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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/4451/2022

JTAPI/797/2024 du 19.08.2024 ( ICCIFD ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : CONVENTION DE DOUBLE IMPOSITION;IMPÔT À LA SOURCE;ASSUJETTISSEMENT(IMPÔT);DÉCLARATION D'IMPÔT
Normes : LPA.64.al2; LIFD.5.al1.leta; LIPP.3.al2.leta; LIFD.91; OIS.6; LISP.1.al3.letc; LIFD.124.al1; LPFisc.26.al1; LPFisc.28.al1; OIS.4.al1; RISP.5.al1; CDI-F.17.al1
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4451/2022 ICCIFD

JTAPI/797/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 19 août 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______, ressortissant suisse, est domicilié dans le département de B______ en France.

2.             Du 1er octobre 2011 au 31 octobre 2020, il a travaillé en qualité de membre du personnel administratif de la C______auprès de l’D______ à Genève (ci-après : l’D______).

3.             Le 22 novembre 2011, la mission permanente de la Suisse auprès de l’office des Nations Unies et des autres organisations internationales a adressé à la C______auprès de l’D______, en tant qu’employeur, ainsi qu’au contribuable, en tant qu’employé, une information relative à la situation fiscale de l’intéressé, dont il ressortait que ce dernier était entièrement soumis aux impôts suisses. Si l’employeur, qui n’y était pas tenu, ne prélevait pas l’impôt à la source, il incombait à l’employé de s’annoncer à l’administration fiscale cantonale (ci-après: l’AFC-GE) pour déclarer ses revenus.

A cet égard, il est acquis que la C______auprès de l’D______ ne prélevait pas l’impôt à la source sur les revenus du contribuable. Par ailleurs, celui-ci ne jouissait d’aucun privilège et ne bénéficiait d’aucune immunité de juridiction dans l’exercice de ses fonctions.

4.             Depuis la période fiscale 2011, le contribuable refuse de remettre ses déclarations fiscales à l’AFC-GE, contestant être soumis à l’impôt cantonal et communal (ci-après: ICC) et à l’impôt fédéral direct (ci-après: IFD) dès lors que sa résidence fiscale se trouve en France.

5.             Période fiscale 2011

a.    En l’absence de réponse du contribuable aux demandes de l’AFC-GE de lui faire parvenir sa déclaration fiscale, celle-ci a, après sommation, procédé à une taxation d’office pour l’année 2011. Le contribuable a contesté ses bordereaux devant les instances judiciaires.

b.    Par arrêt 2C_436/2016 du 21 décembre 2016, le Tribunal fédéral a considéré que le contribuable, résidant en France et ayant exercé un emploi salarié en Suisse en 2011, était en principe imposable en Suisse pour les rémunérations reçues à ce titre, sous réserve d’une limitation de cette imposition par une disposition conventionnelle, en particulier par l’art. 17 par. 2 de la convention du 9 septembre 1966 entre la Suisse et la France en vue d’éliminer les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l’évasion fiscale (RS 0.672.934.91, ci-après: CDI-F). Or, celle-ci prévoyait une exception au principe de l’imposition du revenu au lieu de l’activité salariale si trois conditions cumulatives étaient remplies, dont le fait que la personne concernée séjourne, à savoir soit présente physiquement sur le sol de l’Etat d’activité durant 183 jours au plus, fractions de jours comprises. En l’espèce, compte tenu de la date d’engagement du contribuable au 1er octobre 2011, il était envisageable que cette condition soit remplie. La cause a dès lors été renvoyée à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après: la chambre administrative) pour qu’elle complète l’état de fait et examine la durée réelle du travail du contribuable en Suisse en 2011.

c.    Suite au renvoi de la cause, la chambre administrative a constaté que, outre la condition des jours de présence sur le sol suisse qui n’était pas réunie pour la période 2011, le contribuable était également rémunéré directement par le siège de la Mission permanente auprès de l’D______ à E______ (Belgique), de sorte que les conditions de l’art. 17 par. 2 CDI-F étaient réunies s’agissant de la période fiscale 2011. L’AFC-GE a donc annulé les bordereaux ICC et IFD 2011. Le recours du contribuable portant sur cette période fiscale est dès lors devenu sans objet et la cause a été rayée du rôle.

6.             Période fiscale 2012

a.    Après avoir échangé de nombreux courriers concernant les conditions d’assujettissement aux impôts suisses et l’application de la CDI-F, dans lesquels le contribuable a admis passer plus de 183 jours en Suisse pour son activité lucrative dépendante, et sommé l’intéressé de lui retourner sa déclaration fiscale 2012, l’AFC-GE a taxé ce dernier d’office.

b.    Les bordereaux ICC et IFD 2012 ont été contestés par le contribuable devant les instances judiciaires.

c.    Par arrêt 2C_254/2019 du 2 avril 2019, le Tribunal fédéral a rejeté le recours du contribuable concernant l’année 2012.

Sur le plan interne, le contribuable relevait à juste titre n’être assujetti que de manière limitée en Suisse en raison du rattachement économique découlant de l’activité lucrative qu’il y exerçait. Toutefois, dans la présente cause comme dans celle qui avait trait à sa taxation 2011, le contribuable confondait à nouveau la question de l’assujettissement avec celle des modalités de perception. Ce n’était pas parce qu’il devait déposer une déclaration d’impôt en Suisse en raison du fait que son employeur ne prélevait pas l’impôt à la source (raison pour laquelle il était traité différemment de la plupart des frontaliers travaillant pour des employeurs soumis à l’impôt en Suisse qui étaient obligés de retenir l’impôt à la source; cf. art. 100 LIFD) qu’il y serait forcément assujetti de manière illimitée. Respectivement ce n’était pas parce que l’impôt n’était pas prélevé à la source qu’il n’était pas dû. Ainsi, sur la base du droit interne, le revenu que le contribuable avait perçu en Suisse en 2012 devait être imposé dans ce pays.

Sur le plan international, comme cela avait déjà été expliqué dans l’arrêt du 21 décembre 2016, les règles générales de l’art. 17 CDI-F s’appliquaient aux travailleurs frontaliers ayant, à l’instar du contribuable, une activité lucrative dans le canton de Genève. Or, comme l’avait jugé la chambre administrative, et contrairement à l’avis du contribuable qui estimait à tort que le critère des 183 jours énoncé dans la première condition de l’art. 17 par. 2 CDI-F se référait au domicile ou au centre des intérêts vitaux, ce critère avait exclusivement trait au nombre de jours de présence physique sur le sol de l’Etat d’activité. Il ressortait à cet égard de l’arrêt entrepris que le contribuable s’était rendu tous les jours de l’année 2012 à Genève pour y travailler (à l’exception de 25 jours de vacances). Le critère en question n’était donc pas rempli. Par conséquent, le droit conventionnel permettait également l’imposition par la Suisse du revenu perçu dans ce pays. 

7.             Période fiscale 2013

a.    Le contribuable ayant refusé de remplir sa déclaration fiscale 2013, l’AFC-GE, après sommation, l’a à nouveau taxé d’office.

b.    Les bordereaux ICC et IFD 2013 ont été contestés par le contribuable devant les instances judiciaires.

c.    Dans son arrêt ATA/152/2019 du 19 février 2019, la chambre administrative a considéré, en se référant à l’arrêt rendu par le Tribunal fédéral le 21 décembre 2016, que le contribuable ne contestait pas avoir été présent en Suisse durant plus de 183 jours en 2013. La première condition d’exemption d’assujettissement prévue par l’art. 17 par. 2 let. a CDI-F n’était pas remplie et le contribuable ne pouvait dès lors pas prétendre être mis au bénéfice de cette disposition conventionnelle. Par conséquent, il était assujetti à l’ICC et à l’IFD pour la rémunération de son emploi salarié dans le canton de Genève et devait y remplir une déclaration fiscale. 

d.    Cet arrêt n’a fait l’objet d’aucun recours et est entré en force.

8.             Périodes fiscales 2014 à 2020

a.    Concernant les périodes fiscales litigieuses (2014 à 2020), l’AFC-GE et le contribuable ont échangé de nombreux courriers au sujet des conditions d’assujettissement aux impôts suisses et l’application de la CDI-F. Il en ressort les éléments pertinents suivants :

b.    Par courrier du 3 février 2016, le contribuable a accusé réception, du formulaire de déclaration fiscale 2015 pour « contribuables domiciliés hors canton » et a affirmé que celui-ci ne s’appliquait pas à sa situation. Il en a fait de même le 14 février 2017 au sujet du formulaire de déclaration fiscale 2016.

c.    Par courriers du 24 avril 2019, l’AFC-GE a déclaré faire suite à l’arrêt du Tribunal fédéral du 2 avril 2019 et a imparti un délai au contribuable pour remettre sa déclaration fiscale 2014, sous peine de taxation d’office. Un délai lui était également imparti pour la remise de ses déclarations 2015 à 2018.

d.    Par courrier du 30 avril 2019, le contribuable a objecté qu’à teneur de l’arrêt du Tribunal fédéral susmentionné, il n’était pas soumis à la loi sur l’imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08) mais uniquement à la loi sur l’impôt à la source (LISP - D 3 20), dès lors qu’il n’était ni domicilié ni en séjour dans le canton.

e.    Par courrier du 12 juin 2019, l’AFC-GE a notamment expliqué au contribuable que l’assujettissement à l’impôt ne devait pas être confondu avec les modalités de perception de l’impôt. En l’occurrence, le contribuable remplissait tous les critères d’un assujettissement limité à Genève. Concernant le type d'imposition, l’art. 7 LISP et l’art. 91 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (ci-après : LIFD) prévoyaient que les travailleurs qui, sans être domiciliés ni en séjour en Suisse, y exerçaient une activité lucrative dépendante, étaient soumis à l’impôt à la source sur le revenu de cette activité. L’art. 1 al. 3 let. c LISP disposait certes que les contribuables rémunérés directement par un employeur domicilié à l'étranger n’étaient pas assujettis à cet impôt à la source. Conformément à la jurisprudence, cette dernière disposition ne constituait toutefois pas une clause d’exemption d’imposition. Les contribuables concernés par cette exception étaient simplement imposés, non plus à la source, mais de manière ordinaire.

f.     Par courrier du 24 juin 2019, le contribuable a objecté que de jurisprudence constante, ce n’était pas le temps de présence physique dans l’Etat de travail mais le centre d’intérêts vitaux qui déterminait l’Etat responsable de la perception de l’impôt au sens de l’art. 17 CDI-F. Or, son centre d’intérêts vitaux ne se trouvait pas en Suisse mais en France, de sorte qu’il n’était pas imposable à Genève.

g.    Par courrier du 28 juillet 2021, l’AFC-GE a rappelé au contribuable la teneur de l’arrêt du Tribunal fédéral du 2 avril 2019. L’imposition du contribuable selon la procédure ordinaire était également prévue par l’art. 6 de l’ordonnance du DFF du 19 octobre 1993 sur l’imposition à la source dans le cadre de l’impôt fédéral direct. Un dernier délai au 27 août 2021 était dès lors accordé au contribuable pour remettre ses déclarations fiscales 2015 à 2020, sous peine de taxation d’office.

h.    Le 24 septembre 2021, l’AFC-GE a notifié au contribuable des bordereaux ICC et IFD pour les années fiscales 2014 à 2020, en se basant sur les éléments en sa possession.

i.      Par courrier du 30 septembre 2021, le contribuable s’est opposé auxdits bordereaux au motif qu’il n’était pas imposable à Genève.

j.      Par courrier du 11 novembre 2021, l’AFC-GE a accusé réception de la réclamation du contribuable et lui a imparti un délai pour lui remettre les déclarations fiscales nécessaires à son examen.

k.    Par courriers du 24 mars 2022, l’AFC-GE a relevé qu’elle avait déjà expliqué à plusieurs reprises au contribuable la particularité de sa situation, à savoir qu’il était assujetti de manière limitée à Genève sur son salaire et qu’il était soumis à déclaration du fait que son employeur ne prélevait pas l’impôt à la source. Sa situation différait de celle d’un travailleur frontalier au service d’un employeur prélevant l’impôt à la source. Un nouveau délai au 14 avril 2022 lui était imparti pour remettre ses déclarations fiscales 2014 à 2020, sous peine de maintien des taxations d’office.

l.      Le contribuable s’y est opposé et a persisté à soutenir qu’il était uniquement imposable à la source eu égard à son statut de frontalier.

m.  Par décisions sur réclamation du 18 août 2022, l’AFC-GE a maintenu les taxations du contribuable pour l’ICC et l’IFD 2014 à 2020.

Elle ne pouvait entrer en matière sur la réclamation du contribuable dans la mesure où celui-ci n’avait répondu ni à sa demande de renseignements du 11 novembre 2021, ni à sa lettre recommandée du 24 mars 2022.

n.    Par courriers des 22 et 23 août 2022, reçus le 29 août et le 2 septembre suivants, le contribuable a contesté ne pas avoir répondu aux demandes de renseignements de l’AFC-GE. Il a, en substance, persisté à affirmer qu’il était uniquement soumis à l’impôt à la source et qu’il n’était pas tenu de remplir une déclaration fiscale à Genève. Cette obligation s’appliquait uniquement aux personnes domiciliées ou en séjour dans le canton.

o.    Par courrier du 1er décembre 2022, l’AFC-GE a rappelé au contribuable que sa situation avait déjà été jugée par le Tribunal fédéral. Elle lui a demandé de lui faire savoir si son courrier du 22 août 2022 devait être considéré comme un recours, auquel cas elle le transmettrait au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), étant précisé qu’un émolument pouvait être fixé.

p.    Par courrier du 20 décembre 2022, le contribuable a campé sur sa position. L’arrêt du Tribunal fédéral n’affirmait pas qu’il était soumis au paiement de l’ICC et de l’IFD. L’AFC-GE avait en outre omis de mentionner, dans le cadre de la procédure qui les avait opposés, la jurisprudence applicable aux pendulaires et qui prenait en considération, pour déterminer l’Etat responsable de la perception de l’impôt, le centre des intérêts vitaux et non le temps de présence physique dans l’Etat de travail. La clause du monteur utilisée par l’AFC-GE pour considérer qu’il séjournait plus de 183 jours à Genève n’était pas conforme à cette jurisprudence.

q.    Par courrier du 20 janvier 2023, l’AFC-GE a notamment expliqué au contribuable que les exemples auxquels il se référait se rapportaient à des situations intercantonales, lesquelles devaient être distinguées des situations internationales. Dans le premier cas de figure, une personne physique, résidente suisse, était assujettie à Genève en raison d'un rattachement économique si elle y exploitait une entreprise ou un établissement stable, y possédait des immeubles, en avait la jouissance ou faisait du commerce immobilier (art. 4 al. 1 de la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 - LHID - RS 642.14 ; art. 3 al. 1 LIPP). Elle n’était en revanche pas assujettie à Genève sur les revenus de son activité salariée si son centre d’intérêts vitaux se trouvait dans son canton de domicile. Il en allait différemment pour les non-résidents suisses, lesquels pouvaient être assujettis de manière limitée dans le canton s’ils y exerçaient une activité lucrative.

L’AFC-GE indiquait pour le surplus qu’elle ne donnerait plus suite aux prochains courriers du contribuable dès lors qu’elle avait déjà répondu à ses nombreuses demandes. Elle l’invitait pas conséquence à entreprendre les démarches nécessaires auprès des instances supérieures.

r.     Une rencontre a encore eu lieu le 16 octobre 2023 dans les locaux de l’AFC-GE entre le contribuable et des membres de cette autorité afin de discuter de la situation fiscale du précité.

s.     Par courrier du 14 novembre 2023 faisant suite à l’entretien susmentionné, l’AFC-GE a expliqué au contribuable que le décompte de 183 jours prenait en compte les jours effectivement passés dans l’Etat d’activité, y compris les parties de journée et les jours d’arrivée et de départ, ce qui avait été confirmé par le Tribunal fédéral dans ses arrêts du 21 décembre 2016 et du 2 avril 2019. Le contribuable exerçait en outre une activité lucrative dans le canton de sorte qu’il y était assujetti à l’impôt à raison de son rattachement économique. Son ancien employeur ne prélevant pas l’impôt à la source, des formulaires de déclarations fiscales « personnes physiques domiciliées hors canton » lui avaient par conséquent été adressés.

L’AFC-GE demandait pour le surplus au contribuable de lui indiquer, d’ici au 30 novembre 2023, s’il persistait à contester les décisions sur réclamation du 18 août 2022, auquel cas elle transmettrait ses courriers au tribunal.

t.      Par courrier du 21 novembre 2023, reçu le 28 novembre suivant, le contribuable a, à nouveau, contesté son obligation de remplir une déclaration fiscale à Genève. Avant de saisir le tribunal, il attendait que l’AFC-GE lui fasse parvenir le formulaire de déclaration pour les personnes physiques domiciliées hors canton afin qu’il le remplisse. Il n’avait en effet jamais reçu ce document – l’AFC-GE ne lui ayant fait parvenir que des déclarations fiscales pour personnes domiciliées à Genève – et ne pouvait pas faire de déclaration fiscale (s’agissant du contenu de ce courrier, cf. également infra ch. 42).

u.    Par pli du 19 décembre 2023, l’AFC-GE a indiqué au contribuable avoir déjà statué sur ses réclamations de sorte que ses courriers étaient transmis au tribunal afin que celui-ci rende une décision, étant précisé qu’un émolument pouvait être fixé.

9.             Période fiscale 2021

a.    Le contribuable et l’AFC-GE ont également échangé des courriers concernant la période fiscale 2021 au sujet des conditions d’assujettissement aux impôts suisses et l’application de la CDI-F, le contribuable persistant à ne pas remettre sa déclaration fiscale.

b.    En date du 13 janvier 2023, l’AFC-GE a envoyé des bordereaux ICC et IFD 2021 au contribuable, se basant sur les éléments en sa possession.

c.    Par courrier du 24 mars 2023, faisant suite à la réclamation du contribuable, l’AFC-GE a demandé au contribuable de lui remettre sa déclaration fiscale 2021, demande à laquelle celui-ci n’a pas donné suite.

d.    Lors de la rencontre du 16 octobre 2023, il a été constaté que le contribuable avait pris sa retraite à la fin de l’année 2020.

e.    Par décision du 1er novembre 2023, l’AFC-GE a par conséquent annulé les bordereaux ICC et IFD 2021.

10.         Recours du contribuable contre les décisions sur réclamation du 18 août 2022

a.    Dans ses courriers des 22 août 2022, 23 août 2022 et 21 novembre 2023, le contribuable a, en substance, admis que la LIPP et la LIFD prévoyaient un rattachement économique en cas d’activité dans le canton et que son employeur ne prélevait pas l’impôt à la source. La CDI-F, dont le but était d’éviter qu’un résident français salarié en Suisse doive déclarer les mêmes revenus dans les deux Etats, prévalait toutefois sur le droit interne. Or, aucune disposition de cette convention ne prévoyait qu’un résident français salarié en Suisse doive déclarer les mêmes revenus dans les deux Etats. Cette convention se limitait à imposer aux frontaliers de déclarer leurs revenus de source suisse comme française dans leur Etat de résidence et c’est ce qu’il faisait. La règle des 183 jours ne concernait que les travailleurs séjournant à certaines périodes dans l’Etat d’activité. Elle ne s’appliquait pas à sa situation puisque son centre d’intérêts vitaux se trouvait tout au long de l’année en France et que la notion de « séjour » sur laquelle elle se fondait ne correspondait pas, contrairement à ce que considérait l’AFC-GE, à la simple présence physique dans l’Etat d’activité. Une telle interprétation aboutirait au surplus à ce que l’ensemble des frontaliers doivent déclarer leurs revenus de source suisse à Genève, ce qui n’était pas le cas dès lors que la convention prévoyait que les revenus salariés ne pouvaient être déclarés que dans un seul pays. Le pays du centre d’intérêts vitaux étant seul compétent pour recevoir une déclaration fiscale, le fait qu’il ne soit pas imposé à la source à Genève était pour le surplus sans incidence. L’AFC-GE ne pouvait enfin s’appuyer sur aucune loi fiscale nationale pour lui imposer de déclarer ses revenus à Genève.

b.    Dans sa réponse du 2 août 2016, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

Le contribuable résidait en France et avait exercé une activité lucrative salariée dans le canton de Genève entre 2014 et 2020. En application de la LIPP et de la LIFD, la rémunération qu’il avait reçue pour cette activité était imposable à Genève. Cet assujettissement limité était conforme aux dispositions de la CDI-F, ainsi qu’en avaient déjà décidé les instances judiciaires successives. Le contribuable était dès lors tenu de remplir une déclaration fiscale pour les années concernées. Ne l’ayant pas fait, c’était à bon droit qu’il avait été taxé d’office.

c.    Dans sa réplique du 25 avril 2024, le contribuable a persisté dans ses conclusions.

L’AFC-GE avait « menti » en affirmant qu’il n’était pas soumis à l’impôt à la source conformément à l’art. 1 al. 3 let. c LISP. Cette disposition était uniquement applicable aux personnes physiques domiciliées ou en séjour dans le canton, ce qui n’était pas son cas. L’AFC-GE avait également « menti » en invoquant l’obligation de déposer une déclaration fiscale contenue à l’art. 124 al. 1 LIFD. Cette disposition s’appliquait uniquement aux résidents suisses. Il était, lui, soumis à l’art. 91 LIFD qui prévoyait l’imposition à la source des travailleurs frontaliers. Seules les dispositions relatives à cet impôt s’appliquaient dès lors à sa situation, à l’exclusion de celles de la LIFD et de la LPFisc qui imposaient le dépôt d’une déclaration fiscale en Suisse. Le fait que la Confédération suisse ait exonéré son employeur du prélèvement de cet impôt ne permettait pas à l’AFC-GE de lui appliquer à titre subsidiaire les lois en question. Celles-ci ne concernaient du reste que les personnes domiciliées ou en séjour dans le canton. Ses obligations déclaratives fiscales étaient dès lors « imaginaires ». A la suite de son entrevue du mois d’octobre 2023 avec des représentants de l’AFC-GE, il avait d’ailleurs demandé à recevoir un « document officiel » afin qu’il le remplisse. Il n’avait rien reçu ce qui prouvait l’inexistence des obligations précitées.

L’AFC-GE détournait en outre le sens de l’art. 17 par. 2 CDI-F en affirmant que la notion de séjour à laquelle se référait cette disposition correspondait à la simple présence physique dans l’Etat d’activité. Le concept de présence physique était uniquement applicable à la « clause du monteur », laquelle concernait les personnes séjournant entre leur Etat de résidence et l’Etat d’activité. L’art. 17 CDI-F se fondait à l’inverse sur le centre des intérêts vitaux du contribuable. Ces deux dispositions s’excluaient dès lors mutuellement. En ce qui le concernait, il avait toujours eu son centre d’intérêts vitaux en France de sorte qu’il n’avait jamais séjourné plus de 183 jours en Suisse lorsqu’il y était actif. Il remplissait dès lors les trois conditions cumulatives de l’art. 17 par. 2 CDI-F et devait, par conséquent, déclarer ses revenus en France. Ce résultat était conforme à la jurisprudence du Tribunal fédéral qui prévoyait que le travailleur était imposé au lieu avec lequel il entretenait les relations les plus étroites.

A l’appui de ses arguments, il a produit les pages de garde de ses déclarations fiscales françaises des années 2012 à 2020 ainsi qu’une copie de la page sur laquelle devaient être déclarés les revenus exonérés versés par des organismes internationaux ou des missions diplomatiques ou consulaires.

Compte tenu des sommes « ahurissantes » que l’AFC-GE lui demandait de verser, il concluait à ce que le tribunal condamne celle-ci à lui verser au moins CHF 20’000.- pour les frais occasionnés par la procédure.

d.    Par courrier du 28 mai 2024, l’AFC-GE a renoncé à dupliquer et persisté dans ses conclusions.

e.    Par courrier du 10 juin 2024, le contribuable a demandé à l’AFC-GE de lui indiquer s’il devait déclarer ses revenus de source suisse à l’administration fiscale française, s’il existait un texte de loi lui imposant de déclarer ses revenus de source suisse à Genève et quelle disposition légale il avait violé en refusant de déclarer lesdits revenus. Il souhaitait enfin savoir pour quelle raison l’AFC-GE avait « menti » en invoquant, par rapport à sa situation, des dispositions légales applicables uniquement aux résidents suisses.

EN DROIT

1.             Le tribunal connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’AFC-GE (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 140 LIFD - RS 642.11).

2.             Conformément aux art. 49 LPFisc et 140 LIFD, le recours doit être adressé au tribunal dans les 30 jours qui suivent la notification de la décision attaquée. Il contient notamment les conclusions du recourant.

Le recours adressé à une autorité incompétente est transmis d’office à la juridiction administrative compétente et le recourant en est averti. L’acte est réputé déposé à la date à laquelle il a été adressé à la première autorité (art. 64 al. 2 LPA).

3.             En l’espèce, lorsqu’il a reçu les décisions sur réclamation du 18 août 2022 qui maintenaient les taxations ICC et IFD 2014 à 2020, le recourant s’est, par courriers des 22 et 23 août 2022, adressé une nouvelle fois à l’AFC-GE, en persistant à affirmer qu’il était uniquement soumis à l’impôt à la source et qu’il n’était pas tenu de remplir une déclaration fiscale à Genève. Interpellé par l’AFC-GE qui souhaitait savoir si ces courriers devaient être considérés comme un recours à l’encontre des décisions précitées, le recourant s’est limité à camper sur ses positions, sans répondre à la question qui lui était posée. Il n’a pas non plus affirmé explicitement qu’il souhaitait recourir contre ces décisions dans le courrier qu’il a adressé le 21 novembre 2023 à l’AFC-GE. Il y a au contraire indiqué qu’il attendait de recevoir le formulaire de déclaration pour les personnes physiques domiciliées hors canton « avant de saisir le tribunal ». La question de savoir si les courriers susmentionnés peuvent être considérés comme des recours à l’encontre des décisions sur réclamation du 18 août 2022 peut dès lors se poser. Ce point peut toutefois rester indécis. A supposer que ces courriers doivent être assimilés à des recours, ceux-ci devraient de toute manière être rejetés sur le fond ainsi qu’il sera exposé ci-après.

4.             Le litige porte sur l’ICC et l’IFD des années fiscales 2014 à 2020.

5.             Le recourant reproche en substance à l’AFC-GE d’avoir considéré qu’il était astreint au dépôt d’une déclaration fiscale à Genève alors qu’il était uniquement assujetti à l’impôt à la source. Or, cet impôt se substituait à l’ICC et à l’IFD de sorte qu’il n’était pas tenu de déposer une telle déclaration.

6.             Les conventions internationales en matière de double imposition ne contiennent que des règles visant à limiter les pouvoirs d’imposition des États mais ne fondent pas l’imposition elle-même. Par conséquent, il convient d’abord de s’assurer de l’existence d’un droit (interne) d’imposition, puis, le cas échéant, de vérifier que ce droit d’imposition n’est pas limité par une disposition conventionnelle visant à restreindre ou éliminer une éventuelle double imposition internationale (ATF 143 II 257 consid. 5.1 et les références; arrêt 2C_365/2021 du 13 décembre 2022 consid. 4).

7.             Les personnes physiques qui, au regard du droit fiscal, ne sont pas domiciliées ou ne séjournent pas en Suisse, sont assujetties à l’IFD et à l’ICC à raison du rattachement économique, lorsqu’elles y exercent une activité lucrative (art. 5 al. 1 let. a LIFD ; art. 3 al. 2 let. a LIPP). Cet assujettissement est limité au revenu de cette activité lucrative (art. 5 al. 1 let. a et b al. 2 LIFD ; art. 3 al. 2 let. a et 5 al. 2 LIPP).

8.             Concernant le type d’imposition, l’art. 91 al. 1 LIFD – dans sa teneur applicable jusqu’au 31 décembre 2020 – prévoyait notamment que les travailleurs qui, sans être domiciliés ni en séjour en Suisse, y exerçaient une activité lucrative dépendante comme frontaliers, étaient soumis à l’impôt à la source sur le revenu de leur activité conformément aux art. 83 à 86 LIFD. L’art. 7 aLISP – dans sa teneur applicable jusqu’au 31 décembre 2020 – avait une teneur similaire. Selon l’art. 99 aLIFD, l’impôt à la source se substituait à l’impôt fédéral direct perçu selon la procédure ordinaire.

L’art. 6 de l’ordonnance du département fédéral des finances du 19 octobre 1993 sur l’imposition à la source dans le cadre de l’impôt fédéral direct (RS 642.118.1 - OIS), restée en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020, disposait cependant que le contribuable qui recevait des rémunérations d’un débiteur à l’étranger était imposé selon la procédure ordinaire dans la mesure où ces rémunérations n’étaient pas prises en charge par une succursale ou par un établissement stable en Suisse.

L’art. 1 al. 3 let. c LISP, dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020, prévoyait quant à lui que les contribuables rémunérés directement par un employeur domicilié à l’étranger n’étaient pas assujettis à la perception de l’impôt à la source. A teneur de l’intitulé du chapitre I LISP, cette disposition n’était applicable qu’aux personnes physiques domiciliées ou en séjour dans le canton. Pour les personnes physiques et morales qui n’étaient ni domiciliées, ni en séjour en Suisse, l’art. 7 LISP se limitait à prévoir que les travailleurs qui, sans être domiciliés ni en séjour en Suisse, exerçaient une activité lucrative dépendante, étaient soumis à l’impôt à la source sur le revenu de leur activité conformément aux art. 2 à 4 LISP.

9.             Parmi les obligations de procédure, l’art. 124 al. 1 LIFD et l’art. 26 al. 1 et 28 al. 1 LPFisc prévoient que les contribuables sont invités à remplir et à déposer une formule de déclaration d’impôt. Les contribuables qui n’ont pas reçu de formule doivent en demander une à l’autorité compétente.

Le contribuable doit faire tout ce qui est nécessaire pour assurer une taxation complète et exacte (art. 42 al. 1 LHID; art. 31 al. 1 LPFisc).

Les contribuables inscrits au rôle ou au registre des contribuables présumés (art. 122 LIFD) sont par conséquent tenus de remplir et de déposer la déclaration d’impôt qu’ils reçoivent. Le fait de n’avoir pas reçu de formule de déclaration d’impôt, pour quelque motif que ce soit, ne dispense pas le contribuable de cette obligation (Isabelle ALTHAUS-HOURIET in Impôt fédéral direct, Commentaire romand, 2017, ad. art. 124 LIFD, n. 1). Il en va de même pour le contribuable qui conteste son assujettissement (ATA/330/2018 du 10 avril 2018 consid. 12b).

L’obligation de remplir la déclaration fait partie des obligations de procédure du contribuable dont la violation est sanctionnée (art. 174 al. 1 let. a LIFD ; Isabelle ALTHAUS-HOURIET, op. cit. p. 1648 n. 2).

10.         En l’espèce, comme l’a relevé le Tribunal fédéral dans son arrêt du 21 décembre 2016 portant sur l’année fiscale 2011, le recourant ne doit pas confondre la question de l’assujettissement à l’impôt avec celle des modalités de perception de l’impôt : ce n’est pas parce que l’impôt n’est pas prélevé à la source qu’il n’est pas dû ; la question à résoudre en premier lieu est celle de savoir si le recourant peut être imposé en Suisse et non de quelle façon l’impôt doit être prélevé (arrêt du Tribunal fédéral 2C_436/2016 précité, consid. 5.3).

Concernant cet assujettissement, le Tribunal fédéral et la chambre administrative ont déjà jugé, au sujet des périodes fiscales 2011 à 2013, que le recourant était assujetti de manière limitée en Suisse, respectivement à Genève, conformément aux art. 5 al. 1 let. a LIFD et 3 al. 2 let. a LIPP, en raison du rattachement économique découlant de l’activité lucrative qu’il y exerçait. Le recourant ayant poursuivi cette activité salariée de 2014 et 2020, cet assujettissement limité a perduré durant ces périodes fiscales. Partant, la rémunération perçue par le recourant était en principe soumise à l’ICC et à l’IFD. L’affirmation du précité selon laquelle ces lois ne lui étaient pas applicables tombe à faux.

11.         S’agissant des modalités de perception de l’impôt, il résulte du dossier que la C______auprès de l’D______ pour le compte de laquelle le recourant a travaillé de 2011 à 2020 n’était, eu égard au statut dont elle jouissait, pas tenue de prélever l’impôt à la source sur les revenus de ses employés et qu’elle n’a jamais procédé à une telle retenue s’agissant du recourant. Contrairement à ce qu’il prétend dans le cadre de son recours, le précité n’a dès lors jamais été imposé à la source à l’instar d’un frontalier ordinaire. Il ne saurait dès lors affirmer que dans sa situation, l’impôt à la source se serait substitué à l’ICC et à l’IFD, de sorte qu’il n’était pas tenu au dépôt d’une déclaration fiscale. Il importe également peu que l’art. 1 al. 3 let. c LISP – qui prévoit que les contribuables rémunérés directement par un employeur domicilié à l’étranger ne sont pas assujettis à la perception de l’impôt à la source – ne concerne que les résidents suisses et non les frontaliers. L’employeur du recourant ne prélevant pas l’impôt à la source, cette disposition n’est en effet pas applicable à la situation de l’intéressé.

A cet égard, il peut encore être renvoyé au jugement du tribunal du 10 décembre 2018 (JTAPI/1210/2018) concernant la période fiscale 2012, dans lequel il a été rappelé que le Tribunal administratif et l’ancienne commission cantonale de recours en matière d’impôts avaient jugé que les contribuables imposables à la source mais rémunérés directement par un employeur domicilié à l’étranger pouvaient être taxés selon le mode ordinaire (ATA du 19 juin 1991 cause G. ; DCRI/249/2008 du 9 juin 2008). La décision du 9 juin 2008 se référait certes à des contribuables imposables à la source en raison du fait qu’ils étaient domiciliés à Genève et titulaires d’un permis de séjour. En revanche, l’arrêt du 19 juin 1991 concernait, comme en l’espèce, un contribuable français travaillant à Genève et domicilié en France voisine. Selon le tribunal, le recourant ne pouvait dès lors se prévaloir du fait que son employeur n’avait pas procédé à une retenue à la source sur son salaire pour soutenir qu’il n’était pas assujetti à l’impôt en Suisse sur les revenus qu’il avait réalisés dans ce pays. Ce point de vue n’a pas été contesté dans l’arrêt de la chambre administrative du 19 février 2019 (ATA/156/2019). Ladite chambre avait par ailleurs statué dans le même sens dans son arrêt du 19 avril 2016 (ATA/330/2016) concernant l’année fiscale 2011, en considérant que la renonciation de l’employeur du recourant à procéder à une retenue à la source sur le salaire de ses employés ne fondait aucun droit du recourant à ne pas se soumettre à ses obligations fiscales en Suisse.

Ce principe – selon lequel le contribuable qui reçoit des rémunérations d’un débiteur à l’étranger est imposé selon la procédure ordinaire dans la mesure où ces rémunérations ne sont pas prises en charge par une succursale ou par un établissement stable en Suisse – figurait du reste déjà à l’art. 6 de l’ordonnance du DFF du 19 octobre 1993 sur l’imposition à la source dans le cadre de l’impôt fédéral direct, restée en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020. Depuis le 1er janvier 2021, il est expressément mentionné aux articles 4 al. 1 OIS et 5 al. 1 du règlement d'application de la loi sur l'imposition à la source des personnes physiques et morales du 30 septembre 2020 (D 3 20.01 - RISP ; « Lorsque le contribuable reçoit des rémunérations d’un débiteur de la prestation imposable qui n’est pas domicilié en Suisse, il est imposé selon la procédure ordinaire »).

Au vu de ce qui précède, l’argument du recourant, selon lequel il aurait été soumis à l’impôt à la source entre 2014 et 2020 de sorte que la LIFD et la LIPP et ne s’appliquaient pas à sa situation, tombe à faux et sera écarté.

12.         Les revenus salariés qu’il a perçus dans le canton de Genève durant cette période y étant imposables, le recourant était tenu, conformément aux art. 124 al. 1 LIFD, 26 al. 1 et 28 al. 1 LPFisc, de déclarer l’ensemble de ces derniers à l’AFC-GE, sous peine de se voir reprocher une tentative de soustraction fiscale (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_553/2018 du 17 juin 2019 consid. 5.2).

Le recourant ne saurait être suivi lorsqu’il prétend que l’AFC-GE lui aurait uniquement communiqué des déclarations fiscales pour personnes domiciliées à Genève et non des formulaires de déclaration pour les personnes physiques domiciliées hors canton. Il résulte en effet du dossier que le recourant a reçu de tels formulaires en 2015 et en 2016. Le tribunal ne discerne dès lors guère pour quels motifs il en serait allé différemment en 2014 ainsi qu’entre 2017 et 2020. Le recourant n’a au surplus pas tenté de démontrer que tel aurait été le cas dès lors qu’il n’a produit aucun des formulaires de déclaration fiscale qu’il a reçu durant la période en question. A supposer qu’il ait réellement reçu le mauvais formulaire, voire qu’il n’en ait reçu aucun, cette erreur ne le dispensait au surplus pas de déclarer ses revenus à l’AFC-GE.

Le grief susmentionné sera par conséquent également écarté.

13.         Il reste encore à déterminer si le recourant peut se prévaloir des dispositions de la CDI-F pour être exempté de toute imposition en Suisse. L’intéressé soutient en substance qu’il remplissait les conditions de l’art. 17 § 2 CDI-F de sorte que ses revenus suisses étaient uniquement imposables en France. Aucune disposition de cette convention ne prévoyait qu’un résident français doive déclarer les mêmes revenus dans les deux Etats.

14.         Selon l’art. 17 § 1 CDI-F, sous réserve des dispositions des art. 18 à 21 qui ne concernent pas la présente cause, les salaires, traitements et autres rémunérations similaires qu’un résident d’un État contractant reçoit au titre d’un emploi salarié ne sont imposables que dans cet État, à moins que l’emploi ne soit exercé dans l’autre État contractant. Si l’emploi y est exercé, les rémunérations reçues à ce titre sont imposables dans cet autre État.

Une exception à l’art. 17 § 1 CDI-F (surnommée clause du monteur) est prévue à l’art. 17 § 2 CDI-F lorsque les trois conditions suivantes sont réalisées :

- le bénéficiaire séjourne dans l’autre État pendant une période ou des périodes n’excédant pas au total 183 jours au cours de l’année fiscale considérée (let. a) ;

- les rémunérations sont payées par un employeur ou au nom d’un employeur qui n’est pas résident de l’autre État (let. b) ;

- la charge des rémunérations n’est pas supportée par un établissement stable ou une base fixe que l’employeur a dans l’autre État (let. c).

Ces trois conditions sont cumulatives. Si elles sont réalisées, l’État de résidence du travailleur possède le droit [exhaustif] d’imposer des rémunérations réalisées à titre de revenus de l’emploi dans l’autre État. A l’inverse, si une de ces conditions fait défaut, l’État d’activité peut imposer la totalité des rémunérations réalisées sur son territoire dès le premier jour d’activité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_436/2016 précité, consid. 6.4).

Ainsi que le Tribunal fédéral l’a déjà jugé pour le recourant, le critère des 183 jours énoncé dans la première condition de l’art. 17 § 2 CDI-F se réfère exclusivement au nombre de jours de présence physique sur le sol de l’État d’activité (arrêts du Tribunal fédéral 2C_254/2019 précité consid. 5.3 ; 2C_436/2016 précité consid. 6.5). Ce critère de la simple présence physique ne se recoupe pas avec celui du domicile ou du centre des intérêts vitaux (arrêt du Tribunal fédéral 2C_254/2019 précité consid. 5.3), utilisé dans le cadre des relations intercantonales pour déterminer le domicile fiscal d’un contribuable séjournant en deux endroits différents (parmi plusieurs : ATF 132 I 29 consid. 4.1 s.).

15.         En l’espèce, il est établi que de 2014 à 2020, le recourant était domicilié en France voisine et était employé par la C______auprès de l’D______ à Genève. La rémunération qu’il a perçue de cet employeur était dès lors imposable en Suisse en application de l’art. 17 § 1 CDI-F, nonobstant le fait que le centre de ses intérêts vitaux se soit trouvé en France durant cette période. Comme exposé ci-avant, l’analogie faite par le recourant avec un contribuable domicilié dans l’Etat de Vaud et imposé uniquement dans ce canton, bien que travaillant à Genève, ne se justifie pas.

Il résulte pour le surplus des décisions précédentes que le recourant exerçait son activité salariée durant toute l’année dans le canton de Genève, de sorte qu’il était présent en Suisse durant plus de 183 jours pendant chacune des périodes fiscales concernées, y compris en 2020 dès lors qu’il a travaillé jusqu’au 31 octobre de l’année en question. Ce point n’est du reste pas contesté par l’intéressé.

Il s’ensuit que la première condition d’exemption d’assujettissement prévue par l’art. 17 par. 2 let. a CDI-F n’est pas remplie, de sorte que le recourant ne peut prétendre à être mis au bénéfice de l’exception prévue par cette disposition.

L’assujettissement du recourant aux impôts suisses pour la rémunération de son emploi salarié dans le canton de Genève, ainsi qu’aux obligations déclaratives fiscales en résultant, est dès lors conforme à l’art. 17 par. 1 CDI-F. La question de savoir s’il en est résulté une double imposition au sens de l’art. 25 let. A CDI-F peut quant à elle souffrir de rester indécise, le recourant n’affirmant rien de tel.

16.         Au surplus, le recourant ne conteste pas le contenu des taxations d’office établies par l’AFC-GE pour les périodes fiscales litigieuses.

Les recours seront par conséquent rejetés dans la mesure de leur recevabilité.

17.         En application des art. 144 al. 1 LIFD, 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, sera condamné au paiement d’un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l’avance de frais du même montant versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             rejette, dans la mesure de leur recevabilité, les recours interjetés les 22 et 23 août 2022, ainsi que le 28 novembre 2023, par Monsieur A______ contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale du 18 août 2022 ;

2.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l’avance de frais ;

3.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

4.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Gwénaëlle GATTONI, présidente, Federico ABRAR et Stéphane TANNER, juges assesseurs.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière