Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/411/2025 du 14.04.2025 ( ICC ) , REJETE
En droit
Par ces motifs
république et | canton de genève | |||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 14 avril 2025
|
dans la cause
Madame A______ et Monsieur B______
contre
ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE
1. Le litige concerne la taxation cantonale 2022 de Madame A______ et de Monsieur B______.
2. Par bordereau d’ICC daté du 24 janvier 2024, l’administration fiscale cantonale
(ci-après : AFC-GE) a taxé les contribuables pour l’année litigieuse.
3. Le 24 juillet 2024, les précités ont élevé réclamation à l’encontre de cette taxation, contestant la valeur d’un immeuble retenue par l’AFC-GE.
4. Par décision du 24 septembre 2024, l’AFC-GE a déclaré la réclamation irrecevable pour cause de tardiveté.
5. Par acte du 25 octobre 2024, les contribuables ont interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal). L’AFC-GE avait déclaré leur réclamation irrecevable, ce qu’ils ne contestaient pas. Ils n’avaient simplement pas établi leur réclamation en temps utile. Ils recouraient néanmoins, car l’erreur portait sur un montant de quelque CHF 0.5 million de fortune. La fiduciaire qui avait rempli leur déclaration fiscale 2023 s’était rendue compte de l’erreur commise par leur mandataire, qui avait établi leur déclaration de l’année 2022.
6. Dans sa réponse du 19 décembre 2024, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours pour cause de tardiveté de la réclamation, relevant que les contribuables n’invoquaient aucun motif sérieux tendant à justifier leur retard.
7. Dans le délai imparti au 28 janvier 2025, les recourants n'ont pas répliqué.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17).
2. Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens de l'art. 49 LPFisc.
3. Étant donné que la décision attaquée est une décision d’irrecevabilité, seule la question de l’irrecevabilité peut faire l’objet du présent recours et non la taxation en tant que telle. En conséquence, le tribunal doit d’abord examiner si les conditions formelles de la recevabilité (forme écrite, délai, motivation, moyen de preuve, etc.) sont ou non remplies et, si tel n’est pas le cas, il doit rejeter le recours déposé devant elle sans examiner lui-même le détail des taxations (arrêt du Tribunal fédéral 2C_930/2018 du 25 octobre 2018 consid. 3).
4. Au vu de cette jurisprudence, il convient uniquement de déterminer si c’est à bon droit que l’AFC-GE a estimé que la réclamation du 24 juillet 2024 avait été déposée tardivement.
5. À teneur de l’art. 39 al. 1 LPFisc, le contribuable peut adresser à l'autorité de taxation une réclamation écrite contre la décision de taxation dans les 30 jours qui suivent sa notification.
Ce délai commence à courir le lendemain de la notification. Il est considéré comme respecté si la réclamation est remise à l'autorité de taxation, à un office de poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse à l'étranger le dernier jour ouvrable du délai au plus tard (art. 41 al. 1 LPFisc). Celui qui n'agit pas dans le délai prescrit est forclos et le jugement ou la décision en cause acquièrent force obligatoire (ATA/923/2018 du 11 novembre 2018 consid. 2c et les références citées).
Les règles relatives à ce type de délai nécessitent une stricte application, ceci pour des motifs d'égalité de traitement et d'intérêt public lié à une bonne administration de la justice et à la sécurité du droit. Ainsi, l'irrecevabilité qui sanctionne le non-respect d'un délai n'est en principe pas constitutive d'un formalisme excessif prohibé par l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) (ATF 125 V 65 consid. 1).
6. Passé le délai de 30 jours, une réclamation tardive n’est recevable que si le contribuable établit que, par suite de service militaire, de service civil, de maladie, d’absence du pays ou pour d’autres motifs sérieux, il a été empêché de présenter sa réclamation en temps utile et qu’il l’a déposée dans les 30 jours après la fin de l’empêchement (art. 41 al. 3 LPFisc).
7. En l’occurrence, les contribuables ont élevé réclamation le 24 juillet 2024 à l’encontre des bordereaux datés du 24 janvier 2024. La date de notification de cette taxation n’est pas connue. Cependant, dans leur recours les précités reconnaissent expressément qu’ils n’ont pas respecté le délai de réclamation. Conformément à la jurisprudence, cette déclaration leur est opposable (arrêt du Tribunal fédéral 2C_637/2007 du 4 avril 2008, consid. 2.3 et 2.4.1). Par ailleurs, ils n’allèguent pas et ne démontrent encore moins l’existence d’un empêchement en raison duquel ils n’auraient pas été en mesure de réclamer en temps utile.
Au vu de ce qui précède, c’est à bon droit que l’AFC-GE a déclaré leur réclamation irrecevable pour cause de tardiveté.
8. À plusieurs reprises, le tribunal a jugé que lorsqu’un contribuable demande à l’AFC-GE de réexaminer sa taxation, alors que le délai de réclamation a expiré depuis plusieurs mois, cette dernière doit envisager une telle requête comme une demande de reconsidération ou de révision (tout récemment, JTAPI/122/2025 du 3 février 2025).
9. Aux termes de l’art. 55 al. 1 LPFisc, une décision ou un prononcé entré en force peut être révisé en faveur du contribuable, à sa demande ou d’office lorsque des faits importants ou des preuves concluantes sont découverts (let. a), lorsque l’autorité qui a statué n’a pas tenu compte de faits importants ou de preuves concluantes qu’elle connaissait ou devait connaître ou qu’elle a violé de quelque autre manière l’une des règles essentielles de la procédure (let. b) ou lorsqu’un crime ou un délit a influé sur la décision ou le prononcé (let. c). L’art. 55 al. 2 LPFisc précise que la reconsidération est exclue lorsque le requérant invoque des motifs qu’il aurait déjà pu faire valoir au cours de la procédure ordinaire s’il avait fait preuve de toute la diligence qui pouvait raisonnablement être exigée de lui.
10. Même en présence d’un motif de révision, si le contribuable ou son représentant omet, de manière négligente, de faire valoir celui-ci dans la procédure ordinaire, la révision n’est pas possible, la jurisprudence se montrant stricte à cet égard (arrêt du Tribunal fédéral 2C_245/2019 du 27 septembre 2019 consid. 5.3 et les références citées). Le seul facteur décisif est ainsi celui de savoir si le contribuable aurait déjà pu présenter les motifs de révision dans la procédure ordinaire, le but de la procédure extraordinaire et subsidiaire de la révision n’étant pas de réparer les omissions évitables du contribuable commises au cours de la procédure ordinaire (arrêt du Tribunal fédéral 2C_245/2019 du 27 septembre 2019 consid. 5.3 et les références citées). Il appartient en effet à ce dernier de contrôler la décision de taxation lorsqu’il la reçoit et de signaler en temps utile les vices dont elle serait affectée (arrêt du Tribunal fédéral 2C_212/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5.2).
Il n’est ainsi pas possible de déroger aux principes régissant la révision, quand bien même le résultat de leur application est choquant et heurte le sentiment de l’équité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_212/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5.2 et 5.3).
11. En l’espèce, rien ne permet de conclure, à la lecture des écritures des contribuables, que ceux-ci auraient sollicité la révision du bordereau du 24 janvier 2024. Le fait qu’il soit entaché d’une erreur portant sur quelque CHF 0.5 million de fortune ne constitue pas un motif de révision, même si cette inexactitude était avérée. En effet, les précités aurait dû vérifier ledit bordereau et, cas échéant, faire valoir leurs griefs par la voie de la procédure ordinaire de réclamation, puis du recours. Enfin, ils ne font valoir aucun argument dont ils n’auraient pas été en mesure de se prévaloir au cours de la procédure ordinaire.
12. Mal fondé, le recours sera rejeté.
13. En application des art. 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, pris conjointement et solidairement, qui succombent, sont condamnés au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 700.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.
14. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable le recours interjeté le 25 octobre 2024 par Madame A______ et Monsieur B______ contre la décision sur réclamation de l'administration fiscale cantonale du 24 septembre 2024 ;
2. le rejette ;
3. met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;
4. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Siégeant: Gwénaëlle GATTONI, présidente, Philippe FONTAINE et Yuri KUDRYAVTSEV, juges assesseurs.
Au nom du Tribunal :
La présidente
Gwénaëlle GATTONI
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.
Genève, le |
| Le greffier |