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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/820/2022

DCSO/523/2022 du 15.12.2022 ( PLAINT ) , REJETE

Descripteurs : Adjudication au créancier poursuivant de l'immeuble saisi; compensation du prix avec la créance en poursuite; conditions d'admission; poursuite abusive
Normes : cc.2.al2; lp.144
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/820/2022-CS DCSO/523/22

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 15 DECEMBRE 2022

 

Plainte 17 LP (A/820/2022-CS) formée en date du 11 mars 2022 par A______, élisant domicile en l'étude de Me Yves Nidegger, avocat.

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

-       A______

c/o Me NIDEGGER Yves

NIDEGGERLAW Sàrl

Rue Marignac 9

Case postale 285

1211 Genève 12.

- B______

c/o Me SPIRA Vincent

SPIRA + ASSOCIEES

Rue De-Candolle 28

1205 Genève.

- Office cantonal des poursuites.


EN FAIT

A. a. Les époux A______ et B______ s'opposent dans une procédure de divorce très conflictuelle.

b. Ils sont copropriétaires, à raison d'une moitié chacun, de la parcelle 1______ de la commune de C______ [GE], construite d'une villa qui a constitué le domicile de la famille pendant la vie commune.

c. A la séparation des conjoints, A______ est restée vivre dans l'ancien domicile conjugal, dont la jouissance lui a été attribuée sur mesures protectrices de l'union conjugale.

d. B______ s'est constitué un nouveau domicile et s'est depuis lors installé aux Emirats Arabes Unis.

e. La parcelle 1______ de la commune de C______ est grevée d'une cédule hypothécaire au porteur de 900'000 fr. plus intérêts de 12 % l'an dont D______, fille des époux A______/B______, allègue être porteuse et qu'elle a dénoncée au paiement, le 6 juin 2019 pour le 30 décembre 2019, uniquement à l'encontre de sa mère.

f. En l'absence de paiement, D______ a requis le 2 janvier 2020 la poursuite en réalisation de gage à l'encontre de A______, laquelle a fait opposition au commandement de payer, poursuite n° 2______, qui lui a été notifié le 2 mars 2020. Saisi d'une requête en mainlevée provisoire, le Tribunal de première instance (ci-après le Tribunal) l'a rejetée par jugement du 11 janvier 2021, confirmé par arrêt de la Cour de justice du 9 juin 2021. Aucune action en reconnaissance de dette n'a été déposée dans le délai de validité du commandement de payer. Cette poursuite s'est ainsi périmée.

g. D______ a déposé le 15 septembre 2021 une nouvelle réquisition de poursuite en réalisation de gage contre A______ pour un montant de 6'920'969 fr. fondée sur la cédule au porteur de 900'000 fr. (poursuite n° 3______). A______ a fait opposition au commandement de payer qui lui a été notifié, opposition dont D______ a demandé la mainlevée provisoire dans le cadre d'une requête déposée le 4 juillet 2022.

h. De son côté, A______, se prévalant de créances du droit de la famille à l'encontre de son mari, a obtenu quatre séquestres de la part de copropriété du premier sur la parcelle 1______ (séquestres n° 4______, 5______, 6______ et 7______).

i. Elle a intenté plusieurs poursuites à l'encontre de son mari, notamment pour valider ces séquestres : poursuite n° 8______ pour un montant de 350'836 fr. 10; poursuite n° 9______ pour un montant de 491'289 fr. 80; poursuite n° 10______ pour un montant de 340'879 fr. 65 à titre d'arriérés de contributions d'entretien; poursuite n° 11______, pour un montant de 1'810'859 fr. 25 à titre de sûretés fixées par le juge du divorce en sa faveur; poursuite n° 12______ pour un montant de 226'504 fr. 30 à titre d'arriérés de contributions d'entretien et de provisio ad litem.

j. Les deux premières ont conduit à la saisie de la part de copropriété de B______ sur la parcelle 1______ dans le cadre d'une série 13______ et les trois suivantes à la saisie du même bien dans le cadre d'une série 14______.

k. A______ a requis, les 24 janvier et 3 février 2022, la vente du bien saisi dans les deux séries susmentionnées. Elle a précisé qu'elle entendait, en vue de la vente aux enchères, se prévaloir de son droit de préemption de copropriétaire (art. 681 CC) et qu'elle souhaitait acquérir la part saisie de l'immeuble par compensation avec les créances qu'elle détenait à l'encontre du débiteur.

l. L'Office cantonal des poursuites (ci-après l'Office) lui a fixé un délai au 12 mars 2022 pour verser une avance de frais de réalisation de 5'000 fr. pour les quatre premières poursuites précitées, la cinquième ayant fait l'objet d'une action en libération de dette, toujours en cours. L'avance de frais a été réglée par l'intéressée.

m. L'Office a rendu le 28 février 2022, dans le cadre de la poursuite 12______, une décision de rejet de la réquisition de vente.

Il relevait en premier lieu que la réquisition de continuer cette poursuite avait d'ores et déjà été rejetée par décision du 17 novembre 2021 en raison du fait que le débiteur avait déposé une action en libération de dette suite au prononcé de la mainlevée provisoire de l'opposition. Or, cette action en libération de dette était toujours en cours et la poursuite ne pouvait être continuée tant qu'elle n'était pas jugée.

Par ailleurs, l'Office annonçait que le moment venu il n'entendait pas organiser une vente distincte de la part de copropriété de B______, mais procéder à une unique vente aux enchères de l'immeuble dans son entier. En effet, D______, créancière gagiste, avait requis une poursuite en réalisation de gage portant sur l'entier du bien immobilier. En application de l'art. 73f al. 2 ORFI, si avant la vente d'une part de copropriété, une poursuite en réalisation de gage ayant pour objet l'immeuble dans son entier était introduite, la priorité devait être donnée à cette poursuite. Dans de telles circonstances, l'acquisition de la part de copropriété du débiteur par un créancier acquéreur, n'était ouverte qu'au créancier gagiste.

B. a. Par acte expédié le 11 mars 2022, A______ a formé une plainte auprès de la Chambre de surveillance, concluant à ce qu'il soit ordonné à l'Office de procéder à la vente aux enchères de la part de B______ exclusivement et qu'il soit dit qu'elle était autorisée à se porter acquéreuse par compensation de créance.

A l'appui de la plainte, elle a contesté la position de l'Office selon laquelle seul un créancier gagiste pouvait acquérir le bien immobilier saisi par compensation, le seul critère étant le fait que le créancier soit le seul à participer à la saisie, outre le fait que l'Office soit d'accord avec la compensation. Or, en l'occurrence, elle était bien la seule créancière poursuivante. S'agissant de la poursuite en réalisation de gage émanant de D______, la créancière n'avait pas obtenu la mainlevée de l'opposition dans la première poursuite en réalisation de gage intentée et le sort de la seconde poursuite serait vraisemblablement le même. D______ n'était en réalité pas créancière gagiste et la créance alléguée était imaginaire.

b. La Chambre de surveillance a octroyé, par décision du 29 juin 2022, l'effet suspensif à la plainte, requis par A______.

c. Dans ses observations du 15 août 2022, l'Office a conclu au rejet de la plainte. Lorsqu'une poursuite en réalisation de gage vise un bien immobilier dans son ensemble, elle prime les autres poursuites qui auraient conduit à la saisie et à la réalisation d'une part de copropriété portant sur ce même bien (art. 73f al. 2 ORFI). En l'état, la poursuite en réalisation de gage intentée par D______ n'en était qu'au stade de la mainlevée de l'opposition, laquelle était en cours devant le Tribunal; le stade de la réquisition de vente était encore lointain. En outre, cette poursuite n'était pas abusive puisque la prétendue créancière persistait dans le processus d'exécution forcée en agissant en mainlevée. Tant que l'étape de la réquisition de vente par la créancière gagiste n'était pas atteinte, tout le processus de réalisation dans les poursuites ordinaires intentées par A______ était immobilisé. L'Office persistait par conséquent dans sa position exprimée dans sa décision du 28 février 2022, à savoir qu'il était prématuré de lui demander d'examiner si les conditions d'une acquisition par la plaignante de la part de copropriété de son mari sur la villa par compensation étaient réalisées, notamment le fait que la plaignante était la seule créancière poursuivante, ce qui ne pourrait être établi qu'à l'issue de la procédure en mainlevée pendante devant le Tribunal.

d. Dans leurs observations des 28 mars, 26 et 31 août 2022, B______ et D______ ont en substance soutenu que A______ n'était pas la seule créancière à requérir la réalisation de la villa et ne remplissait par conséquent pas les conditions pour requérir l'acquisition par compensation de la part de copropriété de son mari. Ils contestaient notamment la position de la plaignante selon laquelle la poursuite en réalisation de gage intentée par D______ était abusive et qu'il fallait en faire abstraction. En outre, la poursuite de D______ en réalisation de gage était prioritaire aux poursuites ordinaires de la plaignante comme l'avait souligné l'Office.

e. Par courriers des 22 août et 5 septembre 2022, A______ a répliqué.

f. Le greffe de la Chambre de surveillance a informé les parties par courrier du 23 septembre 2022 que la cause était gardée à juger.

g. Les parties ont encore spontanément répliqué les 6 octobre, 18 et 23 novembre 2022, écritures dont il n'a pas été tenu compte puisque déposées après que la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie potentiellement lésée dans ses intérêts (ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), la plainte est recevable.

2. La décision entreprise refuse d'entrer en matière en l'état sur la demande de la plaignante d'acquérir la part de copropriété de son mari sur la villa familiale par compensation essentiellement au motif qu'elle n'est pas la seule créancière poursuivante et que la poursuite concurrente de D______ est en réalisation de gage, ce qui lui confère la priorité. La plaignante rétorque à cela qu'il n'y a pas lieu de tenir compte de la poursuite en réalisation de gage de sa fille qui est abusive et nulle.

2.1.1 L'adjudicataire, lorsqu'il s'agit du créancier poursuivant, ne peut compenser le prix de l'adjudication avec la créance qu'il détient contre le poursuivi. Le poursuivi n'est pas titulaire de la créance du prix d'adjudication. Celui-ci est dû à l'office qui s'en servira pour prélever les frais de réalisation et de distribution et pour payer les poursuivants saisissants de la série où la réalisation a été requise et faite (art. 144 al. 3 et 4 LP). Tout au plus peut-on admettre que l'adjudicataire ne verse pas le prix de vente lorsqu'il est le seul créancier poursuivant (ou qu'il bénéficie, vis-à-vis des autres poursuivants, d'un droit préférable au produit de la réalisation selon l'art. 110 LP) et que le paiement en mains de l'Office pour s'acquitter du prix de l'adjudication lui donne immédiatement le droit de réclamer le versement de ces espèces en couverture de sa créance, espèces que l'Office doit lui distribuer en application de l'art. 144 LP. C'est dans cette seule mesure que l'on peut improprement parler d'une compensation. Le créancier enchérisseur doit du reste, même dans une telle situation, verser la somme correspondant aux frais. Ceux-ci sont en effet prélevés par l'Office en vertu de l'art. 144 al. 3 LP, et c'est le produit net qui doit être distribué, soit reversé au créancier lorsque celui-ci a seul un droit préférable à la distribution (ATF 111 III 56 consid. 2; 79 III 22ss).

Sur la base de cette jurisprudence s'est développée une pratique consistant à admettre une compensation "improprement dite" lorsque l'acquéreur du bien réalisé est également le créancier poursuivant bénéficiaire de la distribution des deniers. Elle fait l'objet de deux conditions : le créancier acquéreur est le seul créancier ou dispose d'un privilège sur le produit de réalisation ; le créancier acquéreur doit en outre payer les frais de procédure prélevés par l'Office (Marchand, La compensation dans la procédure de poursuite, in JdT 2012 II 61, p. 76).

2.1.2 A teneur de l'art. 73f al. 2 ORFI relatif à la réalisation des parts de copropriété, si, avant la vente de la part, une poursuite en réalisation de gage immobilier ayant pour objet l'immeuble entier est introduite, la priorité doit être donnée à cette poursuite.

2.1.3 Sont nulles les poursuites introduites en violation du principe de l'interdiction de l'abus de droit, tel qu'il résulte de l'art. 2 al. 2 CC (ATF
140 III 481 consid. 2.3.1). La nullité doit être constatée en tout temps et indépendamment de toute plainte par l'autorité de surveillance (art. 22 al. 1 LP).

La nullité d'une poursuite pour abus de droit ne peut être admise par les autorités de surveillance que dans des cas exceptionnels, notamment lorsqu'il est manifeste que le poursuivant agit dans un but n'ayant pas le moindre rapport avec la procédure de poursuite ou pour tourmenter délibérément le poursuivi; une telle éventualité est, par exemple, réalisée lorsque le poursuivant fait notifier plusieurs commandements de payer fondés sur la même cause et pour des sommes importantes, sans jamais requérir la mainlevée de l'opposition, ni la reconnaissance judiciaire de sa prétention, lorsqu'il procède par voie de poursuite contre une personne dans l'unique but de détruire sa bonne réputation, ou encore lorsqu'il reconnaît, devant l'Office des poursuites ou le poursuivi lui-même, qu'il n'agit pas envers le véritable débiteur. L'existence d'un abus ne peut donc être reconnue que sur la base d'éléments ou d'un ensemble d'indices démontrant de façon patente que l'institution du droit de l'exécution forcée est détournée de sa finalité (ATF 140 III 481 consid. 2.3.1; ATF 115 III 18 consid. 3b; arrêts du Tribunal fédéral 5A_1020/2018 du 11 février 2019, 5A_317/2015 du 13 octobre 2015 consid. 2.1, 5A_218/2015 du 30 novembre 2015 consid. 3; DCSO/321/10 du 8 juillet 2010 consid. 3.b).

La procédure de plainte des art. 17 ss LP ne permet par ailleurs pas d'obtenir l'annulation de la poursuite en se prévalant de l'art. 2 al. 2 CC, dans la mesure où le grief pris de l'abus de droit est invoqué à l'encontre de la créance litigieuse. L'autorité de surveillance n'est en effet pas compétente pour statuer sur le bienfondé matériel des prétentions du créancier déduites en poursuite qui relèvent de la compétence du juge ordinaire; elle n'est notamment pas compétente pour déterminer si le poursuivi est bien le débiteur du montant qui lui est réclamé; ce dernier doit utiliser les moyens que lui offre la procédure de poursuite, soit notamment l'opposition au commandement de payer, l'action en libération de dette, l'annulation de la poursuite, l'action en constatation de l'inexistence de la dette ou l'action en répétition de l'indu. L'Office ne peut ainsi exiger des explications sur la nature de la prétention ni refuser d'émettre un commandement de payer, même si la cause de la créance semble peu plausible voire imaginaire (parmi d'autres ATF 136 III 365 consid. 2.1, avec la jurisprudence citée, ATF 115 III 18 consid. 3b, ATF 113 III 2 consid. 2b = JdT 1989 II 120; arrêts du Tribunal fédéral 5A_250-252/2015 du 10 septembre 2015 consid. 4.1, 5A_76/2013 du 15 mars 2013 consid. 3.1, 5A_890/2012 du 5 mars 2013 consid. 5.3, 5A_595/2012 du 24 octobre 2012 consid. 5).

Une seconde poursuite pour la même créance n'est inadmissible que si, dans la première poursuite, le créancier a déjà requis la continuation de la poursuite ou est en droit de le faire Ce n'est en effet que dans ces cas qu'il y a un risque sérieux que le patrimoine du débiteur fasse l'objet d'une exécution à plusieurs reprises. En revanche, si la première poursuite a été arrêtée à la suite d'une opposition ou qu'elle est devenue caduque en raison d'une renonciation du créancier, il n'y a pas de motif d'empêcher ce dernier d'engager une nouvelle poursuite pour la même créance (ATF 128 III 383).

2.2.1 En l'espèce, il existe plusieurs poursuites visant la réalisation de la villa des époux A______/B______ : d'une part, les poursuites ordinaires intentées par la plaignante, dont la poursuite litigieuse 12______, qui sont parvenues au stade de la réquisition de vente de la part de copropriété de B______ saisie; d'autre part, la poursuite en réalisation de gage intentée par D______, parvenue au stade de la mainlevée de l'opposition, qui tend à la réalisation de l'entier du bien immobilier gagé.

Il découle de la jurisprudence du Tribunal fédéral susmentionnée que la compensation en cas d'acquisition du bien réalisé par le créancier poursuivant est exclue en l'espèce puisqu'il y a deux créanciers dont les poursuites aboutiront à la réalisation du bien immobilier saisi. De surcroît, la créancière D______ poursuit la réalisation de son prétendu gage sur l'entier du bien, alors que la plaignante est poursuivante ordinaire et la saisie en sa faveur est limitée à la part de copropriété de son mari; la poursuite de cette dernière n'est donc pas prioritaire en application de l'art. 73f al. 2 ORFI. Le fait que deux créancières poursuivent la réalisation du même bien et la priorité concédée à la poursuite de D______ impliquent que la plaignante n'aura pas la possibilité de requérir l'acquisition de la part de copropriété de son mari par compensation. La décision entreprise de l'Office est par conséquent fondée.

2.2.2 La plaignante soutient toutefois que la poursuite intentée par D______ était fondée sur une créance imaginaire et qu'il ne fallait pas en tenir compte, ce qui revient à soutenir sa nullité en raison de son caractère abusif.

La Chambre de surveillance a déjà eu l'occasion de se prononcer sur cette question dans le cadre des décisions DCSO/51/22 du 3 février 2022 et DCSO/109 du 17 mars 2022 rendues sur plainte de A______ contre les deux poursuites intentées contre elle par sa fille en constatation de leur nullité en raison de leur caractère abusif. La Chambre a rejeté les deux plaintes en application des principes rappelés ci-dessus.

Il n'y a pas de raison de statuer différemment dans le cadre de la présente plainte puisque D______ a poursuivi le processus d'exécution forcée en déposant requête de mainlevée, dont l'instruction est en cours. La prétendue créancière ne multiplie pas les poursuites, tout en les abandonnant après la notification du commandement de payer dans le seul but de nuire. Il est vrai qu'elle a renoncé à la première poursuite sans agir en reconnaissance de dette suite au rejet de sa requête de mainlevée provisoire par le Tribunal. Cette première poursuite est désormais périmée et ne pourrait être continuée. Le fait d'avoir repris une nouvelle poursuite à son début suite à cet échec n'est ainsi pas abusif, à ce stade, dans la mesure où, cette fois-ci, en cas d'échec de la requête en mainlevée, D______ ne laisse pas la poursuite se périmer, mais agit en reconnaissance de dette afin de faire annuler l'opposition formée au commandement de payer et d'avancer dans le processus d'exécution forcée. En revanche, dans le cas inverse, la question se posera de démarches abusives, dont le but serait uniquement d'empêcher l'avancement de la poursuite de la plaignante afin qu'elle ne parvienne pas au stade de la réalisation et de la distribution des deniers. La Chambre de surveillance a d'ailleurs déjà averti D______, dans le cadre de sa décision DCSO/109/22, du risque de voir sa poursuite qualifiée d'abusive et déclarée nulle si elle n'agissait pas sérieusement en vue d'obtenir la mainlevée de l'opposition. Il s'agit toutefois de circonstances futures hypothétiques dont il ne peut être tenu compte à ce stade.

Par ailleurs, le fait que la plaignante adresse à la poursuite litigieuse des griefs qui ne sont pas a priori voués à l'échec n'est pas encore suffisant pour qualifier la poursuite d'abusive au vu des conditions très restrictives d'admission de l'abus décrites ci-dessus.

Il découle de ce qui précède que la poursuite de D______ n'est pas abusive. L'Office ne peut en faire abstraction et ne peut donc entrer en matière sur la demande de la plaignante de se voir attribuer la part de copropriété de son mari par compensation. Sa décision du 28 février 2022 reste ainsi pleinement justifiée et la plainte sera rejetée.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable la plainte du 11 mars 2022 de A______ contre la décision rendue le 28 février 2022 par l'Office dans la poursuite n° 12______.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Madame Ekaterine BLINOVA et Monsieur Denis KELLER, juges assesseurs; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

 

Le président :

Jean REYMOND

 

La greffière :

Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.