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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2954/2025

ATA/1259/2025 du 11.11.2025 ( FORMA ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2954/2025-FORMA ATA/1259/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 11 novembre 2025

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant

contre


DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE intimé


EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 2006, a terminé sa 11e année scolaire au cycle d’orientation, section littéraire scientifique, avec certificat, une moyenne générale de 5.1 et, notamment, une moyenne annuelle de 5.5 en mathématiques.

b. En août 2021, il a commencé une formation gymnasiale au collège B______ (ci‑après : le collège).

c. Dans le courant de sa première année, des troubles DYS (dyslexie notamment) lui ont été diagnostiqués.

Par courrier du 4 mai 2022, la direction du collège a confirmé la prise en compte d’aménagements pédagogiques en raison desdits troubles. Les mesures seraient mises en place pour la fin de l’année scolaire.

À l’issue de l’année scolaire 2021/2022, A______ ne satisfaisait pas aux conditions de promotion en 2e année. Il avait une moyenne générale de 4.1, sept disciplines insuffisantes et une somme des écarts négatifs à la moyenne de 4.1.

Il a été autorisé par la direction à redoubler sa 1re année.

d. À l’issue de l’année scolaire 2022/2023, A______ a été promu par tolérance en 2e année. Il avait une moyenne générale de 4.7, une discipline insuffisante (3.6 en italien) et une somme des écarts négatifs à la moyenne de 0.4.

Il n’avait pas pu s’inscrire aux ateliers méthodologiques pour élèves DYS, ceux-ci étant complets.

e. Le père d’A______ est décédé pendant l’été 2023.

f. À l’issue de l’année scolaire 2023/2024, A______ ne satisfaisait pas aux conditions de promotion en 3e année. Il avait une moyenne générale de 4.4, quatre disciplines insuffisantes, une somme des écarts négatifs à la moyenne de 1.4 et un total (français, langues étrangères, mathématiques et option spécifique ; ci-après : le total) de 16.2.

Sur le bulletin scolaire de fin d’année, la responsable de groupe a relevé que les résultats étaient insuffisants pour une promotion en 3e année en grande partie à cause de son état émotionnel lors des épreuves regroupées. L’ensemble des enseignants soulignaient la belle évolution au cours des dernières années, tant au niveau scolaire que social. Cela avait été un réel plaisir de l’avoir comme élève.

Le conseil de classe s’est dit favorable, à l’unanimité, à une promotion par dérogation en 3e. La direction du collège la lui a toutefois refusée le 26 juin 2024.

g. Le 15 août 2024, la veille de la rentrée, la direction générale de l’enseignement secondaire II (ci-après : DGES II) a rejeté le recours interjeté par la mère d’A______ le 26 juin 2024 contre la décision du même jour.

h. Le 19 août 2024, A______ a commencé une 3e année à l’école de culture générale (ci-après : ECG).

i. Le 22 août 2024, l’étudiant a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision de la DGES II du 15 août 2024.

j. Par courrier du 28 août 2024 adressé à la chambre administrative, la DGES II a reconsidéré sa décision.

k. A______ a repris les cours au collège, en 3e année, près d’un mois après la rentrée scolaire.

l. À l’issue du premier semestre de l’année scolaire 2024/2025, A______ ne satisfaisait pas aux conditions de promotion. Il avait une moyenne générale de 4.1, sept disciplines insuffisantes, une somme des écarts négatifs à la moyenne de 3.8 et un total de 15.9.

Par courrier du 3 février 2025, la direction du collège a alerté la mère de l’élève sur l’insuffisance des résultats de ce dernier et l’impossibilité d’accéder à un redoublement réglementaire.

m. À teneur d’un rapport neuropsychologique établi à la suite des consultations des 30 octobre, 12 décembre 2024 et 11 février 2025, un trouble du spectre autistique (ci-après : TSA) léger, accompagné d’un fonctionnement à très haut potentiel intellectuel (ci-après : THPI) ont été diagnostiqués à A______.

Le rapport concluait que « certains symptômes pouvaient également avoir été modulés/accentués par le traumatisme infantile qu’il avait vécu, mais ce dernier n’expliquait pas, par exemple, les perturbations de la cognition sociale plus spécifique au TSA qu’à un trouble psychique ».

n. L’intéressé n’a sollicité du collège que quelques aménagements supplémentaires en lien avec cette nouvelle symptomatologie. Il n’a notamment pas demandé de temps supplémentaire pour les épreuves orales.

Parallèlement, des répétiteurs privés, spécialisés, ont été engagés auprès d’OASYS, service dépendant de la Croix-Rouge genevoise, proposant des prestations de soutien scolaire pour des enfants et adolescents ayant des troubles des apprentissages et/ou des troubles associés diagnostiqués et se trouvant en grande difficulté scolaire.

o. À l’issue de l’année scolaire 2024/2025, A______ ne satisfaisait pas aux conditions de promotion en 4e année. Il avait une moyenne générale de 4.5, quatre disciplines insuffisantes (italien : 3.7 ; mathématiques 1 : 2.9 ; physique : 3.4 ; histoire : 3.7), une somme des écarts négatifs à la moyenne de 2.3 et un total de 16.0. Il cumulait deux absences non excusées et un renvoi disciplinaire.

Ses notes étaient les suivantes :

Disciplines

1er semestre

2e semestre

Moyennes

Disciplines du domaine d’études de formation générale

Français

3.8

4.2

 

4.0

Italien

3.6

3.7

 

3.7

Anglais

4.3

4.9

 

4.6

Mathématiques 1 (normal)

3.0

2.7

 

2.9

Physique

2.8

4.0

 

3.4

Biologie

4.1

5.7

 

4.9

Géographie

3.9

5.0

 

4.5

Histoire

3.3

4.1

 

3.7

Philosophie

3.8

4.5

 

4.2

Option spécifique

Arts visuels

 

 

 

4.9

Arts plastiques

5.1

5.0

5.1

 

Histoire de l’art

5.0

4.2

4.6

 

Discipline obligatoire

Informatique

 

5.9

 

5.9

Option complémentaire

Informatique

 

 

 

6.0

Perfectionnement en programmation

6.0

 

6.0

 

Approfondissements et applications

 

6.0

6.0

 

Discipline particulière

Éducation physique

6.0

5.3

5.0

 

5.4

Moyenne générale

4.5

La responsable du groupe a indiqué sous « observations » : « bravo pour la remontée en anglais, biologie, français, géographie, histoire, philosophie et physique A______. C’est vraiment remarquable. Ce n’est malheureusement pas suffisant pour une promotion, mais ton investissement est à relever. Je te souhaite tout le meilleur pour la suite, ça été un plaisir de t’accompagner pendant ces trois années. »

p. Par courriel du 7 juillet 2024 (recte : 2025), A______ a adressé à la DGES II une demande de redoublement exceptionnel de la 3e année du collège.

Son parcours scolaire avait été marqué par des événements ayant affecté ses capacités d’apprentissage, sa stabilité émotionnelle et sa santé mentale. Il avait été diagnostiqué dyslexique au cours de la 1re année, diagnostic émotionnellement difficile à accepter. L’arrivée tardive des mesures adaptées à son trouble était responsable de son redoublement de la 1re année de collège. Son père était décédé pendant la 2e année du collège. Le décès, couplé au refus de la direction du collège de lui accorder une promotion en 3e année, ainsi que la procédure de recours l’avaient émotionnellement affecté. Il avait commencé l’année scolaire 2024/2025 avec une « grande fragilité psychologique ». En février 2025, un rapport d’examen neuropsychologique avait révélé un TSA et un THPI. La doyenne l’avait encouragé à déposer une demande de redoublement exceptionnel au vu des circonstances.

q. Le vendredi 15 août 2025, veille de la rentrée scolaire, la DGES II a rejeté la demande de redoublement exceptionnel. Il avait redoublé sa 1re année et ne pouvait en principe pas prétendre à un nouveau redoublement. Il n’était pas promu en raison de deux causes d’échec, à savoir quatre disciplines insuffisantes alors que seules trois étaient admises et une somme des écarts négatifs à la moyenne de 2.3 au lieu de 1.0 toléré. Si les problèmes de santé pouvaient expliquer en partie son échec, ils ne pouvaient pas justifier à eux seuls la faiblesse des résultats obtenus. Un pronostic de réussite de la filière gymnasiale ne pouvait pas être posé. Il était renvoyé à l’office pour l’orientation, la formation professionnelle et continue.

B. a. Par acte du 1er septembre 2025, A______ a interjeté recours devant la chambre administrative contre la décision du 15 août 2025. Il a conclu à son annulation, et à ce qu’il soit autorisé à redoubler, exceptionnellement, sa 3e année. Préalablement, il devait être autorisé à suivre les cours, sous peine de dommage difficilement réparable compte tenu de ses besoins spécifiques.

La condition de juste motif était remplie par le diagnostic TSA léger cumulé d’un THPI ainsi que par l’absence d’aménagements spécifiques pour le TSA durant le premier semestre de la 3e année et même pendant toute sa scolarité au collège. Le retard accumulé au début de l’année était indépendant de sa volonté et résultait du refus de la direction du collège puis de la DGES II de lui accorder une dérogation en juin puis en août 2024. Son projet professionnel était cohérent puisqu’il souhaitait rejoindre l’université et étudier l’informatique, discipline dans laquelle il avait fait 6.0 de moyenne et pour laquelle il avait les capacités cognitives de réussir au vu de son THPI.

Son comportement était exemplaire et sa volonté de réussir jamais démentie. Il regrettait le manque de prise en compte de sa situation. La DGES II avait davantage été mue par un esprit de sélection, contrairement à ce que préconisait l’art. 4 al. 1 du règlement de l'enseignement secondaire II et tertiaire B du 29 juin 2016 (REST - C 1 10.31) que par un maintien dans la formation qu’il souhaitait accomplir et pour laquelle il avait des aptitudes. Les refus répétés et tardifs d’accéder à des demandes justifiées, sans tenir compte de ses handicaps, notifiés la veille de deux rentrées scolaires consécutives, constituaient une atteinte à son bien être psychologique, en violation de l’art. 28 de la loi sur l’instruction publique du 17 septembre 2015 (LIP - C 1 10) et du principe de l’égalité de traitement garanti par la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst ‑ RS 101). Ne pas évaluer sa situation au regard des inégalités qui frappaient les personnes handicapées constituait une discrimination. La réponse de la DGES II était disproportionnée et n’était pas en adéquation avec une adaptation du parcours scolaire aux besoins spécifiques, telle que préconisée par la loi fédérale sur l’élimination des inégalités frappant les personnes handicapées du 13 décembre 2002 (LHand - RS 151.3).

Il a produit de nombreux documents attestant du suivi des troubles DYS depuis 2022, du suivi d’OASYS, de nombreux échanges de courriels entre lui-même, soutenu par sa mère, et les doyens, des attestations des répétiteurs en italien et en mathématiques du 2 juin 2025, ainsi que les documents médicaux, notamment l’entier du rapport d’examen neuropsychologique de février 2025, établi par C______, psychologue spécialiste en neuropsychologie FSP.

Dans le certificat neuropsychologique du 4 juillet 2025, C______ résumait que les résultats de l’évaluation neuropsychologique avaient révélé un TSA léger associé à un THPI. Cette neuro-atypie s’inscrivait également dans un contexte psycho-traumatique de l’enfance. Dans ce contexte médical et psychique particulier, elle soutenait la démarche allant dans le sens du redoublement pour l’élève qui avait toutes ses capacités cognitives de poursuivre sa scolarité. En outre, son patient avait un projet bien défini concernant son avenir et ses études. Il paraissait dommage de ne pas lui laisser toutes ses chances d’y parvenir. Il était sincèrement motivé et en grande capacité de réussir compte tenu de ses hautes capacités intellectuelles. Les facteurs de stress étaient vécus beaucoup plus intensément dans ce contexte de neuro-atypie et avaient certainement nuit à la scolarité de l’étudiant. Il utilisait des stratégies de « masking » propres au TSA pour compenser ses difficultés et peinait à exprimer spontanément ses besoins. Ce type de diagnostic nécessitait des aménagements particuliers : favoriser les épreuves écrites, les oraux restant complexes dans le TSA, minimiser les travaux de groupe qui étaient anxiogènes, et redéfinir avec lui, au cours de l’année, ses besoins.

Selon l’attestation de D______, psychologue spécialiste en psychothérapie FSP, A______ avait poursuivi les séances psychothérapeutiques durant l’année scolaire 2024/2025. Elles continueraient tant qu’elles seraient jugées utiles par les différentes parties. L’intéressé avait commencé le collège avec un mois de retard. Les conséquences avaient été anxiogènes et avaient induit un départ, pour cette 3e année, le « desservant ». A______ avait malgré tout fait preuve d’abnégation essayant de mener au mieux les mois qui avaient suivis. À la suite des résultats négatifs de la fin de session, le psychologue avait pu constater une motivation intacte chez le jeune de rester totalement engagé dans son cursus.

b. Par décision sur mesures superprovisionnelles du 2 septembre 2025, la juge déléguée a autorisé l’étudiant, au vu des résultats des examens neuropsychologiques effectués pendant l’année scolaire 2024/2025, à suivre les cours en 3e du collège B______ avec ses choix d’options et les mesures spécifiques pour compenser ses handicaps. L’octroi ne préjugeait en rien de l’issue du litige, ni de la décision sur effet suspensif.

c. Le DIP a conclu au rejet du recours. L’élève n’avait jamais été promu au terme d’un seul semestre des quatre années passées au collège. Il terminait la 3e année avec deux causes d’échec. Il baissait ses moyennes dans quatre disciplines et terminait l’année avec quatre disciplines insuffisantes dont deux à 3.7 et deux autres inférieures à 3.5. Sur le seul second semestre, il ne remplissait pas les conditions de promotion avec une somme des écarts négatifs à la moyenne de 1.6 au lieu de 1.0 admis et un total de 15.8 au lieu de 16.0 demandé, malgré les aménagements mis en place pour son trouble.

Dès que le diagnostic du TSA avait été attesté, l’établissement avait tout mis en œuvre pour soutenir l’étudiant.

d. Dans sa réplique, l’étudiant a persisté dans ses conclusions, produisant notamment les derniers échanges avec le collège et OASYS.

e. Lors de l’audience du 29 octobre 2025, A______ a indiqué que le début de sa 3e année se déroulait bien. Il avait principalement de bonnes notes. Son doyen lui avait indiqué que les évaluations faites en septembre 2025 ne compteraient que si elles étaient satisfaisantes, compte tenu des circonstances.

La représentante du DIP a produit un relevé de notes, transmis par le collège, le 27 octobre 2025. Les mesures nécessaires avaient été mises en place dès que l’étudiant les avait demandées. Le DIP maintenait sa décision.

Il ressort du document produit par le DIP les résultats suivants, la pondération étant précisée avec chaque évaluation :

Disciplines / résultats au 27 octobre 2025

 

remarques

Moyenne provisoire

Disciplines du domaine d’études de formation générale

Français

4.5

2x

4.5

Italien

4.0

 

4.0

Anglais

5.0

 

5.0

Mathématiques 1 (normal)

3.5

 

3.5

Physique

3.5

 

3.5

Biologie

6.0

labo

4.7

 

4.0

2x

Géographie

4.0

2x

4.0

Histoire

2.5

 

2.5

Philosophie

5.5

 

5.5

 

Option spécifique

Arts visuels

 

 

 

Arts plastiques

---

 

---

Histoire de l’art

(6.0)

(Petit travail)

(6.0)

 

Discipline obligatoire

Informatique

 

 

 

Option complémentaire

Informatique

---

 

---

Perfectionnement en programmation

 

 

 

Approfondissements et applications

 

 

 

Discipline particulière

Éducation physique

4.5

 

 

4.5

Moyenne générale

 

