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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/4923/2021

ACJC/1525/2025 du 16.10.2025 sur JTPH/437/2023 ( OS ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/4923/2021 ACJC/1525/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud’hommes

DU JEUDI 16 OCTOBRE 2025

 

Entre

A______ SA, sise ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud’hommes le 18 décembre 2023 (JTPH/437/2023), représentée par
Me Guillaume FATIO, avocat, BMG Avocats, avenue de Champel 8C, case
postale 385, 1211 Genève 12,

et

Monsieur B______, domicilié ______ (France), intimé, représenté par
Me Patrick SPINEDI, avocat, Aubert, Spinedi, Street & Associés, rue Saint-Léger 2, case postale 107, 1211 Genève 4.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/437/2023 du 18 décembre 2023, reçu le 7 mars 2024 par les parties, le Tribunal des prud’hommes (ci-après: le Tribunal), statuant par voie de procédure simplifiée, a, à la forme, déclaré recevable la demande formée le 27 août 2021 par B______ contre A______ SA (chiffre 1 du dispositif) et irrecevable l'amplification de sa demande formée le 23 novembre 2023 (ch. 2) et, au fond, condamné A______ SA à verser à B______ les sommes brutes de 7'005 fr. plus intérêts moratoires à 5% l'an à compter du 1er décembre 2020 (ch. 3), de 4'950 fr. plus intérêts moratoires à 5% l'an à compter du 1er janvier 2021 (ch. 4) et de 14'587 fr. 90 plus intérêts moratoires à 5% l'an à compter du 1er janvier 2020 (ch. 5), invité la partie qui en avait la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 6), condamné A______ SA à remettre à B______ un certificat de travail conforme au point 7 de la partie "EN DROIT" du jugement (ch. 7), prononcé la mainlevée définitive de l'opposition à la poursuite n° 1______ à concurrence de 11'955 fr. et 14'587 fr. 90 (ch. 8), dit qu'il ne serait pas perçu de frais, ni alloué de dépens (ch. 9) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 10).

B.            a. Par acte expédié le 22 avril 2024 au greffe de la Cour de justice, A______ SA appelle de ce jugement, concluant à son annulation et au déboutement de B______ de toutes ses conclusions.

b. Dans sa réponse du 24 mai 2024, B______ conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris, avec suite de frais et dépens de l'instance.

c. Les parties ont répliqué le 29 août 2024 et dupliqué le 12 novembre 2024, persistant dans leurs conclusions respectives.

A______ SA a en outre préalablement conclu à ce que la Cour ordonne la production, par B______, de son contrat de travail et de ses fiches de salaire des six derniers mois auprès de C______ [consultations médicales à domicile 24 heures sur 24] et lui impartisse un délai pour se déterminer sur les nouvelles pièces.

B______ a quant à lui conclu en sus à ce que A______ SA soit condamnée aux frais et dépens de première instance.

d. Le 29 novembre 2024, A______ SA s'est encore déterminée spontanément sur la duplique, reçue le 21 novembre 2024.

e. Par avis du 8 janvier 2025, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.


 

C.           Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure:

a. A______ SA est une société de droit suisse dont le but est notamment l'exploitation d'un cabinet médical destiné à dispenser des soins ambulatoires à Genève.

Le Dr D______ en est administrateur, avec signature collective à deux.

b. Par contrat de travail "pour médecin salarié", B______ a été engagé à temps partiel par A______ SA, en qualité de médecin, à partir du 3 décembre 2018.

Libellé "obligations du médecin", l'article 2 du contrat prévoyait, sous son chiffre 2.1 relatif à la rémunération, qu'"en contrepartie de l'ensemble des prestations que A______ SA fournira[it] au médecin aux termes du présent contrat, A______ SA versera[it] mensuellement au médecin un montant en espèce correspondant au travail réalisé et effectivement facturé au patient selon les modalités prévues à l'Annexe 4. […] Il [était] rappelé que seules ser[aie]nt rémunérées au médecin les heures facturables aux patients, à un coût unitaire fixe".

L'Annexe 4, intitulée "Modalités de calcul de la rémunération due à A______ SA par le Médecin conformément à l'Article 2.1 du Contrat", stipulait que le salaire brut était de 150 fr. par heure de "travail effectif".

L'article 7.1 du contrat avait par ailleurs la teneur suivante: "les parties déclarent que parmi l'ensemble des obligations contractées par elles en vertu du présent contrat, l'élément prépondérant, le centre de gravité du contrat, est le droit d'usage conféré au médecin, contre rémunération, d'un local au sein de l'établissement".

c. B______ travaillait exclusivement aux urgences, un voire deux week-ends par mois, du vendredi matin au dimanche soir. Il n'effectuait pas de consultations sur rendez-vous.

d. Les heures de garde faisaient l'objet d'un planning élaboré par le Dr E______ en accord avec les différents médecins du centre.

F______ – responsable administrative puis directrice opérationnelle de A______ SA –, se fondait sur ce planning pour relever les temps de présence. Les médecins l'informaient en cas de changement à cet égard ainsi que des horaires consacrés aux patients ayant rendez-vous. Elle transmettait ensuite le relevé des heures de garde et de consultations sur rendez-vous à la comptable, G______, pour le paiement des salaires (témoin F______).

G______ validait les salaires avec D______ (témoins G______ et F______). Selon sa compréhension, le nombre d'heures reporté par F______ sur les timesheets servant au calcul des salaires correspondait aux heures facturées aux patients, alors qu'il s'agissait d'heures de présence (témoin G______).

e. Jusqu'en octobre 2020, B______ a perçu sa rémunération sur la base de ses heures de présence.

Durant la relation contractuelle, il a ainsi perçu au total 167'850 fr. bruts à titre de salaire, pour un taux d'activité oscillant entre 25 heures et 80 heures par mois. En 2020, il a en particulier perçu les montants bruts suivants:

-          7'350 fr. pour 49 heures en janvier 2020;

-          5'550 fr. pour 37 heures en février 2020;

-          10'800 fr. pour 72 heures en mars 2020;

-          6'150 fr. pour 41 heures en avril 2020;

-          6'750 fr. pour 45 heures en mai 2020;

-          4'800 fr. pour 32 heures en juin 2020;

-          6'600 fr. pour 44 heures en juillet 2020;

-          7'800 fr. pour 52 heures en août 2020;

-          3'750 fr. pour 25 heures en septembre 2020;

-          10'500 fr. pour 70 heures en octobre 2020.

f. Du 2 novembre au 2 décembre 2020, B______ s'est trouvé en incapacité de travail, ayant contracté la COVID-19.

g. B______ a réalisé 33 heures de garde en décembre 2020.

h. Durant la pandémie de COVID-19, le service des urgences de A______ SA a subi une baisse importante de son activité.

Selon ses déclarations, cette activité, qui présentait jusqu'alors une courbe de croissance constante, avait été divisée par 7 ou 8 en raison des restrictions liées au COVID. En été 2020, elle s'était donc rendue compte qu'il y avait un problème de trésorerie et avait cherché à comprendre son origine. Fin novembre 2020, elle avait décelé la source du problème, à savoir que quatre médecins – dont B______ – avaient été rémunérés sur la base des heures de présence au lieu des heures facturables aux patients.

i. Par courriel du 2 décembre 2020, F______, signant en qualité de "COO" (chief operating officer) de A______ SA, a informé B______ qu'après vérification des décomptes d'heures, certaines incohérences qui remontaient à plusieurs mois étaient apparues "par rapport aux heures de travail effectif comme stipulées dans [les] contrats". Il était possible que le paiement du salaire du mois novembre 2020 intervienne avec un peu de retard, dès lors que des décomptes précis devaient être établis afin de corriger les éventuelles erreurs. Un entretien avec D______, G______ et elle-même serait organisé afin d'en discuter.

j. Le 17 décembre 2020 s'est donc tenue une réunion, au cours de laquelle D______ a informé B______ de ce que A______ SA entendait lui réclamer, pour l'année 2020, un montant de 28'000 fr. correspondant à un prétendu trop-perçu de salaire découlant d'une erreur de comptabilité.

