Décisions | Chambre des baux et loyers
ACJC/624/2025 du 14.05.2025 sur JTBL/1200/2024 ( SBL ) , CONFIRME
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/22831/2024 ACJC/624/2025 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre des baux et loyers DU MERCREDI 14 MAI 2025 |
Entre
Monsieur A______ et Madame B______, domiciliés ______ [GE], appelants d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 21 novembre 2024,
et
C______ SA, sise ______ [FR], intimée, représentée par [la régie immobilière] D______, ______ [GE].
A. Par jugement JTBL/1200/2024 du 21 novembre 2024, reçu par A______ et B______ le 10 décembre 2024, le Tribunal des baux et loyers, statuant par voie de procédure sommaire, a déclaré irrecevables les écritures et pièces déposées par ces derniers le 22 novembre 2024 (ch. 1 du dispositif), les a condamnés à évacuer immédiatement la villa sise no. ______ chemin 1______ à E______ [GE] (ch. 2), a autorisé C______ SA [agence immobilière] à requérir leur évacuation par la force publique dès le 1er juillet 2025 (ch. 3), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4) et dit que la procédure était gratuite (ch. 5).
B. a. Le 20 décembre 2024, A______ et B______ ont formé appel contre ce jugement, concluant à ce que la Cour de justice l'annule (conclusion n° 2), leur octroie un délai d'épreuve "leur imposant de payer la mensualité convenue de 5'000 fr. pour le mois courant au plus tard le 10 du mois suivant" (conclusion n° 3), donne acte à leur partie adverse qu'elle est en droit de percevoir 500 fr. par jour en cas de retard de paiement de plus de 30 jours (conclusion n° 4), réserve les droits de celle-ci tendant au recouvrement des mensualités de retard (conclusion n° 5), donne acte à C______ SA de son "engagement de racheter la villa de F______ [FR], au plus tard 6 mois après la vente de la villa de F______ par l'hoirie A______/G______/H______ et la distribution effective de la part d'héritage correspondante à A______" (conclusion n° 6), subsidiairement, prolonge le délai d'évacuation jusqu'à 6 mois après cette vente (conclusion n° 7) et interdise à C______ SA de vendre la villa de E______ (conclusion n° 8).
Ils ont produit des pièces nouvelles.
b. C______ SA a conclu à l'irrecevabilité de l'appel, subsidiairement à son rejet.
c. A______ et B______ ont par la suite déposé plusieurs déterminations dans le délai légal imparti par la Cour, persistant dans leurs conclusions.
Ils ont également déposé des pièces nouvelles.
d. C______ SA a déposé des déterminations dans les délais légaux impartis par la Cour, persistant dans ses conclusions.
e. Les parties ont été informées le 2 avril 2025 de ce que la cause était gardée à juger par la Cour.
f. A______ et B______ ont encore déposé une écriture et une pièce nouvelle le 15 avril 2025.
C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier.
a.a C______ SA, est propriétaire de la parcelle n° 2______ de la commune de E______, sise no. ______, chemin 1______, sur laquelle se trouve une villa.
a.b C______ SA en qualité de bailleresse, d'une part, et B______ et A______, en qualité de locataires, d'autre part, ont conclu le 22 mai 2014 un contrat de bail à loyer portant sur la location d'une villa sise chemin 1______ no. ______, [code postal] E______.
Le contrat a été conclu du 5 juin 2014 au 31 mai 2015, avec renouvellement tacite d'année en année. Le montant du loyer et des charges a été fixé en dernier lieu à 5'000 fr. par mois.
Les conditions particulières annexées au contrat de bail avaient la teneur suivante :
"Le présent contrat de bail à loyer est effectué suite au rachat de la propriété de Madame B______ par C______ SA, dans le contexte particulier des difficultés économiques momentanées de Madame et Monsieur B______ et A______, et dans le but du rachat de la propriété par ces derniers au plus court terme.
Les conditions contractuelles énumérées ci-dessous sont fermes, et de par leurs signatures, les locataires s'y engagent en totale connaissance et acceptation de cause.
1) Le prix du loyer est forfaitaire et comprend le paiement de la dette hypothécaire, l'amortissement de la dette auprès de la banque, le paiement de l'impôt immobilier. Le solde du loyer est utilisé au remboursement du solde du prêt à A______ dans un premier temps, et dès extinction du remboursement, sera utilisé en amortissement complémentaire de la dette hypothécaire. Ce coût est valable pour la 1ère année, durée du contrat de prêt hypothécaire et pourra être revu à la hausse ou à la baisse pour l'année suivante, en fonction de l'éventuelle fluctuation des taux et conditions bancaires pour l'année suivante, et ainsi de suite. (…)
6) Dans le cas particulier de ce contrat, le prix du loyer est imposé et fait partie du contrat d'octroi de prêt hypothécaire par [la banque] I______ à J______ [FR]. Il est obligatoire.
En cas de non-paiement du loyer, les locataires prennent acte et acceptent que la propriété sera revendue par C______ SA au prix du marché, sans délai. Après remboursement du prêt auprès de la banque, des frais de la société C______ SA, des frais et courtage de la vente, et de l'éventuel remboursement du solde du prêt privé, et des impôts, le solde du prix de vente, soit le bénéfice sera versé à B______ et A______.
7) Le présent contrat est établi pour une durée maximum de 3 ans, le temps aux locataires de se refinancer pour la ré-acquisition de la propriété, qui sera rachetée au prix de la dette bancaire au moment du rachat, additionné des frais de vente, des frais de la société C______ SA, et de l'éventuel solde du prêt privé encore à rembourser.
Le présent contrat est contresigné des 2 époux B______ et A______, qui s'engagent comme co-débiteurs solidaires au présent contrat de bail et de ses conditions."
b. En mars 2018, C______ SA a résilié une première fois le bail pour le 30 avril 2018. Le 10 juillet 2018, les parties ont conclu un accord par devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers. A teneur de cet accord, une unique prolongation de bail était accordée aux locataires jusqu'au 31 mars 2019, étant précisé que ceux-ci conservaient le droit exclusif d'acquérir la villa jusqu'au 31 octobre 2018. Dès le 1er novembre 2018, les locataires s'engageaient à ne pas entraver les démarches en vue de la vente de la villa.
c. Par avis comminatoires du 14 juin 2024, C______ SA a mis en demeure les locataires de lui régler dans les 30 jours 15'000 fr., à titre d'arriéré de loyers et de charges pour la période du 1er avril 2024 au 30 juin 2024, et les a informés de son intention, à défaut du paiement intégral de la somme réclamée dans le délai imparti, de résilier le bail conformément à l'art. 257d CO.
d. Considérant que la somme susmentionnée n'avait pas été intégralement réglée dans le délai imparti, C______ SA a, par avis officiels du 25 juillet 2024, résilié le bail pour le 31 août 2024.
e. Par requête déposée le 2 octobre 2024, C______ SA, agissant par la voie de la protection pour les cas clairs, a, sur les points encore litigieux à ce stade, conclu à ce que le Tribunal ordonne l'évacuation des locataires et prononce des mesures d'exécution directe.
f. Lors de l'audience du Tribunal du 21 novembre 2024, A______ s'est opposé à la requête, expliquant le contexte familial de l'affaire, son frère étant administrateur de la société bailleresse. Il a déclaré avoir effectué différents versements en janvier, février, avril et finalement en novembre 2024, n'ayant toutefois pas réalisé que le versement du 23 février 2024 n'avait pas été exécuté. Il n'avait appris cela que la veille de l'audience, en s'entretenant avec la régie, alors qu'il avait tenté d'entrer en contact avec cette dernière et son frère durant les trois dernières semaines, sans succès. Il s'était alors immédiatement exécuté.
A______ a expliqué la raison du retard du paiement des loyers par le fait que ceux-ci devaient être acquittés au moyen du produit de la vente d'un appartement à K______ (VS) appartenant à l'hoirie dont il faisait partie avec ses deux frères. La vente avait eu lieu le 6 septembre 2024 mais le produit de celle-ci n'avait été redistribué que le 30 octobre 2024, ce qui lui avait permis de s'acquitter en novembre des 35'000 fr. d'arriérés. Selon le locataire, son frère était au courant du retard et des raisons de celui-ci. La maison, dont il était originairement propriétaire, avait été rachetée par la société de son frère et le loyer, simulé, devait servir au remboursement de la dette hypothécaire. Les locataires devaient racheter la villa en 2018 au moyen de fonds propres qui devaient provenir de la vente d'une villa familiale dans le canton de Fribourg. La vente n'avait pas eu lieu et la villa était toujours en vente depuis deux ans.
A______ a conclu à titre subsidiaire, à la suspension de la procédure dans l'attente de discussions avec son frère, voire à l'octroi d'un délai de mise à l'épreuve d'une année, vivant dans le logement avec sa femme et ses deux enfants, encore en études.
C______ SA a proposé un délai de départ maximum au 30 juin 2025 et a persisté pour le surplus dans ses conclusions.
Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.
g. Le 22 novembre 2024, les locataires ont déposé au greffe du Tribunal un courrier accompagné de pièces complémentaires.
1. 1.1 La voie de l'appel est ouverte contre les décisions d'évacuation, lorsque la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).
Pour calculer la valeur litigieuse dans les actions en expulsion initiées selon la procédure de l'art. 257 CPC, il faut distinguer les cas où seule est litigieuse l'expulsion en tant que telle, de ceux où la résiliation l'est également à titre de question préjudicielle. S'il ne s'agit que de la question de l'expulsion, l'intérêt économique des parties réside dans la valeur que représente l'usage des locaux pendant la période de prolongation résultant de la procédure sommaire elle-même, laquelle est estimée à six mois. Si en revanche la résiliation des rapports de bail est également contestée, la valeur litigieuse est égale au loyer pour la période minimale pendant laquelle le contrat subsiste si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle une nouvelle résiliation peut être signifiée; comme il faut prendre en considération la période de protection de trois ans prévue à l'art. 271a al. 1 let. e CO, la valeur litigieuse correspondra en principe au montant du loyer brut (charges et frais accessoires compris) pendant trois ans (ATF 144 III 346 consid. 1.2.1 et 1.2.2.3, JdT 2019 II 235 pp. 236 et 239; arrêt du Tribunal fédéral 4A_376/2021 du 7 janvier 2022 consid.1; Lachat, Procédure civile en matière de baux et loyers, Lausanne 2019, pp. 69-70).
En l'espèce, les appelants contestent que le bail ait pris fin. Compte tenu de la période de protection précitée et du montant du loyer, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr.
Partant, la voie de l'appel est ouverte contre le prononcé de l'évacuation.
1.2.1 L'appel, écrit et motivé (art. 311 al. 1 CPC), doit être formé dans un délai de dix jours si la décision a été rendue en procédure sommaire (art. 314 al. 1 CPC).
Selon l'article 317 CPC, les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont pris en compte dans le cadre d'un appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard et s'ils ne pouvaient être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (al. 1). La demande ne peut être modifiée que si les conditions fixées à l'art. 227 al. 1 CPC sont remplies et si la modification repose sur des faits ou moyens de preuve nouveaux (al. 2).
1.2.2 En l'espèce, les conclusions n° 4 à 8 des appelants sont nouvelles. Ceux-ci n'expliquent cependant pas sur quels faits nouveaux ces nouvelles conclusions se fondent ni n'allèguent que les conditions fixées par l'art. 227 al. 1 CPC seraient réalisées.
Ces conclusions sont dès lors irrecevables.
Pour le reste, l'appel, déposé dans le délai et selon les formes prévus par la loi, est recevable.
1.3 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit; en particulier, le juge d'appel contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).
2. 2.1 En appel, les parties doivent présenter de manière complète les griefs contre la décision attaquée dans le délai d'appel, respectivement dans la réponse à l'appel; un éventuel deuxième échange d'écritures ou l'exercice du droit de réplique n'est pas destiné à compléter une motivation insuffisante, ni à introduire des arguments nouveaux après l'expiration du délai d'appel. Les nova doivent eux aussi en principe être invoqués dans le premier échange d'écritures (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêt 4A_412/2021 du 21 avril 2022 consid. 3.2).
A partir du début des délibérations, les parties ne peuvent plus introduire de nova, même si les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC sont réunies. La phase des délibérations débute dès la clôture des débats, s'il y en a eu, respectivement dès que l'autorité d'appel a communiqué aux parties que la cause a été gardée à juger (ATF 142 III 413 consid. 2.2.3 à 2.2.6; arrêt du Tribunal fédéral 5A_456/2016 du 28 octobre 2016 consid. 4.1.2).
2.2 En l'espèce, les pièces nouvelles produites par les appelants en même temps que leur appel sont irrecevables.
Ces pièces sont soit antérieures à la date à laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger, soit non datées. Or les appelants n'exposent pas pour quel motif ils ne pouvaient pas les produire devant le Tribunal ni n'allèguent que les conditions posées par l'art. 317 al. 1 CPC seraient réalisées.
Les pièces produites avec les écritures des appelants déposées après l'expiration du délai d'appel sont également irrecevables, conformément à la jurisprudence précitée.
Il en va de même de la pièce et de l'écriture déposées par les appelants après que la cause a été gardée à juger par la Cour.
3. Le Tribunal a retenu que l'intimée avait valablement résilié le bail des appelants pour défaut de paiement, puisqu'aucun versement du loyer n'était intervenu dans le délai comminatoire. La possibilité donnée aux locataires de racheter le logement ne pouvait faire échec au cas clair, puisqu'il ressortait du bail et de l'accord du 10 juillet 2018 que cette option était limitée dans le temps et échue. L'évacuation des appelants, qui ne disposaient d'aucun titre leur permettant de se maintenir dans les locaux, devait être prononcée.
Au fil d'une argumentation prolixe et confuse, mélangeant les faits et le droit, les appelants font valoir qu'il avait été oralement convenu avec G______, administrateur de l'intimée, que le délai qui leur avait été octroyé pour le rachat de la villa de E______ serait prolongé jusqu'à la vente d'une maison sise à J______ [FR] dont les deux frères étaient copropriétaires. La vente de la villa à l'intimée et le contrat de bail étaient des actes simulés, "la réelle volonté des parties étant que G______ rende à son frère A______ le service de portage de la villa de E______ par C______ SA, villa que ce dernier rachèterait dans un délai convenu (et désormais prolongé) et que jusque-là, une mensualité de 5'000 fr. serait payée de ce chef que la comptabilité de C______ SA reconnaissait comme des loyers". L'intimée commettait un abus de droit. Toutes les mensualités avaient été payées au jour de l'audience du Tribunal et l'intimée ne subissait aucun dommage.
L'intimée conteste toutes les allégations de ses parties averses.
3.1.1 La procédure de protection dans les cas clairs prévue par l'art. 257 CPC permet à la partie demanderesse d'obtenir rapidement une décision ayant l'autorité de la chose jugée et la force exécutoire, lorsque la situation de fait et de droit n'est pas équivoque (ATF 141 III 23 consid. 3.2 et la référence citée). En vertu de l'art. 257 al. 1 CPC, le tribunal admet l'application de la procédure sommaire lorsque l'état de fait n'est pas litigieux ou est susceptible d'être immédiatement prouvé (let. a) et que la situation juridique est claire (let. b). Le tribunal n'entre pas en matière sur la requête lorsque cette procédure ne peut pas être appliquée (art. 257 al. 3 CPC).
Selon la jurisprudence, l'état de fait n'est pas litigieux lorsqu'il n'est pas contesté par le défendeur. Il est susceptible d'être immédiatement prouvé lorsque les faits peuvent être établis sans retard et sans trop de frais. En règle générale, la preuve doit être rapportée par la production de titres, conformément à l'art. 254 al. 1 CPC. Si le défendeur fait valoir des objections et exceptions motivées et concluantes, qui ne peuvent être écartées immédiatement et qui sont de nature à ébranler la conviction du juge, la procédure pour les cas clairs est exclue et la requête irrecevable. A l'inverse, le cas clair doit être retenu lorsque sont émises des objections manifestement mal fondées ou inconsistantes sur lesquelles il peut être statué immédiatement. La situation juridique est claire lorsque l'application de la norme au cas concret s'impose de façon évidente au regard du texte légal ou sur la base d'une doctrine et d'une jurisprudence éprouvées. En règle générale, la situation juridique n'est pas claire si l'application d'une norme nécessite l'exercice d'un certain pouvoir d'appréciation de la part du juge ou que celui-ci doit rendre une décision en équité, en tenant compte des circonstances concrètes de l'espèce, ce qui est notamment le cas lorsqu'il doit statuer sur la bonne foi (ATF 144 III 462 consid. 3.1; 141 III 23 consid. 3.2; 138 III 123 consid. 2.1.2).
3.1.2 A teneur de l'art. 253 CO, le bail à loyer est un contrat par lequel le bailleur s'oblige à céder l'usage d'une chose au locataire moyennant un loyer.
3.1.3 Selon l'art. 257d CO, lorsque le locataire a reçu la chose louée et qu'il tarde à s'acquitter d'un terme ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui signifier qu'à défaut de paiement dans ce délai, il résiliera le bail; ce délai doit être d'au moins trente jours pour les baux d'habitations ou de locaux commerciaux (al. 1). A défaut de paiement dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux d'habitations ou de locaux commerciaux peuvent être résiliés avec un délai de congé minimum de trente jours pour la fin d'un mois (al. 2).
3.1.4 Pour apprécier la forme et les clauses d'un contrat, le juge n'est pas lié par les expressions ou dénominations inexactes dont les parties ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO). Dans cette dernière hypothèse, on parle de simulation. La volonté de simuler un acte juridique est nécessairement liée à une intention de tromper. Un acte juridique est simulé au sens de l'art. 18 CO lorsque les deux parties sont d'accord que les effets juridiques correspondant au sens objectif de leurs déclarations ne doivent pas se produire et qu'elles n'ont voulu créer que l'apparence d'un acte juridique à l'égard des tiers. Leur volonté véritable tendra soit à ne produire aucun effet juridique, soit à produire un autre effet que celui de l'acte apparent; dans ce dernier cas, les parties entendent en réalité conclure un second acte dissimulé. Juridiquement inefficace d'après la volonté réelle et commune des parties, le contrat simulé est nul, tandis que le contrat dissimulé - que, le cas échéant, les parties ont réellement conclu - est valable si les dispositions légales auxquelles il est soumis quant à sa forme et à son contenu ont été observées (ATF 117 II 382 consid. 2a; arrêts du Tribunal fédéral 4A_484/2018 consid. 4.1; 4A_473/2018 consid. 4.1.3; 4A_90/2016 consid. 3.3.2).
Le comportement ultérieur des parties est un indice de leur intention réelle au moment de la conclusion du contrat. Il incombe à celui qui se prévaut de la simulation d'en apporter la preuve (art. 8 CC), étant précisé qu'on ne saurait admettre trop facilement que les déclarations ou attitudes des parties ne correspondent pas à leur volonté réelle; le juge doit se montrer exigeant en matière de preuve d'une simulation. Des allégations de caractère général et de simples présomptions ne suffisent pas (arrêt du Tribunal fédéral 4A_287/2021 du 7 juin 2022 consid. 6.2.1).
3.1.5 Selon l'art. 2 CC, chacun est tenu d’exercer ses droits et d’exécuter ses obligations selon les règles de la bonne foi (al. 1). L’abus manifeste d’un droit n’est pas protégé par la loi (al. 2).
Il y a abus de droit lorsqu'une institution est utilisée de façon contraire au droit, pour la réalisation d'intérêts que cette institution n'a pas pour but de protéger (ATF 137 V 82; 138 III 401, JdT 2015 II 267).
3.2 En l'espèce, les appelants occupent depuis 2014 la villa qui appartient à l'intimée et s'acquittent en échange d'un montant mensuel de 5'000 fr. à titre de loyer. Cette opération correspond en tous points à la définition du bail à loyer au sens de l'art. 253 CO.
Le prétendu contrat simulé a de plus été exécuté par les parties depuis de nombreuses années.
Aucun élément du dossier ne permet dès lors de retenir que le bail conclu par les parties serait simulé.
Même à supposer que tel soit le cas, un contrat de bail simulé ne donnerait pas aux appelants le droit d'occuper librement la villa qui appartient à l'intimée.
Par ailleurs, le fait que les parties aient initialement prévu que les appelants auraient la possibilité d'acquérir la maison litigieuse n'est pas déterminant. Cette acquisition ne s'est pas faite à ce jour, de sorte que les appelants ne sont pas autorisés à occuper la villa en tant que propriétaires. A cela s'ajoute que, comme l'a relevé à juste titre le Tribunal, il ressort du contrat de bail et de l'accord conclu par les parties le 10 juillet 2018, dans le cadre d'une précédente procédure d'évacuation, que cette option d'achat était limitée dans le temps et que la durée convenue a expiré depuis plusieurs années.
Le fait que les appelants aient résorbé l'arriéré de loyer après la résiliation du bail n'est pas déterminant, puisque, pour faire échec à l'entrée en force de la résiliation, le paiement aurait dû intervenir dans le délai comminatoire.
Enfin, aucun élément du dossier ne permet de retenir que l'intimée abuserait de son droit en requérant l'évacuation des appelants. Ceux-ci se limitent d'ailleurs à invoquer brièvement l'art. 2 CC sans expliquer concrètement en quoi consisterait l'abus de droit dont ils se prévalent.
Il résulte de ce qui précède que les appelants n'ont fait valoir aucune objection ou exception motivée et concluante de nature à faire obstacle à leur évacuation.
Le Tribunal a dès lors jugé à bon droit que les conditions d'une résiliation du bail pour défaut de paiement du loyer sont clairement réalisées et que les appelants ne disposent plus de titre les autorisant à occuper la villa litigieuse.
Les appelants ne formulent par ailleurs aucune critique motivée recevable à l'encontre des modalités d'exécution de l'évacuation fixée par le Tribunal.
Le jugement querellé sera dès lors confirmé.
4. Il n'est pas prélevé de frais ni alloué de dépens, s'agissant d'une cause soumise à la juridiction des baux et loyers (art. 22 al. 1 LaCC).
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La Chambre des baux et loyers :
A la forme :
Déclare recevable l'appel interjeté le 20 décembre 2024 par A______ et B______ contre le jugement JTBL/1200/2024 rendu le 21 novembre 2024 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/22831/2024.
Au fond :
Confirme le jugement querellé.
Dit que la procédure est gratuite.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Siégeant :
Madame Nathalie RAPP, présidente; Madame Pauline ERARD, Madame
Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges: Madame Laurence MIZRAHI, Monsieur Jean-Philippe FERRERO, juges assesseurs; Madame Victoria PALAZZETTI, greffière.
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.