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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/484/2021

ATA/291/2021 du 08.03.2021 ( EXPLOI ) , ACCORDE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/484/2021-EXPLOI ATA/291/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 8 mars 2021

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Stéphanie Butikofer, avocate

contre

SERVICE DE POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR



Vu le recours interjeté le 11 février 2021 à la chambre administrative de la Cour de justice par Monsieur A______ contre la décision du service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci-après : PCTN) du 2 février 2021, notifiée le 8 février 2021 et déclarée exécutoire nonobstant recours, ordonnant la fermeture immédiate de l'établissement à l'enseigne « B______ » pour une durée de
28 jours supplémentaires, soit jusqu'au 28 mars 2021 inclus ;

que, selon le rapport de police du 19 janvier 2021, le même jour, à 20h10, neuf clients consommaient des bières sur la terrasse de l'établissement précité exploité par M. A______, que ceux-ci ne portaient pas de masque et que trois tables hautes, munies de cendriers, leur avaient été mis à disposition ;

que le recourant qui conclut à l'annulation de la décision expose qu'il avait expliqué le 22 janvier 2021 au PCTN que son restaurant était fermé, que les clients attendaient leur commande à emporter, que les rubans apposés pour signifier l'interdiction de stationner sur la terrasse étaient régulièrement cassés, que la présence des cendriers était le fruit d'un oubli et que les tables hautes se trouvaient à l'extérieur par manque de place à l'intérieur du restaurant ;

qu'il précise dans son recours qu'il avait conservé les tables hautes à l'extérieur pour y déposer un gel hydro-alcoolique et les commandes à l'emporter ; rien ne permettait de retenir que les boissons consommées le soir en question par les clients, qui étaient répartis en trois groupes, auraient été servies par lui ; il n'avait pas à vérifier ce qui se passait à l'extérieur ; il n'y avait qu'un seul cendrier, utilisé par le personnel ; il avait immédiatement rentré les tables hautes ; elles demeuraient depuis lors à l'intérieur et il avait apposé de nouvelles bandes signifiant l'interdiction d'utiliser la terrasse ;

que depuis la seconde fermeture des restaurants, il ne percevait qu'un revenu entre CHF 20.- à CHF 50.- par jour ; son épouse, salariée, était sans revenu depuis mai 2020 ; il percevait un montant de CHF 3'406.30 par mois à titre d'allocation perte de gains ;

qu'il requerrait la restitution de l'effet suspensif, faisant valoir que la fermeture immédiate pour une durée de 28 jours supplémentaires à compter du 1er mars 2021 privait sa famille de tout moyen de subsistance pendant 55 jours ; son droit d'être entendu avait été violé du fait que la décision ne mentionnait aucun des arguments soulevés dans ses observations ; la sévérité de la sanction n'était pas compatible avec le principe de la proportionnalité ;

que le PCTN s'est opposé à la restitution de l'effet suspensif ; il importait de façon urgente de prévenir la transmission du virus de Covid-19 ; les clients présents n'attendaient pas une commande, mais consommaient sur place ; le PCTN avait tenu compte des observations du recourant puisque sa décision les transcrivait ; la fermeture était de
28 jours à compter du 1er mars 2021 et non de 55 jours ; la vente à l'emporter demeurait permise ;

que, dans sa réplique sur effet du 4 mars 2021, le recourant a relevé que le pli de la chambre de céans du 23 févier 2021 ne lui était parvenu que le 3 mars 2021 ; il avait tout mis en oeuvre pour assurer la protection de la santé publique ; depuis novembre 2020, il réalisait, au mieux, une recette journalière de CHF 100.- ; l'établissement était fermé au public et les huit clients présents attendaient une commande à l'emporter ; la fermeture du restaurant ayant été ordonnée immédiatement, elle l'était désormais depuis le 8 février 2021, date de la réception de la décision ; cela étant, il prenait acte que selon le PCTN, il pouvait reprendre son activité de vente à l'emporter, ce qu'il allait faire immédiatement ;

Considérant, en droit, l'art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative de la Cour de justice du 26 mai 2020, à teneur duquel les décisions sur effet suspensif sont prises par la présidente de ladite chambre, respectivement par le vice-président, ou en cas d'empêchement de ceux-ci, par une juge ;

qu'aux termes de l'art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10), sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (al. 3) ;

que selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles, dont fait partie la restitution et le retrait de l'effet suspensif, ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/288/2021 du 3 mars 2021 ; ATA/1043/2020 du 19 octobre 2020 ; ATA/303/2020 du 19 mars 2020) ;

que, par ailleurs, l'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3) ;

que la restitution de l'effet suspensif est subordonnée à l'existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l'absence d'exécution immédiate de la décision (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1) ;

que lors du prononcé de mesures provisionnelles, l'autorité de recours dispose d'un large pouvoir d'appréciation qui varie selon la nature de l'affaire (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1) ;

qu'en l'espèce, la décision querellée repose sur une perturbation importante de la santé publique, le recourant n'ayant, prima facie et sans préjudice de l'examen au fond, pas respecté l'arrêté du Conseil d'État du 20 janvier 2021 modifiant l'arrêté du 1er novembre 2020 d'application des mesures fédérales destinées à lutter contre l'épidémie de Covid-19 en situation particulière ;

que le recourant conteste l'infraction qui lui est reprochée ainsi que le respect du principe de la proportionnalité de la sanction ;

que les constats sur lesquels se fonde le PCTN ressortent d'un rapport de police établi par un agent assermenté, qui mentionne la présence de trois autres agents au moment des faits décrits par lui ;

que le recourant soutient que son établissement était fermé et que les personnes présentes n'étaient pas ses clients ;

qu'il n'en demeure pas moins que le rapport de police qui bénéficie, a priori, d'une pleine valeur probante, retient que des clients étaient présents, en train de consommer des boissons, des tables hautes ainsi que des cendriers étant à disposition ;

qu'au vu de ces éléments, il n'apparaît pas d'emblée que la version soutenue par le recourant soit manifestement bien fondée ;

que l'intérêt public à ce que les prescriptions d'ordre sanitaire visant la protection de la santé publique contre la pandémie et à ce que les sanctions prononcées par le PCTN soient immédiatement exécutées est important ;

que la décision du PCTN, qui a prononcé la fermeture immédiate de l'établissement, ne précisait pas que le recourant pouvait continuer à offrir des plats à l'emporter ;

que celui-ci indique - ce qu'il n'y a en l'état pas lieu de mettre en doute - qu'il en a conclu que cette activité lui était également interdite, de sorte qu'il y a mis fin le 8 février 2021, pour ne la reprendre que le 3 mars 2021, à réception des déterminations du PCTN ;

que la lecture que le recourant a fait de la décision n'apparaît, a priori et sans préjudice de l'examen au fond, pas d'emblée contraire au principe de la bonne foi ;

qu'ainsi, l'établissement est d'ores et déjà demeuré complètement fermé, sans service à l'emporter, pendant 24 jours ;

qu'il apparaît donc que l'essentiel de la sanction a déjà été exécuté ;

qu'au vu de cet élément, il convient d'admettre la requête de restitution de l'effet suspensif, le solde de la sanction, si elle était bien fondée, pouvant être exécuté ultérieurement ;

qu'il sera statué sur les frais de la présente décision avec l'arrêt sur le fond.

 

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

admet la requête de restitution d'effet suspensif ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu'à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du
17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique la présente décision à Me Stéphanie Butikofer, avocate du recourant, ainsi qu'au service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir.

 

 

 

La juge :

 

 

F. Krauskopf

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :