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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/89/2024

ATA/588/2024 du 14.05.2024 ( AIDSO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/89/2024-AIDSO ATA/588/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 mai 2024

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourante

contre

HOSPICE GÉNÉRAL intimé

_________



EN FAIT

A. a. Par décision du 27 juillet 2023, adressée par pli recommandé, le Centre d'action sociale de Saint-Jean a confirmé à A______ sa demande de remboursement de la somme de CHF 20'347.15 perçue indûment à titre d'aide financière.

Il avait été informé qu'elle avait un compte d'épargne UBS qu'elle n'avait pas déclaré à l'Hospice général (ci-après : hospice) et qu'elle était propriétaire d'un bien immobilier à 50% en Ukraine qu'elle avait hérité à la suite du décès de son père en septembre 2021, qu'elle n'avait pas déclaré lors de sa demande d'aide financière en mars 2022. La présente décision pouvait faire l'objet d'une opposition écrite dans les 30 jours suivant sa notification.

b. Selon le système « Track & Trace » de la Poste, A______ a été avisée pour retrait le 28 juillet 2023 et le pli lui a été distribué le 7 août 2023.

c. Le 19 octobre 2023, le Service du contentieux de l'hospice (ci-après : le service du contentieux) lui a demandé le remboursement de sa dette d'ici au 8 novembre 2023.

d. Par courriel du 8 novembre 2023, A______ a demandé à recevoir des explications sur la demande de remboursement, et le service du contentieux lui a remis le jour même une copie de la décision du 27 juillet 2023.

e. Par courriel du 10 novembre 2023, A______ a indiqué au service du contentieux contester fermement la facture de CHF 20'347.-.

f. Le même jour, le service du contentieux lui a répondu ne pas être habilité à se prononcer sur le bien-fondé des décisions administratives qui bénéficiaient d'un délai d'opposition de 30 jours.

g. Après un nouvel échange de courriels, A______ a, en date du 27 novembre 2023, demandé au service du contentieux de lui transmettre la décision du 27 juillet 2023 qu'elle n'avait jamais reçue.

h. Par courrier du 3 décembre 2023, A______ a indiqué à l'hospice n'avoir reçu la décision du 27 juillet 2023 qu'en date du 28 novembre 2023 et avoir formé une opposition formelle le 10 novembre 2023 à la demande de remboursement de la somme de CHF 20'347.-.

i. Par décision sur opposition du 22 décembre 2023, le directeur général de l'hospice a déclaré irrecevable l'opposition formée par A______ le 3 décembre  2023 pour cause de tardiveté.

B. a. Par acte du 10 janvier 2024, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant implicitement à son annulation.

Elle n'avait pas reçu le recommandé du 27 juillet 2023, de sorte qu'elle ne pouvait s'y opposer. Elle était dans l'incapacité de rembourser la somme exigée de l'hospice, se trouvait dans une situation terriblement précaire, et il convenait de rappeler à l'intimé son rôle de « support social ».

b. Dans ses observations du 8 février 2024, l'hospice a conclu, à la forme, à ce que le recours interjeté par A______ contre la décision du 22 décembre 2023 soit déclaré irrecevable et, au fond, au rejet du recours.

c. Dans sa réplique du 10 mars 2024, A______ a répété ne pas avoir reçu la lettre recommandée du 27 juillet 2023 car elle était en vacances à l'étranger du 26 juillet au 2 août 2023. Elle n'était pas en mesure financièrement de rembourser la somme de CHF 20'347.15

d. Le 12 mars 2024, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10 ; art. 52 de la loi sur l’insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 - LIASI - J 4 04).

2.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de l'hospice du 27 juillet 2023 déclarant l'opposition formée par la recourante irrecevable car tardive.

2.1    L'opposition (ou réclamation) constitue un moyen de droit ordinaire qui a pour effet de contraindre l'autorité qui a rendu la décision attaquée à se prononcer à nouveau sur l'affaire (art. 50 al. 1 LPA ; Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2ème éd., 2014, p. 435). En droit genevois, la loi définit les cas où une réclamation (ou une opposition) doit être présentée avant que les juridictions administratives ne puissent être saisies par la voie d'un recours (art. 50 al. 3 LPA).

2.2    Toute décision prise par l'hospice en application de la LIASI est écrite et motivée. Elle mentionne expressément dans quel délai, sous quelle forme et auprès de quelle autorité il peut être formé une opposition (art. 50 LIASI).

Les décisions peuvent faire l'objet d'une opposition écrite, adressée à la direction de l'hospice dans un délai de trente jours à partir de leur notification (art. 51  al. 1 LIASI). Le délai court dès le lendemain de la notification de la décision (art. 51 al. 4 phr. 2 et 62 al. 3 phr. 1 LPA). Lorsque son dernier jour est un samedi, un dimanche ou un jour légalement férié, il expire le premier jour utile (art. 17 al. 3 LPA).

Selon l'art. 63 al. 1 let. b LPA, les délais en jours fixés par la loi ou par l'autorité ne courent pas du 15 juillet au 15 août inclusivement, . Cette disposition est applicable par analogie au délai d'opposition (art. 51 al. 4 LPA).

2.3    La notification doit permettre au destinataire de prendre connaissance de la décision et, le cas échéant, de faire usage des voies de droit ouvertes à son encontre. Une décision est notifiée, non pas au moment où l'intéressé en prend connaissance, mais le jour où elle est dûment communiquée (ATF 113 Ib 296 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.1 et les références citées ; ATA/890/2015 du 1er septembre 2015 consid. 2b).

La notification d'un acte soumis à réception, comme une décision ou une communication de procédure, est réputée faite au moment où l'envoi entre dans la sphère de pouvoir de son destinataire (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3ème éd., 2011, p. 302 s n. 2.2.8.3). La preuve de la notification d'un acte et de la date de celle-ci incombe en principe à l'autorité qui entend en tirer une conséquence juridique. L'autorité qui veut contrer le risque d'un échec de la preuve de la notification peut communiquer ses décisions par pli recommandé. En tel cas, lorsque le destinataire de l'envoi n'est pas atteint et qu'un avis de retrait est déposé dans sa boîte aux lettres ou dans sa case postale, l'envoi est considéré comme notifié au moment où il est retiré. Si le retrait n'a pas eu lieu dans le délai de garde, il est réputé notifié le dernier jour de celui-ci (ATF 134 V 49 consid 4 ; 130 III 396 consid. 1.2.3).

2.4    Les délais de réclamation et de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d'être prolongés (art. 16 al. 1 LPA), restitués ou suspendus, si ce n'est par le législateur lui-même. Celui qui n’agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire. Le strict respect des délais légaux se justifie pour des raisons d’égalité de traitement et n’est en principe pas constitutif de formalisme excessif (ATF 142 V 152 consid. 4.2 in fine ; ATA/454/2024 du 9 avril 2024 consid. 1.4 ; ATA/583/2023 du 5 juin 2023 consid. 1.3 et les références citées).

Les cas de force majeure restent réservés (art. 16 al. 1 2ème phr. LPA). Tombent sous cette notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d'activité de l'intéressé et qui s'imposent à lui de l'extérieur de façon irrésistible (ATA/454/2024 précité consid. 1.2 ; ATA/271/2021 précité consid. 3c ; ATA/642/2015 du 16 juin 2015 consid. 4).


 

2.5    En l'espèce, il ressort du suivi « Track and Trace » de la poste versé au dossier que la décision du 27 juillet 2023 a été notifiée à la recourante le 7 août 2023. La recourante allègue dans sa réplique, pièce à l'appui, ne pas avoir reçu cette décision du fait qu'elle était en vacances à l'étranger jusqu'au 2 août 2023. Cet élément ne lui est toutefois d'aucun secours puisque la décision querellée lui a été distribuée le 7 août suivant, alors qu'elle était de retour de ses vacances.

En tenant compte de la période des féries comprises du 15 juillet au 15 août inclus, le délai d'opposition arrivait à échéance le 14 septembre 2023. C'est donc à juste titre que l'intimé a déclaré irrecevable, car tardive, l'opposition de la recourante formée le 3 décembre 2023. La solution est identique même si par impossible il fallait tenir compte de l'opposition formée par la recourante le 10 novembre 2023 devant le service du contentieux.

La recourante ne se prévaut pour le surplus pas d'un éventuel cas de force majeure qui justifierait la tardiveté de cette déclaration intervenue au-delà du délai légal d'opposition.

Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.

3.             Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA et 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 janvier 2024 par A______ contre la décision de l'Hospice général du 22 décembre 2023 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : Eleanor McGREGOR, présidente, Patrick CHENAUX, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. WERFFELI BASTIANELLI

 

 

la présidente siégeant :

 

 

E. McGREGOR

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :