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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/374/2022

ATAS/1093/2022 du 13.12.2022 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/374/2022 ATAS/1093/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 13 décembre 2022

15ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié c/o Mme B______, à GENÈVE, comparant avec élection de domicile en l’étude de Maître Jacques EMERY

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L’ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né le ______1964, séparé, père de trois enfants majeurs, naturalisé suisse en 2011, sans formation autre que l’école secondaire fréquentée en Tunisie, a obtenu en 2008 un diplôme de conducteur d’élévateurs « catégorie S » en Suisse, et a suivi en 2013, auprès du CEFIL, une formation d’agent de maintenance, « partie bâtiment ». Après avoir exercé, dès 1997, divers emplois à Genève en tant que peintre en bâtiment, chauffeur/messager, concierge et surveillant de musée, il
a exercé en dernier lieu, d’octobre 2015 à octobre 2016, l’activité d’employé de nettoyage auprès du service des bâtiments de la Ville de C______ avant d’émarger au chômage.

b. Après avoir bénéficié, dans le cadre de l’assurance-chômage, de prestations cantonales en cas de maladie (PCM), d’abord à 100% (du 6 juin au 2 juillet 2017), puis à 50% (du 3 juillet au 3 août 2017), il a déposé, le 19 septembre 2017, une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI ou l’intimé), mentionnant qu’il était atteint dans sa santé depuis mai 2017. Selon un certificat non daté, produit en annexe, établi
par la doctoresse D______, spécialiste en médecine interne et médecin traitant, l’assuré présentait des cervicobrachialgies invalidantes sur cervicarthrose disco-somatique et interfacettaire en C5 et C7-T1 sur canal étroit, sans myelopathie, une discopathie protrusive en C4-C5, C5-C6 et C6-C7 avec « impingement » des racines C6 et C7 à gauche par protrusion disco-ostéophytaire depuis mai 2017 ainsi qu’une uncarthrose gauche en C5-C6 et C6-C7, traitée de manière conservatrice mais pouvant évoluer vers une indication opératoire.

c. Dans un rapport du 25 octobre 2017 à l’OAI, la Dresse D______ a indiqué que le début de la longue maladie remontait à mai 2017. En raison des diagnostics évoqués dans son précédent rapport, qui se manifestaient par des douleurs violentes de l’épaule et de la colonne cervicale qui l’empêchaient de dormir la nuit, l’assuré présentait une incapacité de travail totale du 6 juin au
2 juillet 2017 et de 50% du 3 juillet au 3 août 2017. Une reprise à 100% était possible dès le 4 août 2017, à condition qu’il s’agisse d’une activité n’impliquant ni port de charges de plus de 5kg ni mouvements trop physiques des membres supérieurs. Quant à l’activité habituelle, son exercice était exigible à 50%, à condition de s’en tenir à la restriction évoquée concernant les charges de plus de 5kg.

d. Lors d’un entretien du 16 novembre 2017 à l’OAI, l’assuré a déclaré que son dernier emploi avait été celui d’agent d’entretien-nettoyage à 100% auprès de la Ville de C______ dans une école. Interrogé sur le point de savoir s’il était encore sous contrat, l’assuré a indiqué avoir remplacé quelqu’un : « du coup, il est revenu et a repris son poste de travail, mon dernier jour de travail c’était le 30.11.2016 ».

e. Par avis du 1er novembre 2017, le service médical régional de l’assurance-invalidité (ci-après : SMR) a estimé que le début de l’incapacité de travail durable remontait au 6 juin 2017. Dans l’activité habituelle d’agent d’entretien/nettoyage auprès de la Ville de C______, la capacité de travail était nulle depuis lors. En revanche, dans une activité n’impliquant ni port de charges excédant 5kg, ni élévation des membres supérieurs au-dessus de l’horizontale, ni position la tête penchée en avant, ni escaliers, ni échafaudages ni échelles, la capacité de travail était entière depuis toujours.

f. Par communication du 1er décembre 2017, l’OAI a informé l’assuré qu’il lui octroyait des mesures d’intervention précoce sous la forme d’une aide au placement (conseil et soutien pour la recherche d’un emploi approprié). Cette mesure a été prolongée le 29 janvier 2018.

g. Le 7 décembre 2017, la mesure précitée a été complétée par un cours de formation (bureautique et dactylographie), sanctionné par la remise, le 15 février 2018, d’une attestation délivrée par le prestataire désigné par l’OAI, selon laquelle l’assuré avait suivi avec succès une formation d’une durée de 66h ayant pour objet la dactylographie, Windows7 ainsi que l’utilisation des applications Word, Excel et Outlook.

h. Par communication du 1er mars 2018, l’OAI a octroyé à l’assuré un placement à l’essai auprès de la Poste suisse (stage du 19 février au 27 avril 2018 en tant que coursier appelé à se déplacer à pied ou en transports publics pour notifier des actes de poursuite).

i. Le 22 mars 2018, lors d’un bilan tripartite réunissant l’OAI, la Poste et l’assuré, celui-ci a présenté un certificat d’incapacité de travail à 50%, valable du 16 mars au 13 avril 2018, et expliqué que l’activité auprès de la Poste était certes adaptée à ses problèmes physiques mais que c’était « [sa] tête qui ne [permettait] pas » de dépasser un certain nombre d’heures de travail, raison pour laquelle il comptait se rendre à une consultation pour un test de la mémoire et de l’attention. Pour sa part, le représentant de la Poste a exprimé sa satisfaction en précisant qu’après certaines erreurs habituelles commises au départ, tout était rentré dans l’ordre et que le rendement était bon.

j. Le 1er mai 2018, l’entreprise RHPro – par l’intermédiaire de laquelle le stage de l’assuré auprès de la Poste avait été organisé du 19 février au 23 mars 2018 et du 9 au 27 avril 2018 – a établi un rapport d’évaluation co-signé par le représentant de RHPro, l’assuré et le responsable de stage auprès de la Poste. Il en ressortait, sur la grille d’évaluation ad hoc, allant de « insatisfaisant, presque satisfaisant, satisfaisant à très satisfaisant », que la discipline au travail avait été jugée très satisfaisante. Quant aux dix-sept autres critères d’évaluation (dont l’organisation, la prise d’initiatives, l’autonomie, le rythme, la quantité et la qualité du travail), l’assuré obtenait quatorze fois un résultat satisfaisant, seules la communication, l’intégration auprès des collaborateurs et la flexibilité/capacité d’adaptation étant jugées presque satisfaisantes. En guise de bilan, le responsable du stage auprès de la Poste a toutefois indiqué qu’il n’était disposé ni à être cité en référence 
par l’assuré, ni à embaucher ce dernier, motif pris que huit semaines de stage représentaient une période trop brève « pour faire référence » et que la Poste n’engageait qu’exceptionnellement des stagiaires.

k. Le 29 juin 2018, la doctoresse E______, médecin interne auprès du Service de psychiatrie adulte des HUG, a attesté que l’assuré était suivi au Centre ambulatoire de psychiatrie et psychothérapie (CAPPI Jonction) depuis le 14 mai 2018 à sa demande et sur le conseil de la Dresse D______. Il existait, en l’état, une suspicion d’un trouble de stress post-traumatique qui devait être encore investiguée car l’assuré, qui bénéficiait d’entretiens à raison de deux séances par mois, restait très fragile pour en parler. Son incapacité de travail était totale du 1er juin au 31 juillet 2018.

l. Dans un rapport du 22 octobre 2018, la Dresse E______, a répondu à une série de questions du SMR en expliquant qu’elle retenait un syndrome de stress post-traumatique (F43.1), ainsi qu’un trouble dépressif récurrent, épisode actuel moyen (F33.1). Au plan anamnestique, elle a indiqué qu’avant son arrivée en Suisse en 1986, l’assuré avait été emprisonné et torturé (coups portés à la tête) durant deux ans sous le régime du Président BEN ALI. Il revivait quotidiennement, jusqu’à aujourd’hui, des « flashs de ces tortures ». Il avait également été agressé à deux reprises à son domicile, d’abord en 2003 (coups, menaces et dommage à la propriété), puis en 2015 (menaces et tentative de violation de domicile). Suite à ces agressions, il avait présenté des symptômes relevant d’un syndrome de stress post traumatique. Interrogées sur les limitations fonctionnelles en lien avec les diagnostics retenus, la Dresse E______ a indiqué que l’assuré présentait une aboulie, une anhédonie, des difficultés à faire les choses de la vie quotidienne, à s’occuper des choses administratives. Il avait de la peine à se mobiliser, présentait une baisse de l’estime de soi, des idées noires et un sentiment de dévalorisation. N’arrivant pas à se projeter dans l’avenir, il rapportait une baisse de la mémoire et de la concentration, et des troubles du sommeil principalement à l’endormissement, qui étaient dus aux ruminations qui l’envahissaient le soir. On retrouvait une anxiété importante liée au passé et à sa situation actuelle. Compte tenu de sa problématique actuelle, l’assuré n’était pas apte à reprendre une activité professionnelle dans quelque domaine que ce soit.

