Skip to main content

Décisions | Sommaires

1 resultats
C/13694/2022

ACJC/1437/2022 du 26.10.2022 sur JTPI/9833/2022 ( SFC ) , JUGE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/13694/2022 ACJC/1437/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MERCREDI 26 OCTOBRE 2022

 

Entre

A______ SÀRL, c/o B______, ______, recourante contre un jugement rendu par la 19ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 25 août 2022, comparant en personne,

et

C______, ______, sise ______[VD], intimée, comparant en personne.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/9833/2022 du 25 août 2021, expédié pour notification aux parties le 31 août 2022, le Tribunal de première instance, vu le commandement de payer poursuite n° 1______ et la commination de faillite du 20 juin 2022, a déclaré A______ Sàrl en état de faillite dès le 25 août 2022 à 8h30 (ch. 1), arrêté les frais judiciaires à 150 fr., compensés avec l'avance opérée par la C______, et les a mis à la charge de A______ Sàrl, condamnée à en rembourser la précitée (ch. 2 et 3).

B.            Par acte du 9 septembre 2022 à la Cour de justice, A______ Sàrl a formé recours contre la décision précitée, concluant à l'annulation de celle-ci et cela fait au rejet de la requête de faillite, alléguant être solvable, et avoir acquitté la dette en capital, intérêts et frais, pièce à l'appui.

Par ordonnance du 15 septembre 2022, la Cour a requis de A______ Sàrl qu'elle produise les pièces justifiant de sa solvabilité (comptes de l'année courante et des deux exercices précédents, contrats en cours, etc.) et se détermine sur la liste des poursuites en cours qu'elle a annexée.

Il résulte de cette liste de nombreuses poursuites de créanciers institutionnels depuis le mois de mars 2021, dont plusieurs ont été soldées par paiement à l'Office des poursuites ou au créancier.

Par détermination du 20 septembre 2022, A______ Sàrl a évalué à un montant de l'ordre de 24'000 fr. les montants "de factures ouvertes à l'Office des poursuites", allégué détenir au 5 septembre 2022 environ 10'000 fr. sur son compte bancaire, rester dans l'attente de versements par 17'785 fr. et avoir de nombreux devis en cours de validations pour environ 100'000 fr. Elle a affirmé que l'entreprise était saine, et que les difficultés connues avaient pour cause la gestion de son courrier, qu'elle entendait désormais confier à une fiduciaire pour traitement "normal" de sa correspondance. Elle a déposé des comptes établis par ses soins pour 2021 et 2022, qui font état respectivement d'un bénéfice de 1'756 fr. et de 7'240 fr., ainsi que des copies de devis.

Par acte du 26 septembre 2022, la C______ s'en est rapportée à justice.

Par avis du 28 septembre 2022, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.


 

 

EN DROIT

1.             1.1 L'appel étant irrecevable dans les affaires relevant de la compétence du tribunal de la faillite selon la LP (art. 309 let. b ch. 7 CPC), seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a CPC; art. 174 LP).

Les décisions rendues en matière de faillite sont soumises à la procédure sommaire (art. 251 let. a CPC).

1.2 Formé selon la forme et dans le délai prévus par la loi (art. 321 al. 1 et 2 CPC; art. 174 al. 1 LP), le recours est recevable.

1.3 D'après l'art. 174 al. 1, 2ème phrase LP, les parties peuvent faire valoir devant l'instance de recours des faits nouveaux qui se sont produits avant le jugement de première instance ("pseudo nova"; COMETTA, in Commentaire romand LP, 2005, n. 5 ad art. 174 LP). Le débiteur peut également alléguer des faits et présenter des moyens de preuve postérieurs au jugement de faillite ("vrais nova"), pour autant qu'ils servent à établir que les conditions de l'art. 174 al. 2 LP sont remplies (COMETTA, op. cit., n. 6 ad art. 174 LP).

En l'espèce, les pièces nouvelles déposées par la recourante sont recevables dans la mesure où elles ont été produites dans le délai de recours ou dans le délai qui lui avait été imparti par la Cour et servent à établir que la dette a été payée ainsi que sa solvabilité.

2. La recourante soutient avoir payé sa dette et être solvable.

2.1 En vertu de l'art. 174 al. 2 LP, l'autorité de recours peut annuler le jugement de faillite lorsque le débiteur rend vraisemblable sa solvabilité et qu'il établit par titre que l'une des conditions suivantes a été remplie, à savoir que la dette, intérêts et frais compris, a été payée (ch. 1), que la totalité du montant à rembourser a été déposée auprès de l'autorité de recours à l'intention du créancier (ch. 2) ou que le créancier a retiré sa réquisition de faillite (ch. 3). Ainsi, le débiteur ne doit pas seulement prouver le paiement de la dette à l'origine de la faillite, mais également rendre vraisemblable sa solvabilité. Ces deux conditions sont cumulatives (arrêts du Tribunal fédéral 5A_640/2011 du 4 janvier 2012 consid. 2 in fine; 5A_126/2010 du 10 juin 2010 consid. 6.2).

