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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3752/2024

ATA/880/2025 du 19.08.2025 ( PROF ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3752/2024-PROF ATA/880/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 août 2025

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Cédric KURTH, avocat

contre

COMMISSION DE SURVEILLANCE DES PROFESSIONS DE LA SANTÉ ET DES DROITS DES PATIENTS intimée

 



EN FAIT

A. a. A______ exerce à Genève la profession de médecin spécialisé en psychiatrie et psychothérapie.

b. Le 14 mars 2019, B______ (ci-après également : la dénonciatrice) a saisi la commission de surveillance des professions de la santé (ci-après : la commission) des faits suivants concernant A______.

Elle avait trois enfants : C______, né le ______ 2006, D______, née le ______ 2008, et E______, née le ______ 2010. Elle s'était séparée de leur père, F______, le 24 novembre 2018. Une violente altercation avait eu lieu avec son époux le 31 octobre 2018 et une instruction pénale avait été ouverte à la suite de sa plainte. Dans ce contexte, elle lui avait demandé de consulter un spécialiste, ce qu'il avait fait. Elle avait également souhaité que ses enfants, « témoins du comportement violent » de leur père à son encontre, puissent consulter quelqu'un de neutre. Ses enfants avaient entamé un suivi auprès de G______, psychologue, dès mi-décembre 2018, à raison d'une fois par semaine, le mercredi. À réception de la première facture émise au nom de sa fille E______, elle avait constaté que le nom de A______ y figurait. Or, ce même nom figurait également sur une facture en faveur de son époux. Interpellé sur cette question, G______ lui avait répondu que son nom ne figurait pas sur les factures pour des questions d'assurance et il lui avait assuré que A______ ne suivait pas ses enfants.

Lors d'une consultation au cabinet pour ses enfants le 6 mars 2019, elle avait aperçu que G______ était venu chercher son fils accompagné d'un autre médecin et que son époux les attendait. Elle avait compris que ce médecin, qu'elle croisait régulièrement dans les couloirs, n'était autre que le psychiatre de son mari et qu'il s'agissait également du médecin dont le nom figurait sur les factures de ses enfants. Elle avait compris qu'il existait un lien de subordination entre les deux et qu'ils allaient passer outre son consentement. Elle avait pourtant fait part à G______ de la plainte pénale déposée à l'encontre de son époux, information qui figurait donc au dossier auquel A______ avait accès.

Elle avait directement fait part à G______ du fait qu'elle était choquée par un tel comportement et par de telles méthodes. A______, entendant leur conversation, l'avait menacée d'appeler les « services sociaux », et ce devant ses enfants. Elle avait mis fin au suivi thérapeutique effectué par G______ dans la mesure où il était clair que ses enfants avaient été « spoliés » d'un espace neutre dans lequel se confier alors qu'ils se trouvaient dans un contexte difficile. Elle estimait qu'il y avait conflit d'intérêt et que A______ avait commis une violation « éthique et déontologique crasse » dans l'exercice de sa profession.

c. Le 8 avril 2019, le bureau de la commission a ouvert une procédure administrative à l'encontre A______, dont elle a confié l’instruction à la sous-commission 2.

d. Par courrier du 4 juin 2019, A______ et G______ ont produit des observations.

F______ avait initié le suivi de ses enfants, préoccupé du changement dans leur comportement. Inquiets de la situation clinique de l'enfant C______, ils avaient souhaité organiser un réseau en présence des parents. L'enfant souffrait d'un conflit de loyauté avec installation d'une symptomatologie dépressive. Il était terrifié par sa mère, dont il reprenait les discours durant les séances avec G______. Il voyait peu son père et avait confié préférer être chez lui à cause des innombrables cris et punitions subis à la maison. Les enfants étaient par ailleurs soumis à un entraînement drastique allant jusqu'à quatorze activités extrascolaires par semaine.

Avant de « passer la main » aux services de l'Office médico-pédagogique (ci-après : OMP) et d'annoncer la situation au Service de protection des mineurs (ci-après : SPMi), ils avaient souhaité organiser un réseau, lequel avait eu lieu le 27 février 2019 [recte : 6 mars 2019]. Dès le début de l'entretien, B______ s'était montrée réticente et opposante. Il n'y avait pas eu de violation éthique et déontologique, dans la mesure où le père était en droit de connaître la situation des enfants et leur réflexion sur la suite de leur prise en charge, en particulier celle d'C______ qui leur paraissait critique et soulevait des interrogations quant à sa santé mentale. Le suivi thérapeutique d'F______ était par ailleurs terminé au moment du réseau susmentionné.

e. Le 9 novembre 2020, la Commission a demandé des pièces à A______ et G______, dont l'ensemble des factures relatives aux consultations d'F______ et à celles de ses enfants au sein de la Clinique H______(ci-après : la Clinique).

f. Le 5 janvier 2021, ils ont transmis des pièces, ainsi que leurs observations.

Ils ont décrit leur expérience professionnelle. Notamment, A______ avait une expérience pratique de plus de dix ans dans le domaine de la pédopsychiatrie, notamment au sein du Centre hospitalier universitaire du canton de Vaud (ci-après: CHUV), et G______ était, selon arrêté du 11 avril 2016, autorisé à exercer la profession de psychologue à titre dépendant en psychothérapie, en psychologie clinique et en neuropsychologie. Il avait, au travers de sa formation à l'Université de Genève, étudié de manière approfondie la prise en charge de la psychopathologie de l'enfant et de l'adolescent. Après l'obtention de son Master, il avait suivi un stage à l'OMP où il occupait à ce jour la fonction de psychologue à temps partiel.

