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Décisions | Chambre civile

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C/27422/2023

ACJC/1058/2024 du 30.08.2024 sur JTPI/5123/2024 ( SDF ) , MODIFIE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/27422/2023 ACJC/1058/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU VENDREDI 30 AOÛT 2024

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par la 13ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 25 avril 2024, représentée par Me Rachel DUC, avocate, Interdroit avocat-e-s Sàrl, boulevard de Saint-Georges 72, case postale, 1211 Genève 8,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé.

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/5123/2024 du 25 avril 2024, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a autorisé A______ et B______ à vivre séparés (ch. 1 du dispositif), attribué à A______ la jouissance exclusive du domicile conjugal (ch. 2) ainsi que la garde de l'enfant C______ (ch. 3), réservé à B______ un droit de visite sur l'enfant C______ devant s'exercer, sauf accord contraire entre les parties, tous les dimanches de 13h30 à 17h30 et tous les mercredis de 7h20 à 17h30 (ch. 4), condamné B______ à payer à A______, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, 700 fr. à titre de contribution à l'entretien de l'enfant C______ (ch. 5), prononcé la séparation de biens des parties (ch. 6), prononcé ces mesures pour une durée indéterminée (ch. 7), arrêté les frais judiciaires à 770 fr. et les a répartis à raison de la moitié à la charge de chacun des époux, la part de A______ étant provisoirement laissée à la charge de l'Etat, sous réserve d'une décision de l'Assistance juridique, condamné en conséquence B______ à payer à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire un montant de de 385 fr. (ch. 8), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 9) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 10).

B. a. Par acte expédié le 8 mai 2024 à la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a appelé de ce jugement, qu'elle a reçu le 29 avril 2024. Elle a conclu à l'annulation des chiffres 5 et 8 du dispositif de ce jugement et, cela fait, à ce que B______ soit condamné à lui verser, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, 834 fr. à titre de contribution à l'entretien de l'enfant C______, à ce que les frais judiciaires soient arrêtés à 650 fr., hors frais d'interprète, ces derniers, de 120 fr., devant être mis à la seule charge de B______, de sorte qu'il devait être condamné à verser 445 fr. à l'Etat de Genève au titre de frais judicaires de première instance.

Elle a préalablement conclu à ce que B______ soit condamné à produire les preuves de paiement de son loyer, son planning de travail pour les mois d'avril et mai 2024 et à communiquer son adresse actuelle.

b. Invité à se déterminer sur cet appel, B______ n'a pas répondu dans le délai qui lui a été imparti par la Cour.

c. Par avis du greffe de la Cour du 5 juillet 2024, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les éléments pertinents suivants résultent de la procédure :

a. A______, née le ______ 1985, et B______, né le ______ 1987, tous deux de nationalité mongolienne, se sont mariés le ______ 2022 à D______ (Genève).

Ils sont les parents de C______, née le ______ 2018, que B______ a reconnu le 31 janvier 2019.

b. Les parties vivent séparées depuis le 1er octobre 2023. A______ et l'enfant sont restés vivre au domicile conjugal.

c. Le 15 décembre 2023, A______ a formé une requête en mesures protectrices de l'union conjugale, assortie de mesures provisionnelles.

Sur mesures provisionnelles, elle a conclu à ce que son époux soit condamné à lui verser, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, 659 fr. à titre de contribution à l'entretien de l'enfant C______.

Au fond, elle a conclu, sous suite de frais et dépens, à ce que le Tribunal autorise les époux à vivre séparés, lui attribue la jouissance du domicile conjugal ainsi que la garde de C______, dise que le droit de visite de B______ sur l'enfant s'exercera tous les mercredis de 7h à 17h30, condamne B______ à verser en ses mains, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, à titre de contribution à l'entretien de C______, 659 fr. dès le 1er octobre 2023, 704 fr. dès que l'enfant aura atteint l'âge de 6 ans et 904 fr. dès qu'il aura atteint l'âge de 10 ans, avec indexation usuelle, dise que les frais extraordinaires, tels que les frais dentaires, optiques ou orthodontiques, seront partagés par moitié entre les parties, lui donne acte de ce qu'elle renonce à toute contribution à son propre entretien dans la mesure où B______ en fera de même et ordonne la séparation de biens.

d. Lors de l'audience du 27 février 2024, A______ a persisté dans ses conclusions, sous réserve du droit de visite, dont elle a expliqué qu'elle l'avait suspendu de son propre chef et souhaitait qu'il le restât tant que B______ ne se soumettrait pas à des tests attestant qu'il ne consomme pas de drogue.

B______, comparant en personne, a indiqué ne pas bien comprendre le français et avait pensé qu'il y aurait un interprète. L'audience s'est toutefois tenue, A______ ayant fait office d'interprète par moments.

B______ a déclaré ne pas s'opposer au principe de la séparation ni au fait que la jouissance du domicile conjugal ainsi que la garde de C______ soient attribuées à son épouse. Il lui était arrivé de prendre de la drogue mais il n'en prenait plus. Il séjournait gratuitement chez des amis mais il lui était difficile d'être tout le temps dehors.

Les parties se sont mises d'accord pour que dans un premier temps, B______ bénéficie d'un droit de visite sur C______, lequel se déroulerait au Point Rencontre, selon la modalité "Passages". De plus, B______ s'est engagé à verser un montant mensuel de 500 fr. pour l'entretien de C______.

e. Ainsi, par ordonnance du 27 février 2024 rendue sur le siège, le Tribunal, statuant sur mesures provisionnelles, a attribué à A______ la garde de l'enfant C______, réservé à B______ un droit de visite sur l'enfant, devant s'exercer tous les dimanches, de 13h30 à 17h30 au Point Rencontre, selon la modalité "Passages", et donné acte à B______ de son engagement à verser, par mois et d'avance, dès le 1er mars 2024, allocations familiales non comprises, 500 fr. à titre de contribution à l'entretien de C______, l'y condamnant en tant que de besoin.

f. Lors de l'audience du 25 mars 2024, A______ a persisté dans ses conclusions, sous réserve de celles concernant le droit de visite, concluant à ce que celui-ci s'exerce tous les dimanches de 13h30 à 17h30 et tous les mercredis de 7h20 à 17h30, et à ce que la contribution à l'entretien de C______ soit fixée à 1'024 fr. dès le 1er octobre 2023, 1'078 fr. dès l'âge de 6 ans et 1'318 fr. dès l'âge de 10 ans et jusqu'à l'âge de 25 ans en cas d'études sérieuses et régulières.

B______ a acquiescé à toutes les conclusions de son épouse, hormis celle en lien avec la contribution due à l'entretien de C______, réitérant son engagement à verser 500 fr. par mois. Il a indiqué avoir modifié ses horaires de travail pour pouvoir s'occuper de l'enfant le mercredi, jour où la mère était en formation. Il a déclaré louer pour une période de deux mois une chambre de 9 m2 pour un loyer de 1'000 fr. par mois, versé en argent liquide. Il ne pouvait pas cuisiner de sorte qu'il mangeait au travail ou à l'extérieur. Il désirait un logement où recevoir sa fille et effectuait des recherches de logements subventionnés. Il n'avait pas changé officiellement d'adresse, car il ne pouvait pas rester dans cette chambre, de sorte que l'adresse du domicile conjugal étant encore la sienne. Il avait fait une demande pour une poste restante. Il avait besoin de sa voiture pour travailler car il terminait son service à 2h du matin. Son emploi était situé au quai G______ et il habitait aux [quartier] H______.

g. Dans la décision querellée, compte tenu des revenus des parties, le Tribunal s'est basé sur le minimum vital du droit des poursuites pour établir les charges des parties, faisant ainsi abstraction des primes d'assurance-maladie complémentaires. Il a retenu que les charges de l'enfant C______ s'élevaient à 545 fr. par mois, arrondi à 550 fr., comprenant le 20% du loyer de sa mère (237 fr. 80), la prime d'assurance-maladie de base subside déduit (5 fr. 50), les frais médicaux non couverts (28 fr. 90), les frais de restaurant scolaire (90 fr.), les frais parascolaires (93 fr. 75) et l'entretien de base selon les normes OP (400 fr.), sous déduction des allocations familiales (311 fr.). Il n'y avait pas lieu de tenir compte des frais de cours de natation et de chant qui devaient être financés par l'excédent et ne faisaient pas partie des charges incompressibles.

A______ était en troisième année d'apprentissage d'employée de commerce à F______ et percevait un salaire d'environ 3'200 fr. par mois. Ses charges mensuelles étaient de 2'557 fr. 35, comprenant le 80% du loyer (951 fr. 20), la prime d'assurance-maladie de base subside déduit (127 fr. 55), les frais médicaux non couverts (33 fr. 35) les frais d'assurance RC/ménage (25 fr. 05), les frais de transport (70 fr.) et l'entretien de base selon les normes OP (1'350 fr.). Son disponible était ainsi de 642 fr. 70 par mois, arrondi à 600 fr.

B______ travaillait comme cuisinier à l'Hôtel E______ pour un salaire de quelques 3'900 fr. par mois. Ses charges mensuelles étaient de 2'943 fr. 10, comprenant un loyer (1'000 fr.), la prime d'assurance-maladie subside déduit (282 fr. 15), les prime d'assurance RC/ménage (14 fr. 85), les frais de leasing, compte tenu de ses horaires de travail (446 fr. 10), et l'entretien de base selon les normes OP (1'200 fr.). Le premier juge a considéré que le montant de 1'000 fr. de loyer allégué, bien que non prouvé, devait être retenu s'agissant d'un montant raisonnable pour un logement. Son disponible était ainsi de 956 fr. 90 par mois, arrondi à 900 fr. Le Tribunal a condamné B______ à verser 700 fr. à titre de contribution à l'entretien de l'enfant.

Le Tribunal a arrêté les frais judiciaires à 770 fr., comprenant les frais de l'ordonnance sur mesures provisionnelles (150 fr.), les frais d'interprète (120 fr.) ainsi que l'émolument de décision de 500 fr., qu'il a répartis par moitié entre les parties s'agissant d'un litige du droit de la famille.

h. La situation financière des parties est la suivante (tous les montants sont arrondis) :

ha. B______ travaille comme cuisiner à l'Hôtel E______ à Genève. En 2023, il a réalisé à ce titre un salaire annuel net de 47'570 fr., soit 3'964 fr. par mois en moyenne.

hb. En 2024, ses primes d'assurance-maladie de base et complémentaires étaient respectivement de 532 fr. et de 20 fr., dont à déduire 250 fr. de subside cantonal.

Le coût de son abonnement téléphonique s'élève à 72 fr. par mois.

hc. A______ est en troisième année d'apprentissage d'employée de commerce à l'Etat de Genève et perçoit à ce titre un salaire mensuel net de 3'221 fr.

hd. En 2024, ses primes d'assurance-maladie de base et complémentaires étaient respectivement de 532 fr. et de 20 fr., dont à déduire un subside de 250 fr. par mois.

Sa prime d'assurance RC/ménage s'est élevée à 301 fr. entre novembre 2023 et octobre 2024, compte tenu d'une réduction de prime de 71 fr. résultant d'un fonds d'excédents.

Ses frais de téléphonie s'élèvent, réseau fixe, internet et mobile, à 126 fr. par mois.

he. En 2024, les primes d'assurance-maladie de base et complémentaires de l'enfant étaient respectivement de 128 fr. et 27 fr., dont à déduire un subside cantonal de 112 fr. par mois.

En 2023-2024, l'enfant prenait des cours de natation (495 fr. par année) et prévoyait de s'inscrire à des cours de chant à la rentrée 2024-2025.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les jugements de mesures protectrices, qui doivent être considérés comme des décisions provisionnelles au sens de l'art. 308 al. 1 let. b CPC (ATF 137 III 475 consid. 4.1), dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Savoir si l’affaire est de nature patrimoniale dépend des conclusions de l’appel. Si tel est le cas, la valeur décisive pour l’appel est celle des conclusions qui étaient litigieuses immédiatement avant la communication de la décision attaquée (arrêt du Tribunal fédéral 5D_13/2017 du 4 décembre 2017 consid. 5.2; Tappy, Commentaire romand, CPC, 2019, n. 64 ad art. 91 CPC; Baston Bulletti, Petit commentaire, CPC, 2020, n. 6 ad art. 308 CPC).

En l'espèce, compte tenu du montant de la contribution d'entretien contestée devant la Cour, de 1'024 fr. par mois, la valeur litigieuse de 10'000 fr. est atteinte (art. 92 al. 2 CPC), de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.2 Déposé en temps utile et dans la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 314 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

2. La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC).

Les mesures protectrices étant soumises à la procédure sommaire (art. 248 let. d CPC), la cognition du juge est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb, in JdT 2002 I 352; arrêt du Tribunal fédéral 5A_392/2014 du 20 août 2014 consid. 1.5).

La présente cause est soumise aux maximes d'office et inquisitoire illimitée en tant qu'elle concerne l'enfant mineur des parties (art. 277 al. 3 et 296 al. 1 et al. 3 CPC), de sorte que la Cour n'est liée ni par les conclusions des parties sur ce point (art. 296 al. 3 CPC) ni par l'interdiction de la reformatio in pejus (ATF 129 III 417 consid. 2.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_843/2018 du 12 février 2020 consid. 5.2).

3. L'appelante réclame la production par l'intimé de ses plannings de travail pour les mois d'avril et mai 2024 et la preuve du paiement d'un loyer, en vue de prouver la capacité contributive de l'intimé.

3.1 Conformément à l'art. 316 al. 3 CPC, l'instance d'appel peut librement décider d'administrer des preuves. Le juge peut, par une appréciation anticipée des preuves déjà disponibles, refuser d'administrer une preuve supplémentaire offerte par une partie s'il considère que celle-ci serait impropre à ébranler sa conviction (ATF 141 I 60 consid. 3.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_82/2022 du 26 avril 2022 consid. 5.1 et les références citées).

3.2 En l'espèce, l'intimé a produit son certificat de salaire annuel pour l'année 2023 de sorte que la Cour s'estime suffisamment renseignée sur ses revenus, étant relevé qu'il n'a pas changé d'emploi depuis lors et qu'il n'est pas allégué qu'il aurait modifié son temps de travail.

Par ailleurs, la non-production – prévisible – de la preuve du paiement du loyer par l'intimé, qui s'en acquitte en argent liquide, ne permettrait en l’état pas de modifier significativement l'appréciation qui sera faite par la Cour de la situation financière de l'intimé (cf. consid. 4.2.2 ci-dessous).

Par conséquent, les conclusions préalables de l'appelante seront rejetées, la cause étant en état d'être jugée.

4. L'appelante critique le montant de la contribution d'entretien mise à la charge de l'intimé pour l'enfant. Elle reproche au Tribunal d'avoir mal établi la situation financière des parties et de ne pas avoir attribué un montant suffisant à l'enfant au titre de la participation à l'excédent de l'intimé.

4.1.1 Selon l'art. 276 CC, auquel renvoie l'art. 176 al. 3 CC, l'entretien des enfants est assuré par les soins, l'éducation et des prestations pécuniaires (al. 1). Les père et mère contribuent ensemble, chacun selon ses facultés, à l'entretien convenable de l'enfant et assument en particulier les frais de sa prise en charge, de son éducation, de sa formation et des mesures prises pour le protéger (al. 2).

La contribution d'entretien due à l'enfant doit correspondre aux besoins de celui-ci ainsi qu'à la situation et aux ressources des père et mère, compte tenu de la fortune et des revenus de l'enfant (art. 285 al. 1 CC).

4.1.2 Le Tribunal fédéral a posé, pour toute la Suisse, une méthode de calcul uniforme des contributions d'entretien du droit de la famille, soit la méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent, dite en deux étapes (ATF
147 III 265 in SJ 2021 I 316; 147 III 293 et 147 III 301).

Selon cette méthode, les ressources financières et les besoins des personnes concernées sont déterminés puis répartis entre les membres de la famille de manière à couvrir, dans un certain ordre, le minimum vital du droit des poursuites ou, si les ressources sont suffisantes, le minimum vital élargi du droit de la famille, puis l'excédent éventuel (ATF 147 III 265 consid. 7; 147 III 293 consid. 4).

Dans tous les cas, le minimum vital du débirentier doit être préservé (ATF
141 III 401 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_455/2019 du 23 juin 2020 consid. 5.4.2).

4.1.3 Les besoins des parties sont calculés en prenant pour point de départ les lignes directrices pour le calcul du minimum vital du droit des poursuites selon l'art. 93 LP, en y dérogeant s’agissant du loyer, une participation aux frais de logement du parent gardien devant être attribuée à chaque enfant (20% pour un enfant, cf. Burgat, Entretien de l'enfant, des précisions bienvenues : une méthode (presque) complète et obligatoire pour toute la Suisse; analyse de l'arrêt du Tribunal fédéral 5A_311/2019, Newsletter DroitMatrimonial.ch janvier 2021, p. 15).

Lorsque les moyens financiers le permettent, l'entretien convenable doit être étendu au minimum vital du droit de la famille. Pour les parents, les postes suivants entrent notamment en considération : les impôts, les forfaits de télécommunication, les assurances, les frais de logement correspondant à la situation (plutôt que fondés sur le minimum d'existence) et les primes d'assurance-maladie complémentaires. Chez l'enfant, le minimum vital du droit de la famille comprend une part des impôts, une part au logement du parent gardien et les primes d'assurance-maladie complémentaire. En revanche, le fait de multiplier le montant de base ou de prendre en compte des postes supplémentaires comme les voyages ou les loisirs n'est pas admissible. Ces besoins doivent être financés au moyen de la répartition de l'excédent. Toutes les autres particularités devront également être appréciées au moment de la répartition de l'excédent (ATF
147 III 265 consid. 7.2).

Seules les charges effectives, à savoir celles qui sont réellement acquittées, peuvent être incluses pour le calcul de la contribution d'entretien (ATF 140 III 337 consid. 4.2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_378/2021 du 7 septembre 2022 consid. 7; 5A_717/2019 du 20 avril 2020 consid. 3.1.2.2). Dans certaines situations, il est possible de prendre en compte une charge hypothétique, telle un loyer (arrêts du Tribunal fédéral 5A_405/2019 précité consid. 5.3; 5A_845/2012 du 2 octobre 2013 consid. 3.1.3; .De Weck-Immelé, in Commentaire pratique, Droit matrimonial, 2016, n. 97 ad art. 176 CC). 

4.1.4 Le partage d'un éventuel disponible aux fins de couvrir les postes de charges consacrés aux loisirs et aux vacances n'est envisageable qu'après couverture des minimas vitaux élargis des membres de la famille (ATF 147 III 265 consid. 7.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_257/2023 du 4 décembre 2023 consid. 5.2.1 ; consid. 8 ; 5A_174/2023 du 16 août 2023 consid. 8 ; 5A_378/2021 du 7 septembre 2022 consid. 6.2).

4.1.5 Le parent qui ne prend pas en charge l'enfant ou qui ne s'en occupe que très partiellement doit, en principe, subvenir à son entretien financier (ATF
147 III 265 consid. 5.5 et 8.1; arrêt 5A_117/2021 du 9 mars 2022 consid. 4.2 et l'autre référence, publié in FamPra.ch 2022 p. 1031).

4.2.1 En l'espèce, les parties ne remettent pas en cause l'application de la méthode dite du minimum vital avec répartition de l'excédent appliquée par le Tribunal, de sorte que la Cour en fera de même.

Cela dit, c'est à tort que le premier juge a procédé à un partage de l'excédent sans avoir préalablement tenu compte des charges élargies des parties (minimum vital du droit de la famille), notamment de leurs primes d'assurance-maladie complémentaire. Par conséquent, il y a lieu non seulement de prendre en compte les primes d'assurance RC/ménage, mais également les primes d'assurance-maladie complémentaire, des acomptes d'impôts et d'un forfait télécommunication pour chacune des parties.

4.2.2 Compte tenu de ce qui précède, les charges mensuelles de l'enfant s'élèvent à 572 fr., comprenant le 20% du loyer de sa mère (237 fr. 80), la prime d'assurance-maladie de base subside déduit (5 fr. 50), la prime d'assurance-maladie complémentaire (27 fr.), les frais médicaux non couverts (28 fr. 90), les frais de restaurant scolaire (90 fr.), les frais parascolaires (93 fr. 75) et l'entretien de base selon les normes OP (400 fr.), sous déduction des allocations familiales (311 fr.).

