Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/435/2025 du 15.04.2025 sur JTAPI/630/2024 ( ICC ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/3599/2023-ICC ATA/435/2025 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 15 avril 2025 4ème section |
| ||
dans la cause
A______ recourant
contre
ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE intimée
_________
Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 juin 2024 (JTAPI/630/2024)
A. a. A______ est domicilié à Genève.
b. Il détient notamment des comptes auprès de la banque B______ (ci‑après : B______) à Moscou. Celle-ci fait l'objet, depuis le 2 mars 2023, de mesures en lien avec la situation en Ukraine.
c. En mars 2022, la Suisse a exclu la Russie du réseau international de communication « Swift ». L'exclusion visait sept banques, dont B______ ne faisait, à ce moment-là, pas partie.
B. a. Dans sa déclaration fiscale 2022, A______ a mentionné des avoirs détenus auprès de B______, sans indiquer de valeur imposable ni de rendement.
Dans une lettre annexée à sa déclaration, il a expliqué qu’il n’avait pas perdu la propriété de ces fonds, mais ne pouvait pas en disposer librement en raison des mesures de blocage prises à l’encontre de B______ par le secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO).
Il a déclaré un revenu brut de CHF 475'187.- (dont CHF 29'868.- de revenu brut mobilier) et une fortune brute de CHF 5'520'315.-.
b. Donnant suite à plusieurs demandes de renseignements de l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE), A______ a expliqué que B______ n’émettait pas de relevé fiscal mais un simple état de ses comptes à la date de clôture de chaque exercice fiscal.
Il a produit un document établi par la banque, rédigé en russe, et a exposé qu’au 31 décembre 2022, il détenait auprès de B______ des avoirs s’élevant à RUB 82'327'356.-, ce qui équivalait à CHF 1'032'097.95. En outre, il avait perçu, en 2022, des revenus se montant à RUB 2'168'539.- (CHF 27'484.-).
c. Le 18 août 2023, l’AFC-GE a taxé A______ pour l’année 2022 (impôt cantonal et communal [ci-après : ICC] et impôt fédéral direct [ci-après : IFD]), en ajoutant à sa fortune et à son revenu les avoirs et leurs revenus qu’il détenait auprès de B______.
Ainsi, pour l'ICC, elle a retenu un revenu brut de CHF 502'786.- (dont CHF 57'352.- de revenu mobilier) et une fortune brute de CHF 6'552'413.-.
C. a. Le contribuable a formé réclamation contre les bordereaux d'impôt ICC et IFD de 2022.
Depuis juin 2022, sa banque, C______, « aurait » refusé l’arrivée et le crédit de fonds en provenance de B______, ce que D______du C______ avait confirmé. Il ne pouvait dès lors plus disposer librement de ses avoirs. Leur valeur vénale était ainsi nulle.
b. L’AFC-GE a rejeté la réclamation le 24 octobre 2023, tant pour l'ICC que pour l'IFD de 2022.
Les créances envers des tiers devaient figurer dans la fortune mobilière du contribuable. C'était donc à juste titre que le fisc maintenait les montants de CHF 1'032'098.- et CHF 27'484.- représentant respectivement le solde et le revenu au 31 décembre 2022 de sa créance envers B______.
D. a. Le contribuable a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) à l’encontre de la décision sur réclamation en tant qu'elle concernait l'ICC, en demandant d’être taxé conformément à sa déclaration fiscale.
b. L’AFC-GE a conclu au rejet du recours.
c. Après de nouveaux échanges d'écritures, le TAPI a rejeté le recours par jugement du 24 juin 2024.
E. a. Par acte remis à la poste le 1er juillet 2024, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, demandant à ce que la valeur de ses comptes soit portée à zéro et exposant ne pas être opposé à être entendu.
Le TAPI aurait dû déposer une requête auprès du C______ afin de confirmer ses propos et avait sélectionné les faits et la jurisprudence qu'il avait exposés. Rien n'était dit sur les principes applicables à la valeur vénale. Les faits n'étaient pas correctement exprimés. La problématique n'avait pas été objectivement analysée.
La valeur marchande des actifs dont il ne pouvait plus disposer devait être définie en équité. Il était exact que B______ n'avait été intégrée à la liste des entités sanctionnées que le 2 mars 2023. En mars 2023, au moment de remplir sa déclaration fiscale, il avait su que sa banque était incluse dans la liste des sanctions, si bien qu'au 31 décembre 2022, il existait déjà un risque. Au moment de sa déclaration, ce risque s'était réalisé.
b. L'AFC-GE a conclu au rejet du recours.
c. Dans sa réplique, le recourant a persisté dans son argumentation.
d. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 2 let. e de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 7 al. 2 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17), étant précisé que bien que le recourant n'ait pas pris de conclusions formelles en annulation du jugement querellé, on comprend qu'il demande son annulation, dans la mesure où il a indiqué, d'une part, former un recours « en opposition et réclamation contre le prononcé de jugement » et, d'autre part, qu'il convenait de porter la valeur de ses comptes à zéro (ATA/300/2025 du 25 mars 2025 consid. 2).
2. Le litige porte sur la conformité au droit des décisions de taxation de l'AFC-GE pour l'ICC 2022.
3. Le recourant demande implicitement son audition.
3.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 138 III 374 consid. 4.3.2). En outre, le droit d'être entendu n'implique pas le droit d'être entendu oralement ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).
3.2 En l'espèce, le recourant n’indique pas quels éléments supplémentaires et utiles à la solution du litige il n'aurait pas pu apporter par écrit. En outre, il s'est exprimé de manière circonstanciée sur l'ensemble du litige et a produit les pièces auxquelles il s'est référé dans ses écritures. Son audition n'apparaît donc pas nécessaire.
Pour le surplus, et dans la mesure où l'ACF-GE s'est également déterminée et a produit son dossier, la chambre de céans dispose des éléments nécessaires pour statuer en connaissance de cause.
Il ne sera donc pas procédé à d'autres actes d'instruction.
4. Le recourant reproche implicitement au TAPI d'avoir violé son droit d'être entendu en n'entendant pas « le C______ ».
4.1 La procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle le juge établit les faits d’office (art. 19 LPA), sans être limité par les allégués et les offres de preuves des parties. Ce principe n’est toutefois pas absolu, sa portée étant restreinte par le devoir des parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA). Celui-ci comprend en particulier l’obligation des parties d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l’absence de preuves (ATF 128 II 139 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_454/2017 du 16 mai 2018 consid. 4.1 ; ATA/60/2025 du 14 janvier 2025 consid. 7.2 et l'arrêt cité).
4.2 En matière fiscale, c’est l'autorité qui doit démontrer l'existence d'éléments créant ou augmentant la charge fiscale, tandis que le contribuable doit supporter le fardeau de la preuve des éléments qui réduisent ou éteignent son obligation d'impôts. Il appartient au contribuable non seulement d’alléguer ces derniers, mais encore d'en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l'échec de cette preuve ; ces règles s'appliquent également à la procédure devant les autorités de recours (ATF 133 II 153 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_89/2014 du 26 novembre 2014 consid. 7.2 ; ATA/20/2025 du 7 janvier 2025 consid. 2.2).
4.3 En l'espèce, il ressort des écritures du recourant devant le TAPI qu'il n'a pas sollicité l'audition d'employés du C______, si bien qu'il ne saurait reprocher au TAPI, pour ce motif déjà, de ne pas les avoir entendus. En outre, le fait sur lequel le recourant aurait a posteriori souhaité que le TAPI entende lesdits employés, soit que le C______ « aurait » refusé l'arrivée et le crédit de fonds en provenance de B______, n'est pas pertinent pour l'issue du litige, comme cela sera exposé ci-après. Le TAPI n'a donc pas violé le droit d'être entendu du recourant.
Par conséquent, le grief, mal fondé, sera écarté.
5. Le recourant se plaint matériellement d'une constatation inexacte des faits pertinents.
5.1 Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), non réalisée en l'espèce.
5.2 En l'espèce, en tant que le recourant se plaint du fait que le jugement attaqué ne fait aucune mention des « aspects, lois, régulations et instructions administratives, jurisprudence, de la valeur vénale, de ses limitations/qualifications », il semble plutôt alléguer une violation du droit et n'indique pas quels éléments factuels propres à sa situation le TAPI n'aurait pas constatés.
Par conséquent, le grief, dans la mesure où il est recevable, sera écarté.
6. Le recourant estime que la fortune et les revenus issus de ses avoirs bancaires auprès de B______ n'auraient pas dû être pris en compte dans le calcul de son impôt.
6.1 En vertu de l'art. 26 al. 1 Cst., la propriété est garantie. De jurisprudence constante, en matière fiscale, ce droit fondamental ne va toutefois pas au-delà de l'interdiction d'une imposition confiscatoire. Ainsi, une prétention fiscale ne doit pas porter atteinte à l'essence même de la propriété privée (art. 36 al. 4 Cst.). Il incombe au législateur de conserver la substance du patrimoine du contribuable et de lui laisser la possibilité d'en former un nouveau (ATF 143 I 73 consid. 5.1 = RDAF 2017 II 193 ; ATF 128 II 112 consid. 10b/bb).
6.2 En droit genevois, l’impôt sur le revenu a pour objet tous les revenus, prestations et avantages du contribuable, qu’ils soient uniques ou périodiques, en espèces ou en nature et quelle qu’en soit l’origine, avant déductions (art. 17 de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 - LIPP - D 3 08). Est imposable le rendement de la fortune mobilière, en particulier les intérêts d'avoirs, créances, obligations, dépôts d'argent payés par le débiteur de la prestation, notamment (art. 22 al. 1 let. a LIPP).
Le revenu imposable se détermine d'après les revenus acquis pendant la période fiscale (art. 62 al. 1 LIPP). Genève a ainsi adopté le système postnumerando, dans lequel l'impôt est calculé après la fin de l'année fiscale sur la base des revenus effectivement réalisés.
6.2.1 Le revenu est défini comme l’ensemble des biens économiques recueillis par un contribuable pendant une période déterminée et dont il peut disposer pour couvrir ses besoins personnels (et ceux de son exploitation) sans diminuer sa fortune (ATA/76/2024 du 23 janvier 2024 consid. 2.4 et la référence citée). Dans le concept de la théorie de l’accroissement net du patrimoine, est considéré comme fortune (nette) l’ensemble des objets et droits qui sont attribuables au contribuable et dont la valeur peut être exprimée en argent (« valeurs patrimoniales »), sous déduction des dettes (appréciables en argent) de cette personne (ATF 149 II 400 consid. 4.1 = RDAF 2023 II 506, 511).
Un revenu n'est imposable que s'il est réalisé. Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, un revenu est considéré comme réalisé lorsqu'une prestation est faite au contribuable ou que ce dernier acquiert une prétention ferme sur laquelle il a effectivement un pouvoir de disposition (ATF 149 II 400 consid. 4.3 = RDAF 2023 II 506 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_226/2024 du 27 janvier 2025 consid. 7.1.2). La réalisation suppose un titre juridique ferme, qui peut consister en l'acquisition d'une prétention ou en l'acquisition de la propriété. L'acquisition de la prétention précède en principe la prestation en argent. En règle générale, l'acquisition d'une prétention est déjà qualifiée de revenu dans la mesure où son exécution ne paraît pas incertaine (ATF 113 Ib 23 consid. 2e ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_710/2017 du 29 octobre 2018 consid. 5.3). L’exécution d’une obligation est considérée comme incertaine si elle paraît d’emblée peu probable, soit parce que le débiteur est insolvable soit parce qu’il refuse le paiement. Une imposition selon la méthode de la comptabilisation ne se justifie pas dans un tel cas parce que les risques de pertes sur débiteurs influencent généralement la valeur en argent de la créance : cette valeur ne correspond plus au montant nominal et ne peut plus en général être déterminée avec la sûreté nécessaire pour appréhender fiscalement l’accroissement de la capacité contributive du créancier (149 II 400 consid. 4.4 = RDAF 2023 II 506, 513).
Il peut arriver qu'un revenu, imposé au moment de sa réalisation, soit soumis ultérieurement à une obligation de restitution ou à une mesure de confiscation. Dans un tel cas, ce n'est que si la restitution n'a pas lieu que le revenu reste imposable. Un accroissement de fortune ne constitue un revenu imposable que si son acquéreur peut en disposer définitivement (ATA/1367/2023 du 19 décembre 2023 consid. 4.2 ; ATA/1065/2023 du 26 septembre 2023 consid. 2.1).
6.3 L'impôt sur la fortune a pour objet l'ensemble de la fortune nette (art. 13 al. 1 de la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 - LHID - RS 642.14 ; art. 46 LIPP). La fortune est estimée à la valeur vénale. Toutefois, la valeur de rendement peut être prise en considération de façon appropriée (art. 14 al. 1 LHID). Sont notamment soumis à l’impôt sur la fortune l'argent comptant, les dépôts dans les banques et caisses d'épargne, les soldes de comptes courants et tous titres représentant la possession d'une somme d'argent (art. 47 let. c LIPP).
À Genève, l'état de la fortune mobilière et immobilière est établi au 31 décembre de l'année pour laquelle l'impôt est dû (art. 49 al. 1 LIPP).
6.3.1 La fortune imposable au sens de l'art. 13 al. 1 LHID se compose de l'ensemble des actifs, pour autant qu'ils ne soient pas exonérés de l'impôt en vertu d'une disposition spéciale. Les actifs imposables comprennent en principe tous les droits – qu'ils portent sur des choses, des créances ou des participations – appréciables en argent, à savoir tous les droits qui peuvent être réalisés, c'est-à-dire cédés en échange d'une contre-prestation (ATF 136 II 256 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_710/2017 du 29 octobre 2018 consid. 7.2).
6.3.2 La valeur vénale est la valeur marchande objective d'un actif à un moment donné. Il s'agit de la valeur qu'un acheteur paierait normalement dans des circonstances normales (arrêt du Tribunal fédéral 2C_866/2019 du 27 août 2020 consid. 4.1). Pour les créances, l’évaluation de la valeur vénale se fonde sur le principe dit de la valeur nominale, de sorte qu’elles sont soumises à l’impôt sur la fortune à concurrence du montant total de la créance, à moins que la probabilité de perte ne nécessite un abattement (Hannes TEUSCHER/Frank LOBSIGER, in Martin ZWEIFEL, Michael BEUSCH, Bundesgesetz über die Harmonisierung der direkten Steuern der Kantone und Gemeinden, 4e éd., 2022, n. 8 ad art. 14 LHID ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_565/2007 du 15 janvier 2008 consid. 4.2).
6.4 Le 4 mars 2022 est entrée en vigueur l’ordonnance instituant des mesures en lien avec la situation en Ukraine (RS 946.231.176.72 - ci-après : l’ordonnance), en application de l’art. 2 de la loi fédérale sur les embargos du 22 mars 2002 (LEmb - RS 946.231).
Selon l'art. 1 let. b de cette ordonnance, le gel des avoirs est le fait d’empêcher toute action permettant la gestion ou l’utilisation des avoirs, à l’exception des actions administratives normales effectuées par des instituts financiers.
À teneur de l’art. 15 al. 1 de l’ordonnance, sont gelés les avoirs et les ressources économiques qui sont la propriété ou sous le contrôle, direct ou indirect : des personnes physiques, entreprises et entités visées à l’annexe 8 (let. a), des personnes physiques, entreprises et entités agissant au nom ou selon les instructions de personnes physiques, entreprises ou entités visées à la let. a (let. b) et des entreprises et entités qui sont la propriété ou sous le contrôle de personnes physiques, entreprises ou entités visées à la let. a ou b (let. c).
L’art. 15 al. 2 de l’ordonnance prévoit qu’il est interdit de fournir des avoirs aux personnes physiques, entreprises et entités visées à l’al. 1 ou de mettre à leur disposition, directement ou indirectement, des avoirs ou des ressources économiques.
Par ailleurs, l’art. 24a al. 1 let. a de l’ordonnance dispose qu’il est interdit de participer directement ou indirectement à toute transaction avec une banque, une entreprise ou une entité sise en Fédération de Russie visée à l’annexe 15.
6.5 Sur le site internet du SECO figurent les versions antérieures et actualisées des annexes 2, 8 à 15b, 25 et 33 de l’ordonnance (https://www.seco.admin.ch/seco/fr/
home/Aussenwirtschaftspolitik_Wirtschaftliche_Zusammenarbeit/Wirtschaftsbeziehungen/exportkontrollen-und-sanktionen/sanktionen-embargos/sanktionsmassna
hmen/massnahmen-zur-vermeidung-der-umgehung-internationaler-sanktione.
html). Le 2 mars 2023, B______ a été ajoutée à la liste des entités faisant l’objet des sanctions (RO 2023 100 ; état de l’ordonnance au 1er mars 2023, avec entrée en vigueur le lendemain, p. 34).
6.6 En l'espèce, le recourant a établi qu'il détenait, à fin 2022, auprès de B______ des avoirs s’élevant à CHF 1'032'097.95 (RUB 82'327'356.-) et qu'il a perçu, pour cette même année, des revenus tirés desdits avoirs se montant à CHF 27'484.- (RUB 2'168'539.-.). C'est par conséquent de manière conforme aux art. 22 al. 1 let. a et 47 let. c LIPP que l'AFC-GE a pris en compte ces montants dans la taxation 2022 du recourant, au titre de fortune et de revenus imposables.
Le fait que les avoirs du recourant auprès de B______ aient été, par hypothèse, bloqués dès le 2 mars 2023 n'a aucune incidence sur sa taxation 2022. L'état de la fortune mobilière est établi au 31 décembre de l'année pour laquelle l'impôt est dû et le revenu imposable se détermine d'après les revenus acquis pendant la période fiscale. Dès lors que la période concernée est l'année fiscale 2022, c'est le 31 décembre 2022 qui est la date déterminante pour l'évaluation de l'impôt sur la fortune et de l'impôt sur le revenu. À ce moment-là, B______ ne faisait pas encore l’objet de sanctions venant de la Suisse, les mesures prévues par l’ordonnance n'étant entrées en vigueur à l’égard de cette banque qu’à compter du 2 mars 2023. Ainsi, et quoi qu'en dise le recourant, ce dernier était en mesure de disposer librement de ses avoirs déposés auprès de B______ ainsi que de leur rendement au 31 décembre 2022.
Par ailleurs, à fin 2022, l’exécution de l'obligation de la banque ne pouvait être considérée comme incertaine, rien dans le dossier n'indiquant que la banque était insolvable ou aurait refusé d'honorer ses obligations envers le recourant. De même, le blocage d'avoirs comme celui dont pourrait avoir fait l'objet le recourant dès le 2 mars 2023, qui n'apparaît de surcroît pas définitif, n'a pas d'incidence sur la valeur nominale de la créance, si bien qu'un abattement n'entre pas en ligne de compte.
Enfin, on comprend des écritures du recourant que sa banque d'alors, le C______, « aurait » refusé l'arrivée et le crédit de fonds en provenance de B______ dès le mois de juin 2022. Or, quand bien même tel aurait été le cas, cela ne signifiait pas que les avoirs du recourant auprès de B______ étaient indisponibles d'un point de vue juridique à ce moment-là, puisque, comme exposé ci‑avant, B______ ne faisait pas encore l’objet de sanctions venant de la Suisse.
Pour le surplus, les montants de revenu et de fortune sur lesquels le recourant a été taxé sont corrects. Pour le revenu, le fisc a ajouté au montant de CHF 29'868.-, déclaré à titre de revenu brut mobilier, la somme de CHF 27'484.- correspondant aux revenus des avoirs bancaires, pour un total de CHF 57'352.- de revenus mobiliers figurant dans les éléments retenus par l'AFC le 18 août 2023. Pour la fortune, elle a ajouté au montant de CHF 5'520'315.-, déclaré à titre de fortune brute, la somme de CHF 1'032'097.95 correspondant au montant du compte bancaire russe, pour un total de CHF 6'552'413.- figurant dans les éléments retenus par l'AFC le 18 août 2023.
Rien ne permet d'affirmer que la substance du patrimoine du recourant serait entamée par sa taxation 2022 ou qu'il ne disposerait plus de la possibilité d'en former un nouveau, si bien que ladite taxation ne contrevient pas à la garantie de sa propriété.
Par conséquent, le grief sera écarté et le recours sera rejeté.
7. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 700.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
* * * * *
PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 1er juillet 2024 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 juin 2024 ;
au fond :
le rejette ;
met à la charge de A______ un émolument de CHF 700.- ;
dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;
dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession de la demanderesse, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;
communique le présent arrêt à A______, à l'administration fiscale cantonale et au Tribunal administratif de première instance.
Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Claudio MASCOTTO, juges.
Au nom de la chambre administrative :
la greffière-juriste :
M. RODRIGUEZ ELLWANGER |
| la présidente siégeant :
F. KRAUSKOPF |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
|
| la greffière :
|