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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1387/2022

ATAS/209/2023 du 21.03.2023 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1387/2022 ATAS/209/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 21 mars 2023

3ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée en FRANCE, représentée par le syndicat SIT

 

 

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis rue des Gares 16, Genève

 

 

 

intimé

 


 

 

EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), employée en nettoyage, s’est annoncée auprès de l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) et un délai-cadre d’indemnisation a été ouvert en sa faveur le 9 juillet 2021.

b. Le 25 août 2021, l'assurée a informé sa conseillère en placement, Madame B______, de son souhait de suivre une formation dans le secteur de l'horlogerie, au motif que ce dernier offrait de nombreuses perspectives d’emploi.

c. Afin d'évaluer son niveau et de s’assurer que la formation envisagée augmenterait de manière significative les chances de l’assurée de retrouver un emploi, sa conseillère l’a adressée à C______, qui lui a fait passer un test horloger en date du 26 octobre 2021 et constaté qu’elle rencontrait des difficultés de dextérité et de compréhension des explications données et faisait preuve d’un manque de minutie. Elle n’avait plus ou moins réussi qu’un test sur cinq. C______ en concluait qu'une formation de quatre mois dans le domaine horloger était irréaliste (cf. courriel de Madame D______, de C______, à Mme B______, du 1er novembre 2021).

d. Par décision du 13 décembre 2021, après un entretien s’étant déroulé le 29 novembre 2021, l’OCE a enjoint l’assurée de participer à une mesure intitulée « ParcourS », de l’Œuvre suisse d’entraide ouvrière (ci-après : OSEO), du 10 janvier au 3 avril 2022. Ce programme avait pour objectif de définir des pistes professionnelles, puis un plan d’action (accompagnement individuel et objectifs, stratégies d’accès à l’emploi, technologies de l’information et de la communication, expression corporelle et gestion du stress, prospection cible, construction d’un réseau, etc.). Il a été expliqué à l’assurée que la mesure devait lui permettre de maîtriser les méthodes actuelles de recherche d’emploi, valider les cibles professionnelles en les confrontant par la pratique au marché du travail (stages en entreprises), bénéficier d’un dossier de candidature conforme aux atteintes du marché pour les cibles professionnelles visées et disposer des connaissances bureautiques et linguistiques pour la recherche d’emploi. Il lui était par ailleurs rappelé qu’elle était tenue de participer aux mesures relatives au marché du travail propre à améliorer son aptitude au placement.

e. Par contrat de mission signé le 14 décembre 2021, l'assurée a été engagée par E______ SA en tant que lingère/nettoyeuse à 100% pour une mission de deux semaines au maximum, du 27 décembre 2021 au 7 janvier 2022.

f. Par courriel du 4 janvier 2022, l'assurée a informé sa conseillère qu'elle venait de terminer une formation dans le contrôle esthétique en horlogerie et qu'un emploi lui avait été promis pour le mois de février. Arguant qu’elle avait déjà suivi « une formation au pôle emploi (nettoyage, femme chambre aide au personne âgée, ) » (sic), elle indiquait : « La proposition que vous m’avez faire de suivre une formation en nettoyage OSEO ne m’intéresse pas par conséquent je veux annuler le rendez-vous avec OSEO » (sic).

g. Invitée à s’expliquer, l’assurée, par courriel du 5 janvier 2022, a répondu en ces termes « Je cherche du travail de horlogerie gemmologue j’ai 3 certificats et une des plantes de contrôle esthétique j’ai déjà fait l’équivalent de formation de nettoyage pôle formation » (sic).

B.            a. Par décision du 3 février 2022, l'OCE a prononcé la suspension pour une durée de 24 jours de l’exercice du droit à l’indemnité de l’assurée au motif que l’intéressée avait refusé une mesure ayant pour but de l'accompagner individuellement dans la mise à jour de son dossier de candidature, de bénéficier d'un coaching et d’acquérir une expérience formatrice sur le terrain.

b. Par courrier du 17 février 2022, l'assurée s’est opposée à cette décision en répétant qu’elle venait de terminer une formation dans le contrôle esthétique en horlogerie, complétant une formation en gemmologie. Elle recherchait un emploi dans ces domaines. En outre, elle avait déjà suivi une formation dans le nettoyage.

Invitée à produire la preuve des allégations selon lesquelles un emploi lui aurait été promis durant la mesure proposée, l’assurée a transmis, notamment :

-            un courriel du 20 décembre 2021 qui lui avait adressé Madame F______, chargée de recrutement chez G______ SA (ci-après : G______), lui transmettant trois descriptifs de postes d'opérateur en horlogerie à pourvoir chez H______ SA débutant soit le 24 janvier, soit le 1er février 2022 et demandant à l'assurée lequel avait sa préférence ;

-            un courriel de la même Mme F______, du 17 décembre 2021, réclamant à l’assurée ses coordonnées bancaires « pour le remboursement de la formation » ;

-            la confirmation par H______ SA, que sa candidature pour l’un de ces postes, débutant le 1er février 2022, lui avait été transmise par G______ ;

-            un courriel de G______ du 24 février 2022 indiquant ne pas avoir reçu de réponse concernant cette candidature ;

-            une invitation à un entretien chez I______ le 2 février 2022 (pour un poste de gemmologue, selon l’assurée).

c. Par décision du 21 mars 2022, l'OCE a rejeté l’opposition.

L’OCE a considéré que les courriels produits par l’assurée et échangés avec des sociétés de placement concernant des postes à pourvoir pour lesquels elle souhaitait faire acte de candidature ne démontraient aucunement qu’un poste lui avait été promis, mais simplement que ses candidatures étaient en cours d’analyse. En d’autres termes, l’intéressée n’était pas assurée d’avoir un emploi durant la période du 10 janvier 2022 au 3 avril 2022, de sorte qu’il convenait de confirmer la sanction.

d. Le 11 avril 2022, l’assurée a adressé à sa nouvelle conseillère, Madame J______, un courriel rédigé en ces termes : « J’ai commencé le formation aujourd’hui j’aimerais savoir par rapport le domaine de recherche d’emploi moi je cherche direction de gemmologue contrôle esthétique horlogerie j’ai quatre diplômes et j’aimerais continuer la même secteur par rapport le nettoyage je peux passer demain chez mon médecin pour donner une attestation parce que j’arrive pas à travailler dans la domaine de nettoyage j’ai l’asthme la cause de produits de nettoyage » (sic).

À l’appui de ses dires, l’assurée a transmis à sa conseillère :

-            un bref certificat établi le 4 avril 2022 par son médecin traitant, le docteur K______, certifiant que sa patiente souffrait d’asthme allergique provoqué par les produits de nettoyage et la poussière et lui déconseillant tout contact avec ces produits ;

-            la copie partielle d’une facture concernant une formation de base en contrôle esthétique s'étant déroulée du 16 novembre au 14 décembre 2021.

C.           a. Par écriture du 3 mai 2022, déposée au greffe le lendemain, l’assurée a interjeté recours contre la décision du 21 mars 2022 en concluant à l’annulation de la sanction.

En substance, la recourante allègue avoir entrepris, dans le but de se réorienter professionnellement et par ses propres moyens, une formation de contrôle esthétique en horlogerie, en novembre et décembre 2021. Son but était de changer d’activité, car elle a développé des allergies aux produits de nettoyage et à la poussière. Elle explique qu’avant d’entreprendre sa formation dans l’horlogerie, elle a pris contact avec une chargée de recrutement chez G______, qui s’est engagée à lui rembourser ses frais de formation. Il a également été convenu qu’un poste de travail à 100% lui serait proposé dès la réussite de sa formation. La recourante reproche à sa conseillère de lui avoir malgré tout imposé une mesure devant se dérouler du 10 janvier au 3 avril 2022, dans le secteur du nettoyage.

La recourante allègue que, lorsqu’elle a pris contact avec sa conseillère, le 4 janvier 2022, cette dernière lui a affirmé qu’elle allait annuler la mesure.

Pour le surplus, la recourante émet de sérieux doutes quant aux bénéfices qu’auraient pu lui apporter ladite mesure en termes d’aptitude au placement et d’employabilité.

Elle estime être désormais apte à se réinsérer professionnellement dans le secteur de l’horlogerie, malgré les conclusions de la fondation C______ et en veut pour démonstration le succès de sa formation, attesté par un certificat délivré le 20 janvier 2022 (« contrôle esthétique base »), à l’issue de la formation suivie du 16 novembre au 14 décembre 2021.

b. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 27 mai 2022, a conclu au rejet du recours.

Il soutient que la recourante n’avait pas de motifs valables de ne pas participer à la mesure qui lui a été proposée, dont il rappelle qu’elle n’était pas propre au domaine professionnel du nettoyage, mais avait pour objectif de mettre en lien les demandeurs d’emploi avec la réalité professionnelle en conciliant accompagnement personnalisé, formation sur mesure et stage d’évaluation ou de formation dans l’économie primaire. Dans le cas de l’assurée, cela aurait consisté à mettre en place un plan d’action, avec, notamment, la mise à jour et la vérification de son dossier de candidature, un coaching et l’acquisition d’une expérience formatrice sur le terrain. Une telle formation est utile en tout temps pour un demandeur d’emploi n’arrivant pas à trouver un poste après plusieurs mois à l’assurance-chômage.

En outre, aucun poste n'a été garanti à la recourante chez H______, aucun autre ne lui a d’ailleurs été proposé depuis, ainsi qu’en atteste le fait que, dans les formulaires « Indications de la personne assurée » (IPA) de décembre 2021, puis de janvier à mai 2022, la recourante a indiqué être toujours au chômage.

Quant aux prétendues limitations à travailler dans le domaine du nettoyage, l’intimé relève la brièveté du certificat médical produit et le fait que ce dernier, s’il déconseille certes tout contact avec des produits de nettoyage, ne l’interdit pas, pas plus qu’il ne précise depuis quand l’allergie est présente. L’intimé fait remarquer à cet égard que la recourante a d’ailleurs accepté un gain intermédiaire jusqu’au 7 janvier 2022 en qualité de nettoyeuse à 100%.

c. Par écriture du 13 juin 2022, la recourante a persisté dans ses conclusions.

Elle maintient que sa conseillère, lors de leur entretien téléphonique du 4 janvier 2022, lui aurait donné son accord pour ne pas suivre la mesure litigieuse.

Elle précise, s’agissant de l’emploi qu’elle a accepté fin 2021, qu’il consistait principalement à mettre des habits dans une machine à laver, à les plier et à les ranger. Quant au nettoyage requis, il se limitait à l’entretien du sol (aspirateur et nettoyage à l’eau).

d. Le 12 juillet 2022, l’intimé a persisté dans ses conclusions.

e. Une audience de comparution personnelle s’est tenue le 27 octobre 2022.

La recourante a confirmé pour l’essentiel ses allégations et admis n’avoir toujours pas trouvé de poste dans l'horlogerie. Elle aurait eu plusieurs propositions qui ne se sont pas concrétisées.

La recourante a pour le surplus produit un courrier de G______ du 25 janvier 2022 lui confirmant accepter le remboursement de sa formation en esthétique horlogère. Elle soutient que, puisque l’agence de placement a accepté de prendre en charge ses frais de formation, elle était légitimée à penser qu’elle lui trouverait un poste à l'issue de ladite formation.

f. Mme B______ a été entendue le 1er décembre 2022.

Elle a expliqué que, durant tout son délai-cadre, l’assurée lui a adressé plusieurs demandes de formation, dont une en horlogerie dispensée par C______, qu’elle n’a pu suivre, car ses tests se sont révélés insuffisants, tant au niveau de sa maîtrise du français que de sa dextérité. C’est alors qu’elle a proposé à l’assurée la mesure auprès d'OSEO, qui ne portait pas spécifiquement sur le domaine du nettoyage. Son objectif était d'aider l’assurée à élaborer un dossier de candidature conforme aux exigences et de lui donner des compétences supplémentaires en bureautique pour l'aider dans ses recherches d'emploi.

Cette mesure devait se dérouler en deux étapes : la première, de quatre semaines, aurait porté sur les techniques de recherche d'emploi et aurait eu pour objectif final l'établissement d'un dossier de candidature. La seconde aurait consisté en un stage dans le domaine déterminé lors de la première étape, pour autant qu'un stage puisse être trouvé. À ce stade, si l’assurée avait produit les certificats médicaux attestant de ses limitations fonctionnelles dans le domaine du nettoyage, un autre champ d'activité aurait pu être envisagé.

Cette mesure a été validée par décision du 13 décembre 2021. L’assurée l’a acceptée dans un premier temps, avant de revenir sur sa position et de lui adresser, le 4 janvier à 21h42, un courriel et un message téléphonique l'informant que cela ne l'intéressait plus et qu'elle souhaitait annuler la mesure.

Mme B______ a expliqué avoir rappelé l’assurée, lui avoir souligné qu'il s'agissait d'une mesure obligatoire et s’être étonnée de sa position, puisque la mesure accordée correspondait à ses demandes. L’assurée lui a alors expliqué qu’elle avait la possibilité d'obtenir, par le biais de G______, un emploi chez H______, devant commencer en février. Mme B______ dit lui avoir alors signifié que, si elle pouvait lui envoyer le contrat, elle pourrait être dispensée de la mesure. Elle a également relevé que l’assurée restait disponible en janvier, mais que, de la même manière, si elle pouvait justifier d’un emploi ce mois-là également, elle pourrait être dispensée de même. N’ayant jamais reçu le contrat annoncé, Mme B______ a transmis le dossier au service compétent.

Elle dit n’avoir jamais vraiment compris pourquoi l’assurée a changé de position sur la mesure proposée, dont elles avaient pourtant discuté à plusieurs reprises.

En septembre 2021, l’assurée l’a informée de ses allergies. Elle lui a répondu qu'elle devait produire un certificat médical confirmant les limitations fonctionnelles. Malgré plusieurs rappels, l’assurée ne lui a jamais fourni ce document.

De façon générale, le témoin a expliqué que la communication a toujours été difficile avec l’assurée, à qui elle a dû fournir des explications à maintes reprises.

L’assurée l’a certes tenue informée de sa formation en esthétique d'horlogerie, mais a posteriori. Là encore, elle a dû lui rappeler qu'elle aurait dû obtenir l'accord préalable de l'OCE et lui réclamer des justificatifs qu’elle n’a jamais reçus.

g. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté dans les délai et forme prescrits par la loi, le recours est recevable (art. 56 LPGA).

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension de 24 jours infligée à la recourante pour refus de suivre une mesure.

4.             L'assurance alloue des prestations financières au titre des mesures relatives au marché du travail (MMT) en faveur des assurés et des personnes menacées de chômage (art. 59 al. 1 LACI).

Les MMT visent à favoriser l'intégration professionnelle des assurés dont le placement est difficile pour des raisons inhérentes au marché de l'emploi (art. 59 al. 2 LACI). Ces mesures ont notamment pour but : a. d'améliorer l'aptitude au placement des assurés de manière à permettre leur réinsertion rapide et durable ; b. de promouvoir les qualifications professionnelles des assurés en fonction des besoins du marché du travail ; c. de diminuer le risque de chômage de longue durée ; d. de permettre aux assurés d'acquérir une expérience professionnelle.

Les MMT visent ainsi l'amélioration de l'aptitude au placement des assurés sur le marché du travail. Cela implique, d'une part, que les mesures soient adaptées à la situation et au développement du marché du travail, d'autre part, qu'elles prennent en compte la situation personnelle, les aptitudes et les inclinations des assurés (ch. A23 Bulletin LACI MMT).


 

5.              

5.1 Selon l'art. 17 al. 3 let. a LACI, l'assuré qui fait valoir des prestations d'assurance a l'obligation, lorsque l'autorité compétente le lui enjoint, de participer aux MMT propres à améliorer son aptitude au placement.

5.2 La violation de cette obligation expose l'assuré à une suspension de son droit à l'indemnité. Selon l'art. 30 al. 1 let. d LACI, le droit de l'assuré à l'indemnité est suspendu, notamment lorsqu'il est établi que celui-ci ne se présente pas à une MMT ou l'interrompt sans motif valable.

On considère en effet que, de la sorte, l’assuré adopte un comportement qui, de manière générale, est de nature à prolonger la durée de son chômage. Il n’est en principe pas d’emblée privé de prestations, mais tout d’abord sanctionné en application de l’art. 30 al. 1 let. c ou d LACI, puis, en cas de violations répétées, déclaré inapte au placement, en vertu des art. 8 al. 1 let. f et 15 LACI. Jurisprudence et doctrine s’accordent à dire que, du moins sauf réitérations, la sanction prévue par l’art. 30 al. 1 LACI constitue une manière appropriée et adéquate de faire participer l’assuré au dommage qu’il cause à l’assurance-chômage en raison d’une attitude contraire à ses obligations (ATF 125 V 197 consid. 6a ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 208/06 du 3 août 2007 consid. 3 ; Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014, n. 3 ad art. 17, n. 5 ad art. 30). La suspension du droit à l'indemnité est soumise exclusivement aux dispositions de la LACI et de ses dispositions d'exécution (Thomas NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, 2ème éd. 2007, p. 2424, n. 825).

5.3 Selon le ch. D34 du Bulletin LACI IC, l'assuré qui n'observe pas les prescriptions de contrôle ou les instructions de l'autorité compétente, notamment refuse un travail convenable (assigné officiellement ou non), ne se présente pas à une MMT ou l'interrompt sans motif valable, ou encore compromet ou empêche, par son comportement, le déroulement de la mesure ou la réalisation de son but, est suspendu dans son droit à l'indemnité.

Selon la doctrine, une sanction se justifie lorsqu'un assuré refuse de participer à une MMT (que celle-ci ait été assignée par l'Office régional de placement ou revendiquée par l'assuré - note pied de page 46), quitte la mesure avant son terme pour une autre raison qu'une prise d'emploi, ou compromet le déroulement de la mesure en raison de son comportement (absence ou retard injustifié, violation des instructions, mauvaise volonté, passivité extrême, etc.). Il importe que le comportement d'un assuré n'influence pas négativement l'ambiance générale au sein d'un groupe de participants à une mesure. Le but de la sanction est ici de favoriser l'intégration des assurés dans le marché du travail et de garantir la bonne exécution des mesures (Boris RUBIN, op.cit., ch. 70 ad art. 30).

Pour déterminer si un assuré dispose d'un motif valable de ne pas participer à une MMT, il faut en principe appliquer par analogie les critères relatifs au travail convenable mentionnés à l'art. 16 LACI. Ces critères ne s'appliquent pas forcément dans leur intégralité. Cela dépend des dispositions spéciales applicables. L'adéquation entre la MMT et les critères fixés à l'art. 16 al. 2 LACI s'examine en principe, non en relation avec l'organisme qui gère la mesure, mais en rapport avec les activités effectivement exercées par l'assuré au sein de l'organisme en question. L'obligation de participer à une MMT ne dépend en principe pas de la pertinence de celle-ci (Boris RUBIN, op.cit., ch. 71 ad art. 30).

5.4 La durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute (art. 30 al. 3 LACI ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 254/06 du 26 novembre 2007 consid. 5.3). L'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (ordonnance sur l'assurance-chômage, OACI - RS 837.02) distingue trois catégories de fautes – à savoir les fautes légères, moyennes et graves – et prévoit, pour chacune d'elles, une durée minimale et maximale de suspension, qui est de 1 à 15 jours en cas de faute légère, de 16 à 30 jours en cas de faute de gravité moyenne, et de 31 à 60 jours en cas de faute grave (art. 45 al. 3 OACI). Des antécédents remontant à moins de deux ans justifient une prolongation de la durée de suspension (art. 45 al. 5 OACI ; Boris RUBIN, op. cit., 2014, ch. 114 ss ad art. 30).

5.5 En tant qu'autorité de surveillance, le secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO) a adopté un barème indicatif à l'intention des organes d'exécution. Un tel barème constitue un instrument précieux pour les organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire des sanctions dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances – tant objectives que subjectives – du cas d'espèce et de fixer la sanction en fonction de la faute (arrêt du Tribunal fédéral 8C_425/2014 du 12 août 2014 consid. 5.1).

La directive du SECO prévoit que la durée de la suspension est fixée en tenant compte de toutes les circonstances du cas particulier, tel que le mobile, les circonstances personnelles relatives à l'assuré, les circonstances particulières, le cas échéant, du cas d'espèce (cf. D64 Bulletin LACI IC).

Le SECO a, en outre, établi un barème des suspensions selon lequel si l'assuré ne suit pas un cours ou l'interrompt sans excuse valable, une suspension du droit à l'indemnité doit être prononcée, de 10 à 12 jours pour un cours d'environ trois semaines, de 13 à 15 jours pour un cours d'environ quatre semaines, de 16 à 18 jours pour un cours d'environ cinq semaines et de 19 à 20 jours pour un cours de dix semaines. Lorsque la durée du cours est plus longue, la suspension doit être augmentée en conséquence (cf. D79 3.D 1-6 Bulletin LACI IC).

5.6 Selon la jurisprudence, la durée de la suspension du droit à l'indemnité de chômage est fixée compte tenu non seulement de la faute, mais également du principe de proportionnalité (ATF non publié du 26 novembre 2007, C 254/06, consid. 5.3).

5.7 La quotité de la suspension du droit à l'indemnité de chômage dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 8C_194/2013 du 26 septembre 2013 consid. 5.2). Le juge ne s'écarte de l'appréciation de l'administration que s'il existe de solides raisons. Il y a abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d'appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 123 V 150 consid. 2).

6.              

6.1 Pour l'établissement des faits pertinents, il y a lieu d'appliquer les principes ordinaires régissant la procédure en matière d'assurances sociales, à savoir, en particulier, la maxime inquisitoire, ainsi que les règles sur l'appréciation des preuves et le degré de la preuve.

La maxime inquisitoire signifie que l'assureur social et, en cas de litige, le juge, établissent d'office les faits déterminants, avec la collaboration des parties, sans être liés par les faits allégués et les preuves offertes par les parties, en s'attachant à le faire de manière correcte, complète et objective afin de découvrir la réalité matérielle (art. 43 LPGA ; art. 19 s., 22 ss, 76 et 89A de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10] ; Ghislaine FRÉSARD-FELLAY/Bettina KAHIL-WOLFF/Stéphanie PERRENOUD, Droit suisse de la sécurité sociale, vol. II, 2015, p. 499 s.). Les parties ont l'obligation d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués ; à défaut, elles s'exposent à devoir supporter les conséquences de l'absence de preuve (art. 28 LPGA ; ATF 125 V 193 consid. 2 ; 122 V 157 consid. 1a ; 117 V 261 consid. 3b et les références).

6.2 Une preuve absolue n'est pas requise en matière d'assurances sociales. L'administration et le juge fondent leur décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b; 125 V 193 consid. 2 et les références). Il n'existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a; Ghislaine FRÉSARD-FELLAY/Bettina KAHIL-WOLFF/Stéphanie PERRENOUD, op. cit., p. 517 s.). Reste réservé le degré de preuve requis pour la notification de décisions, l'exercice d'un moyen de droit, le contenu d'une communication dont la notification est établie (ATF 124 V 400; 121 V 5 consid. 3b ; 119 V 7 consid. 3c/bb ; ATAS/286/2018 du 3 avril 2018 consid. 3 ; ATAS/763/2016 du 27 septembre 2016 consid. 4 et 5c).

7.              

7.1 En l'espèce, la sanction litigieuse a été motivée par le refus de la recourante de participer à la MMT devant se dérouler du 10 janvier au 3 avril 2022.

7.1.1 Pour justifier son refus de suivre la mesure proposée, la recourante argue qu’elle n’était « pas convenable », car elle concernait le secteur du nettoyage. Or, d’une part, son allergie aux produits nettoyants et à la poussière lui interdisent désormais ce domaine d’activité, d’autre part, elle venait de terminer une formation dans le contrôle esthétique en horlogerie et souhaitait se réorienter. Qui plus est, elle était persuadée de pouvoir obtenir rapidement un poste dans cette branche. Elle en veut pour preuve les courriels échangés avec diverses agences de placement et le fait que l’une d’elles (G______) a même accepté de prendre en charge ses frais de formation. Elle estime avoir fait la démonstration de sa volonté de sortir du chômage en se réorientant par ses propres moyens.

7.1.2 L’intimé considère pour sa part que la recourante n’avait aucun motif valable de refuser la MMT proposée – dont il souligne qu’elle ne se limitait pas au seul domaine du nettoyage –, puisqu’elle n’avait pas de poste assuré durant cette période (du 10 janvier au 3 avril 2022).

7.1.3 En l'occurrence, le plan d'actions établi par l'OCE prévoyait comme cible un emploi dans le domaine du nettoyage. Les recherches de la recourante, y compris durant les mois de janvier à mars 2022, ont également porté sur des postes dans cette branche. Le fait que la MMT ait été organisée en mentionnant un poste dans ce domaine n'est dès lors guère critiquable. Au demeurant, si le descriptif du programme mentionne comme pistes et projets professionnels les professions d'agente de propreté et d'entretien et de nettoyeuse, il ressort de la lecture du programme dans son ensemble et des explications de la conseillère que cette mesure avait pour objectif d’apporter à l’assurée, de manière générale, de l’aide dans ses recherches d'emploi, par le biais d’un accompagnement individuel, comportant notamment une vérification de son dossier de candidature, un coaching et des cours et ateliers traitant des stratégies d'accès à l'emploi. Dès lors, l'utilité de la mesure, en soi, n’est guère contestable, étant rappelé que la recourante émargeait au chômage depuis plusieurs mois et que ses recherches ne lui avaient toujours pas permis de trouver un emploi.

Quant aux limitations évoquées par la recourante et relatives à ses allergies, force est de constater que, si elle en a effectivement fait part à sa conseillère, elle ne lui avait, au moment des faits, toujours pas fourni d’attestation médicale en ce sens, et ce, malgré les demandes réitérées de Mme B______. La seule attestation médicale au dossier est datée du 4 avril 2022 et donc bien postérieure à la décision enjoignant à la recourante de suivre la mesure litigieuse, de sorte qu'il ne peut pas être reproché à l'intimé de ne pas en avoir tenu compte. D’autant moins que la recourante a encore exercé un emploi dans le domaine du nettoyage en décembre 2021. Certes, elle a allégué à ce propos que ce poste consistait principalement à mettre des habits dans une machine à laver, à les plier et à les ranger et que le nettoyage à proprement parler se limitait à entretenir le sol (aspirateur et nettoyage à l’eau). Cela démontre cependant que tout poste dans le nettoyage n’était donc pas a priori exclu.

Quant au souhait de la recourante de se réorienter dans le domaine du contrôle esthétique en horlogerie et de la gemmologie, il ne suffit pas à justifier son refus de participer à la MMT. D’une part, parce que, comme déjà relevé supra, celle-ci ne se limitait pas d’emblée au secteur du nettoyage. D’autre part, parce que ce n’est que le 4 janvier 2022, soit quelques jours avant le début de la mesure, que la recourante a jugé bon d’informer sa conseillère de la formation pourtant terminée depuis plusieurs jours et effectuée sans avoir été avalisée par l'OCE. Enfin, parce que, contrairement à ses allégations, l’assurée ne s’était pas assurée un poste durant la période de la mesure. Le fait d’avoir fait part de ses souhaits à des agences de placement et d’avoir déposé des candidatures ne lui permettait pas de conclure qu’un poste lui serait garanti en janvier ou février 2022. Tel n’a d’ailleurs pas été le cas. De la même manière, le fait que l’agence de placement ait accepté de lui rembourser les frais de sa formation en contrôle esthétique en horlogerie – en janvier 2022, soit postérieurement au refus de l’intéressée – n'est pas non plus propre à démontrer l'existence d'une garantie d'emploi. Preuve en est le fait que la recourante, en octobre 2022, n’avait toujours pas trouvé d'emploi dans le domaine de l'horlogerie.

Dans ces conditions, la recourante ne pouvait décemment refuser la MMT à laquelle il lui avait été enjoint de participer en lui rappelant son devoir de collaborer, obligation qui lui a été soulignée une nouvelle fois par sa conseillère en janvier 2022. La recourante ne pouvait dès lors ignorer ses obligations. Faute d’emploi, elle était disponible au moment de la mesure litigieuse et l’est restée durant toute la durée de celle-ci. Dès lors, elle n’avait aucun motif valable de s’y soustraire.

Eu égard à ce qui précède, une suspension du droit à l’indemnité de chômage devait être prononcée à l’encontre de la recourante.

7.2 Reste à en vérifier la quotité (24 jours).

En l’occurrence, la mesure proposée était d'une durée de 12 semaines (du 10 janvier au 3 avril 2022).

Le SECO prévoit, lorsque l'assuré ne suit pas un cours sans excuse valable, une suspension du droit à l'indemnité de 19 à 20 jours pour un cours de dix semaines, soit l'équivalent de 1.9 à 2 jours de suspension par semaine de cours. Lorsque la durée du cours est plus longue, la suspension doit être augmentée en conséquence.

La MMT étant de 12 semaines, une suspension de 24 jours est ainsi proportionnée, d'autant qu'il s'agissait-là du deuxième manquement reproché à la recourante. En effet, celle-ci a déjà été sanctionnée par le passé pour avoir refusé un emploi.

8.             Au vu de ce qui précède, la sanction, tout comme sa quotité, apparaissent bien fondées, de sorte que le recours doit être rejeté.

La procédure est gratuite.

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'au Secrétariat d'Etat à l'économie par le greffe le