4.2.3 A juste titre le premier juge s'est fondé sur le relevé annuel de salaire de l'intimé pour déterminer son revenu mensuel net moyen. L'appelante n'a pas remis ce montant en cause en appel, même si elle a sollicité la production de pièces nouvelles à cet égard.

C'est également de manière fondée que le Tribunal a considéré qu'un montant de 1'000 fr. par mois pouvait être admis au titre des frais de logement pour l'intimé. En effet, depuis son départ du domicile conjugal, l'intimé ne s'est pas constitué de nouveau domicile. Il a d'abord été hébergé par des amis et loue depuis quelques semaines une chambre dans un appartement, de sorte qu'il ne peut pas cuisiner ni recevoir sa fille. Or, l'intimé est en droit de bénéficier des mêmes conditions de vie que l'appelante, à savoir un logement qui lui est propre. Par conséquent, même si l'intimé n'a pas prouvé s'acquitter actuellement d'un loyer de 1'000 fr. par mois, ce montant doit être admis au titre de futur loyer pour l'intimé. De même, si l'intimé n'a pas indiqué où se situait son logement actuel et quels étaient ses horaires de travail, il est vraisemblable, vu son activité de cuisiner dans un hôtel de luxe au centre de Genève, qu'il termine son activité après minuit. Compte tenu de la raréfaction des bus à ces heures, il serait excessif d'exiger de lui qu'il les emprunte pour rentrer chez lui. Par conséquent, les frais de leasing seront admis. Enfin, comme déjà indiqué, il y a lieu de tenir compte de l'assurance RC/ménage, de la prime d'assurance-maladie complémentaire, des acomptes d'impôts et d'un forfait télécommunication dans le minimum du droit de la famille de l'intimé.

Les charges mensuelles de l'intimé s'élèvent ainsi à 3'285 fr., comprenant un montant raisonnable pour son futur loyer (1'000 fr.), la prime d'assurance-maladie de base subside déduit (282 fr.), la prime d'assurance-maladie complémentaire (20 fr.), la prime d'assurance RC/ménage (15 fr.), les frais de transport (446 fr.), les acomptes d'impôts (250 fr., compte tenu de la contribution d'entretien fixée ci-après), un forfait téléphonie/internet (72 fr.) et l'entretien de base selon les normes OP (1'200 fr.).

Son solde mensuel est ainsi de 679 fr. (3'964 fr. – 3'285 fr.).

4.2.4 Il n'est pas contesté en appel que le revenu mensuel net de l'appelante est de 3'221 fr.

L'appelante relève à juste titre que le premier juge a commis une erreur dans la fixation de sa prime d'assurance-maladie de base et il peut être admis que sa prime d'assurance RC/ménage est supérieure puisqu'elle ne bénéficiera peut-être pas de réduction exceptionnelle à l'avenir. Comme pour l'intimé, il doit être tenu compte pour l'appelante non seulement de la prime de l'assurance RC/ménage mais également de la prime d'assurance-maladie complémentaire et d'un forfait télécommunication.

Les charges mensuelles de l'appelante s'élèvent ainsi à 2'863 fr., comprenant le 80% du loyer (951 fr. 20), la prime d'assurance-maladie de base subside déduit (282 fr. 50), la prime d'assurance-maladie complémentaire (20 fr.), les frais médicaux non couverts (33 fr. 35) les frais d'assurance RC/ménage (30 fr.), les frais de transport (70 fr.), un forfait téléphonie/internet (126 fr.) et l'entretien de base selon les normes OP (1'350 fr.), étant relevé que ses impôts se limiteront à la taxe personnelle.

Son solde mensuel est ainsi de 358 fr. (3'221 fr. - 2'863 fr.).

4.2.5 La garde de l'enfant ayant été attribuée à sa mère, celle-ci assume les soins de l'enfant en nature, de sorte que c'est à raison que le premier juge a retenu que l'intégralité des coûts de l'enfant devait être mise à la charge de l'intimé.

Après couverture de ses propres frais courants et ceux de l'enfant, l'intimé bénéficie d'un excédent mensuel de 107 fr. (3'964 fr. – 3'285 fr. – 572 fr.). Partagé à raison de 1/3 pour l'enfant et de 2/3 pour l'intimé, l'enfant peut ainsi prétendre à une participation à l'excédent de son père de 36 fr. (1/3 de 107 fr.) et ainsi à une contribution à son entretien de 608 fr. (572 fr. + 36 fr.). L'appelante bénéficie d'un disponible mensuel de 358 fr., qui augmentera une fois ses études achevées, lui permettant de couvrir le solde des frais de loisirs de l'enfant, ces derniers étant pour l'heure de 41 fr. par mois.

Par conséquent, le chiffre 5 du dispositif du jugement sera annulé et le montant de la contribution à l'entretien de l'enfant sera fixé à 600 fr. par mois, étant relevé que l'intimé prend en charge l'enfant un jour et demi par semaine et que les revenus de l'appelante augmenteront une fois sa formation achevée.

5. L'appelante reproche au Tribunal d'avoir inclus 120 fr. de frais d'interprète dans les frais judiciaires. Elle considère que l'intimé devrait parler français dès lors qu'il réside en Suisse depuis plusieurs années.

5.1 Les frais judiciaires comprennent notamment les frais de traduction (art. 95 al. 2 let. d CPC).

Le droit d'être entendu garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. comprend celui d'être assisté d'un interprète durant les débats oraux en cas de connaissances insuffisantes de la langue officielle utilisée devant le tribunal (arrêt du Tribunal fédéral 5A_639/2014 du 8 septembre 2015 consid. 4..2).

Les frais sont mis à la charge de la partie succombante (art. 106 al. 1 CPC). Le tribunal peut s’écarter des règles générales et répartir les frais selon sa libre appréciation notamment lorsque le litige relève du droit de la famille (art. 107 al. 1 let. c CPC).

5.2 En l'espèce, l'appelante ne nie pas que l'intimé ne maîtrise pas suffisamment la langue française pour agir seul devant le Tribunal. Preuve en est que l'appelante a fait office d'interprète pour l'intimé lors de la première audience. L'intimé n'a donc pas abusé de son droit en sollicitant la présence d'un interprète lors de la deuxième audience, étant relevé qu'il agissait en personne. On ne saurait mettre à la charge de l'intimé les frais d'interprète au motif qu'il aurait dû apprendre la langue française car il ne pouvait pas anticiper le fait qu'il devrait agir devant un tribunal.

Par conséquent, le jugement querellé sera confirmé en tant qu'il intègre les frais d'interprète dans les frais judiciaires de première instance et partage par moitié les frais judiciaires s'agissant d'une affaire familiale où aucune des parties n'a obtenu entièrement gain de cause.

La modification du jugement entrepris ne commande, par ailleurs, pas de revoir la répartition effectuée par le premier juge. Le montant et la répartition des frais de première instance seront par conséquent confirmés.

6. Les frais judiciaires de la procédure d'appel seront fixés à 800 fr. (art. 31 et 37 RTFMC) et mis à la charge des parties par moitié chacune (art. 107 al. 1 let. c CPC).

Dans la mesure où l'appelante plaide au bénéfice de l'assistance judiciaire, ses frais judiciaires seront provisoirement supportés par l'Etat de Genève (art. 122 al. 1 let. b CPC), étant rappelé que les bénéficiaires de l'assistance judiciaire sont tenus au remboursement des frais judiciaires mis à la charge de l'Etat dans la mesure de l'art. 123 CPC (art. 19 RAJ).

L'intimé sera condamné à verser 400 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Compte tenu de la nature familiale du litige, chaque partie supportera ses propres dépens d'appel (art. 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 8 mai 2024 par A______ contre le jugement JTPI/5123/2024 rendu le 25 avril 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/27422/2023.

Au fond :

Annule le chiffre 5 du dispositif de ce jugement et, statuant à nouveau sur ce point :

Condamne B______ à payer à A______, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, 600 fr. à titre de contribution à l'entretien de l'enfant C______.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 800 fr., et les met à la charge de A______ et de B______ par moitié chacun.

Dit que les frais judiciaires à la charge de A______ sont provisoirement supportés par l'Etat de Genève, sous réserve d'une décision de l'assistance judiciaire.

Condamne B______ à verser 400 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Pauline ERARD, Monsieur
Cédric-Laurent MICHEL, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.