A______ a précisé qu’il avait sept heures de répétitoire par semaine depuis le 5 octobre 2025, soit depuis moins d’un mois. OASYS n’avait pas pu intervenir avant la décision sur mesures superprovisionnelles. Il avait par ailleurs fallu le temps que l’organisation trouve des personnes adéquates et encore disponibles après la rentrée. Il bénéficiait ainsi de trois heures avec une répétitrice générale et de quatre heures avec un répétiteur spécifique pour les mathématiques et la physique. Il était toujours dans l’attente d’une réponse de l’assurance-invalidité (ci‑après : AI) à la suite de sa demande de « coach AI ». Il a confirmé que le collège avait été extrêmement soutenant pour la mise en place des mesures nécessaires.

À l’issue de l’audience, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

f. Dans un courrier spontané, A______ a relevé que le tableau qui avait été présenté lors de l’audience, occasion à laquelle il avait pris connaissance de certains résultats qu’il ignorait alors, ne tenait pas compte du fait que certaines notes obtenues en septembre pourraient être annulées si elles baissaient la moyenne de son premier semestre, conformément à ce qu’avait indiqué le doyen.

EN DROIT

 

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n’ont pas la compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée dans le cas d’espèce.

Il y a abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3).

3.             Le recourant demande à bénéficier d’un redoublement supplémentaire de la 3e année du collège, pour de justes motifs, après avoir doublé la 1re.

3.1 L’école publique a pour buts, dans le respect de la personnalité de chacun : a) de donner à chaque élève le moyen d’acquérir les meilleures connaissances et compétences dans la perspective de ses activités futures et de chercher à susciter chez lui le désir permanent d’apprendre et de se former ; b) d’aider chaque élève à développer de manière équilibrée sa personnalité, sa créativité ainsi que ses aptitudes intellectuelles, manuelles, physiques et artistiques ; c) de veiller à respecter, dans la mesure des conditions requises, les choix de formation des élèves ; d) de préparer chacun à participer à la vie sociale, culturelle, civique, politique et économique du pays, en affermissant le sens des responsabilités, la faculté de discernement et l’indépendance de jugement ; e) de rendre chaque élève progressivement conscient de son appartenance au monde qui l’entoure, en éveillant en lui le respect d’autrui, la tolérance à la différence, l’esprit de solidarité et de coopération et l’attachement aux objectifs du développement durable ; f) de tendre à corriger les inégalités de chance de réussite scolaire des élèves dès les premières années de l’école (art. 10 al. 1 de la loi sur l’instruction publique du 17 septembre 2015 - LIP - C 1 10).

3.2 Selon l’art. 29 REST, les conditions de promotion sont déterminées par les règlements de chaque filière (al. 1). L’orientation des élèves constitue une part importante de la mission de l’école et, dans cette optique, lors de l’analyse de l’octroi d’une promotion par dérogation ou d’un redoublement ou lors d’une réorientation, il doit être tenu compte des aptitudes de l’élève à mener à bien son projet de formation (al. 2). Sont également prises en considération les circonstances ayant entraîné l’échec, les progrès accomplis, la fréquentation régulière des cours et le comportement de l’élève (al. 3).

3.3 À teneur de l’art. 31 REST, l’octroi d’un redoublement n’est pas un droit (al. 1). La direction d’un établissement, sur proposition de la conférence des maîtres de la classe ou du groupe ou, dans des cas exceptionnels, de sa propre initiative, peut autoriser un élève non promu à redoubler l’année (al. 2). Dans les voies de formation générale, cette mesure ne peut être accordée qu’une seule fois par filière (al. 3). Un élève ayant bénéficié d’un redoublement ne peut prétendre ni à un triplement de l’année ni à un redoublement de l’année immédiatement supérieure (al. 4). La DGES II peut accorder un redoublement supplémentaire pour de justes motifs, tels que des problèmes de santé ou un accident (al. 7).