Le poursuivi doit rendre vraisemblable sa solvabilité, en produisant des titres immédiatement disponibles.

En principe, s'avère insolvable le débiteur qui, par exemple, laisse des comminations de faillite s'accumuler, fait systématiquement opposition et ne paie pas même des montants peu élevés. De simples difficultés passagères de paiements ne font en revanche pas apparaître insolvable le débiteur, à moins qu'il n'y ait aucun indice important permettant d'admettre une amélioration de sa situation financière et qu'il semble manquer de liquidités pour une période indéterminée. L'appréciation de la solvabilité repose sur une impression générale fondée sur les habitudes de paiement du failli (arrêts du Tribunal fédéral 5A_153/2017 du 21 mars 2017 consid. 3.1, 5A_118/2012 du 20 avril 2012 consid. 3.1, 5A_328/2011 du 11 août 2011 consid. 2, publié in SJ 2012 I p. 25). Pour rendre vraisemblable qu'il est solvable, le débiteur doit notamment établir qu'aucune requête de faillite dans une poursuite ordinaire ou dans une poursuite pour effets de change n'est pendante contre lui et qu'aucune poursuite exécutoire n'est en cours (arrêts du Tribunal fédéral 5A_118/2012 du 20 avril 2012 consid. 3.1 et 5A_640/2011 du 4 janvier 2012 consid. 3.1).

Un fait est rendu vraisemblable si le juge, en se basant sur des éléments objectifs, a l'impression que le fait invoqué s'est produit, sans pour autant devoir exclure la possibilité qu'il ait pu se dérouler autrement (ATF 132 III 715 consid. 3.1). Pour l'annulation du prononcé de faillite, cela signifie que la solvabilité du débiteur doit être plus probable que son insolvabilité. Dans ce domaine, il ne faut pas poser d'exigences trop sévères, en particulier lorsque la viabilité de l'entreprise endettée ne saurait être déniée d'emblée (arrêt du Tribunal fédéral 5A_328/2011 du 11 août 2011 consid. 2, traduit et publié in SJ 2012 I 25; Message du Conseil fédéral du 8 mai 1991 concernant la révision de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, FF 1991 III p. 130 s.).

2.2 En l'espèce, les pièces produites démontrent que la recourante a soldé la dette, en capital, intérêts et frais, pour laquelle elle était poursuivie. La première condition de l'art. 174 al. 1 LP est dès lors remplie.

Par ailleurs, elle a allégué et rendu suffisamment vraisemblable avoir soldé plusieurs poursuites et disposer d'un solde d'avoirs bancaires, ce qui tend à rendre vraisemblable qu'elle dispose d'une certaine capacité financière, qui pourrait être renforcée de surcroît par l'exécution des devis produits.

Elle a également fait valoir, et, en l'état, à défaut d'élément permettant de retenir le contraire, rendu vraisemblable, qu'elle a identifié la cause, administrative, de ses demeures de paiement et pris des décisions en vue d'éviter de nouvelles poursuites par une gestion "normale" de son courrier.

Ainsi, la recourante a rendu suffisamment vraisemblable, en l'état, que sa solvabilité est plus probable que son insolvabilité et que sa viabilité ne peut être déniée d'emblée.

Le recours sera dès lors admis et la faillite annulée.

3. Le paiement de la dette n'ayant été effectué qu'au moment du dépôt du recours, les frais judiciaires de première instance, arrêtés à 150 fr. (montant payé par la recourante lorsqu'elle a soldé la poursuite), et ceux de recours, arrêtés à 220 fr., seront mis à la charge de la recourante et compensés avec les avances fournies, qui restent acquises à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Il ne sera pas alloué de dépens, l'intimée comparaissant en personne et les circonstances ne le justifiant pas.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 9 septembre 2022 par A______ Sàrl contre le jugement JTPI/9833/2022 rendu le 25 août 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/13694/2022–19 SFC.

Au fond :

Annule le jugement attaqué et, cela fait, statuant à nouveau :

Rejette la requête formée par la C______.

Arrête les frais judiciaires de première instance à 150 fr., les met à la charge de A______ Sàrl et les compense avec l'avance fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Déboutement les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judicaires de recours à 220 fr., les met à la charge de A______ Sàrl et les compense avec l'avance fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse indifférente (74 al. 2 LTF).