m. Par avis du 10 décembre 2018, le SMR a proposé la réalisation d’une expertise psychiatrique.

n. Par communication du 1er février 2019, l’OAI a informé l’assuré que l’expert pressenti était le docteur F______, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, qu’il pouvait adresser des questions complémentaires à celles produites en annexe, qui seraient soumises à l’expert, et faire valoir d’éventuels motifs de récusation à l’encontre de l’expert.

o. L’expert a reçu l’assuré en entretien les 1er et 22 mars 2019 et rendu ses conclusions le 13 juin 2019. Il a posé les diagnostics d’éventuel trouble de l’adaptation, sub-clinique et de personnalité avec des traits impulsifs, précisant qu’aucune de ces affections n’avait de répercussion sur la capacité de travail. Interrogé sur la capacité de travail de l’assuré dans l’activité exercée en dernier lieu, l’expert a répondu que l’assuré avait pu présenter un trouble de l’adaptation en août-septembre 2018, dont l’origine n’était ni compréhensible ni objectivable. Cela étant, l’évolution avait été largement favorable grâce au traitement prescrit par la Dresse E______. Autrement dit, il n’y avait jamais eu de baisse durable de la capacité dans aucune activité. Dans le cadre d’un emploi exercé à plein temps, cette capacité était de 8h/j. Questionné sur la capacité de travail dans une activité adaptée et les caractéristiques que devrait revêtir une telle activité pour être adaptée de manière optimale au handicap de l’assuré, l’expert a répondu que les limitations étaient dues à des facteurs médicaux, comme les cervicalgies. En revanche, le bilan neuropsychologique réalisé avait révélé qu’il n’y avait aucune limitation à ce niveau, ni d’un point de vue psychiatrique. Il n’y avait donc pas lieu d’envisager une activité adaptée.

p. Par avis du 3 juillet 2019, le SMR a jugé convaincant le rapport d’expertise du 13 juin 2019, ajoutant qu’il n’y avait pas lieu de s’en écarter. Partant, en l’absence de diagnostic incapacitant d’ordre psychiatrique, il convenait de s’en tenir aux conclusions du 1er novembre 2017 du SMR, qui concernaient l’atteinte somatique.

q. Par envoi spontané du 29 juillet 2019 à l’OAI, l’assuré s’est dit « déçu et outré » par le rapport d’expertise, précisant qu’il en contestait d’ores et déjà la teneur avant même de recevoir une décision de la part de l’OAI.

r. Dans un rapport « final » du 17 octobre 2019, la division réadaptation professionnelle de l’OAI a indiqué qu’elle était toujours d’avis que l’activité de coursier-huissier était exigible de la part de l’assuré. Étant donné qu’il avait
pu démontrer pendant le stage ses capacités à travailler dans cette voie professionnelle, adaptée, qui plus est, à ses limitations fonctionnelles, et qu’il disposait également d’un dossier de candidature complet lui offrant les moyens
de rechercher du travail de manière autonome, il était possible de déterminer son degré d’invalidité de la manière suivante : en comparant le revenu réalisé en tant qu’employé de nettoyage, actualisé à 2018, au revenu statistique qu’il pouvait réaliser à plein temps dans une activité de service administratif et de soutien
aux entreprises (ligne 82 de la table TA1 de l’enquête suisse sur la structure des salaires) de niveau 1 (activités simples et répétitives), et en déduisant de ce revenu statistique un abattement de 10% pour tenir compte des limitations fonctionnelles et du fait que seule une activité légère était possible, le degré d’invalidité s’élevait à 15%.

s. Par rapport du 10 février 2020 les docteurs G______ et H______, respectivement médecin interne et cheffe de clinique auprès du département des neurosciences cliniques des HUG ont indiqué en synthèse, que l’assuré présentait des cervicobrachialgies insomniantes.

B. a. Par projet de décision du 23 avril 2020, portant l’intitulé « réussite de mesures professionnelles », l’OAI a informé l’assuré qu’à l’issue de ces mesures, il était en mesure de faire valoir, sur le marché économique de l’emploi, les compétences acquises et qu’une fois la réadaptation professionnelle achevée, son taux d’invalidité, qui était de 15%, excluait tout droit à une rente d’invalidité.

b. Par courrier du 11 mai 2020, l’assuré a contesté ce projet en alléguant que les mesures professionnelles avaient « mal réussi et fonctionné ». Il avait eu des « ennuis » avec des personnes qui n’avaient jamais reçu leur acte de poursuite et avait fini par être convoqué le 4 décembre 2018 en qualité de témoin par la Chambre de surveillance de l’office des poursuites et faillites dans une cause opposant un plaignant au Service de recouvrement de la taxe d’exemption de l’obligation de servir. Pour ce motif, « la Poste [avait] résili[é] immédiatement le contrat » (sic). Par ailleurs, le dossier médical en possession de l’OAI n’était pas complet. Aussi, l’assuré a annexé à son envoi :

-          un rapport de polysomnographie du docteur I______, pneumologue, faisant suite à un enregistrement réalisé le 15 janvier 2020, ayant permis d’objectiver un syndrome d’apnées/hypopnées obstructives du sommeil sévère, nécessitant un traitement par CPAP [NDR : support ventilatoire] ;

-          un contrat de location du 27 juin 2020 ayant pour objet la mise à disposition d’un appareil CPAP ;

-          un certificat médical du 30 octobre 2019 du docteur J______, médecin interne auprès du département de santé mentale et de psychiatrie des HUG, indiquant que l’assuré présentait une persistance de symptomatologie dépressive ainsi qu’une symptomatologie anxieuse sévère avec un mutisme et un isolement aggravés par des comorbidités en cours d’investigation.

c. Par avis du 25 mai 2020, le SMR a estimé que l’état somatique n’était pas stabilisé et nécessitait des informations complémentaires.

d. Dans un rapport du 30 juin 2020, le Dr I______ a mentionné que le syndrome d’apnées/hypopnées obstructives du sommeil sévère faisait l’objet, depuis le 27 février, d’un traitement par CPAP. Selon une note des infirmières
de soins, le masque était adapté et l’utilisation bonne. Interrogé sur la capacité
de travail du point de vue de sa spécialité, le Dr I______ a indiqué que
même s’il ne pouvait pas se prononcer dans le cas concret, un syndrome d’apnées obstructives du sommeil n’avait en général pas de répercussions sur l’activité professionnelle s’il était traité.

e. Dans un rapport du 2 juillet 2020, la Dresse D______ a fait état d’une aggravation des cervicobrachialgies et d’une décompensation psychiatrique avec une « dépression gravissime » qui était le problème majeur actuellement. Au vu des rapports du CAPPI et de l’atteinte neurologique, il lui semblait clairement que l’incapacité de travail était de 100%.

f. Dans un rapport du 3 septembre 2020, la Dresse E______ a mentionné un suivi depuis mai 2018 et retenu comme diagnostic incapacitant un trouble dépressif récurrent actuel moyen F33.1. Le syndrome de stress post-traumatique (F43.1) n’avait en revanche pas d’impact sur la capacité de travail. Interrogée sur les limitations fonctionnelles, elle a indiqué que l’assuré présentait une aboulie, une anhédonie, des difficultés à faire les choses de la vie quotidienne et à s’occuper des choses administratives. Il avait de la peine à se mobiliser et présentait une baisse de l’estime de soi, des idées noires et un sentiment de dévalorisation. Il n’arrivait pas à se projeter dans l’avenir. En outre, l’assuré rapportait une baisse de la mémoire et de la concentration. S’il retrouvait une stabilisation de son état psychique, ce qui n’était pas le cas actuellement, il pourrait reprendre à 50% une activité adaptée à ses limitations.

g. Par avis du 9 novembre 2020, le SMR a relevé que l’assuré était suivi sur
le plan psychique depuis 2018 et qu’il existait des discordances avec l’expertise
psychiatrique laquelle ne retenait pas d’atteinte incapacitante en 2019. Considérant ne pas pouvoir suivre non plus les conclusions des autres médecins traitants, le SMR a indiqué que la réalisation d’une expertise pluridisciplinaire – rhumatologique, pneumologique, psychiatrique et de médecine interne – était nécessaire, via la plateforme MED@P.

h. Par courrier du 12 novembre 2020, l’OAI a informé l’assuré, soit pour lui
son conseil, qu’une expertise pluridisciplinaire serait ordonnée et qu’il avait la possibilité d’adresser des questions complémentaires aux experts dans un délai imparti à cet effet.

i. Par pli du 26 mai 2021, le Centre médical d’expertises CEMEDEX SA (ci-après : CEMEDEX SA) a convoqué l’assuré à cinq rendez-vous prévus entre
le 16 juin et le 6 juillet 2021, pour être examiné tour à tour par les experts
K______, neuropsychologue, L______, médecin généraliste, M______, rhumatologue, N______, pneumologue, et O______, psychiatre.

j. Le 8 septembre 2021, les experts ont rendu leurs conclusions en retenant,
au terme d’une évaluation consensuelle, que sur les diagnostics retenus (névralgie cervicobrachiale gauche non déficitaire sur uncarthrose [M53.1], syndrome des apnées nocturnes modéré à sévère de type obstructif [G47.31], troubles de maintien du sommeil [G47.0], bronchopneumopathie chronique obstructive [ci-après : BPCO] de stade II, avec emphysème [J44], trouble dépressif d’un degré léger [F33.0], diabète de type II non compliqué [E66]), il n’existait pas de limitations fonctionnelles relevant de la médecine interne, de la psychiatrie ou de la neuropsychologie. Celles-ci étaient seulement d’ordre rhumatologique (pas d’efforts de soulèvement de plus de 5kg à partir du sol, pas de porte-à-faux ou de rotation répétée du rachis cervical, port de charges proches du corps limitées à 10kg) et pneumologique (pas de conduite automobile, pas de travail nécessitant beaucoup de concentration, précision et mémoire, pas de travail impliquant une exposition à beaucoup de poussières).

Dans l’activité exercée jusqu’ici (agent d’entretien), la capacité de travail était de 0% depuis juin 2017, pour des motifs d’ordre rhumatologique, et de 50% (4h/j) depuis le 12 août 2020 pour des raisons pneumologiques (syndrome des apnées nocturnes modéré à sévère de type obstructif [G47.31], troubles de maintien du sommeil [G47.0], BPCO de stade II, avec emphysème [J44]. En revanche, les diagnostics relevant des autres disciplines médicales (trouble dépressif léger [F33.1], traits de la personnalité dépendante [Z73.1], diabète de type II non compliqué [E66] étaient sans effet sur la capacité de travail.

Dans une activité adaptée (activité sédentaire), la capacité de travail était de 70% (soit 100% avec une diminution de rendement de 30%) depuis le 15 janvier 2020, pour raisons pneumologiques, ce qui s’expliquait par le syndrome des apnées nocturnes (problèmes de fatigue et de somnolence). S’agissant enfin des mesures médicales et thérapies ayant une incidence sur la capacité de travail, l’expert rhumatologue a proposé la poursuite du traitement conservateur. Quant à l’expert pneumologue, il a proposé un nouvel essai par CPAP nasale qui permettrait de corriger au moins partiellement la somnolence et la fatigue, pour la composante due au syndrome des apnées du sommeil.

k. Par avis du 20 septembre 2021, le SMR a fait siennes les conclusions de l’expertise pluridisciplinaire, sans toutefois retenir l’exigibilité d’un traitement, motif pris que l’amélioration attendue ne serait que partielle et que les symptômes de fatigue et de somnolence étaient difficiles à objectiver. Il a précisé les limitations fonctionnelles retenues par les experts, en ce sens qu’une activité adaptée, exigible à 100% dès le 6 juin 2017, mais assortie d’une diminution de rendement de 30% dès le 15 janvier 2020, devait privilégier une activité de type sédentaire ou semi-sédentaire et être exempte :

-          d’efforts de soulèvement de plus de 5kg à partir du sol, de porte-à-faux ou de rotation répétée du rachis cervical ;

-          de port de charges proches du corps, supérieures à 10 kg ;

-          d’élévations des membres supérieurs au-dessus de l’horizontale ;

-          d’escaliers, échafaudages et échelles ;

-          de conduite d’un véhicule à titre professionnel ;

-          de travail nécessitant beaucoup de concentration, de précision et de mémoire ;

-          de contact avec la poussière.

l. Le 14 décembre 2021, l’OAI a fixé le degré d’invalidité de l’assuré à 34.85% sur la base du raisonnement et des calculs suivants : il convenait de déterminer le revenu sans invalidité sur la base de l’enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) et d’établir la comparaison suivante : en se référant au tableau TA1 (tirage « skill level »), secteur privé, ligne 82 (i.e activité de service administratif et
de soutien aux entreprises), un homme pouvait réaliser, dans une activité
de niveau 1, un revenu mensuel de « CHF 4’731.- selon l’ESS 2018 » (recte :
CHF 4’731.- selon l’ESS 2016, soit CHF 56’772.- par année). En tenant compte de la durée normale de travail s’élevant à 41.7 heures, le revenu avec invalidité se montait à CHF 4’932.- (soit CHF 59’185.- par année). L’indexation de ce revenu à 2020 (59’185 x 2’298 / 2260) aboutissait à un revenu brut avec invalidité de CHF 60’180.-, respectivement CHF 42’126.- après la prise en compte d’une diminution de rendement de 30%. En comparant ce dernier montant au revenu que l’assuré réalisait en tant qu’agent de nettoyage auprès de la Ville de C______ en 2016 (CHF 62’983.-), indexé à 2020 (CHF 64’643.-), la perte de gain s’établissait à CHF 22’517.- et le degré d’invalidité à 35% [(64’643 – 42’126) x 100 / 64’643 = 34.83%, arrondi à 35%].

m. Par décision du 15 décembre 2021, l’OAI a confirmé son projet de décision
du 23 avril 2020 en tant qu’il fixait le taux d’invalidité à 15% une fois la réadaptation professionnelle achevée. L’OAI a précisé en outre qu’au vu des résultats de l’instruction médicale qu’il avait menée suite au courrier du 11 mai 2020 de l’assuré, la capacité de travail dans une activité adaptée était toujours de 100% mais assortie d’une diminution de rendement de 30% depuis le 15 janvier 2020. En procédant à un calcul du degré d’invalidité sur ces nouvelles bases,
le taux d’invalidité (35%) demeurait inférieur au minimum de 40% requis
pour l’ouverture du droit à une rente. Pour le surplus de nouvelles mesures professionnelles n’étaient pas indiquées, dans la mesure où « l’activité adaptée de type coursier-huissier [était] toujours d’actualité et exigible ».

C. a. Le 31 janvier 2022, l’assuré, assisté de son conseil, a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) d’un recours contre cette décision, concluant à son annulation, à la mise en œuvre d’une expertise pluridisciplinaire et, cela fait, au calcul du degré d’invalidité.

À l’appui de ses conclusions, il a fait valoir que selon ses médecins traitants, en particulier la Dresse E______ (cf. le rapport du 22 octobre 2018), son incapacité de travail était totale dans toute activité. En revanche, les experts considéraient qu’il était un simulateur et refusaient de lui reconnaître une « invalidité » quelconque dans une activité adaptée. Ce point de vue était incompréhensible si l’on se référait à son parcours professionnel. Selon le rapport du 22 octobre 2018 de la Dresse E______, en effet, l’assuré avait été « licencié selon lui à cause de ses difficultés de concentration, des oublis, des troubles du comportement et de son irritabilité ». Compte tenu des éléments rapportés par ce médecin, il était nécessaire que la chambre de céans ordonne une nouvelle expertise dans les domaines de la neuropsychologie, de la psychiatrie, de la pneumologie et de la rhumatologie et, cela fait, détermine son taux d’invalidité.

Le recourant a également versé au dossier :

-          un rapport du 12 janvier 2022 de Madame P______, psychologue FSP, contresigné par la doctoresse Q______, psychiatre et psychothérapeute FMH, indiquant qu’elle suivait régulièrement le recourant depuis janvier 2021 sur délégation de la Dresse Q______. Selon cette psychologue, le recourant présentait un ralentissement psychomoteur important, une perte de motivation, des difficultés attentionnelles et de mémorisation. À cela s’ajoutait une anhédonie et une perte d’intérêt. Il était limité au niveau de ses affects, avec un sentiment anxieux sous forme de panique et angoisses envahissantes amenant un repli social marqué et l’évitement de nombreuses situations, transports, magasins, lieux nouveaux, clos par exemple. Il présentait des troubles du sommeil avec des réveils nocturnes multiples, des cauchemars et des réveils précoces sans possibilité de se rendormir, amenant un état de fatigue important. Il présentait une thymie très affectée, avec de la tristesse et des pleurs ainsi que de l’abattement, accompagnés de pensées suicidaires. Il montrait une perte d’autonomie importante, raison pour laquelle il ne pouvait pas vivre seul sans aide. Il était actuellement hébergé chez sa fille aînée. Cette dernière l’aidait entre autres au niveau organisationnel, administratif, dans ses déplacements, son alimentation et la prise de son traitement ;

-          un rapport du 12 janvier 2022 par lequel la Dresse D______ décrivait retenir trois principaux diagnostics empêchant le recourant de travailler : un syndrome de stress post-traumatique dans les suites de deux agressions en 2003, et une en 2015, avec un trouble anxiodépressif et un trouble dépressif récurrent, des cervicobrachialgies ainsi qu’une discopathie étagée avec cunéisation de D7 et D8 depuis 2019, des troubles respiratoires avec BPCO II avec emphysème et syndrome d’apnée du sommeil sévère. Par ailleurs, ce médecin décrivait d’autres problèmes de santé qui avaient un impact moindre sur sa vie de tous les jours, mais qu’il devait contrôler régulièrement.

b. Par réponse du 2 mars 2022, l’intimé a conclu au rejet du recours en faisant valoir en substance que les arguments du recourant consistaient essentiellement à souligner qu’en partant d’un même état de fait connu des experts, les médecins traitants en tiraient des conclusions différentes, sans pour autant mettre en lumière des éléments objectivement vérifiables – de nature clinique ou diagnostique – qui auraient été ignoré dans le cadre de l’expertise. Dans ces conditions, c’était à juste titre que la décision attaquée s’en tenait aux conclusions des experts, à savoir que le recourant ne pouvait plus exercer son activité habituelle, mais disposait d’une capacité de travail de 70% dans une activité adaptée.

Pour le surplus, l’intimé a joint à sa réponse un avis médical du 28 février 2022, par lequel le SMR indiquait que le rapport de la Dresse D______ du 12 janvier 2022 n’apportait pas de nouvel élément médical objectif. Les problèmes psychiatriques n’étaient pas du ressort d’un médecin généraliste. Quant aux atteintes cervicale et pneumologique, elles avaient été appréciées par l’expert rhumatologue, respectivement l’expert pneumologue. Durant l’expertise, l’assuré n’avait pas émis de plaintes dorsales et l’examen clinique n’avait pas relevé de particularités à ce niveau. Quant au rapport de Mme P______ du 12 janvier 2022, la description qui y était effectuée était en tous points semblable à celle mentionnée dans l’expertise pluridisciplinaire du 9 août 2021, soit dans les réponses aux questions de l’expert psychiatre et le compte-rendu des plaintes du recourant. Cependant, lors de son expertise, l’expert psychiatre n’était parvenu ni aux mêmes constatations ni aux mêmes conclusions. En conclusion, les deux rapports du 12 janvier 2022 produits par le recourant n’amenaient aucun élément médical objectif nouveau permettant au SMR de modifier sa précédente appréciation du cas.

c. Par réplique du 30 mars 2022, le recourant a persisté dans ses conclusions,
en particulier la mise en œuvre d’une expertise judiciaire pluridisciplinaire qu’il estimait nécessaire compte tenu des nouveaux rapports médicaux suivants :

-          un rapport du 23 mars 2022, dans lequel la Dresse Q______ indiquait que le recourant présentait un trouble de la personnalité de type état limite et impulsif qui le rendait incapable de contrôler son débordement émotionnel. Ainsi, durant l’entretien, quand on l’interrogeait sur certains éléments anamnestiques qui le contrariaient, il devenait vite irritable et menaçait de quitter l’entretien. Par ailleurs, le traitement neuroleptique à base de Quétiapine avait été remplacé par de l’Abilify® 10mg/j pour contenir l’impulsivité ;

-          un courrier du 21 mars 2022, par lequel la Dresse D______, prenant position au sujet de l’expertise de CEMEDEX SA, informait conseil du recourant que le « point absolument capital » qu’il y avait lieu de contester était le trouble anxio-dépressif léger retenu par l’expert psychiatre. En effet, le rapport du psychiatre traitant du recourant évoquait « un état anxio-dépressif moyen à grave selon évolution », qu’elle pouvait personnellement confirmer et qui était en outre corroboré par l’importance de la médication prescrite (Cymbalta, Imovane, Abilify, Temesta [en réserve], Lyrica). Or, un tel traitement ne se justifierait pas si l’on était en présence d’une dépression légère, ce type d’affection pouvant souvent être traité exclusivement par psychothérapie. En outre, les cervicalgies étaient bien présentes et deux imageries, datant de 2017, respectivement 2019, confirmaient la présence d’arthrose, d’un canal étroit et d’une inflammation. La médecine actuelle ne pouvait hélas offrir qu’un traitement médicamenteux, car une opération aux cervicales s’avérait risquée. En revanche, les douleurs à ce niveau étaient persistantes et leur chronicité avait un fort impact psychologique qui pouvait aggraver l’état anxio-dépressif sus-décrit. En ce qui concernait les fonctions pulmonaires, la Dresse D______ était d’avis que le recourant n’était pas tout à fait collaborant, mais que cela s’expliquait peut-être en partie par les troubles psychiques et les cervicalgies. En ce qui concernait la BPCO de stade II avec emphysème, le recourant devait arrêter de fumer – pour que sa situation ne s’aggrave pas davantage – et faire de la physiothérapie, ce qu’il avait refusé. En ce qui concernait le syndrome d’apnées du sommeil, il devait utiliser plus régulièrement le CPAP, mais c’était un traitement très contraignant qui pouvait aussi être angoissant. Quant aux troubles du sommeil, ils étaient multifactoriels (anxio-dépression, syndrome post-traumatique, apnée du sommeil mal gérée). Cela créait une fatigue intense et de la somnolence diurne, ce qui ne favorisait ni la concentration ni l’humeur. Enfin, le diabète était léger et n’affectait actuellement pas la capacité de travail. Ce constat s’appliquait également à l’hépatopathie sur hépatite B chronique. En résumé, le recourant présentait un important trouble psychiatrique qui était la cause principale de son incapacité de travail. Cela influait sur les autres diagnostics en les aggravant ou en ne permettant pas un traitement adéquat.

d. Par duplique du 26 avril 2022, l’intimé a indiqué avoir soumis au SMR les pièces annexées à la réplique. Dans la mesure où ce service avait déclaré, par
avis du 11 avril 2022, qu’en l’absence de nouvel élément médical permettant de remettre en cause son appréciation du 20 septembre 2021, il y avait lieu de s’en tenir aux conclusions figurant dans les précédentes écritures.

e. Par courrier du 24 mai 2022, l’assuré a persisté dans ses conclusions.

f. Le 31 mai 2022, la chambre de céans a transmis à l’intimé, pour information, une copie de la dernière écriture du recourant.

g. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA – RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI – RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.              

2.1 À teneur de l’art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-invalidité, à moins que la loi n’y déroge expressément.

2.2 Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a a contrario LPGA).

2.3 Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l’état de fait réalisé à
la date déterminante de la décision litigieuse (ATF
144 V 210 consid. 4.3.1 ;
ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).

En l’occurrence, la décision querellée a été rendue antérieurement au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur ancienne teneur.

3.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA – E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pendant la période du 18 décembre au 2 janvier inclusivement (art. 38 al. 4 let. c LPGA et art. 89C let. c LPA), le recours est recevable.

4.             À titre liminaire, il y a lieu de déterminer l’objet du litige.

L’objet du litige est le rapport juridique qui – dans le cadre de l’objet de la contestation déterminé par la décision – constitue, d’après les conclusions du recours, l’objet effectivement attaqué. D’après cette définition, l’objet de la contestation et l’objet du litige sont identiques lorsque la décision administrative est attaquée dans son ensemble. En revanche, lorsque le recours ne porte que sur une partie des rapports juridiques déterminés par la décision, les rapports juridiques non contestés son certes compris dans l’objet de la contestation, mais non pas dans l’objet du litige (ATF 131 V 164 consid. 2.1 ; 125 V 413 consid. 1b et 2 et les références citées).

Les questions qui – bien qu’elles soient visées par la décision administrative et fassent ainsi partie de l’objet de la contestation – ne sont plus litigieuses, d’après les conclusions du recours, et qui ne sont donc pas comprises dans l’objet du litige, ne sont examinées par le juge que s’il existe un rapport de connexité étroit entre les points non contestés et l’objet du litige (arrêt du Tribunal fédéral 9C_197/2007 du 27 mars 2008 consid. 1.2 et les références).

En l’espèce, la décision querellée nie au recourant aussi bien le droit à de nouvelles mesures d’ordre professionnel que celui à une rente d’invalidité. Cela étant, en tant que le recourant conteste le taux d’invalidité fixé par l’intimé (35%), sans pour autant remettre en cause le refus de nouvelles mesures d’ordre professionnel, le recours dont est saisie la chambre de céans ne concerne que le droit à une rente d’invalidité, qui est donc seul litigieux.

5.             Est réputée invalidité, l’incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l’ensemble ou d’une partie des possibilités de gain de l’assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d’une atteinte à la santé physique ou mentale et qu’elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2).

6.              

6.1 En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois-quarts de rente s’il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

Pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA ;
ATF 130 V 343 consid. 3.4). La détermination du taux d’invalidité ne saurait reposer sur la simple évaluation médico-théorique de la capacité de travail de l’assuré car cela revient à déduire de manière abstraite le degré d’invalidité de l’incapacité de travail, sans tenir compte de l’incidence économique de l’atteinte à la santé (ATF 114 V 281 consid. 1c et 310 consid. 3c ; RAMA 1996 n° U 237
p. 36 consid. 3b).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d’invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l’incapacité fonctionnelle qu’il importe d’évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure
où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain
de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001
consid. 1).

6.2  

6.2.1 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l’art. 4 al. 1 LAI en lien avec l’art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d’un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l’assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l’assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c; ATF 102 V 165 consid. 3.1; VSI 2001 p. 223 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral des assurances
I 786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).

La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanent d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, tel la CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; ATF 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1; ATF 130 V 396 consid. 5.3 et 6).

