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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/4021/2021

DCSO/522/2023 du 23.11.2023 ( PLAINT ) , REJETE

Recours TF déposé le 12.12.2023, 5A_933/2023
Normes : LP.221; LP.228; OAOF.29; OAOF.30; LP.222; LP.229; LP.244; LP.245; LP.207; LP.17; OAOF.63; LP.250
Résumé : Recours au TF formé le 12.12.2023 par la débitrice (5A_933/2023)
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4021/2021-CS DCSO/522/23

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 23 NOVEMBRE 2023

 

Plainte 17 LP (A/4021/2021-CS) formée en date du 25 novembre 2021 par A______, représenté par Me Anath GUGGENHEIM, avocate.

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

-       A______

c/o Me GUGGENHEIM Anath

Boulevard des Tranchées 36

1206 Genève.

- B______

c/o Me ARFAZADEH Homayoon

Rue Charles-Bonnet 2

1206 Genève.

- C______ LTD, EN LIQUIDATION
p.a. Office cantonal des faillites
Faillite n° 2020 1______, groupe 1.


EN FAIT

A. a. C______ LTD est une société anonyme fondée en 1964, au capital de 51'000 fr. et dont le siège est à Genève.

La société a pour but l'achat, la vente et la distribution de tous produits pétroliers.

A______ en est l'administratrice unique depuis une date indéterminée, mais en tous les cas depuis 1994, avec signature individuelle. D______ en a également été administrateur de septembre 2019 à septembre 2021, sans pouvoir de signature.

E______ SA et F______ SA en ont été l'organe de révision depuis respectivement 2008 et 2017.

b. La société a été créée, financée et dirigée par trois entités israéliennes, G______ LTD, H______ LTD, I______ LTD, dans le but de leur servir de prête-nom dans l'acquisition de pétrole destiné à Israël, auprès de la société B______, ayant son siège en Iran.

C______ LTD n'aurait jamais concrètement déployé d'activité, ni réalisé de chiffre d'affaires, ni disposé d'employés ou de locaux, car elle aurait eu pour seule fonction d'apparaître formellement en qualité de partie acheteuse dans les contrats d'acquisition de pétrole négociés, conclus et exécutés en réalité entre G______ LTD, H______ LTD et I______ LTD en qualité d'acheteuses et B______ en qualité de vendeuse.

c. Des contrats de vente de pétrole ont été conclus selon ces modalités de 1964 à 1979, la révolution islamique en Iran y ayant mis fin.

d. Les dernières livraisons de pétrole ayant précédé la révolution islamique en Iran n'ont pas été payées. B______ a requis l'arbitrage prévu par le contrat de vente. Le litige a été tranché par une sentence arbitrale partielle du 3 mars 1999 et une sentence finale du 8 juin 2001, condamnant G______ LTD, H______ LTD, I______ LTD et C______ LTD conjointement et solidairement à verser à B______ la somme de 96'993'890 usd, composée de 30'130'396 usd représentant le prix des dernières livraisons de pétrole, de 65'968'828 usd d'intérêts à 10 % courus sur ledit prix entre la date de son exigibilité et le prononcé de la sentence arbitrale ainsi que de 894'666 usd à titre d'honoraires d'arbitrage.

e. Sur la base de la sentence arbitrale du 8 juin 2001, B______ a fait notifier à C______ LTD, le 11 mars 2011, un commandement de payer le montant de 93'994'800 fr., plus intérêt à 5 % l'an dès le 8 juin 2001.

C______ LTD ayant fait opposition au commandement de payer, B______ a obtenu sa mainlevée par jugement du Tribunal de première instance de Genève (ci-après le Tribunal) du 25 septembre 2012, à concurrence de 93'994'800 fr., plus intérêts à 5 % sur la contrevaleur en francs suisses de 30'130'396 usd, dus à compter du 12  mars 2011 (date de notification du commandement de payer). Ce jugement a été modifié par arrêt de la Cour de justice du 22 mars 2013 qui a prononcé la mainlevée à concurrence du montant de 93'994'800 fr. (contrevaleur en francs suisses de la somme de 96'993'890 usd), sans intérêt. La Cour de justice a retenu que la sentence arbitrale ne condamnait au versement d'aucuns intérêts au-delà du 8 juin 2001, de sorte qu'il n'existait aucun titre de mainlevée définitive pour le paiement de tels intérêts. Cet arrêt a été confirmé par le Tribunal fédéral le 21  janvier 2014.

f. L'Office cantonal des poursuites a rejeté la réquisition de continuer la poursuite déposée le 4 février 2014 par B______, le commandement de payer notifié le 11 mars 2011 étant périmé.

g. En juin 2014, G______ LTD, H______ LTD et I______ LTD ont remis, en exécution de la sentence arbitrale du 8 juin 2001, un montant de 96'993'890 usd au "Consignataire de la propriété ennemie", un organisme d'état israélien chargé de conserver les prestations commerciales destinées à des entreprises mentionnées comme ennemies en application de l'ordonnance sur le commerce avec l'ennemi de 1939, dont B______ fait partie. Selon cette ordonnance, la remise en consignation à cet organisme vaut exécution de l'obligation et libère le débiteur.

h. B______ a fait notifier à C______ LTD le 2 mars 2017 un nouveau commandement de payer portant sur la somme de 94'433'251 fr. 30, sans intérêt, plus diverses sommes relatives aux frais et dépens de la procédure de mainlevée consécutives au premier commandement de payer.

C______ LTD a fait opposition au commandement de payer, laquelle a été levée par jugement du Tribunal du 26 janvier 2019, confirmé par arrêt de la Cour de justice du 16 mai 2019. Ces décisions ont notamment retenu que l'on ne pouvait tenir compte de la consignation de la somme litigieuse en Israël auprès du "Consignataire de la propriété ennemie" comme valant extinction de la créance en poursuite, en substance, parce que le paiement en mains de cet organisme ne déployait aucun effet libératoire en faveur de C______ LTD dont le siège était hors de l'Etat d'Israël, que seul le droit iranien était applicable aux relations entre les parties et que le créancier ne pouvait obtenir le versement du montant consigné auprès du "Consignataire de la propriété ennemie".

i. B______ ayant requis la continuation de la poursuite, l'Office cantonal des poursuites a notifié le 14 juin 2019 à C______ LTD une commination de faillite.

j. Le 4 juillet 2019, C______ LTD a déposé une requête d'arbitrage fondée sur le contrat de fourniture de pétrole de 1977 en vue de faire constater que le paiement des dernières livraisons de pétrole avait eu lieu par consignation auprès du "Consignataire de la propriété ennemie". B______ a répondu à la requête d'arbitrage le 17 décembre 2019, formulant des conclusions reconventionnelles et appelant en cause l'Etat d'Israël.

La procédure arbitrale est en cours, émaillée d'incidents portant sur la désignation des arbitres.

k. C______ LTD a également agi le 22 juillet 2019 auprès du Tribunal en annulation de la poursuite, avec requête provisionnelle de suspension de la poursuite.

La requête de suspension provisoire a été rejetée par ordonnance du 17 février 2020, confirmée par arrêt de la Cour de justice du 24 juillet 2020, pour de motifs similaires à ceux ayant conduit au rejet des objections de B______ dans la procédure de mainlevée de l'opposition formée au commandement de payer du 2 mars 2017.

La demande en annulation de la poursuite a finalement été déclarée irrecevable par jugement du 14 septembre 2020, C______ LTD n'ayant pas versé les sûretés auxquelles elle avait été condamnée par ordonnance du 17 février 2020, confirmée par arrêt de la Cour de justice du 24 juillet 2020.

l. C______ LTD a été déclarée en faillite le 8 octobre 2020 par le Tribunal sur requête de B______.

m. La faillite fait l'objet d'une liquidation en la forme sommaire, B______ ayant versé l'avance requise pour en couvrir les frais.

n. L'Office cantonal des faillites (ci-après l'Office) a procédé à l'interrogatoire de la faillie le 5 novembre 2020.

Au cours de celui-ci, la faillie a estimé les dettes de la société à 94'000'000 fr., composées essentiellement de la créance de B______, contestée, mais provisionnée à hauteur de 92'591'104 fr., et de créances fiscales. Compte tenu de la contestation de la dette envers B______, la faillie considérait qu'elle n'était pas surendettée.

o. B______ est intervenue auprès de l'Office le 25 février 2021 après avoir pris connaissance du procès-verbal d'interrogatoire et des documents produits par la faillie en posant plusieurs questions, afin que des investigations complémentaires soient entreprises (production de pièces complémentaires, interrogatoire des organes, recherches de renseignements auprès des banques, etc.), car elle émettait des doutes sur la relation exacte entre C______ LTD d'une part et G______ LTD, H______ LTD et I______ LTD d'autre part, ainsi que sur l'absence totale de flux financiers transitant par C______ LTD. Elle estimait également que des créances en responsabilité contre les organes de C______ LTD, ainsi que des créances envers G______ LTD, H______ LTD et I______ LTD devaient être inscrites à l'inventaire.

p. L'Office a procédé à des investigations complémentaires auxquelles C______ LTD s'est partiellement opposée, estimant que certaines requêtes de B______ étaient abusives.

q. La faillie a approuvé par courrier du 24 juin 2021 l'inventaire de la faillite contenant la mention "aucun bien à inventorier".

r. L'Office a procédé à la publication de la faillite et à l'appel aux créanciers le ______ 2021 et fixé un délai au 1er août 2021 aux créanciers et aux détenteurs de biens appartenant à la faillie pour s'annoncer.

s. A______ a produit une créance de 13'220 fr. 71 dans la faillite de C______ LTD à titre d'honoraires d'administratrice.

D______ a produit une créance 13'698 fr. à titre d'honoraires d'administrateur.

B______ a produit une créance de 283'445'186 fr. 98, composée d'une créance principale de 96'615'613 fr. 82, soit la contre-valeur en francs suisse de la créance découlant de la sentence arbitrale du 8 juin 2001 de 96'993'890 usd au cours du 30.01.2019, d'une créance d'intérêt de 186'763'349 fr. 05, soit les intérêts générés entre le 8 juin 2001 et la faillite au taux de 10 %, des frais de justice et dépens alloués dans le cadre des procédures d'exécution forcée en Suisse de 228'572  fr.  45, d'une créance d'intérêt de 42'724 fr. 11 sur lesdits frais judiciaires et dépens, le tout sous déduction de 205'072 fr. 45 versés par C______ LTD à l'Office des poursuites le 17 juillet 2019.

t. La faillie a été convoquée par l'Office le 12 octobre 2021 pour se prononcer sur les productions des créanciers.

Elle allègue s'être opposée à la créance de 283'445'186 fr. 98 produite par B______, au motif qu'elle avait été éteinte par la consignation du montant de 96'993'890 usd par G______ LTD, H______ LTD et I______ LTD auprès du "Consignataire de la propriété ennemie".

Elle allègue également s'être étonnée du montant de la créance articulée, qui comprenait des intérêts très importants, incompatibles avec ceux admis par le jugement de mainlevée du 25 septembre 2012 et l'arrêt de la Cour de justice du 22  mars 2013 qu'elle a présentés à l'Office.

Lors de cette séance, l'Office n'aurait pas soumis à la faillie une version modifiée de l'inventaire pour approbation.

u. L'Office a publié le dépôt de l'inventaire et de l'état de collocation le ______ 2021. Ces documents ont été adressés le même jour à la faillie par courriel. L'Office a envoyé le même jour à A______ un courrier l'informant de l'inscription à l'inventaire de la faillite de C______ LTD, sur requête de B______, d'une créance à son encontre de 175'152'079 fr. 41 et l'a invitée à régler ce montant.

L'état de collocation admettait notamment la créance de B______ résultant de la sentence arbitrale du 8 juin 2001, à hauteur de 175'107'600 fr., comprenant 88'957'000 fr. de créance principale (93'908'945 usd au taux de change du 8.10.2020, jour du prononcé de la faillite), 86'127'600 fr. d'intérêts au taux légal de 5 % l'an, courus entre le 8 juin 2001 et le prononcé de la faillite, et 23'000 fr. à titre de solde de frais et dépens issus des procédures de mainlevée et de faillite à Genève.

L'inventaire, qui avait été modifié depuis son approbation du 24 juin 2021 par A______, mentionnait six prétentions litigieuses, toutes estimées à 1 fr., de 175'152'079 fr. 41 contre A______, D______ et F______ SA, fondées sur leur responsabilité d'organes de C______ LTD, et de 175'107'600 fr. contre G______ LTD, H______ LTD et I______ LTD, fondées sur leur condamnation conjointe et solidaire avec C______ LTD dans la sentence arbitrale du 8 juin 2001.

v. Le 28 septembre 2021, l'Office a conclu à la suspension de la procédure arbitrale initiée le 4 juillet 2019 par C______ LTD et de la procédure en désignation d'arbitre, en application de l'art. 207 LP. Le Tribunal a toutefois rejeté cette requête, considérant que la procédure en désignation d'arbitre n'avait pas à être suspendue en application de l'art. 207 LP, tout comme la procédure arbitrale internationale.

Par circulaire du 1er décembre 2021 aux créanciers de C______ LTD, l'Office a proposé la renonciation par la masse en faillite de C______ LTD à ses droits dans la procédure d'arbitrage initiée par C______ LTD le 4 juillet 2019 et de céder ces droits aux créanciers qui le souhaitaient.

Par courrier du 20 décembre 2021, A______ et D______ ont approuvé la proposition de l'Office et demandé la cession des droits de la masse dans la procédure arbitrale.

L'Office a fait droit à cette demande par décision du 23 décembre 2021.

A______ et D______ ont dès lors repris la place de la masse en faillite de C______ LTD dans les procédures d'arbitrage et de désignation d'arbitre.

B. a. Par acte déposé le 25 novembre 2021 auprès du greffe universel du Pouvoir judiciaire, à l'attention de la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (ci-après la Chambre de surveillance), "A______, plaignante", a déposé plainte contre l'inventaire et l'état de collocation établis par l'Office. Elle a conclu à ce que ces actes soient annulés, à ce que la mention d'une créance à son encontre et de créances à l'encontre de G______ LTD, H______ LTD et I______ LTD soit supprimée de l'inventaire et à ce que l'état de collocation soit modifié en ce sens que la créance de B______ ne soit pas simplement colloquée à concurrence de 175'107'600  fr., mais le soit "pour mémoire" à concurrence de 88'979'997 fr. plus frais judiciaires.

Dans le corps de la plainte, aux pages 18 et 19, sous rubrique "recevabilité" figurait le passage suivant :

"Madame A______ agit dans le cadre de la présente plainte tant en qualité de représentante de la société faillite qu'en tant que créancière et débitrice.

A ce titre, Madame A______ a intérêt à ce que les mesures prises par l'Office en violation des dispositions applicables à la faillite soient annulées, subsidiairement modifiées.

Elle a en premier lieu intérêt à ce que des créances grevant la masse ne soient pas colloquées en violation des règles procédurales applicables, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce puisque (…).

En second lieu, Madame A______ a également intérêt à ce que l'Office respecte les dispositions légales applicables à l'établissement de l'inventaire et ne prête pas son concours aux visées d'un créancier qui sont étrangères au but poursuivi par la procédure de faillite (…).

Madame A______ dispose ainsi de la qualité pour porter plainte tant contre la décision d'inventaire que contre celle d'état de collocation (…)".

Sur le fond et en substance, elle reprochait à l'Office d'avoir établi l'inventaire déposé sans l'avoir soumis à la faillie pour approbation en application des art. 228 LP et 29 al. 3 et 4 OAOF, d'avoir inscrit des créances litigieuses à l'encontre de tiers à l'inventaire sans avoir procédé à un examen minimal de l'existence de ces créances, en violation des art. 221 LP et 2 CC, et en se laissant influencer par B______, alors que ces créances étaient manifestement inexistantes. L'Office n'avait notamment pas examiné les conditions de l'action en responsabilité contre les organes, plus spécifiquement la péjoration de la situation financière de la faillie après l'apparition du surendettement, spécialement s'agissant de la plaignante qui n'aurait été administratrice de la société que depuis 1994, alors que la créance litigieuse était née en 1979. En tout état, aucun surendettement n'était ressorti de la comptabilité de C______ LTD durant les dix dernières années et la société n'avait jamais détenu d'actifs en raison de sa position de pur prête-nom. Aucune aggravation du surendettement ne pouvait par conséquent être reproché à la plaignante.

Un raisonnement similaire devait être appliqué aux créances contre D______ et de F______ SA.

L'Office avait par ailleurs accepté d'inscrire à l'inventaire, à la demande B______, une action récursoire de C______ LTD contre G______ LTD, H______ LTD et I______ LTD en répartition du montant versé à B______ par C______ LTD en exécution de la sentence arbitrale, ce qui entrait en contradiction avec le fait que B______ contestait simultanément tout paiement en sa faveur en exécution de la sentence arbitrale par C______ LTD et réclamait l'admission à l'état de collocation de C______ LTD de sa créance en paiement du montant que la sentence arbitrale avait condamné C______ LTD à lui verser. L'Office avait par conséquent prêté son concours à des manœuvres contraires à la bonne foi de B______ en admettant l'inscription de créances récursoires contre G______ LTD, H______ LTD et I______ LTD à l'inventaire de C______ LTD.

La plaignante reprochait par ailleurs à l'Office d'avoir admis purement et simplement à l'état de collocation la créance de B______ alors qu'elle faisait l'objet d'une procédure arbitrale en constatation de son extinction et n'aurait par conséquent dû y figurer que "pour mémoire" en raison de la procédure en cours au moment du prononcé de la faillite (art. 63 OAOF), dans l'attente d'une décision de l'assemblée des créanciers, après suspension de la procédure arbitrale (art. 207 LP). Ce faisant, il avait privé les créanciers de se prononcer sur l'admission de la créance ou de la reprise du procès, puis, cas échéant de se faire céder les droits de la masse dans la procédure en cours (art. 260 LP). Subsidiairement, la plaignante reprochait à l'Office de ne pas avoir procédé à un examen ne serait-ce que sommaire de l'existence de la créance alléguée par B______, lequel aurait conduit à refuser son inscription à l'état de collocation au montant requis qui comprenait des intérêts indus.

b. La plaignante a sollicité l'effet suspensif à la plainte, lequel a été prononcé par la Chambre de surveillance par ordonnance du 1er décembre 2021.

Dans le cadre des considérants de cette ordonnance, la Chambre de surveillance a mentionné, en se fondant sur l'entête de la plainte, que la plaignante agissait pour elle-même et non pour C______ LTD.

c. Par courrier du 9 décembre 2021 à la Chambre de surveillance, la plaignante a réagi au fait que l'ordonnance sur effet suspensif mentionnait qu'elle n'agissait que pour elle-même en renvoyant au passage de sa plainte mentionné supra à l'attendu B.a, et en soutenant qu'elle agissait tant à titre personnel qu'au nom de la société faillie.

d. D______ a déposé une plainte similaire à celle de A______ contre l'inventaire et l’état de collocation de C______ LTD.

Par courrier du 13 janvier 2022, la Chambre de surveillance a fixé un délai aux parties au 21 janvier 2022 pour se prononcer sur l'éventuelle jonction des procédures issues des plaintes de A______ et de D______. Les parties se sont déclarées favorables ou s'en sont rapportées à justice dans leurs réponses du 21 janvier 2022.

L'Office a également déposé ses déterminations sur les plaintes dans le même délai.

Par courrier du 31 janvier 2022, le conseil de D______ a informé la Chambre de céans du décès de son client.

Par ordonnance du 8 mars 2022, la Chambre de surveillance a renoncé à la jonction des causes en l'état, suspendu la cause portant sur la plainte de D______ et invité son conseil à l'informer dans les meilleurs délais du nom des héritiers du défunt, certificat à l'appui, afin d'éviter de retarder le traitement de la présente cause dans l'optique d'un traitement conjoint.

Aucune information concernant les successibles de D______ ne lui ayant été communiquée, la Chambre a renoncé, par ordonnance du 13 juillet 2022, à envisager la jonction de la présente cause à celle consécutive à la plainte de D______ et fixé un délai pour le dépôt des observations de B______.

e. Dans ses observations du 21 janvier 2022, l'Office a conclu à l'irrecevabilité de la plainte en tant qu'elle visait l'inventaire et à son rejet en tant qu'elle visait l'état de collocation.

f. Dans ses observations du 26 août 2022, B______ a conclu à l'irrecevabilité de la plainte de A______, subsidiairement à son rejet et à la révocation de l'effet suspensif octroyé à la plainte.

g. Dans le cadre de ses déterminations, B______ a également critiqué la collocation de sa créance par l'Office, considérant que celui-ci avait appliqué un taux de change dollar américain / franc suisse qui n'était pas pertinent, qu'il avait calculé des intérêts au taux de 5 % en lieu et place de 10 % l'an et qu'il n'avait pas retenu d'intérêts moratoires sur les frais judiciaires et dépens. Elle annonçait par conséquent le dépôt d'une action en contestation de l'état de collocation tendant à inscrire une créance en sa faveur de 261'494'957 fr. 80 à l'état de collocation.

h. Les parties ayant sollicité la fixation de délais pour répliquer, elles ont respectivement déposé des écritures en ce sens les 5 et 27 décembre 2022.

i. La Chambre de surveillance a gardé la cause à juger le 24 janvier 2023, ce dont elle a informé les parties par avis du même jour.

EN DROIT

1. 1.1 Déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office (art. 17 al. 1 LP), la plainte est a priori recevable.

1.2 La qualité pour porter plainte selon l'art. 17 LP – condition de recevabilité devant être examinée d'office (GILLIERON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, n° 140 ad art. 17 LP) – est reconnue à toute personne lésée ou exposée à l'être dans ses intérêts juridiquement protégés, ou à tout le moins atteinte dans ses intérêts de fait, par une mesure ou une omission d'un organe de la poursuite. Les créanciers et les débiteurs ont, de manière générale, le droit de se plaindre de ce que les actes de l'administration de la faillite n'ont pas été accomplis conformément à la loi. En revanche, les tiers à la procédure d'exécution forcée n'ont en principe pas la qualité pour former une plainte, à moins qu'un acte de poursuite ne leur soit directement préjudiciable. Le plaignant doit dans tous les cas poursuivre un but concret; il doit être matériellement lésé par les effets de la décision attaquée et avoir un intérêt digne de protection à sa modification ou à son annulation (ATF 139 III 384 consid. 2.1; 138 III 628 consid. 4; 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3, JdT 2004 II 96; 120 III 42 consid. 3; arrêts du Tribunal fédéral 5A_48/2022 du 10 mai 2022 consid. 4.2.1; 5A_483/2012 du 23 août 2012 consid. 5.3.1).