A teneur du procès-verbal de réunion dressé par l'employeuse, B______ s'est montré très surpris car le paiement de son salaire en fonction des heures facturées au patient ne correspondait pas à ce qui lui avait été expliqué lors de son premier entretien; aucune nuance n'avait alors été apportée par rapport au "temps payé par patient", vu qu'il devait être présent pour les gardes et selon le nombre d'heures indiqué dans les timesheets établis par F______ et envoyés à G______. Si cela avait été expliqué, il n'aurait pas accepté le poste car il se déplaçait depuis Grenoble – ce qui représentait 2h de trajet – pour trois ou quatre urgences par garde. Il ne comprenait pas comment personne ne lui avait rien dit durant deux ans. Il souhaitait obtenir un avis juridique au sujet de la notion de "travail effectif". Il estimait que ses salaires de novembre et décembre 2020 lui étaient dus conformément aux modalités de paiement préexistantes. En tout état, si le contrat devait être modifié en ce sens que seules les heures facturées aux patients se verraient rétribuées, il démissionnerait car il n'y avait pas assez de fréquentation des urgences. Une proposition serait présentée au médecin par A______ SA la semaine suivante.

Le procès-verbal de réunion n'a pas été contresigné par B______.

k. Par courriel du 22 décembre 2020, D______ a informé B______ que, par gain de paix et pour permettre une continuation de la collaboration, A______ SA était prête à renoncer, sans aucune reconnaissance de responsabilité, à 50% de sa créance, l'autre 50% devant être remboursé par le travailleur, soit en espèces, soit par des heures de travail non rétribuées ou rémunérées à un tarif réduit. Cette proposition serait caduque au 31 décembre 2020, si elle n'était pas expressément acceptée dans l'intervalle.

l. Par courriel du 23 décembre 2020 à A______ SA, B______ a relevé qu'il avait assuré une présence médicale d'environ 455 heures de janvier à octobre 2020 pour un montant rémunéré d'environ 41'164 fr. nets. En retranchant le prétendu trop-perçu de 28'000 fr. que A______ SA lui réclamait, il ne restait que 13'164 fr., soit un salaire net horaire de 28 fr. 90.

m. Par courrier du 30 décembre 2020 à A______ SA, B______ et H______ – autre médecin concerné par la problématique du prétendu trop-perçu de salaire – ont relevé que, depuis leur engagement, A______ SA n'avait pas remis en cause les décomptes de salaire mensuels sur lesquels figuraient leurs heures effectives de présence au cabinet. L'employeuse avait par ailleurs appliqué les charges sociales et prélevé l'impôt anticipé en fonction des décomptes contenant leurs heures effectives de présence. Si l'employeuse avait entendu ne les rémunérer qu'à raison des heures facturées aux patients, elle aurait dû le faire savoir immédiatement, ne pas imputer les cotisations et ne pas prélever l'impôt à la source. En conséquence, A______ SA n'était pas légitimée à leur réclamer un quelconque remboursement rétroactif, à modifier le contrat de travail de manière unilatérale et elle devait leur payer la totalité des heures effectuées tant que perduraient les contrats de travail.

n. Par courriel du 5 janvier 2021 à B______, F______, "pour A______ SA" a réitéré la proposition du 22 décembre 2020 avec un délai au 8 janvier 2021 pour l'accepter.

o. Sans réponse de B______ dans l'intervalle, F______, COO, lui a adressé un nouveau courriel le 11 janvier 2021 pour s'assurer de sa présence aux gardes planifiées, précisant qu'il serait rémunéré conformément à l'article 2.1 de son contrat.

p. Par courrier du 11 janvier 2021, B______ a mis A______ SA en demeure de lui verser ses salaires des mois de novembre et décembre 2020 dans un délai de cinq jours, étant précisé qu'il s'était trouvé en arrêt maladie à 100% du 2 novembre au 2 décembre 2020 et qu'il avait réalisé 32 heures de travail en décembre 2020 qui devaient être payées au tarif horaire de 150 fr. Il a par ailleurs annoncé la suspension de l'exercice de son activité professionnelle pour défaut de paiement des salaires à l'échéance du délai précité.

q. Par courrier du 1er février 2021, A______ SA a intégralement contesté les prétentions émises par B______ dans ses courriers des 30 décembre 2020 et 11 janvier 2021. Les services administratifs de A______ SA avaient commis une erreur sérieuse en lui versant des salaires erronés, faute d'avoir correctement appliqué les principes contractuels, et avaient proposé des solutions amiables que le travailleur avait refusées. Dans ces conditions, A______ SA compensait toute somme qui serait due avec les montants que B______ avait perçus en trop.

r. Par courrier du 10 février 2021, B______ a notamment informé A______ SA qu'il mettait un terme à son contrat de travail avec effet immédiat et l'a mise en demeure de lui verser les montants de 15'000 fr., 16'451 fr. 75 et 5'000 fr. dans un délai de dix jours.

s. Le 8 juin 2021, B______ a fait notifier à A______ SA un commandement de payer, poursuite n° 1______, pour la somme totale de 37'251 fr. 75, décomposée comme suit:

-          15'800 fr. à titre de salaires pour les mois de novembre et décembre 2020;

-          16'451 fr. 75 à titre de salaire pour les vacances non prises en nature;

-          5'000 fr. à titre d'indemnité pour tort moral.

L'employeuse y a fait opposition.

D.            a. Le 1er mars 2021, B______ a saisi l'Autorité de conciliation du Tribunal des prud’hommes d'une requête de conciliation dirigée contre A______ SA, concluant à ce que cette dernière soit condamnée à lui verser la somme totale de 37'251 fr. 75.

b. Au bénéfice d'une autorisation de procéder du 27 avril 2021, B______ a introduit sa demande en paiement auprès du Tribunal le 27 août 2021, concluant notamment à ce que A______ SA soit condamnée à lui payer la somme totale de 29'992 fr. 90, décomposée comme suit :

-          7'005 fr. bruts, plus intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er décembre 2020, à titre de salaire pour le mois de novembre 2020;

-          4'950 fr. bruts, plus intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er janvier 2021, à titre de salaire pour le mois de décembre 2020;

-          14'587 fr. 90 bruts, plus intérêts moratoires à 5% l'an à compter du 10 février 2021, à titre de salaire pour les vacances non prises en nature;

-          3'450 fr. nets, plus intérêts moratoires à 5% l'an à compter du 10 février 2021, à titre d'indemnité pour tort moral.

Il a également conclu à la remise d'un certificat de travail conforme à sa pièce 34 et à la mainlevée définitive de la poursuite n° 1______.

En substance, il a fait valoir que le contrat de travail comportait plusieurs clauses confuses et contradictoires qui devaient être interprétées en défaveur de l'employeuse, qui l'avait rédigé. En particulier, le contrat prévoyait la rémunération des heures de travail effectives. Or, les heures de présence devaient être considérées comme des heures de travail, dès lors qu'elles étaient obligatoires à l'accomplissement de la tâche. Il avait d'ailleurs été conforté dans cette interprétation, vu le salaire horaire de 150 fr. par heure de présence perçu depuis son engagement et ceci pendant deux ans. Son salaire pour les mois de novembre et décembre 2020 devait ainsi lui être versé sur la base de ce tarif horaire. En particulier, il s'était trouvé en incapacité de travail au mois de novembre 2020 et il convenait de lui verser un salaire équivalent à ce qu'il aurait perçu s'il avait pu normalement travailler. Dès lors que son salaire ne prévoyait pas d'indemnité pour les vacances et qu'il ne les avait pas prises en nature, il avait également droit au paiement de celles-ci, soit 14'587 fr. 90 correspondant à 8,33% de la totalité des salaires perçus durant la relation contractuelle.

Il a notamment produit un courriel du 28 février 2019 adressé à I______, une des quatre médecins concernés par la problématique des salaires prétendument versés en trop, dans lequel F______ a notamment écrit: "En regardant les autres contrats des médecins à l'heure (qui est exactement le même que le tien) qui travaillent chez nous, ils sont payés effectivement à l'heure selon leur temps de présence dans les gardes, ce qui veut dire: que si tu fais une garde de 8h-12h, tu seras payée pour ces 4h même si le premier patient arrive à 9h ou que tu n'as que 4 patients durant ces 4h. Car étant donné que vous êtes de garde, il est obligé que le médecin soit présent dans les locaux".

c. A______ SA a conclu au déboutement de sa partie adverse et a reconventionnellement conclu à ce que B______ soit condamné à lui payer 103'966 fr. 70, plus intérêts moratoires à 5% l'an à compter du 31 décembre 2020.

En substance, elle a fait valoir qu'à l'embauche, elle proposait généralement deux types de contrats à choix pour les médecins salariés, l'un avec un salaire fixe (60 fr. par heure) et l'autre avec un salaire payé à la consultation (150 fr. par heure). La différence entre ces deux types de rémunération s'expliquait par le fait que le salarié fixe était payé également pour ses heures de garde, alors que le salarié payé à la consultation ne voyait pas ses heures de garde rémunérées, lesquelles étaient compensées par le paiement plus important versé à la consultation. Au final, les deux types de salariés devaient percevoir plus ou moins le même montant.

Le contrat litigieux prévoyait clairement que le salaire était payé sur la base des "heures effectivement facturées aux patients". En raison de l'erreur d'une employée en charge des salaires qui n'avait pas compris que seules les heures de consultation étaient payées au médecin et non pas les heures de présence, elle avait versé mensuellement à son employé un montant qui ne correspondait pas à ce qui avait été initialement convenu. B______ faisait preuve de mauvaise foi lorsqu'il soutenait que toutes ses heures devaient être rémunérées au tarif de 150 fr. par heure de présence – équivalant à 100% à 327'348 fr. par an –, alors qu'un salarié fixe de l'entreprise percevait une rémunération annuelle comprise entre 144'000 fr. et 148'000 fr. à 100%. Alors même qu'il ne pouvait ignorer percevoir une rémunération excessive par rapport à la branche, B______ n'avait jamais informé son employeuse de son erreur, de sorte que 105'193 fr. lui avaient été versés indûment. Dès lors que l'employé avait refusé toute proposition de remboursement amiable, elle avait compensé une partie de ce montant avec les salaires de novembre et décembre 2020, B______ restant lui devoir 103'966 fr. 70, objet de la demande reconventionnelle.

S'agissant des vacances, elles avaient été prises par l'employé et rétribuées. Si par impossible le Tribunal devait retenir un montant à titre de vacances, il devrait être compensé avec les sommes que B______ restait lui devoir.

A______ SA a notamment produit les pièces suivantes à l'appui de ses écritures:

-          un courriel du 26 novembre 2020 de J______, directeur K______ des HUG, à D______, dont la teneur est la suivante:

"Hello,

A condition que tu ne m'en débauche pas trop… Amitiés,

J______ [prénom]

Le salaire d'un chef de clinique va de CHF 131'423 et 170'815.-, celui d'un médecin adjoint de CHF 137'962.- et 212'873.-."

Le dernier paragraphe relatif au salaire était rédigé dans une police différente de celle utilisée pour le reste du message;

-          une étude de la FMH parue dans le Bulletin des médecins suisses en 2019, selon laquelle le revenu brut médian des médecins était de 163'000 fr. et qu'avec un salaire horaire médian de 75 fr., les médecins indépendants gagnaient 19% de plus que les médecins salariés (63 fr. de l'heure);

-          un courriel du 9 mars 2023 de L______ à D______ au sujet de la rémunération des médecins de C______, selon lequel "le revenu est médical est [sic] lié à un pourcentage des factures encaissées".

-          un échange de courriels entre B______ et F______ des 15 et 19 novembre 2018, dans lequel B______ a indiqué que ses certificats de salaires annuels auprès de C______ pendant quatre ans révélaient un taux horaire brut de 153 fr. 84 en moyenne (sans différencier les horaires de week-end, du soir, ou des jours ouvrables), à la suite de quoi F______ lui a proposé un salaire horaire brut de 150 fr., après discussions avec D______;

-          le courriel de candidature de B______ envoyé le 28 octobre 2018 à A______ SA, dans lequel il expose notamment être sans emploi depuis un mois.

d. Par jugement du 9 décembre 2021, le Tribunal a déclaré irrecevable la demande reconventionnelle au motif qu'elle n'était pas soumise au même type de procédure que la demande principale, à laquelle la procédure simplifiée s'appliquait.

e. Le 16 décembre 2021, A______ SA a donc assigné B______ en paiement de la somme nette de 103'966 fr. 70 avec intérêts moratoires à 5% l'an à compter du 31 décembre 2020, à titre de remboursement de sommes indûment perçues.

Cette demande fait l'objet de la procédure C/2______/2021, traitée selon les règles de la procédure ordinaire.

f. Deux procédures ont également été initiées réciproquement par A______ SA (C/3______/2021 instruite selon la procédure ordinaire) et M______ (C/4______/2021 instruite selon la procédure simplifiée), autre médecin touché par la problématique des salaires prétendument trop perçus.

g. Par ordonnance du 20 octobre 2022, le Tribunal a notamment ordonné la jonction de l'instruction de la présente cause et de la cause C/4______/2021 opposant M______ à A______ SA, dont le complexe de faits est similaire et dans le cadre de laquelle les mêmes témoins ont été cités, et proposé aux parties d'apporter les procès-verbaux établis dans les procédures ordinaires aux procédures simplifiées, ou inversement, et de les compléter si nécessaire.

h. Lors de l'audience du 13 mars 2023, A______ SA a sollicité la production, par B______, de son contrat de travail auprès de C______ ainsi que de ses fiches de salaire. Le Tribunal a réservé le sort de cette question, précisant qu'elle serait réexaminée après l'audition des témoins.

i. Le Tribunal a entendu les parties et plusieurs témoins, dont les déclarations ont été reprises ci-avant dans la mesure utile. Pour le surplus, les faits pertinents suivants ressortent de celles-ci:

i.a. D______, représentant A______ SA, a notamment déclaré que les tarifs offerts aux médecins travaillant pour A______ SA étaient basés sur les chiffres pratiqués aux HUG et recommandés par la FMH et l'OFSP. Si elle avait offert un salaire de 120 fr. plus les frais à M______, c'était pour être plus généreux que certains concurrents. S'agissant du salaire de 150 fr. par heure de consultation offert à B______, il tenait compte du fait que ce dernier ne travaillait que les week-ends. À la question de savoir si D______ trouvait normal qu'un médecin puisse passer une demi-journée complète sans voir un patient et ne pas recevoir de rémunération pour la mise à disposition de son temps, ce dernier a répondu que c'était justement la raison pour laquelle il offrait le choix aux médecins entre deux types de contrats, dont l'un rémunérait toutes les heures de présence à un tarif nettement inférieur (entre 60 fr. et 65 fr. de l'heure). Il n'y avait toutefois jamais de demi-journée sans patient. Au demeurant, aucun médecin ne gagnait 240'000 fr. par an et en aucun cas des médecins praticiens, comme B______, qui étaient facturés 7% de moins que les médecins FMH.

Les médecins saisissaient les données utiles relatives aux facturations et A______ SA établissait les factures. Il était exact que cette dernière pouvait facilement avoir connaissance du nombre de consultations facturées par chacun des médecins. L'erreur de rémunération provenait du fait que F______ s'était injustement basée sur les plannings des heures de présence, au lieu de se baser sur les timesheets. A______ SA ne s'était pas rendue compte plus rapidement de l'erreur de rémunération car la comptabilité était effectuée par G______, qui s'occupait de la comptabilité des trois centres A______ SA.

Ce n'était que dans le cadre du différend, voire de la présente procédure, que D______ avait pris connaissance du courriel du 28 février 2019 de F______ à I______.

Une urgence dans le cadre d'un centre médical occupait un médecin 15 voire 30 minutes, alors que chez C______ c'était beaucoup plus long car il fallait d'abord se rendre au domicile du patient.

i.b. B______ a notamment déclaré que lorsqu'il travaillait pour C______, il était payé au pourcentage des consultations effectuées, sans prise en considération du temps travaillé. Il s'agissait d'un contrat de franchise. Pour obtenir le salaire horaire chez C______ qu'il avait mentionné dans le courriel produit sous pièce 7 déf. – à savoir 153 fr. 84 en moyenne –, il avait divisé le total de sa rémunération par le nombre d'heures travaillées, étant précisé que les consultations n'étaient pas forcément facturées au même tarif. Cela dépendait du jour de la semaine, de la nuit ou des traitements effectués. S'il n'y avait pas de consultations, il n'était pas payé, étant toutefois précisé que chez C______, il y avait des consultations tout le temps. Chez A______ SA, il travaillait uniquement du vendredi matin au dimanche soir et il n'y avait pas beaucoup de consultations.

Lorsqu'il avait été engagé, il avait discuté avec D______ de l'aspect médecine et avec F______ des différents points administratifs. Il n'avait jamais eu le choix entre deux contrats et avait toujours parlé des aspects financiers de son engagement avec F______; c'était avec elle qu'il avait signé son contrat. Il avait discuté de sa rémunération avec ses collègues; certains touchaient des remboursements de frais ou des primes journalières que lui-même ne percevait pas car il avait négocié un tarif horaire plus élevé. Il ignorait quel salaire percevaient les médecins salariés fixes qui travaillaient pour A______ SA. Il n'avait eu connaissance du courriel reçu par I______ que lorsque la situation avait commencé à dégénérer. Pour lui, tous les médecins étaient payés à l'heure de présence, sauf le Dr E______ qui travaillait comme indépendant.

Il n'avait jamais été étonné de la rémunération qu'il percevait, car elle était conforme à ce qu'il avait négocié. Il se souvenait de dimanches où il y avait très peu de patients, alors qu'il passait dix heures sur place. Il vivait par ailleurs à 2h de route de Genève et n'allait pas sacrifier sa vie de famille pour ne pas gagner sa vie.

i.c. M______, médecin chez A______ SA au moment des faits et également en litige avec cette dernière, a notamment déclaré qu'il avait de tout temps constaté que la fréquentation des consultations d'urgence n'était pas optimale. Il avait vécu la même chose auprès de son précédent employeur à N______ [GE] – où il faisait des gardes et des rendez-vous consécutifs aux gardes – avec des gardes le dimanche sans un seul patient, raison pour laquelle il avait insisté pour avoir un salaire à l'heure de présence. A______ SA lui avait alors garanti un salaire indépendant de la fréquentation du centre médical. F______ était présente à son entretien. Durant le COVID, ladite fréquentation s'était effondrée et à partir de ce moment-là, il s'était demandé si sa rémunération pouvait continuer à être dans une telle inadéquation. Il s'attendait à ce que son contrat soit renégocié. Comme il ne vivait pas très loin du centre médical, A______ SA lui avait proposé de rentrer chez lui et de l'appeler "s'il y avait quelque chose". Il n'osait pas imaginer ce qu'il se serait passé s'il avait donné suite à cette proposition et qu'un patient victime d'un infarctus s'était présenté, vu qu'il vivait quand même à vingt minutes à pieds du centre médical. Les médecins de garde se devaient d'être présents. Avant la procédure, il n'avait pas eu connaissance du courriel du 28 février 2019 de F______ à I______.

Actuellement, il travaillait au centre médical de O______ [GE] en qualité de médecin indépendant et réalisait un revenu supérieur à celui perçu chez A______ SA pour un taux d'activité équivalent. Son contrat actuel prévoyait qu'il gardait 52% des montants qu'il facturait et le centre gardait les 48% restants. Il avait déjà eu un contrat de ce type à N______ avec des pourcentages similaires.

i.d. I______, médecin, entendue en qualité de témoin, a déclaré avoir travaillé pour A______ SA du 6 avril 2020 au 31 mai 2021. Elle avait également ponctuellement travaillé quelques heures chez la précitée début 2019, rémunérées au temps de présence. Elle avait été engagée par D______ et F______, responsable administrative à qui elle s'adressait lorsqu'elle avait des questions car c'était son rôle et elle était plus disponible que D______. Elle avait discuté avec les deux précités de sa rémunération. Lors de l'entretien d'embauche, seul un contrat lui avait été proposé, soit un contrat à durée indéterminée qui prévoyait une rémunération horaire de 120 fr., à laquelle s'ajoutaient 30 fr. ou 50 fr. par jour de travail pour les frais de déplacement et de repas. La rémunération de 120 fr. de l'heure s'entendait à l'heure de présence, ce qui lui avait été confirmé par un courriel de F______, qu'elle avait transmis à ses collègues. Elle avait accordé plus de crédit à ce courriel limpide qu'au long contrat peu clair qui lui avait été remis. Elle n'avait pas demandé de précisions quant au contrat car, jusque-là, elle avait toujours été rémunérée aux heures de présence, notamment lorsqu'elle faisait des gardes dans les hôpitaux genevois.

Son travail consistait à assurer des gardes puisque le cabinet était ouvert de 8h à 20h et qu'il fallait un médecin en permanence, mais également à développer sa patientèle. Un planning était établi par le Dr E______ puis validé par D______ et F______, laquelle gérait le personnel, recueillait les heures effectuées et s'occupait des problèmes de fonctionnement du cabinet.

En novembre 2020, elle avait été informée d'une prétendue erreur quant aux salaires qui lui avaient été versés. Elle avait été sidérée. Pour elle, il n'y avait pas de raison qu'elle ne soit pas payée, dès lors qu'elle devait être sur place pour s'occuper d'urgences potentielles, ce d'autant plus qu'elle n'était pas responsable du manque de consultations d'urgence. À aucun moment elle n'avait eu l'impression de toucher une rémunération qui ne correspondait pas à ce qui avait été convenu et à ce qui lui avait été expliqué. Elle avait été très affectée par la situation et avait eu du mal à s'en remettre; elle s'était sentie dévalorisée, mal considérée, coincée. Ses collègues avaient alors quitté la société mais elle était restée le temps de trouver autre chose. Elle avait d'ailleurs rapidement retrouvé un emploi comme indépendante dans lequel elle gagnait beaucoup mieux sa vie que lorsqu'elle était sous le contrat renégocié avec A______ SA – dont le salaire mensuel fixe était alors de 6'500 fr. pour un taux de travail de 74% comprenant au moins un week-end par mois –, peut-être même mieux que sous le contrat initial. Finalement, elle n'avait rien remboursé mais n'avait perçu aucun salaire pour les mois de novembre et décembre 2020, alors qu'elle avait notamment travaillé 181 heures en novembre. Elle avait trois enfants, dont l'un âgé de quatre mois au moment de son engagement, si bien qu'il était évident qu'elle n'aurait pas travaillé pour A______ SA si elle n'avait pas été rémunérée pour les heures passées au travail.

i.e. F______, entendue en qualité de témoin, a déclaré avoir travaillé pour A______ SA de septembre 2018 à novembre 2021, d'abord en qualité de responsable administrative, puis de directrice opérationnelle dès 2019 ou 2020. Lorsqu'un nouveau médecin était engagé, elle participait au premier entretien avec D______, faisait visiter les lieux puis assurait le lien entre le médecin et le précité. Elle n'avait pas de rôle décisionnel en lien avec les salaires.

Elle avait assisté au premier entretien d'engagement de B______. Les trois contrats en vigueur chez A______ SA lui avaient alors été expliqués: celui d'indépendant, celui avec un salaire à l'heure et enfin celui au salaire mensuel. B______ avait choisi d'être rémunéré à l'heure effective de travail. Sa compréhension initiale de ces termes était erronée car elle avait compris qu'il s'agissait des heures de présence au travail. Elle n'avait pas pensé à demander des explications à D______, son supérieur hiérarchique, à ce sujet. Ce dernier et G______ s'étaient rendus compte de cette erreur pendant le COVID, car il y avait beaucoup plus de salaires à payer que d'entrées d'argent liées aux consultations. Elle avait beaucoup culpabilisé car le problème provenait de son incompréhension.

Elle n'avait pas la compétence de négocier les salaires avec les médecins mais il n'était pas exclu qu'elle eût parlé avec B______ du tarif horaire dans le cadre de la relecture du contrat.

Elle avait participé à l'entretien au cours duquel l'erreur de salaires avait été abordée avec B______. Ce dernier était fâché et mécontent, il ne comprenait pas. Elle avait dressé le procès-verbal de cette rencontre mais ne se souvenait pas s'il avait été soumis à l'employé pour relecture et signature. Elle pouvait comprendre son mécontentement, mais si des montants avaient été trop payés, ils devaient être remboursés.

i.f. G______, responsable des ressources humaines et de la comptabilité de A______ SA depuis 2010, entendue en qualité de témoin, a déclaré que lorsqu'un nouveau médecin était engagé, deux types de contrats lui étaient expliqués: le premier avec un salaire horaire par heure de présence et le second avec un salaire horaire par heure facturée au patient. Il y avait également un contrat pour les médecins indépendants. Selon les informations qu'elle avait reçues pour le calcul des salaires, B______ avait choisi une rémunération par heure facturée au patient.

À l'époque des faits litigieux, elle travaillait sur le site de P______ [GE] et elle ne s'était pas rendue compte que les heures figurant sur les timesheets transmis par F______ ne correspondaient pas aux heures facturées aux patients. Ce n'était que durant le COVID qu'ils s'étaient aperçus qu'il y avait beaucoup plus de sorties que d'entrées d'argent. Il n'était pas choquant qu'un médecin gagne 12'000 fr. en un mois. Certains gagnaient plus, cela dépendait de leur taux d'activité.

Lors des discussions de décembre 2020, auxquelles elle avait assisté, B______ n'était pas content.

i.g. H______, médecin, entendu en qualité de témoin, a notamment déclaré qu'il avait travaillé un an et demi ou deux ans pour A______ SA jusqu'à fin 2020. Lorsqu'il avait été engagé, il avait été reçu par D______ et F______, qui était selon lui assistante ou responsable administrative. Il avait été convenu qu'il percevrait une rémunération de 150 fr. par heure de travail sur place, étant précisé qu'il travaillait environ un week-end par mois.

En novembre 2020, son salaire ne correspondait pas aux gardes qu'il avait assumées. Il avait alors rapidement cessé son activité pour A______ SA. On lui avait indiqué que les conditions avaient ou allaient changer et il avait reçu un courrier lui demandant de rembourser des salaires prétendument trop perçus. Aucune suite n'avait été donnée aux réclamations respectives de chaque partie.

E.            Dans le jugement querellé, le Tribunal a notamment retenu que B______ avait été payé au tarif de 150 fr. de l'heure durant vingt-trois mois, ce qui l'avait indéniablement conforté dans l'idée que sa compréhension des termes contractuels était bonne. La lettre du contrat était quant à elle confuse, dès lors qu'elle mentionnait un salaire horaire pour le "travail effectif". B______, de même que trois autres collègues, avait compris cette formulation comme une rémunération à l'heure de présence, laquelle était effectivement indispensable à l'accomplissement de la tâche (urgences médicales). F______, alors responsable administrative de A______ SA, avait eu la même compréhension qu'eux. Le courriel de F______ à I______ avait également conforté les collaborateurs dans leur compréhension de ce que chaque heure passée sur place se verrait rétribuée.

Certes, F______ n'avait aucun pouvoir décisionnel au sein de l'entreprise. A______ SA avait néanmoins donné l'apparence aux collaborateurs que la précitée endossait un rôle de direction dans l'entreprise, en participant notamment aux entretiens d'embauche et en étant leur interlocutrice principale durant la relation contractuelle. Cette apparence avait d'ailleurs été renforcée et consolidée lorsque cette dernière avait signé les courriels des 2 décembre 2020 et 11 janvier 2021 par "F______, COO de A______ SA". Les collaborateurs s'étaient donc fiés de bonne foi aux précisions qu'elle leur avait données par écrit quant à leur rétribution. La compréhension de B______ était d'ailleurs identique à celle de ses collègues instruits à ce sujet et A______ SA ne pouvait décemment exiger de lui qu'il investigue sur les conditions de rémunération, alors même que sa compréhension concordait avec les salaires versés. Aucune mauvaise foi de la part de B______ ou de ses collègues ne pouvait ainsi être retenue quant au salaire convenu et payable à l'heure de présence, ce d'autant plus que A______ SA elle-même avait déclaré que les différents médecins renseignés au sujet de l'erreur de calcul salarial s'étaient montrés surpris, mécontents et dévalorisés, ce qui constituait un indice de leur bonne foi et de la compréhension commune du contrat, de même que leur rupture contractuelle rapide postérieure à cette annonce, le lien de confiance ayant été rompu.

S'agissant de la rétribution moyenne d'un médecin dans la région, A______ SA n'était pas parvenue à démontrer que le salaire de 150 fr. par heure de présence était excessif. Le Tribunal ne pouvait retenir que le courriel du 26 novembre 2020 était entièrement attribuable au directeur K______ de HUG, dans la mesure où la phrase relative aux salaires n'était ni signée ni datée et comportait une police différente de la précédente. De plus, les témoins M______ et I______ avaient déclaré qu'ils gagnaient davantage dans leurs emplois actuels qu'auprès de A______ SA. Enfin, quel qu'eût été ou serait la rétribution de B______ avant ou après la relation contractuelle litigieuse, chacune procédait du principe de liberté contractuelle et était par conséquent sans incidence sur la volonté des parties au présent contrat. Par surabondance d'arguments, l'employeuse supportait le risque de l'entreprise, lequel comprenait la haute direction et le contrôle du travail fourni par ses subordonnés, de même que la formulation alambiquée du contrat soumis à ses collaborateurs. Il devait ainsi être retenu que les parties s'étaient bien accordées sur un salaire à l'heure de présence de 150 fr. et qu'il convenait dès lors de rémunérer B______ pour les heures effectuées en novembre et décembre 2020.

En novembre 2020, B______ n'avait pas pu travailler car il avait contracté la COVID. Ayant perçu 167'850 fr. brut au total de décembre 2018 à fin octobre 2020, soit 7'297 fr. 80 brut par mois, il aurait pu prétendre à ce salaire moyen. Ne pouvant statuer ultra petita, le Tribunal a donc condamné A______ SA à verser les 7'005 fr. requis par B______. Pour décembre 2020, elle devait lui rémunérer ses 33 heures de garde au tarif horaire de 150 fr., soit 4'950 fr. Enfin, l'employeuse n'avait pas démontré que son employé avait bénéficié de ses vacances alors qu'elle en avait le fardeau de la preuve, si bien qu'elle devait lui verser une indemnité afférente aux vacances non prises en nature. Le salaire total de B______ s'étant élevé à 179'805 fr. (167'850 fr. + 7'005 fr. + 4'950 fr.) durant toute la relation contractuelle, il pouvait prétendre à 14'977 fr. 75 brut (179'805 fr. x 8.33%). Ne pouvant statuer ultra petita, le Tribunal a donc condamné A______ SA à verser la somme réclamée de 14'587 fr. 90 à B______.

EN DROIT

1.             Le jugement entrepris ayant été communiqué aux parties avant le 1er janvier 2025, la présente procédure d'appel demeure régie par l'ancien droit de procédure (art. 404 al. 1 et 405 al. 1 CPC), sous réserve des dispositions d'application immédiate énumérées à l'art. 407f CPC.

2.             2.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et incidentes de première instance lorsque, dans les affaires patrimoniales, la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

En l'espèce, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

2.2 Déposé dans le délai utile de trente jours, compte tenu des féries pascales, et selon la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1, 131, 142 al. 1 et 3, 143 al. 1, 145 al. 1 let. a et 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable. Il en va de même de la réponse de l'intimé et des écritures subséquentes des parties, déposées dans les délais impartis à cet effet (art. 312 al. 2 et 316 al. 2 CPC), ainsi que de la détermination spontanée de l'appelante du 29 novembre 2024, celle-ci ayant dûment fait usage de son droit inconditionnel de répliquer dans les dix jours suivant la notification de la duplique de l'intimée (ATF 146 III 97 consid. 3.4.1; 142 III 48 consid. 4.1.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_120/2019 du 21 août 2019 consid. 2.2; 5A_174/2016 du 25 mai 2016 consid. 3.2).

2.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC), mais uniquement dans la limite des griefs motivés qui sont formulés (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêts du Tribunal fédéral 4A_290/2014 du 1er septembre 2014 consid. 5; cf. infra consid. 5.1.6).

La Cour disposant d'un pouvoir de cognition complet, l'état de fait a été complété en tenant compte des griefs de l'appelante, dans la mesure utile à la résolution du litige.

2.4 La valeur litigieuse étant inférieure à 30'000 fr., la procédure simplifiée est applicable (art. 243 al. 1 CPC). La présente cause est soumise aux maximes inquisitoire sociale (art. 247 al. 2 let. b ch. 2 CPC) et de disposition (art. 58 al. 1 CPC).

3.             Le litige revêt un caractère international en raison du domicile en France de l'intimé. A juste titre, les parties ne contestent pas la compétence des autorités prud'homales genevoises pour traiter de la présente cause, ni l'application du droit suisse (art. 19 de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale et 121 al. 1 LDIP).

4.             Il ne sera pas donné suite à la requête de l’appelante tendant à la production par l’intimé de son contrat de travail et de ses fiches de salaire auprès de C______, dans la mesure où ces pièces n’ont pas d’incidence sur l’issue du litige (cf. infra consid. 5.2.3).

5.             L'appelante reproche au Tribunal d'avoir erré dans son interprétation subjective du contrat et d'avoir retenu que les parties avaient convenu d'un salaire horaire payable selon les heures de présence au lieu des heures facturables au patient.

5.1 Aux termes de l'art. 18 al. 1 CO, pour apprécier la forme et les clauses d'un contrat, il y a lieu de rechercher la réelle et commune intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention.

Le juge doit donc rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices. Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté – écrites ou orales –, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2; arrêts du Tribunal fédéral 4A_334/2023 du 13 mars 2024 consid. 3.3; 4A_125/2023 du 21 décembre 2023 consid. 3.1). On peut aussi se fonder sur le but du contrat et les intérêts des parties ou encore les usages et les pratiques commerciales (Tercier/Pichonnaz, Le droit des obligations, 6ème éd., 2019, n. 1020).

Si les deux parties veulent la même chose, il y a accord dans les faits, puisqu'il repose sur la concordance effective des volontés (ATF 134 III 625 consid. 3.4). Peu importe le contenu des manifestations de volonté (la volonté "déclarée"); le consentement correspond à ce qu'elles ont effectivement voulu (la volonté "interne"). C'est ce qu'exprime l'art. 18 al. 1 CO, qui prescrit de se fonder sur la "réelle et commune intention" des parties (Tercier/Pichonnaz, Le droit des obligations, 6ème éd., 2019, p. 150 n. 623).

La "lettre" doit notamment céder le pas lorsqu'il faut conclure par l'analyse de moyens complémentaires qu'elle constitue en fait une "dénomination inexacte" au sens de l'art. 18 al. 1 CO, même si la dénomination paraissait tout à fait claire (Tercier/Pichonnaz, op. cit., n. 1021)

Si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties – parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes – ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat – ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves –, il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre. Il s'agit d'une interprétation selon le principe de la confiance (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3 et les références citées).

Subsidiairement, si l'interprétation selon le principe de la confiance ne permet pas de dégager le sens de clauses ambiguës, celles-ci sont à interpréter en défaveur de celui qui les a rédigées, en vertu de la règle "in dubio contra stipulatorem" (ATF 133 III 61 consid. 2.2.2.3; 122 III 118 consid. 2a).

5.2.1 En l'espèce, l'appelante reproche tout d'abord au Tribunal d'avoir retenu que la lettre du contrat était confuse et de s'être uniquement concentré sur l'annexe 4 en omettant d'analyser la clause 2.1. Elle soutient que l'annexe 4 ne pouvait se lire qu'en lien avec la clause précitée à laquelle elle renvoyait et qui prévoyait clairement une rémunération basée sur les heures de travail réalisées et facturées aux patients.

Il est vrai que la clause 2.1 du contrat prévoit une rémunération des heures facturables au patient. L'annexe 4 évoque en revanche une rémunération par heure de "travail effectif", notion peu précise qui peut aisément être comprise comme le temps durant lequel l'employé est à la disposition de son employeur, sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles – ce qui correspond aux heures de présence – ou comme le temps durant lequel il traite effectivement des patients – soit les heures de consultations.

Si la lecture conjointe de l'annexe 4 avec l'art. 2.1, auquel elle renvoie, tend à retenir une rémunération à l'heure de consultation, cela ne suffit pas à retenir que la lettre de l'art. 2.1 refléterait, en l’espèce, la réelle et commune intention des parties, étant rappelé que le texte ne restitue pas toujours le sens de l'accord conclu.

Les parties semblent en effet ne pas avoir prêté une attention particulière au contenu du contrat, en particulier à son art. 2.1, puisque cette clause n'est pas adaptée au médecin salarié. Elle figure sous le titre "obligations du médecin", alors que le paiement du salaire est une obligation de l'employeur, et précise que la rémunération intervient "en contrepartie de l'ensemble des prestations que [l'appelante] fournira au médecin", éléments qui ne sont pertinents que pour un médecin indépendant, qui utilise l'infrastructure de l'appelante en échange d'une partie de ses gains. D'autres clauses, à l'instar de l'art. 7.1 qui stipule que le centre de gravité du contrat est le droit d'usage conféré au médecin, contre rémunération, d'un local au sein de l'établissement, démontrent que le contrat n'est pas adapté à un médecin salarié mais au médecin indépendant. La lettre du contrat, en particulier de l'art. 2.1, doit ainsi être appréciée avec réserve dans l'interprétation de la volonté des parties. Dans ces conditions, il ne peut être reproché au Tribunal de s'être davantage fondé sur l'annexe 4, laquelle est spécifique à la situation de l'intimé, par opposition au reste du contrat rédigé de manière générique et dont le contenu n'est pas adapté au médecin salarié.

Le comportement de l'appelante postérieurement à la conclusion du contrat ne laisse par ailleurs que peu de place au doute quant à la réelle et commune intention des parties, puisqu’elle a versé à son employé un salaire horaire de 150 fr. sur la base de ses heures de présence pendant près de deux ans.

5.2.2 L'appelante soutient à cet égard avoir été dans l’erreur, qui résultait de la transmission par F______ des heures de présence à la comptabilité, et qui n'avait pas été détectée par G______ du fait que le salaire versé pouvait être légitime si le taux d'activité de l'intimé avait été plus important.

Contrairement à ce qu'elle soutient, les premiers juges ont pris en compte ce qui précède et retenu que l'employeuse supportait le risque de l'entreprise, lequel comprenait la haute direction et le contrôle du travail fourni par ses subordonnés. L'appelante ne formulant aucune critique sur ce point, son grief se révèle infondé. Une telle "erreur" apparaît en tout état peu crédible au vu de la durée de la rémunération des heures de présence, laquelle excède une année fiscale complète. Il apparaît surprenant qu'elle n'ait pas été décelée à tout le moins lors de l'établissement des comptes annuels, ce d'autant plus si une telle rémunération – laquelle concernait également trois autres médecins – n'était pas rentable pour l'entreprise comme le prétend l'appelante.

Il semble également improbable que F______ ait pu mal comprendre les conditions de rémunération des médecins de garde, alors qu'elle participait aux entretiens d'embauche, lors desquels l'appelante allègue avoir expliqué les différents contrats possibles aux médecins.

De plus, une des médecins, I______, avait spécifiquement questionné F______ à ce sujet. Il apparaît donc surprenant qu'elle ait pu lui affirmer, par courriel du 28 février 2019, qu'après avoir regardé les autres contrats des médecins rémunérés à l'heure – qui étaient exactement les mêmes que le sien, étaient confus et mentionnaient notamment à l'art. 2.1 la rémunération des heures facturables aux patients –, ils étaient payés à l'heure selon leur temps de présence, si tel n'était pas effectivement le cas. Contrairement à ce que soutient l'appelante, le fait que F______ n'ait eu aucun pouvoir décisionnel sur les salaires n'est pas déterminant, puisque cela ne l'empêchait pas d'avoir pleinement connaissance des conditions salariales appliquées et de pouvoir communiquer sur ce point, ce d'autant plus que selon les témoignages recueillis, elle était la personne de contact des employés pour ce genre de question.

Il n'est pas non plus déterminant que l'intimé n'ait eu connaissance de ce courriel que lorsque la situation a commencé à dégénérer. En effet, si ce document ne pouvait le conforter dans sa compréhension de sa rémunération, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal, le paiement de son salaire sur la base des heures de présence pendant vingt-trois mois suffisait à cet égard. Ce courriel témoigne en revanche de la réelle volonté de l'appelante.

G______ a par ailleurs déclaré que D______ validait les paiements. Or, tant la première – responsable des ressources humaines – que le second – qui a engagé l'intimé – ne pouvaient ignorer son taux d'activité, lequel n'excédait pas un voire deux week-ends par mois. Dans ces conditions, il est pour le moins curieux qu'ils aient procédé pendant près de deux ans au paiement du salaire sur la base des heures de présence à un faible taux d'activité, si les montants versés correspondaient selon eux à un taux d'activité plus élevé, se rapprochant parfois d'un temps plein.

L'appelante échoue ainsi à démontrer qu'elle était victime d'une erreur.

5.2.3 L'appelante fait ensuite grief au Tribunal de ne pas avoir pris en compte l'ensemble des éléments du dossier faisant ressortir que le salaire de l'intimé était disproportionné par rapport à la pratique commerciale des centres médicaux. Elle fait valoir que l'employé ne pouvait pas prétendre de bonne foi à un salaire aussi élevé et qu'elle-même n'avait aucun intérêt à offrir un salaire trois fois plus important que la moyenne.

Son grief est infondé. L'appelante persiste en effet à annualiser, à temps plein, le salaire horaire de l'intimé pour soutenir qu'il serait en disproportion avec le salaire moyen des médecins en Suisse, alors qu'elle a elle-même admis que le salaire de 150 fr. visait à compenser le fait que l'intimé ne travaillait que les week-ends. Une conversion de ce tarif horaire en un salaire fixe à temps plein afin de le comparer aux salaires de la branche est donc inadéquate. L'intimé travaillait à un taux réduit et variable pouvant osciller entre 25 et 80 heures par mois, sans que l'appelante n'établisse – ni même n'allègue – que les salaires moyens dont elle se prévaut seraient versés à des médecins exerçant dans des conditions comparables à celles de l'intimé. L’on ne saurait toutefois comparer le salaire de médecins dont les conditions de travail ne sont pas équivalentes. L'étude de la FMH sur les salaires moyens des médecins en Suisse, le salaire appliqué par les HUG et celui du Dr E______ – qui exerce en tant qu'indépendant et dont le témoignage n'a du reste pas été requis ni produit dans le cadre de la présente procédure – sont ainsi sans pertinence.

Il en va de même de l'allégué de l'appelante selon lequel les trois contrats qu'elle proposait à l'embauche étaient économiquement équivalents – ce qu'elle n'établit pas, la rémunération du médecin salarié au mois n'ayant pas été prouvée –, puisqu'elle compare à nouveau des situations qui ne sont pas comparables, à savoir une activité fixe à temps plein avec celle de l'intimé, engagé à temps partiel, avec un taux d'activité fluctuant exercé exclusivement le week-end. L'explication de l'appelante selon laquelle le salaire horaire plus élevé de 150 fr. visait à compenser les "heures creuses", sans consultations, ne trouve quant à elle aucune assise dans le dossier, au vu des différents éléments examinés ci-dessus.

Le salaire de l'intimé auprès de son précédent employeur n'est pas non plus déterminant, l'appelante n'alléguant pas que l'activité de l'employé exercée auprès de C______ et en son sein serait comparable. Il ressort au contraire des déclarations de l'intimé et du courriel du 9 mars 2023 de L______ à D______ que la rémunération appliquée par C______ correspondait à un pourcentage des factures encaissées. L'intimé a par ailleurs précisé qu'il bénéficiait d'un contrat de franchise, que le montant facturé dépendait du moment de la consultation et qu'il y avait des consultations tout le temps. L'appelante a en outre elle-même déclaré que l'activité chez C______ n'était pas la même qu'auprès d'elle, puisque le médecin travaillant pour C______ devait se déplacer chez le patient. Au vu de ce qui précède, les conditions de travail de l'intimé auprès de son précédent employeur ne sont pas comparables à celles qu'il a eues auprès de l'appelante, si bien qu'elles ne sont pas propres à établir que l'intimé percevait un salaire excessif si l'appelante devait le rémunérer aux heures de présence. C’est dès lors à raison que le Tribunal a renoncé à ordonner la production du contrat et des fiches de salaire de l’intimé auprès de son précédent employeur.

Pour le surplus et contrairement à ce que soutient l'appelante, l'intimé n'a pas reconnu qu'il gagnait un salaire de 153 fr. "par heure de consultation" auprès de C______, celui-ci ayant indiqué à l'appelante, dans leur échange de novembre 2018, qu'il s'agissait d'une moyenne calculée sur la base de ses quatre derniers certificats de salaire puis précisé en audience qu'il était parvenu à ce montant en divisant le total de sa rémunération par le nombre d'heures travaillées pour obtenir un salaire horaire moyen. L'intimé n'a à aucun moment reconnu qu'il était rémunéré 153 fr. par heure de consultation et cela ne peut être déduit de sa déclaration selon laquelle il était payé au pourcentage des consultations effectuées sans prise en considération du temps travaillé, au vu de ce qui précède. Le fait que ce salaire ait servi de base pour les négociations salariales entre les parties ne permet donc pas de retenir que le salaire de 150 fr. visait à rémunérer les heures de consultation, étant en tout état relevé que dans la mesure où l'intimé a déclaré qu'il y avait tout le temps des consultations chez C______ – sans qu'aucun élément de la procédure ne permette d'en douter –, le nombre d'heures de consultation y équivalait à celui des heures de présence, l'appelante n'ayant pas allégué que les déplacements chez les patients n'étaient pas comptabilisés dans les consultations.

Le fait que l'intimé se soit trouvé sans emploi depuis un mois avant d'être engagé par l'appelante n'est quant à lui pas de nature à démontrer que le salaire négocié visait à rémunérer uniquement les heures de consultation.

L'appelante soutient à tort qu'elle n'avait aucun intérêt à offrir un salaire aussi élevé par rapport à ceux proposés par ses concurrents. Outre les éléments qui précèdent, elle a admis en audience qu'elle avait offert le salaire de 120 fr. à certains médecins pour être plus généreuse que certains de ses concurrents et précisé que le salaire de 150 fr. visait à compenser le fait que l'intimé ne travaillait que les week-ends. L'appelante bénéficiait de la flexibilité de son employé, dont le taux d'activité pouvait varier énormément en fonction des besoins de l'appelante, ainsi que de sa disponibilité les week-ends. Elle avait donc bien un intérêt à proposer un salaire horaire plus élevé, contrairement à ce qu'elle soutient.

Elle n'établit par ailleurs pas que le salaire de 150 fr. par heure de présence compromettait sa rentabilité au regard des tarifs TARMED applicables, se contentant d'alléguer que le règlement TARMED imposait des tarifs entre 180 fr. à 400 fr. de l'heure, sans préciser le tarif applicable à l'activité de l'intimé, étant rappelé qu'il travaillait exclusivement le week-end. La rémunération de l'intimé lui a du reste été versée pendant vingt-trois mois et ce n'est que lorsque le nombre de consultations a chuté en raison de la pandémie de COVID-19 que le problème de trésorerie a surgi. En dehors de cette circonstance particulière, le salaire de l'intimé lui permettait manifestement d'être rentable, faute de quoi l'appelante aurait réagi plus tôt, étant rappelé qu'un exercice comptable entier s'était écoulé dans l'intervalle.

Au vu de la relativité des contrats, les questionnements de M______ quant à l'inadéquation de sa propre rémunération par rapport à son activité ne sont pas pertinents pour déterminer la volonté des parties au contrat. En tout état de cause, dits questionnements ne sont apparus qu'à partir de la pandémie de COVID-19, lorsque le nombre de consultations a chuté. Ils sont donc sans incidence sur le caractère adéquat ou excessif du salaire en temps normal, étant rappelé que le contrat litigieux a été conclu en 2018, soit plus d'un an avant le début de la pandémie. La question de savoir si M______ a interpelé F______ au sujet de ce qui précède au moment du COVID est quant à elle sans incidence sur la volonté des parties à la signature du contrat.

L’appelante ne saurait ainsi être suivie lorsqu’elle soutient que la disproportion du salaire horaire à l’heure de présence au regard de la pratique commerciale ne permettait pas à l’intimé de prétendre de bonne foi à une telle rémunération.

5.2.4 L'appelante soutient que l'employé inscrivait par ailleurs ses heures de consultation dans l'agenda, si bien qu'il ne pouvait ignorer qu'il était rémunéré à l'heure de consultation.

Son grief est infondé. En effet, le fait que l'employé inscrivait ses heures de consultation dans l'agenda de l'appelante ne saurait signifier que seules celles-ci étaient rémunérées, puisque ces données étaient nécessaires pour la facturation aux patients.

L'intimé n'avait en particulier pas à partir du principe que le temps qu'il mettait à disposition de son employeur, dans l'attente de consultations, n'était pas rémunéré, une telle hypothèse faisant indûment supporter le risque de l'entreprise à l'employé. A cet égard, l'appelante n'a apporté aucun élément permettant de retenir que la rémunération des seules heures effectivement facturées aux patients constituait une pratique répandue dans le milieu des médecins de garde. Il ne ressort notamment pas des déclarations de M______ qu'il aurait été payé à l'heure de consultation par son précédent employeur, contrairement à ce qu'elle soutient, mais qu'il y travaillait comme "médecin indépendant".

5.2.5 L'appelante fait enfin grief au Tribunal d'avoir omis de prendre en considération que M______ avait la possibilité de rentrer chez lui, ce qui n'était pas envisageable pour un médecin salarié payé à l'heure de présence et tendait à démontrer que l'intimé, qui avait le même contrat que le précité, n'était pas rémunéré de cette manière.

Son grief est infondé. En effet, le fait que l'appelante ait proposé à M______, à une date et dans des circonstances indéterminées, de rentrer chez lui et de l'appeler s'il y avait quelque chose, ne suffit pas à retenir que sa présence n'était pas obligatoire. Cette proposition est contredite par le courriel de F______, qui a confirmé à I______ que pour le type d'activité exercé par l'intimé, la présence du médecin dans les locaux était obligatoire. Par ailleurs, la nature même de son activité de médecin urgentiste impliquait d'être présent dans les locaux, même en l'absence de consultations, afin d'être prêt à intervenir en cas d'urgence, ce qu'a également confirmé I______.

5.2.6 En définitive, l’ensemble des éléments au dossier conduit la Chambre d’appel à retenir, à l’instar du Tribunal, que les parties avaient la réelle et commune intention de fixer le salaire horaire de l’intimé à 150 fr. par heure de présence lorsqu’elles ont conclu le contrat de travail, puisqu’elles ont exécuté leur accord de la sorte pendant près de deux ans et que l’appelante n’a pas démontré avoir été dans l’erreur en s’acquittant de ce salaire, ni que l’intimé ne pouvait pas partir de l’idée qu’il s’agissait du salaire horaire correspondant à l’heure de présence.

L'appelante ne dispose ainsi d'aucune prétention envers l'intimé en restitution de salaires trop perçus (cf. également C/2______/2021), si bien qu'elle ne peut se prévaloir de la compensation pour s'opposer au paiement des sommes qu'elle lui doit.

Les chiffres 3 à 5 et 8 du dispositif du jugement entrepris seront par conséquent confirmés, étant précisé que l'appelante ne remet pas en cause les calculs opérés par le Tribunal et se contente d'indiquer de manière toute générale, s'agissant du chiffre 5, que l'employé avait régulièrement pris ses vacances, sans l'établir.

6.             L'appelante remet en cause le certificat de travail en tant qu'il comporte la mention "nous quitte libre de tout engagement". Elle fait valoir qu'une telle mention équivaudrait à donner à l'intimé un solde de tout compte, alors que des procédures civiles (C/2______/2021) étaient en cours pour récupérer les montants versés en trop à l'employé.

Or, au vu de l'issue du litige, les prétentions de l'employeuse sont infondées et l'intimé ne doit plus rien à l'appelante, si bien que son grief se révèle infondé. De plus, l'expression "libre de tout engagement" signifie davantage que l'employé est libre de s'engager auprès d'un nouvel employeur, sans que des clauses contractuelles, telles qu'une clause de non-concurrence, n'y fasse obstacle.

Partant, le chiffre 7 du dispositif du jugement entrepris sera confirmé.

7.             La valeur litigieuse étant inférieure à 50'000 fr., il ne sera pas prélevé de frais judiciaires (art. 116 al. 1 CPC; art. 19 al. 3 let. c LaCC; art. 71 RTFMC).

Il n'est pas alloué de dépens dans les causes soumises à la juridiction des prud’hommes (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud’hommes :


A la forme
:

Déclare recevable l'appel interjeté le 22 avril 2024 par A______ SA contre le jugement JTPH/437/2023 rendu le 18 décembre 2023 par le Tribunal des prud’hommes dans la cause C/4923/2021.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires ni alloué de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Madame Monique FORNI, Monsieur Aurélien WITZIG, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.