6.2.2 Dans l’ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d’évaluation de la capacité de travail, respectivement de l’incapacité
de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d’affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d’évaluation au moyen d’un catalogue d’indicateurs (ATF 141 V 281 consid. 4). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d’évaluation aux autres affections psychiques
(ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Aussi, le caractère invalidant d’atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d’un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au sein desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l’art (ATF 143 V 409 consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 3 et les références).

Le Tribunal fédéral a en revanche maintenu, voire renforcé, la portée des motifs d’exclusion définis dans l’ATF 131 V 49, aux termes desquels il y a lieu de conclure à l’absence d’une atteinte à la santé ouvrant le droit aux prestations d’assurance, si les limitations liées à l’exercice d’une activité résultent d’une exagération des symptômes ou d’une constellation semblable, et ce même si les caractéristiques d’un trouble au sens de la classification sont réalisées. Des indices d’une telle exagération apparaissent notamment en cas de discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, l’allégation d’intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l’absence de demande de soins, de grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l’anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l’expert, ainsi que l’allégation de lourds handicaps malgré un environnement psycho-social intact (ATF 141 V 281 consid. 2.2.1 et 2.2.2; ATF 132 V 65 consid. 4.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2016 du 14 juin 2016 consid. 3.2).

L’organe chargé de l’application du droit doit, avant de procéder à l’examen des indicateurs, analyser si les troubles psychiques dûment diagnostiqués conduisent à la constatation d’une atteinte à la santé importante et pertinente en droit de l’assurance-invalidité, c’est-à-dire qui résiste aux motifs dits d’exclusion tels qu’une exagération ou d’autres manifestations d’un profit secondaire tiré de la maladie (cf. ATF 141 V 281 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 5.2.2 et la référence).

6.2.3 Pour des motifs de proportionnalité, on peut renoncer à une appréciation selon la grille d’évaluation normative et structurée si elle n’est pas nécessaire ou si elle est inappropriée. Il en va ainsi notamment lorsqu’il n’existe aucun indice en faveur d’une incapacité de travail durable ou lorsque l’incapacité de travail est niée sous l’angle psychique sur la base d’un rapport probant établi par un médecin spécialisé et que d’éventuelles appréciations contraires n’ont pas de valeur probante du fait qu’elles proviennent de médecins n’ayant pas une qualification spécialisée ou pour d’autres raisons (arrêt du Tribunal fédéral 9C_101/2019 du 12 juillet 2019 consid. 4.3 et la référence ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_724/2018 du 11 juillet 2019 consid. 7). En l’absence d’un diagnostic psychiatrique, une telle appréciation n’a pas non plus à être effectuée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_176/2018 du 16 août 2018 consid. 3.2.2).

7.              

7.1 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d’autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1). La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore raisonnablement exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 ; ATF 115 V 133 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_442/2013 du 4 juillet 2014 consid. 2).

7.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (art. 61 let. c LPGA), le juge n’est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu’en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l’affaire sans apprécier l’ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L’élément déterminant pour la valeur probante d’un rapport médical n’est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l’objet d’une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu’il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l’expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3 ; ATF 125 V 351 consid. 3).

7.3 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d’apprécier certains types d’expertises ou de rapports médicaux.

7.3.1 Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d’observations approfondies et d’investigations complètes, ainsi qu’en pleine connaissance du dossier, et que l’expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu’aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

7.3.2 Un rapport du SMR a pour fonction d’opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu’il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d’une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d’un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante et il est admissible que l’office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve ; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1).

7.3.3 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l’expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l’unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S’il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l’objectivité ou l’impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l’éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l’existence d’éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

7.3.4 En cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n’est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s’apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu’au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d’expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; SVR 2008
IV n° 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l’administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu’un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n’en va différemment que si ces médecins traitants font état d’éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l’expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l’expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_776/2009 du 11 juin 2010 consid. 2.2).

8.              

8.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Il n’existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

8.2 Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a ; ATF 122 III 219 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 – Cst ; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; ATF 122 V 157 consid. 1d).

9.              

9.1 La décision attaquée retient sur la base des avis du SMR rendus avant, respectivement après le rapport d’expertise pluridisciplinaire du 8 septembre 2021, que le recourant présente une capacité de travail nulle dans son activité habituelle depuis le 6 juin 2017, mais entière dans une activité adaptée depuis cette même date. Dite décision retient également qu’au terme de la comparaison des revenus effectuée à l’issue des mesures d’ordre professionnel, le recourant ne subissait qu’une perte de gain de CHF 9’808.- (soit 15%), majorée à CHF 22’517.- (soit 35%) dès le 15 janvier 2020, étant donné que l’expertise pluridisciplinaire a conclu à une capacité de travail demeurant entière dans une activité adaptée, mais assortie d’une diminution de rendement de 30% dès cette date.

Le recourant conteste les conclusions des experts, au motif que leurs appréciations diagnostiques – en particulier sur le plan psychiatrique – seraient contredites notamment par son médecin traitant, la Dresse D______, ainsi que ses psychiatres successives, les Dresses E______ et Q______.

Dans ces conditions, il convient tout d’abord d’examiner la valeur probante du rapport d’expertise pluridisciplinaire.

9.2  

9.2.1 Dans leur rapport du 8 septembre 2021, les experts ont retenu les diagnostics suivants :

-          avec répercussion sur la capacité de travail (diagnostics rhumatologiques et pneumologiques) :

névralgie cervicobrachialgie gauche non déficitaire sur uncarthrose (M53.1) ;

syndrome des apnées nocturnes modéré à sévère de type obstructif (G47.31) ;

BPCO de stade II, avec emphysème (J44);

-          sans répercussion sur la capacité de travail :

trouble dépressif léger (F33.1) ;

traits de la personnalité dépendante (Z73.1) ;

diabète de type II non compliqué (E66) ;

Alors que la névralgie cervicobrachialgie gauche non déficitaire sur uncarthrose rend seulement inexigible la poursuite de l’activité d’agent d’entretien depuis juin 2017, sans affecter, pour le surplus, la pleine exigibilité d’une activité adaptée, la situation d’un point de vue pulmonaire s’articule principalement autour de deux dates, soit la polysomnographie du 15 janvier 2020 et les fonctions pulmonaires du 12 août 2020. S’agissant de l’examen du 15 janvier 2020, celui-ci a mis en évidence un syndrome des apnées nocturnes modéré à sévère et a comme conséquence une fatigue, une somnolence diurne et des troubles de la mémoire
et de la concentration. Quant à la BPCO de stade II, avec emphysème, son diagnostic est basé sur les fonctions pulmonaires effectuées le 12 août 2020. Cette affection entraîne une dyspnée d’effort et parfois des épisodes de dyspnée paroxystique nocturne, ce qui permet à l’expert pneumologue de conclure que dans l’activité habituelle d’agent d’entretien, la capacité de travail est réduite à 50% (4h/jour) depuis le 12 août 2020, alors qu’elle était de 100% auparavant. L’expert précise que cette atteinte pulmonaire ne jouerait plus de rôle dans une activité sédentaire, mais que dans une telle activité, qui serait exigible à plein temps, il y aurait néanmoins une diminution de rendement de 30%, ce depuis
le 15 janvier 2020, en raison des problèmes de fatigue et de somnolence dus au syndrome des apnées nocturnes.

Les experts ont rendu un rapport basé sur une documentation complète. Chaque volet de l’expertise comporte une anamnèse par domaine, relate les plaintes du recourant et comporte des examens complets dans chacune des cinq spécialités médicales. En outre, les diagnostics sont précis, les constatations sont claires et les conclusions bien motivées. Le rapport d’expertise pluridisciplinaire doit donc en principe se voir reconnaître une pleine valeur probante.

9.3  

9.3.1 Dans un premier moyen, le recourant fait valoir que « les médecins mandatés par l’AI considèrent [qu’il] est un simulateur et refusent de lui reconnaître une invalidité quelconque dans une activité adaptée » et que ce point de vue est incompréhensible si l’on se réfère à son parcours professionnel, puisqu’il a été licencié précisément parce qu’il souffrait de troubles de la mémoire, de la concentration qui l’empêchaient d’exercer l’activité de coursier-huissier que l’AI estime exigible. Le recourant s’appuie en grande partie sur le rapport du 22 octobre 2018 de la Dresse E______, selon laquelle le syndrome de stress post-traumatique (F43.1) et le trouble dépressif récurrent, épisode actuel moyen (F33.1) réduisent sa capacité de travail à néant dans toute activité.