Dans ce cadre, l’autorité scolaire bénéficie d’un très large pouvoir d’appréciation, dont la chambre de céans ne censure que l’abus ou l’excès. Ainsi, alors même que l’autorité resterait dans le cadre de ses pouvoirs, quelques principes juridiques les restreignent, dont la violation constitue un abus de ce pouvoir : elle doit exercer sa liberté conformément au droit. Elle doit respecter le but dans lequel un tel pouvoir lui a été conféré, procéder à un examen complet de toutes les circonstances pertinentes, user de critères transparents et objectifs, ne pas commettre d’inégalité de traitement et appliquer le principe de la proportionnalité (ATA/1697/2019 du 19 novembre 2019 consid. 4d et les références citées).

3.4 Dans l’exercice de ses compétences, toute autorité administrative est tenue de respecter le principe de la proportionnalité découlant des art. 5 al. 2 et 36 al. 3 Cst., qui commande que la mesure étatique en cause soit nécessaire et apte à atteindre le but prévu et qu’elle soit dans un rapport raisonnable avec l’atteinte aux droits des particuliers qu’elle entraîne (ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 140 II 194 consid. 5.8.2).

3.5  Le principe, de la proportionnalité garanti par l'art. 36 al. 3 Cst., se compose des règles d'aptitude – qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 140 I 218 consid. 6.7.1 ; 136 IV 97 consid. 5.2.2).

3.6 Dans le cas d'espèce, il n'est pas contesté que le recourant a doublé la 1re année du collège à l’issue de l’année scolaire 2021/2022 et qu’il ne remplissait pas les conditions d'une promotion en 4e année du collège à l’issue de l’année scolaire 2024/2025 de telle sorte que l'art. 31 al. 4 REST ne lui permet en principe pas de prétendre à un nouveau redoublement. C'est donc exclusivement au regard de la possibilité dérogatoire d'accorder un redoublement supplémentaire en présence de justes motifs tels que des problèmes de santé ou un accident, prévue par l'art. 31 al. 7 REST, que sa situation doit être examinée.

Le recourant invoque la découverte, au cours de l’année 2024/2025 d’un TSA doublé d’un THPI, le commencement de sa 3e année avec un mois de retard ainsi que le stress, cumulé à un sentiment d’injustice, induit par ce mois de retard.

Il n’est pas contesté que le diagnostic tant du TSA que du THPI n’est intervenu qu’en février 2025 soit quelques six mois après le début de l’année scolaire 2024/2025. Il n’est de même pas contesté que si le collège a été extrêmement soutenant pour la mise en place rapide des mesures nécessaires, celles-ci n’ont pu être offertes à l’intéressé qu’à compter du 14 avril 2025 soit deux mois avant l’issue de l’année scolaire. Il ressort par ailleurs du dossier qu’au moment où le diagnostic a été posé, indépendamment de la difficulté à l’accepter tant pour le concerné que pour ses proches, l’étudiant n’a demandé au collège qu’une partie des aménagements auxquels il aurait eu droit. Cette réaction est expliquée par les professionnels, notamment par la neuropsychologue qui a relevé que l’anxiété et le stress anticipatoire ressentis par son patient ne seraient pas forcément montrés ni exprimés. Elle a précisé notamment dans l’attestation du 4 juillet 2025, que l’intéressé utilisait des stratégies de « masking » propres au TSA pour compenser ses difficultés et peinait à exprimer spontanément ses besoins.

Il ressort de ce qui précède que, lors de l’année scolaire 2024/2025, le recourant présentait un TSA et un THPI, qui n’ont été diagnostiqués que tardivement dans le courant de l’année et pour lesquels il n’a pu bénéficier, qu’en toute fin d’année, que d’une partie des aménagements nécessaires.

À cela s’ajoute qu’il n’a commencé les cours de 3e année que tardivement, soit avec approximativement un mois de retard, ce qui est indéniablement un facteur de nature à entraver l’assimilation des connaissances nécessaires, singulièrement lors du premier semestre. Il ressort d’ailleurs de son bulletin scolaire de fin d’année que s’il avait sept notes insuffisantes au premier semestre, il est parvenu à remonter ses moyennes dans au moins huit branches ce que sa maîtresse de groupe a dûment relevé dans ses observations de fin d’année. Ainsi, s’il finit avec quatre moyennes insuffisantes, il a réussi pour deux des branches concernées (physique et histoire) à obtenir sa moyenne au second semestre, sans toutefois suffisamment parvenir à remonter ses notes pour que la moyenne de fin d’année soit suffisante. Les problèmes sont toutefois restés récurrents en italien et en mathématiques.

