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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/955/2025

ACPR/327/2025 du 05.05.2025 sur OMP/6926/2025 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : EXPERTISE PSYCHIATRIQUE;RÉCUSATION
Normes : CPP.56; CPP.186.al3; CPP.188; CPP.184.al2

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/955/2025 ACPR/327/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 5 mai 2025

 

Entre

A______, représenté par Me B______, avocat,

recourant,

contre le mandat d'expertise psychiatrique rendu le 19 mars 2025 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 31 mars 2025, A______ recourt contre le mandat d'expertise psychiatrique décerné contre lui le 19 mars 2025 et notifié le 21 suivant.

Le recourant conclut à l'annulation de ce mandat en tant qu'il a été confié au Centre universitaire romand de médecine légale (ci-après: CURML) et à ce qu'il soit ordonné au Ministère public de le confier à des experts en psychiatrie légale répondant aux réquisits de l'art. 183 CPP n'œuvrant pas au sein du CURML, mandat dont la question sous ch. 4.1. devait être modifiée comme proposé et celle figurant au ch. 4.3. supprimée.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______, né le ______ 2000, est prévenu de menaces (art. 180 CP), contrainte (art. 181 CP), tentative de contrainte (art. 22 cum 181 CP) et consommation de stupéfiants (art. 19a LStup) pour avoir, à Genève :

- le 21 décembre 2024, vers 9h00, dans l'appartement familial, menacé de se suicider en pointant un couteau contre son ventre, griffé C______, le mari de sa mère, alors que celui-ci lui enlevait le couteau des mains, pris un câble pour se pendre, puis s'être montré violent envers sa mère, D______, qui cherchait à l'en empêcher, en lui donnant des coups lui ayant causé notamment une tuméfaction pariétale droite ainsi qu'un œdème de la joue et des douleurs, causé divers dommages dans l'appartement, notamment à la hotte de la cuisine, une porte et divers objets, menacé sa mère et son beau-père de mort, de sorte à les effrayer, traité ce dernier de "fils de pute", ayant agi ainsi dans le but de les empêcher d'intervenir;

- le 23 décembre 2024, vers 2h00, alors qu'il se trouvait à l'extérieur de l'appartement qui était verrouillé et que sa mère et son beau-père de mort refusaient de lui ouvrir, frappé à la porte en menaçant de revenir avec des bidons d'essence pour mettre le feu à la maison, menacé de tuer D______, traité C______ de "fils de pute", avant de s'en aller et de revenir avec une barre de fer, moment où il a été interpellé par la police;

- le 14 février 2025, au domicile familial, menacé de mort sa mère à plusieurs reprises, l'effrayant de la sorte, étant précisé qu'il avait caché un couteau sur le balcon, qu'il pensait utiliser le soir venu dans le but de la menacer, pour la contraindre à renoncer à le faire retourner vivre au Brésil, et arraché les caméras de vidéosurveillance se trouvant sur le balcon, étant précisé que plaintes pénales ont été déposées en raison de ces faits, et que D______ et C______ ont retiré celles déposées en lien avec les faits des 21 et 23 décembre 2024 à l'issue de l'audience de confrontation du 27 janvier 2025;

- avoir régulièrement consommé du haschich.

Les faits de décembre 2024 ont été enregistrés sous le numéro de procédure P/955/2025 et ceux de février 2025 sous la référence P/4115/2015, ces deux procédures ayant été jointes par ordonnance du Ministère public du 18 février 2025 sous le premier numéro.

b. À la suite des faits du 21 décembre 2024, A______ a été hospitalisé à E______, établissement d'où il a fugué avant d'y être ramené le 23 décembre 2024. Il en est sorti le 14 janvier 2025.

Une expertise psychiatrique a été rendue le 30 décembre 2024 – par le Dr F______, médecin adjoint à l'Unité G______ du CURML, Unité dont la responsable est la Dre H______ – dans le cadre d'une procédure devant le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : TPAE) en vue du placement de A______ à des fins d'assistance. Les diagnostics d'épisode dépressif, grave, sans symptômes psychotiques, de dépendance au cannabis, de mode de consommation nocif d'alcool et de trouble modéré de la personnalité ont été posés. L'expertisé avait été hospitalisé à trois autres reprises à E______ en 2024 et ne se serait pas conformé aux suivis ambulatoires préconisés. En cas de sortie prématurée et non préparée de l'hôpital, il existait un risque de passage à l'acte auto-agressif et de consommation nocive d'alcool. On ne pouvait ainsi exclure, dans ce contexte, des troubles du comportement tels que ceux qui avaient conduit à son hospitalisation (hétéro-agressivité envers sa mère) ou encore des comportements auto-agressifs (tels que les deux tentatives de suicide du 21 décembre 2024).

c. Lors de ses diverses auditions, le prévenu a reconnu les faits dans les grandes lignes ainsi que ses diverses consommations d'alcool et de stupéfiants.

d. A______ a été placé en détention provisoire dès le 27 janvier 2025. Il a été mis en liberté par ordonnance du Tribunal des mesures de contrainte du 6 mars 2025 avec effet au jour de son transfert effectif à l'hôpital de psychiatrie de E______, avec notamment, comme mesures de substitution, l'obligation d'intégrer cet hôpital (unité I______) et d'y résider jusqu'à décision contraire de la direction de la procédure (let. a) et l'obligation de se soumettre à une expertise psychiatrique (let. d).

e. Le 6 mars 2025, le Ministère public a adressé aux partie un projet d'expertise psychiatrique qu'il entendait confier aux Drs J______, médecin cheffe de clinique à l'Unité G______ et K______, médecin interne à l'Unité G______.

f. Le 18 mars suivant – dans le délai imparti pour ce faire – A______ s'est notamment opposé à l'intervention de tout médecin du CURML, se prévalant des règles sur la récusation (art. 56 CPP).

g. Il ressort de son casier judiciaire que A______ a été condamné pour blanchiment d'argent (art. 305bis CP) par ordonnances pénales du Ministère public des 3 mars 2021 et 19 juillet 2022.

C. Dans le mandat d'expertise querellé, le Ministère public a retenu que le fait que les Drs J______ et K______ soient collègues du Dr F______ ne saurait fonder un risque de prévention ou d'absence d'indépendance et constituer un motif de récusation, étant relevé que les experts répondaient personnellement de l'exécution de l'expertise (art. 185 al. 1 CPP) et étaient liés à l'autorité qui les désignait par un rapport de droit public, les règles du contrat de mandat ou du contrat d’entreprise s’appliquant à titre subsidiaire. Il n'y avait pas lieu pour le surplus de modifier le libellé de la question 4, dans la mesure où les experts devaient pouvoir distinguer le risque de récidive en fonction des types d'infraction.

Le mandat d'expertise prévoit sous le titre "III. Mesures (articles 56 et suivants CP)" notamment les questions suivantes:

"4. Le prévenu présente-t-il un risque de commettre à nouveau des infractions ? Si oui, à quel genre d'infractions peut-on s'attendre ?

Quel est le degré de probabilité de réalisation de ce risque, en fonction des infractions auxquelles on peut s'attendre ? Prière de quantifier ce degré de probabilité (élevé, moyen, faible) en fonction des infractions auxquelles on peut s'attendre, en distinguant:

4.1.les infractions contre la vie et l'intégrité corporelle (atteintes physiques, psychiques, sexuelles);

4.2.les infractions contre les biens;

4.3.les autres types d'infractions".

D. a. À l'appui de son recours, A______ expose que la procédure contenait déjà une expertise psychiatrique récente, du CURML, qui posait un diagnostic ainsi que des conclusions en matière de dépendance, de soins et de risques. Si, lors de cette expertise, il s'était montré très réticent à tout traitement ainsi qu'à son hospitalisation à la clinique de E______, tel n'était plus du tout le cas. Il ne pouvait concevoir que ce soit à nouveau le CURML qui diligente une expertise pénale si l'on voulait garantir un regard neuf et une totale indépendance. Si les Drs F______ et H______, qui avaient procédé à l'expertise du 30 décembre 2024, ne prendraient pas directement part à cette nouvelle expertise, les experts mandatés étaient leurs collègues directs, de la même unité G______, et dépendaient de la même hiérarchie. Le fait que chacun réponde personnellement de l'expertise, soit une question de responsabilités, ne devait pas être confondu avec les questions d'indépendance et de totale partialité (sic). Un risque, fût-il ténu, de prévention, de même que d'absence d'indépendance des seconds experts du CURML ne pouvait donc être exclu.

En lien avec le risque de récidive, les infractions qui lui étaient reprochées, hors celles à la LStup, consistaient en des infractions contre la liberté et les biens. Il ne présentait de plus aucun antécédent en matière d'infractions contre la vie ou l'intégrité physique d'autrui. L'expert n'avait dès lors pas pour vocation à s'exprimer sur le risque qu'il perpétue à nouveau un acte qu'il n'avait jamais commis ni n'était accusé d'avoir commis. Aussi, les questions sous ch. 4.1. et 4.3. ne trouvaient aucune justification dans la procédure. Le libellé de la question 4 pourrait être maintenu et l'expert devrait distinguer "4.1. Les infractions contre la liberté; 4.2. Les infractions contre les biens", la question 4.3. devant être supprimée.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une décision sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             3.1. Le recourant, dans son premier grief, ne remet pas en cause les qualifications professionnelles des experts désignés (art. 183 al. 1 CPP). Si, dans ses conclusions, il ne demande pas formellement leur récusation, il conclut à l'annulation du mandat d'expertise qui les désigne à titre d'experts, développant dans son recours la problématique de leur nomination sous l'angle de l'art. 56 CPP (art. 183 al. 3 CPP). Il faut donc retenir qu'il demande en réalité leur récusation (ACPR/319/2021 du 17 mai 2021 et ACPR/901/2024 du 4 décembre 2024).

3.2. La demande de récusation doit être présentée sans délai par les parties dès qu'elles ont connaissance d'un motif de récusation (art. 58 al. 1 CPP), soit dans les jours qui suivent la connaissance du motif de récusation (arrêt du Tribunal fédéral 1B_601/2011 du 22 décembre 2011 consid. 1.2.1), sous peine de déchéance (ATF 138 I 1 consid. 2.2).

La jurisprudence admet le dépôt d'une demande de récusation six à sept jours après la connaissance des motifs mais considère qu'une demande déposée deux à trois semaines après est tardive (L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, Petit commentaire du code de procédure pénale, 2ème éd., Bâle 2016, N. 3 ad art. 58 CPP et références citées; arrêts du Tribunal fédéral 1B_14/2016 du 2 février 2016 consid. 2 et 1B_60/2014 du 1er mai 2014 consid. 2.2).

L'autorité qui constate qu'une demande de récusation est tardive n'entre pas en matière et la déclare irrecevable (A. DONATSCH / T. HANSJAKOB / V. LIEBER (éds), Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung (StPO), 2ème éd., Zurich 2014, n. 4 ad art. 58 CPP; arrêt du Tribunal fédéral 2C_239/2010 du 30 juin 2010 consid. 2.2; ACPR/303/2014 du 18 juin 2014).

3.3. En l'occurrence, A______ s'est opposé, dans sa détermination du 18 mars 2025, soit dans le délai imparti par le Ministère public pour ce faire, à la nomination des Drs J______ et K______ en qualité d'experts, se prévalant des règles sur la récusation (art. 56 CPP).

Il a en effet soulevé l'apparence de prévention au motif que les prénommés étaient rattachés au CURML, tout comme l'expert ayant rendu le rapport du 30 décembre 2024 dans le cadre de la procédure devant le TPAE, sous la responsabilité de la Dre H______, responsable de l'Unité G______.

La demande de récusation est ainsi recevable.

4.             4.1. L'art. 56 CPP – applicable aux experts par renvoi de l'art. 183 al. 3 CPP – énumère divers motifs de récusation aux lettres a à e, la lettre f imposant quant à elle la récusation lorsque d'autres motifs, notamment un rapport d'amitié étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil, sont de nature à le rendre suspect de prévention. La lettre f de l'art. 56 CPP a la portée d'une clause générale recouvrant tous les motifs de récusation non expressément prévus aux lettres précédentes (ATF 138 IV 142 consid. 2.1; TF 1B_45/2015 du 29 avril 2015 consid. 2.1 et les références citées).

4.2.1. L'art. 56 CPP concrétise les garanties déduites de l'art. 30 al. 1 Cst. Certes, dès lors que l'expert ne fait pas partie du tribunal, sa récusation ne s'examine pas au regard de l'art. 30 al. 1 Cst., mais sous l'angle de l'art. 29 al. 1 Cst. garantissant l'équité du procès (ATF 125 II 541 consid. 4a). Cette disposition assure toutefois au justiciable une protection équivalente à celle de l'art. 30 al. 1 Cst. s'agissant des exigences d'impartialité et d'indépendance requises d'un expert (ATF 127 I 196 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 1B_488/2011 du 2 décembre 2011 consid. 3.1). Les parties à une procédure ont donc le droit d'exiger la récusation d'un expert dont la situation ou le comportement sont de nature à faire naître un doute sur son impartialité. Cette garantie tend notamment à éviter que des circonstances extérieures à l'affaire puissent influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective est établie, car une disposition interne de la part de l'expert ne peut guère être prouvée; il suffit que les circonstances donnent l'apparence d'une prévention et fassent redouter une activité partiale. Cependant, seules les circonstances constatées objectivement doivent être prises en compte, les impressions purement individuelles n'étant pas décisives (ATF 140 III 221 consid. 4.1; ATF 139 III 433 consid. 2.1.1; ATF 138 IV 142 consid. 2.1; ATF 137 I 227 consid. 2.1 et les références citées).

4.2.2. Il y a notamment motif à récusation lorsque l'expert affiche son antipathie à l'égard de l'une des parties par des gestes ou des propos déplacés; c'est également le cas s'il dit à des tiers qu'il estime le prévenu coupable, ou si, lors de sa nomination, il exprime déjà des opinions tranchées quant à l'issue de l'expertise (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 19 ad art. 183 CPP). En revanche, l'appartenance à une autorité, à une institution ou à un organisme dont un autre membre est à l'origine de l'action pénale ou s'est prononcé en sa faveur ne suffit pas à faire naître un doute quant à l'impartialité de l'expert. Dans bien des cas, admettre le contraire limiterait de façon inacceptable la possibilité pour les tribunaux de recourir à une expertise. Dans le même sens, le fait qu'un expert doive se prononcer sur des déclarations faites par un collègue ne suffit pas à le récuser (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op. cit., n. 23 ad art. 183 CPP et les références citées).

4.2.3. Le Tribunal fédéral a examiné le cas d'un prévenu qui avait été extrait de sa cellule à deux reprises pour un déplacement à l'Unité hospitalière de psychiatrie pénitentiaire (UHPP) dont le superviseur de son expertise était le responsable médical. À ce titre, l'expert avait certes été le médecin responsable du prévenu pendant ces deux brefs séjours. Toutefois, le seul fait qu'il était le dirigeant de l'établissement dans lequel celui-ci avait été soigné ne conduisait pas en soi à la conclusion qu'il était partial en raison d'un conflit d'intérêts (arrêts du Tribunal fédéral arrêt du Tribunal fédéral 6B_27/2018 du 30 mai 2018 consid. 3 ; 6B_70/2017 du 19 juillet 2017 consid. 1.5 ; S. TRECHSEL/M. PIETH [éds], Schweizerisches Strafgesetzbuch, Praxiskommentar, 3e éd. 2018, n. 17 ad art. 56 CP).

4.3. En l'espèce, A______ soutient que les Drs J______ et K______ seraient suspects de prévention du seul fait de leur appartenance à l'Unité G______, tout comme les experts ayant réalisé ou supervisé l'expertise psychiatrique du 30 décembre 2024 dans le cadre de la procédure devant le TPAE.

Si l'on suit le raisonnement de l'intéressé, les prénommés seraient ainsi marqués d'un a priori négatif sur lui et ne pourraient, dès lors, exécuter leur mission avec toute l'impartialité requise. Tel n'est pas le cas.

Aucun élément au dossier ne permet de penser, dans le cas présent, que les experts mandatés par le Ministre public ne seraient pas en mesure de procéder à leur mission en toute indépendance et avec toute l'objectivité requise, ni d'avoir des avis ou approches différents de ceux déjà exprimés.

En sa qualité de responsable de l'Unité G______, la Dre H______ – qui a apparemment supervisé la première expertise – est la répondante normalement sollicitée pour suggérer les experts psychiatres rattachés au CURML. Elle n’est pas appelée elle-même à fonctionner une nouvelle fois comme experte.

Que les experts nommés dans la présente procédure soient sous sa responsabilité hiérarchique ne les prive pas d'emblée de cette indépendance, pas plus le fait qu'ils disposent du précédent rapport d'expertise, fût-il récent. Le rôle des experts est précisément de s'extraire de leur fonction pour établir leur rapport.

À la lumière de ces principes, les griefs soulevés tombent à faux.

Le recours sera ainsi rejeté en tant qu'il vaut requête en récusation.

5.             Dans son second grief, le recourant s'en prend au contenu de la mission d'expertise.

5.1.       À teneur de l'art. 182 CPP, le ministère public et les tribunaux ont recours à un ou plusieurs experts lorsqu’ils ne disposent pas des connaissances et des capacités nécessaires pour constater ou juger un état de fait.

5.2.       La direction de la procédure établit un mandat écrit qui contient une définition précise des questions à élucider (art. 184 al. 2 let. c CPP).

Celles-ci doivent être précises (c'est-à-dire ne pas porter sur des généralités) et leur formulation doit être la plus neutre possible (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op. cit., 2ème éd., Bâle 2019, n. 7 ad art. 184).

5.3.       En l'espèce, la question sous ch. 4 du mandat querellés sous le titre "III Mesures (articles 56 et suivants CP)" demande à l'expert si le prévenu présente un risque de commettre à nouveau des infractions, et, si oui, à quel genre d'infractions on peut s'attendre.

Cette question, qui vise à déterminer l'éventuel risque de réitération, pour des faits similaires à ceux qui sont reprochés au prévenu – soit menaces (art. 180 CP), contrainte (art. 181 CP), tentative de contrainte (art. 22 cum 181 CP) –, ou des faits d'autre nature – liés par exemple à la violence (question sous ch. 4.1.) – ne sort pas du cadre de compétences d'un expert psychiatre et restent en adéquation avec les faits reprochés au recourant. Il est en effet rappelé que le recourant est mis en cause à la suite de trois interventions de la police au domicile familial, les 21 et 23 décembre 2024, puis le 14 février 2025, en raison de menaces sérieuses de mort et d'actes hétéro-agressifs – à l'égard de sa mère et de son beau-père, et auto-agressifs – il entendait se suicider le 21 décembre 2024 –, ainsi que de dommages causés dans l'appartement, comportements qu'il reconnait dans les grandes lignes. Cette répétition de comportements, impliquant la menace de mettre le feu à l'appartement avec des bidons d'essence, de tuer sa mère et d'essayer d'entrer de force dans l'appartement alors qu'il était hospitalisé à la clinique de E______ d'où il a fugué entre les deux épisodes de décembre 2024, auquel s'ajoute l'épisode du 14 février 2025 au cours duquel il est mis en cause pour avoir – une nouvelle fois – menacé de mort sa mère et entendait la contraindre encore plus tard dans la soirée au moyen d'un couteau qu'il avait dissimulé sur le balcon – permet, contrairement à ce qu'il soutient, de faire porter la mission d'expertise sur un risque de réitération notamment contre la vie et l'intégrité corporelle.

En effet, l'un des buts de l'expertise psychiatrique est de déterminer si l'expertisé souffre d'un grave trouble mental (art. 59 al. 1 ou 63 al. 1 CP) et, dans cette hypothèse, si un traitement institutionnel ou ambulatoire peut être ordonné par le juge, lorsque l'auteur a commis un acte punissable en relation avec son état (let. a) et s'il est à prévoir que la mesure ou le traitement le détournerait de nouvelles infractions en relation avec ce trouble (let. b).

Il est donc nécessaire de déterminer non seulement si un risque de réitération existe, mais également pour quels types d'infractions. L'expert expliquera ainsi, dans la motivation de son rapport, les raisons pour lesquelles il parvient, le cas échéant, à la conclusion qu'un tel risque existe, et pour quel genre d'infraction. Si un seul type d'infractions lui paraît entrer en ligne de compte, il le précisera.

Les questions III.4.1 à III.4.3 du mandat concernent le degré du risque de réitération retenu par l'expert et invitent ce dernier à préciser ses réponses en fonction des types d'infractions qu'il aura retenus. S'il n'en retient qu'un seul, il ne répondra pas aux autres questions.

Il s'ensuit que, contrairement aux craintes du recourant, la question III.4 ne sort pas du cadre de l'exeprtise. Posée sous le titre des éventuelles mesures à ordonner par le juge, au sens des art. 56ss CP, cette question vise à déterminer l'existence d'un éventuel risque de réitération et ne saurait par conséquent, dans ce cadre, être limitée au seul type d'infractions retenu dans la procédure en cours.

Le grief est donc rejeté.

6.             Infondé, le recours sera dès lors rejeté.

7.             Le recourant, prévenu, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 800.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03). En effet, l'autorité de recours est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

8.             Il n'y a pas lieu d'indemniser à ce stade (art. 135 al. 2 CPP) le défenseur d'office, qui ne l'a du reste pas demandé.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette la requête en récusation.

Rejette le recours.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 800.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit pour lui son conseil) et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Valérie LAUBER, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/955/2025

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- demande sur récusation (let. b)

CHF

715.00

Total

CHF

800.00