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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1373/2023

ATAS/667/2023 du 06.09.2023 ( PC ) , ADMIS/RENVOI

Recours TF déposé le 11.10.2023, rendu le 19.04.2024, ADMIS, 8C_640/2023
En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1373/2023 ATAS/667/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 6 septembre 2023

Chambre 5

 

En la cause

A______

représentée par CARITAS Genève, soit pour elle Alexis PREITNER, mandataire

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

A. a. Madame A______ (ci-après : l’intéressée ou la recourante), née en ______ 1959, est bénéficiaire de prestations complémentaires.

b. Par décision du 4 octobre 2022, le service des prestations complémentaires (ci‑après : le SPC ou l’intimé) a informé l’intéressée qu’après re-calcul de son droit aux prestations complémentaires, il s’avérait que cette dernière avait trop perçu de prestations complémentaires pour la période rétroactive allant du 1er avril au 31 octobre 2022. Il s’ensuivait un solde rétroactif, en faveur du SPC, d’un montant de CHF 1’220.-.

c. Après avoir fait opposition dans un premier temps, la bénéficiaire a retiré son opposition, par courrier du 7 novembre 2022, informant le SPC qu’après une vérification attentive des nouveaux plans de calcul, elle avait pu constater que la décision était correcte au vu des indexations successives de sa rente de l’Organisation des Nations unies (ci-après : l'ONU), en 2022.

B. a. Par courrier de son mandataire du 14 décembre 2022, l’intéressée a demandé la remise de son obligation de rembourser en indiquant que, suite au décès de son ex-mari en date du 6 juin 2021, sa rente avait été indexée une première fois, dès le 1er avril 2022, puis une deuxième fois, dès le 1er juillet 2022. Elle en avait informé le SPC en lui envoyant une copie de sa nouvelle attestation de rente indexée par l’ONU, dès le 1er juillet 2022. En tous les cas, elle se souvenait avoir transmis les attestations dans les semaines qui avaient suivi la réception des courriers de l’ONU ; dès lors, elle estimait avoir dûment informé le SPC des augmentations successives de ses revenus, de sorte que la condition de la bonne foi était remplie. En ce qui concernait la condition des faibles revenus, ceci ressortait des informations connues du SPC et le remboursement la mettrait dans une situation financière difficile, raison pour laquelle elle demandait la remise de son obligation de rembourser le montant de CHF 1’220.-.

b. Par décision du 25 janvier 2023, le SPC a refusé la demande de remise au motif que la condition de la bonne foi n’était pas remplie. En effet, selon les pièces au dossier, il apparaissait que ce n’était qu’en date du 14 juillet 2022 que le SPC avait reçu une copie du courrier du 22 avril 2022 établi par la caisse commune des pensions du personnel des Nations unies (ci-après : la caisse de pension) informant la bénéficiaire du fait que sa rente était augmentée dès le 1er avril 2022. En raison de ce délai de plus de deux mois, le SPC considérait que la transmission des informations avait été faite avec retard et que la condition de la bonne foi n’était pas remplie, au vu du manque de diligence de l’intéressée.

c. Par courrier de son mandataire du 27 février 2023, l’intéressée s’est opposée à la décision du 25 janvier 2023, au motif qu’elle avait rempli son devoir d’information à l’égard du SPC, même si c’était tardivement ; dès lors, la condition de la bonne foi était remplie.

d. Par décision sur opposition du 9 mars 2023, le SPC a écarté l’opposition du 27 février 2023 et a confirmé la décision de refus de la demande de remise du 25 janvier 2023. Selon le SPC, c’était la hausse du montant de la pension, en date du 1er avril 2022, qui avait principalement engendré la demande de restitution de CHF 1'220.-, raison pour laquelle il convenait de considérer que l’intéressée n’avait pas fait preuve de diligence. En ce qui concernait la deuxième indexation de la rente, à partir du 1er juillet 2022, on ne pouvait pas se livrer à une appréciation de la bonne foi en deux temps, soit une première fois après indexation du 1er avril 2022 puis une deuxième fois après indexation du 1er juillet 2022.

C. a. Par acte de son mandataire posté en date du 25 avril 2023, l’intéressée a interjeté recours contre la décision sur opposition du 9 mars 2023 auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans). Selon la recourante, le retard avec lequel elle avait communiqué ses changements de situation au SPC justifiait que sa bonne foi ne soit pas reconnue pour l’ensemble de la période, mais elle devait l’être, à tout le moins, pour les périodes entre les moments où elle en avait effectivement informé le SPC et le moment où le SPC avait recalculé le montant de son droit aux prestations complémentaires. Partant, elle concluait à l’annulation de la décision querellée et à ce que la remise de son obligation de restituer le montant de CHF 1’220.- lui soit accordée.

b. Par réponse du 23 mai 2023, le SPC a conclu au rejet du recours dès lors que la condition de la bonne foi ne pouvait pas être reconnue puisque la hausse de la rente, intervenue au mois d’avril 2022, n’avait été annoncée qu’au mois de juillet 2022, ce qui constituait une négligence grave, faisant obstacle à la condition de la bonne foi, pour l’ensemble de la période litigieuse.

c. Par réplique du 28 juillet 2023, la recourante a persisté dans ses conclusions, exposant que son retard ne dépassait pas quelques semaines et qu’en tout état, elle avait spontanément annoncé l’augmentation de sa rente et n’avait jamais cherché à dissimuler quoi que ce soit au SPC. Elle soulignait encore que, dans la pratique, le SPC prenait plusieurs mois à traiter les annonces de changement de situation de ses assurés, que ces changements aient été communiqués avec ou sans retard, ce qui entraînait une augmentation des dettes des assurés envers le SPC. Au vu de la situation, une remise, en tous les cas partielle, du montant devant être remboursé, se justifiait.

d. Par duplique du 24 août 2023, le SPC a allégué que le délai de traitement des informations relatives à la hausse de la rente de l’ONU n’était pas pertinent dès lors que le SPC avait agi dans un délai de moins de trois mois entre l’information reçue, le 14 juillet 2022, et la décision de restitution du 4 octobre 2022. Il était encore mentionné que la recourante devait s’attendre à son obligation de rembourser, compte tenu de la hausse de sa rente. Le SPC persistait ainsi dans ses conclusions.

e. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

f. Les autres faits seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC ‑ RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA.

3.        Le délai de recours est de 30 jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais du 7e jour avant Pâques au 7e jour après Pâques inclusivement
(art. 38 al. 4 let. a LPGA et art. 89C let. a LPA), le recours est recevable.

4.        Le litige porte sur la question de savoir si la recourante peut bénéficier d’une remise de l’obligation de restituer la somme de CHF 1’220.-, singulièrement si la condition de la bonne foi est remplie.

5.        Selon l'art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile. Ces deux conditions matérielles sont cumulatives et leur réalisation est nécessaire pour que la remise de l'obligation de restituer soit accordée (ATF 126 V 48 consid. 3c ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_364/2019 du 9 juillet 2020 consid. 4.1).

L'art. 4 de l'ordonnance fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 11 septembre 2002 (OPGA - RS 830.11) précise que la restitution entière ou partielle des prestations allouées indûment, mais reçues de bonne foi, ne peut être exigée si l'intéressé se trouve dans une situation difficile (al. 1). Est déterminant, pour apprécier s'il y a une situation difficile, le moment où la décision de restitution est exécutoire (al. 2).

À teneur de l’art. 24 LPCC, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile (al. 1). Le règlement fixe la procédure de la demande de remise ainsi que les conditions de la situation difficile (al. 2).

L’art. 15 al. 1 du règlement relatif aux prestations cantonales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 25 juin 1999 (RPCC-AVS/AI - J 4 25.03) prévoit que la restitution entière ou partielle des prestations allouées indûment, mais reçues de bonne foi, ne peut être exigée si l'intéressé se trouve dans une situation difficile.

6.        Selon l’art. 31 LPGA, l'ayant droit, ses proches ou les tiers auxquels une prestation est versée sont tenus de communiquer à l'assureur ou, selon le cas, à l'organe compétent toute modification importante des circonstances déterminantes pour l'octroi d'une prestation (al. 1). Toute personne ou institution participant à la mise en œuvre des assurances sociales a l'obligation d'informer l'assureur si elle apprend que les circonstances déterminantes pour l'octroi de prestations se sont modifiées (al. 2).

Selon l’art. 24 de l’ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI - RS 831.301), l'ayant droit ou son représentant légal ou, le cas échéant, le tiers ou l'autorité à qui la prestation complémentaire est versée, doit communiquer sans retard à l'organe cantonal compétent tout changement dans la situation personnelle et toute modification sensible dans la situation matérielle du bénéficiaire de la prestation. Cette obligation de renseigner vaut aussi pour les modifications concernant les membres de la famille de l'ayant droit.

À teneur de l’art. 11 al. 1 LPCC, le bénéficiaire ou son représentant légal doit déclarer au service tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations qui lui sont allouées ou leur suppression.

7.        Savoir si la condition de la bonne foi, présumée en règle générale (art. 3 du Code civil suisse, du 10 décembre 1907 [CC - RS 210]), est réalisée doit être examiné dans chaque cas à la lumière des circonstances concrètes (arrêt du Tribunal fédéral 8C_269/2009 du 13 novembre 2009 consid. 5.2.1). La condition de la bonne foi doit être remplie dans la période où l’assuré concerné a reçu les prestations indues dont la restitution est exigée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_766/2007 du
17 avril 2008 consid. 4.1 et les références).

La jurisprudence constante considère que l’ignorance, par le bénéficiaire, du fait qu’il n’avait pas droit aux prestations ne suffit pas pour admettre qu’il était de bonne foi. Il faut bien plutôt qu’il ne se soit rendu coupable, non seulement d’aucune intention malicieuse, mais aussi d’aucune négligence grave. Il s’ensuit que la bonne foi, en tant que condition de la remise, est exclue d'emblée lorsque les faits qui conduisent à l'obligation de restituer (violation du devoir d’annoncer ou de renseigner) sont imputables à un comportement dolosif ou à une négligence grave. En revanche, l'assuré peut invoquer sa bonne foi lorsque l'acte ou l'omission fautifs ne constituent qu'une violation légère de l'obligation d'annoncer ou de renseigner (ATF 138 V 218 consid. 4 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_43/2020 du
13 octobre 2020 consid. 3 et 9C_16/2019 du 25 avril 2019 consid. 4).

On parlera de négligence grave lorsque l'ayant droit ne se conforme pas à ce qui peut raisonnablement être exigé d'une personne capable de discernement dans une situation identique et dans les mêmes circonstances (ATF 110 V 176 consid. 3d ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2019 du 25 avril 2019 consid. 4). La mesure de l'attention nécessaire qui peut être exigée doit être jugée selon des critères objectifs, où l'on ne peut occulter ce qui est possible et raisonnable dans la subjectivité de la personne concernée (faculté de jugement, état de santé, niveau de formation, etc. ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_413/2016 du 26 septembre 2016 consid. 3.1 ;
Sylvie PÉTREMAND, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 69 ad
art. 25 LPGA). Il faut ainsi en particulier examiner si, en faisant preuve de la vigilance exigible, l’assuré aurait pu constater que les versements ne reposaient pas sur une base juridique. Il n’est pas demandé à un bénéficiaire de prestations de connaître dans leurs moindres détails les règles légales. En revanche, il est exigible de lui qu’il vérifie les éléments pris en compte par l’administration pour calculer son droit aux prestations. On peut attendre d'un assuré qu'il décèle des erreurs manifestes et qu'il en fasse l'annonce (arrêt du Tribunal fédéral 9C_498/2012 du
7 mars 2013 consid. 4.2). On ajoutera que la bonne foi doit être niée quand l’enrichi pouvait, au moment du versement, s’attendre à son obligation de restituer, parce qu’il savait ou devait savoir, en faisant preuve de l’attention requise, que la prestation était indue (art. 3 al. 2 CC ; ATF 130 V 414 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_319/2013 du 27 octobre 2013 consid. 2.2).

En revanche, l’intéressé peut invoquer sa bonne foi si son défaut de conscience du caractère indu de la prestation ne tient qu’à une négligence légère, notamment, en cas d’omission d’annoncer un élément susceptible d’influer sur le droit aux prestations sociales considérées, lorsque ladite omission ne constitue qu’une violation légère de l’obligation d’annoncer ou de renseigner sur un tel élément (ATF 112 V 97 consid. 2c ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_16/2019 précité consid. 4 et 9C_14/2007 du 2 mai 2007 consid. 4 ; DTA 2003 n° 29 p. 260 consid. 1.2 et les références ; RSAS 1999 p. 384 ; Ueli KIESER, Kommentar zum Bundesgesetz über den Allgemeinen Teil des Sozialversicherungsrechts - ATSG, 2020, n. 65 ad art. 25 LPGA).

8. Les directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI
(ci-après : DPC), valables dès le 1er avril 2011 (état au 1er janvier 2021), énoncent que si une prestation complémentaire est versée à tort et que l'assuré ne pouvait s'en rendre compte en faisant preuve de l'attention minimale exigible au vu des circonstances et du cas d'espèce, force est d'admettre la bonne foi (DPC n° 4652.01). À l'inverse, nul ne peut invoquer sa bonne foi si elle est incompatible avec l'attention que les circonstances permettaient d'exiger de lui. Ainsi, la condition de la bonne foi n'est pas réalisée lorsque le versement à tort d'une prestation complémentaire est dû à une grave négligence ou au dol de la personne tenue à restitution. Tel est le cas si, lors de la demande ou de l'examen des conditions économiques, certains faits n'ont pas été annoncés ou que des indications fausses ont été fournies intentionnellement ou par négligence grave ; il en est de même lorsqu'un changement dans la situation personnelle ou matérielle n'a, intentionnellement ou par grave négligence, pas été annoncé ou l'a été avec retard, ou lorsque des prestations complémentaires indues ont été acceptées en connaissance de leur caractère indu (DPC n° 4652.02).

Commet une négligence grave celui qui, lors de la demande de prestation, de l'examen des conditions du droit, ou du paiement de la prestation complémentaire indûment versée, ne fait pas preuve du minimum d'attention que l'on est en droit d'exiger de lui en fonction de ses compétences et de son degré de formation. Fait preuve de négligence grave la personne qui omet d'annoncer une modification de son revenu, qu'il soit obtenu sous forme de rente ou en vertu de l'exercice d'une activité lucrative, ou qui ne contrôlant pas - ou seulement à la légère - la feuille de calcul des prestations complémentaires, n'annonce pas une erreur de calcul qu'elle aurait facilement pu reconnaître (DPC n° 4652.03).

À titre d’exemple, dans le domaine des prestations complémentaires, le Tribunal fédéral a retenu une négligence grave excluant toute bonne foi dans les cas suivants :

-            d’une bénéficiaire qui n’avait pas spontanément informé le service sur l’état de sa fortune, d’autant plus qu’elle avait reçu chaque début d’année des informations précises à ce sujet ; le fait d’avoir délégué volontairement la gestion de ses affaires à un tiers alors qu’elle n’avait pas été officiellement reconnue comme étant totalement ou partiellement incapable de discernement ne permettait pas de s’exonérer de toute responsabilité dans le non accomplissement de certaines obligations (arrêt du Tribunal fédéral 9C_746/2016 du 11 janvier 2017 consid. 4) ;

-            d’une bénéficiaire de prestations complémentaires qui avait annoncé au SPC, par l’intermédiaire de son curateur, avoir quitté le foyer dans lequel elle logeait pour un appartement, mais qui avait continué à percevoir des prestations complémentaire équivalentes à celles qu’elle recevait alors qu’elle était en foyer, sans s’enquérir auprès du SPC du bien-fondé des versements ; il ne faisait pas de doute que le curateur, dont le comportement et le degré de connaissance était opposable à l’intéressée, savait que le changement de résidence du foyer vers un appartement avait une influence sur le montant des prestations complémentaires ; les feuilles de calcul annexées aux décisions comprenaient en outre la mention d’un important montant en relation avec les « frais de home » (arrêt du Tribunal fédéral 9C_496/2014 du 22 octobre 2014 consid. 4).

-            d’un assuré qui aurait pu déceler que la feuille de calcul comportait une erreur manifeste en faisant preuve de l’attention nécessaire, ce quand bien même il aurait annoncé des revenus que le SPC avait omis de prendre en compte ; le Tribunal fédéral a en particulier relevé que lorsqu'une prestation complémentaire n'était que légèrement trop élevée, l'attention requise et l'obligation de signaler l'erreur lors du contrôle des relevés étaient moins strictes que dans le cas de la perception d'une prestation de plusieurs centaines de francs trop élevée chaque mois, qui devrait être constatée sans plus attendre (arrêt du Tribunal fédéral 9C_385/2013 du 19 septembre 2013 consid. 4.4) ;

-            d’un couple qui n’avait pas réagi à une décision erronée accroissant les prestations complémentaires versées, alors qu’il avait annoncé la perception d’une nouvelle rente devant aboutir à une diminution des prestations ; le Tribunal fédéral a relevé qu’un examen sommaire de la feuille de calcul, qui ne présentait aucune difficulté de lecture ou de compréhension, aurait permis à l’intéressé de constater que les revenus annoncés n’avaient pas été pris en considération ; le manque de vigilance de l’assuré, qui avait omis de contrôler la feuille de calcul et d’informer l’administration de l’erreur manifeste qu’elle venait de commettre, excluait sa bonne foi (arrêt du Tribunal fédéral 9C_189/2012 du 21 août 2012 consid. 4) ;

-            d’une bénéficiaire de prestations complémentaires qui avait omis d’annoncer une rente AI versée à son conjoint, dont une partie était versée avec effet rétroactif : la bonne foi a été niée pour la période postérieure à la décision d’octroi de la rente AI ; en effet, à compter de la date de versement de la rente, la bénéficiaire avait pu prendre connaissance de la décision d’octroi de rente à son époux et aisément se rendre compte que l’existence d’un revenu supplémentaire dans le couple était de nature à influencer son droit aux prestations complémentaires ; il lui incombait dès lors d’informer immédiatement la caisse de cette nouvelle situation (arrêt du Tribunal fédéral 8C_766/2007 du 17 avril 2008 consid. 4.3) ;

-            du conjoint survivant d’une bénéficiaire de prestations complémentaires qui n’avait pas communiqué à l’administration les revenus liés à sa nouvelle activité salariée, alors que depuis le dépôt de la demande de prestations complémentaires, c’était avant tout lui-même qui s’était occupé de renseigner l’administration de toute modification survenue dans sa situation financière ou celle de feue son épouse (arrêt du Tribunal fédéral P 32/06 du 14 novembre 2006 consid. 4.3) ;

-            d’un bénéficiaire de prestations complémentaires qui avait passé sous silence l'augmentation du revenu de son épouse, en violation de son obligation de renseigner (arrêt du Tribunal fédéral P 17/03 du 3 février 2004 consid. 4.1).

9. Dans le domaine des assurances sociales notamment, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 et les références).

10. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ;
ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

11. En l'espèce, il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, que les conditions de la bonne foi et de la situation financière difficile sont cumulatives. En d'autres termes, les deux doivent être réalisées pour que la remise de l'obligation de restituer puisse être acceptée. Cela signifie également que si l'une des conditions n'est pas remplie, il n'est pas nécessaire d'examiner l'autre et la remise sera, dans tous les cas, refusée.

11.1 Dans le cas présent, le SPC a commencé par examiner la condition de la bonne foi. Retenant un retard dans l'obligation de renseigner, l'intimé a considéré que la condition de la bonne foi n'était pas réalisée, de sorte qu'il n'a pas examiné la condition de la situation difficile.

11.2 La question qui se pose est dès lors uniquement celle de savoir si c'est à juste titre que le SPC a considéré que la condition de la bonne foi n'était pas réalisée. Si la chambre de céans arrive à la conclusion que cette condition est remplie, elle devra renvoyer la cause au service pour instruction complémentaire sur la question de la situation difficile. En revanche, si elle arrive à la conclusion que la condition de la bonne foi n'est effectivement pas réalisée, la décision sur opposition querellée ne pourra être que confirmée et la recourante devra restituer le montant précité.

11.3 Les faits pertinents se sont déroulés de la manière qui suit :

En date du 24 mars 2022, le SPC a adressé à l’intéressée une décision de prestations complémentaires, tout en l’invitant à contrôler attentivement les montants indiqués sur le plan de calcul, afin de s’assurer qu’ils correspondaient bien à la situation réelle.

La caisse de pension a informé l’intéressée de son droit aux prestations, en conformité avec le système d’ajustement des pensions - soit une indexation de sa rente - selon courrier daté du 22 avril 2022.

Ledit courrier a été transmis par l’intéressée au SPC, qui l’a enregistré en date du 14 juillet 2022.

Si l’on admet, dans le meilleur des cas, l’hypothèse selon laquelle l’intéressée a reçu le courrier en date du 23 avril 2022 et l’a envoyé au SPC en date du 13 juillet 2022, il s’est écoulé un délai de deux mois et trois semaines entre le moment où l’intéressée a reçu la communication de l’indexation de sa rente et le moment où elle a transmis cette information au SPC.

S’agissant de la deuxième indexation de la rente de l’intéressée, cette dernière a été informée par courrier de la caisse de pension daté du 22 juillet 2022 et l’a communiqué au SPC, qui l’a enregistré en date du 26 août 2022.

Le délai de transmission de l’information, en admettant que, dans le meilleur des cas, l’intéressée a reçu le courrier de la caisse de pension en date du 23 juillet 2022 et l’a envoyé au SPC en date du 25 août 2022, est égal à un mois.

Il s’agit donc de déterminer si le retard dans la transmission des informations au SPC constitue une négligence grave.

La chambre de céans constate qu’au moment où elle a été informée de la décision du SPC du 24 mars 2022, la recourante n’était pas informée du fait que sa rente allait être indexée, respectivement au mois d’avril puis au mois de juillet 2022. Ce n’est qu’à partir du moment de la réception du relevé de la caisse de pension, daté du 22 avril 2022, que son devoir d’informer le SPC a pris naissance.

Ni les directives DPC, ni la jurisprudence ne se prononcent sur le moment à partir duquel un retard dans l’obligation d’informer peut être constitutif d’une négligence grave.

On peut ainsi admettre, par analogie avec les délais de recours, qu’une information transmise dans un délai d’un mois n’est pas tardive.

En l’occurrence, l’intéressée a communiqué au SPC l’indexation de sa pension, selon relevé du mois d’avril 2022, dans un délai de deux mois et trois semaines, soit avec un retard d’un mois et trois semaines par rapport au délai usuel estimé à un mois.

On constate, par ailleurs, que lorsqu’elle a été informée de la deuxième indexation, l’intéressée s’est montrée plus diligente et a transmis l’information au SPC dans un délai d’un mois.

L’examen du dossier montre que l’intéressée s’est toujours montrée diligente et a coopéré avec le SPC en fournissant régulièrement les pièces demandées.

Compte tenu de ces éléments, la chambre de céans considère que le SPC n’est pas parvenu à établir, au degré de la vraisemblance prépondérante, que l’intéressée a commis une négligence grave en transmettant tardivement l’information de sa caisse de pension concernant l’indexation de sa rente au mois d’avril 2022. Tout au plus, peut-on admettre qu’il s’agit d’une négligence légère et isolée chez une assurée qui, par ailleurs, s’est montrée diligente.

Au vu de ce qui précède, la condition de la bonne foi de la recourante doit être admise. Le recours est partiellement admis et la décision sur opposition du 9 mars 2023 annulée.

12. S’agissant de la situation financière difficile, la recourante n’apporte pas la preuve que cette condition est remplie. L’intimé ne s’étant pas prononcé sur cette question, la cause lui sera renvoyée pour qu’il se détermine et rende une nouvelle décision.

13. La recourante, assistée par un mandataire professionnellement qualifié et obtenant gain de cause, a ainsi droit à une indemnité à titre de participation à ses frais et dépens, que la chambre de céans fixera à CHF 1'200.- (art. 61 let. g LPGA ; art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - RS E 5 10.03]).

14. Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision sur opposition de l’intimé du 9 mars 2023.

4.        Renvoie la cause à l’intimé pour instruction de la situation financière de la recourante et nouvelle décision, au sens des considérants.

5.        Alloue à la recourante, à charge de l’intimé, une indemnité de CHF 1’200.- à titre de participation à ses frais et dépens.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le