La condition posée par l’art. 31 al. 7 REST de l’existence de justes motifs est en conséquence remplie au vu des problèmes de santé du recourant découverts en fin d’année scolaire 2024/2025 et de leurs conséquences sur les résultats de l’intéressé, ce que le département ne semble au demeurant pas contester, ainsi que de son début d’année retardé.

Dans sa décision de refus d’accorder un redoublement exceptionnel, le collège a mis en avant le fait que l’élève présentait deux causes d’échec à savoir une somme des écarts négatifs à la moyenne de 2.3 au lieu de 1.0 toléré et quatre branches insuffisantes. Or, ces deux éléments ne forment qu’une cause d’échec à teneur du règlement applicable (art. 28 al. 2 let. c RGymCG), l’élève ayant une moyenne supérieure au 4.0 exigé puisqu’il a obtenu 4.5 (let. a), son option spécifique remplissant la condition d’être supérieure à 4.0 au vu de sa moyenne annuelle de 4.9 (let. b) et son total se situant à 16.0, comme exigé (let. d). Le recourant remplit ainsi trois des quatre conditions exigées par l’art. 28 RGymCG.

Toutefois, si le refus de la DGES II d’un redoublement exceptionnel est apte à poursuivre le but d’orientation des élèves rappelé notamment à l’art. 29 REST, les principes de la nécessité et du sous-principe de la proportionnalité apparaissent en l’espèce violés. En effet, l’intérêt privé du recourant à pouvoir tenter une nouvelle fois la 3e année du collège dans des conditions respectueuses de son handicap, dès le début de l’année scolaire, est en l’espèce très important. À défaut d’une telle possibilité, la réorientation qu’il devrait effectuer prolongerait significativement la formation qu’il devrait acquérir avant de pouvoir, par hypothèse, accéder à l’université. L’intérêt public au respect des conditions strictes de promotion des élèves doit en l’occurrence céder le pas devant l’intérêt précité, ce d’autant plus que, conformément à l’art. 29 REST, tant les aptitudes de l’élève à mener à bien son projet de formation que les circonstances ayant entraîné l’échec, les progrès accomplis, la fréquentation régulière des cours et le comportement de l’élève plaident en faveur du recourant.

L’étudiant a un projet précis, à savoir effectuer une formation universitaire en informatique. Or, non seulement les notes obtenues au collège, soit respectivement 5.9 pour la discipline obligatoire et 6.0 en option complémentaire attestent de ses capacités dans le domaine.

Les notes présentées lors de l’audience ne sont pas de nature à contredire ce qui précède, l’intéressé ayant de surcroît confirmé qu’à la suite de la mesure superprovisionnelle, il avait immédiatement recontacté OASYS afin de bénéficier de répétiteurs spécialisés dans les troubles qu’il présente aux fins de l’aider notamment en mathématiques et en physique. Il sera enfin relevé que l’élève n’a pas toujours présenté des difficultés dans cette branche terminant son cycle avec 5.5 en cette matière, puis étant promu en 2e année du collège avec 4.8 en juin 2023.

L’autorité intimée a en conséquence abusé de son pouvoir d’appréciation en violant le principe de la proportionnalité, sous l’angle du principe de la nécessité qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés, et du sous-principe de la proportionnalité au sens étroit. Sa décision sera annulée et le dossier lui sera renvoyé pour nouvelle décision, le recourant remplissant les conditions pour un redoublement supplémentaire.

Le prononcé du présent arrêt rend sans objet la requête en mesures provisionnelles.

4.             Vu l’issue du litige, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée, le recourant ne faisant pas état de frais de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 1er septembre 2025 par A______ contre la décision du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 15 août 2025 ;

au fond :

l’admet ;

renvoie la cause à la direction générale de l'enseignement secondaire II pour nouvelle décision au sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : Patrick CHENAUX, président, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

P. CHENAUX

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :