Décisions | Chambre civile
ACJC/405/2025 du 18.03.2025 sur OTPI/672/2024 ( SDF ) , MODIFIE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/6608/2024 ACJC/405/2025 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU MARDI 18 MARS 2025 |
Entre
Monsieur A______, domicilié c/o Madame B______, ______, appelant d'une ordonnance rendue par la 7ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 29 octobre 2024, représenté par Me Mathias BUHLER, avocat, Schmidt & Associés, rue du Vieux-Collège 10, 1204 Genève,
et
La mineure C______, représentée par sa mère, D______, domiciliée ______, intimée, représentée par Me Stéphane REY, avocat, rue Michel-Chauvet 3, case postale 477, 1211 Genève 12.
A. Par ordonnance OTPI/672/2024 du 29 octobre 2024, reçue par les parties le 31 octobre 2024, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant sur mesures provisionnelles, a rejeté la requête formée le 8 octobre 2024 par A______ (chiffre 1 du dispositif), réservé sa décision finale quant au sort des frais judiciaires (ch. 2), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 3) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 4).
B. a. Par acte expédié le 7 novembre 2024 au greffe de la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a formé appel contre cette ordonnance, dont il a sollicité l'annulation.
Il a conclu à ce que la Cour attribue la garde de l'enfant C______ à sa mère D______, lui réserve un droit de visite sur sa fille qui s'exercerait avec le soutien de E______ [centre de consultations familiales] et s'élargirait de manière progressive tous les trois mois (soit d'abord deux fois deux heures par semaine, puis deux demi-journées par semaine, puis une journée par semaine et enfin une journée avec une nuit par semaine), sous réserve de l'évaluation de E______ et du curateur, et instaure une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles.
Il a produit une pièce nouvelle, soit un échange de messages WhatsApp avec D______ ayant eu lieu entre le 28 octobre et le 2 novembre 2024, dans le cadre duquel A______ a adressé 25 messages à la mère de sa fille (sans compter les 8 messages qu'il a supprimés) pour lui adresser de nombreux reproches.
b. Par réponse du 25 novembre 2024, D______, agissant pour sa fille, a conclu au rejet de l'appel.
c. Les parties ont été informées par avis de la Cour du 17 décembre 2024 de ce que la cause était gardée à juger.
C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier :
a. D______, née le ______ 1992, et A______, né le ______ 1998, ont vécu en concubinage pendant une année.
b. De leur relation est issue C______, née le ______ 2023.
c. D______ et A______ se sont séparés en novembre 2023. A______ est retourné vivre chez sa mère, tandis que D______ est demeuré avec leur fille au domicile familial.
d. Par acte déposé en conciliation le 18 mars 2024, D______, agissant pour le compte de sa fille, a saisi le Tribunal d'une action alimentaire et en fixation des relations personnelles à l'encontre de A______.
e. Lors de l'audience de conciliation du 8 mai 2024, les parties sont parvenues à un accord.
Par transaction partielle ACTPI/110/2024, le juge conciliateur a ainsi attribué la garde sur l'enfant à la mère et réservé au père un droit de visite provisoire qui s'exercerait, sauf accord contraire des parties, à raison de deux heures chaque semaine, le vendredi matin de 10h à 12h, au domicile de D______, réservé une évolution ultérieure du droit et ordonné l'établissement d'un rapport d'évaluation sociale par le Service d'évaluation et d'accompagnement de la séparation parentale (ci-après : le SEASP).
f. Après délivrance de l'autorisation de procéder, D______, agissant pour sa fille, a introduit sa demande devant le Tribunal le 14 mai 2024, dans le cadre de laquelle elle a notamment conclu à ce qu'un droit de visite à exercer conformément aux recommandations du SEASP soit réservé à A______.
Elle a notamment fait valoir qu'elle souhaitait que, dans un premier temps, les visites soient encadrées par des professionnels, dans la mesure où A______ avait exprimé ne pas se sentir à l'aise dans l'ancien domicile commun. Un droit de visite au Point Rencontre permettrait au père d'être guidé par des professionnels qui l'aideraient à créer une relation de qualité avec sa fille et à améliorer son sens des responsabilités. Un tel cadre était "impérativement nécessaire" pour sauvegarder l'intérêt et le bien-être de l'enfant.
g. Lors de l'audience du 18 juin 2024, les parties se sont déclarées d'accord de maintenir le droit de visite tel que convenu jusqu'à ce que le SEASP rende son rapport d'évaluation sociale.
A______ a ajouté qu'il souhaitait que le droit de visite puisse progressivement s'élargir. D______ a réaffirmé son souhait que le droit de visite s'exerce au Point Rencontre.
h. Le 31 juillet 2024, le SEASP a rendu son rapport d'évaluation sociale.
Il résulte notamment de ce rapport que D______, qui assume la prise en charge de C______ de manière adéquate, estime que le droit de visite devrait être encadré par un professionnel pour guider et donner des conseils au père et qu'elle ne souhaite plus endosser ce rôle de "tiers". La pédiatre de l'enfant partage l'avis de la mère sur la nécessité d'un suivi par un éducateur au bénéfice du père pour l'accompagner dans sa relation avec sa fille.
Selon le SEASP, les modalités du droit de visite, à savoir deux heures le vendredi au domicile de la mère et en présence de celle-ci, ne pouvaient pas perdurer. Les parents n'étaient en effet pas satisfaits de cette situation et cela avait pour conséquence de nuire à la relation père-fille. Il était nécessaire que l'enfant puisse développer un lien avec son père, sans que sa mère soit présente. Au vu de la position de A______ (qui avait changé plusieurs fois d'avis et pouvait tenir une position radicale, inquiétante, lorsqu'il envisageait de couper tout contact avec l'enfant), le SEASP se questionnait par ailleurs sur la capacité de ce dernier à assumer son rôle de père et les inquiétudes exprimées par la mère quant au manque d'implication du père apparaissaient légitimes. Il était par conséquent dans l'intérêt de l'enfant que les visites s'exercent par l'intermédiaire de E______ et de manière progressive. De cette manière, A______ pourrait bénéficier de soutien et conseils durant les visites avec sa fille et mieux appréhender son rôle de père. Pour cela, une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles apparaissait nécessaire, afin de coordonner les visites avec E______ et d'accompagner l'évolution de celles-ci notamment.
Au terme de son évaluation, le SEASP a conclu qu'il était conforme à l'intérêt de l'enfant de maintenir l'autorité parentale conjointe, d'attribuer la garde de fait à la mère, de réserver un droit de visite au père, qui s'exercerait avec le soutien de E______ à raison de deux fois deux heures par semaine durant trois mois et s'élargirait ensuite progressivement, sous réserve de l'évaluation de E______ et du curateur, tous les trois mois, à deux demi-journées par semaine, puis une journée par semaine et une journée avec une nuit par semaine, et enfin d'instaurer une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles.
Dès lors que l'intérêt de l'enfant conduisait le SEASP à demander la mise en place de mesures de protection, il était recommandé de les instaurer sans délai.
i. Lors de l'audience du 8 octobre 2024, A______ a indiqué qu'il souhaitait que les mesures proposées par le SEASP s'agissant de la prise en charge de l'enfant soient mises en place rapidement.
D______ a répondu qu'elle n'y était pas favorable, ajoutant que, selon elle, le droit de visite du père devait être "encadré" et avoir lieu au Point Rencontre afin de permettre à A______ de créer un lien avec sa fille, sans qu'elle ne soit présente. Le droit de visite proposé par le SEASP représentait, selon elle, un élargissement trop soudain et elle s'inquiétait que l'enfant soit confrontée à un nouvel environnement inconnu.
Elle s'était renseignée sur E______ et ne pensait pas que "les éducateurs qui y travaill[ai]ent soient formés correctement pour assister un parent avec son enfant". A______ était en revanche plus favorable à un droit de visite avec E______, car cette structure permettait, selon lui, des visites plus régulières que le Point Rencontre et il souhaitait voir son enfant le plus possible.
Si les parties se sont accordées sur le fait que les visites se passaient mieux depuis trois semaines, elles ne sont toutefois pas parvenues à se mettre d'accord sur la manière dont le droit de visite devait évoluer, D______ envisageant même la possibilité de requérir la mise en œuvre d'une expertise familiale.
A______ a requis le prononcé de mesures provisionnelles, concluant à ce que son droit de visite soit élargi conformément aux recommandations du SEASP. D______ s'y est opposée et a conclu au rejet de la requête de mesures provisionnelles. Les parties ont plaidé et la cause a été gardée à juger sur mesures provisionnelles à l'issue de l'audience.
j. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a relevé que la question des droits parentaux, en particulier le droit de visite provisoire de A______ sur l'enfant, avait fait l'objet d'un accord. Si la situation actuelle n'était pas idéale, elle permettait néanmoins au père de bénéficier d'un droit de visite sur sa fille à raison de deux heures chaque semaine. Le SEASP avait certes préconisé une modification sans délai de ce droit de visite. Il avait toutefois également considéré que les inquiétudes de la mère s'agissant des capacités parentales de A______ étaient légitimes. En outre, l'amélioration dans l'exercice du droit de visite du précité et la meilleure communication qui semblait prévaloir entre les parents étaient récentes, et A______ n'avait pas rendu vraisemblable le risque d'un préjudice difficilement réparable ni une quelconque urgence, qu'il n'avait d'ailleurs ni allégué ni plaidé. Le Tribunal a par conséquent estimé qu'il était conforme au bien de l'enfant et à son intérêt de maintenir la situation qui prévalait s'agissant de sa prise en charge, ajoutant que le prononcé des mesures provisionnelles requises risquerait de préjuger de la décision au fond.
1. 1.1 L'appel est recevable pour avoir été interjeté auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 CPC) et dans le délai utile de dix jours (art. 142, 248 let. d et 314 al. 1 CPC), à l'encontre d'une décision sur mesures provisionnelles (art. 308 al. 1 let. b CPC), statuant sur une requête ayant pour objet les modalités du droit aux relations personnelles, soit une affaire de nature non-pécuniaire (art. 308 al. 2 CPC a contrario).
Le mémoire de réponse est également recevable pour avoir été déposé dans le délai et la forme prescrits par la loi (art 314 al. 1 CPC).
1.2 La pièce nouvelle produite par l'appelant est recevable (art. 317 al. 1bis et 407f CPC).
1.3 La procédure sommaire est applicable aux mesures provisionnelles (art. 248 al. 2 CPC).
La cognition du juge des mesures provisionnelles est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit. Les moyens de preuve sont limités à ceux qui sont immédiatement disponibles (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb; arrêt du Tribunal fédéral 5A_442/2013 du 24 juillet 2013 consid. 2.1 et 5.1).
1.4 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC), dans la limite des griefs qui sont formulés (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêts du Tribunal fédéral 4A_290/2014 du 1er septembre 2014 consid. 5; 5A_89/2014 du 15 avril 2014 consid. 5.3.2). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF
138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2014 du 28 août 2014 consid. 2.2.3).
1.5 Les maximes d'office et inquisitoire illimitée régissent la procédure, de sorte que la Cour établit les faits d'office et n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 296 al. 1 et 3 CPC), ni par l'interdiction de la reformatio in pejus (ATF 147 III 301 consid. 2.2; 138 III 374 consid. 4.3.1; 129 III 417 consid. 2.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_841/2018 du 12 février 2020 consid. 5.2; 5A_757/2013 du 14 juillet 2014 consid. 2.1).
2. L'appelant reproche au Tribunal d'avoir rejeté sa requête de mesures provisionnelles et d'avoir refusé de modifier son droit de visite.
2.1 Lorsque le juge compétent est saisi d'une action alimentaire, il est également compétent pour statuer sur l'autorité parentale ou les modalités d'exercice des relations personnelles (art. 298b al. 3 CC et 304 al. 2 CPC).
2.1.1 Selon la jurisprudence de la Cour, des mesures provisionnelles relatives aux modalités d'exercice des relations personnelles peuvent être requises dans le cadre d'une action alimentaire aux conditions de l'art. 261 al. 1 CPC (ACJC/560/2024 du 6 mai 2024 consid. 4.1.3; ACJC/278/2023 du 27 février 2023; ACJC/959/2022 du 14 juillet 2022 consid. 1; ACJC/1501/2021 du 17 novembre 2021 consid. 2).
2.1.2 Selon l'art. 261 al. 1 CPC, le tribunal ordonne les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable qu'une prétention dont il est titulaire est l'objet d'une atteinte ou risque de l'être (let. a) et que cette atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable (let. b).
L'existence d'un préjudice difficilement réparable doit être appréciée au regard des conséquences concrètes qu'aurait pour la partie requérante l'absence de telles mesures. Un tel préjudice devra ainsi être admis si, à défaut de mesures provisionnelles, la partie requérante serait privée en tout ou en partie de la possibilité d'entretenir des relations personnelles avec son enfant mineur : dans une telle hypothèse en effet, il ne pourra être remédié au préjudice subi pendant la procédure même en cas de décision finale favorable (ACJC/1042/2023 du 15 août 2023 consid. 1.1.1; ACJC/959/2022 du 14 juillet 2022 consid. 1.1; ACJC/1501/2021 du 17 novembre 2021 consid. 2.1).
2.1.3 A la requête de l'un des parents ou de l'enfant ou encore d'office, l'autorité de protection, respectivement le juge compétent, modifie les modalités des relations personnelles lorsque des faits nouveaux importants le commandent pour le bien de l'enfant (art. 298d CC).
Toute modification suppose que la nouvelle réglementation soit requise dans l'intérêt de l'enfant en raison de la survenance de faits nouveaux essentiels. En d'autres termes, une nouvelle réglementation de la garde ne dépend pas seulement de l'existence de circonstances nouvelles importantes; elle doit aussi être commandée par le bien de l'enfant. La modification ne peut être envisagée que si le maintien de la réglementation actuelle risque de porter atteinte au bien de l'enfant et le menace sérieusement (arrêt du Tribunal fédéral 5A_499/2023 du 26 février 2024 consid. 4.1 et les références citées).
2.1.4 Aux termes de l'art. 273 al. 1 CC, le parent qui ne détient pas l'autorité parentale ou la garde ainsi que l'enfant mineur ont réciproquement le droit d'entretenir les relations personnelles indiquées par les circonstances.
Le droit aux relations personnelles est considéré à la fois comme un droit et un devoir des parents, mais aussi comme un droit de la personnalité de l'enfant, qui doit servir en premier lieu l'intérêt de celui-ci; dans chaque cas, la décision doit donc être prise de manière à répondre le mieux possible à ses besoins, l'intérêt des parents étant relégué à l'arrière-plan (ATF 142 III 617 consid. 3.2.3; 141 III 328 consid. 5.4; 131 III 209 consid. 5). A cet égard, il est unanimement reconnu que le rapport de l'enfant avec ses deux parents est essentiel et qu'il peut jouer un rôle décisif dans le processus de recherche d'identité de l'enfant (ATF 127 III 295 consid. 4a; 123 III 445 consid. 3c; arrêt du Tribunal fédéral 5A_454/2019 du 16 avril 2020 consid. 4.2.1).
La fixation du droit aux relations personnelles relève de l'appréciation du juge du fait, qui jouit pour cela d'un large pouvoir et applique les règles du droit et de l'équité (ATF 142 III 617 consid. 3.2.5; arrêts du Tribunal fédéral 5A_669/2019 du 7 février 2020 consid. 6.3; 5A_334/2018 du 7 août 2018 consid. 3.1 et les références citées).
2.1.5 Selon l'art. 308 CC, lorsque les circonstances l'exigent, l'autorité de protection de l'enfant - respectivement le juge (art. 315a al. 1 CC) - nomme un curateur qui assiste les père et mère de ses conseils et de son appui dans la prise en charge de l'enfant (al. 1). Le curateur peut se voir conférer certains pouvoirs tels que la surveillance des relations personnelles (al. 2).
La curatelle de surveillance des relations personnelles prévue à l'art. 308 al. 2 CC fait partie des modalités auxquelles peut être soumis le droit de visite. Elle a pour but de faciliter, malgré les tensions existantes entre les père et mère, le contact entre l'enfant et le parent qui n'est pas au bénéfice de la garde et de garantir l'exercice du droit de visite. Le rôle du curateur est, dans ce cas, proche de celui d'un intermédiaire et d'un négociateur. Ce dernier n'a pas le pouvoir de décider lui-même de la réglementation du droit de visite, mais le juge peut lui confier le soin d'organiser les modalités pratiques de ce droit dans le cadre qu'il aura préalablement déterminé (arrêts du Tribunal fédéral 5A_670/2013 du 8 janvier 2014 consid. 4.1; 5A_101/2011 du 7 juin 2011 consid. 3.1.4).
L'autorité jouit à cet égard d'un large pouvoir d'appréciation (art. 4 CC) (arrêts du Tribunal fédéral 5A_818/2022 du 9 mars 2023 consid. 4.1; 5A_690/2022 du 31 janvier 2023 consid. 3.1).
2.1.6 Aux fins de trancher la question du sort des enfants, le juge peut avoir recours aux services de protection de l'enfance ou de la jeunesse pour demander un rapport sur la situation familiale, une enquête sociale pouvant avoir son utilité en cas de situation conflictuelle et de doute sur la solution adéquate pour les enfants; il peut toutefois s'écarter des conclusions d'un rapport établi par un tel service à des conditions moins strictes que celles applicables lorsqu'il s'agit d'une expertise judiciaire (arrêt du Tribunal fédéral 5A_119/2022 du 7 novembre 2022 consid. 3.1).
2.2 En l'espèce, le lien entre le père et sa fille est fragile depuis la séparation des parents, intervenue lorsque l'enfant était âgée d'à peine 4 mois. Leurs relations personnelles se sont en effet déroulées de façon irrégulière et limitées, en raison notamment du conflit entre le père et la mère et du manque d'implication dont l'appelant a pu faire preuve à l'égard de sa fille. L'appelant ne s'est ainsi jamais occupé seul de C______.
L'accord trouvé par les parties, lors de l'audience de conciliation du 8 mai 2024, a permis d'instaurer une certaine régularité des visites. Il était toutefois prévu que ce droit de visite évolue, comme cela résulte de la transaction partielle (qui qualifie le droit de visite de provisoire) et du procès-verbal d'audience du 18 juin 2024, en fonction des recommandations du SEASP.
Le rapport d'évaluation sociale du 31 juillet 2024 a précisément confirmé la nécessité de faire évoluer ce droit de visite, dont les modalités ne sont pas conformes à l'intérêt de l'enfant, puisqu'elles ne permettent pas au père et à sa fille de construire une véritable relation, les moments partagés se déroulant en présence de la mère, et confrontent l'enfant à un conflit parental encore marqué au vu des échanges produits en appel. Il apparaît primordial que l'enfant, désormais âgée de 20 mois, puisse, sans tarder, construire une relation de confiance avec son père, laquelle est nécessaire à son bon développement, et que l'appelant puisse investir son rôle de père.
Or, en l'absence d'une décision sur mesures provisionnelles, la situation actuelle va probablement se prolonger encore un certain temps, la procédure n'étant qu'à ses prémices et l'appelante envisageant, de plus, de solliciter la mise en œuvre d'une expertise familiale. Ainsi, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, les conditions pour le prononcé de mesures provisionnelles fixées par l'art. 261 al. 1 CPC sont réunies.
Il est vrai que les capacités parentales de l'appelant ne permettent pas d'envisager un élargissement trop soudain du droit de visite exercé actuellement. Les inquiétudes exprimées par la mère ont été objectivées par le SEASP ainsi que par la pédiatre de l'enfant, qui soutient également qu'une mesure d'assistance éducative serait bénéfique au père, et doivent être prises en compte. Le SEASP ainsi que l'appelant concluent néanmoins à la mise en place d'un droit de visite accompagné, ce qui correspond au souhait de la mère, pour laquelle il est impératif que le père soit guidé par des professionnels. Il est dès lors admis qu'un tiers professionnel doit intervenir, afin de conseiller le père et d'éviter de mettre en péril le bon développement de l'enfant.
Les craintes exprimées par la mère à l'égard de E______ n'apparaissent en revanche pas fondées puisque l'organisme en question bénéficie de l'expérience d'éducateurs spécialisés et permet la mise en place d'une assistance éducative (de type AEMO) en parallèle de l'organisation d'un droit de visite accompagné. Grâce à un tel suivi, parents et enfant bénéficieront de toute l'aide nécessaire pour construire une relation sereine, où chacun aura sa place.
Compte tenu de ce qui précède, il sera par conséquent procédé à une modification du droit de visite, lequel aura lieu, dans un premier temps, à raison de deux heures par semaine, dans les locaux de E______, en présence d'un tiers professionnel, puis, aussitôt que le curateur (cf. infra) estimera que la situation le permet, à raison de deux visites hebdomadaires de deux heures, au domicile du père, toujours en présence d'un tiers professionnel. Dans la mesure où les mesures provisionnelles n'ont pas vocation à durer, il n'y a pas lieu de réglementer, à ce stade, le droit de visite de l'appelant au-delà-de ce qui précède.
Une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles sera par ailleurs instaurée et le curateur sera chargé de mettre en place avec E______ le droit de visite selon les modalités décrites et d'accompagner l'évolution du droit de visite.
En attendant de pouvoir obtenir le soutien de E______, père et fille continueront de se voir selon les modalités mises en place depuis le 8 mai 2024.
Pour le reste, il n'y a pas lieu de statuer sur la garde, les parties ne remettant pas en cause leur accord sur ce point.
3. 3.1 Lorsque l'instance d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de première instance (art. 318 al. 3 CPC).
En l'espèce, le Tribunal a réservé le sort des frais de la décision querellée à la décision à rendre sur le fond, conformément à l'art. 104 al. 3 CPC. Ce point sera confirmé sans qu'il y ait lieu de statuer à nouveau sur les frais de première instance.
3.2 Les frais judiciaires d'appel seront fixés à 800 fr. (art. 96 CPC et art. 32 et 35 RTFMC) et mis à la charge des parents pour moitié chacun, compte tenu de la nature familiale du litige (art. 107 al. 1 let. c CPC).
Ceux-ci plaidant au bénéfice de l'assistance judiciaire, leur part sera provisoirement laissée à la charge de l'Etat de Genève, qui pourra en réclamer le remboursement ultérieurement (art. 122 al. 1 let. b et 123 al. 1 CPC; art. 19 RAJ)
Pour les mêmes motifs, chaque partie conservera à sa charge ses dépens d'appel.
* * * * *
La Chambre civile :
A la forme :
Déclare recevable l'appel interjeté le 7 novembre 2024 par A______ contre l'ordonnance OTPI/672/2024 rendue le 29 octobre 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/6608/2024.
Au fond :
Annule le chiffre 1 du dispositif de cette ordonnance et cela fait, statuant à nouveau :
Réserve à A______ un droit de visite sur sa fille C______ devant s'exercer à raison d'une visite hebdomadaire de deux heures dans les locaux de E______, en présence d'un intervenant, puis, aussitôt que le curateur estimera que la situation le permet, à raison de deux visites hebdomadaires de deux heures au domicile de A______, toujours en présence d'un intervenant de E______, étant précisé qu'en attendant de pouvoir obtenir le soutien de cet organisme, le droit de visite continuera de s'exercer selon les modalités convenues par transaction partielle du 8 mai 2024.
Instaure une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles et charge le curateur de mettre en place un service d'accompagnement spécifique du droit de visite avec E______ et de veiller à la bonne évolution du droit de visite pour procéder à son élargissement.
Transmet la présente décision au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant pour désignation du curateur.
Confirme l'ordonnance entreprise pour le surplus.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Sur les frais :
Arrête les frais judiciaires d'appel à 800 fr., les met à la charge de A______ et de D______ à raison d'une moitié chacun et dit qu'ils sont provisoirement supportés par l'Etat de Genève, sous réserve d'une décision contraire de l'assistance judiciaire.
Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.
Siégeant :
Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.
Le président : Laurent RIEBEN |
| La greffière : Sandra CARRIER |
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.