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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/10259/2021

ACPR/523/2024 du 18.07.2024 sur OTDP/2486/2023 ( TDP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE PÉNALE;OPPOSITION(PROCÉDURE);EMPÊCHEMENT(EN GÉNÉRAL)
Normes : CPP.205; CPP.356

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/10259/2021 ACPR/523/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 18 juillet 2024

 

Entre

A______, représenté par Me Luc-Alain BAUMBERGER, avocat, SCHMIDT & Associés, rue du Vieux-Collège 10, 1204 Genève,

recourant,

contre l'ordonnance rendue par le Tribunal de police le 9 novembre 2023,

et

B______, représentée par Me C______, avocate,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte déposé le 20 novembre 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 9 novembre 2023, notifiée à son conseil le jour même, par laquelle le Tribunal de police a constaté son défaut à l'audience et dit que son opposition à l'ordonnance pénale du 17 mai 2023 était réputée retirée, dite ordonnance étant assimilée à un jugement entré en force.

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de l'ordonnance querellée et au renvoi de la cause au Tribunal de police pour fixation d'une nouvelle audience.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Par ordonnance pénale du 17 mai 2023, le Ministère public a condamné A______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende, avec sursis durant trois ans, et à une amende de CHF 500.-, pour dommages à la propriété, injure et menace, ainsi qu'à une amende de CHF 200.-, pour voies de fait, infractions commises au préjudice de son épouse, B______.

Le prénommé y a formé opposition.

b. Par ordonnance de maintien du 13 juin 2023, le Ministère public a transmis la procédure au Tribunal de police pour qu'il statue sur l'opposition.

c. Le 8 août 2023, la Présidente du Tribunal de police a cité A______ à comparaître personnellement le 9 novembre 2023, à 14h00, afin d’être entendu dans le cadre de son opposition. Il était précisé que, dans le cas où il ne se présenterait pas, sans excuse valable, son opposition serait réputée retirée et que l'ordonnance pénale contestée serait déclarée exécutoire (art. 356 al. 4 CPP).

Selon le suivi de la Poste, cette citation à comparaitre a été distribuée le 10 août 2023.

d. Par lettre du 7 novembre 2023, Me Luc-Alain BAUMBERGER s'est constitué en faveur de A______ en qualité de défenseur de choix, avec élection de domicile. Son client lui avait indiqué ne pas pouvoir se présenter à l'audience de jugement "pour des raisons médicales". Un certificat médical serait remis "au plus vite".

e. Par courriel du jour-même, la Présidente du Tribunal de police a indiqué maintenir l'audience fixée.

f. À teneur du certificat produit le lendemain, A______ était en incapacité de travail à 100 %, du 8 au 9 novembre 2023, avec reprise à 100 % le 10 suivant.

g. Dans sa réponse, par courriel du même jour, la Présidente du Tribunal de police a annoncé le maintien de l'audience de jugement, citant expressément les termes de l'art. 356 al. 4 CPP.

h. A______ n'a pas comparu le 9 novembre 2023. Son conseil, qui a sollicité le report des débats ou de pouvoir représenter son client, a produit un "rapport médical succinct" établi par la Dre D______, Spéc. FMH Psychiatrie et Psychothérapie, le 14 mars 2023.

i. Selon ce rapport, complétant un précédent rapport non annexé, A______ était suivi en lien avec la séparation d'avec son fils. Il continuait à suivre son traitement, semblait "se conformer à l'ordre public de notre pays", sans présenter "de pulsion régressive pouvant faire craindre un quelconque danger de sa part".

C. Dans sa décision querellée, le Tribunal de police retient que dès lors que A______, dûment convoqué à l'audience du même jour, ne s'était pas présenté, sans avoir été valablement excusé, son opposition à l'ordonnance pénale était réputée retirée et ladite décision assimilée à un jugement entré en force. Le certificat médical remis le 8 novembre 2023 était "vague et général", semblant avoir été établi "pour les besoins de la cause". L'incapacité de travail mentionnée ne présumait pas d'une incapacité de comparaître aux débats, étant souligné qu'elle se terminait déjà le lendemain de l'audience. En outre, il ne pouvait être représenté par son avocat dans la mesure où il contestait les faits et plaidait l'acquittement.

D. a. À l'appui de son recours, A______ soutient ne pas avoir pu se présenter à l'audience fixée "vu son état de santé". Il se réfère au certificat médical du 8 novembre 2023 et rappelle "qu'il est notoire que l'automne sous nos latitudes, et plus particulièrement le début du mois de novembre, est une période hautement propice à la propagation de diverses affections très contagieuses, telles que le SARS-Cov-2 (Covid-19), l'influenza (grippes saisonnières) ou toutes autres formes de rhinovirus". Comme preuve, il produit l'extrait du site internet de l'Office fédéral de la santé publique, portail d'information sur les maladies transmissibles, consulté le 15 novembre 2023 à 18h07. Il considère que le Tribunal aurait à tout le moins dû autoriser son conseil à le représenter et, à défaut, reporter l'audience.

b. Le Tribunal de police se réfère intégralement à sa décision, sans formuler d'observations.

c. Le Ministère public conclut au rejet du recours.

d. B______ conclut, préalablement, à l'octroi de l’assistance judiciaire gratuite pour le recours et, principalement, au rejet de celui-ci.

e. Le recourant a répliqué.

f. B______ a persisté dans ses précédentes conclusions.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé dans le délai et la forme prescrits (art. 396 al. 1 et 385 al. 1 CPP), concerner une décision du Tribunal de police sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. b CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant soutient que son absence à l’audience du 9 novembre 2023 était justifiée.

2.1. Selon l'art. 356 al. 2 CPP, en cas d'opposition à une ordonnance pénale rendue par le Ministère public, le Tribunal de première instance – en l'occurrence le Tribunal de police – statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition à celle-ci.

2.2. À teneur de l'art. 356 al. 4 CPP, si l'opposant à une ordonnance pénale fait défaut aux débats devant le tribunal de première instance sans être excusé et sans se faire représenter, son opposition est réputée retirée. Toutefois, à la différence de ce que prévoit l'art. 355 al. 2 CPP pour la procédure d'opposition devant le ministère public, l'opposant qui fait défaut aux débats devant le tribunal a le droit de se faire représenter, à moins que, lorsqu'il est prévenu, sa présence n'ait – comme en l'espèce – été exigée (Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale (CPP) du 21 décembre 2005, FF 2006 1275 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_289/2013 du 6 mai 2014 consid. 12.2 et références citées ; 6B_747/2012 du 7 février 2014 consid. 3.3).

2.3. Quiconque est cité à comparaître par une autorité pénale est tenu de donner suite au mandat de comparution (art. 205 al. 1 CPP). En cas d'empêchement, il y a lieu d'informer sans délai l'autorité concernée, justificatifs à l'appui (art. 205 al. 2 CPP).

Comme motifs d’excuse valable, la doctrine mentionne, la maladie, le service militaire ou l’absence à l’étranger, le service civil ou un autre service public affectant la disponibilité de la personne convoquée, la maladie d’un enfant ou d’un proche parent dont la personne convoquée a la charge et pour les soins duquel elle ne trouve pas de remplaçant à brève échéance, la grève d’une compagnie aérienne, le décès très récent d’un proche parent ou d’autres situations d’exceptions, voire des engagements de la vie privée pris de longue date, avant la notification du mandat (vacances, voyage d’affaires) (A. KUHN / Y. JEANNERET / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 4 ad art. 205 ; M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER, Schweizerische Strafprozessordnung / Schweizerische Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, 2ème éd., Bâle 2014, n. 6 ad art. 205).

2.4. En l'espèce, le mandat de comparution personnelle du 9 novembre 2023 a été notifié au recourant le 10 août 2023. Celui-ci avait donc connaissance de la date de l'audience, de l'obligation de s'y présenter et des conséquences du défaut – ce qu'il ne conteste du reste pas.

Le 7 novembre 2023, il a, par son conseil, averti le Tribunal de ne pas pouvoir se présenter à l'audience "pour des raisons médicales", lui communiquant, le lendemain, un certificat médical à teneur duquel sa capacité de travail était nulle du 8 au 9 novembre 2023.

Comme l’a observé à juste titre le Tribunal de police, ce certificat n’autorise aucune conclusion à l’appui d’une incapacité de comparaître; tout au contraire, il démontre que le recourant a été, le lendemain de l'annonce de sa maladie, en mesure de se déplacer jusqu’à un cabinet médical. Le médecin n’a attesté que d’une capacité de travail nulle, et de rien d’autre. Qui plus est, à teneur de son courrier du 8 novembre 2023, le conseil du recourant a reçu le certificat médical le jour même, ce qui tend à démontrer que le recourant, après avoir vu un médecin, s’est vraisemblablement déplacé jusqu’au cabinet de son avocat, pour lui remettre le certificat médical. On ne voit, dès lors, pas en quoi ni comment le recourant aurait été, le lendemain, dans l’incapacité de comparaître. Quant au rapport médical du 14 mars 2023 – largement antérieur à l'audience –, il ne permet aucunement de justifier l'incapacité de comparaitre alléguée.

Le Tribunal de police était donc fondé à retenir que le recourant n'avait pas comparu, sans s'être excusé valablement et – dès lors que sa présence était exigée – sans pouvoir être représenté. Il a ainsi correctement appliqué la loi en jugeant que l'opposition devait être considérée comme retirée.

2.5. Dans la mesure où l'ordonnance entreprise ne concerne que la question du retrait de l'opposition à l'ordonnance pénale, il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur les griefs soulevés en lien avec le non report de l'audience.

3.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

4.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 500.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

5.             L'intimée, B______, sollicite l'assistance judiciaire pour la procédure de recours, conformément à l'art. 136 al. 3 CPP, entré en vigueur le 1er janvier 2024.

5.1. Les art. 135 al. 1 cum 138 al. 1 CPP prévoient que le conseil juridique gratuit est rétribué conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. À Genève, ce tarif est édicté à l'art. 16 RAJ et s'élève à CHF 200.- de l'heure pour un chef d'étude (al. 1 let. c). Seules les prestations nécessaires sont retenues; elles sont appréciées en fonction, notamment, de la nature, l'importance et les difficultés de la cause, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu (art. 16 al. 2 RAJ).

5.2. En l'espèce, B______ a requis l'indemnisation de son conseil à hauteur de CHF 473.35 (1h50 au tarif de CHF 200.- l'heure pour la rédaction de ses observations, auxquelles s'ajoutent CHF 73.20.- de "frais divers : 20 % sur le total des activités" et la TVA), selon la note d'honoraires produite.

Eu égard aux observations d'une page et demie au total (de discussion juridique faiblement topique) et à un très bref courrier, le montant d'honoraires réclamé apparaît excessif et sera ramené à 1h00 au tarif demandé, soit CHF 200.-, TVA à 8.1% comprise.

Il n'y a pas lieu d'y ajouter l'indemnité de CHF 73.20 à titre de frais forfaitaires réclamée, tel forfait ne se justifiant pas en instance de recours (cf. ACPR/762/2018 du 14 décembre 2018).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Admet B______ au bénéfice de l'assistance judiciaire pour le recours et désigne Me C______ en qualité de conseil juridique gratuit.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 500.-.

Alloue à Me C______, à la charge de l'État, une indemnité de CHF 216.20 (TVA à 8.1 % incluse).

Notifie le présent arrêt, en copie, à A______ et B______, soit pour eux leurs conseils, au Ministère public, et au Tribunal de police.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Valérie LAUBER et
Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Selim AMMANN, greffier.

 

Le greffier :

Selim AMMANN

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/10259/2021

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

415.00

Total

CHF

500.00