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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2541/2021

ATAS/410/2023 du 06.06.2023 ( PC ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2541/2021 ATAS/410/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 6 juin 2023

Chambre 2

 

En la cause

A______
représentée par Me Butrint AJREDINI, avocat

recourante

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : la requérante ou la recourante), née le ______ 1952, a été mariée avec Monsieur B______ du 24 septembre 1971 jusqu’au décès de celui-ci le 16 septembre 2015.

b. Les époux A______ et B______ sont parents de quatre enfants, C______, né le ______ 1976, D______, née le ______ 1978, E______, née le ______ 1980 et F______, né le ______ 1982.

c. F______ est domicilié à Bâle avec sa famille.

B. a. Le 30 novembre 1995, l’époux de la requérante a sollicité de l’office cantonal des personnes âgées (ci-après : l’OCPA, devenu depuis lors le service des prestations complémentaires, ci-après : le SPC ou l’intimé) des prestations complémentaires à la rente d’invalidité qu’il percevait depuis le 6 novembre 1992, étant précisé que la requérante et ses enfants étaient alors domiciliés en ex-Yougoslavie.

b. Des prestations d’entretien, d’assistance et/ou des prestations complémentaires tant fédérales que cantonales ont été versées à l’époux de la requérante dès le 1er mars 1996.

c. Ces prestations ont été régulièrement mises à jour afin de tenir compte, dans les calculs, de l’arrivée à Genève de la requérante le 13 février 1999 notamment.

d. L’époux de la requérante est décédé le 16 septembre 2015 et les prestations complémentaires ont été transférées à la requérante et recalculées dès le 1er octobre 2015.

e. Dans le cadre d’une révision périodique, le SPC a requis la production de diverses pièces par courrier du 6 novembre 2020 et par rappels des 8 décembre 2020 et 6 janvier 2021.

f. Les pièces sollicitées ont été fournies en annexe à un courrier signé le 15 janvier 2021 par le fils de l’assurée, F______, et son épouse.

g. Constatant, à l’examen des pièces reçues, l’absence de frais médicaux à Genève et l’existence de retraits effectués dans un autre canton, le SPC a sollicité, en date du 25 janvier 2021, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : l’OCPM) pour que celui-ci procède à une enquête administrative sur la question de la résidence effective de la requérante à Genève, censée être à la rue L______.

h. Dans son rapport du 4 mars 2021, l’OCPM a considéré que ses recherches avaient montré que la requérante ne serait plus domiciliée à Genève. En effet, elle était notamment inconnue du voisinage et du service d’immeuble. De plus, Monsieur G______, son neveu, qui occupait le logement depuis 2018, avait déclaré que la requérante résidait dans le canton de Bâle et au Kosovo.

i. Considérant que le centre d’intérêts de la recourante n’était plus à l’adresse indiquée, le SPC a requis la restitution de :

-        CHF 35'646.- à titre de prestations complémentaires versées du 1er janvier 2020 au 31 mars 2021 (absence de domicile à Genève : restitution de la totalité des prestations complémentaires versées ; cf. décision du 8 mars 2021) ;

-        CHF 7'930.50 à titre de subsides de l’assurance-maladie versées pendant la période susmentionnée également (décision du 26 mars 2021) ;

-        CHF 21'189.- à titre de prestations complémentaires versées du 1er avril 2018 au 31 décembre 2019 (absence de domicile à l’adresse indiquée mais pas forcément absence de domicile dans le canton de Genève : restitution d’une partie des prestations complémentaires versées, droit calculé sans prise en compte d’un loyer ; cf. décision du 26 mars 2021).

j. La requérante s’est opposée aux décisions précitées par courrier du 8 avril 2021.

k. Le 9 avril 2021, le SPC a notamment précisé que les directives applicables prévoyaient, jusqu’au 31 décembre 2020, qu’un séjour de plus de six mois (183 jours) à l’étranger au cours d’une même année civile entraînait la suppression du droit aux prestations complémentaires. Depuis le 1er janvier 2021, un séjour à l’étranger de plus de trois mois au cours d’une même année civile entraînait les mêmes conséquences. Eu égard à ce qui précédait, dans la mesure où l’appartement situé à Genève était occupé uniquement par son neveu, il devait être considéré que le centre d’intérêts de la requérante n’était plus à Genève.

l. Le 15 juin 2021, la requérante a adressé au SPC un courrier comportant les signatures de voisins, attestant l’avoir aperçue, de temps en temps, comme voisine.

m. Par décision sur opposition du 30 juin 2021, le SPC a écarté l’opposition de la requérante et confirmé ses décisions des 8 et 26 mars 2021, considérant que les éléments suivants démontraient qu’elle ne résidait plus de manière effective dans le canton de Genève depuis le 1er janvier 2020 au moins mais à Bâle et à M______ (Kosovo) : en 2020, la totalité des retraits et opérations bancaires avait été effectuée à Bâle et au Kosovo ; l’enquête diligentée par l’OCPM avait révélé que le neveu de la requérante occupait le logement à Genève depuis le 26 mars 2018 et elle n’avait demandé le remboursement d’aucun frais médical depuis le mois de mars 2014.

Cette décision, adressée par pli recommandé à l’adresse genevoise, n’a pas été réclamée, de sorte qu’elle a été envoyée, par pli simple, à l’adresse bâloise de son fils.

C. a. Agissant en personne, la requérante a contesté par-devant la Chambre de céans la décision sur opposition précitée dans un courrier, rédigé en allemand, daté du 26 juillet 2021.

b. Le 30 juillet 2021, la Chambre de céans a imparti à la requérante un délai pour traduire son recours en français.

c. Après réception de la traduction du recours, la Chambre de céans a imparti un nouveau délai à la requérante, afin que celle-ci formule les prétentions exactes qu’elle entendait faire valoir et appose sa signature sur la traduction.

d. Parallèlement à la procédure devant la Chambre de céans, le SPC a reçu, en date du 26 août 2021, une demande d’information de l’office de la population et des migrations de Bâle, dont il ressort que la recourante avait fait une demande de changement de domicile.

e. Sous la plume de son conseil, la recourante a transmis à la Chambre de céans, en date du 20 septembre 2021, le recours signé et a formellement conclu, sous suite de frais et dépens, à l’annulation de la décision sur opposition attaquée, ainsi que des décisions des 8 et 26 mars 2021.

f. Le 21 octobre 2021, toujours sous la plume de son conseil, la recourante a contesté avoir eu l’intention de quitter Genève et la Suisse, se référant notamment à sa bonne foi. Elle s’était rendue au Kosovo pour quelques semaines et y était restée bloquée en raison de la pandémie qui s’était entretemps déclarée. Son absence prolongée était dès lors extraordinaire. La recourante a également contesté la validité de l’enquête à domicile, dès lors que l’OCPM savait qu’elle était à l’étranger à cette période.

g. Le service intimé a répondu en date du 18 novembre 2021 et a repris les éléments soulevés dans la décision sur opposition querellée, à savoir le fait que l’intégralité des retraits avait été effectuée à Bâle et au Kosovo, que l’enquête diligentée par l’OCPM avait révélé que son neveu occupait le logement depuis le 26 mars 2018 et qu’elle n’avait requis le remboursement d’aucun frais médical depuis le mois de mars 2014. Par ailleurs, les retraits hors du canton étaient effectués depuis le 1er janvier 2020, soit avant le début de la pandémie. Au demeurant, la recourante n’avait pas produit les relevés détaillés de son compte pour les années 2018 et 2019, ce qui était singulier, et elle avait confirmé effectuer ses visites médicales à Bâle et décoller de Bâle lorsqu’elle voyageait en avion. S’y ajoutait le fait que son fils était domicilié à Bâle. Ainsi, le SPC ne voyait pas quelles attaches la recourante avait encore avec le canton de Genève.

h. Par réplique du 21 janvier 2022, la recourante a rappelé qu’elle était partie en vacances au Kosovo et qu’elle s’était retrouvée coincée là-bas en raison de la pandémie.

i. Le 15 mars 2022, la Chambre de céans a entendu la recourante, son fils et son neveu.

j. Le 26 avril 2022, la Chambre de céans a une nouvelle fois entendu la recourante avant de procéder à un transport sur place non annoncé.

Les constatations effectuées lors dudit transport sur place ont été consignées dans un procès-verbal, contresigné par les parties et complété par la Chambre de céans par courrier du 2 juin 2022.

k. Par courrier du 5 mai 2022, le SPC a relevé qu’il n’avait pas réclamé l’intégralité des prestations complémentaires pour l’année 2018 mais uniquement celles versées à compter du 1er avril 2018. Par ailleurs, en l’absence de relevés bancaires pour la période du 1er avril 2018 au 31 décembre 2019, il avait considéré qu’il ne pouvait être exclu que la recourante fût domiciliée ailleurs dans le canton de Genève, de sorte qu’il avait uniquement supprimé le loyer pendant cette période. Une fois les relevés bancaires reçus, l’intimé se réservait le droit de solliciter une reformatio in peius et de réclamer la restitution de l’intégralité des prestations, s’il devait s’avérer que la recourante n’avait déjà plus sa résidence habituelle à Genève avant la date retenue. Enfin, le SPC informait la Chambre de céans qu’il ressortait de documents qu’il avait reçus que la recourante percevait une rente de la sécurité sociale kosovare depuis le 16 mars 2017, qu’elle avait ouvert le même jour un compte bancaire à M______ pour encaisser cette rente et que des retraits et débits mensuels avaient été effectués dès le mois d’avril 2017.

l. Par courrier du 19 mai 2022, la recourante a produit diverses pièces, à la demande de la Chambre de céans, soit ses relevés bancaires dès le 1er janvier 2018 et les décomptes de l’assurance-maladie dès 2017.

m. Suite à la réception des pièces précitées, les parties ont pu formuler d’ultimes observations.

n. Ainsi, par courrier du 15 juillet 2022, le service intimé a constaté que 99,40% en 2018, 100% en 2019 et en 2020 et 100% du 1er janvier au 31 mars 2021, des retraits/paiements avaient été effectués dans le canton de Bâle, en Allemagne et au Kosovo. Entre le 7 avril 2017 et le 17 septembre 2021, la recourante avait uniquement consulté des médecins à Bâle. Le SPC a également rappelé que l’enquête de l’OCPM avait montré que la recourante ne vivait pas à l’adresse indiquée. Certes, dès le mois d’avril 2021, plusieurs éléments laissaient présumer une certaine présence à Genève (frais médicaux, relevés bancaires, transport sur place du 26 avril 2022), étant toutefois rappelé que les décisions litigieuses avaient été rendues en mars 2021. Au vu de ce qui précédait, le SPC était d’avis que la recourante n’avait plus ses domicile et résidence habituelle dans le canton de Genève depuis le 1er avril 2017 au moins, de sorte qu’il convenait de réformer la décision querellée au détriment de la recourante. Quand bien même la recourante avait à nouveau son domicile et sa résidence habituelle à Genève dès le 1er avril 2021, elle ne pouvait plus prétendre à des prestations complémentaires dès lors qu’un nouveau délai de carence de 10 ans lui serait appliqué au vu de son long séjour hors du canton.

o. Par courrier des 24 août et 19 septembre 2022, la recourante a pris note de la demande de reformatio in peius mais a persisté dans ses précédentes conclusions, réitérant notamment avoir vécu entre Genève, Bâle et le Kosovo et avoir besoin d’aide pour tout, y compris pour ses retraits d’argent ou ses visites médicales. Elle a une nouvelle fois rappelé qu’elle s’était retrouvée bloquée au Kosovo en raison de la pandémie et que malgré la situation sanitaire et son absence, un contrôle domiciliaire avait eu lieu. Cela étant, lors du transport sur place non annoncé et malgré son âge avancé, elle savait où se trouvaient les objets demandés. Pour ces motifs, elle demandait à la Chambre de céans « de faire preuve de clémence et d’annuler la décision du SPC dans la mesure où [elle] était de bonne foi et que la restitution la placerait dans une situation financière inextricable ».

p. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA).

4.             Des modifications législatives et réglementaires sont entrées en vigueur au 1er janvier 2021 dans le cadre de la Réforme des PC (LPC, modification du 22 mars 2019, RO 2020 585, FF 2016 7249; OPC-AVS/AI [ordonnance du 15 janvier 1971 sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité ; RS 831.301], modification du 29 janvier 2020, RO 2020 599).

Toutefois, dans la mesure où la recourante était, au 1er janvier 2021, déjà bénéficiaire de prestations complémentaires, le nouveau droit est applicable pour autant qu’il n’entraîne pas, dans son ensemble, une diminution de la prestation complémentaire annuelle ou la perte du droit à celle-ci (cf. Dispositions transitoires de la modification du 22 mars 2019 – Réforme des PC).

5.             Le délai de recours est de trente jours (art. 60 al. 1 LPGA; art. 43 LPCC; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA-GE - E 5 10] et art. 43 LPCC).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pour la période du 15 juillet au 15 août inclusivement (art. 38 al. 4 let. b LPGA et art. 89C let. b LPA), le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss LPA).

6.             Le litige porte sur la question de savoir si c’est à juste titre que l’intimé a requis de la recourante la restitution des prestations complémentaires et des subsides de l’assurance-maladie, pour la période courant du 1er avril 2018 au 31 mars 2021, singulièrement sur la question du domicile à Genève.

7.              

7.1 Selon l'art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile. Ces deux conditions matérielles sont cumulatives et leur réalisation est nécessaire pour que la remise de l'obligation de restituer soit accordée (ATF 126 V 48 consid. 3c ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_364/2019 du 9 juillet 2020 consid. 4.1).

Conformément à l'art. 3 de l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 (OPGA - RS 830.11), l'étendue de l'obligation de restituer est fixée par une décision (al. 1), dans laquelle l'assureur indique la possibilité d'une remise (al. 2).

L'art. 4 OPGA précise que la restitution entière ou partielle des prestations allouées indûment, mais reçues de bonne foi, ne peut être exigée si l'intéressé se trouve dans une situation difficile (al. 1). Est déterminant, pour apprécier s'il y a une situation difficile, le moment où la décision de restitution est exécutoire (al. 2). Les autorités auxquelles les prestations ont été versées en vertu de l'art. 20 LPGA ou des dispositions des lois spéciales ne peuvent invoquer le fait qu'elles seraient mises dans une situation difficile (al. 3). La demande de remise doit être présentée par écrit. Elle doit être motivée, accompagnée des pièces nécessaires et déposée au plus tard trente jours à compter de l'entrée en force de la décision de restitution (al. 4). La remise fait l'objet d'une décision (al. 5).

7.2 Le destinataire d'une décision de restitution qui entend la contester dispose en réalité de deux moyens qu'il convient de distinguer de façon claire : s'il prétend qu'il avait droit aux prestations en question, il doit s'opposer à la décision de restitution dans un délai de 30 jours ; en revanche, s'il admet avoir perçu indûment des prestations, mais qu'il invoque sa bonne foi et des difficultés économiques qu'il rencontrerait en cas de remboursement, il doit présenter une demande de remise. Dans la mesure où la demande de remise ne peut être traitée sur le fond que si la décision de restitution est entrée en force, la remise et son étendue font l'objet d'une procédure distincte (cf. art. 4 al. 2 OPGA ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_589/2016 du 26 avril 2017 consid. 3.1; 8C_130/2008 du 11 juillet 2008 consid. 2.2 et 8C_602/2007 du 13 décembre 2007 consid. 3).

Intrinsèquement, une remise de l'obligation de restituer n'a de sens que pour la personne tenue à restitution (arrêt du Tribunal fédéral 9C_211/2009 du 26 février 2010 consid. 3.1).

8.             En l’espèce, dans ses écritures des 21 octobre 2021 et 19 septembre 2022, la recourante a vaguement évoqué sa bonne foi et sa situation financière difficile, tout en contestant l’absence de domicile à Genève et, partant, le principe même de la restitution.

Pour autant que ses remarques quant à sa bonne foi et à sa situation financière difficile doivent être qualifiées de demande de remise, celle-ci serait quoi qu’il en soit prématurée, les décisions de restitution n’étant pas encore entrées en force vu la présente procédure de recours.

9.              

9.1 Comme indiqué précédemment, s'agissant des prestations complémentaires fédérales, selon l'art. 25 al. 1 1ère phrase LPGA, en relation avec l'art. 2 al. 1 let. a OPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées par le bénéficiaire ou par ses héritiers.

Selon l'art. 3 al. 1 OPGA, l’étendue de l’obligation de restituer est fixée par une décision.

L'obligation de restituer suppose que soient remplies les conditions d'une révision procédurale (art. 53 al. 1 LPGA) ou d'une reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA) de la décision - formelle ou non - par laquelle les prestations en cause ont été allouées (ATF 142 V 259 consid. 3.2 et les références; ATF 138 V 426 consid. 5.2.1 et les références; ATF 130 V 318 consid. 5.2 et les références).

A cet égard, la jurisprudence constante distingue la révision d'une décision entrée en force formelle, à laquelle l'administration est tenue de procéder lorsque sont découverts des faits nouveaux ou de nouveaux moyens de preuve susceptibles de conduire à une appréciation juridique différente (ATF 129 V 200 consid. 1.1; ATF 127 V 466 consid. 2c et les références), de la reconsidération d'une décision formellement passée en force de chose décidée sur laquelle une autorité judiciaire ne s'est pas prononcée quant au fond, à laquelle l'administration peut procéder pour autant que la décision soit sans nul doute erronée et que sa rectification revête une importance notable. Ainsi, par le biais d'une reconsidération, on corrigera une application initiale erronée du droit (ATF 147 V 167 consid. 4.2 et la référence). L'obligation de restituer des prestations complémentaires indûment touchées et son étendue dans le temps n’est pas liée à une violation de l'obligation de renseigner (ATF 122 V 134 consid. 2e). Il s'agit simplement de rétablir l'ordre légal après la découverte du fait nouveau (arrêt du Tribunal fédéral 9C_398/2021 du 22 février 2022 consid. 5.1).

9.2 Au plan cantonal, l'art. 24 al. 1 1ère phrase LPCC prévoit que les prestations indûment touchées doivent être restituées. Conformément à l’art. 43A LPCC, les décisions et les décisions sur opposition formellement passées en force sont soumises à révision si le bénéficiaire ou le service découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient être produits avant (al. 1). Le SPC peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition formellement passées en force lorsqu’elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable (al. 2).

L'art. 14 du règlement relatif aux prestations cantonales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 25 juin 1999 (RPCC-AVS/AI - J 4 25.03) précise que le SPC doit demander la restitution des prestations indûment touchées au bénéficiaire, à ses héritiers ou aux autres personnes mentionnées à l'art. 2 OPGA appliqué par analogie (al. 1). Il fixe l'étendue de l'obligation de restituer par décision (al. 2).

9.3 Conformément à l’art. 33 de la loi d’application de la loi fédérale sur l’assurance-maladie du 29 mai 1997 (LaLAMal – J 3 05), les subsides indûment touchés doivent être restitués en appliquant par analogie l'article 25 LPGA (al. 1). Lorsque des subsides ont été indûment touchés par un bénéficiaire des prestations du service, ce service peut en demander la restitution au nom et pour le compte du service de l'assurance-maladie (al. 2).

10.          

10.1 En vertu de l'art. 25 al. 2 1ère phrase LPGA (dans sa teneur en vigueur à compter du 1er janvier 2021), le droit de demander la restitution s'éteint trois ans après le moment où l'institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation.

Jusqu’au 31 décembre 2020, l’art. 25 al. 2 1ère phrase aLPGA prévoyait que le droit de demander la restitution s’éteignait un an après le moment où l’institution d’assurance avait eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation.

L’application du nouveau délai de péremption aux créances déjà nées et devenues exigibles sous l’empire de l’ancien droit est admise, dans la mesure où la péremption était déjà prévue sous l’ancien droit et que les créances ne sont pas encore périmées au moment de l’entrée en vigueur du nouveau droit. Si, au moment de l’entrée en vigueur de la nouvelle disposition, le délai de péremption relatif ou absolu en vertu de l’art. 25 al. 2 aLPGA a déjà expiré et que la créance est déjà périmée, celle-ci reste périmée (OFAS, Lettre circulaire AI n° 406, du 22 décembre 2020, modifiée le 31 mars 2021 et les références).

10.2 En l’espèce, le SPC a initié une procédure de révision en novembre 2020. Après avoir recueilli les pièces pertinentes, il a établi ses trois demandes de restitution en date des 8 et 26 mars 2021. Quant à la décision sur opposition, elle date du 30 juin 2021. L’ensemble des décisions a donc été rendu dans un délai d’un an après l’ouverture de la procédure de révision et la réception des pièces, de sorte que l’intimé a agi en temps utile.

11.          

11.1 D'après l'art. 4 al. 1 LPC, les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse ont droit à des prestations complémentaires dès lors que, notamment, elles ont droit à certaines prestations d'assurances sociales, dont - comme en l'espèce - une rente de l'AVS (art. 4 al. 1 let. b LPC).

Sur le plan cantonal, les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle sur le territoire de la République et canton de Genève ont droit aux prestations complémentaires cantonales à la condition, notamment, d'être au bénéfice de certaines prestations d'assurances sociales, dont une rente de l'AVS (art. 2 al. 1 let. a LPCC).

Le droit aux prestation complémentaires fédérales et cantonales suppose donc notamment que le bénéficiaire ait son domicile et sa résidence habituelle respectivement en Suisse et dans le canton de Genève. Lesdites prestations ne sont pas exportables. Les conditions de domicile et de résidence sont cumulatives (Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, 2015, n° 15 ad art. 4).

11.2 Aux termes de l’art. 19 al. 1 LaLAMal, conformément aux art. 65ss de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10), l’État de Genève accorde aux assurés de condition économique modeste des subsides destinés à la couverture totale ou partielle des primes de l’assurance-maladie. Les subsides sont notamment destinés aux assurés bénéficiaires des prestations complémentaires à l'AVS/AI (cf. art. 20 al. 1 let. b LaLAMal).

L’art. 22 al. 6 LaLAMal dans sa teneur en force en 2015 disposait que les bénéficiaires d’une prestation annuelle, fédérale et/ou cantonale, complémentaire à l’AVS/AI versée par le service ont droit à un subside égal au montant de leur prime d’assurance obligatoire des soins, mais au maximum au montant correspondant à la prime moyenne cantonale fixée par le Département fédéral de l’intérieur. Les personnes qui ont un excédent de ressources inférieur à la prime moyenne cantonale ont droit à un subside équivalent à la différence entre la prime moyenne cantonale et l’excédent de ressources.

11.3  

11.3.1 Selon l'art. 13 LPGA, le domicile d'une personne est déterminé selon les art. 23 à 26 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210), et une personne est réputée avoir sa résidence habituelle au lieu où elle séjourne un certain temps, même si la durée de ce séjour est d'emblée limitée. Cette disposition s'applique en matière de prestations complémentaires fédérales, du fait du renvoi qu'opère la LPC à la LPGA de façon générale comme sur cette question spécifique (art. 1 et 4 al. 1 LPC), mais aussi en matière de prestations complémentaires cantonales, en raison du silence de la LPCC sur le sujet, appelant l'application de la LPGA (art. 1A al. 1 LPCC), ainsi que de motifs de sécurité juridique et d'harmonisation des pratiques administratives (ATAS/1235/2013 du 12 décembre 2013 consid. 5).

En d’autres termes, les notions de domicile et de résidence habituelle doivent donc être interprétées de la même manière pour les deux prestations considérées.

11.3.2 Le domicile de toute personne est au lieu où elle réside avec l'intention de s'y établir (art. 23 al. 1 CC). La notion de domicile comporte deux éléments : l'un objectif, la résidence, soit un séjour d'une certaine durée dans un endroit donné et la création en ce lieu de rapports assez étroits ; l'autre, l'intention d'y résider, soit de se fixer pour une certaine durée au lieu de sa résidence, qui doit être reconnaissable pour les tiers et donc ressortir de circonstances extérieures et objectives. Cette intention implique la volonté manifestée de faire d'un lieu le centre de ses relations personnelles et professionnelles. Le domicile d'une personne se trouve ainsi au lieu avec lequel elle a les relations les plus étroites, compte tenu de l'ensemble des circonstances (ATF 136 II 405 consid. 4.3 et les arrêts cités). Le lieu où les papiers d'identité ont été déposés ou celui figurant dans des documents administratifs, comme des attestations de la police des étrangers, des autorités fiscales ou des assurances sociales, constituent des indices, qui ne sauraient toutefois l'emporter sur le lieu où se focalise un maximum d'éléments concernant la vie personnelle, sociale et professionnelle de l'intéressé (ATF 125 III 100 consid. 3 ; Michel VALTERIO, op. cit., n. 16 ad art. 4 ; Ueli KIESER, ATSG Kommentar, 3ème éd., 2015, n° 15 s. ad art. 13 LPGA).

Lorsqu'une personne séjourne en deux endroits différents, il faut tenir compte de l'ensemble de ses conditions de vie, le centre de son existence se trouvant à l'endroit, lieu ou pays, où se focalise un maximum d'éléments concernant sa vie personnelle, sociale et professionnelle, de sorte que l'intensité des liens avec ce centre l'emporte sur les liens existant avec d'autres endroits ou pays (ATF 125 III 100 consid. 3). En ce qui concerne les prestations complémentaires, la règle de l'art. 24 al. 1 CC, selon laquelle toute personne conserve son domicile aussi longtemps qu'elle ne s'en est pas créé un nouveau, s'applique (ATF 127 V 237 consid. 1). Le domicile est maintenu lorsque la personne concernée quitte momentanément (p. ex. en raison d'une maladie) le lieu dont elle a fait le centre de ses intérêts ; le domicile reste en ce lieu jusqu'à ce qu'un nouveau domicile est, le cas échéant, créé à un autre endroit (ATF 99 V 106 consid. 2 ; Michel VALTERIO, op. cit., n° 22 ad art. 4).

11.3.3 Selon l'art. 13 al. 2 LPGA, une personne est réputée avoir sa résidence habituelle au lieu où elle séjourne un certain temps même si la durée du séjour est d'emblée limitée. Selon la jurisprudence, la notion de résidence doit être comprise dans un sens objectif, de sorte que la condition de la résidence habituelle en Suisse n'est en principe plus remplie à la suite d'un départ à l'étranger. Il n'y a cependant pas interruption de la résidence en Suisse lorsque le séjour à l'étranger, correspondant à ce qui est généralement habituel, est dû à des motifs tels qu'une visite, des vacances, une absence pour affaires, une cure ou une formation. De tels séjours ne peuvent en principe dépasser la durée d'une année. Des motifs contraignants et imprévisibles, tels que la maladie ou un accident, peuvent justifier de prolonger au-delà d'une année la durée du séjour (ATF 111 V 180 consid. 4 p. 182 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_696/2009 du 15 mars 2010 consid. 3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 71/89 du 14 mai 1990 consid. 2a, in RCC 1992 p. 36). Le Tribunal fédéral a cependant jugé que des exceptions au principe de la résidence en Suisse ne pouvaient entrer en considération que lorsque l'intéressé avait envisagé dès le début un départ temporaire et non pas définitif de Suisse (ATF 111 V 180 consid. 4c ; Michel VALTERIO, op. cit., n° 27 ad art. 4).

11.4  

11.4.1 Selon les DPC en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020, lorsqu'une personne - également lors d'une période à cheval entre deux années civiles - séjourne à l'étranger plus de trois mois (92 jours) d'une traite sans raison majeure ou impérative, le versement de la prestation complémentaire est suspendu dès le mois suivant. Il reprend dès le mois au cours duquel l'intéressé revient en Suisse (DPC n° 2330.01). Lorsqu'au cours d'une même année civile, une personne séjourne plus de six mois (183 jours) à l'étranger, le droit à la prestation complémentaire tombe pour toute l'année civile en question. Le versement de la prestation complémentaire doit dès lors être supprimé pour le restant de l'année civile ; les prestations complémentaires déjà versées doivent être restituées. Lors de plusieurs séjours à l'étranger au cours de la même année civile, lesdits séjours sont additionnés au jour près. En cas de séjour à cheval entre deux années civiles, seuls les jours de l'année civile correspondante sont pris en compte. Les jours d'arrivée et de départ ne sont pas considérés comme jours de résidence à l'étranger (DPC n° 2330.02). Lors d'un séjour à l'étranger dicté par une raison majeure, la prestation complémentaire peut continuer à être versée pour une année au maximum. Si le séjour à l'étranger se prolonge au-delà de douze mois, le versement de la prestation complémentaire prend fin dès le mois civil suivant. La prestation complémentaire est à nouveau versée dès le mois civil à partir duquel la personne est de retour en Suisse (DPC n° 2340.01). Seuls des motifs d'ordre professionnel, ou la poursuite d'une formation professionnelle, peuvent être considérés comme relevant d'une raison majeure, mais pas un séjour pour cause de vacances ou de visites (DPC n° 2340.02). En cas de séjour à l'étranger dicté par des raisons impératives, la prestation complémentaire continue d'être versée tant et aussi longtemps que l'intéressé garde le centre de tous ses intérêts personnels en Suisse (DPC n° 2340.03). Les raisons impératives ne peuvent être que des raisons inhérentes à la santé des personnes comprises dans le calcul PC (p. ex. impossibilité de transport suite à maladie ou accident) ou d'autres circonstances extraordinaires qui rendent impossible tout retour en Suisse (DPC n° 2340.04).

Depuis le 1er janvier 2021, les DPC prévoient ce que la résidence habituelle en Suisse est présumée interrompue lorsqu’une personne séjourne à l’étranger sans motif important pendant plus de trois mois (90 jours) de manière ininterrompue ou pendant plus de trois mois (90 jours) au total au cours d’une même année civile (DPC n° 2330.01). Le versement de la prestation complémentaire est interrompu avec effet rétroactif au début du mois au cours duquel la personne a passé le 91ème jour à l’étranger. Les jours d’arrivée et de départ ne sont pas considérés comme jours de résidence à l’étranger (v. ex. des annexes 3.1 à 3.3 ; DPC n° 2330.02). Lors de plusieurs séjours à l’étranger au cours de la même année civile, lesdits séjours sont additionnés au jour près. En cas de séjour à cheval entre deux années civiles, afin de vérifier si plus de 90 jours ont été passés à l’étranger lors de la même année civile, seuls les jours de l’année civile correspondante sont pris en compte (DPC n° 2330.03). Lorsqu’une personne retourne à l’étranger au cours d’une année civile pendant laquelle elle a déjà passé au moins 90 jours à l’étranger, le versement des prestations complémentaires est interrompu au début du mois au cours duquel elle a à nouveau quitté la Suisse (DPC n° 2330.04). Le versement de la complémentaire reprend dès le mois qui suit le retour de la personne en Suisse. Demeurent réservés les cas au sens du n° 2310.02 (DPC n° 2330.05). Lors d’un séjour à l’étranger dicté par un motif important, la prestation complémentaire peut continuer à être versée pour une année au maximum. Si le séjour à l’étranger se prolonge au-delà de 365 jours, le versement de la prestation complémentaire prend fin dès le mois civil suivant. Lorsque plusieurs séjours à l’étranger sont dictés par un même motif important, ils sont additionnés au jour près. Les jours d’arrivée et de départ ne sont pas considérés comme jours de résidence à l’étranger (v. ex. des annexes 3.1 à 3.3 ; DPC n° 2340.01). La prestation complémentaire est à nouveau versée dès le mois civil à partir duquel la personne est de retour en Suisse. Demeurent réservés les cas prévus au no 2310.02 (DPC n° 2340.02). Seules les situations suivantes constituent des motifs importants : – une formation qui remplit les critères de formation de l’article 49bis du règlement sur l'assurance-vieillesse et survivants du 31 octobre 1947 (RAVS - RS 831.101) et qui ne peut pas être achevée sans un séjour à l’étranger (ex. des études de langue dans une université) ; – une maladie ou un accident du bénéficiaire de prestation complémentaire ou d’un membre de sa famille au sens de l’art. 29septies de la loi fédérale du 20 décembre 1946 sur l’assurance-vieillesse et survivants (LAVS) s’étant rendu à l’étranger avec lui, qui rend impossible le retour en Suisse ; – un cas de force majeure (catastrophe naturelle, pandémie, guerre, etc.) qui empêche le retour en Suisse (DPC n° 2340.03). Le motif important doit exister pendant toute la durée du séjour à l’étranger. Si une personne poursuit son séjour à l’étranger alors que le motif important qui le justifiait a disparu, les jours supplémentaires à l’étranger sont considérés comme étant sans motif important (DPC n° 2340.04).

11.4.2 Comme le Tribunal fédéral l'a rappelé dans l'arrêt 9C_345/2010 précité (consid. 5.1 in fine, mentionnant l'ATF 126 V 64 consid. 3b p. 68), de telles directives ne lient pas le juge des assurances sociales et ces délais de trois ou douze mois ne doivent pas être appliqués de façon schématique et rigide.

11.5  

11.5.1 S’agissant des prestations complémentaires cantonales, l’art. 2 al. 1 let. a LPCC prévoit notamment qu’ont droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle sur le territoire de la République et canton de Genève.

Selon l'art. 1 al. 1 RPCC-AVS/AI, le bénéficiaire qui séjourne hors du canton plus de trois mois au total par année perd son droit aux prestations, à moins qu'il ne s'agisse d'une hospitalisation ou d'un placement dans un home ou dans un établissement médico-social pour personnes âgées ou invalides.

11.5.2 Dans son arrêt de principe du 12 décembre 2013, la Chambre de céans a notamment constaté que la notion de domicile et de résidence habituelle de l’art. 2 al. 1 LPCC devait manifestement être interprétée de la même manière que celle de l’art. 13 LPGA et donc de celle de l’art. 4 LPC en matière de prestations complémentaires fédérales, le législateur cantonal ayant eu, à cet égard, clairement l’intention d’harmoniser les notions du droit cantonal avec celles du droit fédéral. Par ailleurs, selon l’art. 47 LPCC, lequel prévoit que le Conseil d’Etat édicte le règlement d’application, le RPCC est une ordonnance d’exécution. Or, l’art. 1 al. 1 RPCC-AVS/AI, en tant qu’il pose une règle nouvelle restreignant le droit des administrés, outrepasse l’art. 2 al. 1 let. a LPCC. En effet, cet art. 1 al. 1 RPCC-AVS/AI donne une définition de la résidence, laquelle est interrompue après trois mois de séjour hors du canton de Genève, plus restrictive que celle du droit fédéral (art. 4 LPC et 13 LPGA) alors même que l’art. 2 al. 1 LPCC se réfère justement au domicile tel que défini par le droit fédéral. La définition de l’art. 1 al. 1 RPCC-AVS/AI est également plus restrictive que celle donnée par la jurisprudence du Tribunal fédéral, laquelle s’écarte des DPC qui, elles-mêmes, fixent une durée similaire à celle du RPCC-AVS/AI, soit une durée de trois mois de séjour à l’étranger au-delà de laquelle la résidence en Suisse n’est plus donnée (art. 4 LPC et 13 LPGA ; ATAS/1235/2013 du 12 décembre 2013 consid. 5c).

12.         Conformément à l’art. 12 LPC, non modifié lors de la réforme, le droit à une prestation complémentaire annuelle prend naissance le premier jour du mois au cours duquel la demande est déposée, pour autant que toutes les conditions légales soient remplies (al. 1). Ce droit s’éteint à la fin du mois au cours duquel l’une des conditions dont il dépend cesse d’être remplie (al. 3).

Le droit aux prestations complémentaires fédérales s’éteint suite à une modification de la situation économique du bénéficiaire ou du transfert de son domicile à l’étranger (Michel VALTERIO, op. cit., n° 15 ad Art. 12).

13.          

13.1 Dans sa teneur en vigueur jusqu'au 30 décembre 2020, l'art. 21 al. 1 LPC prévoyait que le canton de domicile du bénéficiaire est compétent pour fixer et verser les prestations complémentaires. Le séjour dans un home, un hôpital ou tout autre établissement ne fonde aucune nouvelle compétence; il en va de même du placement dans une famille d'une personne, interdite ou non, décidé par une autorité ou un organe de tutelle.

Modifié au 1er janvier 2021 (réforme de prestations complémentaires), l'art. 21 LPC prévoit désormais que le canton de domicile du bénéficiaire est compétent pour fixer et verser les prestations complémentaires (al. 1). Il reste compétent lorsque le bénéficiaire entre dans un home, un hôpital ou une autre institution situés dans un autre canton, ou lorsqu'une personne majeure est placée, par décision d'une autorité, dans une famille résidant dans un autre canton (al. 1bis). Il est également compétent si le droit aux prestations complémentaires naît après l'admission dans un home, un hôpital ou une autre institution, ou après le placement dans une famille (al. 1ter). Si la personne considérée élit domicile dans le canton où se situe le home ou l'institution, le canton dans lequel elle était domiciliée avant l'admission est compétent (al. 1quater). 

13.2 En cas de changement de domicile, l'autorité compétente en matière de prestations complémentaires du canton de départ doit annoncer le changement de domicile à son homologue du canton d'arrivée dès qu'elle a connaissance de cette information. Selon la pratique administrative, cette communication est réputée constituer une demande écrite de prestations complémentaires, pour autant qu'elle contienne les informations énoncées à l'art. 20 al. 2 OPC-AVS/AI (Directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI [DPC, état au 1er janvier 2016], ch. 2130.01 et ch. 6410.01 ss ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 5/07 du 12 septembre 2007 consid. 4 et 5.1). Une fois saisi de la demande, l'organe de prestations complémentaires du nouveau canton de domicile devra rendre une nouvelle décision sur le droit aux prestations complémentaires, après avoir procédé à un nouveau calcul. Dans le cadre de celui-ci, il pourra s'écarter de la décision du canton précédent sans être limité aux motifs de révisions de l'art. 17 LPGA ou à ceux de l'art. 25 al. 1 OPC-AVS/AI, ce qui signifie qu'il pourra également, cas échéant, réexaminer la question d'un éventuel dessaisissement de revenu ou de fortune au sens de l'art. 11 al. 1 let. g LPC (arrêt du Tribunal fédéral 9C_52/2015 du 3 juillet 2015 consid. 2.2.2). Par ailleurs, s’il y a contestation sur le domicile entre deux ou plusieurs cantons, il incombe en premier lieu aux organes des prestations complémentaires intéressés de tenter de trouver un accord. S’ils n’y arrivent pas, il appartient à l’organe de prestations complémentaires auprès duquel la demande a été présentée de rendre une décision de non-entrée en matière. Il s’agit ce faisant d’une décision finale qui peut être attaquée par voie d’opposition. Jusqu’au terme de la procédure, à savoir jusqu’à l’entrée en force de la décision, l’organe de prestations complémentaires du canton de résidence – après consultation des autres organes de prestations complémentaires pouvant entrer en ligne de compte – doit calculer et verser une prestation complémentaire provisoire fixée selon les règles usuelles. Si, par la suite, grâce à une entente intervenue entre les cantons intéressés ou en raison d’un jugement entré en force, il s’avère que le canton de résidence et le canton de domicile ne sont pas les mêmes, le canton compétent doit rembourser au canton de résidence les prestations complémentaires que ce dernier a versées provisoirement (ch. 1500.01 et 1500.02 DPC).

14.          

14.1 Dans le domaine des assurances sociales notamment, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 et les références).

14.2 Comme l'administration, le juge apprécie librement les preuves administrées, sans être lié par des règles formelles (art. 61 let. c LPGA). Il lui faut examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les pièces du dossier et autres preuves recueillies permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. Il lui est loisible, sur la base d'une appréciation anticipée des preuves déjà disponibles, de refuser l'administration d'une preuve supplémentaire au motif qu'il la tient pour impropre à modifier sa conviction (ATF 131 III 222 consid. 4.3 ; ATF 129 III 18 consid. 2.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_5/2011 du 24 mars 2011 consid. 3.1). 

14.3 Une preuve absolue n'est pas requise en matière d'assurances sociales. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; 126 V 353 consid. 5b; 125 V 193 consid. 2 et les références).

15.          

15.1 En l’espèce, constatant, à l’examen de diverses pièces reçues, l’absence de frais médicaux à Genève et l’existence de retraits effectués dans un autre canton, le SPC a sollicité, en date du 25 janvier 2021, l’OCPM pour que celui-ci procède à une enquête administrative sur la question de la résidence effective à Genève de la recourante.

Comme il ressort du rapport du 4 mars 2021, l’OCPM est arrivé à la conclusion que la recourante n’était pas domiciliée à la rue L______ pour diverses raisons. Tout d’abord, le service d’immeuble et une voisine directe avaient expliqué, par téléphone, que seul un homme, correspondant au profil du neveu de la recourante, résidait à cette adresse, selon toute vraisemblance en colocation. La consommation d’électricité de l’appartement en question était d’ailleurs légèrement supérieure à la consommation moyenne par an pour un ménage similaire occupé par une personne. S’y ajoutait le fait que selon les comptes bancaires pour 2020, tous les retraits en espèces et les achats avaient été effectués en Suisse alémanique ou au Kosovo. Lors d’un entretien téléphonique le 18 février 2021, la belle-fille de la recourante avait également expliqué que si cette dernière résidait effectivement à Genève, elle se rendait régulièrement chez eux à Bâle et voyageait une fois par année au Kosovo, pour une durée de trois à quatre mois, hormis en 2020, où elle s’y était retrouvée de février à octobre, soit pendant neuf mois. L’OCPM avait enfin procédé à une vérification du domicile en date du 23 février 2021 à 8h15, laquelle avait montré que l’appartement en question était uniquement occupé par le neveu de la recourante, aucun effet personnel appartenant à cette dernière n’ayant été remarqué. L’ensemble de ces éléments permettait de conclure, selon l’OCPM, que la recourante n’habitait plus à Genève.

Sur la base de ce rapport et du fait que les frais médicaux et retraits en espèces étaient effectués à Bâle, en Allemagne ou au Kosovo, le SPC a considéré que la recourante n’était plus domiciliée dans le canton de Genève et lui a, de ce fait, demandé la restitution des prestations indûment perçues depuis le 1er avril 2018, par décisions des 8 et 26 mars 2021.

La question que la Chambre de céans a donc à résoudre est celle de savoir si c’est à juste titre que le SPC n’a pas retenu de domicile à Genève de la recourante et qu’il lui a par conséquent demandé la restitution des prestations complémentaires versées.

15.2 Pour pouvoir bénéficier de prestations complémentaires du canton de Genève, le domicile et la résidence habituelle de la recourante doivent se trouver dans ce canton. En d’autres termes, c’est avec Genève qu’elle doit avoir les relations les plus étroites compte tenu de l’ensemble des circonstances et c’est également dans ce canton qu’elle doit séjourner pendant un certain temps.

Or, l’instruction menée par le SPC et la Chambre de céans a montré ce qui suit.

15.2.1 Du dossier, il ressort tout d’abord que la recourante est mère de quatre enfants. Son fils F______ vit à Bâle, avec sa famille, et y travaille. Ses trois autres enfants vivent au Kosovo ou en Macédoine. La recourante ne parle pas français et seuls des membres de la famille plus éloignée se trouvent à Genève.

Durant la période litigieuse, soit entre le 1er janvier 2018 et le 31 mars 2021, la recourante s’est régulièrement rendue à Bâle et au Kosovo pour voir ses enfants et petits-enfants. Ainsi, son fils a expliqué qu’en 2018, elle avait passé trois mois à Bâle, 4,5 mois environ au Kosovo sur la base de trois voyages, en Macédoine un jour ou deux et le reste du temps à Genève. Il en allait de même pour l’année 2019. En 2020, elle s’était rendue au Kosovo en février ou mars, voire avril, et y était restée plus de 5 mois en raison de la pandémie (cf. audition de M. F______ du 15 mars 2022).

A ce stade, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence précitée, l’art. 1 al. 1 RPCC-AVS/AI qui évoque une absence d’une durée maximum de trois mois n’est pas applicable. S’agissant des DPC qui prévoient une durée maximum admise à l’étranger de six mois, le Tribunal fédéral a retenu qu’une durée fixe ne devait pas être comprise comme un critère schématique et rigide. La durée admissible d’un séjour à l’étranger dépend en premier lieu de la nature et du but de celui-ci, étant relevé que, selon le Tribunal fédéral, les séjours à l’étranger ne devraient en principe pas dépasser la durée d’une année (arrêt 9C_345/2010 précité, consid. 5.1).

Cela étant, il apparaît que depuis 2018 à tout le moins, la recourante a séjourné nettement plus longtemps à Bâle et au Kosovo qu’à Genève.

Elle justifie notamment son séjour prolongé au Kosovo par la pandémie de Covid, laquelle l’aurait empêchée de revenir en Suisse. Certes, au début de cette pandémie, les liaisons aériennes entre les différents pays ont été suspendues et les frontières ont été fermées. Cela étant, des assouplissements sont progressivement entrés en vigueur et il était à nouveau possible pour la recourante, titulaire d’un permis C, de revenir en Suisse à tout le moins à compter de mai ou juin 2020. Partant, la pandémie de Covid ne saurait justifier son absence prolongée de Genève.

Au demeurant, la recourante n’entretenait pas de relations sociales ou familiales particulières à Genève, ses explications étant d’ailleurs très vagues à ce propos.

Enfin, il ressort d’un courrier contresigné par des voisins les 7 et 8 juin 2021 que ceux-ci confirmaient avoir « aperçu » la recourante « de temps en temps », ce qui ne plaide pas non plus en faveur d’une présence continue et de longue durée à Genève.

15.2.2 La présence sur une longue durée ailleurs qu’à Genève, soit à Bâle ou au Kosovo, est également corroborée par le fait que la majeure partie des retraits en espèces ou paiement était effectuée à Bâle et sa région ou ponctuellement au Kosovo. En effet, les relevés bancaires montrent qu’entre le 1er janvier 2018 et le 31 mars 2021, seul un retrait d’argent a eu lieu à Genève.

-          En 2018, 156 retraits sur 157 ont eu lieu dans le canton de Bâle, en Allemagne et au Kosovo.

-          En 2019 et 2020, 100% de retraits ont eu lieu dans ces régions, soit 98 retraits en 2019 et 90 en 2020.

-          Entre janvier et mars 2021, à nouveau 100% des retraits ont eu lieu ailleurs qu’à Genève.

La recourante a tenté de justifier le lieu de ces retraits en expliquant que c’était son fils qui effectuait les prélèvements et qui lui envoyait ensuite l’argent (audition de la recourante du 15 mars 2022 p. 2).

Ces explications ne convainquent toutefois pas la Chambre de céans, au vu du nombre et de la fréquence des retraits de peu d’importance. Il n’est en effet pas crédible que le fils de la recourante prélève, pour elle, CHF 100.- à CHF 200.-, tous les deux ou trois jours, pour lui envoyer ensuite régulièrement ces sommes.

15.2.3 S’y ajoute le fait que, pendant la période litigieuse, la recourante a sollicité le remboursement de divers frais médicaux facturés par des professionnels de la santé intervenant à Bâle. Ainsi,

-          En 2017 :

o   7 avril : frais de la pharmacie H______ AG ;

o   27 octobre : honoraires du docteur I______, spécialiste FMH en médecine interne générale ;

-          En 2018 :

o   19 janvier et 17 août : frais de la pharmacie H______ AG ;

o   16 février : honoraires du Dr I______ ;

-          En 2019 :

o   1er mars, 3 mai et 16 août : frais de la pharmacie H______ AG ;

o   20 septembre : honoraires du docteur J______, spécialiste FMH en médecine interne générale ;

-          En 2020 :

o   17 janvier, 6 mars et 6 novembre : frais de la pharmacie H______ AG ;

o   15 mai : honoraires du Dr J______ ;

-          En 2021 :

o   5 février et 13 août : frais de la pharmacie H______ AG ;

o   5 février : frais d’un laboratoire situé à Goldach ;

o   30 avril et 17 septembre : honoraires du Dr J______.

Force est ainsi de constater, au vu de ce qui précède, qu’entre le mois d’avril 2017 et le mois de septembre 2021, les frais médicaux ont été facturés par des personnels de la santé intervenant à Bâle, étant constaté que tant les cabinets des Drs J______ et I______ que la pharmacie H______ AG sont situés non loin de l’adresse du domicile du fils de la recourante. Ce n’est en réalité que suite à la décision sur opposition, rendue le 30 juin 2021, que la recourante a recommencé à consulter à Genève.

15.2.4 Enfin, lors du transport sur place réalisé le 26 avril 2022, la Chambre de céans a pu constater la présence de nombreux vêtements et objets n’appartenant de toute évidence pas à la recourante.

Ainsi, en est-il par exemple des pots et du matériel de peinture. Interrogée à ce propos, la recourante a expliqué que ces objets appartenaient à son fils F______, lequel aurait fait des travaux de peinture dans l’appartement l’année précédente, après son retour du Kosovo, à une date dont elle ne se souvenait plus. Ces pots de peinture et les chaussures étaient restés dans l’appartement malgré la fin des travaux, pour le cas où il y aurait encore besoin de faire de la peinture à l’avenir, les pots de peinture étant alors déjà là (cf. procès-verbal du transport sur place du 26 avril 2022, p. 2).

Ces explications n’emportent toutefois pas la conviction de la Chambre de céans. En effet, il paraît peu plausible que des pots et du matériel de peinture traînent dans l’appartement de la recourante pendant autant de mois alors que le neveu de la recourante, dont l’adresse annoncée à l’OCPM était celle de la recourante, est peintre (cf. audition de G______ du 15 mars 2022). Il paraît dès lors plus plausible que ce matériel lui appartienne.

S’y ajoute le fait que des vêtements d’homme ont été constatés à plusieurs endroits. A ce propos, la recourante a expliqué qu’il s’agissait de vieux vêtements de son fils, F______, destinés à être emmenés au Kosovo ou de vêtements que celui-ci avait laissés, étant pressé de rentrer et ne pouvant pas tout emmener (cf. procès-verbal du transport sur place du 26 avril 2022). A nouveau, ces explications sont peu plausibles. En effet, il n’est pas crédible que le fils de la recourante laisse ses vieux vêtements chez sa mère pour que celle-ci les emmène au Kosovo alors qu’elle décolle systématiquement de Bâle pour se rendre dans ce pays et qu’il habite lui-même à Bâle.

Par ailleurs, il est également peu crédible que la brosse à dents et le dentifrice se trouvant dans la salle de bains, au-dessus du lavabo, soient ceux du fils de la recourante, qui n’habite pas dans l’appartement en question et que la brosse à dents et le dentifrice de la recourante soient rangés dans l’armoire blanche, à droite de l’entrée, alors qu’elle est censée habiter dans l’appartement.

En réalité, il paraît plus plausible que les affaires d’hommes se trouvant dans l’appartement de la recourante soient celles de son neveu, ce qui accrédite le fait que c’était celui-ci qui habitait dans l’appartement en question et non la recourante.

Certes, depuis le 15 mars 2021, le neveu de la recourante est officiellement domicilié auprès de Monsieur K______, à l’avenue N______. La date du changement de domicile interpelle toutefois également, dès lors qu’elle survient quelques jours à peine après le rapport de l’OCPM, daté du 4 mars 2021, et la première décision de restitution de l’intimé, quant à elle datée du 8 mars 2021.

En réalité, il ressort de ce transport sur place que la recourante séjournait peut-être parfois et pour de courtes durées dans l’appartement sis au C______, mais qu’il ne s’agissait pas d’un séjour durable.

15.3 Il appert en réalité, au vu de ce qui précède, qu’à tout le moins depuis le 1er janvier 2018, le centre des intérêts, des relations personnelles et de l’existence de la recourante ne se trouve plus dans le canton de Genève mais selon toute vraisemblance dans le canton de Bâle. En effet, la recourante se rendait souvent et pour une longue durée à Bâle, où vit son fils et sa famille. Outre les déclarations de son fils, la présence de la recourante dans la région bâloise est également confirmée par le fait que la quasi-totalité des retraits en espèces et des paiements ont eu lieu dans cette région et que c’est également dans cette ville que la recourante a consulté plusieurs médecins et encouru des frais de pharmacie entre 2017 et 2021. Enfin, elle a demandé le transfert officiel de son domicile dans le canton de Bâle.

Au vu de ce qui précède, c’est donc à juste titre que le SPC a nié l’existence d’un domicile et d’une résidence habituelle à Genève dès le 1er avril 2018 et ce pendant toute la période litigieuse.

16.         L’absence de domicile dans le canton de Genève entraîne des conséquences différentes selon s’il s’agit de prestations complémentaires fédérales ou cantonales.

16.1 Dès lors qu’un domicile à Genève constitue une condition impérative pour pouvoir bénéficier de prestations complémentaires cantonales, l’absence de domicile à Genève entraîne la suppression du droit auxdites prestations et, partant, la restitution de celles versées à tort pendant cette période.

16.2 Contrairement à la situation concernant les prestations complémentaires cantonales, l’absence de domicile à Genève n’entraîne pas forcément la suppression du droit aux prestations complémentaires fédérales, celles-ci impliquant un domicile en Suisse.

Or, dans le cas de la recourante, l’instruction de la cause a montré de nombreux indices en faveur d’un domicile à Bâle durant la période litigieuse (aveux et témoignages évoquant de nombreux séjours à Bâle, ensemble des retraits d’argent à Bâle, ensemble des frais médicaux concernant des professionnels de la santé situés à Bâle, présence de nombreux vêtements d’homme dans l’appartement à Genève).

En d’autres termes, la compétence pour le versement des prestations complémentaires fédérales est potentiellement passée à l’autorité compétente pour les bénéficiaires domiciliés à Bâle Ville.

Dans de telles circonstances, le SPC aurait dû annoncer le changement de domicile à l’autorité bâloise et, en cas de désaccord sur le domicile, des discussions avec ladite autorité auraient dû avoir lieu. Pendant cette période, le versement, par le SPC de Genève, aurait pu – voire dû – être considéré comme des avances, que l’autorité bâloise aurait, dans un second temps, remboursées.

Dans une telle hypothèse, le service intimé ne pouvait donc pas réclamer la restitution de prestations complémentaires fédérales ou du moins pas de l’intégralité des avances.

Aucune discussion ni coordination n’a toutefois eu lieu dans le cas d’espèce. Dans cette mesure, la Chambre de céans ne saurait purement et simplement confirmer la décision sur opposition, ce qui aurait pour conséquence que la recourante pourrait être poursuivie pour le remboursement de prestations complémentaires fédérales, alors qu’elle aurait potentiellement pu y prétendre des autorités bâloises.

16.3 Ainsi, dès lors que ces aspects procéduraux n’ont pas été examinés par le SPC, la décision sur opposition sera annulée et la cause lui sera renvoyée pour examen puis mise en œuvre des règles de coordination. En effet, ce n’est que s’il s’avérait que recourante n’était pas domiciliée en Suisse ou si, pour une raison ou une autre, aucun remboursement n’était effectué, que le SPC pourrait demander à la recourante la restitution des prestations complémentaires fédérales versées à tort.

17.         Dans ses écritures des 5 mai et 15 juillet 2022, le SPC a conclu à une reformatio in peius. Il a plus particulièrement considéré, dans un premier temps, que s’il devait s’avérer que la recourante n’avait déjà plus sa résidence habituelle dans le canton de Genève, c’était l’intégralité des prestations accordées pendant la période du 1er avril 2018 au 31 décembre 2019 qui devraient lui être réclamées (écriture du 5 mai 2022). Dans un deuxième temps, il a estimé qu’au vu des éléments récoltés dans le cadre de la présente procédure, il devait être considéré que la recourante n’avait plus ses domicile et résidence habituelle dans le canton de Genève depuis le 1er avril 2017 au moins et il a conclu à une reformatio in peius sans autres précisions (écriture du 15 juillet 2022).

Force est tout d’abord de constater que la période du 1er avril 2017 au 31 mars 2018 excède l’objet du litige, la première décision de restitution portant sur la période courant dès le 1er avril 2018. Par ailleurs, en avril 2021, le SPC éprouvait déjà des doutes concernant le domicile et la résidence effective de la recourante dans le canton de Genève dès le 1er avril 2018, dès lors qu’il a écrit à cette dernière que « depuis le mois de mars 2018, [son] appartement à Genève [était] occupé uniquement par [son] neveu, Monsieur G______, ce qui [faisait] que [son] centre d’intérêt n’[était] plus à Genève ». Il appartenait donc à l’intimé, à ce stade, d’effectuer des mesures d’instruction supplémentaires, ce qui lui aurait permis de réformer la décision de restitution au détriment de la recourante dans sa décision sur opposition du 30 juin 2021. Au lieu de cela, le SPC a procédé à de nouveaux calculs en toute connaissance de cause.

Pour tous ces motifs, la Chambre de céans n’entrera pas en matière sur la demande de reformatio in peius. Ce d’autant plus qu’il n’est pas impossible que les prestations complémentaires fédérales versées depuis le 1er avril 2018 soient finalement remboursées directement au SPC par l’autorité compétente du canton de Bâle, ce qui réduirait d’autant le montant total dû par la recourante. En effet, dans la mesure où c’est un montant total qui est réclamé à la recourante, il ne peut pas être exclu que l’éventuelle augmentation du montant à restituer au titre de prestations complémentaires cantonales soit compensée par les prestations complémentaires fédérales dont la restitution a été réclamée, éventuellement à tort, en cas de remboursement par l’autorité bâloise.

18.         Partant, au vu de ce qui précède, le recours du 26 juillet 2021 doit être partiellement admis et la décision sur opposition du 30 juin 2021 annulée. La cause sera renvoyée au SPC, notamment pour mise en œuvre des règles de coordination et nouvelle décision.

La recourante obtenant très partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario et 89H al. 1 LPA).

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable,

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Annule la décision sur opposition du 30 juin 2021.

4.        Renvoie la cause à l’intimé pour instruction complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

5.        Alloue à la recourante une indemnité de dépens de CHF 500.- à la charge de l’intimé.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le