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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2400/2020

ATAS/1018/2021 du 04.10.2021 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2400/2020 ATAS/1018/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 4 octobre 2021

10ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée ______, à GENÈVE

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame A______ (ci-après : la bénéficiaire, l'intéressée ou la recourante), née le ______ 1942 en Roumanie, est arrivée en Suisse - venant d'Italie - le 3 septembre 1985, jour de son mariage avec un citoyen suisse, union qui lui avait conféré la nationalité helvétique. Elle est divorcée depuis le 2 avril 1986. Elle a bénéficié de prestations complémentaires à l'AVS/AI (ci-après : PC) depuis le début des années 90.

2.        À la fin de chaque année, elle recevait du service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l'intimé) les plans de calcul des prestations complémentaires valables dès le 1er janvier de l'année suivante; elle était expressément invitée à contrôler attentivement les montants indiqués sur ce document, pour s'assurer qu'ils correspondaient bien à la situation actuelle. Ce courrier lui rappelait qu'il lui appartenait de signaler au SPC sans délai les changements intervenus dans sa situation personnelle et financière. Il indiquait qu'en cas d'omission, les prestations reçues à tort devraient être remboursées et, le cas échéant, des sanctions pénales étaient possibles.

3.        Jusqu'au début 2017, les plans de calcul ne prenaient en compte, au titre de revenu déterminant, que le montant de la rente AVS dont elle était bénéficiaire.

4.        Au printemps 2017, le SPC a entrepris la révision périodique du dossier de la bénéficiaire. Il est apparu des renseignements fiscaux obtenus par le SPC que, depuis plusieurs années, la bénéficiaire disposait d'une fortune mobilière dépassant très sensiblement les deniers de nécessité (CHF 37'500.- pour une personne seule).

5.        Par courrier du 19 mai 2017, le SPC a indiqué à la bénéficiaire qu'il entendait entreprendre la révision périodique de son dossier, et qu'à cette fin, elle était priée de bien vouloir remplir et signer le formulaire ad hoc, accompagné des pièces justificatives demandées. La bénéficiaire a produit les pièces justificatives et autres documents réclamés, après plusieurs rappels.

6.        Par courrier daté du 31 octobre 2017, le SPC a notifié à la bénéficiaire une décision du 5 octobre 2017 après révision du dossier : les nouveaux plans de calcul laissaient notamment apparaitre qu'elle avait perçu trop de prestations pour la période du 1er janvier 2012 au 31 octobre 2017, soit CHF 35'644.-. Ce montant devait être remboursé dans les trente jours dès l'entrée en force des décisions de restitution. Toute demande relative aux modalités de remboursement devait être formulée par écrit à la division financière du SPC dans le même délai.

7.        Par décision sur opposition du 3 décembre 2018, le SPC a rejeté l'opposition formée par la bénéficiaire le 28 (recte : 27) novembre 2017 contre cette décision. Le SPC relevait que toute autre était, cependant, la question de déterminer si le montant de CHF 35'644.- serait effectivement réclamé. L'opposition contenait en effet une demande de remise, laquelle ne pourrait être examinée qu'une fois la décision de restitution entrée en force.

8.        La chambre de céans a rejeté le recours de la bénéficiaire contre cette décision, par arrêt du 18 mars 2019 (ATAS/212/2019). La CJCAS y rappelait que la demande de remise de l'obligation de restituer la somme de CHF 35'644.- ne faisait pas partie de l'objet du litige dans le cadre de ce recours. En effet, conformément à l'art. 4 de l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 (OPGA - RS 830.11), cette question serait instruite et ferait l'objet d'une décision distincte par le SPC, dès l'entrée en force de la décision sur opposition du 3 décembre 2018. Cet arrêt est entré en force.

9.        Par décision du 21 octobre 2019, le SPC a indiqué à la bénéficiaire que, faisant suite à l'arrêt susmentionné de la chambre de céans, il avait examiné sa demande de remise. Il la rejetait. Après avoir rappelé les principes légaux et jurisprudentiels applicables, le SPC constatait que l'intéressée n'avait pas communiqué l'augmentation de sa fortune mobilière au SPC avant la révision de son dossier, ce qui, au vu des divers courriers l'invitant à lui communiquer tout changement dans sa situation, excluait la condition de la bonne foi, soit l'une des deux conditions cumulatives requises pour pouvoir prétendre à la remise de l'obligation de restituer. Dans ces conditions, il était inutile d'examiner la condition de la charge trop lourde.

10.    Par courrier du 14 novembre 2019, l'intéressée a formé opposition à la décision susmentionnée, sollicitant un rendez-vous pour lui permettre d'exposer oralement sa situation.

11.    Bien que le SPC, donnant suite à sa demande d'entretien pour qu'elle puisse exposer les arguments qu'elle entendait développer pour motiver son opposition, l'ait dûment convoquée, le 28 janvier 2020 à 11 heures, la bénéficiaire ne s'est pas présentée.

12.    Le SPC a dès lors rejeté l'opposition par décision sur opposition du 6 juillet 2020, confirmant la décision du 21 octobre 2019.

13.    Par courrier recommandé du 7 août 2020, transmis pour motif de compétence à la chambre de céans par courrier du 13 août 2020, l'intéressée a formé « opposition » à la décision du SPC de refuser sa demande de remise de la « dette » de CHF 35'644.-. Elle était choquée d'être accusée de mauvaise foi, et cela parce qu'elle ne se serait pas présentée au rendez-vous du 28 janvier 2020. L'explication était pourtant simple : le courrier B (convocation) envoyé le 21 janvier 2020 ne lui était parvenu que le 27 janvier, et le lendemain elle était convoquée à 10h25 au Tribunal des baux et loyers. Elle avait pris contact avec le SPC pour l'aviser de ce contretemps, mais il était évident que ce message n'avait pas été communiqué. Elle vivait une situation cauchemardesque depuis trois ans, se battant pour ne pas perdre son appartement; ce à quoi il fallait ajouter des problèmes de santé (fractures, entorses). Elle ne souhaitait pas donner plus d'explications dans son courrier, pour éviter d'être trop longue, mais elle sollicitait un autre rendez-vous pour se justifier, documents à l'appui.

14.    L'intimé s'est déterminé sur le recours, par courrier du 11 septembre 2020. Il concluait à son rejet. Comme il l'avait indiqué dans la décision attaquée, l'intéressée avait omis de communiquer la hausse de sa fortune mobilière avant la révision de son dossier, raison pour laquelle la condition de la bonne foi n'était pas remplie. Le rendez-vous manqué auquel se référait la recourante n'avait aucune incidence en ce qui concerne l'examen des conditions de la remise.

15.    Par courrier du 14 septembre 2020, la chambre de céans a communiqué à la recourante copie de la réponse de l'intimé à son recours, et l'a invitée à lui adresser une réplique d'ici au 5 octobre 2020.

16.    La recourante a consulté le dossier au siège de la juridiction, le 2 octobre 2020.

17.    N'ayant toutefois pas produit de réplique dans le délai imparti, la chambre de céans lui a spontanément fixé un délai supplémentaire au 13 novembre 2020 pour y donner suite.

18.    La recourante n'ayant pas réagi dans le délai imparti, la chambre de céans a informé les parties, par courrier du 23 novembre 2020, que la cause serait gardée à juger à dater du 14 décembre 2020.

19.    La recourante ne s'est plus manifestée.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Les dispositions de la LPGA, s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales (PCC), la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Toutefois, dans la mesure où le recours était, au 1er janvier 2021, pendant devant la chambre de céans, il reste soumis à l'ancien droit (cf. art. 82a LPGA; RO 2020 5137; FF 2018 1597; erratum de la CdR de l’Ass. féd. du 19 mai 2021, publié le 18 juin 2021 in RO 2021 358).

Les décisions sur opposition sont sujettes à recours dans le délai de trente jours suivant la notification auprès du tribunal des assurances compétent (cf. art. 56 et 60 LPGA; art. 9 de la loi sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 14 octobre 1965 [LPFC - J 4 20]; art. 43 LPCC).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pour la période du 15 juillet au 15 août inclusivement (art. 38 al. 4 let. b LPGA et art. 89C let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]), le recours est recevable.

3.        a. Pour l’établissement des faits pertinents, il y a lieu d’appliquer les principes ordinaires régissant la procédure en matière d’assurances sociales, à savoir, en particulier, la maxime inquisitoire, ainsi que les règles sur l’appréciation des preuves et le degré de la preuve.

b. La maxime inquisitoire signifie que l’assureur social et, en cas de litige, le juge, établissent d’office les faits déterminants, avec la collaboration des parties, sans être liés par les faits allégués et les preuves offertes par les parties, en s’attachant à le faire de manière correcte, complète et objective afin de découvrir la réalité matérielle (art. 43 LPGA; art. 19 s., 22 ss, 76 et 89A LPA; Ghislaine FRÉSARD FELLAY / Bettina KAHIL-WOLFF / Stéphanie PERRENOUD, Droit suisse de la sécurité sociale, vol. II, 2015, p. 499 s.). Les parties ont l’obligation d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués; à défaut, elles s’exposent à devoir supporter les conséquences de l’absence de preuve (art. 28 LPGA; ATF 125 V 193 consid. 2; 122 V 157 consid. 1a; 117 V 261 consid. 3b et les références).

c. Comme l’administration, le juge apprécie librement les preuves administrées, sans être lié par des règles formelles (art. 61 let. c LPGA). Il lui faut examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les pièces du dossier et autres preuves recueillies permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. Il lui est loisible, sur la base d’une appréciation anticipée des preuves déjà disponibles, de refuser l’administration d’une preuve supplémentaire au motif qu’il la tient pour impropre à modifier sa conviction (ATF 131 III 222 consid. 4.3; ATF 129 III 18 consid. 2.6; arrêt du Tribunal fédéral 4A_5/2011 du 24 mars 2011 consid. 3.1).

d. Une preuve absolue n’est pas requise en matière d’assurances sociales. L’administration et le juge fondent leur décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; 126 V 353 consid. 5b; 125 V 193 consid. 2 et les références). Il n’existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a; Ghislaine FRÉSARD- FELLAY / Bettina KAHIL-WOLFF / Stéphanie PERRENOUD, op. cit., p. 517 s.). Reste réservé le degré de preuve requis pour la notification de décisions, l’exercice d’un moyen de droit, le contenu d’une communication dont la notification est établie (ATF 124 V 400; 121 V 5 consid. 3b; 119 V 7 consid. 3c/bb; ATAS/286/2018 du 3 avril 2018 consid. 3; ATAS/763/2016 du 27 septembre 2016 consid. 4 et 5c).

4.        Le litige porte sur la question de savoir si la recourante peut bénéficier d’une remise de l’obligation de restituer la somme de CHF 35'644.-.

5.        Selon l'art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile. Ces deux conditions matérielles sont cumulatives et leur réalisation est nécessaire pour que la remise de l'obligation de restituer soit accordée (ATF 126 V 48 consid. 3c; arrêt du Tribunal fédéral 8C_364/2019 du 9 juillet 2020 consid. 4.1).

L'art. 4 de l'ordonnance fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 11 septembre 2002 (OPGA - RS 830.11) précise que la restitution entière ou partielle des prestations allouées indûment, mais reçues de bonne foi, ne peut être exigée si l'intéressé se trouve dans une situation difficile (al. 1). Est déterminant, pour apprécier s'il y a une situation difficile, le moment où la décision de restitution est exécutoire (al. 2).

À teneur de l’art. 11 al. 1 LPCC, le bénéficiaire ou son représentant légal doit déclarer au service tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations qui lui sont allouées ou leur suppression.

À teneur de l’art. 24 LPCC, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile (al. 1). Le règlement fixe la procédure de la demande de remise ainsi que les conditions de la situation difficile (al. 2).

L’art. 15 al. 1 du règlement relatif aux prestations cantonales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 25 juin 1999 (RPCC-AVS/AI - J 4 25.03) prévoit que la restitution entière ou partielle des prestations allouées indûment, mais reçues de bonne foi, ne peut être exigée si l'intéressé se trouve dans une situation difficile.

6.        Savoir si la condition de la bonne foi, présumée en règle générale (art. 3 du Code civil suisse, du 10 décembre 1907 - CC - RS 210), est réalisée doit être examiné dans chaque cas à la lumière des circonstances concrètes (arrêt du Tribunal fédéral 8C_269/2009 du 13 novembre 2009 consid. 5.2.1). La condition de la bonne foi doit être remplie dans la période où l’assuré concerné a reçu les prestations indues dont la restitution est exigée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_766/2007 du 17 avril 2008 consid. 4.1 et les références).

La jurisprudence constante considère que l’ignorance, par le bénéficiaire, du fait qu’il n’avait pas droit aux prestations ne suffit pas pour admettre qu’il était de bonne foi. Il faut bien plutôt qu’il ne se soit rendu coupable, non seulement d’aucune intention malicieuse, mais aussi d’aucune négligence grave. Il s’ensuit que la bonne foi, en tant que condition de la remise, est exclue d'emblée lorsque les faits qui conduisent à l'obligation de restituer (violation du devoir d’annoncer ou de renseigner) sont imputables à un comportement dolosif ou à une négligence grave. En revanche, l'assuré peut invoquer sa bonne foi lorsque l'acte ou l'omission fautifs ne constituent qu'une violation légère de l'obligation d'annoncer ou de renseigner (ATF 138 V 218 consid. 4; arrêts du Tribunal fédéral 9C_43/2020 du 13 octobre 2020 consid. 3 et 9C_16/2019 du 25 avril 2019 consid. 4).

On parlera de négligence grave lorsque l'ayant droit ne se conforme pas à ce qui peut raisonnablement être exigé d'une personne capable de discernement dans une situation identique et dans les mêmes circonstances (ATF 110 V 176 consid. 3d; arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2019 du 25 avril 2019 consid. 4). La mesure de l'attention nécessaire qui peut être exigée doit être jugée selon des critères objectifs, où l'on ne peut occulter ce qui est possible et raisonnable dans la subjectivité de la personne concernée (faculté de jugement, état de santé, niveau de formation, etc.; arrêt du Tribunal fédéral 9C_413/2016 du 26 septembre 2016 consid. 3.1;
Sylvie PÉTREMAND, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 69 ad art. 25 LPGA). Il faut ainsi en particulier examiner si, en faisant preuve de la vigilance exigible, l’assuré aurait pu constater que les versements ne reposaient pas sur une base juridique. Il n’est pas demandé à un bénéficiaire de prestations de connaître dans leurs moindres détails les règles légales. En revanche, il est exigible de lui qu’il vérifie les éléments pris en compte par l’administration pour calculer son droit aux prestations. On peut attendre d'un assuré qu'il décèle des erreurs manifestes et qu'il en fasse l'annonce (arrêt du Tribunal fédéral 9C_498/2012 du 7 mars 2013 consid. 4.2). On ajoutera que la bonne foi doit être niée quand l’enrichi pouvait, au moment du versement, s’attendre à son obligation de restituer, parce qu’il savait ou devait savoir, en faisant preuve de l’attention requise, que la prestation était indue (art. 3 al. 2 CC; ATF 130 V 414 consid. 4.3; arrêt du Tribunal fédéral 9C_319/2013 du 27 octobre 2013 consid. 2.2).

En revanche, l’intéressé peut invoquer sa bonne foi si son défaut de conscience du caractère indu de la prestation ne tient qu’à une négligence légère, notamment, en cas d’omission d’annoncer un élément susceptible d’influer sur le droit aux prestations sociales considérées, lorsque ladite omission ne constitue qu’une violation légère de l’obligation d’annoncer ou de renseigner sur un tel élément (ATF 112 V 97 consid. 2c; arrêts du Tribunal fédéral 9C_16/2019 précité consid. 4 et 9C_14/2007 du 2 mai 2007 consid. 4; DTA 2003 n° 29 p. 260 consid. 1.2 et les références; RSAS 1999 p. 384; Ueli KIESER, Kommentar zum Bundesgesetz über den Allgemeinen Teil des Sozialversicherungsrechts - ATSG, 2020, n. 65 ad art. 25 LPGA).

7.        Les directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI
(ci-après : DPC), valables dès le 1er avril 2011 (état au 1er janvier 2021), énoncent que si une PC est versée à tort et que l'assuré ne pouvait s'en rendre compte en faisant preuve de l'attention minimale exigible au vu des circonstances et du cas d'espèce, force est d'admettre la bonne foi (DPC n° 4652.01). À l'inverse, nul ne peut invoquer sa bonne foi si elle est incompatible avec l'attention que les circonstances permettaient d'exiger de lui. Ainsi, la condition de la bonne foi n'est pas réalisée lorsque le versement à tort d'une PC est dû à une grave négligence ou au dol de la personne tenue à restitution. Tel est le cas si, lors de la demande ou de l'examen des conditions économiques, certains faits n'ont pas été annoncés ou que des indications fausses ont été fournies intentionnellement ou par négligence grave; il en est de même lorsqu'un changement dans la situation personnelle ou matérielle n'a, intentionnellement ou par grave négligence, pas été annoncé ou l'a été avec retard, ou lorsque des PC indues ont été acceptées en connaissance de leur caractère indu (DPC n° 4652.02).

8.        Commet une négligence grave celui qui, lors de la demande de prestation, de l'examen des conditions du droit, ou du paiement de la prestation complémentaire indûment versée, ne fait pas preuve du minimum d'attention que l'on est en droit d'exiger de lui en fonction de ses compétences et de son degré de formation. Fait preuve de négligence grave la personne qui omet d'annoncer une modification de son revenu, qu'il soit obtenu sous forme de rente ou en vertu de l'exercice d'une activité lucrative, ou qui ne contrôlant pas - ou seulement à la légère - la feuille de calcul des prestations complémentaires, n'annonce pas une erreur de calcul qu'elle aurait facilement pu reconnaître (DPC n° 4652.03).

À titre d’exemple, parmi de nombreux autres, dans une affaire genevoise, le Tribunal fédéral a retenu une négligence grave excluant toute bonne foi dans le cas d’une bénéficiaire qui n’avait pas spontanément informé le service sur l’état de sa fortune, d’autant plus qu’elle avait reçu chaque début d’année des informations précises à ce sujet. Devant le Tribunal fédéral, l'assurée faisait pour l'essentiel grief à la juridiction cantonale d'avoir fait preuve d'arbitraire dans l'appréciation de la notion de bonne foi, au sens de l'art. 25 al. 1 LPGA. Elle soutenait notamment que, l'absence de modifications significatives dans ses revenus, charges et dépenses, empêchait de qualifier de grave l'éventuelle négligence dont elle aurait fait preuve. Elle prétendait enfin que le résultat auquel étaient parvenus les premiers juges était arbitraire, dans la mesure où elle devait restituer un montant supérieur à CHF 50'000.- alors qu'elle ne disposait que d'un revenu inférieur à CHF 2'000.-. Répondant à cet argument, le Tribunal fédéral a considéré que le fait de devoir rembourser un montant supérieur à CHF 50'000.- avec un revenu inférieur à CHF 2'000.- était la conséquence du refus de la remise de l'obligation de restituer en raison de la mauvaise foi de la recourante (arrêt du Tribunal fédéral 9C_746/2016 du 11 janvier 2017 consid. 3.2 et 4).

9.        En l'espèce, on relèvera tout d'abord que dans son « opposition » contre la décision sur opposition du 6 juillet 2020, adressée à une autorité incompétente (le SPC), mais transmise d'office par ce dernier à la chambre de céans, conformément au droit, la recourante se plaignait d'avoir été considérée comme étant de mauvaise foi dans la mesure où elle n'avait pas comparu au SPC, qui l'avait dûment convoquée à sa demande pour exposer en plus de détail les motifs de son opposition. En réalité, le SPC ne lui a pas imputé la mauvaise foi pour ce motif, mais bien plutôt exclu, comme on le verra ci-dessous, la condition de la bonne foi au sens juridique du terme, l'intimé se référant à ce sujet à sa décision du 21 octobre 2019, lui précisant quant au sens de cette notion qu'il n'était ainsi pas considéré qu'elle ait sciemment voulu dissimuler un fait au SPC, mais uniquement qu'il était exigible qu'elle fasse preuve de davantage de diligence quant à son devoir d'annoncer la hausse de sa fortune mobilière. Certes, le SPC - qui a à juste titre transmis ce courrier à la chambre de céans pour motif de compétence - n'a pas donné suite à la demande de la bénéficiaire de la reconvoquer. Bien qu'elle n'invoque pas, dans le cadre de la procédure devant la chambre de céans, une violation du droit d'être entendue, il sera simplement indiqué à ce sujet qu'à supposer que l'on puisse retenir une telle violation, ce que la chambre de céans ne retient pas dans le cas particulier, son droit d'être entendue aurait quoi qu'il en soit été réparé devant la chambre de céans ayant plein pouvoir de cognition ou aurait pu l'être - mais elle n'en a pas fait l'usage, malgré les délais que la chambre de céans lui a impartis successivement.

10.    Comme l'a déjà retenu la chambre de céans dans son arrêt précédent relatif au principe de la demande de restitution du montant litigieux (ATAS/212/2019 consid. 9), la recourante ne conteste pas que pendant toutes ces années, les montants de la fortune mobilière dont elle disposait n'ont pas été pris en considération dans les plans de calcul ayant déterminé le montant des prestations complémentaires qui lui avaient été octroyées. Elle ne conteste pas non plus avoir reçu du SPC, chaque année en décembre, les plans de calcul pris pour base de la détermination des PC qui lui seraient servies dès le 1er janvier suivant, l'administration l'invitant à vérifier attentivement les chiffres y figurant, en attirant son attention sur le fait qu'elle devait signaler les différences entre les chiffres retenus et sa situation effective. Et elle ne conteste pas non plus n'avoir jamais annoncé de différences au SPC (notamment au vu de l'absence de toute fortune mobilière dans le revenu déterminant). Son comportement n'est pas différent de ce qui a été dit précédemment par rapport à ce que la jurisprudence retient comme à tout le moins une négligence grave excluant le principe de la bonne foi; de sorte que c'est à bon droit que le SPC a retenu dans la décision entreprise que cette condition n'était pas réalisée en l'espèce. C'est également à juste titre, dans la mesure où les conditions rappelées précédemment (bonne foi et situation financière difficile) doivent être cumulativement réalisées pour qu'entre en question la remise de l'obligation de restitution des prestations reçues indûment, que le SPC a indiqué dans la décision entreprise que la première des deux conditions n'étant pas réalisée, il était inutile d'examiner si la seconde l'était.

11.    Partant, la remise de l’obligation de restituer ne peut être accordée, la décision entreprise étant conforme au droit.

12.    Au vu de ce qui précède, le recours est rejeté.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Mario-Dominique TORELLO

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le