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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/98/2025

ATA/980/2025 du 09.09.2025 ( FPUBL ) , REJETE

Recours TF déposé le 17.10.2025, 1C_611/2025
Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;POUVOIR D'APPRÉCIATION;RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC;EMPLOYÉ PUBLIC;DROIT DU TRAVAIL;ÉTABLISSEMENT DE DROIT PUBLIC;LICENCIEMENT ADMINISTRATIF;RÉSILIATION;JUSTE MOTIF;RELATION DE CONFIANCE;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;PROPORTIONNALITÉ
Normes : Cst..29.al2; LPAC.21; LPAC.22; LIPH.28; LIPH.43.al1; RPAC.22; RPAC.23A; RPAC.44; RPAC.46
Résumé : rejet du recours contre la résiliation des rapports de service de la recourante, fonctionnaire des EPI, pour motif fondé. D'une part, la recourante, qui occupait une fonction aux ressources humaines, a contrevenu à ses devoirs de service en consultant, sans y être autorisée, des données personnelles sensibles de tiers, et ce pendant une année, ce qui a engendré une rupture du lien de confiance. D'autre part, ses prestations étaient insuffisantes depuis plusieurs années. Vu les circonstances, les EPI pouvaient renoncer à la mise en œuvre d'une procédure de reclassement.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/98/2025-FPUBL ATA/980/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 septembre 2025

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Yann LAM, avocat

contre

ÉTABLISSEMENTS PUBLICS POUR L'INTÉGRATION (EPI) intimés
représentés par Me Sébastien VÖGELI, avocat

 



EN FAIT

A. a. A______, née le ______ 1967, a été engagée le 1er novembre 1994 au sein du centre d’intégration professionnelle, devenu les Établissements publics pour l’intégration (ci-après : EPI) dès le 1er janvier 2008.

b. Nommée fonctionnaire le 1er novembre 1997, elle a occupé diverses fonctions au cours de sa carrière, notamment assistante de direction et de secteur, chargée de formation 2 du 1er novembre 2015 au 31 janvier 2020, gestionnaire des ressources humaines (ci-après : RH) à partir du 1er février 2020 jusqu’au 31 décembre 2020 puis chargée de formation 2 depuis le 1er janvier 2021 jusqu’au 23 février 2024.

c. Les différents entretiens d’évaluation de la collaboratrice des 26 février 2007, 27 mars 2008, 4 décembre 2014 et 2 mai 2022 étaient globalement positifs, la plupart des critères étant qualifiés de « maîtrisés », voire « expertise ». Néanmoins, certains éléments à améliorer ont successivement été relevés par sa hiérarchie.

d. Les 1er juin 2016 et 10 octobre 2018, les EPI ont établi des certificats intermédiaires de travail. Selon le premier, A______ donnait pleine et entière satisfaction. Le second mentionnait que les EPI la remerciaient pour la qualité de son travail et se réjouissaient de poursuivre la collaboration avec elle.

e. Le 27 août 2021, B______, directrice des services des RH, a informé les collaborateurs de l'EPI que les comptes MOBATIME (application officielle dédiée à l’enregistrement du temps de travail des membres du personnel) des collaborateurs seraient désormais accessibles uniquement aux personnes qui, dans le cadre de leur responsabilité, devaient avoir accès aux données concernées. Ces personnes devaient consulter des données personnelles uniquement si leur traitement était indispensable à l'accomplissement d'une tâche définie. Enfin, la législation prévoyait que quiconque, au sein d'une institution, traitait des données personnelles à des fins étrangères à l'accomplissement des tâches légales qui lui étaient confiées s'exposait à des sanctions.

f. Un entretien a eu lieu le 17 février 2022 entre A______ et C______, cheffe de service « analyses et développement RH ».

Selon le compte rendu dudit entretien, qui a été transmis à la collaboratrice, sa supérieure hiérarchique rappelait qu'elle avait souhaité partager des éléments préoccupants portant sur l'état de santé de l'intéressée et leur collaboration. Celle‑ci relevait une surcharge de travail. Sa supérieure hiérarchique récapitulait diverses demandes et tâches à accomplir afin de la soutenir dans la priorisation des tâches et diminuer son ressenti de surcharge. Elle demandait en revanche le respect du cadre horaire par la collaboratrice (pas d’arrivées après 9h00), l’adoption d’un ton respectueux même en cas de problèmes, la prise d’initiatives en lien avec les activités de formations, soit la prise en charge des dossiers dans les délais convenus, afin que les EPI et sa supérieure puissent se « reposer sur sa maîtrise des processus et tâches en lien avec la formation ».

g. Deux entretiens d’évaluation supplémentaires successifs portant sur la période du 1er janvier 2021 au 30 avril 2022 se sont tenus les 2 mai et 28 juin 2022 pour juger de l'adéquation d'A______ au poste de chargée de formation 2.

h. Selon le compte rendu de l'entretien du 2 mai 2022, certains critères restaient à améliorer (ou développer), notamment le respect des personnes, la maîtrise des compétences professionnelles, l’adaptabilité, le sens de l’initiative, l’implication personnelle, la résistance, la communication et la gestion du stress. Plusieurs critères étaient considérés comme maîtrisés.

La collaboratrice pouvait se montrer disponible et enthousiaste lorsque sa supérieure hiérarchique sollicitait son aide. En revanche, elle pouvait se monter agacée et avait employé à plusieurs reprises un ton inadéquat. Elle devait améliorer la gestion de son stress pour répondre de manière adéquate à tous ses interlocuteurs. En cas de désaccord, elle devait maintenir le dialogue en appelant le cadre concerné pour comprendre son besoin et trouver un compromis. La communication « en interne RH » devait aussi être soignée.

Les demandes de formations, les remboursements de frais et les réponses aux sollicitations des collaborateurs étaient effectués avec autonomie mais pas toujours très rapidement. A______ devait être plus autonome et prendre le lead sur l'ensemble des suivis dont elle avait la charge pour la formation des collaborateurs « B5 ». Sa supérieure hiérarchique devait effectuer des contrôles sur trop de sujets pour s'assurer que les dossiers soient traités dans les délais.

Les derniers mois, des difficultés avaient été constatées dans la réalisation du travail de la collaboratrice. Celle-ci avait remonté un sentiment de surcharge de travail, de rôles mal définis et de processus peu clairs. Sa supérieure hiérarchique la sentait moins à l'aise dans son poste. La composition de l'équipe et la nouvelle politique de formation demandaient plus de réactivité et une autonomie plus grande. Il était attendu de l'intéressée qu'elle adopte davantage ce mode de fonctionnement.

A______ devait progresser dans la mise en place des formations, des tableaux de suivi et de mise à jour de procédures. Elle ne démontrait pas suffisamment d'initiatives et laissait sa hiérarchie les prendre.

Sur certains aspects, elle était organisée. Cependant, un manque de rigueur était relevé dans les tâches qui demandaient plus de réflexion, qui n'étaient pas toujours rendues dans les délais attendus. Il était également attendu de l'intéressée davantage d'implication.

Selon le bilan hiérarchique, la collaboratrice voulait bien faire mais il était attendu d’elle plus d’initiative et d’autonomie. Le poste nécessitait une forte implication personnelle, une prise d'initiative élevée, un très bon relationnel, une force de travail importante et une bonne gestion du stress. Plusieurs points à corriger avaient déjà été abordés en février 2022. Au vu des problèmes relevés et des objectifs fixés, un nouvel entretien intermédiaire était fixé à juillet 2022. Faute d’être atteints, les objectifs considérés comme « à développer » ont été reportés.

La collaboratrice a indiqué que la communication était parfois difficile car elle ne savait pas exactement qui était impliqué dans les dossiers dont elle avait la charge. En outre, la charge de travail était importante et l’anticipation s’avérait difficile. N’étant pas en accord avec les éléments mentionnés dans l’évaluation, elle ne souhaitait pas les commenter. Elle n’avait pas la même perception de la gestion du stress et du ton adopté. Les relations depuis 27 ans avaient toujours été excellentes avec la hiérarchie et les collaborateurs. Le précédent service où elle avait travaillé la considérait comme une ressource pour ses collègues.

i. Selon le compte rendu de l'entretien d'évaluation intermédiaire du 28 juin 2022, A______ devait faire attention au respect des délais, de sorte que les collaborateurs aient suffisamment de temps pour s'inscrire aux formations. Sa supérieure hiérarchique souhaitait pouvoir être rassurée sur le fait que l'ensemble du déploiement du plan de formations soit sous le contrôle de l'intéressée. Il était attendu d'elle que les dossiers soient suivis et produits plus rapidement. Enfin, le ton employé par l'intéressée avec la hiérarchie et les collègues RH était adéquat. Un épisode avec un cadre avait toutefois été remonté en raison d'un ton inadéquat.

Les objectifs « prendre davantage le lead », « améliorer sa gestion du stress » et « mieux maîtriser l'outil Excel » étaient reconduits respectivement au 30 septembre 2022, 31 décembre 2023 et 30 juin 2023.

j. Par courrier du 1er décembre 2022, A______ a été confirmée dans son poste de chargée de formation 2, bien que les entretiens d’évaluation et de développement de 2022 aient révélé des points d’amélioration.

k. Le 1er juin 2023, faisant suite à un échange du 31 mai 2023, B______ a rappelé à A______ qu'il était attendu d'elle une meilleure communication et qu'elle devait respecter les horaires bloqués, notamment les arrivées du matin qui devaient être effectuées au plus tard à 9h00.

l. Un entretien d’évaluation intermédiaire s'est tenu le 18 juillet 2023.

Sur les cinq objectifs convenus, quatre (« finaliser le concept de suivi des collaborateurs suivant une formation en emploi » ; « améliorer la gestion du stress » ; « mieux maîtriser l'outil Excel » et « veiller à toujours utiliser un ton adéquat ») ont été considérés comme partiellement atteints. Un objectif (« prendre le lead sur les sujets liés aux formations collectives à organiser ») n’était pas atteint.

Sa responsable hiérarchique n'était toujours pas rassurée sur le fait que l'ensemble des formations dont A______ avait la responsabilité d'organisation soit géré dans les temps. Les formations obligatoires avaient été organisées par l'ensemble de l'équipe « formation » mais toutes les autres ne l'avaient pas été, alors que la collaboratrice avait le lead sur l'organisation de ces formations sur les premiers mois de 2023. À son retour d'absence fin mai, sa responsable hiérarchique lui avait indiqué qu'il restait seulement quelques formations à organiser. Or, à ce jour, le nécessaire n'avait pas encore été fait. Le volume de travail devait être augmenté afin que les dossiers confiés soient réalisés plus rapidement sans que la hiérarchie doive régulièrement reprendre le suivi des délais.

A______ devait créer une convention pour activité déléguée. Elle avait certes participé au processus mais ne l'avait pas finalisé dans son ensemble, alors que cela était attendu d'elle. C'était finalement sa responsable hiérarchique qui avait dû prendre le lead afin que le dossier puisse aboutir. Il convenait de faire attention aux conventions de formations ; l'année précédente, plusieurs avaient été rédigées et signées après le début de la formation.

La gestion du stress s'était vraiment améliorée. Le ton était cordial et la responsable hiérarchique sentait un climat apaisé. Un épisode isolé devait toutefois être signalé, en lien avec envoi d'un courriel par A______. Lorsque sa responsable hiérarchique l'avait reçue dans son bureau pour en discuter, le ton qu'elle avait employé n'était pas calme. La gestion du stress restait ainsi encore fragile.

L'objectif « prendre davantage le lead » a été repoussé au 28 février 2024 et quatre nouveaux objectifs ont été fixés aux 30 septembre 2023, 30 novembre 2023 et 30 juin 2024.

m. La collaboratrice n’a pas rempli sa part de l’évaluation et aucun commentaire supplémentaire ne figure dans le document.

B. a. Le 9 janvier 2024, en raison de soupçons de la hiérarchie de la collaboratrice en lien avec ses horaires, les EPI ont extrait les données concernant ses entrées au moyen de sa clé électronique dans les locaux sis au premier étage du bâtiment où elle travaillait pour la période du 16 janvier 2023 au 4 janvier 2024. Ils ont croisé ce fichier de données avec les entrées manuelles des horaires de la collaboratrice dans l’application MOBATIME.

b. Une seconde extraction des données a été effectuée le 11 janvier 2024 à propos des recherches et consultations de données personnelles effectuées dans la base de données Vision RH (ci-après : VRH) par la collaboratrice afin d’établir l’existence ou non d’un manquement à ses obligations professionnelles et son étendue.

c. Le 15 janvier 2024, A______ a été convoquée à un entretien de service. À teneur de la convocation, le but de l'entretien était de l'entendre sur la manipulation des timbrages dans l'application MOBATIME et les consultations non-autorisées de données personnelles dans l'application VRH. Il était également mentionné qu'elle faisait l'objet d'un suivi hiérarchique soutenu depuis plusieurs mois en raison d'insuffisance de prestations et de points d'amélioration relevés par la hiérarchie.

A______ avait régulièrement consulté des données personnelles, y compris des données sensibles, des collaborateurs des EPI, alors que cela ne se justifiait pas au regard de ses activités professionnelles. Elle avait consulté des données personnelles relatives à la directrice générale des EPI, à cinq membres de la direction et à neuf collaborateurs du service RH. Un document portant sur l'extraction des données consultées dans VRH entre le 11 janvier 2023 et le 8 janvier 2024 était annexé.

d. Le 30 janvier 2024 s’est tenu un entretien de service, au cours duquel la hiérarchie a reproché à A______ une manipulation des timbrages dans l’application MOBATIME (point développé sur une page), des consultations non autorisées de données sur l’application VRH (point développé sur deux pages) et un « contexte d'insuffisance de prestations » (point développé sur deux pages et demie).

Le 4 janvier 2024, la responsable RH avait constaté l'entrée d'A______ dans le bâtiment aux alentours de 10h15, ce qui l’avait surprise, dans un contexte d’arrivées après l’horaire de présence obligatoire. Elle avait donc vérifié l'application MOBATIME.

Début janvier 2024, un collègue avait constaté qu’A______ avait entrepris des recherches à son sujet dans l’application VRH afin de consulter ses données salariales. Il avait alerté sa hiérarchie. Le 11 janvier 2024, les EPI avaient procédé à une vérification des recherches et une journalisation de VRH avait été requise. Il en ressortait qu’elle consultait régulièrement des données personnelles sensibles (données salariales, historiques des salaires, données administratives, état civil, liste d’enfants, adresses d’urgence, dates contractuelles, transports, listes des entretiens d’évaluation, diplômes, expériences professionnelles) des collaborateurs des EPI et de la hiérarchie, en particulier des collègues du service RH, ce qui ne se justifiait pas au regard de ses activités professionnelles.

Les faits reprochés s'inscrivaient dans un contexte d'insuffisance des prestations faisant l'objet d'un suivi hiérarchique soutenu depuis près de deux ans. Des objectifs n'avaient pas fait l'objet de l'amélioration attendue et avaient dû être reconduits. Ces objectifs étaient en lien avec une mauvaise gestion du stress, une communication inadéquate ou irrespectueuse, un non-respect des délais et des livrables, un rendement trop faible ainsi qu'un manque d'« autonomisation » dans la prise en charge des dossiers.

Le conseil d'A______ a indiqué, concernant le contexte d'insuffisance de prestations, qu'il s'agissait d'éléments qui ressortaient des différentes évaluations, si bien que l'intéressée avait déjà eu l'occasion de s'exprimer sur ce point. Celle-ci a précisé qu'elle avait été régulièrement en désaccord avec le contenu des évaluations. Il n'y avait que quatre personnes dans le service de formation mais il y avait beaucoup de travail à effectuer. Enfin, lorsqu'elle utilisait la système VRH, l'utilisation était essentiellement professionnelle. Elle n'avait pas contourné le système, ni divulgué aucune donnée à laquelle elle avait eu accès.

Selon B______, A______ avait consulté des données personnelles relevant de la sphère familiale de collaborateurs, notamment la liste d'enfants, les données d'état civil et les numéros d'urgence. Elle avait également consulté les données personnelles de presque tous les nouveaux collaborateurs ayant pris leurs fonctions au sein du service des RH en 2023. L'intéressée ne s'est pas exprimée sur ces points.

Cette situation était susceptible de conduire à la résiliation des rapports de service avec effet immédiat pour violation grave des devoirs de fonction. La collaboratrice était libérée de l’obligation de travailler jusqu’à nouvel ordre.

e. Le 14 février 2024, A______ a transmis ses observations. Les données de VRH avaient été collectées de manière illicite. Elle ignorait que le logiciel VRH enregistrait ses activités et que les données étaient conservées pendant une année. La seule directive liée à VRH concernait l’obligation de confidentialité, scrupuleusement respectée. Le terme « insuffisance de prestations » n’était apparu pour la première fois que dans la convocation à l’entretien de service. La dernière évaluation complète remontait à mai 2022 et aucun critère n’était « non maîtrisé ». Il n’était pas fait mention d’une insuffisance de prestations. En août 2022, l’entretien n'était qu'intermédiaire et aucun bilan général n’avait été établi. Le délai pour atteindre certains objectifs n’était toujours pas échu, de sorte qu’il était prématuré d’en tirer des conclusions. Finalement, l’entretien de service n’avait pas été convoqué en raison de l’insuffisance de prestations mais pour deux autres motifs, de sorte qu’elle ne s’exprimerait pas davantage sur cette question.

f. Par décision du 22 février 2024, déclarée exécutoire nonobstant recours, les EPI ont résilié avec effet immédiat les rapports de service d’A______ en raison de manquements graves à ses devoirs de fonction, en lien avec des problèmes de timbrages et des consultations non autorisées de données personnelles de collaborateurs de l’institution dans l’application VRH et survenant dans un contexte d’insuffisance de prestations (rappelé sur deux pages et demie, tel que dans le procès-verbal d'entretien de service). La continuation des rapports de service était incompatible avec le bon fonctionnement de l’institution.

Son licenciement se fondait sur les fichiers obtenus dans le cadre des extractions de VRH et de la journalisation relative à l’utilisation de sa clé électronique pour ouvrir les portes sécurisées du premier étage. Les manquements constatés étaient suffisants pour mettre fin aux rapports de service avec effet immédiat.

g. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) à l’encontre de cette décision. La cause a été enregistrée sous le numéro A/981/2024.

C. a. En parallèle, le 14 février 2024, la collaboratrice a formulé auprès de son employeur une requête au sens de l’art. 47 de la loi sur l’information du public, l’accès aux documents et la protection des données personnelles du 5 octobre 2001 (LIPAD ‑ A 2 08). Elle n’avait jamais été informée de l’utilisation de sa clé pour générer un fichier de données à son nom et du fait que celles‑ci étaient conservées. Elle demandait à son employeur de détruire ces fichiers et de constater le caractère illicite du traitement. En cas de refus, le dossier devait être transmis au Préposé cantonal à la protection des données et à la transparence (ci-après : le préposé).

b. Les EPI ont transféré la requête au préposé, avec des observations.

c. Le 15 mars 2024, le préposé a considéré que la journalisation des accès dans l’application VRH était conforme à la LIPAD. En revanche, l’utilisation à des fins de contrôle horaire de la journalisation relative aux ouvertures des portes sécurisées du service des RH au moyen de la clé électronique constituait un traitement illicite des données. Il s’agissait d’y mettre fin.

d. Par décision du 28 mars 2024, les EPI ont constaté que la journalisation des accès dans l’application VRH et celle relative à la clé d’ouverture des portes sécurisées du service RH étaient conformes à la LIPAD. Ils ont refusé de procéder à la destruction des fichiers générés par les deux extractions querellées tant que la procédure A/981/2024 serait pendante.

e. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative à l’encontre de cette décision.

D. a. Par arrêt du 12 novembre 2024 (ATA/1315/2024), la chambre administrative a admis le recours interjeté par A______ contre la résiliation, avec effet immédiat, de ses rapports de service et a renvoyé la cause aux EPI.

La résiliation avec effet immédiat ne reposait sur aucune base légale. Le dossier était renvoyé aux EPI pour qu'ils examinent la suite qu'ils entendaient lui donner, à savoir s'ils privilégiaient la voie de la résiliation des rapports de service pour motif fondé ou la voie disciplinaire.

b. Par arrêt du même jour (ATA/1316/2024), la chambre administrative a également admis le recours interjeté contre la décision des EPI du 28 mars 2024, l’utilisation de la journalisation des accès au moyen de la clé électronique d’A______ à des fins de contrôle horaire constituant un traitement de données illicite. Le choix d'une option de traitement moins incisif aurait dû être privilégié pour contrôler l’heure réelle d’arrivée de la recourante afin de confirmer ou infirmer les soupçons du supérieur hiérarchique. Elle a ordonné la destruction des fichiers récapitulant les accès d’A______ au moyen de sa clé électronique.

L’objet du litige était limité au constat par les EPI de la conformité à la LIPAD de la journalisation des données relatives à la clé d’ouverture des portes sécurisées, l’utilisation considérée comme licite de ces données à des fins de contrôle des horaires de travail et leur refus de détruire ces données. La question de la journalisation des accès dans l’application VRH n’était plus litigieuse, la recourante ayant admis la position du préposé, qui estimait que le traitement de ces données était licite et proportionné.

E. a. Le 19 novembre 2024, les EPI ont informé A______ qu'ils envisageaient de rendre une décision de résiliation ordinaire des rapports de service. Les faits et motifs considérés, soit une insuffisance de prestations et des manquements professionnels engendrant une inaptitude à remplir la fonction ainsi qu'une rupture du lien de confiance, étaient identiques à ceux qui avaient été pris en compte dans le cadre de la première décision, si bien qu'ils priaient l'intéressée de s'y référer en tant que de besoin. Vu la nature de faits, ils entendaient renoncer à l'ouverture d'une procédure de reclassement. Un délai au 26 novembre 2024 était imparti à A______ pour transmettre ses observations.

b. Le 26 novembre 2024, A______ a sollicité la prolongation dudit délai, jusqu'au 29 novembre 2024.

c. Après plusieurs échanges de courriels, le délai a été prolongé au 28 novembre 2024 à 11h00.

d. A______ n'a pas formulé d'observations dans le délai imparti.

e. Par décision du 28 novembre 2024 déclarée exécutoire nonobstant recours, les EPI ont résilié les rapports de service d'A______ avec effet au 28 février 2025 et ont renoncé, compte tenu de la nature des reproches, à l'ouverture d'une procédure de reclassement. Ils l'ont libérée de son obligation de travailler avec effet immédiat.

Après avoir rappelé la teneur du premier entretien (30 janvier 2024), ils ont relevé que le comportement d'A______ était constitutif de manquements graves à ses devoirs de fonction, propres à rompre le lien de confiance, ce d'autant qu'elle déployait ses activités au sein du service des RH, ce qui impliquait un sens aigu et strict de la confidentialité des données traitées et auxquelles l'accès était conféré. Ces manquements étaient venus « cristalliser » une situation déjà fragile dans un contexte d'insuffisance de prestations, qui n'avait pas fait l'objet de l'amélioration attendue.

Elle n'avait pas contesté avoir consulté dans VRH l'ensemble des données personnelles des collaborateurs ni tenté de justifier ces consultations par un besoin d'ordre professionnel. Compte tenu de la nature des données consultées (relevant de la sphère privée et familiale) et de l'identité des personnes visées par les recherches, ces consultations ne se justifiaient pas par ses activités professionnelles et ne visaient qu'à satisfaire sa curiosité personnelle, notamment lors de l'arrivée de tout nouveau collaborateur au sein des services RH. Ces recherches n'étaient pas isolées et étaient récurrentes en 2023 et début 2024. Elles étaient contraires aux règles de confidentialité et de limitation d'accès aux données strictement nécessaires à ses activités professionnelles.

F. a. Par acte remis à la poste le 12 janvier 2025, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre cette décision, concluant à son annulation et à ce que sa réintégration au sein des EPI au poste de chargée de formation 2 soit proposée. Subsidiairement, elle a conclu à ce que les EPI soient condamnés à lui verser une indemnité équivalant à 24 mois de traitement, 13e salaire inclus, avec intérêts à 5% l'an dès le 18 novembre 2024.

La procédure en cas de résiliation des rapports de travail avait été violée. Les EPI auraient dû procéder à un nouvel entretien de service.

Il n'existait aucun motif fondé de résiliation, en l'absence de violation de ses devoirs de service. Les preuves portant sur la prétendue manipulation des timbrages étaient illicites et ne pouvaient être utilisées. Elle n'avait jamais violé son obligation de confidentialité et on ne lui reprochait pas d'avoir communiqué des informations à des tiers. Enfin, ses prestations n'étaient pas insuffisantes.

Le principe de la proportionnalité avait été violé. Un blâme aurait été suffisant et les EPI ne pouvaient pas renoncer à l'ouverture d'une procédure de reclassement.

b. Les EPI ont conclu au rejet du recours et à l'octroi d'une indemnité.

c. Dans sa réplique, la recourante a persisté dans ses explications et conclusions. Elle a relevé que l'insuffisance des prestations ne faisait pas l'objet de l'entretien de service. Si elle avait pu s'exprimer sur ce point, elle aurait exposé en détails en quoi elle ne se trouvait pas dans une situation d'insuffisance de prestations.

d. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

e. Les arguments des parties et le contenu des pièces seront repris, en tant que de besoin, dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le litige porte sur la conformité au droit de la résiliation des rapports de service de la recourante pour motif fondé.

3.             La recourante se plaint de la violation de la procédure en cas de résiliation des rapports de travail.

3.1 Les rapports de travail entre les EPI, établissement de droit public, doté de la personnalité juridique (art. 28 de la loi sur l’intégration des personnes handicapées du 16 mai 2003 - LIPH - K 1 36), et son personnel sont régis par la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) et son règlement d’application du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01 ; art. 43 al. 1 LIPH).

3.2 Le droit d'être entendu, garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision touchant sa situation juridique ne soit prise (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 et les arrêts cités ; 135 I 279 consid. 2.3). La procédure administrative genevoise exige donc de l'autorité qu'elle entende les parties avant de prendre une décision (art. 41 LPA). En tant que droit de participation, le droit d’être entendu englobe donc tous les droits qui doivent être attribués à une partie pour qu’elle puisse faire valoir efficacement son point de vue dans une procédure (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1 ; 132 II 485 consid. 3.2 ; 129 II 497 consid. 2.2).

Le droit d’être entendu n’est toutefois pas une fin en soi ; il constitue un moyen d'éviter qu'une procédure judiciaire n'aboutisse à un jugement vicié en raison de la violation du droit des parties de participer à la procédure. Lorsqu'on ne voit pas quelle influence la violation du droit d'être entendu a pu exercer sur la procédure, il n'y a pas lieu d'annuler la décision attaquée (ATF 143 IV 380 consid. 1.4.1).

3.3 En matière de rapport de travail de droit public, des occasions relativement informelles de s'exprimer avant le licenciement peuvent remplir les exigences du droit constitutionnel d'être entendu, pour autant que la personne concernée ait compris qu'une telle mesure pouvait entrer en ligne de compte à son encontre (ATF 144 I 11 consid. 5.3 in fine ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_176/2022 du 21 septembre 2022 consid. 4.1). La personne concernée ne doit pas seulement connaître les faits qui lui sont reprochés, mais doit également savoir qu'une décision allant dans une certaine direction est envisagée à son égard (ATF 144 I 11 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_158/2009 du 2 septembre 2009 consid. 5.2 non publié aux ATF 136 I 39). Selon la jurisprudence, l'omission pour un employeur public d'entendre le fonctionnaire auquel il veut signifier son congé constitue en principe une violation grave du droit d'être entendu de l'intéressé (arrêts du Tribunal fédéral 8C_310/2017 précité consid. 7.4 ; 8C_615/2016 du 15 juillet 2017 consid. 3.4 ; 8C_53/2012 du 6 juin 2012 consid. 5.4 ; ATA/536/2024 du 30 avril 2024 consid. 5.1).

Sauf cas d’urgence, le collaborateur doit pouvoir disposer de suffisamment de temps pour préparer ses objections (ATA/358/2025 du 1er avril 2025 consid. 3.1). En l’absence de délai uniformisé, un délai de huit à dix jours est raisonnable (arrêts du Tribunal fédéral 8C_615/2016 du 15 juillet 2017 consid. 3.2.1.8 ; 8C_20/2016 du 18 novembre 2016 consid. 3.3 ; 8C_817/2015 du 6 juillet 2016 consid. 4.3.1).

3.4 Selon l'art. 44 RPAC, un entretien de service entre le membre du personnel et son supérieur hiérarchique a pour objet les manquements aux devoirs du personnel (al. 1). La convocation doit parvenir au membre du personnel 14 jours avant l'entretien. Ce délai peut être réduit lorsque l'entretien a pour objet une infraction aux devoirs du personnel (al. 2). La convocation précise la nature, le motif de l’entretien et les personnes présentes pour l'employeur. Elle rappelle le droit de se faire accompagner (al. 3). Le droit d'être entendu est exercé de manière écrite dans les situations où un entretien de service ne peut pas se dérouler dans les locaux de l'administration en raison, notamment, de la détention du membre du personnel, de sa disparition, de son absence pour cause de maladie ou d'accident, ou de sa non‑comparution alors qu'il a été dûment convoqué (al. 6).

3.5 Il y a formalisme excessif, prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst., lorsque la stricte application des règles de procédure – judiciaire ou administrative – ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi et complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 149 IV 9 consid. 7.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_159/2025 du 18 juillet 2025 consid. 5.2).

3.6 En l'espèce, un entretien de service s'est tenu le 30 janvier 2024 en présence de la recourante. Il a porté sur la manipulation, par celle-ci, des timbrages dans l’application MOBATIME, sur des consultations non autorisées de données dans l’application VRH et sur un « contexte d'insuffisance de prestations ». À la suite de cet entretien, la recourante a transmis par écrit ses observations le 14 février 2024 et une décision de résiliation de ses rapports de service, avec effet immédiat, a ensuite été prononcée le 22 février 2024. Au vu de ces éléments, le droit d'être entendu de la recourante a été respecté à ce stade à tout le moins.

3.6.1 La recourante a interjeté recours contre la décision du 22 février 2024, que la chambre de céans a annulée par arrêt du 12 novembre 2024 (ATA/1315/2024), la résiliation avec effet immédiat ne reposant sur aucune base légale. La chambre administrative a renvoyé la cause aux EPI pour qu'ils examinent la suite qu'ils entendaient lui donner, à savoir s'ils privilégiaient la voie de la résiliation des rapports de service pour motif fondé ou la voie disciplinaire.

À la suite de l'arrêt précité, les EPI ont informé la recourante, le 19 novembre 2024, qu'ils envisageaient de prononcer une décision de résiliation ordinaire de ses rapports de service et lui ont octroyé un délai au 26 novembre 2024 pour leur transmettre ses observations, en précisant que les faits et motifs considérés, soit une insuffisance de prestations et des manquements professionnels engendrant une inaptitude à remplir la fonction ainsi qu'une rupture du lien de confiance, étaient identiques à ceux qui avaient été pris en compte dans le cadre de la première décision.

3.6.2 Dans la mesure où un entretien de service, au cours duquel la recourante a eu l'occasion de s'exprimer sur les reproches qui lui étaient adressés, a été tenu le 30 janvier 2024, mais également dans la mesure où les reproches fondant la décision querellée sont les mêmes que ceux fondant la décision du 22 février 2024, ce dont la recourante a été informée au préalable, les EPI n'étaient pas tenus de tenir un nouvel entretien de service, celui-ci n'apparaissant pas utile. Retenir le contraire contreviendrait d'ailleurs à l'interdiction du formalisme excessif, ce d'autant que la recourante n'a pas demandé, après avoir reçu le courrier du 19 novembre 2024, qu'un nouvel entretien ait lieu.

3.6.3 Les arguments contraires de l'intéressée n'emportent pas conviction. En premier lieu, elle fait d'abord valoir qu'une partie des faits reprochés se fondait sur des données non probantes et déclarées illicites par le préposé et que la situation juridique avait changé entre l'entretien du 30 janvier et le licenciement du 28 novembre 2024, l'intention de l'autorité n'étant plus de prononcer un licenciement avec effet immédiat, mais un licenciement pour motif fondé.

Or, d'une part, même si les reproches principaux étaient fondés sur les données récoltées par les EPI, la première décision était également fondée sur l'insuffisance des prestations de la recourante. En outre, si les données concernant le timbrage dans l'application MOBATIME ont certes été déclarées illicites par la chambre administrative, tel n'a pas été le cas de celles concernant les accès à la base de données VRH, considérées comme licites, ce qui n'est plus contesté. D'autre part, les motifs susceptibles de fonder une résiliation avec effet immédiat peuvent a fortiori fonder une réalisation pour motif fondé, les exigences relatives à la première étant plus élevées que celles relatives à la seconde. Dès lors, l'essentiel des comportements reprochés à la recourante lors de l'entretien du 30 janvier 2024 est resté pertinent, malgré le constat du caractère illicite des données concernant le timbrage dans l'application MOBATIME.

3.6.4 En second lieu, la recourante estime que, s'agissant d'un motif fondé, la question de l'insuffisance de prestations était devenue importante. Dans la convocation en vue de l'entretien du 30 janvier 2024, les EPI ne l'avaient invitée à s'exprimer que sur les deux manquements qu'ils disaient avoir relevés. La question de l'insuffisance des prestations avait à peine été abordée lors de l'entretien.

Or, cette appréciation apparaît en contradiction manifeste avec la situation de fait, pour les raisons qui suivent. Premièrement, la convocation mentionnait notamment que la recourante faisait l'objet d'un suivi hiérarchique soutenu depuis plusieurs mois en raison d'insuffisance de prestations. Deuxièmement, la question de l'insuffisance des prestations a été abordée durant l'entretien, le compte rendu y relatif en consacrant pas moins de deux pages et demie. Finalement, la recourante s'est exprimée sur la qualité de ses prestations pendant l'entretien, indiquant qu'il s'agissait d'éléments qui ressortaient des différentes évaluations, si bien qu'elle avait déjà eu l'occasion de s'exprimer à leur sujet. Dans cette mesure d'ailleurs, elle n'est pas fondée à soutenir que « si elle avait pu s'exprimer sur l'insuffisance des prestations, elle aurait exposé en détail en quoi elle ne se trouvait pas dans une situation d'insuffisance de prestations ».

3.6.5 Enfin, avant de prononcer la décision querellée, les EPI ont octroyé, le 19 novembre 2024, un délai au 26 novembre 2024 à la recourante pour se déterminer. Si ce délai, de sept jours, apparaît trop court au sens de la jurisprudence précitée, il a finalement été prolongé jusqu'au 28 novembre 2024. La recourante a donc disposé du temps nécessaire pour transmettre ses observations, bien qu'elle ait finalement renoncé à le faire.

3.6.6 En définitive, l'art. 44 RPAC n'a pas été violé et le droit d'être entendu de la recourante a été respecté.

Le grief sera donc écarté.

4.             La recourante conteste l'existence d'un motif fondé de résiliation de ses rapports de service et se plaint d'une violation du principe de la proportionnalité.

4.1 Selon l'art. 21 al. 3 LPAC, l'autorité compétente peut résilier les rapports de service du fonctionnaire pour un motif fondé ; elle motive sa décision ; elle est tenue, préalablement à la résiliation, de proposer des mesures de développement et de réinsertion professionnels et de rechercher si un autre poste au sein de l'administration cantonale correspond aux capacités de l'intéressée. Il y a motif fondé lorsque la continuation des rapports de service n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration, soit notamment en raison de l'insuffisance des prestations (art. 22 let. a LPAC) ou de l'inaptitude à remplir les exigences du poste (art. 22 let. b LPAC). Le licenciement pour motif fondé ne suppose pas l'existence d'une faute de la part de l'employé, le critère déterminant étant le bon fonctionnement de l'administration cantonale. Il ne s'agit donc pas de sanctionner un comportement fautif, mais d'adapter la composition d'un service déterminé aux exigences relatives à son bon fonctionnement. La notion de motif fondé doit être concrétisée dans chaque situation à la lumière des circonstances concrètes, l'employeur jouissant d'un large pouvoir d'appréciation (arrêts du Tribunal fédéral 1C_9/2025 du 13 juin 2025 consid. 3.2 ; 1C_381/2024 du 3 avril 2025 consid. 5.2 ; 1C_17/2024 du 8 août 2024 consid. 4.2).

Il faut que le comportement de l'employé – dont les manquements sont aussi reconnaissables pour des tiers – perturbe le bon fonctionnement du service ou qu'il soit propre à ébranler le rapport de confiance avec le supérieur (arrêt du Tribunal fédéral 8C_392/2019 du 24 août 2020 consid. 4.1 et 4.2). De jurisprudence constante, le fait de ne pas pouvoir s'intégrer à une équipe ou de présenter des défauts de comportement ou de caractère tels que toute collaboration est difficile ou impossible est de nature à fonder la résiliation des rapports de travail, quelles que soient les qualités professionnelles de l'intéressé (ATA/530/2024 du 30 avril 2024 consid. 5.3 et l'arrêt cité). En outre, alors même que la relation avec les patients est bonne, des difficultés relationnelles répétées avec les collègues et la hiérarchie, émaillées d'incidents et d'emportements, mis en évidence par les évaluations successives et ayant fait l'objet d'entretiens, de rappels et d'accompagnements, pris dans leur ensemble, peuvent constituer un motif fondé de résiliation (ATA/726/2024 du 18 juin 2024 consid. 6.4 ; ATA/1521/2019 du 15 octobre 2019 consid. 6 et 7).

4.2 La notion de motifs fondés doit être concrétisée, dans chaque situation, à la lumière des circonstances du cas d’espèce. L’employeur jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour juger si les manquements d’un fonctionnaire sont susceptibles de rendre la continuation des rapports de service incompatible avec le bon fonctionnement de l’administration (ATA/530/2024 précité consid. 5.3 et l'arrêt cité). Les rapports de service étant soumis au droit public, la résiliation est en outre assujettie au respect des principes constitutionnels, en particulier ceux de la légalité (art. 5 al. 1 Cst.), de l’égalité de traitement (art. 8 Cst.), de l’interdiction de l’arbitraire (art. 9 Cst.) et de la proportionnalité (art. 5 al. 2 et 36 al. 3 Cst. ; ATA/530/2024 du 30 avril 2024 consid. 5.4 et les arrêts cités). Le principe de la proportionnalité exige que les mesures mises en œuvre soient propres à atteindre le but visé (règle de l'aptitude) et que celui-ci ne puisse être atteint par une mesure moins contraignante (règle de la nécessité) ; il doit en outre y avoir un rapport raisonnable entre ce but et les intérêts compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts ; ATF 140 I 168 consid. 4.2.1).

4.3 Au vu de la diversité des agissements susceptibles de constituer une violation des devoirs de service, le recours à des clauses générales susceptibles de saisir tous les agissements et les attitudes qui peuvent constituer des violations de ces devoirs est admis. Tout agissement, manquement ou omission, dès lors qu’il est incompatible avec le comportement que l’on est en droit d’attendre de celui qui occupe une fonction ou qui exerce une activité soumise au droit disciplinaire, peut ainsi engendrer une sanction (arrêt du Tribunal fédéral 8C_161/2019 du 26 juin 2020 consid. 4.2.2).

4.4 Les justes motifs de renvoi des fonctionnaires ou employés de l'État peuvent procéder de toutes circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, excluent la poursuite des rapports de service, même en l'absence de faute. De toute nature, ils peuvent relever d'événements ou de circonstances que l'intéressé ne pouvait éviter, ou au contraire d'activités, de comportements ou de situations qui lui sont imputables (arrêts du Tribunal fédéral 8C_667/2019 du 28 janvier 2021 consid. 6.2 et les arrêts cités ; 8C_638/2016 du 18 août 2017 consid. 4.2 et les références citées). Les conditions justifiant une résiliation ne se déterminent pas de façon abstraite ou générale, mais dépendent concrètement de la position et des responsabilités de l'intéressé, de la nature et de la durée des rapports de travail ainsi que du genre et de l'importance du manquement (ATF 142 III 579 consid. 4.2).

4.5 L'art. 22 RPAC prévoit que les membres du personnel se doivent de remplir tous les devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence (al. 1). Ils se doivent de respecter leur horaire de travail (al. 2), d’assumer personnellement leur travail et de s’abstenir de toute occupation étrangère au service pendant les heures de travail (al. 3).

4.6 Selon l'art. 23A RPAC, le personnel de la fonction publique qui dispose de l'accès à un téléphone, à un poste de travail informatique, à Internet, à un compte de messagerie ou à tout autre outil de communication électronique mis à disposition par l'État doit utiliser ces ressources à des fins professionnelles (al. 1). Leur utilisation à titre privé n'est tolérée que si elle est minime en temps et en fréquence, qu'elle n'entraîne qu'une utilisation négligeable des ressources informatiques, qu'elle ne compromet ni n'entrave l'activité professionnelle ou celle du service, qu'elle ne relève pas d'une activité lucrative privée, et qu'elle n'est ni illicite, ni contraire à la bienséance ou à la décence (al. 2). Des contrôles statistiques et non individualisés de l'utilisation des ressources informatiques par le personnel peuvent être effectués (al. 4). Lorsque les intérêts prépondérants de l’État de Genève, tels que la sécurité informatique ou le bon fonctionnement du service, l’exigent, des contrôles individualisés, et le cas échéant un accès à la liste des appels et à leur durée, au poste de travail informatique ou au compte de messagerie, peuvent être ordonnés par le chef du département ou son secrétaire général. Ces mesures respectent, dans toute la mesure du possible, la sphère privée des membres du personnel concernés (al. 5). Le collège des secrétaires généraux précise par voie de directive l'utilisation de ces ressources par les membres du personnel et les mesures de contrôle y relatives (al. 6).

4.7 Dans un arrêt du 22 janvier 2019, la chambre administrative a confirmé la révocation d'un fonctionnaire, employé administratif au sein de la police, ayant transmis des informations confidentielles à des tiers et ayant été reconnu coupable de violation de son secret de fonction. L'intéressé avait fait usage, pendant plus de quatre ans, des outils informatiques mis à sa disposition par son employeur pour satisfaire sa curiosité personnelle et, surtout, transmettre des informations confidentielles à différents tiers, et notamment à un ami détective privé. La remise d'informations sensibles (photocopies de passeports, rapports d'arrestations, rapports de police sur certains prévenus, demandes de renseignements internationales sur des trafiquants présumés, noms, adresses et numéros de téléphones de tiers, etc.) constituait une faute extrêmement lourde (ATA/56/2019 du 22 janvier 2019 consid. 20).

4.8 Dans un arrêt du 14 janvier 2025, la chambre administrative a considéré que le comportement d'une fonctionnaire consistant, de manière répétée et pendant plusieurs années, à consulter des données confidentielles destinées uniquement à usage professionnel et à les transmettre à des tiers était de nature à rompre le lien de confiance avec l'employeur (ATA/47/2025 du 14 janvier 2025 consid. 4.10).

4.9 Le fonctionnaire, au sein de l'administration cantonale, qui enfreint ses devoirs de service, soit intentionnellement soit par négligence, peut faire l'objet d'une révocation, qui est prononcée par le Conseil d'État (art. 16 al. 1 let. c ch. 5 LPAC).

Il convient de distinguer deux types de licenciement s'agissant de la résiliation des rapports de service d'un membre du personnel : la résiliation pour des motifs objectifs liés au bon fonctionnement de l'administration, ou licenciement pour motif fondé (art. 22 LPAC) et le licenciement pour violation des devoirs de service ou révocation, lequel est une sanction disciplinaire (art. 16 al. 1 let. c ch. 5 LPAC ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_530/2020 du 1er juin 2021 consid. 3.2).

Selon le Tribunal fédéral, la révocation et le licenciement pour motifs graves visent des buts différents même si les deux prononcés ont pour effet de mettre un terme à l'engagement du fonctionnaire. La révocation, qui figure sous le chapitre « Responsabilité disciplinaire et sanctions » du statut communal, est une mesure de nature disciplinaire et constitue la sanction formelle d'un comportement fautif. Elle implique le constat que le fonctionnaire a violé les devoirs de sa charge, intentionnellement ou par négligence, et que la gravité de la faute justifie une sanction disciplinaire. En revanche, le licenciement pour motifs graves ne relève pas du droit disciplinaire. Il suppose l'existence de motifs graves, ce par quoi il faut entendre toutes circonstances qui, d'après les règles de la bonne foi, font admettre que l'autorité ne peut plus maintenir les rapports de service (arrêt du Tribunal fédéral 8C_631/2011 du 19 septembre 2012 consid. 7.1).

Selon la jurisprudence, la violation fautive des devoirs de service n'exclut pas le prononcé d'un licenciement administratif, soit une résiliation des rapports de service pour motif fondé. Si le principe même d'une collaboration ultérieure est remis en cause par une faute disciplinaire de manière à rendre inacceptable une continuation du rapport de service, un simple licenciement, dont les conséquences sont moins graves pour la personne concernée, peut être décidé à la place de la révocation disciplinaire (arrêt du Tribunal fédéral 1C_17/2024 du 8 août 2024 consid. 4.4). Toute violation des devoirs de service ne saurait être sanctionnée par la voie de la révocation disciplinaire. Cette mesure revêt l’aspect d’une peine et a un caractère relativement infamant. Elle s’impose surtout dans les cas où le comportement de l’agent démontre qu’il n’est plus digne de rester en fonction (arrêt du Tribunal fédéral 8C_126/2023 du 4 septembre 2023 consid. 3.1.4.)

5.             En l'espèce, la résiliation des rapports de service de la recourante est fondée sur trois motifs, de nature, selon les EPI, à rompre le lien de confiance, à savoir l'insuffisance de ses prestations, l'accès indu à des données personnelles dans VRH ainsi que la manipulation des timbrages dans l'application MOBATIME.

5.1 Il n'est pas contesté qu'une extraction des données a été réalisée le 11 janvier 2024 à propos des recherches et consultations de données personnelles effectuées par la recourante dans la base de données VRH, étant précisé que la question de la licéité de la journalisation des accès dans cette application n’est pas litigieuse, la recourante ayant admis la position du préposé, qui estimait que le traitement de ces données était licite et proportionné, ce que la chambre de céans a constaté dans ATA/1316/2024 précité.

Il ressort du document exposant les données personnelles consultées par la recourante, annexé au procès-verbal d'entretien de service du 30 janvier 2024, que l'intéressée a régulièrement consulté, du 11 janvier 2023 au 8 janvier 2024, des données personnelles, y compris des données personnelles sensibles (relevant de la sphère familiale de collaborateurs, notamment la liste d'enfants, les données d'état civil et les numéros d'urgence) de collaborateurs des EPI (en particulier nouveaux), de la directrice générale des EPI, de cinq membres de la direction et de neuf collaborateurs du service RH. La recourante indique ne pas être en mesure de se déterminer sur ce point. Dès lors, dans la mesure où le reproche est fondé sur un document informatique fiable et en l'absence de contestation crédible de la recourante, il est établi que celle‑ci a consulté des données personnelles sensibles, sans que ces consultations aient été justifiées par les activités professionnelles de la recourante, ce qu'elle ne prétend du reste pas.

Ces agissements délibérés sont contraires aux règles interdisant au personnel de l'État qui dispose d'un poste de travail informatique mis à disposition par l'État et d'Internet d'utiliser ces ressources à des fins privées (art. 23A al. 1 RPAC a contrario) et à celles prescrivant que les membres du personnel de l'État doivent s'abstenir de toute occupation étrangère au service pendant les heures de travail (art. 22 al. 3 RPAC). Ils contreviennent également à la charte informatique des EPI, qui rappelle la teneur de 23A al. 1 RPAC.

 

Les EPI étaient donc fondés à retenir que la recourante a contrevenu à ses devoirs de service en consultant, sans y être autorisée, des données personnelles sensibles de tiers, ce d'autant plus que ces consultations se sont répétées pendant une année. Ils l'étaient d'autant plus que la chambre de céans a déjà considéré que l'usage, par un fonctionnaire, des outils informatiques mis à sa disposition par son employeur pour satisfaire sa curiosité personnelle est constitutif d'une violation de devoirs de fonction. Le fait que la recourante n'ait pas, selon elle, violé son obligation de confidentialité ni n'ait communiqué les informations consultées à des tiers n'y change rien, la seule consultation desdites informations suffisant à fonder une violation des devoirs de service et leur communication à des tiers constituant une circonstance aggravante.

Contrairement à ce que soutient la recourante, il n'était en toute hypothèse pas nécessaire que les EPI posent expressément un cadre concernant l'utilisation du logiciel VRH en particulier, l'obligation de principe d'utiliser Internet ou les outils informatiques à des fins professionnelles uniquement ressortant déjà de l'art. 23A al. 1 RPAC et de la charte des EPI. Au demeurant, le 27 août 2021, la directrice des services des RH a informé les collaborateurs des EPI, y compris la recourante, que les comptes MOBATIME des collaborateurs seraient désormais accessibles uniquement aux personnes qui, dans le cadre de leurs responsabilités, devaient avoir accès à ces données. Ces personnes devaient consulter uniquement des données personnelles si leur traitement était indispensable à l'accomplissement d'une tâche définie. La directrice des services des RH a de surcroît mentionné, en faisant référence à juste titre à l'art. 64 LIPAD, que quiconque, au sein d'une institution, traitait des données personnelles à des fins étrangères à l'accomplissement des tâches légales qui lui étaient confiées s'exposait à des sanctions. Si le courriel mentionnait certes uniquement l'application MOBATIME, les principes énoncés s'appliquaient mutatis mutandis à l'application VRH. En raison de sa fonction aux RH et de son expérience de plus de 25 ans dans le domaine, la recourante ne pouvait l'ignorer. Pour le surplus, les critiques de la recourante en lien avec le moyen de communication par lequel l'information a été transmise, soit par courriel, ne sont pas pertinentes, dès lors que seul importe le fait que l'intéressée ait reçu le courriel, ce qui n'est pas contesté. Celle-ci était donc en possession de cette information et devait s'y conformer.

La recourante soutient encore que la question de la faute et de la violation des devoirs de service n'était pas capitale, dans la mesure où les EPI ont mis fin à ses rapports de services par la voie administrative et non disciplinaire. Or, cet argument n'est pas fondé puisque, de jurisprudence constante, la violation fautive des devoirs de service n'exclut pas le prononcé d'un licenciement administratif. Par ailleurs, dans la mesure où les EPI ont mis fin aux rapports de services de la recourante par la voie administrative et non pas par le prononcé d'une révocation, ils n'étaient pas tenus d'ouvrir une enquête administrative (art. 27 al. 2 LPAC a contrario), ce d'autant moins que les faits reprochés à la recourante sont suffisamment établis.

Enfin, quoiqu'en dise celle-ci, son comportement était propre à nuire à la bonne marche du service, celle-ci consacrant une partie de son temps de travail à des fins privées, au détriment de son employeur. En outre, la consultation non autorisée de données personnelles de collègues est propre à ébranler la dynamique d'équipe et la confiance que ceux-ci doivent pouvoir placer en la recourante, qui occupait de surcroît un poste à responsabilité aux RH. Pour le surplus, le comportement de la recourante entrant en contradiction manifeste avec ses devoirs de services, il était reconnaissable par des tiers, ce d'autant que c'est à la suite d'une dénonciation d'un collègue que les données relatives aux recherches dans VRH de la recourante ont été extraites.

Le premier reproche est donc fondé.

5.2 Pour ce qui a trait aux prestations de la recourante, le premier grief que lui a adressé son employeur est le non-respect des délais et un rendement de travail insuffisant. Ce point a d'abord été signalé à la recourante lors de l'entretien du 17 février 2022, au cours duquel sa supérieure hiérarchique lui a demandé de prendre en charge les dossiers dans les délais convenus. Puis, lors de l'entretien du 2 mai 2022, il a été relevé que les demandes de formations, les remboursements de frais et les réponses aux sollicitations des collaborateurs étaient effectuées avec autonomie mais pas toujours très rapidement et que les tâches qui demandaient plus de réflexion n'étaient pas toujours rendues dans les délais attendus. Ensuite, lors de l'entretien du 28 juin 2022, sa supérieure hiérarchique a une nouvelle fois rappelé à la recourante qu'elle devait faire attention au respect des délais et a relevé que les dossiers devaient être « produits » plus rapidement. Enfin, lors de l'entretien du 18 juillet 2023, sa supérieure hiérarchique a indiqué ne pas être toujours rassurée sur le fait que l'ensemble des formations dont la recourante avait la responsabilité d'organisation soit géré dans les temps et que le volume de travail devait être augmenté afin que les dossiers confiés soient réalisés plus rapidement, sans que la hiérarchie doive régulièrement reprendre le suivi des délais.

Compte tenu de ce qui précède, il est établi que la recourante rencontrait des difficultés dans le respect des délais et que son rendement était insuffisant. Or, le respect des délais fait partie des devoirs de tout membre du personnel de l'État et est une composante de leur obligation de remplir les tâches qui leur sont confiées avec diligence (art. 22 al. 1 RPAC). Le premier reproche est donc fondé.

Le second reproche que les EPI ont adressé à la recourante est son manque d'initiative, s'agissant notamment des activités de formations sur lesquelles il était attendu d'elle qu'elle prenne le lead. Ce reproche a d'abord été signalé lors de l'entretien du 17 février 2022. Puis, lors de celui du 2 mai 2022, il a été relevé que la recourante devait s'impliquer d'avantage, être plus autonome et prendre le lead sur l'ensemble des suivis dont elle avait la charge pour la formation des collaborateurs B5. Sa supérieure hiérarchique devait effectuer des suivis/contrôles sur trop de sujets pour s'assurer que les dossiers soient traités dans les délais. En outre le critère « d'initiative » était à développer. Le recourante devait progresser dans la mise en place des formations, des tableaux de suivi et de mise à jour de procédures. Elle ne démontrait pas suffisamment d'initiatives et laissait sa hiérarchie les prendre. Ensuite, lors de l'entretien du 28 juin 2022, l'objectif « prendre davantage le lead » a été reconduit. Enfin, lors de l’entretien d’évaluation du 18 juillet 2023, sa supérieure hiérarchique a relevé que les formations obligatoires avaient été organisées par l'ensemble de l'équipe formation mais que toutes les autres ne l'avaient pas été, alors que la recourante avait le lead sur l'organisation de ces formations sur les premiers mois de 2023. En outre, la recourante, qui devait créer une convention pour activité déléguée avait certes participé au processus mais ne l'avait pas finalisé dans son ensemble, contrairement à ce qui était attendu d'elle. C'était finalement sa responsable hiérarchique qui avait dû prendre le lead afin que le dossier puisse aboutir.

Compte tenu de ce qui précède, il est établi que la recourante rencontrait des difficultés dans la prise d'initiatives concernant les activités de formations ainsi que des difficultés à prendre le lead lorsqu'elle le devait. Or, les EPI ont expliqué sans être contredits que le poste occupé par la recourante nécessitait notamment une forte implication et une prise d'initiative élevée, ce qui ressort également de l'évaluation du 2 mai 2022. La recourante ne conteste pas expressément le reproche mais tente de le justifier par le fait que son environnement de travail était trop bruyant. Toutefois, cela ne suffit pas à expliquer un manque de prise d'initiatives, ce d'autant moins que, comme elle le relève, des aménagements ont été mis en place avec l'infirmière. Or, il ne ressort pas du dossier que la recourante les aurait mis à profit pour combler ses lacunes.

Dans la mesure où la recourante n'a pas satisfait aux exigences susmentionnées, le second reproche est également fondé.

Dès lors, au vu des difficultés rencontrées par la recourante dans le respect des délais et de son incapacité à prendre des initiatives et le lead sur les sujets liés aux formations collectives à organiser, ce qui ressort des différents entretiens passés par la recourante, les EPI disposaient de suffisamment d'éléments pour retenir que ses prestations étaient insuffisantes pour remplir les exigences de son poste, en tant que celui-ci nécessitait une forte implication personnelle, une prise d'initiative élevée et une force de travail importante.

Contrairement à ce que soutient la recourante, elle se trouvait déjà dans une situation d'insuffisance de prestations lors de la dernière évaluation le 18 juillet 2023 et il importe peu que cette évaluation n'était qu'intermédiaire, l'essentiel étant qu'une évaluation soit effectuée. Aucun des objectifs convenus, qui étaient en lien avec les reproches adressés à la recourante, notamment le fait de « prendre le lead sur les sujets liés aux formations collectives à organiser », n'était atteint. Ces objectifs ne l'étaient que partiellement, à l'exception de celui consistant à « prendre le lead sur les sujets liés aux formations collectives à organiser », qui n'était pas atteint. La recourante avait connaissance depuis plus d'une année des reproches dont elle faisait l'objet et a disposé du temps nécessaire pour y remédier, ce qu'elle n'a toutefois pas réussi à faire, ou que très partiellement, avant le prononcé de la première décision de résiliation des rapports de service (24 février 2024). Dans cette mesure, le fait que, dans l'EEDP du 2 mai 2022, antérieur au dernier entretien, sur les douze points évalués, huit avaient été considérés comme maîtrisés et quatre comme étant à développer n'y change rien.

Enfin, la recourante reproche aux EPI d'avoir fixé un objectif, soit celui de prendre le lead, qui n’était pas mesurable, contrairement à ce que préconisait la méthode SMART. Or, non seulement les EPI disposent d'un large pouvoir d'appréciation pour définir les critères d'évaluation de ses collaborateurs mais il apparaît que la prise d'initiatives et de lead sont des critères suffisamment précis et qui peuvent être facilement constatés par la hiérarchie ou par des collègues. Le grief n'est donc pas fondé.

5.3 Cumulés, les reproches adressés à la recourante, de nature à conduire à la rupture du lien de confiance, suffisent pour une résiliation des rapports de service. Il n'est donc pas nécessaire d'analyser le bien-fondé du reproche fondé sur la manipulation des timbrages dans l'application MOBATIME ni de répondre à la question de savoir si les données ayant permis aux EPI de constater les heures d'arrivées réelles de la recourante, jugées illicites par la chambre de céans dans l'ATA/1316/2024 précitée, peuvent être utilisées dans le cadre de la présente procédure.

5.4 Sur le plan de la proportionnalité, le licenciement est apte à atteindre le but visé, soit adapter la composition du service des RH des EPI en écartant un collaborateur, soit la recourante, dont les prestations sont insuffisantes pour son poste et dont le comportement répété a provoqué une rupture du lien de confiance avec son employeur.

Le licenciement est nécessaire, aucune autre mesure moins incisive n'apparaissant apte à atteindre le but visé. Compte tenu notamment du constat d'insuffisance des prestations, qui ne relève pas d'une faute de la recourante, aucune sanction disciplinaire n'entrait en ligne de compte.

Dans la pesée des intérêts, il y a lieu de tenir compte de l'intérêt de la recourante à conserver son travail et à continuer d'être rémunérée, qui est très important. À cela s'ajoutent ses bons états de service jusqu'à 2022 (qui ressortent de ses certificats se de travail intermédiaires des 1er juin 2016 et 10 octobre 2018), la très longue durée de ses relations de travail avec les EPI et son âge (58 ans), soit un âge proche de la retraite auquel il n'est notoirement pas facile de retrouver un emploi.

L'intérêt des EPI réside dans le fait d'employer des personnes donnant satisfaction dans leur travail et en qui ils peuvent avoir toute confiance, en vue d'assurer le bon fonctionnement de l'institution. Cet intérêt, tant public que privé, est primordial et on ne saurait exiger d'une autorité qu'elle reste liée contractuellement à des collaborateurs ne donnant pas – ou plus – entière satisfaction et dont le comportement est de nature à rompre la confiance nécessaire à la poursuite des relations de travail.

Au vu de ce qui précède, les EPI n'ont pas abusé de leur large pouvoir d'appréciation en prononçant la résiliation des rapports de travail de la recourante, laquelle s'imposait pour les besoins du service et sa bonne marche.

Le grief sera donc écarté.

6.             La recourante se plaint de l'absence de procédure de reclassement.

6.1 Préalablement à la décision de résiliation, l'autorité compétente est tenue de proposer au fonctionnaire qu'elle entend licencier des mesures de développement et de réinsertion professionnelle et de rechercher si un autre poste au sein de l'administration cantonale correspond à ses capacités (art. 21 al. 3 LPAC).

À teneur de l’art. 46 RPAC, lorsque les éléments constitutifs d'un motif fondé de résiliation sont dûment établis lors d'entretiens de service, un reclassement selon l'art. 21 al. 3 LPAC est proposé pour autant qu’un poste soit disponible au sein de l’administration et que l’intéressé au bénéfice d'une nomination dispose des capacités nécessaires pour l’occuper (al. 1). Des mesures de développement et de réinsertion professionnels propres à favoriser le reclassement sont proposées (al. 2). L’intéressé est tenu de collaborer. Il peut faire des suggestions (al. 3). L’intéressé bénéficie d’un délai de dix jours ouvrables pour accepter ou refuser la proposition de reclassement (al. 4). En cas de refus, d’échec ou d'absence du reclassement, une décision motivée de résiliation des rapports de service pour motif fondé intervient (al. 6).

6.2 Le principe du reclassement, applicable aux seuls fonctionnaires, est une expression du principe de la proportionnalité (art. 5 al. 2 Cst.) et impose à l’État de s’assurer, avant qu’un licenciement ne soit prononcé, qu’aucune mesure moins préjudiciable pour l’administré ne puisse être prise (arrêt du Tribunal fédéral 1C_309/2008 du 28 janvier 2009 consid. 2.2). La loi n’impose toutefois pas à l’État une obligation de résultat, mais celle de mettre en œuvre tout ce qui peut être raisonnablement exigé de lui (ATA/726/2024 du 18 juin 2024 consid. 7.3).

6.3 Lorsqu’un reclassement revient à reporter dans un autre service des problèmes de comportement, il paraît illusoire et il peut y être renoncé (arrêt du Tribunal fédéral 8C_839/2014 du 5 mai 2015 consid. 7.1). Toutefois, seules les circonstances particulières, dûment établies, peuvent justifier une exception au principe légal du reclassement et faire primer l’intérêt public et privé de nombreux employés de l’État sur l’intérêt privé, pourtant important, de la personne licenciée (arrêt du Tribunal fédéral 1C_609/2023 du 24 mai 2024 consid. 4.1 ; ATA/239/2025 du 11 mars 2025 consid. 10.4 , ATA/726/2024 du 18 juin 2024 consid. 7.6 ; ATA/71/2024 du 23 janvier 2024 consid. 6.4 et les arrêts cités).

6.4 En l'espèce, les EPI sont soumis à la LPAC, par renvoi de la LIPH, si bien que l’art. 46 al. 1 RPAC s’applique. Ils avaient donc en principe l’obligation de tenter un reclassement, ce qu'ils n'ont pas fait. Ils ont expliqué que le lien de confiance avait été irrémédiablement rompu et que l'insuffisance des prestations reprochées à la recourante remontait à de nombreuses années et s'était répétée dans les diverses fonctions qu'elle avait occupées. Déplacer à nouveau la recourante dans une nouvelle fonction n'aurait eu aucun effet sur les reproches présents depuis de nombreuses années.

Cette appréciation est soutenable. En effet, si l'on peut certes considérer que la recourante aurait éventuellement pu être affectée à un poste moins exigeant, son comportement consistant à consulter de manière répétée et sans droit des données personnelles sensibles de ses collègues, y compris d'autres services, alors même qu'elle occupait une fonction de RH depuis de nombreuses années et ne pouvait ignorer la gravité de son comportement, a en revanche rompu le lien de confiance avec son employeur. Par ailleurs, il ressort du dossier qu'elle a rencontré des difficultés à gérer son stress et ne se montrait pas toujours respectueuse envers ses collaborateurs, sa supérieure hiérarchique lui rappelant encore le 1er juin 2023 qu'il était attendu d'elle une meilleure communication. Par conséquent, le reclassement aurait eu pour effet de reporter dans un autre service les difficultés de comportement rencontrées par la recourante.

À cela s'ajoute que les accès non autorisés à des données personnelles sensibles ont été découverts à la suite de la plainte d'un collègue, ce qui est susceptible de rendre le reclassement encore plus compliqué, eu égard aux bonnes relations que doivent pouvoir entretenir les collègues entre eux.

Le reclassement paraissait donc illusoire, malgré l'ancienneté de l'intéressée, si bien que les EPI pouvaient y renoncer.

Le grief sera donc écarté, ce qui conduit au rejet du recours.

7.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée, pas plus qu'aux EPI, qui disposent d'un service juridique et sont donc à même de traiter la procédure eux-mêmes (art. 87 al. 2 LPA ; ATA/185/2020 du 18 février 2020 consid. 11).

La valeur litigieuse au sens des art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) est supérieure à CHF 15'000.-.

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 13 janvier 2025 par A______ contre la décision des Établissements publics pour l'intégration (EPI) du 28 novembre 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge d'A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Yann LAM, avocat de la recourante, ainsi qu'à Me Sébastien VÖGELI, avocat des Établissements publics pour l'intégration.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, Philippe KNUPFER, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

 

D. WERFFELI BASTIANELLI

 

la présidente siégeant :

 

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.


Genève, le 

 


la greffière :