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Décisions | Sommaires

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C/485/2024

ACJC/1299/2024 du 15.10.2024 sur JTPI/9161/2024 ( SML ) , CONFIRME

Normes : LP.80
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/485/2024 ACJC/1299/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU JEUDI 17 OCTOBRE 2024

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, recourant contre un jugement rendu par la 7ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 23 juillet 2024, représentée par Me Reza VAFADAR, avocat, VZ Lawyers, rue Charles-Bonnet 2,
1206 Genève,

et

Madame B______, domiciliée ______, intimée, représentée par Me Sonia RYSER, avocate, Locca Pion & Ryser, promenade du Pin 1, case postale, 1211 Genève 3.

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/9161/2024 du 23 juillet 2024, reçu par les parties le 5 août 2024, le Tribunal de première instance a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée par A______ au commandement de payer, poursuite n° 1______, pour les chiffres 1, 2 et 4 (ch. 1 du dispositif), l'a condamné à payer à B______ 500 fr. au titre des frais judiciaires (ch. 2 et 3) et 1'000 fr. au titre des dépens (ch. 4).

B. a. Le 15 août 2024, A______ a formé recours contre ce jugement, concluant à ce que la Cour de justice l'annule et déboute B______ de toutes ses conclusions, avec suite de frais et dépens.

Il a produit des pièces nouvelles.

b. Le 29 août 2024, B______ a conclu à ce que la Cour confirme le jugement querellé, avec suite de frais et dépens.

c. Les parties ont été informées le 18 septembre 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier.

a. B______ et A______ se sont mariés le ______ 2003.

Quatre enfants sont issus de cette union, à savoir C______, né le ______ 2005, D______, née le ______ 2007, E______ née le ______ 2008 et F______ née le ______ 2014.

b. Par jugement JTPI/10113/2023 du 11 septembre 2023, le Tribunal, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a notamment condamné A______ à verser à B______, les sommes suivantes :

- dès le 1er juillet 2023, 2'000 fr. par enfant âgé de moins de 10 ans, 2'300 fr par enfant âgé de plus de 10 ans et 3'000 fr. dès le 1er octobre 2024 à titre de contribution à leur entretien, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises (ch. 9 du dispositif);

- 7'100 fr. pour l'entretien de B______ du 1er juillet 2023 au 30 septembre 2024, par mois et d'avance (ch. 10);

- 38'475 fr. au titre d'arriéré de contributions dues pour l'entretien de B______ au 30 juin 2023 (ch. 11).

Ce jugement est exécutoire, à l'exception de son chiffre 11, qui a fait l'objet d'un appel auquel l'effet suspensif a été accordé.

c. Le 19 octobre 2023, B______ a obtenu le séquestre des avoirs de son époux, pour sa créance de 104'875 fr. au titre des contributions d'entretien prévues par le jugement précité.

d. Le 18 décembre 2023, B______ a fait notifier à A______ un commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur 38'500 fr. au titre de contribution à l'entretien des enfants de juillet à novembre 2023, soit 44'500 fr. (2'300 fr. + 2'300 fr. + 2'300 fr. + 2'000 fr. x 5) sous déduction de 6'000 fr. versés (poste 1), 35'500 fr. au titre de contribution à son propre entretien de juillet à novembre 2023 (7'100 fr. x 5) (poste 2), 38'475 fr. au titre d'arriérés de contributions d'entretien au 30 juin 2023 (poste 3) et 8'000 fr. au titre d'allocations familiales (poste 4).

A______ a formé opposition à ce commandement de payer.

e. Le 12 janvier 2024, B______ a requis du Tribunal la mainlevée définitive de cette opposition.

f. Lors de l'audience du Tribunal du 6 mai 2024, A______ a fait valoir que les montants figurant dans le commandement de payer étaient inexacts. Il a produit deux pièces, à savoir une attestation indiquant le montant des allocations familiales qu'il avait perçues et un tableau établi par ses soins récapitulant les dépenses faites pour l'entretien de sa famille.

Il ressort de ce tableau qu'il s'est acquitté de diverses dépenses en faveur de ses enfants entre juillet 2023 et avril 2024 au titre de courses alimentaires, activités de loisirs, frais de téléphone et argent de poche, pour un montant total de 6'636 fr. Il avait en outre opéré des versements en 38'150 fr. à son épouse pour la même période, dont 6'000 fr. avant le 31 octobre 2023.

B______, représentée par son avocate, a persisté dans sa requête.

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

EN DROIT

1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a et 309 let. b ch. 3 CPC). La procédure sommaire est applicable (art. 251 let. a CPC).

Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée, pour les décisions prises en procédure sommaire (art. 251 let. a CPC).

Le recours a été formé dans le délai et la forme prévus par la loi, de sorte qu'il est recevable.

1.2 Le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC). L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par le recourant (Hohl/De Poret Bortolaso/Aguet, Procédure civile, Tome II, 2ème édition, Berne, 2010, n. 2307).

Par ailleurs, la maxime des débats s'applique et la preuve des faits allégués doit être apportée par titre (art. 55 al. 1, 255 let. a a contrario et 254 CPC). En outre, la maxime de disposition s'applique, de sorte que le tribunal ne peut accorder à une partie plus que ce qui est demandé (art. 58 al. 1 CPC).

2. Le recourant a produit à l'appui de son recours des pièces nouvelles déposées par ses soins et par ceux de l'intimée, en mai et juillet 2024, dans une autre procédure C/11071/2024 opposant les mêmes parties. Il fait valoir que ces pièces sont recevables, en dépit du fait que les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours (art. 326 al. 1 CPC), car il s'agit de faits notoires.

La question de la recevabilité de ces pièces peut rester ouverte car, comme cela ressort des considérants qui suivent, elles ne sont pas pertinentes pour l'issue du litige.

3. Le Tribunal a retenu que le recourant avait produit un décompte personnel de ses dépenses de juillet 2023 à février 2024 mais que cela ne suffisait pas à démontrer qu'il s'était acquitté des montants figurant dans le commandement de payer.

Le recourant fait valoir que cette motivation n'est pas suffisante de sorte que son droit d'être entendu a été violé. Il ajoute que l'intimée n'a pas contesté ses allégués ni le tableau produit.

3.1 Le droit d'être entendu, en tant que droit personnel de participer à la procédure, exige que l’autorité écoute effectivement, puis examine soigneusement et sérieusement, et prenne en compte dans sa décision, les arguments de la personne dont la décision touche la position juridique. Il implique l'obligation, pour l'autorité, de motiver sa décisionafin que son destinataire puisse la comprendre et l'attaquer utilement s'il y a lieu. Le juge n'a en revanche pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties; il suffit qu'il mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause ATF 142 III 433 consid. 4.3.2, JdT 2016 II 347; 129 I 232 consid. 3.2, JdT 2004 I 588, SJ 2003 I 513; arrêt du Tribunal fédéral 4A_523/2010 du 22 novembre 2010 consid. 5.3).

Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée. La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision. En revanche, une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (arrêt du Tribunal fédéral 5A_111/2015 du 20 octobre 2015 consid. 3.1).

3.2 En l'espèce, le droit d'être entendu du recourant n'a pas été violé. On comprend en effet clairement à la lecture du jugement querellé que le Tribunal a estimé que le tableau confectionné par le recourant n'établissait pas que les montants qui y figuraient avaient été versés à l'intimée.

En outre, il ne ressort pas du procès-verbal de l'audience devant le Tribunal que l'intimée aurait reconnu que les montants en question avaient été effectivement versés. L'avocate de la requérante a au contraire indiqué qu'elle persistait dans sa requête.

Le grief du recourant n'est dès lors pas fondé.

4. Le Tribunal a retenu que le jugement de mesures protectrices du 11 septembre 2023 était un titre de mainlevée définitive puisqu'il était exécutoire, à l'exception du chiffre 11 de son dispositif. Le recourant n'avait pas démontré par pièces que les montants figurant dans le commandement de payer étaient erronés. Il n'avait pas non plus établi qu'il s'était acquitté des contributions d'entretien et allocations familiales visées dans le jugement et la poursuite.

Le recourant fait valoir que les montants qu'il a versés à l'intimée entre le 2 novembre 23 et le 25 avril 2024, à savoir 32'150 fr. et les dépenses faites en faveur de ses enfants en 6'636 fr., doivent être imputés sur sa dette d'entretien pour la période de juillet à novembre 2023. Il avait en outre versé, postérieurement à l'audience de mainlevée, 45'137 fr. à son épouse, ce qui résultait des pièces nouvelles produites devant la Cour.

L'intimée a pour sa part indiqué qu'elle admettait avoir reçu les versements figurant sur le tableau produit par le recourant, mais que ceux-ci avaient été faits après le 31 octobre 2023 et ne concernaient pas les contributions dues pour juillet à novembre 2023, puisque la contribution était due par mois et d'avance, mais les contributions courantes. Le montant de 6'636 fr. n'avait pas été versé en ses mains et ne concernait pas la période visée par le commandement de payer, de sorte qu'il n'éteignait pas sa créance.

4.1 Le créancier qui est au bénéfice d'un jugement exécutoire peut requérir du juge la mainlevée définitive de l'opposition (art. 80 al. 1 LP). Dans ce cas, le juge ordonne la mainlevée définitive de l’opposition, à moins que l’opposant ne prouve par titre que la dette a été éteinte ou qu’il a obtenu un sursis, postérieurement au jugement, ou qu’il ne se prévale de la prescription (art. 81 al. 1 LP).

Dans la procédure de mainlevée définitive, les moyens de défense du débiteur sont fortement limités (art. 81 LP); un titre à la mainlevée définitive ne peut être remis en cause qu'au moyen de pièces totalement univoques (ATF 140 III 372 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_703/2019 du 27 avril 2020 consid. 4.1). Le titre de mainlevée au sens de l'art. 81 al. 1 LP créant la présomption que la dette existe, cette présomption ne peut être renversée que par la preuve stricte du contraire (ATF 136 III 624 consid. 4.2.1; 125 III 42 consid. 2b; 124 III 501 consid. 3a et les références; 115 III 97 consid. 4). Ainsi, le tribunal de la mainlevée n'a pas à trancher les questions de droit matériel délicates ou pour la solution desquelles le pouvoir d'appréciation joue un rôle important, dont la connaissance ressort exclusivement au juge du fond (ATF 124 III 501 consid. 3a; 113 III consid. 1b).

Il appartient au poursuivi d'établir non seulement par titre la cause de l'extinction, mais aussi le montant exact à concurrence duquel la dette est éteinte. Il n'incombe ni au juge de la mainlevée ni au créancier d'établir cette somme (ATF 124 III 501 consid. 3b; arrêt du Tribunal fédéral 5A_49/2020 précité consid. 4.1 et les références citées).

4.2 En l'espèce, il n'est pas contesté que le jugement du 11 septembre 2023 constitue un titre de mainlevée définitive de l'opposition pour les contribution d'entretien dues pour la période de juillet à novembre 2023 et pour les allocations familiales, créances mentionnées sur les postes 1, 2 et 4 du commandement de payer.

Le Tribunal a constaté à juste titre que le recourant n'avait pas établi par titre lors de l'audience de mainlevée que la dette était éteinte, ni a fortiori, à concurrence de quel montant exactement.

Le jugement du 11 septembre 2023 prévoit que les contributions sont dues en mains de l'intimée, de sorte que les montants dépensés par le recourant pour payer de la nourriture et des loisirs, voire l'argent de poche qu'il a directement versé à ses enfants, n'éteignent pas sa dette.

Il n'a pas produit de titre probant étayant ses allégations, mais s'est limité à fournir un tableau établi par ses soins, qui n'a qu'une valeur d'allégué. Il n'a pas non plus démontré que les versements dont il fait état étaient destinés à éteindre l'arriéré et non à assurer le paiement des contributions courantes. En particulier, il ne démontre pas avoir indiqué, au moment des paiements dont il se prévaut, quelle dette ceux-ci étaient supposés éteindre (art. 86 CO).

A supposer qu'elles soient recevables, les pièces nouvelles produites par le recourant devant la Cour n'étayent nullement sa thèse. Les documents produits sous pièce 4, dont on ignore de quoi il s'agit et d'où ils proviennent, font état de différents versements sans mention particulière, dont on ne sait pas s'ils ont été faits en 2023 ou 2024. En ce qui concerne la pièce 5, à savoir deux versements à l'intimée datés du 22 mai 2024, l'un ne comporte aucune indication et l'autre concerne le "remboursement" de frais hypothécaires et amortissements, dépenses qui ne sauraient être imputées sur les contributions d'entretien dues pour la période de juillet à novembre 2023.

Le recours sera dès lors rejeté.

5. Le recourant, qui succombe, sera condamné aux frais et dépens de la procédure de recours (art. 106 CPC).

Les frais judiciaires seront arrêtés à 950 fr. et compensés avec l'avance du même montant versée par le recourant, acquise à l'Etat de Genève (art. 48 et 61 OELP; 111 CPC).

Une indemnité de 1'000 fr. sera allouée à l'intimée au titre de dépens, débours et TVA inclus (art. 84, 85, 88, 89 et 90 RTFMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 15 août 2024 par A______ contre le jugement JTPI/9161/2024 rendu le 23 juillet 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/485/2024–7 SML.

Au fond :

Rejette ce recours.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Met à la charge de A______ les frais judiciaires de recours, arrêtés à 950 fr. et compensés avec l'avance versée, acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à B______ 1'000 fr. à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Laura SESSA, greffière.

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Laura SESSA

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.