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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3699/2022

ATAS/565/2023 du 20.07.2023 ( AI ) , SANS OBJET

En droit

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3699/2022 ATAS/565/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 20 juillet 2023

 

En la cause

A______
représenté par l’Association pour la permanence de défense des patients et des assurés (APAS)

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L’ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


 

 

ATTENDU EN FAIT

Que A______ (ci-après : l’assuré), né en 1969, ayant travaillé depuis 2001 comme maçon, a déposé en 2003 une première demande de prestations auprès de l’office cantonal de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI) en invoquant une allergie à la poussière ;

Qu’à l’issue d’une mesure de reclassement professionnel en qualité de chauffeur, l’assuré a été engagé par une entreprise de transports, de sorte que, par décision du 12 décembre 2007, l’OAI lui a nié le droit à une rente au motif qu’il avait recouvré une pleine capacité de travail dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles et que la perte de gain en résultant était insuffisante ;

Que le 4 décembre 2009, l’assuré a été victime d’un accident (chute d’une échelle), qui lui a occasionné une atteinte au niveau du genou gauche, pour laquelle il a déposé, en date du 14 mai 2010, une nouvelle demande de prestations de l’assurance-invalidité ;

Que cette demande a été suivie d’une autre, en date du 18 décembre 2013, motivée cette fois par une dépression ;

Que par décision du 23 avril 2018, l’OAI a nié à l’assuré le droit à une rente d’invalidité au motif qu’à l’issue des mesures de réadaptation (sous la forme d’une formation de responsable d’immeuble), la perte de gain n’était plus que de 29% ;

Que, saisie d’un recours de l’assuré, la Cour de céans l’a admis partiellement en date du 4 juin 2020 (cf. ATAS/463/2020 du 4 juin 2020) ; Qu’en effet, la Cour de céans a considéré qu’à défaut de rapport circonstancié permettant de se prononcer sur la capacité de travail de l’assuré, son évolution dans le temps et, cas échéant, la date à partir de laquelle l’exercice d’une activité professionnelle adaptée pouvait être envisagé, une instruction complémentaire était nécessaire, sous la forme d’une expertise pluridisciplinaire en rhumatologie, neurochirurgie et psychiatrie, la cause étant renvoyée à l’OAI pour ce faire ;

Que le 24 juillet 2020, l’OAI a inscrit la demande d’expertise dans la plateforme SuisseMED@P ;

Que le 9 novembre 2022, l’assuré a saisi la Cour de céans d’un recours pour déni de justice en alléguant que, malgré des relances, en dates des 26 octobre 2021 et 5 juillet 2022, plus de deux ans et trois mois après l’inscription du mandat d’expertise dans la plateforme, aucune attribution à un centre d’expertises n’était encore intervenue ; que le recourant conclut à ce qu’il soit constaté qu’un déni de justice a été commis et à ce que la Cour de céans ordonne elle-même l’expertise sollicitée, avec suite de frais et dépens ;

Que par courrier du 14 novembre 2022, l’OAI a sollicité de l’assuré la permission de modifier le mandat d’expertise dans la plateforme et de le remplacer par un examen bidisciplinaire neurologique et rhumatologique ;

Qu’invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 7 décembre 2022, a conclu au rejet du recours en faisant valoir en substance qu’il ne disposait d’aucun moyen d’influencer la plateforme d’attribution aléatoire des mandats d’expertise, qu’il avait l’obligation de passer par cette plateforme en vertu de la loi et qu’aucun retard ou faute ne pouvait lui être imputé, le mandat ayant été inscrit dans la plateforme le 24 juillet 2020 déjà, soit dans les semaines ayant suivi l’arrêt de la Cour de céans, notifié le 30 juin 2020 ;

Que par écriture du 7 juin 2023, le recourant a indiqué à la Cour de céans que, par communication du 9 mai 2023, l’OAI l’avait informé que l’expertise avait finalement pu être attribuée par SuisseMED@P à Unisanté, qu’il n’avait pas fait valoir de motifs de récusation et que, dès lors, il renonçait à la conclusion visant à la mise sur pied d’une expertise judiciaire, mais persistait à demander à ce qu’il soit constaté qu’un déni de justice a été commis et que des dépens lui soient alloués ;

Qu’une audience s’est tenue en date du 6 juillet 2023, au cours de laquelle le représentant de l’OAI a expliqué que le délai exceptionnel pris en l’occurrence par la plateforme s’expliquait par le manque criant de spécialistes en neurochirurgie ; qu’en Suisse, ce ne sont pas moins de quarante mandats par an qui sont demandés dans cette spécialité ; que les experts sont pour la plupart des chirurgiens en exercice qui n’acceptent que peu de mandats ; que c’est la raison pour laquelle il a finalement proposé de renoncer au volet neurochirurgical au profit d’un volet rhumatologique complété d’un volet neurologique, ce qui a permis de débloquer la situation, étant précisé que l’attente pour une expertise neurochirurgicale peut atteindre six ans ;

Que pour sa part, le recourant a persisté dans ses conclusions en constatation d’un déni de justice et en allocation d’une indemnité de participation à ses frais et dépens ;

 

EN DROIT

 

Que conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20) ;

Que sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie ;

Qu’en vertu de la LPGA, un recours peut être formé lorsque l'assureur, malgré la demande de l'intéressé, ne rend pas de décision ou de décision sur opposition (art. 56 al. 2 LPGA) ;

Que selon la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), lorsqu’une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision (art. 4 al. 4 LPA) ; qu’une partie peut recourir en tout temps pour déni de justice ou retard non justifié si l’autorité concernée ne donne pas suite rapidement à la mise en demeure prévue à l’art. 4 al. 4 (art. 62 al. 6 LPA) ;

Qu’en l’espèce, le recours pour déni de justice, interjeté par-devant l’autorité compétente (art. 58 al. 1 LPGA), est recevable ;

Que lorsqu’il existe un intérêt actuel au recours au moment où celui-ci est formé, mais qu’il tombe ultérieurement en cours de procédure, le recours pour déni de justice doit être déclaré sans objet et rayé du rôle (ATF 125 V 373 consid. 1) ;

Que c’est ce qui s’est produit en l’occurrence, le mandat d’expertise litigieux ayant finalement été attribué en cours de procédure ;

Que lorsqu’un procès devient sans objet, il s’impose de statuer néanmoins sur les frais afférents à la procédure engagée, par une décision sommairement motivée, en tenant compte de l’état de fait existant avant l’événement mettant fin au litige et de l’issue probable de celui-ci (cf. ATF 125 V 373 consid. 2a) ; que les frais et dépens sont supportés en premier lieu par la partie qui a provoqué la procédure devenue sans objet ou chez qui sont intervenues les causes qui ont conduit à ce que cette procédure devienne sans objet (arrêt du Tribunal fédéral 9C_773/2011 du 30 juillet 2012 consid. 4 et les références) ; qu’en particulier, des dépens sont dus, en principe, si le grief d'un retard injustifié est avéré (arrêt du Tribunal fédéral 9C_448/2014 du 4 septembre 2014 consid. 3) ;

Qu’en l’occurrence, vu l’attribution du mandat d’expertise à Unisanté, le litige porte ainsi uniquement sur le droit du recourant, dûment représenté, à des dépens pour la procédure qu'il a initiée, en déterminant si l’intimé a pris un retard injustifié ;

Qu’aux termes de l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable ;

Que le droit de recours de l'art. 56 al. 2 LPGA sert à mettre en œuvre l'interdiction du déni de justice formel prévue par l'art. 29 al. 1 Cst. ;

Que le retard injustifié à statuer, également prohibé par l'art. 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) – qui n'offre à cet égard pas une protection plus étendue que la disposition constitutionnelle (ATF 103 V 190 consid. 2b) –, est une forme particulière du déni de justice formel (ATF 119 Ia 237 consid. 2) ;

Qu’il y a retard injustifié à statuer lorsque l'autorité administrative ou judiciaire compétente ne rend pas la décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prévu par la loi ou dans un délai que la nature de l'affaire ainsi que toutes les autres circonstances font apparaître comme raisonnable (ATF 131 V 407 consid. 1.1 et les références) ; qu’entre autres critères, sont notamment déterminants le degré de complexité de l'affaire, l'enjeu que revêt le litige pour l'intéressé ainsi que le comportement de ce dernier et celui des autorités compétentes, mais aussi la difficulté à élucider les questions de fait (expertises, par exemple ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 53/01 du 30 avril 2001 consid. 2.2), mais non des circonstances sans rapport avec le litige, telle une surcharge de travail de l'autorité (ATF 130 I 312 consid. 5.2 ; 125 V 188 consid. 2a). ;

Que si on ne peut reprocher à l'autorité quelques « temps morts », celle-ci ne saurait en revanche invoquer une organisation déficiente ou une surcharge structurelle pour justifier la lenteur de la procédure ; qu’il appartient en effet à l'État d'organiser ses juridictions de manière à garantir aux citoyens une administration de la justice conforme aux règles (ATF 130 I 312 consid. 5.1 et 5.2 et les références) ; que dans le cadre d'une appréciation d'ensemble, il faut également tenir compte du fait qu'en matière d'assurances sociales le législateur accorde une importance particulière à une liquidation rapide des procès (ATF 126 V 244 consid. 4a) ; que peu importe le motif qui est à l’origine du refus de statuer ou du retard injustifié ; ce qui est déterminant, c’est le fait que l’autorité n’ait pas agi ou qu’elle ait agi avec retard (ATF 124 V 133 ; 117 Ia 117 consid. 3a et 197 consid. 1c ; arrêts du Tribunal fédéral des assurances I 819/02 du 23 avril 2003 consid. 2.1 et C 53/01 précité consid. 2) ;

Que pour répondre aux exigences posées par la jurisprudence du Tribunal fédéral (ATF 137 V 210), le Conseil fédéral a introduit le nouvel art. 72bis du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201), en vigueur depuis le 1er mars 2012, aux termes duquel les expertises comprenant trois, ou plus de trois, disciplines médicales – et, depuis le 1er janvier 2022, également celles n’impliquant que deux disciplines médicales – doivent se dérouler auprès d’un centre d’expertises médicales lié à l’office fédéral par une convention (al. 1) et l’attribution du mandat d’expertise doit se faire de manière aléatoire (al. 2) ;

Que dans ce même ordre d’idées, l’Office fédéral des assurances sociales (ci-après : OFAS) a élaboré une liste des critères que les centres d’expertises doivent remplir, qui comprennent d’une part des exigences formelles et professionnelles, et, d’autre part, la mention obligatoire d’indications pour assurer une plus grande transparence et attester de l’indépendance des instituts ;

Que SuisseMED@P est une plateforme basée sur le web ; qu’elle attribue des mandats d’expertise médicale pluridisciplinaire de manière aléatoire et dispose d’un service statistique qui permet de mesurer la qualité et le temps nécessaire à l’accomplissement des mandats ;

Que lorsque l’office AI transmet le mandat, SuisseMED@P tire au sort un centre d’expertises parmi ceux remplissant les critères requis pour son accomplissement (capacités disponibles dans les disciplines médicales voulues ; possibilité de réaliser l’expertise dans la langue de procédure souhaitée) ; que l’on peut raisonnablement exiger de la personne assurée qu’elle se soumette à des expertises dans toute la Suisse ;

Que le centre d’expertises tiré au sort et l’office AI à l’origine du mandat sont informés de l’attribution du mandat par courriel ;

Qu’à titre d’exemple, s’agissant plus particulièrement de la mise en œuvre d’une expertise, un déni de justice a été admis par la Cour de céans lorsque :

- l’OAI, neuf mois après un jugement lui ordonnant de mettre en place une expertise, n’avait pas encore entrepris de démarches en ce sens (ATAS/430/2005 du 10 mai 2005) ;

- l’OAI avait attendu quatorze mois depuis l’opposition de l’assuré au projet pour mettre en œuvre une expertise multidisciplinaire à laquelle l’assuré avait conclu d’emblée (ATAS/484/2007 du 9 mai 2007) ;

- l’OAI n’avait rendu aucune décision plus de cinq ans après le dépôt de la demande de prestations et avait notamment tardé à instruire le cas par le biais d’une expertise pluridisciplinaire et à demander l’intégration dans la plateforme SuisseMED@P, alors même qu’il connaissait la longueur des délais pour la mise en place d’une telle expertise, le recourant ayant par ailleurs régulièrement pris contact avec l’intimé pour demander des nouvelles de son dossier (ATAS/1116/2013 du 18 novembre 2013) ;

- l’OAI n’avait introduit le mandat dans la plateforme SuisseMED@P que quatre mois après la notification d'un arrêt de renvoi – en dehors de toute complexité de l'affaire et ce, alors même que plusieurs dénis de justice avaient déjà été constatés sur une période de trois ans (ATAS/942/2014 du 27 août 2014) ;

- l’OAI n’avait introduit le mandat d’expertise dans la plateforme que plus d’une année après l’arrêt de renvoi de l’autorité judiciaire pour ce faire et ce, alors que rien ne justifiait ce retard (ATAS/696/2015 du 11 septembre 2015).

Qu’en revanche, elle a considéré que le délai de douze semaines entre la rédaction de l'avis du service médical régional de Suisse romande (ci-après : SMR) et l'inscription effective sur la plateforme informatique SuisseMED@P pouvait apparaître comme long, mais pas excessif (ATAS/93/2018 du 6 février 2018) ; que le Tribunal fédéral a confirmé que, dans un tel cas, il n’y avait pas de déni de justice (arrêt du Tribunal fédéral 9C_230/2018 du 4 juin 2018 consid. 3.3) ;

Que la Cour de céans a également nié l’existence d’un déni de justice dans un cas où aucune décision quant au centre d’expertises désigné n’était encore intervenue dix mois après que l’OAI avait informé l’assurée de la mise en œuvre d’une expertise médicale pluridisciplinaire car l’introduction du mandat dans le système SuisseMED@P avait été effectué moins de dix jours après la communication l’assurée ; qu’il a été jugé que si un délai de près d’une année pour l’attribution d’un mandat par le biais de cette plateforme apparaissait excessif, ce retard n’était pas imputable à l’OAI (ATAS/237/2014 du 26 février 2014) ;

Que le Tribunal fédéral a également statué en la matière, notamment dans un arrêt du 26 mai 2015 (ATF 9C_140/2015 consid. 5.1) : il a considéré qu’un assuré ne saurait se plaindre d’un refus de statuer en relation avec la question de la réalisation d'une expertise lorsque l’office – comme c’était le cas en l’occurrence – avait rendu la décision incidente qu'il était tenu de rendre en vertu de l'art. 72bis RAI, étant rappelé qu’il n’y avait de place pour aucun autre système de désignation des experts (cf. ATF 140 V 507) ; que, s’agissant des dysfonctionnements rencontrés dans l'exécution d'une telle mesure ou aux conséquences de ces dysfonctionnements sur l'ensemble de la procédure, le Tribunal fédéral a relevé que SuisseMED@P est une plateforme informatique exploitée par la Conférence des offices AI, qu’elle est destinée à mettre en œuvre le système règlementaire et jurisprudentiel de désignation aléatoire des experts dans le contexte d'expertises pluridisciplinaires, que son bon fonctionnement relève donc des attributions légales des offices AI quant à l'évaluation de l'invalidité (cf. art. 57 let f. LAI) et qu’elle constitue par conséquent un des éléments sur lesquels la Confédération exerce son devoir général de surveillance (cf. art. 64 LAI ; devoir délégué au Département fédéral de l'intérieur, qui en a lui-même transféré une partie à l'OFAS pour qu'il s'en acquitte de manière indépendante [cf. art. 176 du règlement sur l'assurance-vieillesse et survivants du 31 octobre 1947 [RAVS - RS 831.101] applicable par renvoi des art. 64 LAI et 72 RAVS]) ; que le Tribunal fédéral en a tiré la conclusion qu’il n’appartenait dès lors pas à une autorité judiciaire de s'exprimer sous l'angle du déni de justice sur les difficultés ou les retards survenus dans le cadre de l'exécution d'une décision entrée en force (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_72/2011 du 20 juin 2011 consid. 2.2 et 2.3) ; qu’il revenait à l'OFAS d'intervenir – éventuellement par le biais d'une dénonciation – en exerçant son contrôle sur l'exécution par les offices AI des tâches énumérées à l'art. 57 LAI (cf. art. 64a al. 1 let. a LAI) et en édictant à l'intention desdits offices des directives générales ou portant sur des cas d'espèce (cf. art. 64a al. 1 let. b LAI et 50 al. 1 RAI) ; que le Tribunal fédéral a ajouté qu’il n'appartenait pas à l'autorité judiciaire cantonale de suppléer aux dysfonctionnements rencontrés dans l'exécution d'une décision administrative, de sorte qu'elle ne saurait en aucun cas être tenue de réaliser une expertise judiciaire pour accélérer la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 9C_140/2015 consid. 5.2) ;

Qu’en l’occurrence, on ne saurait reprocher à l’intimé d’avoir tardé à introduire le mandat dans la plateforme, puisqu’il a procédé à cette opération le 24 juillet 2020, étant rappelé que l’arrêt de la Cour de céans lui renvoyant la cause pour ce faire a été rendu le 4 juin 2020 ;

Qu’entre le moment de l’introduction dans la plateforme et l’attribution du mandat à Unisanté, le 9 mai 2023, ce sont près de trois ans que se sont écoulés ;

Que l’intimé se défend de toute faute, en rappelant qu’il n’a pas les moyens d’influencer l’attribution des mandats par la plateforme ;

Que le recourant se réfère quant à lui à l’arrêt du Tribunal fédéral 9C_140/2015 (op. cit.), dont il tire la conclusion que s’il appartient certes en premier lieu à l’OFAS, en tant qu’autorité de surveillance, de s’assurer que la plateforme fonctionne de manière satisfaisante, le retard dans l’exécution d’une décision incidente ordonnant la mise en place d’une expertise pluridisciplinaire est néanmoins susceptible de constituer un déni de justice en tant que ledit retard influence le prononcé de la décision finale (consid. 5.2.2) ;

Qu’en effet, dans ce considérant, le Tribunal fédéral a admis que le retard pris dans l'exécution d'une décision incidente tendant à la mise en œuvre d'une expertise peut avoir une incidence sur l'ensemble de la procédure et, après l'écoulement d'un certain temps, faire apparaître l'absence de décision finale comme un retard injustifié, ce qu’il a nié dans cet arrêt ; que, dans le cas qui lui était soumis, la procédure de révision du droit à la rente avait débuté le 4 septembre 2007 et, de manière générale, avait suivi son cours normal, dans la mesure où chacune des parties avait utilisé les voies de droit à sa disposition aux différentes étapes de ladite procédure et où les retards injustifiés à rendre les décisions ayant pu marquer les différentes étapes évoquées avaient déjà tous été relevés et sanctionnés par la constatation d'un déni de justice ; que la dernière fois que les premiers juges avaient été amenés à s'exprimer à ce propos remontait au 27 août 2014 et concernait la constatation d'un déni de justice en relation avec l'inscription tardive du mandat d'expertise dans la plateforme SuisseMED@P et l'injonction d'interpeler les responsables de ladite plateforme ; que le Tribunal fédéral a considéré que le laps de temps écoulé entre cette date et le dépôt du dernier recours cantonal constituait un délai déraisonnable (trois mois) au regard de l'ensemble de la procédure ainsi que de son déroulement ;

Que le recourant se réfère également à un arrêt du Tribunal fédéral 9C_547/2015 du 22 avril 2016 consid. 6.3, dans lequel le Tribunal fédéral a considéré qu’un délai de seize mois dans l’exécution de la décision incidente (intervalle de temps entre l’inscription du mandat dans la plateforme et son attribution) ne constituait pas un déni de justice, mais mettait en évidence une situation insatisfaisante, voire un dysfonctionnement susceptible de constituer un déni de justice s’il perdurait ;

Que dans cet arrêt, le Tribunal fédéral a rappelé que le complément d'instruction ordonné par la juridiction cantonale s’inscrivait dans les suites de l'ATF 137 V 210 qui, outre l'amélioration des exigences de qualité et de contrôle des centres d'expertises ou l'élargissement des droits de participation des parties, a introduit le principe du hasard dans l'attribution des mandats d'expertise ; que la mise en œuvre d'un tel système au moyen d'une plateforme informatique engendrait forcément des ajustements et des délais auxquels s'ajoutaient concrètement les difficultés liées aux spécificités de l'expertise (dans le cas envisagé par l’arrêt : cinq disciplines visant à évaluer l'impact du cumul des pathologies diagnostiquées) ; que, dans de telles circonstances, les seize mois de retard pris dans l'exécution de la décision ne faisaient pas encore apparaître le défaut de décision finale comme un retard injustifié mais mettaient en évidence une situation insatisfaisante, voire un dysfonctionnement, qui, s'il perdurait, serait éventuellement susceptible de causer un retard injustifié (consid. 6.2) ;

Que le Tribunal fédéral a ajouté, à ce propos, que la situation était insatisfaisante et difficilement compréhensible pour un justiciable ; qu’elle laisse supposer que la plateforme SuisseMED@P ne fonctionnait pas, ou pas correctement, du moins dans certaines circonstances, telles que la réalisation d'une expertise regroupant plusieurs disciplines choisies de manière contraignante par l'administration ; que l'hypothèse qu'aucun centre d'expertises ne réunisse les compétences requises – et, par conséquent, l'impossibilité de réaliser l'expertise ordonnée – était plausible ; que ce dysfonctionnement était du ressort de l'OFAS, raison pour laquelle le Tribunal fédéral a transmis le dossier à ce dernier, afin qu’il assume son rôle d'autorité de surveillance en identifiant les causes du problème et en indiquant comment les solutionner (arrêt du Tribunal fédéral 9C_547/2013 op. cit. consid. 6.3) ;

Que le recourant fait valoir que, dans son cas, le retard est d’autant moins supportable qu’il a déposé sa demande de prestations le 14 mai 2010 déjà ;

Que, dans le cas présent, selon les explications de l’intimé, c’est le volet neurochirurgical de l’expertise qui a posé problème, les experts spécialistes de ce domaine n’étant pas suffisamment nombreux et disponibles ;

Que l’intimé a indiqué qu’en un tel cas, l’attente pouvait même atteindre six ans, ce qui est proprement inadmissible et incompréhensible pour les assurés ;

Qu’en l’occurrence, la Cour de céans considère que le délai de près de trois ans s’étant écoulé depuis l’introduction du mandat dans la plateforme constitue sans nul doute un retard intolérable que l’intimé aurait sans doute pu réduire s’il avait suggéré à l’assuré plus tôt, comme il l’a fait finalement en date du 14 novembre 2022, de renoncer au volet neurochirurgical au profit d’un volet neurologique et de questions supplémentaires en rhumatologie ;

Qu’en effet, il a suffi de procéder à ce changement pour que la plateforme puisse procéder à l’attribution du mandat tant attendu ;

Que, dans ces circonstances, il se justifie d’accorder au recourant une participation à ses frais et dépens ;

Que, pour le surplus, la Cour de céans transmettra une copie de l’arrêt à l’OFAS afin que ce dernier assume son rôle d’autorité de surveillance s’agissant de cas semblables et vérifie s’il n’y a pas dysfonctionnement de la plateforme s’agissant de la neurochirurgie.


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

2.        Constate qu’il est devenu sans objet.

3.        Raye la cause du rôle.

4.        Condamne l’intimé à verser au recourant la somme de CHF 1’800.- à titre de participation à ses frais et dépens.

5.        Dit qu’il n’est pas perçu d’émolument.

6.        Transmet pour information une copie de l’arrêt à l’OFAS en sa qualité d’autorité de surveillance afin qu’il évalue l’éventualité d’un dysfonctionnement de la plateforme au sens des considérants.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF – RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

Christine RAVIER

 

La présidente

 

 

 

Karine STECK

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le