1.3 La qualité pour agir et la compétence de la Chambre de céans seront examinées ci-après en tant que besoin en lien avec les différents griefs invoqués par la plaignante.

2. A______ est expressément mentionnée dans la plainte en qualité de plaignante. Il n'est jamais fait mention de C______ LTD en cette qualité.

Suite à l'ordonnance sur effet suspensif rendue par la Chambre de céans, la plaignante a soutenu qu'elle n'agissait pas que pour elle-même, mais également pour C______ LTD. A l'appui, elle invoque un passage de la plainte, situé dans le chapitre "recevabilité", dans lequel elle dit agir "en qualité de représentante de la société faillie". Il n'en demeure pas moins que, dans l'argumentation qui suit cette affirmation – laquelle peut au demeurant être comprise de diverses manières –, A______ développe une argumentation exclusivement orientée sur la préservation de ses propres intérêts et non ceux de la faillie, puisque seul son nom apparaît dans le texte et non pas celui de C______ LTD (cf. le texte de la plainte retranscrit supra sous attendu B.a), de sorte que cette prétendue extension de la qualité de plaignante à C______ LTD est sans portée, même en interprétant largement les termes de la plainte.

C'est par conséquent à l'aune des intérêts de A______ que la plainte sera examinée, à l'exclusion de griefs qui seraient dans le seul intérêt de la faillie qui n'est pas plaignante.

3. La plaignante fait grief à l'Office d'avoir inscrit à l'inventaire publié le ______ 2021 divers actifs qui n'y figuraient pas lorsque l'inventaire lui avait été présenté pour vérification en juin 2021, notamment une créance à son encontre de 175'152'079 fr. 41 à titre de réparation du préjudice causé à la société dans l'exercice de son activité d'administratrice.

3.1.1 Dès que l'Office a reçu communication de l'ouverture de la faillite, il procède à l'inventaire des biens du failli (art. 221 al. 1 LP).

L'inventaire est une mesure interne de l'administration de la faillite qui permet d'établir les actifs du failli, donne une vision d'ensemble sur le patrimoine du failli et tend à assurer sa conservation. Il sert aussi de base à la décision déterminant la liquidation de la faillite : suspension de la faillite faute d'actif, liquidation sommaire ou liquidation ordinaire. Il ne détermine pas l'appartenance d'un élément du patrimoine à la masse en faillite, ni n'entraîne le dessaisissement du failli. Il n'a aucun effet sur la situation juridique des tiers. En particulier, le fait de porter à l'inventaire un actif ne faisant pas déjà partie de la masse n'a pour effet ni de le soumettre à la mainmise de l'administration de la faillite ni de trancher la question de son appartenance à la masse. Pour l'établir, l'office se fondera, notamment, sur les livres comptables et les papiers d'affaires qu'il a pris sous sa garde, l'interrogatoire du failli, les envois postaux adressés au failli ou expédiés par lui, ainsi que les allégations des créanciers, sans égard à l'opinion qu'il peut avoir sur l'appartenance du droit patrimonial à la masse active. L'office doit porter à l'inventaire l'ensemble des éléments de ce patrimoine, quelle que soit leur nature et leur lieu de situation, et que leur appartenance au failli soit contestée ou non. Il en va notamment ainsi des créances du failli, que celles-ci soient ou non contestées, exigibles ou liquides (décision et les références citées : ATF 114 III 21 cons. 5b; 90 III 18 cons. 1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_352/2008 du 13 novembre 2008, cons. 2.3.3; décisions de la Chambre de surveillance DCSO/127/2018 du 1er mars 2018 consid. 1.3.2 et 1.3.2; DCSCO/255/2015 du 20 août 2015, consid. 1.3 et 1.4; Vouilloz, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 3, 11, 12, 14 et 15 ad art. 221 LP; Lustenberger, Basler Kommentar, SchKG II, 2010, n° 21 ad art. 221 LP; Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, n° 11 ss ad art. 221 LP et n° 9 ad art. 242 LP).

La seule hypothèse reconnue par la jurisprudence permettant à l'Office de refuser d'inventorier un bien ou un droit est son insaisissabilité ou son incessibilité manifeste, absolument patente (décision de la Chambre de surveillance DCSO/127/2018 du 1er mars 2018 consid. 1.3.2 et les références citées : ATF 81 III 122-123, JdT 1956 II 25; 58 III 113, JdT 1933 II 11; Romy, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 4 ad art. 197 LP).

Après l'achèvement de l'inventaire, le failli se prononce sur le caractère exact et complet de l'inventaire (art. 228 al. 1 LP; art. 29 s. OAOF) après que son attention a été expressément attirée sur les conséquences pénales des indications incomplètes sur sa situation de fortune (art. 29 al. 3 OAOF). Cette déclaration doit être donnée, verbalisée et signée à la suite de chacune des catégories de l'inventaire (art. 29 al. 4 OAOF). Lorsque le failli est une société anonyme, une société à responsabilité limitée ou une société coopérative, un des organes de la société fait la déclaration et la signe (art. 30 OAOF). La déclaration du failli doit être précise, car il s'agit d'établir rigoureusement dans l'inventaire l'étendue de son patrimoine (Vouilloz, op. cit., n° 1 à 3 ad art. 228 LP).

3.1.2 La voie de la plainte est ouverte au failli lui-même ou l’administrateur d’une société anonyme faillie contre des mesures prises par l'office relatives à la formation, la conservation et la réalisation de la masse active, de même que contre le compte final et tableau de distribution, lorsque ces mesures lèsent ses intérêts. Appartiennent aux mesures relatives à la formation de la masse active celles prises en relation avec les droits et obligations du failli telles que l'obligation de renseigner l’Office (art. 222 al. 1 LP) et de coopérer avec l’office (art. 229 LP), ainsi que le droit de se faire soumettre l’inventaire (art. 228 LP; art. 29 et 37 OAOF) et de se déterminer sur chaque production (art. 244 LP; art. 55 OAOF) (décision de la Chambre de surveillance DCSO/330/2006 du 24 mai 2006 consid. 1b et les références citées). En revanche, la prise d'inventaire ne déployant pas d'effets juridiques à l'égard des tiers, ceux-ci n'ont généralement pas qualité pour porter plainte contre la prise en compte ou non de biens dans l'inventaire (ATF 54 III 18 consid. 1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_352/2008 du 13 novembre 2008, cons. 2.3.3; décisions de la Chambre de surveillance DCSO/127/2018 du 1er mars 2018 consid. 1.3.1; DCSCO/255/2015 du 20 août 2015, consid. 1.3 et 1.4Vouilloz, op. cit., n° 22 ad art. 221 LP).

Les litiges relatifs à l'existence ou au montant d'un droit supposé tombé dans le patrimoine du failli ne relèvent pas de la compétence de l'office – ni de celle de l'autorité de surveillance saisie d'une plainte – mais de celle du juge civil (décision de la Chambre de surveillance DCSO/127/2018 du 1er mars 2018 consid. 1.3.2).

3.2 En l'espèce, la plaignante invoque en substance deux griefs à l'encontre de la confection de l'inventaire par l'Office : d'une part, un examen insuffisant des créances inscrites à l'encontre de tiers, alors que l'inexistence desdites créances était évidente; d'autre part, l'absence de soumission de l'inventaire du ______ 2021 à la faillie pour examen et approbation.

3.2.1 Le grief visant le caractère infondé des créances inscrites à l'inventaire n'entre pas dans la compétence de la Chambre de céans. En l'occurrence, la plaignante n'invoque pas l'insaisissabilité ou l'incessibilité patente des créances inscrites – seuls griefs dont la Chambre de céans pourrait connaître –, mais le caractère infondé desdites créances, lequel relève de la compétence exclusive du juge du fond.

Ce grief est partant irrecevable.

3.2.2 Par ailleurs, dans la mesure où la plaignante agit à titre personnel, en qualité de tiers visée par l'inscription d'une créance à son encontre à l'inventaire, il résulte des principes rappelés ci-dessus que le fait d'inventorier une créance à l'égard d'un tiers n'a aucune conséquence sur sa situation juridique. Il n'en découle en particulier ni création d'une obligation auparavant inexistante, ni reconnaissance du bien-fondé de la prétention inventoriée, ni constatation de son montant. Ce tiers n'a donc aucun intérêt à attaquer l'inventaire et il ne dispose pas de la qualité pour agir en application des principes rappelés ci-dessus, que ce soit pour contester le fondement des créances inscrites à l'inventaire ou pour remettre en cause la manière dont l'Office a confectionné l'inventaire.

3.2.3 Dans la mesure où la plaignante agit en qualité de créancière inscrite à l'état de collocation, elle n'a pas d'intérêt à contester l'inventaire en vue d'en soustraire des actifs, une telle opération ayant pour résultat de défavoriser ses intérêts en réduisant les biens soumis à l'exécution forcée.

3.2.4 Dans la mesure où la plaignante agit à titre personnel, mais en sa qualité d'organe de C______ LTD, la qualité pour agir doit également lui être déniée faute d'intérêt. Il ressort en effet de la décision DCSO/330/2006 précitée que la qualité pour déposer plainte est offerte à l'administrateur d'une société anonyme à titre personnel lorsqu'une mesure de l'Office porte atteinte à ses intérêts en cette qualité. La qualité pour agir lui est ainsi essentiellement accordée pour se plaindre d'atteintes personnelles dans le cadre de son obligation de collaborer avec l'Office notamment de fournir des renseignements et des documents, ainsi que de tolérer des visites domiciliaires, séquestres et séquestre du courrier. Or, en l'occurrence, la plaignante ne reproche pas à l'Office d'avoir adopté des comportements préjudiciables à son égard dans ses investigations au cours de la confection de l'inventaire, mais d'avoir omis de soumettre à la faillie l'ultime version de l'inventaire avant publication. Ce faisant, elle n'invoque pas une atteinte à son détriment personnel mais à celui de C______ LTD, qui n'est pas plaignante (cf. consid. 2 supra). Elle ne dispose donc pas de la qualité pour agir.

3.2.5 Il découle de ce qui précède que les griefs adressés par la plaignante à l'encontre de l'inventaire établi par l'Office dans la faillite de C______ LTD sont irrecevables.

4. La plaignante fait également grief à l'Office d'avoir admis à l'état de collocation la créance de B______, à un montant insoutenable sous l'angle de la vraisemblance. En outre, l'Office n'a pas fait figurer la mention "pro memoria" en regard de la créance alors qu'elle faisait l'objet de procédures en cours dont l'objectif était d'établir l'extinction de la créance par consignation du montant litigieux.

4.1.1 Après l'expiration du délai fixé aux créanciers pour produire leurs créances, l'administration de la faillite examine les réclamations, fait les vérifications nécessaires et statue sur leur admission. Elle consulte le failli, mais n'est pas tenue par ses déclarations (art. 244 et 245 LP).

L'administration de la faillite doit examiner chaque production et vérifier l'existence, le montant précis (en capital, intérêts et frais) et le rang de la créance alléguée, ainsi que son appartenance au passif. La loi ne définit pas l'intensité des vérifications auxquelles doit procéder l'administration. En admettant ou en rejetant une production, l'administration de la faillite ne garantit ni ne compromet définitivement la production en cause, mais fixe seulement qui des autres intervenants ou du soi-disant créancier devra, le cas échéant, ouvrir action en contestation de l'état de collocation. L'administration de la faillite ne doit examiner les productions que sommairement et décider de l'admission ou du rejet de la production en fonction du critère de la vraisemblance, limité à la preuve littérale. Bien que sommaire, l'examen de la production ne pourra se limiter à l'enregistrement des déclarations de l'intervenant et/ou du failli, mais celles-ci devront faire l'objet d'une vérification sur la base des éléments objectifs à disposition de l'administration (pièces comptables, livres, correspondance du failli, documents produits, etc.). Elle ne saurait notamment écarter une production en se fondant sur la déclaration du failli qui prétend avoir payé sans rechercher une pièce établissant le paiement (art. 40 al. 1 OAOF; ATF 96 III 106 consid. 2, JdT 1971 II 95; 93 III 59 consid. 2a, JdT 1968 II 2; 64 III 65 consid. 2, JdT 1938 II 85; Jaques, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 7, 9 à 14 ad a art. 244 LP).

4.1.2 En application de l'art. 207 LP, sauf cas d'urgence, les procès civils auxquels le failli est partie et qui influent sur l'état de la masse en faillite sont suspendus. Ils ne peuvent être continués, en cas de liquidation ordinaire qu'à l'expiration d'un délai de dix jours suivant la seconde assemblée des créanciers et en cas de liquidation sommaire, comme c'est le cas ici, qu'après les 20 jours qui suivent le dépôt de l'état de collocation.

A teneur de l'art. 63 al. 1 à 3 OAOF, l’administration de la faillite ne statue pas sur l'admission à l'état de collocation des créances litigieuses qui font l’objet d’un procès au moment de l’ouverture de la faillite; ces créances sont simplement mentionnées pro memoria dans l’état de collocation (al. 1). Si le procès n’est continué ni par la masse, ni par les créanciers cessionnaires de la masse au sens de l’article 260 LP individuellement, la créance est considérée comme reconnue et les créanciers n’ont plus le droit d’attaquer son admission à l’état de collocation, à teneur de l’article 250 LP (al. 2). Si au contraire le procès est continué, cette créance sera, selon l’issue du litige, ou bien radiée ou colloquée définitivement; cette collocation ne pourra pas non plus être attaquée par les créanciers (al. 3).

Le but de la suspension du procès au sens de l'art. 207 LP est de laisser le temps aux créanciers et à l'administration de la faillite de décider s'ils veulent ou non assumer, aux frais de la masse, les procès en cours suspendus et les risques associés, ou si un ou des créanciers souhaitent se faire céder, cas échéant, le droit de conduire le procès en application de l'art. 260 LP. L'art. 63 OAOF précise comment l'office doit procéder et mentionner à l'état de collocation une dette du failli faisant l'objet d'un procès suspendu au sens de l'art. 207 LP. Le mécanisme des art. 207 LP et 63 OAOF ne s'applique qu'aux procès pendants en Suisse, à l'exclusion des procès à l'étranger ou des arbitrages internationaux, à moins que le juge étranger ou les arbitres n'acceptent une suspension de la procédure en se soumettant volontairement à l'art. 207 LP (ATF 141 III 382 consid. 4.2; 140 III 320 consid. 7.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_910/2019 du 1er mars 2021 consid.  3.10 et 3.12; Wohlfart, Meyer Honegger, Basler Kommentar, n° 5a ad art. 207 LP).

4.1.3 L'état de collocation peut être contesté par la voie de la plainte (art. 17 LP) ou par celle de l'action en contestation de l'état de collocation (art. 250 LP).

L'action en contestation de l'état de collocation devant le juge civil du for de la poursuite est ouverte au créancier qui entend contester le fond d'une créance colloquée ou le rang d'un autre créancier (art. 250 LP). En revanche les violations formelles de l'art. 244 LP peuvent être dénoncées par la voie de la plainte, en particulier s'agissant de l'admission d'une prétention en l'absence de tout moyen de preuve, de l'insuffisance de la vérification d'une créance admise ou des exceptions du failli retenues à l'appui d'un rejet, de l'omission d'entendre le failli ou de l'indication erronée de la reconnaissance d'une créance par le failli (ATF 93 III 59 consid. 2a et 3, JdT 1968 II 2; 38 I 269 consid. 1, JdT 1912 II 110; Jaques, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 32 ad art. 244 LP).

La voie de la plainte est également ouverte pour toute violation de l'art. 245 LP contre les décisions de collocation de l'office, notamment en cas d'absence de décision ou de décisions équivoques, conditionnelles, inintelligibles ou contradictoires, interprétées selon le principe de la confiance (Jaques, op. cit., n° 43 ad art. 245 LP).

Une plainte ne soulevant que des problèmes de droit matériel liés à l'existence, au montant, au rang, ou à l'exigibilité d'un droit porté à l'état est irrecevable et relève exclusivement du juge dans le cadre d'une action en contestation de l'état de collocation au sens de l'art. 250 LP (Jaques, op. cit., n° 2, 14 et 15 ad art. 250 LP).

4.1.4 Le tiers débiteur d'une créance ou d'une prétention révocatoire, qui n'est pas lui-même créancier de la faillite, n'est pas directement lésé par la collocation d'une créance et ne peut l'attaquer par la voie de la plainte pour obtenir la modification de l'état de collocation (ATF 139 III 384 consid. 2.2.1).

4.2.1 En l'espèce, la plaignante, créancière colloquée, a la qualité pour agir par la voie de la plainte à l'encontre de l'état de collocation dressé par l'Office.

4.2.2 L'Office n'avait pas à mentionner la créance de B______ pro memoria conformément à l'art. 63 al. 1 OAOF puisque la procédure d'arbitrage international et la procédure satellite en désignation des arbitres n'ont pas été suspendues en application de l'art. 207 LP. Les arbitres et le juge saisis n'avaient d'ailleurs pas à le faire au vu de la jurisprudence du Tribunal fédéral rappelée ci-dessus. La plainte doit par conséquent être rejetée pour ce seul motif en tant qu'elle vise la modification de l'état de collocation en ce sens.

En tout état, remettre en cause l'état de collocation établi par l'Office en se prévalant de l'absence de la mention pro memoria en marge de la créance de B______ n'est pas soutenable en l'espèce. La suspension de l'art. 207 LP et la mention pro memoria en marge de l'état de collocation au sens de l'art. 63 OAOF ont vocation à durer jusqu'à vingt jours après le dépôt de l'état de collocation, afin de laisser le temps à la masse et aux créanciers de se prononcer sur la continuation ou la renonciation aux procès en cours et l'éventuelle cession à des créanciers du droit de les poursuivre. En l'occurrence, ce délai est échu, la masse a renoncé à poursuivre le procès et a cédé ce droit, notamment à la plaignante. L'objectif visé par le processus mis sur pied par les art. 207 LP et 63 OAOF a par conséquent été atteint de sorte que la plainte ne présente plus aucun intérêt pour la plaignante et devrait conduire au constat de son irrecevabilité.

4.2.3 Le grief subsidiaire articulé par la plaignante, consistant à contester la quotité de la créance de B______ inscrite à l'état de collocation, devrait en principe faire l'objet d'une action en contestation de l'état de collocation devant le juge et non pas d'une plainte au sens de l'art. 17 LP devant l'autorité de surveillance. Ce ne serait en effet que si l'Office n'avait pas respecté son obligation d'examiner à tout le moins sommairement les créances produites avant de les colloquer que son activité pourrait faire l'objet d'une plainte auprès de la Chambre de céans.

En l'occurrence, B______ a produit essentiellement une créance composée de la contrevaleur en francs suisses du capital découlant de la sentence arbitrale du 8 juin 2001 de 96'993'890 usd, soit 96'615'613 fr. 82 (comprenant le capital d'origine en 30'130'396 usd et les intérêts courus au taux de 10 % entre son exigibilité et la sentence en 65'968'828 usd) et d'une créance d'intérêt de 186'763'349 fr. 05, soit les intérêts générés entre le 8 juin 2001 et la faillite au taux de 10 % par l'intégralité du capital découlant de la sentence arbitrale.

La plaignante allègue que C______ LTD a, lors de l'examen des productions de ses créanciers à l'Office, le 12 octobre 2021, contesté le montant de la production de B______, notamment le montant le calcul des intérêts, et présenté le jugement du 25 septembre 2012 du Tribunal ainsi que l'arrêt du 22 mars 2013 de la Cour de justice qui impliquaient qu'aucun intérêt ne devait être perçu sur le capital fixé par la sentence du 8 juin 2001.

Dans ses observations, l'Office ne conteste pas ces allégués mais estime avoir tenu compte des objections de C______ LTD dans la mesure admissible lors de l'établissement de l'état de collocation.

Il ressort de l'état de collocation attaqué que l'Office a inscrit la créance litigieuse de B______ à concurrence du capital auquel C______ LTD avait été condamnée par la sentence arbitrale du 8 juin 2001, plus les intérêts moratoires au taux de 5 % l'an courus entre le 8 juin 2001 et le prononcé de la faillite. Il n'a ainsi ni suivi B______ – contrairement à ce que soutient la plaignante –, ni C______ LTD. Cela étant, au vu des divers documents dont il disposait, notamment des décisions sur mainlevée susmentionnées, et des positions adoptées par les parties, son calcul n'est pas moins vraisemblable que celui de la plaignante ou celui de B______. Les prétentions de cette dernière semblent injustifiées car elles impliquent que des intérêts courent sur des intérêts déjà capitalisés, de surcroît au taux de 10 % qui n'est pas le taux usuel des intérêts moratoires (art. 104 CO). L'Office était par conséquent fondé à ne pas admettre la vraisemblance des prétentions en intérêts de B______. Il n'avait pas non plus à tenir pour vraisemblable la position de C______ LTD qui prétendait qu'aucun intérêt moratoire n'était dû sur la somme à laquelle elle avait été condamnée par sentence du 8 juin 2001. A cet égard, l'arrêt de la Cour de justice du 22 mars 2013 n'excluait pas qu'un tel intérêt soit dû; il retenait uniquement qu'il n'existait pas de titre de mainlevée définitive condamnant C______ LTD à verser un tel intérêt. De son côté, le Tribunal, dans son jugement de mainlevée du 25  septembre 2012, avait retenu une autre solution estimant qu'un intérêt moratoire au taux de 5 % était dû dès la notification du commandement de payer sur le capital fixé dans la sentence arbitrale. Dans un contexte présentant de telles divergences d'opinions, la solution de l'Office est soutenable, sous l'angle de la vraisemblance, au vu des pièces dont il disposait. Aucun reproche ne peut donc lui être adressé dans la confection de l'état de collocation. Il appartenait donc aux créanciers insatisfaits de contester la collocation de la créance de B______ devant le juge du for de la faillite et non pas de former une plainte auprès de l'autorité de surveillance.

La plainte sera par conséquent, sur ce grief également, déclarée irrecevable faute de compétence de la Chambre de surveillance.

5. En définitive, la plainte de A______ sera rejetée dans la mesure, très restreinte, de sa recevabilité.

6. La procédure devant l'autorité de surveillance est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


Rejette, dans la mesure de sa recevabilité, la plainte formée le 25 novembre 2021 par A______ contre l'inventaire et l'état de collocation établis le ______ 2021 dans la faillite de C______ LTD, n° 2020 1______.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Madame Ekaterine BLINOVA et Monsieur Anthony HUGUENIN, juges assesseurs; Madame Elise CAIRUS, greffière.

 

Le président :

Jean REYMOND

 

La greffière :

Elise CAIRUS

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.