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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/269/2023

DCSO/234/2023 du 25.05.2023 ( PLAINT ) , ADMIS

Normes : lp.46
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/269/2023-CS DCSO/234/23

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 25 MAI 2023

 

Plainte 17 LP (A/269/2023-CS) formée en date du 26 janvier 2023 par A______, élisant domicile en l'étude de Me Emmanuel Crettaz, avocat.


* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

-       A______

c/o Me CRETTAZ Emmanuel

Avenue Général-Guisan 38

3960 Sierre.

- B______

______

______ [VS].

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Par réquisition du 27 octobre 2022, B______ a engagé à l'encontre de A______ une poursuite ordinaire en recouvrement d'un montant de 200'000 fr. plus intérêts au taux de 5% l'an à compter du 1er octobre 2022, allégué être dû au titre d'une transaction judiciaire passée le 13 septembre 2017 devant le Tribunal de première instance.

Selon la réquisition de poursuite, A______ était domicilié à la route 1______ no. ______ à C______ (GE).

b. L'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office) a établi le 3 novembre 2022 un commandement de payer, poursuite n° 2______, mentionnant l'adresse du poursuivi indiquée par le poursuivant.

Cet acte n'a toutefois pu être notifié, la locataire du logement situé à la route 1______ no. ______ à C______ indiquant à l'agent notificateur que A______ serait "parti en Valais".

c. Au vu de l'échec de cette première tentative de notification, l'Office a procédé à des recherches dans les registres tenus par l'Office cantonal de la population et des migrations (OCPM), qui lui ont permis de constater, d'une part, que A______ avait annoncé son départ du canton de Genève pour D______ (VS) le 14 décembre 2017 et, d'autre part, que sa dernière adresse connue dans le canton de Genève était à la rue 3______ no. ______ à Genève.

L'Office a alors procédé à une nouvelle tentative de notification du commandement de payer à cette adresse, en vain dès lors que l'acte lui a à nouveau été retourné non notifié par la Poste. Il a ensuite adressé à A______, à l'adresse de la route 1______ no. ______ à C______, une convocation l'invitant à se présenter en ses locaux pour y retirer un acte de poursuite.

d. A______ a indiqué avoir pris connaissance de cette convocation fortuitement, à l'occasion d'un passage dans l'immeuble sis route 1______ no. ______ à C______, dont il est propriétaire.

Le 16 janvier 2023, il s'est présenté dans les locaux de l'Office, où le commandement de payer, poursuite n° 2______, lui a été notifié.

Il a formé opposition totale à la poursuite lors de la remise de l'acte.

B. a. Par acte adressé le 26 janvier 2023 à la Chambre de surveillance, A______ a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre le commandement de payer, concluant à son annulation. A l'appui de cette conclusion, il a fait valoir qu'il n'était plus domicilié à Genève depuis de nombreuses années, avec pour conséquence que le for ordinaire de la poursuite ne se trouvait pas dans le canton, aucun for spécial n'étant en outre réalisé. A titre subsidiaire, il a invoqué l'irrégularité de la notification au motif qu'elle n'était intervenue ni en sa demeure ni sur son lieu de travail.

Il a notamment produit une "attestation de départ" établie le 24 janvier par l'OCPM, selon laquelle il avait annoncé son départ du territoire genevois pour D______ (VS) le 14 décembre 2017.

b. Par ordonnance du 13 février 2023, la Chambre de céans a octroyé à la plainte l'effet suspensif requis par le plaignant.

c. Dans ses observations du 13 février 2023, l'Office s'en est rapporté à justice sur l'issue de la procédure de plainte.

d. Le poursuivant, B______, ne s'est pour sa part pas déterminé.

e. Par ordonnance du 23 mars 2023, la Chambre de surveillance a imparti au plaignant un délai au 28 avril 2023 pour produire toutes pièces utiles à établir l'existence de son domicile valaisan. Par pli du 18 avril, il a produit diverses pièces complémentaires, parmi lesquelles un extrait du cadastre valaisan relatif à un immeuble dont son épouse et lui-même sont propriétaires à D______ (VS), une attestation de domicile établie le 28 mars 2023 par les autorités de cette commune et plusieurs factures d'acomptes pour l'impôt communal 2023 établis à son intention par la même commune.

Ces pièces complémentaires ont été communiquées le 25 avril 2023 à l'Office et au poursuivant, qui ne se sont pas spontanément déterminés à leur sujet.

f. La cause a été gardée à juger le 9 mai 2023.

EN DROIT

1. Déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie lésée dans ses intérêts (ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), la plainte est recevable.

2. 2.1.1 Les règles régissant le for de la poursuite sont impératives. Les sanctions attachées à leur violation sont cependant différentes selon qu'il s'agit de la notification du commandement de payer dans la poursuite ordinaire ou de la continuation de la poursuite par voie de saisie. La notification du commandement de payer par un office des poursuites incompétent à raison du lieu n'entraîne ainsi que l'annulabilité, sur plainte, de cet acte : dans cette hypothèse en effet, il n'y a pas de lésion de l'intérêt public ou de l'intérêt de tiers au sens de l'art. 22 al. 1 LP. En revanche, la continuation de la poursuite par un office des poursuites incompétent à raison du lieu entraîne, à moins qu'il n'existe aucun bien saisissable, la nullité des avis de saisie et des opérations ultérieures : dans ce cas en effet, la violation des règles sur le for de la poursuite lèse les intérêts des créanciers qui pourraient, le cas échéant, participer à la saisie (arrêt du Tribunal fédéral 5A_539/2022 du 13 septembre 2022 consid. 3.1 et références citées).

2.1.2 Sous réserve des fors spéciaux prévus par les art. 48 à 52 LP, le for de la poursuite est au domicile du débiteur (art. 46 LP).

La notion de domicile au sens de l'art. 46 LP correspond à celle de l'art. 23 al. 1 CC. Il s'agit du lieu où l'intéressé réside avec l'intention de s'établir, ce qui suppose qu'il fasse de ce lieu le centre de ses intérêts personnels et professionnels (ATF 125 III 100 consid. 3; 120 III 7 consid. 2a). La notion de domicile comporte deux éléments: l'un objectif, la présence physique dans un endroit donné; l'autre subjectif, l'intention d'y demeurer de façon durable (ATF 141 V 530 consid. 5.2; 137 II 122 consid. 3.6; 136 II 405 consid. 4.3). La loi n'exige pas qu'une personne ait l'intention de demeurer pour toujours dans un certain endroit; il suffit qu'elle fasse de ce lieu le centre de son existence, quand bien même elle voudrait transférer plus tard son domicile ailleurs (arrêts 5A_419/2020 du 16 avril 2021 consid. 3.2.2; 5A_725/2010 du 12 mai 2011 consid. 2.3). Lorsque plusieurs endroits entrent en ligne de compte, parce que la personne a des attaches avec chacun d'eux, le principe de l'unité du domicile (art. 23 al. 2 CC et 20 al. 2 LDIP) impose un choix; le domicile se trouve au lieu avec lequel l'intéressé entretient les relations les plus étroites, cette question étant résolue sur la base de l'ensemble des circonstances (ATF 136 II 405 consid. 4.3; arrêt 5A_653/2020 du 2 février 2022 consid. 3.3).

2.2 En l'espèce, il résulte des pièces produites par le plaignant que celui-ci a annoncé aux autorités genevoises son départ du canton pour la commune de D______, en Valais, le 14 décembre 2017. Selon une attestation de domicile émanant des autorités de cette commune, le plaignant y est domicilié depuis le 15 décembre 2017. Il y est propriétaire avec son épouse d'un immeuble, dans lequel il indique résider. Enfin, il est tenu d'acquitter l'impôt communal.

Ces indices, ajoutés à l'absence d'éléments plaidant en faveur de l'existence d'un domicile à Genève, conduisent à retenir que le plaignant est, contrairement aux indications fournies par le poursuivant dans sa réquisition de poursuite, effectivement domicilié en Valais.

Aucun des fors de poursuite spéciaux prévus par les art. 48 à 52 LP n'entre par ailleurs en considération.

Il en résulte que l'Office n'était pas compétent pour procéder à l'établissement et à la notification du commandement de payer. La plainte doit donc être admise et ledit commandement de payer annulé, sans qu'il soit nécessaire d'examiner l'argumentation présentée à titre subsidiaire par le plaignant.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 26 janvier 2023 par A______ contre le commandement de payer, poursuite n° 2______, notifié le 16 janvier 2023.

Au fond :

L'admet.

Annule en conséquence le commandement de payer, poursuite n° 2______.

Siégeant :

Monsieur Patrick CHENAUX, président; Madame Ekaterine BLINOVA et Monsieur   Mathieu HOWALD, juges assesseurs; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

Le président :

Patrick CHENAUX

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.