Ils avaient toujours travaillé en toute transparence avec les deux parents, ainsi qu'en toute impartialité et neutralité. F______ disposant de l'autorité parentale, il était autorisé à demander directement les informations ayant trait au suivi pédopsychiatrique de ses enfants à leurs médecins traitants.

L'état de faits allégué par la dénonciatrice était faux et incomplet. Il semblait qu'elle souhaitait les punir pour être restés neutres dans le conflit familial.

g. Il ressort plus spécifiquement des factures qu'ils ont produites qu'F______ s'est rendu à onze consultations auprès de A______ entre les 29 novembre 2018 et 27 juin 2019. S'agissant des enfants, ce dernier avait facturé neuf consultations qui avaient eu lieu avec C______ entre le 5 décembre 2018 et le 15 mars 2019, huit consultations avaient eu lieu avec D______ entre le 5 décembre 2018 et le 15 mars 2019, et cinq consultations avaient eu lieu avec E______ entre le 26 décembre 2018 et le 15 mars 2019.

h. Après que la commission du secret professionnel a délié A______ du secret professionnel s'agissant d'F______, il a, le 16 décembre 2021, transmis le dossier concernant ce dernier.

Il ressort notamment de ce dossier médical qu'un « entretien familial » s'était tenu le 6 mars 2019 en présence de A______ et G______, d'F______, de B______ et de leurs enfants. Les notes de A______ font en particulier état des éléments suivants : « Explication de la situation, difficulté de la situation Proposition d'un suivi OMP. Faut-il signaler la situation au SPMi ? Pas d'entente claire. Mettons fin au suivi officiellement des enfants ».

i. Par courrier du 14 avril 2022, la commission a imparti un nouveau délai à G______ pour produire les dossiers médicaux des enfants C______, D______ et E______, notes de suite comprises.

j. Le même jour, elle a demandé à A______ pour quelles raisons il n'avait pas tenu de dossier médical pour les enfants alors que son ancien conseil avait indiqué, dans un courrier du 15 avril 2021 adressé à la commission, qu'il existait un lien de subordination entre lui et G______ du fait de sa qualité de psychiatre référent. En cette qualité, il devait remplir personnellement les fonctions médicales relatives au suivi, dont par exemple la pose du diagnostic. Toutes les factures des consultations concernant les enfants avaient d'ailleurs été établies à son nom, en sa qualité de fournisseur de prestations.

k. Le 13 juin 2022, il a répondu qu'il n'existait pas de lien de subordination entre eux. S'il avait été évoqué, il s'agissait du « lien théorique entre un médecin et un psychologue, d'autant plus en l'espèce du fait d'un lien entre le propriétaire de la Clinique et un collaborateur » qu'il avait engagé. Dans la pratique, les psychologues menaient eux-mêmes les thérapies, tout en pouvant bénéficier de la supervision d'un autre psychothérapeute. En l'occurrence, compte tenu de ses « grandes aptitudes professionnelles », G______ avait mené seul ses consultations, sans nécessiter de supervision. Celui-ci avait fait ses retours directement auprès de B______ après chaque séance. A______ n'avait pas posé de diagnostic dans cette situation. Il était uniquement intervenu lorsqu'il avait appris qu'un des enfants présentait des risques suicidaires face au rythme trop lourd des séances imposées par la mère. Il avait décidé de mettre fin au suivi des enfants au sein de sa Clinique et avait préconisé un suivi par l'OMP. Il n'avait ainsi ouvert aucun dossier médical relatif aux enfants C______, D______ ET E______. Le fait que la facturation ait été établie à son nom était conforme au souhait du père qui avait sollicité le suivi. La rémunération avait bien été versée à G______ conformément à leur accord interne au sein de la Clinique.

B. a. En date du 26 janvier 2023, la sous-commission 2 a informé G______ qu'elle avait décidé d'étendre la procédure à son encontre.

b. Dans ses observations du 21 avril 2023, G______ a relevé l'absence de lien de subordination avec A______ dans le cadre de son suivi « tant limité que temporaire » des enfants C______, D______ ET E______ avant l'intervention de I______, psychologue spécialisée, récemment engagée par la Clinique, et à qui avaient été confiés ces dossiers. Il n'y avait ainsi pas eu de « supervision » ni de « diagnostic » posés durant cette phase provisoire. Il n'y avait pas eu d'intervention de psychiatre référent auprès de lui, dès lors que son suivi n'était que transitoire, en remplacement temporaire de la psychologue spécialisée, qui était absente.

Il avait en l'occurrence agi en tant qu'employé de la Clinique et n'avait reçu aucune instruction de A______, son employeur. Celui-ci n'avait exigé aucune information ni compte rendu et lui avait accordé toute sa confiance pour assurer l'intérim.

Les entretiens avec les enfants consistaient prioritairement à s'assurer qu'il n'y avait pas de situation d'urgence, tout en rassurant la mère légitimement inquiète. Ainsi, il n'y avait eu aucune psychothérapie entreprise autre que du soutien lors de cette phase difficile, en accord avec les parents, en vue de l'arrivée prochaine de la spécialiste. Constatant que l'un des enfants présentait des idéations suicidaires, il avait conclu que la situation dépassait ses compétences et ne pouvait plus attendre l'arrivée de la psychothérapeute en charge. Il en avait dès lors parlé à A______ au mois de février 2019 et avait préconisé une prise en charge extérieure à la Clinique, auprès de l'OMP.

