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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/244/2022

ATAS/356/2023 du 23.05.2023 ( PC ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/244/2022 ATAS/356/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 23 mai 2023

Chambre 8

 

En la cause

A______

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______, née le ______ 1988, (ci-après : l’assurée) vit à Genève dans un foyer de l’Hospice général avec son époux, Monsieur B______, et leurs quatre enfants mineurs, C______ née le ______ 2013, D______ née le ______ 2015, E______ née le ______ 2016 et F______ née le ______ 2019.

b. Par formulaire reçu par le service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC) le 26 octobre 2020, l’assurée a sollicité des prestations complémentaires.

c. À teneur des pièces annexées à la demande, la famille percevait CHF 1'400.- d’allocations familiales par mois et n’avait ni fortune ni revenu. Le loyer du logement familial était de CHF 1'350.- par mois et les primes d’assurance-maladie de CHF 595.40 pour chaque époux et de CHF 152.90 pour chaque enfants (4 x CHF 152.90).

B. a. Par lettre du 3 novembre 2020, le SPC a indiqué à l’assurée qu’il ne pouvait pas entrer en matière sur sa demande de prestations faute pour cette dernière d’être au bénéfice d’une rente d’invalidité.

b. Le 9 novembre 2020, l’assurée a fait parvenir au SPC la décision d’octroi de rente reçue de l’office cantonal genevois de l’assurance-invalidité le 13 octobre 2020, dans laquelle l’assurée se voyait reconnaître le droit à une rente de l’assurance-invalidité avec effet au 1er septembre 2018 (CHF 1'770.- par mois) et des rentes pour ses enfants (4 x CHF 407.-).

c. Par courrier du 26 février 2021, l’office cantonal de la population et des migrations (OCPM) a attesté que l’époux de l’assurée résidait sur le territoire du canton depuis le 10 octobre 2014.

d. Par décision du 28 avril 2021, le SPC a informé l’assurée du fait que des prestations complémentaires cantonales (PCC) lui seraient allouées avec effet au 1er septembre 2018 et jusqu’au 30 avril 2021, puis des PCC et des prestations complémentaires fédérales (PCF) dès le 1er mai 2021 (CHF 1'784.- [PCF, part destinées aux primes d’assurance-maladie] et CHF 175.- [PCC]).

Le plan de calcul se présentait ainsi du 1er septembre au 31 décembre 2018 :

montants présentés

PCF

PCC

Dépenses reconnues

BESOINS VITAUX

49'095.00

84'939.00

LOYER

15'000.00

15'000.00

Loyer net

16'200.00

Charges locatives

2'160.00

Total des dépenses reconnues

64'095.00

99'939.00

Revenus déterminants

PRESTATIONS DE L'AVS/AI

26'724.00

38'052.00

Rentes de l'AVS/AI

38'052.00

REVENUS

40'610.95

40'610.95

revenu hypothétique du conjoint

62'416.15

FORTUNE

0.00

0.00

épargne

0.80

dette

-5.15

ALLOCATIONS FAMILIALES

12'000.00

4'800.00

12'000.00

Total du revenu déterminant

72'135.00

90'663.00

Dépenses reconnues - revenu déterminant

-8'040.00

9'276.00

prestations annuelles (PCF+PCC)

0.00

9'276.00

prestations mensuelles hors RIP (PCF+PCC)

0.00

773.00

Du 1er janvier au 30 septembre 2019, le plan de calcul était le suivant :

montants présentés

PCF

PCC

Dépenses reconnues

BESOINS VITAUX

49'515.00

85'642.00

LOYER

15'000.00

15'000.00

Loyer net

16'200.00

Charges locatives

2'160.00

Total des dépenses reconnues

64'515.00

100'642.00

Revenus déterminants

PRESTATIONS DE L'AVS/AI

26'952.00

38'376.00

Rentes de l'AVS/AI

38'376.00

REVENUS

40'663.05

40'663.05

revenu hypothétique du conjoint

62'494.25

FORTUNE

0.00

0.00

épargne

0.45

dette

-0.70

ALLOCATIONS FAMILIALES

12'000.00

4'800.00

12'000.00

Total du revenu déterminant

72'415.00

91'039.00

Dépenses reconnues - revenu déterminant

-7'900.00

9'603.00

prestations annuelles (PCF+PCC)

0.00

9'603.00

prestations mensuelles hors RIP (PCF+PCC)

0.00

801.00

Du 1er octobre au 31 décembre 2019, le plan de calcul était le suivant :

montants présentés

PCF

PCC

Dépenses reconnues

BESOINS VITAUX

63'075.00

85'642.00

LOYER

15'000.00

15'000.00

Loyer net

16'200.00

Charges locatives

2'160.00

Total des dépenses reconnues

78'075.00

100'642.00

Revenus déterminants

PRESTATIONS DE L'AVS/AI

40'776.00

40'776.00

Rentes de l'AVS/AI

40'776.00

REVENUS

40'663.05

40'663.05

revenu hypothétique du conjoint

62'494.25

FORTUNE

0.00

0.00

épargne

0.45

dette

-0.70

ALLOCATIONS FAMILIALES

16'800.00

16'800.00

16'800.00

Total du revenu déterminant

98'239.00

98'239.00

Dépenses reconnues - revenu déterminant

-20'164.00

2'403.00

prestations annuelles (PCF+PCC)

0.00

2'403.00

prestations mensuelles hors RIP (PCF+PCC)

0.00

201.00

Du 1er janvier au 31 décembre 2020, le plan de calcul était le suivant :

montants présentés

PCF

PCC

Dépenses reconnues

BESOINS VITAUX

63'075.00

85'642.00

LOYER

15'000.00

15'000.00

Loyer net

16'200.00

Charges locatives

2'160.00

Total des dépenses reconnues

78'075.00

100'642.00

Revenus déterminants

PRESTATIONS DE L'AVS/AI

40'776.00

40'776.00

Rentes de l'AVS/AI

40'776.00

REVENUS

40'807.40

40'807.40

revenu hypothétique du conjoint

62'710.80

FORTUNE

0.00

0.00

épargne

126.25

ALLOCATIONS FAMILIALES

16'800.00

16'800.00

16'800.00

Total du revenu déterminant

98'383.00

98'383.00

Dépenses reconnues - revenu déterminant

-20'308.00

2'259.00

prestations annuelles (PCF+PCC)

0.00

2'259.00

prestations mensuelles hors RIP (PCF+PCC)

0.00

189.00

Le plan de calcul se présentait dès le 1er janvier 2021 (favorable) :

montants présentés

PCF

PCC

Dépenses reconnues

BESOINS VITAUX

- A______

- B______

- C______

- D______

- E______

- F______

LOYER

Loyer net

Charges locatives

Assurance oblig.

Total

 

 

 

 

 

 

 

 

18'996.00

2'880.00

22'420.80

 

29'415.00

--

10'260.00

10'260.00

6'840.00

6'840.00

15'000.00

 

 

21'408.00

100'023.00

 

43'044.00

--

10'260.00

10'260.00

8'609.00

8'609.00

15'000.00

 

 

21'408.00

122'758.00

Revenus déterminants

Report de prestations

 

 

21'408.00

PRESTATIONS DE L'AVS/AI

 

41'100.00

41'100.00

Rentes de l'AVS/AI

41'100.00

REVENUS

41'359.60

41'359.60

revenu hypothétique du conjoint

63'539.10

FORTUNE

0.00

0.00

épargne

126.25

ALLOCATIONS FAMILIALES

16'800.00

16'800.00

16'800.00

Total du revenu déterminant

99'260.00

120'668.00

Dépenses reconnues - revenu déterminant

763.00

2'090.00

prestations annuelles (PCF+PCC)

21'408.00

2'090.00

prestations mensuelles hors RIP (PCF+PCC)

0.00

175.00

Réduction individuelle des primes

- A______

- B______

- C______

- D______

- E______

- F______

 

606.00

606.00

143.00

143.00

143.00

143.00

 

Le plan de calcul se présentait dès le 1er janvier 2021 défavorable selon la réforme (calcul non retenu) :

montants présentés

PCF

PCC

Dépenses reconnues

BESOINS VITAUX

- A______

- B______

- C______

- D______

- E______

- F______

LOYER

Loyer net

Charges locatives

Assurance oblig.

Total

 

 

 

 

 

 

 

 

18'996.00

2'880.00

22'420.80

 

29'415.00

--

7'200.00

6'000.00

5'000.00

4'165.00

21'876.00

 

 

21'408.00

95'064.00

 

43'044.00

--

13'044.00

13'044.00

8'609.00

8'609.00

21'876.00

 

 

21'408.00

129'634.00

Revenus déterminants

Report de prestations

--

PRESTATIONS DE L'AVS/AI

41'100.00

41'100.00

Rentes de l'AVS/AI

41'100.00

REVENUS

50'831.30

50'831.30

revenu hypothétique du conjoint

63'539.10

FORTUNE

0.00

0.00

épargne

126.25

ALLOCATIONS FAMILIALES

16'800.00

16'800.00

16'800.00

Total du revenu déterminant

108'731.00

108'731.00

Dépenses reconnues - revenu déterminant

-13'667.00

20'903.00

prestations annuelles (PCF+PCC)

0.00

20'903.00

prestations mensuelles hors RIP (PCF+PCC)

0.00

0.00

Réduction individuelle des primes

- A______

- B______

- C______

- D______

- E______

- F______

 

590.30

590.30

140.35

140.35

140.35

140.35

 

C. a. Par lettre du 11 mai 2021, l’assurée a formé opposition à cette décision en contestant le revenu hypothétique retenu par le SPC pour son époux, lequel était totalement incapable de travailler depuis de nombreuses années. Elle a joint un arrêt de travail de 100% dès le 1er janvier 2021 du docteur G______, spécialiste FMH en médecine interne, à titre de preuve. L’assurée contestait également le montant retenu à titre de loyer en faisant valoir que son loyer était de CHF 1'823.- par mois depuis le 15 décembre 2020. Enfin, elle ne comprenait pas pourquoi ses filles C______ et D______ étaient exclues des PCF à certaines périodes alors que leurs ressources n’avaient pas varié et étaient identiques à celles de E______ et F______.

b. Le 28 octobre 2021, le SPC a reçu le curriculum demandé, lequel indiquait que l’époux de l’assurée avait travaillé en Irak de 1994 à 1997 dans une entreprise de sachets en plastiques et de 1998 à 2001 dans une entreprise de briques, puis qu’il avait suivi une formation d’allemand en Allemagne en 2001, avant de travailler à Cologne pour H______ en 2002, pour I______ en 2002 et 2003, dans un restaurant depuis une date indéterminée jusqu’en 2011, ainsi qu’en tant que propriétaire d’une entreprise d’outils et de pièces détachées d’automobiles de 2006 à 2014. Il avait suivi à Genève une formation et des cours de français de 2015 à 2018 et avait travaillé en 2017 et 2018 chez J______ SA en tant que chauffeur-livreur. En Irak, il avait suivi une Haute école spécialisée en commerce de 1997 à 2000. Le kurde et l’arabe étaient ses langues maternelles. Il parlait et écrivait en outre l’allemand, le perse et le français. Enfin, il parlait la langue turque, sans savoir l’écrire. Le SPC a également reçu un rapport du docteur K______, spécialiste FMH en psychiatrie et en psychothérapie, daté du 12 octobre 2021, à teneur duquel ce médecin a dressé l’anamnèse de M. B______ et a retenu que ce dernier souffrait depuis son arrivée en Allemagne (après sa fuite d’Irak) d’anxiété, de stress post traumatique, panique ou phobique, puis de dépression. Il souffrait en outre de douleurs chroniques (dos, nuque, maux de tête), de troubles du sommeil et de problèmes de mouvement. Il entendait depuis des années une voix d’homme. Le « fond psychosocial [était] énormément encombrant ». Pour le surplus, le document tel que traduit de l’allemand ne permet pas de comprendre l’évaluation que ce médecin fait de la capacité de travail de son patient. L’épouse a indiqué au SPC que son époux était malade depuis 2018. Il avait suivi des thérapies en vain et son médecin généraliste, le Dr G______, avait fini par le mettre en arrêt de travail en janvier 2021.

c. Par décision du 29 novembre 2021, le SPC a indiqué à l’assurée qu’il avait recalculé son droit aux PCC et PCF, selon l’ancien droit plus favorable à cette dernière. Dès le 1er novembre 2021, elle avait droit à des PCC de CHF 175.- auxquelles s’ajoutaient dès le 1er décembre 2021 des PCF de CHF 1'784.- à titre de part réservée au règlement des primes d’assurance-maladie.

Le plan de calcul se présentait dès le 1er novembre 2021 comme suit :

montants présentés

PCF

PCC

Dépenses reconnues

BESOINS VITAUX

- A______

- B______

- C______

- D______

- E______

- F______

LOYER

Loyer net

Charges locatives

Assurance oblig.

Total

 

 

 

 

 

 

 

 

18'996.00

2'880.00

22'420.80

 

29'415.00

--

10'260.00

10'260.00

6'840.00

6'840.00

15'000.00

 

 

21'408.00

100'023.00

 

43'044.00

--

13'044.00

13'044.00

8'609.00

8'609.00

15'000.00

 

21'408.00

122'758.00

Revenus déterminants

Report de prestations

21'408.00

PRESTATIONS DE L'AVS/AI

41'100.00

41'100.00

Rentes de l'AVS/AI

41'100.00

REVENUS

41'359.60

41'359.60

revenu hypothétique du conjoint

63'539.10

FORTUNE

0.00

0.00

épargne

126.25

ALLOCATIONS FAMILIALES

16'800.00

16'800.00

16'800.00

Total du revenu déterminant

99'260.00

120'668.00

Dépenses reconnues - revenu déterminant

763.00

2'090.00

prestations annuelles (PCF+PCC)

21'408.00

2'900.00

prestations mensuelles hors RIP (PCF+PCC)

0.00

175.00

Réduction individuelle des primes

- A______

- B______

- C______

- D______

- E______

- F______

 

606.00

606.00

143.00

143.00

143.00

143.00

d. Par une autre décision du 29 novembre 2021, l’assurée a été informée du fait qu’elle avait droit à CHF 95.00 par mois à titre d’aide sociale dès le 1er décembre 2021.

e. Par décision du 1er décembre 2021, l’assurée a été informée de ses droits dès le 1er janvier 2022.

f. Par un pli du même jour, l’assurée a été informée de son droit à l’aide sociale de CHF 124.00 dès le 1er janvier 2022.

g. Le 7 décembre 2021, l’assurée s’est opposée à la décision du 29 novembre 2021 relatives aux prestations complémentaires, dans la mesure où le SPC tenait toujours compte d’un revenu hypothétique de son époux. Elle rappelait avoir déjà fait opposition sur ce point et avoir envoyé les documents requis. Une demande de prestations auprès de l’OAI avait été déposée en juillet 2021 par son époux.

h. Par décision sur opposition du 10 décembre 2021, le SPC a rejeté l’opposition du 11 mai 2021, reçue le 14 mai 2021, contre la décision du 28 avril 2021. L’époux de l’assurée était âgé de 42 ans et n’exerçait pas d’activité lucrative. Il parlait six langues, dont le français et l’allemand, avait été diplômé en commerce en Irak, et était au bénéfice d’une large expérience professionnelle acquise en Irak, en Allemagne (restauration et transport) et en Suisse (chauffeur-livreur). Il résidait en Suisse depuis octobre 2014. Le SPC rappelait que tout assuré et son conjoint devaient réduire le dommage en mettant à profit la capacité de travail de celui-ci. Les éléments médicaux transmis n’indiquaient pas la capacité de travail du conjoint de l’assurée dans une activité adaptée à son état de santé. En outre, l’OAI n’avait pas encore statué sur la demande déposée en juillet 2021, le service médical régional de l'assurance-invalidité (ci-après : SMR) n’avait pas rendu de rapport et aucune recherche d’emploi n’avait été produite. Il n’était ainsi pas démontré à un degré de vraisemblance suffisant que le conjoint de l’assurée n’était pas en mesure d’exercer une activité adaptée. Quant au loyer, jusqu’au 31 décembre 2022, sa prise en compte était plafonnée à CHF 15'000.- par an au regard des PCC et des PCF, alors que dès le 1er janvier 2022, le loyer pris en compte pour un logement à Lancy pour quatre personnes et plus était de CHF 22'500.-. L’ancien droit a été considéré comme plus favorable à l’assurée et à sa famille, puisque sous le nouveau droit, ces derniers n’auraient pas eu droit aux prestations complémentaires. Le loyer retenu était donc à juste titre de CHF 15'000.-. Enfin, la prise en compte des enfants était dégressive, de sorte que deux d’entre eux n’avaient pas été pris en compte dans le calcul, leurs revenus excédant leurs besoins.

i. Par décision du 19 janvier 2022, le SPC a statué sur l’opposition formée le 7 décembre 2021 contre la décision du 29 novembre 2021 et l’a rejetée.

j. À la même date, le SPC a reçu un deuxième rapport médical du Dr K______ dans lequel ce dernier indiquait qu’après son arrivée en Allemagne, son patient n’avait pu travailler que durant une courte période en raison de ses atteintes à la santé. A présent, son état de santé et son degré d’adaptation ne lui permettaient pas d’exercer une activité professionnelle (rapport du 17 janvier 2022).

D. a. Par acte du 24 janvier 2022, l’assurée a saisi la Cour de céans d’un recours contre la décision du 10 décembre 2021 et contre celle du 19 janvier 2022, en concluant à leur annulation en tant qu’elles retenaient un revenu hypothétique dans le calcul des prestations. Elle a joint un rapport médical supplémentaire pour démontrer que son époux était incapable de travail dans toute activité depuis le 1er janvier 2021 ainsi que des pièces démontrant qu’avant cela, ce dernier avait fait des recherches d’emploi et de stage en sus d’acte de candidature en personne (JUMBO, PRO, La POSTE, VEDIA, NAVILLE, VAUDAUX SA, Fondation TRAJETS). Il avait également fait un stage au printemps 2019, ce qui démontrait sa volonté de retrouver un emploi. Dans la mesure où il fallait considérer que son époux était entièrement incapable de travailler, l’assurée souhaitait que le SPC fasse un nouveau calcul selon le nouveau et l’ancien droit et tienne compte de ses griefs quant au montant du loyer et de la prise en compte de deux enfants sur ses quatre enfants dans les calculs.

b. Le 28 février 2022, l’assurée a complété son recours. Il existait dans le dossier de l’OAI deux rapports médicaux du Dr G______ attestant d’une incapacité totale de travail dans toute activité ainsi qu’un rapport de la docteure L______ attestant d’une incapacité totale dans l’activité habituelle et un pronostic limité dans une activité adaptée. En outre, son époux n’avait pas l’expérience professionnelle retenue par le SPC. Il n’avait travaillé en Suisse qu’à 10% pour une entreprise de chauffeur-livreur du mois de mars 2017 au mois de février 2018. En Allemagne, il n’avait occupé que des postes sans qualifications essentiellement dans la restauration ou dans d’autres domaines physiques. Quant aux langues, son époux « se débrouillait à l’oral » en turc, en perse et en français. Dans cette dernière langue, il avait un niveau moyen à l’oral, mais ne maîtrisait pas bien la lecture et ne savait pas l’écrire. Il avait suivi quelques cours élémentaires dispensés par la Croix rouge ou par l’Université ouvrière de Genève.

c. Dans sa réponse du 28 mars 2022, le SPC a conclu au rejet du recours. Les éléments au dossier ne permettaient pas de retenir que le conjoint de l’assurée avait fait suffisamment de recherches d’emploi avant le 31 décembre 2020 ni qu’il serait en incapacité totale de travailler dans toute activité depuis le 1er janvier 2021, son psychiatre traitant n’ayant à cet égard pas établi de diagnostic entrant dans la nomenclature de la classification internationale des maladies (ci-après : CIM). Les difficultés en français n’étaient pas, selon la jurisprudence de la Cour de céans, un obstacle à retrouver un emploi, à l’instar du conjoint d'un assuré qui n’avait plus travaillé depuis des années.

d. Par ordonnance du 5 avril 2022, la chambre de céans a formellement joint les deux procédures de recours.

e. Par acte du 25 avril 2022, l’assurée a répliqué et a adressé à la Cour de céans un certificat du Dr K______ indiquant que son époux était en incapacité de travail totale en raisons d’une « profonde déstabilisation bio, psycho-sociale ». Il souffrait de lombalgies invalidantes, d'un stress post-traumatique avec un trouble anxio-dépressif.

f. Le 6 décembre 2022, la Cour de céans a entendu l'époux de la recourante, M. B______, à titre de personne appelée à donner des renseignements. Ce dernier a exposé ce qui suit :

« Jusqu'à présent, je n'ai pas reçu de décision de l'AI. Elle ne m'a pas non plus proposé une mesure d'orientation professionnelle, ni un stage. Aucune expertise n'est actuellement en cours.

Depuis deux ans, je suis suivi par un psychiatre à Genève en raison d'une dépression. En effet, mes troubles dépressifs s'étaient aggravés, car j'ai eu un accident et mes filles ont des problèmes d'autisme ».

« Le traitement prescrit par mon psychiatre n'est pas efficace.

Je parle allemand avec mon psychiatre.

Lorsque je suis arrivé en 2014 en Suisse, j'ai fait beaucoup de recherches d'emploi, dans les restaurants, les supermarchés et à l'aéroport. J'ai également demandé à des proches s'ils avaient connaissance d'offres d'emploi. J'ai même proposé aux employeurs de travailler gratuitement pendant dix jours, afin qu'ils puissent apprécier la qualité de mon travail. Je m'étais également présenté dans les usines, notamment chez Rolex. Je me rendais personnellement chez les différents employeurs et leur donnais mon CV. Néanmoins, personne n'a voulu me donner du travail. J'ai aussi envoyé, en réponse à des offres d'emploi dans les journaux et sur internet, mon CV.

Je confirme avoir travaillé à 10% du 1er mars 2017 au 30 janvier 2018 comme chauffeur-livreur. Ce travail s'était très bien passé. Ensuite, on m'a proposé un stage d'un mois chez M______. Ce stage s'est aussi très bien passé. Après ce stage, j'ai eu un accident à la main et j'ai dû subir deux opérations. Pendant trois mois, j'ai suivi une physiothérapie. Pendant six mois, je portais en outre une attelle à la main.

Je ne me suis jamais inscrit au chômage, mais j'étais par contre suivi par l'agence TRT pour trouver un emploi.

J'ai consulté 5 médecins qui m'ont tous dit que j'étais incapable de travail et que je devais déposer une demande de prestations à l'assurance-invalidité.

Ma femme et moi faisons ensemble le ménage et nous nous occupons des enfants. Il est vrai que, depuis quatre ans, j'ai des maux de dos, de sorte que certains travaux de ménage me sont pénibles. Toutefois, nous n'avons pas le choix, il faut le faire.

En ce qui concerne les enfants, j'amène le lundi une enfant à la logopédie, puis je viens la chercher et l'amène à l'école. Le mardi, j'amène un autre enfant chez le logopédiste, puis à l'école à Confignon. Parallèlement, ma femme amène également un enfant le mardi au Centre thérapeutique Agathe. Deux de nos enfants bénéficient par ailleurs de chauffeurs pour les amener à l'école ».

Quant à la recourante, elle a déclaré

« Je confirme que nos quatre filles souffrent de problèmes du spectre autistique. Elles doivent suivre beaucoup de traitements différents, ce qui nous demande énormément de temps pour les y amener. Mon mari et moi sommes épuisés par cette situation et nous n'arrivons pas à nous en remettre. À cela s'ajoutent nos maladies respectives, ce qui rend la situation encore plus difficile ».

g. À la demande de la Cour de céans, l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI) a produit le dossier du mari de la recourante dans le cadre de la présente procédure. Ce dossier contient notamment les pièces suivantes :

-          Rapport du 18 juin 2020 du docteur N______ de la Clinique de la douleur, faisant état de lombalgies chroniques sans substrat anatomique et d'une situation socio-économique difficile avec trois filles en traitement pour des troubles de la communication ;

-          Rapport du 3 août 2021 du Dr G______ attestant une incapacité totale de travailler en raison d'une dépression moyenne d'intensité sévère et d'une lombalgie chronique extrêmement invalidante ;

-          Rapport du 3 août 2021 de la Dre L______, médecin à l'Hôpital de la Tour, attestant des lombalgies communes chroniques et un syndrome douloureux chronique ; l'assuré ne maitrisait pas le français et disait être à la recherche d'un emploi, consacrer sa journée à garder les enfants et à les emmener aux différents rendez-vous médicaux ; il avait été licencié en 2016 en raison de la fermeture de l'entreprise ; sa capacité de travail était nulle dans l'activité habituelle et le pronostic pour la reprise d'une activité professionnelle adaptée était mitigé en raison de facteurs extra-médicaux, notamment la méconnaissance du français et le manque de motivation pour la recherche d'un emploi ;

-          Rapport du 9 août 2021 du docteur O______, médecin à l'Hôpital de la Tour, selon lequel l'assuré était totalement incapable de travailler en raison de lombalgies chroniques non déficitaires dans un contexte de surcharge et stress psychosocial important ;

-          Rapport du 12 octobre 2021 du Dr K______, détaillant les troubles psychiques de l'assuré ;

-          Rapport du 15 février 2022 du Dr K______ attestant une incapacité de travail totale dans toute activité et que la capacité de travail était diminuée depuis 2011 ;

-          Rapport du Dr G______ du 31 août 2022 confirmant son rapport précédent ;

-          Rapport du Dr K______ du 5 septembre 2022, dans lequel il pose les diagnostics de trouble de stress post-traumatique, de troubles dépressifs persistants (dysthymie) et de troubles catatoniques dus à un trouble mental (dépression) ;

-          Rapport du 24 octobre 2022 des docteurs P______ et Q______ du service de rhumatologie des HUG attestant une incapacité de travail totale ;

-          Avis du SMR du 18 janvier 2023 considérant qu'une expertise bidisciplinaire avec volets rhumatologique et psychiatrique était nécessaire, dans la mesure où les rapports médicaux, notamment psychiatriques, étaient insuffisants.

h. Par écriture du 27 février 2023, l'intimé a persisté dans ses conclusions, en constatant que le SMR avait exposé ne pas être en mesure de suivre la prise de position du psychiatre traitant, selon lequel l'incapacité de travail était toujours totale. Une expertise médicale étant nécessaire, selon ledit service, l'intimé a considéré qu'il n'était pas établi au degré de la vraisemblance prépondérante que l'époux de la recourante était dans l'incapacité de reprendre un emploi ou d'en rechercher un.

i. Le 9 mars 2023, la recourante a produit les pièces requises par la Cour de céans concernant les périodes d'incapacité de travail de son époux.

j. À la demande de la Cour de céans, l'intimé a précisé ses calculs concernant le revenu hypothétique de l'époux de la recourante et les revenus des enfants, par écriture du 4 avril 2023. Ce faisant, il s'est rendu compte avoir tenu compte à tort de quatre enfants pour la période du 1er septembre 2018 à septembre 2019, alors même que la quatrième enfant n'était pas encore née. Pour les prestations complémentaires fédérales, il aurait dû prendre en compte deux enfants et une enfant exclue, et pour les prestations complémentaires cantonales, trois enfants auraient dû être incluses pour les dépenses et revenus. Il en résultait un trop perçu de CHF 2'820.- pour 2018 et de CHF 6'408.- pour 2019.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 En matière de prestations complémentaires fédérales, les décisions sur opposition sont sujettes à recours dans un délai de 30 jours (art. 56 al. 1 et 60 al. 1er LPGA ; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité [LPFC - J 4 20]) auprès du tribunal des assurances du canton de domicile de l’assuré (art. 58 al. 1 LPGA).

S’agissant des prestations complémentaires cantonales, l’art. 43 LPCC ouvre les mêmes voies de droit.

Les délais sont suspendus notamment du 18 décembre au 2 janvier inclusivement (art. 43 LPCC ; art. 43B let. c LPCC ; art. 38 al. 4 let. c et 60 LPGA).

Interjetés dans les formes et les délais légaux, les recours sont recevables, compte tenu de cette suspension (art. 56 al. 1 et 60 LPGA ; art. 43 LPCC).

2.             Le litige porte sur le montant du droit aux PCF et PCC durant la période du 1er septembre 2018 au 31 décembre 2021. La recourante conteste le calcul de celles-ci en ce qui concerne le revenu hypothétique retenu pour son époux, le montant du loyer et le nombre des enfants qui doit être inclus dans le calcul.

3.             Dans le cadre de la réforme de la LPC, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, de nombreuses dispositions ont été modifiées (FF 2016 7249 ; RO 2020 585).

D’après les principes généraux en matière de droit transitoire, on applique, en cas de changement de règles de droit et sauf réglementation transitoire contraire, les dispositions en vigueur lors de la réalisation de l’état de fait qui doit être apprécié juridiquement et qui a des conséquences juridiques (ATF 140 V 41 consid. 6.3.1 et les références). Dans la mesure où le recours porte sur le droit aux prestations complémentaires du 1er septembre 2018 au 31 décembre 2021, le présent litige reste soumis à l'ancien droit pour les prestations dues jusqu'au 31 décembre 2020.

Pour les prestations dues dès le 1er janvier 2021, le nouveau droit est applicable. Toutefois, dans la mesure où la recourante était, au 1er janvier 2021, déjà bénéficiaire de prestations complémentaires, le nouveau droit est applicable pour autant qu’il n’entraîne pas, dans son ensemble, une diminution de la prestation complémentaire annuelle ou la perte du droit à celle-ci (cf. Dispositions transitoires de la modification du 22 mars 2019 – Réforme des PC).

4.             Se pose en premier lieu la question de savoir si l'intimé a pris en considération à raison un revenu hypothétique pour l'époux de la recourante.

4.1 L’art. 9 al. 1 LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants. Figurent notamment au nombre des revenus déterminants énumérés à l’art. 11 al. 1 let. a LPC : deux tiers des ressources en espèces ou en nature provenant de l’exercice d’une activité lucrative, pour autant qu’elles excèdent annuellement CHF 1’500.- pour les couples.

4.2 Au niveau cantonal, conformément à l'art. 15 al. 1 LPCC, le montant de la prestation complémentaire correspond également à la différence entre les dépenses reconnues et le revenu déterminant de l'intéressé. Le revenu déterminant est en principe calculé, conformément aux règles fixées dans la loi fédérale et ses dispositions d'exécution (art. 5 LPCC).

4.3 Pour le revenu hypothétique à prendre en compte, les organes PC se réfèrent aux tables de « l’Enquête suisse sur la structure des salaires » (ci-après : ESS). Ce faisant, il s’agit de salaires bruts. Afin de fixer le montant, on tiendra compte des conditions personnelles telles que l’âge, l’état de santé, les connaissances linguistiques, la formation professionnelle, l’activité exercée précédemment, la durée d’inactivité, ou les obligations familiales (enfants en bas âge par exemple).

Du revenu brut ainsi fixé, on déduit les cotisations obligatoires dues aux assurances sociales de la Confédération (AVS, AI, APG, AC, AF, AA) et, le cas échéant, les frais de garde des enfants au sens du ch. 3421.04 des Directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI, dans leur état au 1er janvier 2018 (ci-après : DPC). Il faut ensuite déduire du revenu net le montant non imputable selon le ch. 3421.04 DPC, le solde étant pris en compte pour les deux tiers. Le montant global de la franchise doit être pris en compte intégralement même si le revenu hypothétique n’est retenu que pendant une partie de l’année déterminante pour le calcul de la prestation complémentaire (ch. 3482.04 DPC).

4.4 Pour les personnes vivant à domicile, le montant annuel de la prestation ne peut dépasser, dans l’année civile, le quintuple du montant annuel minimum de la rente simple de vieillesse fixée à l’art. 34 al. 5 de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10), sous déduction du montant des prestations complémentaires fédérales à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité déjà versées (art. 15 al. 2 LPCC).

4.5 Selon l’art. 11 al. 1 let. g LPC, les revenus déterminants comprennent notamment les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s’est dessaisi.

Par dessaisissement au sens de l'art. 11 al. 1 let. g LPC, il faut entendre, en particulier, la renonciation à des éléments de revenu ou de fortune sans obligation juridique ni contre-prestation équivalente (ATF 120 V 187 consid. 2b).

Cette disposition est directement applicable lorsque le conjoint d'une personne assurée s'abstient de mettre en valeur sa capacité de gain (arrêt du Tribunal fédéral 8C_258/2008 du 12 décembre 2008 consid. 4). Le devoir de contribuer à l’entretien de la famille au sens de l’art. 163 du Code civil (CC – RS 210) fait en effet partie des obligations des époux (arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 18/99 du 22 septembre 2000 consid. 2b).

Il appartient à l'administration ou, en cas de recours, au juge d'examiner si l'on peut exiger de l'intéressé qu'il exerce une activité lucrative et, le cas échéant, de fixer le salaire qu'il pourrait en retirer en faisant preuve de bonne volonté. Pour ce faire, il y a lieu d'appliquer à titre préalable les principes du droit de la famille, compte tenu des circonstances du cas. Les critères décisifs auront notamment trait à l'âge de la personne, à son état de santé, à ses connaissances linguistiques, à sa formation professionnelle, à l'activité exercée jusqu'ici, au marché de l'emploi, et le cas échéant, au temps plus ou moins long pendant lequel elle aura été éloignée de la vie professionnelle (ATF 134 V 53 consid. 4.1 et les références).

Il résulte clairement de la jurisprudence fédérale que, pour déterminer si une activité professionnelle est exigible dans le cadre de l'examen du droit aux prestations complémentaires, les critères sont différents de ceux ouvrant le droit aux prestations de l'assurance-invalidité. En effet, pour cette dernière, seule est pertinente l'atteinte à la santé à caractère invalidant, à l'exclusion de facteurs psychosociaux ou socio-culturels, tels que l'âge de la personne, ses connaissances linguistiques ou son état de santé non objectivé sur le plan médical (ATF 127 V 294 consid. 5a).

4.6 S'agissant de la casuistique, le Tribunal fédéral a jugé que l'on pouvait exiger d'une épouse âgée de 39 ans atteinte de fibromyalgie et mère de trois enfants de 6, 9 et 12 ans qu'elle exerce une activité lucrative au moins à mi-temps, compte tenu de l’aide que pouvait lui amener son conjoint (arrêt du Tribunal fédéral 8C_470/2008 du 29 janvier 2009 consid. 5.3). Il a également confirmé que l'on pouvait raisonnablement exiger d'une femme de 40 ans, en bonne santé et mère de sept enfants, dont le dernier était âgé de 2 ans, qu'elle augmentât son temps de travail à concurrence de 50% (arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 29/04 du 9 novembre 2004 consid. 4.4).

4.7 La Cour de céans a, quant à elle, exclu tout gain potentiel pour une épouse n'ayant aucune formation, ne parlant pratiquement pas le français et ayant quatre enfants dont deux en bas âge (ATAS/750/2004 du 28 septembre 2004 consid. 4). En revanche, un taux d'activité de 50% a été admis pour une épouse ayant à charge quatre enfants, dont les aînés étaient âgés de 12 à 14 ans, et ce jusqu’à la scolarisation de son dernier né (ATAS/468/2004 du 17 juin 2004 consid. 5). Une capacité de travail de 50% a été admise dans le cas d'une femme de 40 ans, sans enfant, dont la fibromyalgie n'était pas invalidante du point de vue de l'assurance-invalidité (ATAS/1445/2007). Dans une affaire concernant l'épouse d'un bénéficiaire de prestations complémentaires, âgée de 39 ans, avec trois enfants, dont un seul encore mineur, qui n'avait pratiquement jamais travaillé depuis son arrivée en Suisse en 1992 et qui était atteinte de fibromyalgie et de fatigue chronique, la Cour de céans a considéré que même si cette affection n'était pas encore invalidante pour l'assurance-invalidité, la prise en compte d'un gain potentiel pour les mois précédant l'octroi de la rente d'invalidité, n'était pas envisageable (ATAS/1021/2007). La prise en compte d'un gain hypothétique de l'épouse correspondant à une activité à 80% a été confirmée dans le cas d'une épouse, âgée de 48 ans au moment de la décision litigieuse, qui s'exprimait aisément en français au bénéfice d'une formation de coiffeuse, qui avait travaillé à plusieurs reprises depuis son arrivée en Suisse et n'avait été que provisoirement éloignée de la vie professionnelle. Sa capacité de travail était entière dans une activité respectant certaines restrictions bien définies, mais une réduction de la capacité de travail exigible de l'ordre de 20% était admise, compte tenu notamment des problèmes de santé (ATAS/1285/2013). Enfin, elle a jugé qu'il était raisonnablement exigible de la part d'une épouse âgée de 48 ans au moment de la décision litigieuse, en bonne santé et sans formation professionnelle spécialisée, ne parlant pas le français, qui avait choisi de travailler à 20% au cours des dix dernières années pour s'occuper de son fils, qu'elle reprenne une activité à 100% (ATAS/837/2013).

4.8 Selon le ch. 3424.07 DPC, aucun revenu hypothétique n’est pris en compte chez le bénéficiaire de PC à l’une ou l’autre des conditions suivantes : (i) si, malgré tous ses efforts, sa bonne volonté et les démarches entreprises, l’intéressé ne trouve aucun emploi. Cette hypothèse peut être considérée comme réalisée lorsqu’il s’est adressé à un office régional de placement (ORP) et prouve que ses recherches d’emploi sont suffisantes qualitativement et quantitativement ; (ii) lorsqu’il touche des allocations de chômage ; (iii) s’il est établi que sans la présence continue de l’intéressé à ses côtés, l’autre conjoint devrait être placé dans un home ou un établissement hospitalier ; (iv) si l’intéressé a atteint sa 60ème année.

5.             Dans le domaine des assurances sociales, le juge fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

6.              

6.1 En l'espèce, il ressort du dossier médical que tous les médecins traitants attestent une incapacité de travail totale du mari de la recourante. Selon le Dr G______, celle-ci a débuté le 1er janvier 2021.

Par ailleurs, les médecins ont posé des diagnostics figurant dans les classifications des maladies psychiatriques, tel que le trouble de stress post-traumatique, les troubles dépressifs persistants (dysthymie) et troubles catatoniques dus à un trouble mental (dépression ; cf. rapport du Dr K______ du 5 septembre 2022). Au demeurant, les principes jurisprudentiels s'appliquant à l'assurance-invalidité pour la reconnaissance de troubles psychiques ne sont pas applicables dans le cadre de la détermination de la capacité de travail pour déterminer l'exigibilité de l'exercice d'une activité professionnelle, du moins tant que l'assurance-invalidité n'a pas statué sur le droit aux prestations.

Au vu des rapports unanimes des médecins, la chambre de céans ne peut que constater que l'époux ne peut pas travailler depuis janvier 2021, de sorte qu'aucun revenu hypothétique ne peut être retenu pour 2021, même si l'OAI ne s'est pas encore formellement prononcé sur son invalidité.

6.2 Reste à déterminer si le conjoint de la recourante aurait pu travailler entre septembre 2018, date du début du droit aux prestations complémentaires, et décembre 2020 ou s'il doit être admis que malgré tous ses efforts, sa bonne volonté et les démarches entreprises, il n'a trouvé aucun emploi durant cette période. Il faut relever à cet égard que la recourante ne conteste pas qu'il est en principe exigible que son époux travaille.

Celui-ci affirme avoir entrepris énormément de recherches d'emploi en Suisse, notamment chez JUMBO, PRO, La POSTE, VEDIA, NAVILLE, VAUDAUX SA, Fondation TRAJETS. Il a également fait un stage au printemps 2019. À l'appui de ses dires, il a produit les lettres du 20 août 2018 de JUMBO, du 26 septembre 2018 de PRO répondant négativement à son offre de candidature spontanée pour un stage, le formulaire pour une formation TRT non daté, les lettres du 22 juillet 2018 de VAUDAUX SA, du 28 août 2018 de la Fondation TRAJETS, du 15 octobre 2018 de NAVILLE DISTRIBUTION SA et du 13 février 2019 de la POSTE SA, l'informant ne pas pouvoir donner suite à son offre d'emploi spontanée, ainsi que le contrat pour un accord de collaboration du 8 février au 8 août 2019 avec l'Agence de placement éthique et professionnel (ci-après : TRT). Il a également transmis le contrat de stage conclu avec cette dernière agence pour la période du 11 mars au 5 avril 2019.

Les pièces produites établissent certes que l'époux de la recourante a fait des efforts pour trouver un emploi. Cependant, il ne parvient pas à prouver avoir effectué des offres d'emploi en nombre suffisant, tel que cela est exigé par les autorités de chômage (10 recherches d'emploi par mois). En effet, à partir de septembre 2018, soit le début du droit aux prestations complémentaires, seules trois recherches d'emploi sont documentées. Tout au plus peut-il être admis qu'il n'était pas apte au placement durant le stage entre le 11 mars et le 5 avril 2019.

Par ailleurs, il résulte des pièces produites par la recourante le 9 mars 2023, que son époux était en incapacité de travail du 28 août au 28 septembre 2018 et du 4 avril au 21 mai 2019.

Partant, un gain potentiel ne peut pas être pris en compte durant environ un mois en 2018 et deux mois en 2019, avec la durée du stage.

7.             Se pose ensuite la question de savoir quel revenu l'époux de la recourante aurait pu réaliser.

7.1 L'intimé a retenu pour 2018 un salaire net de CHF 62'416.15 à ce titre, pour 2019 de CHF 62'494.25 et pour 2020 de CHF 62'710.80, respectivement les deux tiers, après déduction de la franchise forfaitaire de CHF 1'500.-.

L'intimé s'est fondé sur les ESS 2014 et 2016, tableau TA 1, une durée normale du travail en 41,7 heures par semaine en 2018, 2019 et 2020, ainsi que l'évolution des salaires. Des montants obtenus, il a déduit les cotisations sociales dues de 7,621% en 2018 et 2019, ainsi que de 7,771% en 2020.

Toutefois, l'ESS 2018 a déjà été publiée le 21 avril 2020 (étant précisé que le tableau T1_tirage_skill_level a été corrigé le 8 novembre 2018) et était donc déjà disponible au moment des décisions litigieuses. Selon ces statistiques, le revenu médian pour les hommes dans les activités physiques et manuelles était en 2018 de CHF 65'004.-. En tenant compte de la durée normale du travail de 41,7 heures en 2018, ce salaire s'élève à CHF 67'766.67. Toutefois, compte tenu de la nationalité étrangère du mari et de sa mauvaise maîtrise du français, il y a lieu de procéder à un abattement de ce salaire de 10%, de sorte que le salaire déterminant est de CHF 60'990.- en 2018.

Pour 2019, ce salaire doit être adapté à l'évolution des salaires (indice de + 0,9%) et s'élève donc à CHF 61'539.- arrondis. Pour 2020, après indexation du salaire
(+ 0.9%), il est de CHF 62'093.-.

Les salaires nets arrondis s'élèvent ainsi à CHF 56'342.- pour 2018, CHF 56'849.- pour 2019 et à CHF 57'268.- pour 2020, après déduction des cotisations sociales de 7,621% en 2018 et 2019, ainsi que de 7,771% en 2020.

Ces salaires sont inférieurs à ceux retenus par l'intimé, de sorte qu'il y a lieu de corriger les montants retenus à titre de salaire hypothétique.

Certes, ces revenus paraissent toujours relativement élevés. Toutefois, une franchise de CHF 1'500.- est déduite et seulement les deux tiers du revenu obtenu sont pris en compte dans le calcul.

7.2 Compte tenu de ce que l'époux de la recourante n'était pas apte au placement pendant un mois en 2018 et durant deux mois en 2019, il y a toutefois lieu de retenir un revenu hypothétique annuel calculé sur 11 mois de l'année en 2018 et sur 10 mois en 2019, comme cela a été exposé ci-dessus.

8.             La recourante conteste aussi le montant du loyer pris en considération.

8.1 Selon l'art. 10 al. 1 let. b ch. 2 LPC, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020, le montant maximal reconnu à titre de loyer et des frais accessoires est de CHF 15'000.- pour les couples et les personnes ayant à charge des enfants au bénéfice d'une rente pour enfant de l'assurance-invalidité.

Partant, c'est à raison, que l'intimé a retenu ce montant pour les PCF et PCC dues pour le mois de décembre 2020.

8.2 Dès le 1er janvier 2021, l'art. 10 al. 1 let. b ch. 1 et 2 LPC prévoit que le montant annuel maximal reconnu du loyer est pour une personne vivant seule de CHF 17'580.- dans la région 1, de CHF 17'040.- dans la région 2 et de CHF 15'540.- dans la région 3. Si plusieurs personnes vivent dans le même ménage, un supplément de CHF 3'240.- dans la région 1, de CHF 3'180.- dans la région 2 et de CHF 3'240.- dans la région 3 est ajouté pour la deuxième personne, de CHF 2'280.- dans la région 1 et de CHF 1'920.- dans les régions 2 et 3 pour la troisième personne et de CHF 2'100.- dans la région 1, de CHF 1'980.- dans la région 2 et de CHF 1’680.- dans la région 3 pour la quatrième personne.

Selon l'alinéa 1ter de cette disposition, pour les personnes vivant en communauté d’habitation, lorsqu’il n’y a pas de calcul commun en vertu de l’art. 9 al. 2 LPC, le montant pris en considération est le montant annuel maximal reconnu au titre du loyer pour une personne vivant dans un ménage de deux personnes. Le Conseil fédéral détermine le mode de calcul du montant maximal pour les couples vivant ensemble en communauté d’habitation (let. a) et les personnes vivant en communauté d’habitation avec des enfants ayant droit à une rente d’orphelin ou donnant droit à une rente pour enfant de l’AVS ou de l’AI (let. b).

Conformément à ces dispositions, l'intimé a pris en compte l'intégralité du loyer et des frais accessoires de CHF 21'876.- pour le calcul des prestations selon le nouveau droit. Toutefois, il s'est avéré que le calcul global des prestations selon l'ancien droit est plus favorable à la recourante. Dans la mesure où les calculs doivent être refaits sur de nouvelles bases, au vu de ce qui précède, la question du calcul plus favorable peut cependant rester ouverte.

9.              

9.1 S'agissant de la prise en compte des enfants dans le calcul, selon l'art. 9 al. 4 LPC, dont la teneur n'a pas changé lors de la réforme, il n’est pas tenu compte, dans le calcul de la prestation complémentaire annuelle, des enfants dont les revenus déterminants dépassent les dépenses reconnues. Pour déterminer de quels enfants il ne faut pas tenir compte, il faut comparer les revenus déterminants et les dépenses reconnues, y compris le montant pour l’assurance obligatoire des soins visé à l’art. 10 al. 3 let. d, LPC, des enfants susceptibles d’être éliminés du calcul (art. 8 al. 2 de l'ordonnance sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 – OCP-AVS/AI - RS 831.301).

En vertu de l'art. 10 al. 1 let. a ch. 3 LPC, le montant destiné à la couverture des besoins vitaux par enfant ayant droit notamment à une rente pour enfant de l'assurance-invalidité est dégressif dès le troisième enfant. Pour le troisième enfant, seulement deux tiers de ce montant sont retenus et pour chacun des enfants suivants un tiers.

9.2 En l'espèce, il ressort des calculs effectués par l'intimé dans ses dernières écritures que pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2018, les revenus d'un enfant dépassaient les dépenses pour les PCF et que les trois enfants devaient être inclus pour les PCC.

Après correction de l'erreur de calcul, il s'avère que l'intimé a versé pour cette période CHF 2'820.- en trop.

Pour la période de janvier à septembre 2019, deux enfants réalisent des revenus supérieurs aux dépenses pour les prestations fédérales. Au niveau cantonal, les trois enfants nés à cette période devaient être inclus dans le calcul.

Un trop perçu de prestations de CHF 6'408.- résulte du nouveau calcul.

La recourante n'a pas contesté le bien-fondé de ces calculs.

10.         Il résulte de ce qui précède que l'intimé a pris en considération à tort un revenu hypothétique dès janvier 2021. Pour septembre 2018 à décembre 2020, il a pris en compte des revenus hypothétiques trop élevés, le mari de la recourante n'ayant pas été apte au placement pendant un mois en 2018 et durant deux mois en 2019, raison pour laquelle le revenu hypothétique annuel doit être réduit d'un mois en 2018 et de deux mois en 2019. L'intimé devra également tenir compte d'un gain potentiel moins élevé, les salaires nets déterminants s'élévant à CHF 56'342.- pour 2018, à CHF 56'849.- pour 2019 et à CHF 57'268.- pour 2020. Enfin, les éventuelles prestations encore dues devront être diminuées des éventuelles prestations indûment versées entre septembre 2018 et septembre 2019 en raison de l'erreur de calcul de l'intimé concernant les enfants de la recourante. L'intimé devra par ailleurs procéder à une comparaison des prestations dues dès le 1er janvier 2021 en application de l'ancien et du nouveau droit et retenir la solution la plus favorable.

11.         En conséquence, les recours seront partiellement admis, les décisions annulées et les causes renvoyées à l'intimé pour nouveau calcul des PCF et PCC au sens des considérations.

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare les recours recevables.

Au fond :

2.        Les admet partiellement.

3.        Annule les décisions des 10 décembre 2021 et 19 janvier 2022.

4.        Renvoie les causes à l'intimé pour nouveau calcul des prestations complémentaires fédérales et cantonales durant la période de septembre 2018 à décembre 2021.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente suppléante

 

 

 

 

Maya CRAMER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le