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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/5495/2020

CAPH/200/2022 du 22.12.2022 sur JTPH/266/2021 ( OS ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/5495/2020-5 CAPH/200/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU JEUDI 22 DECEMBRE 2022

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], recourant contre un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 7 juillet 2021 (JTPH/266/2021), comparant en personne,

 

Et

Madame B______, domiciliée ______ [NE], intimée, comparant en personne.


EN FAIT

A.           a. A______ est avocat, inscrit au Barreau de Genève.

b. Par contrat de travail écrit du 1er juin 2014, B______ s'est engagée à plein temps au service de A______, pour un stage en qualité d’assistante-secrétaire, débutant au jour de sa signature, pour une durée déterminée d’une année.

L'employeur acceptait de verser "à bien plaire", une rémunération mensuelle nette de 500 fr. de juin à septembre 2014, de 750 fr. d'octobre 2014 à janvier 2015 et de 1'000 fr. de février à mai 2015.

Il s'engageait par ailleurs à payer à la stagiaire un abonnement général pour les transports publics.

c. Par contrat de travail écrit du 1er janvier 2015, B______ a été engagée en qualité de secrétaire à 100 % (40 heures par semaines), pour une durée d’une année, renouvelable.

Le salaire convenu était de 2’000 fr. bruts par mois. Ce montant a été augmenté au cours des relations de travail pour atteindre 3'000 fr. bruts à la fin des rapports de travail.

En sus du salaire, l'employeur s'engageait à payer à son employée un abonnement général pour les transports publics.

d. Parallèlement à son emploi, B______ suivait un cursus académique.

e. D’août 2016 à août 2017, le salaire net versé à l'employée s’est élevé à 2’748 fr. 50, respectivement à 2’698 fr. 70 de septembre 2017 à février 2018.

f. Par courriel du samedi 9 décembre 2017, B______ a demandé à son employeur le remboursement partiel de son abonnement général dont elle avait reçu la facture pour le prochain semestre à acquitter avant le 6 janvier 2018.

A______ lui a répondu par courriel du lendemain, dimanche 10 décembre 2017, expliquant qu’il ne pouvait pas accéder à sa demande en raison de la situation déficitaire de l’Étude. Il informait par la même occasion B______ du fait qu'il lui avait adressé le samedi 9 décembre un courriel, à son adresse professionnelle et à une adresse privée qui s'est révélée erronée, pour lui signifier son congé pour le même motif.

g. A______ a confirmé, par courrier du 13 décembre 2017, le licenciement de B______ avec effet au 28 février 2018, pour des raisons financières. Ce courrier annonçait à l'employée que son solde de vacances serait prochainement déterminé et qu'un certificat de travail lui serait remis. Il comportait pour le surplus des remerciements pour la collaboration. Il n'y était pas question de solde de rémunération ou de prétentions financières. B______ a contresigné ce courrier "bon pour accord".

h. L'employée a été immédiatement libérée de son obligation de travailler.

i. De janvier à juillet 2018, B______ s’est adressée à cinq reprises à son employeur, notamment par courrier recommandé du 4 mai 2018, pour obtenir le remboursement de son abonnement général.

Ses démarches sont restées sans réponse.

j. En date du 27 juillet 2018, B______ a requis la poursuite de son ancien employeur pour un montant de 4’165 fr. à titre de remboursement de son abonnement général pendant dix-sept mois.

A______ a fait opposition totale au commandement de payer, poursuite n° 1______, qui lui a été notifié.

Par jugement du 26 février 2019, le Tribunal de première instance a débouté B______ de ses conclusions en mainlevée provisoire au motif qu’elle n’avait produit aucune pièce valant reconnaissance de dette au sens de l’art. 82 al. 1 LP. B______ a été condamnée aux frais de la procédure de mainlevée, arrêtés à 200 fr.

B. a. Par requête de conciliation expédiée le 11 mars 2020, déclarée non conciliée à l'audience du 19 juin 2020, et demande simplifiée motivée, expédiée le 19 septembre 2020, puis rectifiée le 27 octobre 2020, B______ a assigné A______ en paiement de la somme de 5'451 fr. 60, avec suite de dépens, se décomposant comme suit :

- 4'165 fr. à titre de remboursement de l’abonnement général;

- 1000 fr. à titre d’indemnité pour tort moral;

- 286 fr. 60 à titre de remboursement des frais de poursuite.

A l’appui de ses conclusions, B______ a invoqué la clause contractuelle selon laquelle, en sus du salaire mensuel brut, l’employeur prenait en charge son abonnement général, ce qu’il avait fait durant plusieurs mois. Au mois d’octobre 2016, l’employeur avait cessé de s’acquitter des mensualités de l’abonnement général en arguant de difficultés financières temporaires de l’Étude. Il n’avait jamais été question de supprimer le remboursement de ses frais, mais simplement d’en différer le paiement, le temps que la situation financière de l'Etude se stabilise. Suite à l’annonce de son licenciement, B______ avait sollicité un entretien de son employeur au cours duquel il avait été convenu que le remboursement de l’abonnement général se ferait par mensualités, afin que la somme de 4’165 fr. (245 fr. x 17 mois) soit remboursée dans l’année. Après avoir patienté durant des mois et adressé divers courriels, ainsi qu’un courrier recommandé à son employeur, tous restés sans réponse, elle s’était résolue à entamer une poursuite, qui lui avait coûté 286 fr. 60 (200 fr. de frais de mainlevée + 86 fr. 60 de frais de commandement de payer). Cette situation l’avait beaucoup choquée et blessée et elle avait dû consulter plusieurs professionnels pour ne pas se laisser abattre par le comportement de A______ qui l’avait ignorée durant des mois, alors qu’il était un ami de la famille. Ce dernier avait par ailleurs tenu des propos dénigrants à son encontre dans ses déterminations au Tribunal de première instance dans le cadre de la procédure de mainlevée provisoire.

b. A l’appui de la demande, B______ a produit, une "attestation sur l’honneur" établie par C______ (pièce 4), laquelle y indiquait avoir été engagée le 11 janvier 2016 en qualité d’assistante-juriste, puis dès le 1er août 2016, comme avocate-stagiaire, en l’Étude de A______. Aux termes de cette attestation, ce dernier s’était engagé oralement à prendre en charge, en plus de son salaire, les frais liés à ses déplacements, à savoir l’abonnement général de train. Il en allait de même pour sa collègue, B______. Le paiement de ces frais avait eu lieu sans interruption jusqu’en octobre ou novembre 2017 (recte 2016). Le défendeur les avait alors informées qu’en raison d’un manque de liquidités, il devait interrompre momentanément ces paiements, mais qu’il les reprendrait dès que possible et qu’elles seraient remboursées en conséquence. Il ressort de cette pièce qu’après le départ de B______, cette dernière avait contacté l’Étude à plusieurs reprises et qu’elle s’était même entretenue avec le défendeur afin de régler la fin de leurs relations de travail, ce qui incluait, à sa connaissance, les prétentions financières qui subsistaient encore.

B______ a également produit une pièce 11 à l'appui de la demande qui consiste dans un long échange de SMS entre elle et l'épouse de A______ pour lui demander d'intercéder afin d'obtenir une réponse concernant le paiement des frais d'abonnement général.

c. Dans sa réponse du 26 janvier 2021, A______ a conclu au déboutement de B______ de toutes ses conclusions. Il a également conclu à ce que la pièce 11 du chargé de pièces de la précitée soit écartée de la procédure, de même que toute allégation y relative.

En substance, le défendeur a allégué qu’en raison de la dégradation des finances de l’Étude, il avait été convenu oralement de modifier le contrat de travail de la demanderesse, en ce sens que l’abonnement général n’était plus à la charge de l’employeur. Il s’agissait d’une modification consentie du contrat qui n'avait soulevé aucune opposition de la part de B______ et aucune promesse de reprise des paiements n’avait été formulée. A cet égard, son courriel du 10 décembre 2018 avait été très clair. Il ressortait des relevés bancaires produits par B______ que les frais de transport n’avaient plus été payés depuis le mois de septembre 2016, sans qu’elle n’ait réagi d’une quelconque manière pour les réclamer. Elle n’avait articulé cette prétention qu’après avoir été licenciée.

Le licenciement de la demanderesse avait été décidé principalement en raison de son "incapacité à réaliser les objectifs de sa mission, avec des manquements réguliers, et parfois de portée plus ou moins grave, lesquels lui ont été régulièrement rappelés par écrit et/ou par oral".

d. Par ordonnance du 28 janvier 2021, le Tribunal de céans a imparti un délai de quinze jours aux parties pour déposer ou récapituler leur liste de témoins ainsi que les moyens de preuves dont elles entendaient se prévaloir.

Par courrier du 15 février 2021, B______ a notamment déposé une liste de quatre témoins.

Par courrier du 19 février 2021, le défendeur s’est notamment opposé aux témoins proposés par la demanderesse compte tenu de "la nature de la procédure à la forme (procédure simplifiée), et la nature technique de la seule question juridique qui y est posée, à savoir la modification d’une clause non essentielle du contrat".

e. Au cours des audiences du Tribunal des 30 mars et 12 avril 2021, la demanderesse a amplifié sa demande du salaire du mois de mars 2018, soit fr. 2’000.- [recte : fr. 3'000 fr.], dans la mesure où elle avait été malade du 12 décembre 2017 au 29 janvier 2018. Le défendeur s’est opposé à cette amplification.

Le Tribunal a entendu les parties en interrogatoire. Il n'a procédé à l'audition d'aucun témoin.

Les parties ont plaidé à l'issue de l'audience du 12 avril 2021 et persisté dans l'intégralité de leurs conclusions.

C. Par jugement JTPH/266/2021 du 7 juillet 2021, reçu par A______ le 14 juillet 2021, le Tribunal des prud'hommes a déclaré recevable la demande formée le 19 septembre 2020 et rectifiée le 27 octobre 2020, par B______ contre A______ (chiffre 1 du dispositif du jugement), déclaré irrecevable l'amplification de la demande formulée par B______ le 30 mars 2021 (ch. 2), condamné A______ à payer à B______ la somme nette de 4'165 fr. (ch. 3), débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 4) et dit qu'il n'était alloué ni frais, ni dépens (ch. 5).

En substance, et sur le seul point encore litigieux seconde instance, soit le remboursement des frais d'abonnement général, le Tribunal a considéré que la conclusion et la modification du contrat de travail n'étaient soumises à aucune forme particulière et que la modification pouvait notamment découler d'un accord exprès ou tacite. Il fallait toutefois se montrer prudent dans l'interprétation du silence opposé par le travailleur à des modifications proposées par l'employeur qui lui sont défavorables. La bonne foi imposait dans certaines circonstances que la réponse positive du travailleur soit clairement manifestée. Une réduction tacite du salaire ne pouvait ainsi être retenue qu'exceptionnellement. Il appartenait à l'employeur de prouver les circonstances particulières du cas d'espèce lui permettant d'inférer de bonne foi du silence de l'employé qu'il avait accepté la modification qui lui est défavorable. En l'occurrence, l'employeur s'était engagé contractuellement à payer l'abonnement de l'employée par acomptes mensuels, ce qu'il avait toutefois cessé de faire dès octobre 2016, ce qui était admis par les deux parties. B______ avait allégué avoir accepté temporairement la suspension de ces paiements, mais ne pas y avoir renoncé définitivement. A______ n'avait pas prouvé le contraire ni établi des circonstances permettant de pouvoir inférer de bonne foi du silence de l'employée son acceptation. L'employée était jeune et inexpérimentée, avait commencé à travailler comme stagiaire chez l'employeur qui était un ami de la famille et un avocat confirmé. Au vu de ces circonstances, il aurait appartenu à ce dernier de proposer une modification écrite du contrat. L'attestation établie par C______ permettait par ailleurs de comprendre que le non-paiement de l'abonnement n'était qu'une suspension temporaire et le rétroactif restait dû une fois la situation financière de l'Etude améliorée.

Le jugement mentionne l'appel (art. 308 et ss CPC) comme voie de droit.

D. a. Par acte expédié le 14 septembre 2021 à la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice (ci-après la Chambre), A______ a formé un "appel" contre ce jugement. Il a conclu principalement à l'annulation du chiffre 3 du dispositif du jugement, avec suite de frais de la procédure, et au déboutement de B______ de toute autre conclusion. Il a par ailleurs repris "à la forme", ses conclusions de première instance visant à ce que la pièce 11 du chargé de pièce de B______ ainsi que toute allégation y relative soient écartées de la procédure.

Préalablement, le recourant reprochait à B______ d'avoir allégué des faits faux, incomplets et portant atteinte à la réputation de son Etude. Elle avait également mis en avant les relations personnelles qu'elle entretenait avec son épouse de manière choquante et inadmissible, raison pour laquelle il convenait d'écarter la pièce 11 de l'intimée. En outre, elle avait, ce faisant, adopté une attitude contraire à la bonne foi en procédure (art. 52 CPC et 2 CC), qui avait induit les premiers juges en erreur à son détriment. L'intimée avait notamment caché au Tribunal combien d'avantages il lui avait fourni durant les rapports de travail (stage non rémunéré qui l'a finalement été, paiement de formations et frais d'examens, augmentation de la rémunération au-delà du montant contractuel). Elle avait également caché au Tribunal l'existence des courriels des 9 et 10 décembre 2017 qu'il avait dû produire. Partant, le Tribunal n'aurait pas dû "cautionner le fait que l'intimée ait chercher à exercer ses droits et d'exécuter ses obligations en violation des règles de la bonne foi, ( ) l'abus manifeste d'un droit n'étant pas protégé par la loi".

Sur le fond, le recourant soutenait d'une part que la prise en charge par l'employeur des frais de transport était en l'occurrence à bien plaire et n'avait aucun caractère obligatoire légalement.

D'autre part, la modification du contrat qui portait sur une renonciation définitive au remboursement de l'abonnement général n'avait soulevé aucune contestation de la part de l'employée; à cet égard l'appréciation du premier juge était "subjective basée sur l'examen des intentions des parties de manière totalement défavorable à l'appelant alors que la chaîne des faits dans son ensemble excluait totalement qu'il aurait cherché à abuser de son statut d'avocat dans un rapport manifestement déséquilibré". Les relevés bancaires de l'employée prouvaient l'absence de paiement de l'abonnement général depuis octobre 2016, sans que cela ne provoque la moindre objection, preuve que ce nouveau régime correspondait à un accord; ce n'était qu'après le licenciement que l'intimée avait réclamé leur paiement. Par son courriel du 9 décembre 2017, le recourant avait clairement dit qu'il ne "pouvait pas entrer en matière sur le remboursement de l'abonnement, confirmant au passage l'accord oral convenu peu après l'été 2016". L'intimée ayant signé sa lettre de licenciement, elle avait renoncé à toute autre prétention que celle qui y était mentionnée, soit le paiement du salaire jusqu'à la fin février 2018, preuve que le premier juge avait ignorée. En outre, une fois la relation de travail rompue, on ne pouvait plus parler de "rapport manifestement déséquilibré" entre les parties comme l'avait fait le premier juge. Dans ces circonstances le Tribunal ne pouvait lui reproche de ne pas avoir fait consigner par écrit la modification contractuelle. Quant au témoignage de C______, il allait à l'encontre de la solution du Tribunal puisqu'il permettait de comprendre qu'elle avait perçu le paiement de l'abonnement comme un "bonus" et non comme une obligation assumée par l'employeur. Le contrat écrit liant ce dernier à C______, datant d'août 2016, ne prévoyait d'ailleurs pas une telle prestation de sa part, preuve que l'Etude n'entendait plus prendre en charge une telle prestation en faveur de ses employés. Le recourant avait d'ailleurs déclaré, en interrogatoire, à l'audience du 30 mars 2021, qu'il avait fermement indiqué à l'Etude en 2016 que la décision de ne plus payer l'abonnement était définitive; il n'avait pas confirmé ses propos par écrit en comptant sur le rapport de confiance.

b. L'intimée n'ayant pas répondu à l'appel dans le délai qui lui a été imparti, le greffe de la Chambre a informé les parties, par courrier du 20 octobre 2021 que la cause était gardée à juger.


 

EN DROIT

1.             1.1 Selon l'art. 308 al. 2 CPC, l'appel est recevable dans les affaires patrimoniales, si la valeur litigieuse est de 10'000 fr. au moins au dernier état des conclusions. Si tel n'est pas le cas, seul le recours est recevable (art. 319 let. a CPC). Ainsi, seule la voie du recours est ouverte en l'espèce au vu de la valeur litigieuse inférieure à 10'000 fr. au dernier état des conclusions de première instance.

Introduit dans le délai de trente jours prévu par la loi (art. 145 al. 1 let. b et 321 al. 1 CPC), le recours est recevable en l'espèce de ce point de vue.

1.2 Selon un principe général qui concrétise la protection de la bonne foi constitutionnellement garantie par l'art. 9 Cst., codifié à l'art. 49 LTF notamment, l'indication manquante ou erronée de la voie de recours, lorsque cette indication est prescrite, ne doit causer aucun préjudice aux plaideurs. Le plaideur dépourvu de connaissances juridiques peut se fier à une indication inexacte des voies de recours, s'il n'est pas assisté d'un avocat et qu'il ne jouit d'aucune expérience particulière résultant, par exemple, de procédures antérieures. En revanche, le plaideur expérimenté ou assisté d'un avocat ne peut pas se prévaloir de l'indication erronée lorsqu'il aurait dû se rendre compte de l'inexactitude en agissant avec l'attention commandée par les circonstances (ATF 144 II 401 consid. 3.1; 141 III 270 consid. 3.3 i.f.; 138 I 49 consid. 8.3.2; 135 III 374 consid. 1.2.2; 123 II 231 consid. 8b; arrêts du Tribunal fédéral 5A_139/2021 du 13 juillet 2021 consid. 3.2.1; 5A_46/2020 du 17 novembre 2020 consid. 4.1.1; 4A_475/2018 du 12 septembre 2019 consid. 5.1).

Une fausse indication ne saurait créer une voie de droit inexistante (ATF 129 III 88 consid. 2.1; 119 IV 330 consid. 1c; arrêts du Tribunal fédéral 5A_545/2012 du 21 décembre 2012 consid. 5.1; 4D_82/2012 du 30 octobre 2012 consid. 2.2).

Le fait que la partie recourante intitule son acte "appel" ne fait pas obstacle à sa recevabilité, celui-ci pouvant être traité comme un recours, s'il en remplit les conditions formelles (art. 130 al. 1 et 131 CPC; ATF 134 III 379 consid. 1.2; 131 I 291 consid. 1.3).

En l'espèce, le Tribunal a mentionné la voie de l'appel à la fin de son jugement. Le recourant a intitulé son acte de recours "appel". En sa qualité d'avocat, il ne pouvait prétendre toutefois ne pas avoir su que seule la voie du recours était ouverte en l'occurrence au vu la valeur litigieuse inférieure à 10'000 fr. La condition de la valeur litigieuse pour distinguer la voie de l'appel de celle du recours est prévue par la loi, et constitue le principal critère de distinction entre ces deux voies. Elle est connue de tous les praticiens et elle est facile à appliquer. Le recourant ne saurait donc se prévaloir d'une erreur induite par une indication erronée des voies de droit par le Tribunal. En tout état, l'indication erronée du Tribunal ne pouvait créer une voie d'appel là où elle n'existe pas.

L'acte déposé par le recourant sera par conséquent admis au titre d'un recours et sera examiné sous cet angle.

2. 2.1.1 Selon les articles 311 al. 1 et 321 al. 1 CPC, l'appel, respectivement le recours (arrêt du Tribunal fédéral 5A_82/2013 du 18 mars 2013 consid. 3.2), est motivé. Il s'agit d'une condition à sa recevabilité, laquelle est examinée d'office par le juge (arrêts du Tribunal fédéral 4A_218/2017 du 14 juillet 2017 consid. 3.1.2 et 5A_89/2014 du 15 avril 2014 consid. 5.3.2). L'appelant doit démontrer le caractère erroné de la motivation attaquée et que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée. Sa motivation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre aisément, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision que le recourant attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique. Il ne suffit pas de renvoyer à une écriture antérieure, de reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, ni de se livrer à des critiques générales de la décision attaquée (ATF 141 III 569 consid. 2.3.3; 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêts du Tribunal fédéral 4A_218/2017 du 14 juillet 2017 consid. 3.1.2, 4A_376/2016 du 2 décembre 2016 consid. 3.2.1). Une motivation succincte ou sommaire peut, suivant les circonstances, être suffisante (ACJC/144/2018 du 30 janvier 2018 consid. 2.1.3). Un mémoire d'appel composé de "copié-collé" des faits allégués et de l'argumentation juridique déjà présentés dans les mémoires de première instance, sans aucune critique de la motivation du premier juge, impliquant que le juge de seconde instance exécute le même travail que celui de première instance, ne satisfait pas aux exigences de l'art. 311 al. 1 CPC (arrêt du Tribunal fédéral 4A_290/2014 du 1er septembre 2014 consid. 3.2).

2.1.2 La Cour saisie d'un recours revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en droit et avec un pouvoir d'examen restreint à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC).

La Cour doit ainsi conduire son raisonnement juridique sur la base des faits retenus par le premier juge et ne peut s'en écarter que s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2), c’est-à-dire de manière arbitraire (Jeandin, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2019, n. 5 ad art. 320 CPC). Le recourant ne peut pas se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; il doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3). Le recourant a en outre la charge de démontrer que la correction du vice dont il se prévaut est susceptible d'influer sur le sort de la cause (Jeandin, op. cit., n. 4 ss ad art. 320 CPC).

L’arbitraire peut affecter l’établissement des faits qui ont fondé l’appréciation des preuves (constat des faits manifestement contraire au dossier, mais aussi l’appréciation des preuves, y compris l’appréciation anticipée, ou l’exercice du pouvoir d’appréciation concernant la fixation de l’état de fait déterminant (Bastons Bulletti, Petit Commentaire CPC, 2020, n° 4 ad art. Art. 320 CPC).

2.2 En l'espèce, le mémoire de recours est en grande partie un "copié-collé" du mémoire de réponse en première instance. Ce n'est qu'à quelques occasions que le recourant commente et critique la solution retenue par le premier juge.

Les griefs relevant d'une attitude contraire aux règles de la bonne foi de l'intimée au cours de la procédure – pour avoir dépeint sciemment l'appelant de manière déplaisante et pour avoir omis d'exposer tous les nombreux avantages non prévus dans le contrat dont elle avait bénéficié au cours de son emploi et enfin d'avoir caché l'échange de mails essentiels des 9 et 10 décembre 2017 – ne sont qu'une reprise du mémoire de première instance, sans aucune critique du jugement. Il n'en sera par conséquent pas tenu compte, étant de surcroît précisé que ces éléments ne sont pas utiles à la solution de l'unique objet encore litigieux en appel.

De même, le recourant répète le contenu de son mémoire de réponse en premier instance dans le recours s'agissant de la teneur du contrat signé entre les parties et de la portée qu'il faut donner à la clause prévoyant le paiement de l'abonnement général – que le recourant qualifie de prestation à bien plaire et ne revêtant aucun caractère légalement obligatoire. Mais il ne critique pas le jugement en relation avec ces circonstances. Même si un grief avait été articulé sur cet objet, il porterait sur l'établissement de la teneur de l'accord entre les parties, soit un point de fait que la Chambre ne peut revoir dans le cadre d'un recours. En tout état, l'argumentation du recourant est contradictoire et peu convaincante lorsqu'il soutient que la clause contractuelle prévoyant le paiement de l'abonnement général n'aurait revêtu aucun caractère obligatoire : non seulement le texte du contrat ne souffre d'aucune ambiguïté quant à un engagement ferme et inconditionnel de l'employeur de fournir une telle prestation, mais en plaidant essentiellement que cette clause avait été modifiée ultérieurement et ne liait plus les parties, le recourant reconnaît implicitement que cette clause l'obligeait avant sa prétendue modification.

Le recourant examine en revanche de manière plus critique le jugement en ce qui a trait à l'existence d'une modification du contrat en 2016 par laquelle les parties auraient renoncé à la prise en charge de l'abonnement général par l'employeur. Si sa motivation aurait certainement été suffisante à cet égard pour être recevable dans le cadre d'un appel, elle ne l'est pas sous l'angle du recours, s'agissant d'établissement des faits et d'appréciation des preuves, domaine dans lesquels le recourant doit établir l'arbitraire du premier juge et non une simple violation de la loi. Or, le recourant n'articule pas un seul reproche qui pourrait laisser penser que le Tribunal aurait établi les faits de manière arbitraire. En tout état, le jugement permet de constater que le premier juge n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation ni commis d'arbitraire. Il a abordé tous les arguments développés par le recourant. Il a argumenté l'option retenue de manière cohérente et convaincante.

3. Même à considérer que les griefs du recourant auraient été recevables sous l'angle restreint du recours, celui-ci ne parvient pas à démontrer que le premier juge aurait erré en niant l'existence d'une modification du contrat par actes concluants et libérant l'employeur de son obligation de payer l'abonnement général de son employée.

3.1 Le premier juge a correctement exposé les principes juridiques applicables en la matière – qui ne sont d'ailleurs pas discutés par le recourant. Ils peuvent être résumés par la citation de l'arrêt du Tribunal fédéral auquel le Tribunal s'est notamment référé qui prévoit que le juge se montrera prudent et fera preuve de retenue avant d’inférer du silence d’un travailleur, a la suite de propositions de modification du contrat dans un sens qui lui est défavorable, l’acceptation de ces conditions. Celle-ci ne peut être admise que dans des situations ou, selon les règles de la bonne foi, du droit ou de l’équité, on doit attendre une réaction du travailleur en cas de désaccord de sa part (ATF 109 II 327 consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 4C_474/1996 du 18 février 1997 consid. 3 ; 4C_242/2005 du 9 novembre 2005 consid. 4.3).

3.2.1 En l'espèce, le recourant reproche de manière générale au Tribunal d'avoir préféré, dans l'examen des indices qu'il avait fourni pour prouver l'existence d'une modification du contrat, le point de vue soutenu par l'intimée au sien, sur la base d'un a priori favorable à celle-ci au motif qu'il y avait un déséquilibre entre les parties.

Rien ne permet de retenir cette appréciation toute générale, le Tribunal ayant examiné objectivement les différents indices disponibles. Le fait que le premier juge ait affirmé que le recourant, avocat confirmé, était mieux armé en matière juridique et contractuelle que l'intimée, jeune secrétaire en formation, correspond à un constat objectif des circonstances du cas d'espèce et non à une appréciation subjective, voire orientée. Ce constat n'est par ailleurs pas inutile dans l'interprétation des comportements des parties pour déterminer ce qu'elles avaient pu comprendre de l'attitude de l'autre, compte tenu de leur expérience, dans le cadre d'une éventuelle modification du contrat par actes concluants. Il ne correspond par conséquent pas à une appréciation négative gratuite du Tribunal à l'encontre du recourant.

Partant, ce premier grief général est sans substance.

3.2.2 Le recourant considère que les relevés bancaires établissant que le remboursement de l'abonnement général n'avait plus été fait depuis septembre 2016 prouvait la modification contractuelle. En réalité, il ne s'agit que de la preuve que l'abonnement n'a plus été remboursé depuis cette date, fait incontesté.

Le recourant estime également que le fait que l'intimée n'ait pas réclamé le remboursement de l'abonnement général jusqu'à la fin des rapports de travail était la preuve qu'elle y avait renoncé, sous-entendant que la prétention articulée après les rapports de travail n'était que de circonstance. Or, cela est faux. La réclamation du remboursement est intervenue avant la fin des rapports de travail, voire en aurait été à l'origine.

L'échange de courriels des 9 et 10 décembre 2017 ne contient aucun indice d'un accord antérieur des parties libérant le recourant de son obligation de payer l'abonnement général de l'intimée, contrairement à ce que soutient ce dernier. On ne peut qu'en tirer que le recourant n'entendait pas le payer, faute de moyen.

De même, le fait que l'intimée ait signé sa lettre de licenciement ne permet pas de considérer qu'elle aurait renoncé à ses prétentions en remboursement de l'abonnement, admettant ainsi implicitement un accord antérieur en ce sens. La lettre de licenciement contresignée pour accord ne contient aucune renonciation à quelque prétention que ce soit, et ne mentionne nulle part qu'elle vaudrait solde de tout compte. Le règlement de prestations financières entre les parties n'y est simplement pas abordée.

Finalement, le recourant fait grand cas du témoignage écrit de C______ qui serait la preuve que dès l'été 2016, il était clair à l'Etude que plus personne ne bénéficierait d'un remboursement de l'abonnement général. Rien dans l'attestation produite ne permet toutefois de le soutenir. Au contraire, ce témoignage confirme que l'interruption des paiements de l'abonnement en automne 2017 (recte 2016), correspondait à une suspension provisoire en raison du manque de liquidités de l'Etude et qu'ils reprendraient une fois la situation assainie.

Ainsi, aucun des indices discutés par le recourant ne permet de soutenir ses griefs contre la motivation du jugement entrepris. Même pris dans leur ensemble en tant que faisceau d'indices, ils ne permettent pas de prouver qu'un accord en vue de la suppression de sa prise en charge de l'abonnement général serait intervenu.

En conclusion, même si le recours avait été recevable, il aurait été rejeté s'agissant de l'annulation du chiffre 3 du dispositif du jugement entrepris.

4. Le recourant reproche au premier juge de ne pas avoir statué sur sa demande d'écarter des débats la pièce 11 de l'intimée.

4.1.1 Une autorité commet un déni de justice formel et viole l'art. 29 al. 1 et 2 Cst. féd. lorsqu'elle se refuse à statuer ou ne le fait que partiellement (ATF 144 II 184 consid. 3.1), ou lorsqu'elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (arrêt du Tribunal fédéral 1C_76/2020 du 5 février 2021 consid. 2.1).

En principe, le déni de justice, à l'instar de la violation du droit d'être entendu, entraîne l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond, et pour peu qu'elle ait eu une influence sur cette décision. Cela étant, la jurisprudence admet qu'un manquement à ce droit puisse être considéré comme réparé lorsque la partie lésée a bénéficié de la faculté de s'exprimer librement devant une autorité de recours, pour autant que celle-ci dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure et puisse ainsi contrôler librement l'état de fait et les considérations juridiques de la décision attaquée (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_215/2017 précité).

4.1.2 A teneur de l'art. 132 al. 1 et 2 CPC, le tribunal fixe un délai pour la rectification des actes inconvenants; à défaut de rectification, l'acte n'est pas pris en considération. Les actes abusifs sont renvoyés à l'expéditeur (art. 132 al. 3 CPC).

4.2 En l'espèce, le recourant reprend des conclusions que le premier juge n'a pas du tout examinées, consacrant un déni de justice. S'agissant d'une question de droit, la Chambre de céans dispose d'un plein pouvoir de cognition et le recourant a développé ses arguments, si bien qu'ils peuvent être examinés par l'autorité de recours afin de réparer l'omission du premier juge.

Le recourant considère que la production d'un échange de SMS entre son épouse et l'intimée était choquante, notamment parce qu'il renvoyait une image dégradée de lui.

Après avoir pris connaissance de l'échange de SMS, qui n'est pas d'une grande utilité à la solution du litige et dont la production n'était certes pas nécessaire, la Chambre constate qu'il ne contient aucun élément inconvenant ou qui ternirait particulièrement l'image du recourant. En tous les cas rien qui atteigne un degré suffisant pour entraîner l'application de l'art. 132 CPC.

La requête du recourant en retrait de la pièce 11 de l'intimée de la procédure sera par conséquent rejetée.

5. En conclusion, le recours sera rejeté dans la mesure de sa recevabilité.

6. Vu la valeur litigieuse, la procédure est gratuite (art. 96 CPC; art. 71 RTFMC) et il n'est pas alloué de dépens en matière prud'homale (art. 22 al. 2 LACC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes, groupe 5 :


À la forme
:

Rejette le recours interjeté par A______ contre le jugement JTPH/266/2021 rendu le 7 juillet 2021 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/5495/2020-5 dans la mesure de sa recevabilité.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais ni alloué de dépens.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Madame Anne-Christine GERMANIER, juge employeur; Monsieur Willy KNOPFEL, juge salarié; Madame Chloé RAMAT, greffière.

 

Le président :

Jean REYMOND

 

La greffière :

Chloé RAMAT

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile ; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires ; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les
art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 15'000 fr.