S’agissant de la cause du licenciement, le rapport de la Dresse E______ ne fait qu’énoncer ce que le recourant a lui-même exposé, à savoir qu’il a été licencié par la Ville de C______, selon lui, à cause de ses difficultés de concentration, des oublis, des troubles du comportement et de son irritabilité. Cela étant, dans les premières déclarations du recourant du 16 novembre 2017, ce dernier a indiqué avoir exercé l’activité d’agent d’entretien-nettoyage auprès de la Ville de C______, dans le cadre d’un remplacement, et avoir dû quitter cet emploi lorsque la personne qu’il remplaçait était revenue à son poste de travail. L’on ne saurait dès lors retenir pour établi que la Ville de C______ aurait mis fin à ce rapport de travail en raison de l’état de santé du recourant. L’on constate d’ailleurs que le recourant a fondé sa demande de prestations sur un certificat de la Dresse D______ (non daté mais annexé à la demande de prestations du 19 septembre 2017) qui n’évoquait que des cervicobrachialgies à titre d’atteintes à la santé invalidantes. L’éventualité de troubles psychiques invalidants additionnels n’est apparue qu’à partir du 22 mars 2018, date à laquelle le recourant a présenté un certificat d’incapacité de travail à 50% à l’occasion du bilan intermédiaire de son stage auprès de la Poste. Concernant l’aspect psychique, il sied également de constater que l’entreprise R______, auprès de laquelle le recourant a suivi des cours de formation en bureautique et dactylographie, attestait en date du 15 février 2018 que le recourant comprenait et apprenait très vite (s’agissant de Word), était excellent et apprenait avec un esprit logique (s’agissant d’Excel), semblait assimiler toutes les notions Outlook et était en résumé un excellent apprenant, volontaire et motivé. Ces constats ne semblent pas compatibles avec les difficultés exposées par le recourant, ce qui permet d’expliquer les discordances relevées par les experts au sujet des capacités démontrées par le recourant lors des tests et celles qu’il a manifestées en dehors des tests. S’agissant de l’activité de coursier exercée auprès de la Poste, le recourant soutient avoir vu son contrat résilié immédiatement en raison « d’ennuis » qu’il avait eu avec des personnes n’ayant jamais reçu leur acte de poursuite. Cet élément ne ressort pas du rapport d’évaluation de stage, plutôt satisfaisant, lequel a, au contraire, été suivi jusqu’à son terme (le 27 avril 2018) malgré un arrêt de travail à 50% dès la troisième semaine de stage.

S’agissant des violences subies en Tunisie et de leurs répercussions, l’expert psychiatre ayant réalisé l’expertise pluridisciplinaire a noté que l’expertisé ne les avaient pas signalées. Mais les experts avaient pris connaissance dans le dossier du fait que le recourant avait été expulsé de l’école en raison de son activité politique et qu’il aurait été emprisonné et torturé en Tunisie. L’expertisé avait dès lors été interrogé sur ces éléments et avait indiqué qu’il ne s’en souvenait plus. Les experts n’ont dès lors pas ignoré ces éléments et en ont tiré les conclusions qui s’imposaient selon leurs appréciations de spécialistes.

Il ressort en outre du rapport d’expertise pluridisciplinaire que le recourant s’est soumis à un bilan neuropsychologique aux HUG le 18 octobre 2018, dont le rapport (non versé au dossier AI), établi par Monsieur S______, neuropsychologue. Ce rapport est cité en ces termes par l’expert O______ (et avant lui par l’expert F______) : « l’examen neuropsychologique met en évidence un déficit cognitif d’intensité légère à modérée (selon les critères de l’ASNP, 2015) touchant les fonctions attentionnelles et exécutives, et pouvant affecter les rendements mnésiques. Les difficultés cognitives objectivées ne sont pas de nature et d’intensité à limiter la capacité fonctionnelle du patient au quotidien ainsi que pour la plupart des sollicitations professionnelles. Toutefois, la capacité fonctionnelle "peut être fortement à cause " [sic] des symptômes anxieux et dépressifs sévères ». Dans le cadre du volet neuropsychologique de l’expertise pluridisciplinaire, Mme K______ a indiqué que bien qu’un « comparatif strict avec l’examen de M. S______ du 24 juillet 2018 ne puisse être réalisé (emploi de tests différents), l’appréciation qualitative et les épreuves similaires aux deux bilans (en rouge dans le tableau de résultats) permettent de mettre en évidence une nette dégradation des performances [ ]. En plus des épreuves psychométriques standards évaluant le fonctionnement cognitif, plusieurs épreuves évaluant la validité des symptômes et la validité des performances (épreuves indépendantes et mesures intégrées aux tests standards) ont été administrées et aboutissent chacune à un résultat invalide [alors qu’on] relève de nombreuses incohérences sur le plan clinique, notamment entre la symptomatologie cognitive présentée par l’expertisé durant l’évaluation formelle et son comportement lorsqu’il n’est pas conscient d’être évalué. En effet, les performances [du recourant] dans les épreuves de mémoire épisodique correspondent à des troubles sévères avec oubli à mesure (c’est-à-dire après quelques secondes, tels que dans les syndromes amnésiques) alors qu’aucune répétition de consigne n’est nécessaire durant l’examen chez un expertisé se présentant seul au retour des pauses, devant le bon bureau et en respectant l’heure indiquée oralement 15 minutes auparavant (témoignant d’un apprentissage rapide avec maintien de l’information à plusieurs minutes). L’expertisé utilise par ailleurs son smartphone pour joindre sa fille (devant l’examinatrice) sans difficulté ni ralentissement, alors qu’on s’attend à ce que cette opération (i.e utilisation d’un smartphone avec activation de l’écran tactile, déverrouillage par code, recherche du contact dans le répertoire, appel et transmission de la bonne information) ne puisse être réalisée, compte tenu des performances attentionnelles, exécutives et mnésiques relevées aux épreuves psychométriques. À noter également une incohérence entre les plaintes [du recourant] concernant son incapacité à accomplir certaines tâches du quotidien (déplacements seul à l’extérieur, achats, organisation et planification) et ce qui est cliniquement observé lors de la consultation [ ] » (rapport d’expertise du 8 septembre 2021, p. 24/52).

Mme K______ en a conclu que « les différents éléments identifiés lors de cette évaluation neuropsychologique sont en faveur d’un "malingering" (simulation) d’une dysfonction neurocognitive au sens des critères de Sherman
et al. (2020). À noter qu’un "malingering" peut coexister avec des troubles psychiatriques de type somatoforme (e.g. trouble dissociatif, trouble factice) et en présence d’autres troubles psychiatriques (e.g. dépression) ».

Le recourant, tirant argument de cette dernière affirmation, affirme que les tests mis en place par Mme K______ ne permettraient pas de remettre en cause les troubles psychiatriques relevés par les médecins traitants, mais seraient inexploitables.

La chambre de céans constate que l’hypothèse d’une coexistence d’autres troubles psychiatriques significatifs (aux côtés de la simulation d’une dysfonction neurocognitive) est démentie par l’expert psychiatre, lequel s’est livré à une évaluation de la cohérence et de la plausibilité (qui ne ressort pas des rapports établis par les psychiatres successives de l’intéressé et de son médecin traitant) et a constaté un comportement certes « revendicateur », mais pas de trouble de la personnalité, pas d’anomalie concernant la lignée psychotique, le registre cognitif et le registre anxieux, et pas non plus de signes cliniques d’un état de stress post-traumatique. L’expert a objectivé uniquement des signes cliniques lui permettant de poser les diagnostics (sans effet sur la capacité de travail) de trouble dépressif plutôt léger (F33.0) et de traits de la personnalité dépendante (Z73.1). Il s’ensuit que les arguments développés par le recourant sont uniquement tirés de l’appréciation différente d’un même état de fait médical par ses psychiatres et
son médecin traitant, sans que ces praticiens fassent état d’éléments objectivement vérifiables et suffisamment pertinents qui auraient été ignorés dans le cadre des volets psychiatrique et neuropsychologique de l’expertise. Le rapport d’expertise apparaît dès lors fondé et probant.

En revanche, l’avis de la Dresse Q______ (« trouble de personnalité de type état limite et impulsif ») ne peut être suivi, dans la mesure où il contient des éléments factuels non vérifiés et contradictoires s’agissant notamment de la relation entre le recourant et sa mère (il ressort du dossier que le recourant avait une mère affectueuse (rapport d’expertise, p. 7/52), alors que la Dresse Q______ indique que le recourant a été victime de violence de la part de cette dernière) et des événements survenus en Tunisie que les autres médecins du recourant n’ont pas relatés et que le recourant lui-même a omis d’indiquer aux experts et dont il a dit, sur question, ne pas avoir de souvenirs.

9.3.2 Le recourant soutient également qu’il souffre de douleurs dorsales en s’appuyant sur les rapports et documents d’imagerie produits en pièces 12, 12bis et 12ter de son bordereau du 30 mars 2022, également cités par la Dresse D______ dans son courrier du 21 mars 2022. La chambre de céans constate toutefois que ces documents ont été examinés par l’expert rhumatologue et concernent la colonne cervicale (et non dorsale). Sur ce point, l’expert a rapporté que le recourant était « extrêmement démonstratif [ ] avec des plaintes et des cris à chaque appui cervical, dorsal ou lombaire, sans véritablement un point de fibromyalgie ». L’expert n’a cependant pu objectiver que des douleurs centrées
sur le rachis cervical, le membre supérieur gauche et à un moindre degré à droite et posé le diagnostic de névralgie cervico-brachiale gauche non déficitaire sur uncarthrose (M53.1). Il ne ressort pas du rapport de la Dresse D______ du 21 mars 2022 qu’il existerait un désaccord à ce sujet.

9.3.3 Enfin, le recourant indique qu’une IRM, effectuée le 17 mars 2022, révèle un emphysème centro-lobulaire dont il ne serait pas fait mention dans le rapport d’expertise du 8 septembre 2021. Contrairement à ce qui est allégué, la chambre de céans constate, avec le SMR, que le diagnostic d’emphysème pulmonaire a été retenu par l’expert pneumologue, lequel mentionne une « BPCO stade II, avec emphysème » et qui en a tenu compte dans son appréciation, en se basant sur l’examen clinique et les résultats des fonctions pulmonaires.

9.4 Compte tenu de ce qui précède, les éléments avancés par le recourant ne
sont pas de nature à mettre en doute le bien-fondé des conclusions du rapport d’expertise du 8 septembre 2021. En conséquence, la chambre de céans considère qu’il est établi, au degré de la vraisemblance prépondérante, que depuis le 6 juin 2017, le recourant présente une capacité de travail nulle dans son activité habituelle d’agent d’entretien, mais entière dans une activité adaptée, toutefois assortie d’une baisse de rendement de 30%, d’étiologie pneumologique, depuis
le 15 janvier 2020.

10.         Il convient à présent de vérifier le calcul du degré d’invalidité opéré par l’intimé.

10.1 Chez les assurés actifs, le degré d’invalidité doit être évalué sur la base d’une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l’assuré aurait pu réaliser s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA).

La comparaison des revenus s’effectue, en règle ordinaire, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant l’un avec l’autre, la différence permettant de calculer le taux d’invalidité (méthode générale de comparaison des revenus; ATF 128 V 29 consid. 1; ATF 104 V 135 consid. 2a et 2b).

Pour fixer le revenu sans invalidité, il faut établir ce que l’assuré aurait – au
degré de la vraisemblance prépondérante – réellement pu obtenir au moment déterminant s’il n’était pas invalide (ATF 139 V 28 consid. 3.3.2 et ATF 135 V 297 consid. 5.1). Ce revenu doit être évalué de manière aussi concrète que possible si bien qu’il convient, en règle générale, de se référer au dernier salaire que l’assuré a obtenu avant l’atteinte à la santé, en tenant compte de l’évolution des circonstances au moment de la naissance du droit à la rente et des modifications susceptibles d’influencer ce droit survenues jusqu’au moment
où la décision est rendue (ATF 129 V 222 consid. 4.1; arrêt du Tribunal
fédéral 9C_869/2017 du 4 mai 2018 consid. 2.2). Ce n’est qu’en présence de circonstances particulières qu’il peut se justifier qu’on s’en écarte et qu’on
recoure aux données statistiques résultant de l’ESS éditée par l’Office fédéral de la statistique (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 201/06 du 14 juillet 2006 consid. 5.2.3 et I 774/01 du 4 septembre 2002). Tel sera le cas lorsqu’on ne dispose d’aucun renseignement au sujet de la dernière activité professionnelle de l’assuré ou si le dernier salaire que celui-ci a perçu ne correspond manifestement pas à ce qu’il aurait été en mesure de réaliser, selon toute vraisemblance, en tant que personne valide; par exemple, lorsqu’avant d’être reconnu définitivement incapable de travailler, l’assuré était au chômage ou rencontrait d’ores et déjà des difficultés professionnelles en raison d’une dégradation progressive de son état de santé ou encore percevait une rémunération inférieure aux normes de salaire usuelles. On peut également songer à la situation dans laquelle le poste de travail de l’assuré avant la survenance de l’atteinte à la santé n’existe plus au moment déterminant de l’évaluation de l’invalidité (arrêts du Tribunal fédéral des assurances I 168/05 du 24 avril 2006 consid. 3.3 et B 80/01 du 17 octobre 2003 consid. 5.2.2).

Quant au revenu d’invalide, il doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l’intéressé (ATF 135 V 297 consid. 5.2). Lorsque l’assuré n’a pas repris d’activité, ou aucune activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, contrairement à ce qui serait raisonnablement exigible de sa part, le revenu d’invalide peut être évalué sur la base de données statistiques, telles qu’elles résultent de l’ESS (ATF 143 V 295 consid. 2.2 et la référence ; ATF 135 V 297 consid. 5.2 et les références). Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table ESS TA1, tirage « skill level », à la ligne « total secteur privé » (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 126 V 75 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_58/2021 du 30 juin 2021 consid. 4.1.1). La valeur statistique (médiane) s’applique alors, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu’elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu’ils seraient en mesure de réaliser en tant qu’invalides dès lors qu’il recouvre un large éventail d’activités variées et non qualifiées (branche d’activités), n’impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (cf. arrêts du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1 et 9C_242/2012 du 13 août 2012 consid. 3). Il convient de se référer à la version de l’ESS publiée au moment déterminant de la décision querellée (ATF 143 V 295 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2016 du 4 août 2017 consid. 6.3).

10.2 La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l’ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d’autorisation de séjour et taux d’occupation) et résulte d’une évaluation dans les limites du pouvoir d’appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d’une activité lucrative (ATF 135 V 297 consid. 5.2 ; ATF 134 V 322 consid. 5.2 et les références; ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). D’éventuelles limitations liées à la santé, déjà comprises dans l’évaluation médicale de la capacité de travail, ne doivent pas être prises en compte une seconde fois dans l’appréciation de l’abattement, conduisant sinon à une double prise en compte du même facteur (cf. ATF 146 V 16 consid. 4.1 et ss. et les références). L’étendue de l’abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d’appréciation (ATF 132 V 393 consid. 3.3).

Cette évaluation ressortit en premier lieu à l’administration, qui dispose pour cela d’un large pouvoir d’appréciation. Le juge doit faire preuve de retenue lorsqu’il est amené à vérifier le bien-fondé d’une telle appréciation. L’examen porte alors sur le point de savoir si une autre solution que celle que l’autorité, dans le cas concret, a adoptée dans le cadre de son pouvoir d’appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n’aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. Pour autant, le juge ne peut, sans motif pertinent, substituer son appréciation à celle de l’administration; il doit s’appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 126 V 75 consid. 6; ATF 123 V 150 consid. 2 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 8C_337/2009 du 18 février 2010 consid. 7.5).

10.3 En l’occurrence, s’agissant du revenu sans invalidité, l’intimé ne s’est pas fondé sur des données statistiques, mais sur le dernier salaire que le recourant a obtenu en tant qu’agent d’entretien/nettoyage auprès de la Ville de C______ jusqu’au terme de son contrat en octobre 2016. Sachant que l’incapacité de travail durable dans cette activité ne remonte qu’au 6 juin 2017 et qu’il n’existe pas non plus d’autres indices selon lesquels ce revenu ne correspondait pas, déjà en 2016, à ce qu’il aurait été en mesure de réaliser, selon toute vraisemblance, en tant que personne valide, le choix de l’intimé de se fonder sur le revenu en question apparaît conforme à la jurisprudence (ci-dessus : consid. 10.1).

Quant à la fixation du revenu d’invalide sur la base de données statistiques, à savoir la table ESS TA1, tirage « skill level », elle n’apparaît pas critiquable en tant que telle au regard de l’absence de reprise d’une activité (même adaptée)
par le recourant. Cela étant précisé, il y a lieu de constater que lors des calculs d’invalidité effectués en 2019, après les mesures de réadaptation, respectivement en 2021, après le rapport d’expertise pluridisciplinaire, l’intimé ne s’est pas fondé sur le revenu correspondant à la « ligne total secteur privé » du tableau en question, mais sur les lignes 77-82 de celui-ci (activités de services administratifs et de soutien aux entreprises).

Or, selon le Tribunal fédéral, même si cela apparaît indiqué dans un cas concret pour permettre à l’assuré de mettre pleinement à profit sa capacité résiduelle de travail, le fait se référer aux salaires mensuels de secteurs particuliers (secteur 2 [production] ou 3 [services]), voire à des branches particulières, constitue certes une faculté, mais elle concerne les cas particuliers dans lesquels, avant l’atteinte à la santé, l’assuré a travaillé dans un domaine pendant de nombreuses années et où une activité dans un autre domaine n’entre pratiquement plus en ligne de compte. Il y a en revanche lieu de se référer à la ligne « total secteur privé » lorsque l’assuré ne peut plus raisonnablement exercer son activité habituelle et qu’il est tributaire d’un nouveau domaine d’activité pour lequel l’ensemble du marché du travail est en principe disponible (arrêt du Tribunal fédéral 8C_405/2021 du 9 novembre 2021 consid. 5.2.1 et les arrêts cités). À noter que dans cet arrêt, qui concernait une personne ayant bénéficié d’un reclassement au sens de l’art. 17 LAI, qui avait débouché sur l’obtention d’un certificat d’aide-comptable, le Tribunal fédéral a jugé que la référence au salaire statistique d’une branche particulière (en l’occurrence celle des « activités juridiques et comptables » [ligne 69-71 de la table TA1]) ne se justifiait déjà pas, dans la mesure où il ne ressortait pas du parcours professionnel de l’assurée qu’avant son atteinte à la santé, celle-ci s’était cantonnée à un seul domaine pendant de nombreuses années. En second lieu, le Tribunal fédéral a estimé que le fait de se référer à la ligne 69-71 de la table TA1 – qui visent des personnes disposant d’un niveau de formation élevé, comme un diplôme de comptable – ne reflétait pas la réelle capacité de gain de la simple « aide-comptable » qu’était l’assurée, mais avait bien plutôt pour effet de la pénaliser sur le plan salarial par rapport aux autres assurés dans une situation comparable. Aussi convenait-il, pour déterminer son revenu avec invalidité, de se fonder sur la valeur médiane (« total secteur privé ») du salaire statistique issue de la table TA1, niveau de compétence 2 (cf. arrêt 8C_405/2021 précité consid. 5.2.3).

En l’espèce, il ne ressort pas du curriculum vitae du recourant (dossier AI, doc. 7, p. 24) qu’avant son atteinte à la santé, celui-ci se serait cantonné à un seul domaine d’activité pendant de nombreuses années. Cependant, contrairement au cas visé par l’arrêt 8C_405/2021 précité, où le fait de s’écarter de la valeur médiane « total secteur privé » s’avérait pénalisant pour le droit aux prestations, c’est précisément l’inverse qui se produit, étant relevé que dans la table TA1, tirage « skill level » de l’ESS 2018 ici pertinente, la valeur médiane « total secteur privé » (CHF 5’417.-), s’avère 13.64% plus élevée que la ligne 77-82 que l’intimé considère comme reflétant le mieux la capacité de gain du recourant à l’issue des mesures de réadaptation (CHF 4’767.-). Bien qu’au regard de la jurisprudence précitée, le choix de la ligne 77-82 ne se justifie pas en l’espèce, il n’en demeure pas moins que l’obligation de se référer à la valeur médiane « total secteur privé » diminue d’autant le pouvoir d’appréciation de l’autorité et reporte ce dernier, cas échéant, sur une réduction du salaire statistique (ci-dessus : consid. 10.2).

Sur ce dernier point, l’intimé a considéré, dans son premier calcul du taux d’invalidité (postérieur aux mesures de réadaptation, mais antérieur à l’atteinte pneumologique révélée par l’expertise de CEMEDEX SA) qu’il convenait de déduire du revenu statistique d’invalide un abattement de 10% compte tenu du fait que seule une activité légère était possible, et des limitations fonctionnelles. En revanche, dans son second calcul, l’intimé a estimé qu’eu égard à la réduction de 30% sur le revenu statistique d’invalide, liée à la baisse de rendement (à ce même taux) retenue par le SMR dans son avis du 20 septembre 2021, aucun critère habituellement admis ne permettait de réduction supplémentaire. Ce point de vue apparaît en principe fondé, sachant que lorsqu’un assuré est capable de travailler
à plein temps, mais avec une diminution de rendement, celle-ci est prise en considération dans la fixation de la capacité de travail et il n’y a pas lieu, en sus, d’effectuer un abattement à ce titre (arrêt du Tribunal fédéral 8C_431/2021 du
26 janvier 2022 consid. 5.2). En revanche, un abattement à raison d’autres circonstances est admissible dans la limite maximale de 25%, compte tenu d’autres facteurs personnels et professionnels tels que l’âge ou la nature des limitations fonctionnelles (cf. notamment arrêt du Tribunal fédéral 9C_847/2018 du 2 avril 2019 consid. 6.2.3 et arrêt du Tribunal fédéral 9C_289/2012 du 15 octobre 2012 consid. 3.3.2.2).

En l’espèce, l’expert pneumologue explique que le syndrome des apnées nocturnes, modéré à sévère, objectivé par la polysomnographie du 15 janvier 2020, a pour conséquence une fatigue, une somnolence diurne et des troubles de la mémoire et de la concentration. Il précise que ce syndrome en question justifie une diminution de rendement de 30% depuis le 15 janvier 2020, en raison de problèmes de fatigue et de somnolence. Il ajoute que l’aggravation de l’état de santé, remontant au 12 août 2020 (BPCO de stade II, avec emphysème), réduit depuis lors la capacité de travail dans l’activité habituelle d’agent d’entretien à 50%, mais que cette atteinte pulmonaire (BPCO de stade II, avec emphysème) ne jouerait plus de rôle dans une activité sédentaire qui serait exigible à plein temps, mais avec une diminution de rendement de 30%, en raison des problèmes de fatigue et de somnolence dus au syndrome des apnées nocturnes.

Au vu de la problématique décrite, on ne saurait considérer que la diminution de rendement de 30% retenue par l’expert pneumologue se recouperait avec les limitations fonctionnelles, au point qu’il ne serait pas possible de tenir compte de celles-ci dans le cadre d’une réduction supplémentaire du revenu d’invalide. On constate en premier lieu que la diminution de rendement de 30% est expliquée par les seuls problèmes de fatigue et de somnolence et qu’elle n’inclut donc pas les troubles de la mémoire et de la concentration. En second lieu, il ressort des explications de l’expert que l’atteinte pulmonaire (et la dyspnée d’effort qu’elle entraîne) n’est pas de nature à diminuer le rendement/la capacité de travail à condition que l’activité soit sédentaire. Cela signifie a contrario que si cette dernière ne l’est pas – à l’image de l’activité d’agent d’entretien (qui n’est de toute manière plus exigible pour des motifs rhumatologiques) –, un abattement au titre des limitations fonctionnelles n’équivaut pas à tenir compte deux fois de la diminution de rendement de 30%. Il s’ensuit qu’en l’espèce, aucun employeur potentiel ne retiendrait le dossier du recourant, sans compensation financière, si ce dernier était mis en concurrence avec un autre candidat présentant la même diminution de rendement de 30%, mais qui serait épargné, d’une part, par les troubles de la mémoire et de la concentration et, d’autre part, ne verrait pas son rendement/sa capacité de travail encore réduits en cas d’activité ne s’exerçant pas uniquement en position assise (pour un raisonnement similaire : cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_537/2019 du 25 février 2020 consid. 3.3). En tenant compte encore de l’âge du recourant (presque 56 ans au moment de la naissance d’un éventuel droit à la rente), facteur qui n’est compensé ni par sa formation (il n’en a pas), ni par son expérience professionnelle (pauvre pour son âge), ni par sa capacité d’adaptation (qualifiée de pas entièrement suffisante ; ci-dessus : en fait, point A, let. j), et d’autres facteurs de réduction n’entrant pas en ligne de compte, il se justifie d’opérer un abattement de 20% sur le revenu d’invalide.

10.4 Cela étant précisé, il convient de déterminer le degré d’invalidité de la manière suivante : en se référant à l’ESS 2018 (l’ESS 2020 n’était pas encore publiée au moment déterminant de la décision litigieuse ; ATF 143 V 295
consid. 4), soit à la table TA1 (tirage « skill level »), secteur privé, ligne « total », un homme pouvait réaliser, en 2018, un revenu mensuel de CHF 5’417.- (soit
CHF 65’004.- par année) dans une activité de niveau 1. En tenant compte de
la durée normale de travail s’élevant à 41.7 heures, le revenu avec invalidité est
de CHF 5’647.- (soit CHF 67’767.- par année). L’indexation de ce revenu à
2020 (67’767 x 2’298 / 2’260) permet d’aboutir à un revenu avec
invalidité de CHF 68’906.-, respectivement CHF 48’234.- en tenant compte de
la diminution de rendement. Comme il convient d’appliquer l’abattement de
20% à la part du salaire statistique que le recourant est toujours susceptible de réaliser malgré sa baisse de rendement (20% de 70%, soit 14%), puis de déduire
le résultat obtenu de ladite part salariale (70% - 14% ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_962/2017 du 12 mars 2018 consid. 5), le revenu avec invalidité se monte en définitive à CHF 41’481.-. En comparant ce dernier au revenu sans invalidité réalisé en tant qu’agent de nettoyage en 2016 (CHF 62’983.-), indexé à 2020 selon l’ISS (CHF 64’643.-, soit 62’983 x 2’298 / 2’239), la perte de gain s’établit à CHF 23’162.- et le degré d’invalidité à 36% [(64’643 – 41’481) x 100 / 64’643 = 35.83%, arrondi à 36%], ce qui demeure insuffisant pour ouvrir le droit à une rente. À noter qu’un abattement maximal (25%) ne changerait rien à ce constat.

11.         Compte tenu de ce qui précède, le recours doit être rejeté.

12.         Bien que la procédure ne soit pas gratuite en matière d’assurance-invalidité (cf. art. 69 al. 1bis LAI), il y a lieu en l’espèce de renoncer à la perception d’un émolument, le recourant étant au bénéfice de l’assistance juridique (art. 12 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative – E 5 10.03).

 

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PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Renonce à la perception d’un émolument.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF – RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente

 

 

 

 

Marine WYSSENBACH

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le