Il n'avait commis aucune violation de la loi et avait toujours agi au plus près de sa conscience professionnelle, dans le strict intérêt des enfants, cela sans aucune intervention ou directive directe ou indirecte de leur père.

Il avait maintenu une posture professionnelle neutre et impartiale, en particulier s'agissant du contenu de la plainte pénale de B______ faisant état de violences physiques à son encontre par son mari, ce qui avait manifestement déplu à cette dernière. Il lui importait que les échanges restent focalisés sur l'état de santé et les besoins des enfants, d'autant plus dans le contexte présenté. Son attitude avait pu être interprétée, à tort, comme relevant d'un parti pris en faveur du père, alors qu'il ne s'agissait que d'une posture professionnelle visant à extraire les enfants du conflit parental.

c. Relancé par courriers des 27 avril et 27 juillet 2023 pour produire les dossiers médicaux des enfants C______, D______ ET E______, G______ a indiqué qu'il entendait pleinement collaborer à l'instruction mais qu'il ne détenait aucun des dossiers médicaux requis, n'ayant concrètement pas pris en charge la situation des enfants.

d. Le 2 octobre 2023, la sous-commission 2 a clos l'instruction.

e. Par décision du 8 octobre 2024, la commission a prononcé une amende de CHF 5'000.- à l’encontre de A______.

D'une manière générale, il n'existait pas de contre-indication à ce qu'un psychiatre suive plusieurs membres d'une même famille ou qu'il délègue le suivi pour certains des membres de la famille à un psychologue. En cas de psychothérapie déléguée par un psychiatre, il n'existait pas de règles formelles encadrant une telle pratique. Suivant les circonstances, il était conforme aux règles de l'art qu'une délégation ne soit pas accompagnée d'une supervision régulière par le psychiatre. Dans un tel cas, celui-ci devait néanmoins être au courant de la situation déléguée et la bonne pratique recommandait d'avoir vu, au moins une fois, le patient en consultation pour définir le besoin de psychothérapie, et, ainsi, poser l'indication à celle-ci et la déléguer.

L'instruction avait permis d'établir qu'F______ avait été suivi par A______ entre les 29 novembre 2018 et 27 juin 2019 et que pendant une période qui s'était chevauchée avec celle-ci, les enfants C______, D______ ET E______ avaient été suivis par G______. Même si les professionnels de la santé mis en cause le contestaient, force était de constater que G______ avait travaillé sur délégation de A______ pour le suivi des enfants C______, D______ ET E______. G______ étant autorisé à exercer la profession de psychologue à titre dépendant, il ne pouvait en effet travailler que sur délégation d'un psychiatre. Les factures avaient d'ailleurs été émises au nom de A______ et celui-ci avait pris les choses en main au moment critique où l'un des enfants présentait un risque suicidaire.

Il apparaissait ainsi que les recommandations précitées sur la délégation n'avaient pas été respectées et que le psychologue avait exercé de manière indépendante alors qu'il n'était pas autorisé à le faire, ce qui relevait de la responsabilité de A______ en tant que psychiatre délégant. Dans ces conditions, il avait violé son devoir de diligence.

Par ailleurs, les enfants étant âgés respectivement de 8, 10 et 12 ans au moment de leur prise en charge thérapeutique, ils étaient incapables de discernement. Il revenait ainsi aux professionnels de la santé mis en cause, dont A______, d'informer les deux parents sur les conditions de prise en charge de leurs enfants et de recueillir leurs consentements, compte tenu du contexte familial conflictuel. Or, l'instruction avait permis d'établir que A______ avait manqué de transparence envers B______ sur les conditions du suivi thérapeutique de ses enfants, et qu'un véritable échange entre eux n'avait eu lieu que lors de la consultation du 6 mars 2019, durant laquelle il avait été mis fin au suivi thérapeutique.

Le consentement de B______ au suivi thérapeutique délégué de ses enfants n'avait pas été recueilli valablement, et A______ avait dès lors violé son devoir d'information à cet égard. Les erreurs commises par le psychiatre dans le cade de la psychothérapie déléguée étaient graves, ce d'autant plus que celle-ci était intervenue dans un contexte familial particulièrement tendu. Une amende fixée à CHF 5'000.- était une sanction appropriée.

C. a. Par acte remis à la poste le 11 novembre 2024, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation.

Il n'avait manifestement pas été « entendu » par la commission. Il lui avait pourtant expliqué que G______ n'avait en réalité pas travaillé sur sa délégation pour le suivi des enfants C______, D______ ET E______.

Aucun des deux praticiens n'avait violé son devoir de diligence. La transparence avec les parents avait été établie le mieux possible dans un contexte particulièrement tendu qui avait nécessité également la prise en charge par le SPMi. Vu la situation extrême que présentait l'un des enfants, ils avaient dû immédiatement prévenir les professionnels compétents pour prendre en charge cette situation. Les enfants n'avaient jamais été mis en danger, bien au contraire. Ils avaient été confiés à l'OMP, en urgence.

L'absence de capacité de discernement des enfants, arbitrairement retenue en fonction de leur âge, était contestée. Le rapport de l'OMP dont l'apport était demandé serait éloquent à ce propos. Le montant de l'amende était au surplus arbitrairement retenu, exorbitant et non motivé, en l'absence de tout préjudice et de toute conséquence dommageable.

b. Le 19 décembre 2024, la commission a conclu au rejet du recours.

c. Le 14 mars 2025, le recourant a persisté dans ses conclusions.

Le dossier de l'autorité intimée montrait qu'elle n'avait – arbitrairement – pas retenu que les professionnels concernés avaient intelligemment décidé et annoncé ne pas pouvoir assurer une prise en charge des enfants de la dénonciatrice, recommandant, dans la situation d'urgence et l'intérêt des enfants, un suivi nécessaire auprès de l'OMP.

La commission se référait à une « bonne pratique qui recommande que le psychiatre ait vu au moins une fois le patient en consultation pour définir le besoin de psychothérapie ». Elle errait, dès lors qu'une recommandation n'impliquait pas un caractère obligatoire ou contraignant. Elle laissait toute latitude professionnelle au spécialiste, le laissant agir le plus efficacement en fonction des intérêts de son patient et des circonstances. C'était précisément ce qu'il avait fait. La « bonne pratique » alléguée par la commission ne définissait par ailleurs pas à quel moment le psychiatre devait avoir vu au moins une fois le patient dont il assurait le suivi. Or il n'avait pas pris en charge ce suivi, il s'était uniquement agi d'une intervention d'urgence, dont la dénonciatrice avait été informée. Si la situation n'avait pas pu être confiée à l'OMP, rien ne permettait de prédire qu'il n'aurait pas fixé une consultation avec le patient « au moins une fois ». Dans ce cas, il n'aurait pas manqué d'informer la dénonciatrice s'agissant de la prise en charge concrète qu'il proposait d'entreprendre en recueillant son consentement.

Enfin, en l'absence de suivi mis en place par délégation, dans le cadre d'une situation non déléguée relevant de l'intervention urgente et bienveillante, le recourant n'avait pas d' « obligation » de « bonne tenue du dossier médical ».

Il semblait invraisemblable que la commission s'emploie à inquiéter durant des années un professionnel de la santé qui n'avait rien fait d'autre que de préconiser, six ans auparavant, ce qu'il y avait de mieux pour sauver les enfants, soit un suivi par l'OMP, en l'absence de tout tort créé aux enfants.

Ce qui avait été annoncé au cours de l'entretien de réseau du 27 février 2019 [recte : 6 mars 2019] par les deux professionnels de la santé avait manifestement déplu à la dénonciatrice, mise en cause par ses enfants. La relation conflictuelle entre les parents avait évidemment alourdi la problématique, la dénonciatrice ne supportant pas que des réflexions urgentes aient été partagées avec le père des enfants, titulaire de la garde partagée. La commission se montrait partiale, retenant une crédibilité absolue en faveur de la dénonciatrice, alors que ses propos n'étaient pas conformes à la réalité. Finalement, il apparaissait que le suivi par l'OMP avait bien été nécessaire, mais grandement compliqué par le comportement de la dénonciatrice.

d. Il sera revenu en tant que de besoin dans la partie en droit sur les arguments et pièces produits par les parties.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le recourant sollicite son audition afin de pouvoir s'expliquer de « vive voix sur la réalité du cas d'espèce, décrite par écrit à la commission et manifestement non entendue ». Il sollicite également la production du rapport d'évaluation de l'OMP en charge de cette situation afin de démontrer que les enfants étaient capables de discernement au moment des faits et qu'il avait réagi professionnellement en confiant le dossier à cet office.

2.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes et d’obtenir qu’il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s’étend qu’aux éléments pertinents pour l’issue du litige et n’empêche pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). La procédure administrative est en principe écrite (art. 18 LPA) et le droit d’être entendu n’implique pas le droit à l’audition orale ni à celle de témoins (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1).

2.2 En l’espèce, le recourant s’est vu offrir l’occasion d’exposer par écrit son argumentation et de faire valoir toute pièce utile à plusieurs reprises devant la commission puis la chambre de céans. Comme cela sera développé ci-après, toutes deux ont bien compris que le recourant considère que G______ n'avait pas travaillé sur sa délégation pour le suivi des enfants C______, D______ ET E______, de sorte que son audition orale n'apporterait rien de plus. Quant au dossier de l'OMP, qui concerne le suivi thérapeutique des enfants, il n'est d'aucune utilité pour juger des manquements professionnels reprochés au recourant.

La chambre de céans considère que le dossier est complet et est en état d’être jugé sans qu’il soit nécessaire de procéder aux actes d’instruction sollicités par le recourant.

3.             Le litige porte sur la conformité au droit de la décision par laquelle la commission a infligé au recourant une amende de CHF 5'000.-.

3.1 Selon l’art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (al. 1 let. a) et pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), hypothèse non réalisée en l’espèce.

3.2 Toute personne qui n'est pas privée de la faculté d'agir raisonnablement en raison de son jeune âge, de déficience mentale, de troubles psychiques, d'ivresse ou d'autres causes semblables est capable de discernement (art. 16 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 - CC - RS 210).

La capacité de discernement est relative : elle ne doit pas être appréciée dans l'abstrait, mais concrètement, par rapport à un acte déterminé, en fonction de sa nature et de son importance, les facultés requises devant exister au moment de l'acte. Le CC ne fixe pas un âge déterminé à partir duquel un mineur est censé être raisonnable. Il faut apprécier dans chaque cas si l'enfant avait un âge suffisant pour que l'on puisse admettre que sa faculté d'agir raisonnablement n'était pas altérée par rapport à l'acte considéré (ATF 134 II 235 consid. 4.3.2 et les références citées).

La capacité de discernement doit en principe être présumée, sur la base de l'expérience générale de la vie (ATF 124 III 5 consid. 1b). Toutefois, plus un mineur est jeune et plus la présomption s'affaiblit en fait, jusqu'à disparaître (ATF 90 II 9 consid. 3). On peut présumer qu'un petit enfant n'a pas la capacité de discernement nécessaire pour choisir un traitement médical, alors que la capacité de discernement pourra être présumée pour un jeune proche de l'âge adulte. Dans la tranche d'âge intermédiaire, l'expérience générale de la vie ne permet cependant pas d'admettre cette présomption, car la capacité de discernement de l'enfant dépend de son degré de développement. ll appartient alors à celui qui entend se prévaloir de la capacité ou de l'incapacité de discernement de la prouver, conformément à l'art. 8 CC (ATF 134 II 235 consid. 4.3.3 et les références citées).

La faculté de consentir à un traitement médical fait partie des droits strictement personnels, de sorte qu’un patient mineur peut consentir seul à un traitement médical qui lui est proposé lorsqu'il est capable de discernement (ATF 114 Ia 350 consid. 7a).

3.3 Les père et mère sont, dans les limites de leur autorité parentale, les représentants légaux de leurs enfants à l'égard des tiers (art. 304 al. 1 CC). Lorsque les père et mère sont tous deux détenteurs de l'autorité parentale, les tiers de bonne foi peuvent présumer que chaque parent agit avec le consentement de l'autre (art. 304 al. 2 CC).

En cas de mésentente patente entre les parents, par exemple lorsqu'ils sont en procédure de divorce, la présomption de l'art. 304 al. 2 CC ne s'applique pas et le médecin est tenu de recueillir le consentement éclairé des deux parents de l'enfant incapable de discernement incapable de discernement (Philippe DUCOR, Le médecin, l'enfant et ses parents, in La Lettre de l'AMG 2015, vol. janvier-février, n° 1 p. 7).

3.4 Le 1er septembre 2007 est entrée en vigueur la loi fédérale sur les professions médicales universitaires du 23 juin 2006 (LPMéd - RS 811.11). Certains des articles de cette loi ont fait l’objet d’une modification entrée en vigueur le 1er janvier 2018, le 1er février 2020, ainsi que le 1er janvier 2022. Toutefois, ces modifications n’ont pas d’effet sur l’objet du présent litige, si bien que c’est la LPMéd dans sa teneur la plus récente qui sera exposée ci-dessous.

3.5 La LPMéd, dans le but de promouvoir la santé publique, encourage notamment la qualité de l’exercice des professions dans les domaines de la médecine humaine (art. 1 al. 1 LPMéd). Elle établit les règles régissant l’exercice des professions médicales universitaires sous propre responsabilité professionnelle (al. 3 let. e), à l’instar des médecins (art. 2 al. 1 let. a LPMed).

3.6 Lorsqu’un médecin agit comme indépendant et que son activité répond à la notion qui en est donnée à l’art. 1 al. 3 let. e LPMéd, la loi sur les professions médicales lui est applicable et, au regard de la primauté du droit fédéral, il ne peut être soumis qu’aux mesures disciplinaires prévues par cette loi, à l’exclusion d’éventuelles sanctions prévues par le droit cantonal (ATF 143 I 352 consid. 3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_747/2022 du 14 février 2023 consid. 6.2).

Les devoirs ou obligations professionnels sont des normes de comportement devant être suivies par toutes les personnes exerçant une même profession. En précisant les devoirs professionnels dans la LPMéd, le législateur poursuit un but d’intérêt public. Il ne s’agit pas seulement de fixer les règles régissant la relation individuelle entre patients et soignants, mais aussi les règles de comportement que le professionnel doit respecter en relation avec la communauté. Suivant cette conception d’intérêt public, le respect des devoirs professionnels fait l’objet d’une surveillance de la part des autorités cantonales compétentes et une violation des devoirs professionnels peut entraîner des mesures disciplinaires (ATA/1317/2024 du 12 novembre 2024 consid. 2.3.3 et les références citées ; ATA/987/2022 du 4 octobre 2022 consid. 5b).

L'art. 40 LPMéd prévoit que les personnes exerçant une profession médicale universitaire à titre d'activité économique privée sous leur propre responsabilité professionnelle doivent notamment observer les devoirs professionnels suivants : exercer leur activité avec soin et conscience professionnelle et respecter les limites des compétences qu'elles ont acquises dans le cadre de leur formation universitaire, de leur formation postgrade et de leur formation continue (let. a) ; garantir les droits du patient (let. c) ; observer le secret professionnel conformément aux dispositions applicables (let. f). L’art. 40 let. a LPMéd constitue une clause générale (FF 2005 p. 211).

3.7 Au niveau cantonal, les devoirs professionnels prévus à l’art. 40 LPMéd s’appliquent à tous les professionnels de la santé – parmi lesquels les médecins –, sauf disposition contraire de la LS (art. 71 et 77 LS ; art. 1 let. a du règlement sur les professions de la santé du 22 août 2006 - RPS - K 3 02.01).

Le patient a le droit d’être informé de manière claire et appropriée sur les traitements et interventions possibles, leurs bienfaits et leurs risques éventuels (art. 45 al. 1 let. b LS).

3.8 Au titre des mesures disciplinaires, l’art. 43 al. 1 LPMéd dispose qu’en cas de violation des devoirs professionnels, des dispositions de la loi ou de ses dispositions d’exécution, l’autorité de surveillance peut prononcer un avertissement (let. a) ; un blâme (let. b) ; une amende de CHF 20'000.- au plus (let. c) ; une interdiction de pratiquer sous propre responsabilité professionnelle pendant six ans au plus (interdiction temporaire ; let. d) ; une interdiction définitive de pratiquer sous propre responsabilité professionnelle pour tout ou partie du champ d’activité (let. e).

3.9 Jusqu'au 1er juillet 2022, soit durant la période de la prise en charge litigieuse des enfants (qui a eu lieu entre décembre 2018 et juin 2019), la psychothérapie pouvait se pratiquer de manière déléguée à un psychothérapeute non médecin (https://www.bag.admin.ch/fr/nouvelle-reglementation-de-la-psychotherapie-pratiquee-par-des-psychologues-a-partir-du-1er-juillet-2022).

Dans un arrêt 9C_570/2015 du 6 juin 2016, reprenant sa jurisprudence, le Tribunal fédéral a rappelé qu'une psychothérapie déléguée n’était susceptible d’être prise en charge par l’assurance obligatoire des soins que si l’exécution du traitement psychothérapeutique avait lieu dans le cabinet du médecin et sous la surveillance et la responsabilité de celui-ci. Le médecin devait exécuter personnellement tous les actes strictement médicaux nécessités par la psychothérapie, soit en particulier le diagnostic, le choix et les modifications de la thérapie proprement dite ou la prescription de médicaments. Le médecin ne pouvait donc déléguer au thérapeute que l’exécution du traitement psychologique qu’il avait lui-même déterminé. Le thérapeute devait travailler sous la direction et la responsabilité du médecin, qui devait l’instruire et le surveiller correctement. Tout au long de la thérapie, le médecin devait conserver un contact personnel suffisamment intense avec le patient et pouvoir, si nécessaire, intervenir immédiatement ou revenir sur les mesures ordonnées (consid. 7.1).

La Fédération suisse des médecins psychiatres-psychothérapeutes (ci-après : FMPP) a émis des recommandations en janvier 2016 sur l’implication du médecin-délégant. Les conditions légales et recommandations qui nous occupent dans le présent cas sont les suivantes :

-          le médecin-délégant est responsable du traitement ;

-          il doit remplir personnellement les fonctions médicales proprement dites, à savoir poser le diagnostic, définir et adapter le traitement, et prescrire la médicamentation ;

-          le médecin doit rencontrer le patient au moins une fois au cours du traitement, généralement au début de celui-ci ;

-          le médecin doit régler par écrit les modalités de la délégation dans le contrat de travail qui le lie au psychothérapeute-délégué, qui doit notamment définir : le rythme et les modalités habituelles du contrôle ; le lieu du traitement, qui doit être impérativement celui du cabinet du médecin-délégant ; la délégation doit être adaptée et définie de cas en cas pour chaque patient ;

-          le médecin doit envoyer les factures sur son papier à en-tête en appliquant le tarif applicable.

3.10 Les mesures disciplinaires infligées à un membre d’une profession libérale soumise à la surveillance de l’État ont principalement pour but de maintenir l’ordre dans la profession, d’en assurer le fonctionnement correct, d’en sauvegarder le bon renom et la confiance que leur témoignent les citoyens, ainsi que de protéger le public contre ceux de ses représentants qui pourraient manquer des qualités nécessaires. Les mesures disciplinaires ne visent pas, au premier plan, à punir le destinataire, mais à l’amener à adopter un comportement conforme aux exigences de la profession et à rétablir le fonctionnement correct de celle-ci (ATF 143 I 352 consid. 3.3). Le prononcé d’une sanction disciplinaire tend uniquement à la sauvegarde de l’intérêt public (arrêt du Tribunal fédéral 2C_451/2020 du 9 juin 2021 consid. 12.1).

La responsabilité disciplinaire est une responsabilité fondée sur la faute (ATF 148 I 1 consid. 12.2 et l’arrêt cité). Cette faute peut être commise sans intention, par négligence, par inconscience et donc également par simple méconnaissance d’une règle. S’agissant de son intensité minimale, la jurisprudence énonce de manière constante que seuls des manquements significatifs aux devoirs de la profession justifient la mise en œuvre du droit disciplinaire (ATF 144 II 473 consid. 4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_832/2017 du 17 septembre 2018 consid. 2.2 ; 2C_280/2017 du 4 décembre 2017 consid. 4.1.1). Cette règle ne saurait toutefois être comprise en ce sens que l’acte concerné doit revêtir une gravité qualifiée pour relever du droit disciplinaire. Certes, la mise en œuvre de ce droit ne saurait se justifier pour des manquements très légers et non réitérés aux obligations professionnelles. Cependant, le fait que la grille des sanctions possibles débute par un simple avertissement autorise déjà l’autorité de surveillance à y recourir pour des manquements de moindre importance, puisqu’il s’agit de rendre le professionnel attentif aux conséquences potentielles d’un comportement. Le droit disciplinaire vise ainsi à éviter la réalisation future de tels actes, avec les conséquences que ceux‑ci peuvent entraîner (ATF 148 I 1 consid. 12.2).

3.11 Le principe de la proportionnalité, garanti par l’art. 5 al. 2 Cst., se compose des règles d’aptitude, qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé, de nécessité, qui impose qu’entre plusieurs moyens adaptés, l’on choisisse celui qui porte l’atteinte la moins grave aux intérêts privés, et de proportionnalité au sens étroit, qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l’administré et le résultat escompté du point de vue de l’intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1P. 269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/1317/2024 précité consid. 2.4.4).

Conformément au principe de proportionnalité applicable en matière de sanction disciplinaire, le choix de la nature et de la quotité de la sanction doit être approprié au genre et à la gravité de la violation des devoirs professionnels et ne pas aller au‑delà de ce qui est nécessaire pour assurer les buts d’intérêt public recherchés. À cet égard, l’autorité doit tenir compte en premier lieu d’éléments objectifs, à savoir des conséquences que la faute a entraînées sur le bon fonctionnement de la profession en cause, et de facteurs subjectifs, tels que la gravité de la faute, ainsi que les mobiles et les antécédents de l’intéressé (arrêt du Tribunal fédéral 2C_922/2018 précité consid. 6.2.2 et les références citées).

3.12 À l'instar de ce qui prévaut dans la LPMéd, les autorités compétentes disposent d'un large pouvoir d'appréciation dans la fixation d'une sanction disciplinaire prévue par la loi sur la commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients du 7 avril 2006 (LComPS - K 3 03 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_539/2020 du 28 décembre 2020 consid. 5.1 ; ATA/1317/2024 précité consid. 2.4.5).

Compte tenu du fait que la commission de surveillance est composée de spécialistes, mieux à même d'apprécier les questions d'ordre technique, la chambre de céans s'impose une certaine retenue (ATA/1317/2024 précité consid. 2.4.6 ; ATA/8/2018 du 9 janvier 2018 consid. 4c ; ATA/238/2017 du 28 février 2017).

3.13 Saisie du cas où un médecin psychiatre avait remis un certificat médical à la mère d'un enfant avec l’intitulé « à qui de droit », la chambre de céans a considéré que le médecin, qui ne pouvait de bonne foi retenir que la demande de la mère emportait consentement du père, également détenteur de l’autorité parentale conjointe, à l’établissement d'un certificat destiné à être produit dans un litige opposant les deux parents, avait violé son secret professionnel. Il était très douteux que l’enfant – alors âgée de presque 10 ans – avait été capable de discernement pour délier son médecin du secret professionnel mais même à l’admettre, un éventuel consentement portait sur une simple demande d’audition, et non sur une dénonciation pour maltraitance psychologique. Le médecin n’avait eu que peu de contacts avec le père. Il avait violé son devoir de diligence due à l’enfant et à ses parents, détenteurs de l’autorité parentale, en procédant au signalement (ATA/839/2018 du 21 août 2018 consid. 9 à 12).

Dans un arrêt plus récent, où il était reproché à un médecin psychiatre d’avoir poursuivi le suivi thérapeutique des enfants après que leur père s’y fut opposé, la chambre de céans a jugé que les enfants, âgés de 10 et 12 ans, ne disposaient pas de la capacité de discernement. Elle a également confirmé le reproche d’avoir établi un certificat médical sans avoir été préalablement délié du secret médical par les deux parents, et d’avoir ainsi violé son secret professionnel. Enfin, il lui était reproché une tenue incorrecte du dossier médical, lequel ne comportait aucune analyse médicale de la situation ni aucune documentation de celle-ci (ATA/1317/2024 précité consid. 3).

4.             En l'espèce, la commission a retenu deux griefs à l'encontre du recourant.

4.1 Elle lui reproche d’avoir violé son devoir de diligence en sa qualité de psychiatre délégant. Il avait laissé G______ exercer de manière indépendante dans la prise en charge des enfants C______, D______ ET E______ alors qu'il n'était pas autorisé à le faire et qu'il était de sa responsabilité de s'occuper de sa supervision.

Le recourant conteste que G______ aurait agi sur sa délégation.

Il ne saurait être suivi. À l'instar de l'autorité intimée, il convient de constater que G______ était, selon arrêté du 11 avril 2016, autorisé à exercer la profession de psychologue à titre dépendant, de sorte qu'il ne pouvait travailler à l'époque des faits que sur délégation d'un psychiatre. Or il travaillait dans le même cabinet que le recourant et les factures pour les consultations des enfants C______, D______ ET E______ avaient été émises au nom de A______. Ce dernier ne conteste par ailleurs pas être intervenu au moment critique où l'un des enfants présentait un risque suicidaire en prenant la décision de remettre le cas en mains de l'OMP et d'assister à un « réseau » en présence de toute la famille et du psychologue.

Le recourant ne conteste pas non plus les indications de la commission selon lesquelles en cas de psychothérapie déléguée par un psychiatre, la bonne pratique recommandait d'avoir vu, au moins une fois, le patient en consultation pour définir le besoin de psychothérapie, et, ainsi, poser l'indication à celle-ci et la déléguer. Cela ressort d'ailleurs expressément des recommandations de la FMPP de janvier 2016 citées ci-dessus. Le recourant a reconnu également que les psychologues menaient eux‑mêmes les thérapies, tout en pouvant bénéficier de la supervision d'un autre psychothérapeute, et qu'il avait facturé les traitements en cause à l'assurance obligatoire des soins. Il objecte toutefois qu'il s'agit d'une recommandation et non d'une « obligation ». Il n'en demeure pas moins qu'il s'agit de règles de l'art que les professionnels de la santé doivent respecter au risque de violer leur devoir de diligence et de ne pouvoir facturer leurs prestations à la charge de l’assurance obligatoire des soins.

Son argumentation selon laquelle G______ avait mené seul ses consultations, sans nécessiter de supervision, compte tenu de ses « grandes aptitudes professionnelles », ne lui est d'aucun secours. De même, il reconnaît que le psychiatre devait au moins une fois voir le patient dont il assurait le suivi et que s'il ne s'était pas agi d'une simple intervention d'urgence, il aurait peut‑être fixé une consultation avec le patient au moins une fois. Or contrairement à ce qu'il soutient, la prise en charge par G______ des enfants C______, D______ ET E______ n'a clairement pas consisté en une seule intervention d'urgence, puisqu'à l'examen des factures produites, on constate qu'il a eu plusieurs consultations avec les enfants, et ce durant plusieurs mois. Selon les recommandations susvisées, le recourant a violé son obligation de rencontrer les enfants au moins une fois au cours du traitement, généralement au début de celui-ci, et de n'avoir pas eu un contact personnel suffisamment intense avec eux.

Il convient donc de retenir que le recourant n'a pas instruit et surveillé correctement G______ dans le cadre de la psychothérapie déléguée que ce dernier avait menée seul auprès des enfants C______, D______ ET E______.

Le grief sera écarté.

4.2 La commission reproche également au recourant de ne pas avoir informé les parents B______ et F______ des conditions de prise en charge de leurs enfants, compte tenu du contexte familial conflictuel. Le consentement de B______ au suivi thérapeutique délégué de ses enfants n'avait pas été recueilli valablement et A______ avait dès lors violé son devoir d'information à cet égard.

Le recourant objecte que les enfants avaient la capacité de discernement. Or il ne peut être suivi sur ce point. La commission a relevé à juste titre que les enfants lui avaient été amenés par leur mère dans un contexte familial hautement conflictuel, de sorte qu’il aurait dû faire preuve d’une grande prudence compte tenu de l’âge des enfants et ne pouvait partir du principe que ceux-ci étaient capables de discernement quant au choix du thérapeute. Les enfants étant âgés de respectivement 8, 10 et 12 ans au moment de leur prise en charge thérapeutique, c'est à tort qu'il estime que l'on pouvait présumer de leur capacité de discernement pour décider de suivre une thérapie et de choisir leur thérapeute.

Il revenait ainsi aux professionnels de la santé mis en cause, dont A______, d'obtenir le consentement des deux parents. Or, il ressort clairement de l'instruction du dossier que le recourant a manqué de transparence envers B______ sur les conditions du suivi thérapeutique de ses enfants, et qu'un véritable échange entre eux n'a eu lieu que lors de la consultation du 6 mars 2019, durant laquelle elle a mis fin au suivi thérapeutique. C'est ainsi de manière contraire à la réalité qu'il a indiqué dans ses écritures à la commission qu'il avait toujours travaillé en toute transparence avec les deux parents.

Ceci est d'autant plus vrai qu'F______ a été suivi par A______ entre les 29 novembre 2018 et 27 juin 2019, soit une période qui s'est chevauchée avec celle où les enfants C______, D______ ET E______ ont été suivis par G______. Ceci est encore confirmé par ses explications selon lesquelles il avait établi la facturation à son nom conformément au souhait du père et qu'il était autorisé à lui demander directement les informations ayant trait au suivi pédopsychiatrique de ses enfants.

Les manquements reprochés dans la décision querellée étant fondés, le prononcé d'une mesure disciplinaire est justifié dans son principe.

5.             Le recourant conteste le montant de l'amende.

La décision querellée relève à cet égard que les erreurs commises par le recourant dans le cadre de la psychothérapie déléguée sont graves, ce d'autant plus que celle-ci était intervenue dans un contexte familial particulièrement tendu.

L’autorité intimée a prononcé une amende après avoir retenu deux violations des devoirs professionnels du recourant dans le cadre de la prise en charge des enfants C______, D______ ET E______, à savoir de n'avoir pas tenu de dossier médical et de n'avoir pas recueilli valablement le consentement de leur mère sur les conditions de leur prise en charge. Il s'agit de violations d'autant plus graves en raison du contexte familial particulièrement tendu. Cette appréciation ne prête pas le flanc à la critique. En effet, les fautes commises doivent être qualifiées de graves, compte tenu également du fait que A______ était simultanément le psychiatre des enfants C______, D______ ET E______. B______ avait pourtant à cet égard expressément fait part à G______ de la plainte pénale déposée à l'encontre d'F______.

L'autorité intimée n'a ainsi pas abusé de son pouvoir d'appréciation en infligeant une amende de CHF 5'000.-. Il s'agit d'une sanction apte à sauvegarder l’intérêt des patients et à faire prendre conscience au recourant de la gravité de ses manquements et à adapter son comportement à ce qui est attendu de lui, étant encore relevé que le montant de l'amende se situe au bas de la fourchette. Le fait qu'il n'y aurait en l'espèce pas eu de conséquence dommageable en raison des manquements reprochés, comme le fait valoir le recourant, toutefois sans le démontrer, serait pour le surplus sans incidence sur le caractère proportionné de la sanction.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

6.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA), qui ne peut se voir allouer une indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

La chambre de céans laisse le soin à l’autorité intimée de transmettre le présent arrêt à B______ ou à F______ en leur qualité de représentants légaux des patients du recourant, si elle l’estime nécessaire.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 novembre 2024 par A______ contre la décision de la commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients du 8 octobre 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de A______ contre un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Cédric KURTH, avocat du recourant, à la commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients, ainsi qu'au département fédéral de l’intérieur.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Michèle PERNET, juges.

 

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :