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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/16351/2020

ACJC/1528/2024 du 20.11.2024 sur JTBL/864/2023 ( OBL ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16351/2020 ACJC/1528/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU MERCREDI 20 NOVEMBRE 2024

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______ [GE], et Madame B______, domiciliée ______, France, appelantes d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 15 décembre 2023, représentés par Me Michael ANDERS, avocat, rue du Conseil Général 18, 1205 Genève,

 

et

Monsieur C______, domicilié en Turquie, intimé, représenté par Me Etienne MAITRE, avocat, rue Saint-Léger 8, 1205 Genève.

 

 

 

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/864/2023 du 15 décembre 2023, communiqué pour notification aux parties le 30 janvier 2024, le Tribunal des baux et loyers a condamné A______ et B______, prises conjointement et solidairement, à payer à C______ la somme de 37'170 fr. plus intérêts à 5% l’an dès le 1er juin 2021 (ch. 1 du dispositif), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 2) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 3).

B. a. Par acte expédié le 1er mars 2024 à la Cour de justice, A______ et B______ forment appel contre ce jugement. Elles en sollicitent l'annulation et concluent à ce que la Cour déboute C______ de l’ensemble de ses conclusions.

Elles produisent quatre pièces nouvelles, à savoir les comptes de résultats de leur entreprise pour les années 2018 à 2021. Elles allèguent également des faits nouveaux en lien avec ces pièces.

b. Dans sa réponse du 4 avril 2024, C______ conclut au paiement de la somme de 4'950 fr. portant intérêts à 5% l’an dès le 1er mai 2019 en sa faveur et, pour le surplus, à la confirmation du jugement entrepris.

c. Le 22 mai 2024, A______ et B______ ont répliqué et persisté dans leurs conclusions d’appel.

d. Le 24 juin 2024, C______ a répliqué et persisté dans ses conclusions.

e. Les parties ont été avisées le 23 août 2024 par le greffe de la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. Par contrat du 30 mars 2015, A______ et B______ ont pris en gérance une arcade d’environ 75 m2 au rez-de-chaussée de l’immeuble sis à l'avenue 1______ no. ______ à Genève, exploitée sous l’enseigne « D______ ».

Le contrat était conclu avec C______, locataire principal de l’arcade, pour une durée déterminée de seize mois et demi, soit du 15 avril 2015 au 31 août 2016. Le fermage a été fixé à 5'500 fr. par mois, loyer de 2'833 fr. plus 250 fr. de charges inclus.

Le contrat prévoyait une garantie de loyer de 30'000 fr., laquelle serait restituée aux gérantes en cas de résiliation ou à l’échéance du contrat de gérance, sous déduction notamment des loyers non payés.

b. La gérance a été prolongée pour une durée déterminée de trois ans, du 1er août 2017 au 31 juillet 2020, par avenant du 24 juillet 2017.

c. Par accord entre bailleurs et locataires, le droit de gérance a été réduit à 5'000 fr. par mois dès le 1er août 2017.

d. Par procuration du 21 avril 2019, C______ a donné les pouvoirs à son fils, E______, de le représenter dans tous les actes et actions juridiques de la vie courante.

e. C______ est parti s’installer à F______ (Turquie) depuis le 26 décembre 2019, selon attestation de l’Office cantonal de la population et des migrations du 17 février 2020.

f. Il est admis que les locataires ont consigné les fermages dès mai 2019 (avis n° 14L 2019 2______). Les loyers ont été consignés par la suite, sous réserve d’avril et mai 2020.

g. Selon C______, une place de stationnement située à la même adresse aurait été louée aux locataires pour un loyer de 150 fr. par mois. A______ et B______ allèguent que ladite place de stationnement a été mise à leur disposition à bien plaire, sans terme ni délai, et que son usage a pris fin à la mi-mars 2020 au moment de la fermeture sanitaire et qu’il a repris en été de juin à juillet 2020.

h. Lors de leur comparution personnelle devant le Tribunal, A______ et B______ ont confirmé que, pendant cette période (de mars 2020 à la restitution des locaux), l’épouse du fils de C______ avait utilisé ledit emplacement, car les époux exploitaient un Kebab à l’emporter dans les locaux situés à côté des leurs. Elles ont précisé qu’elles avaient dû fermer en raison de l’exiguïté du local, qu’elles n’avaient pas pu faire de vente à l’emporter, faute de matériel et de cuisine adaptés, ni exploiter la terrasse. Elles n’avaient pu exploiter les locaux qu’environ 3 à 4 mois au total sur ladite période. Le droit de gérance avait été payé durant les mois d’exploitation.

A______ et B______ ont allégué avoir payé un droit d’usage de 150 fr. par mois pour la place de parking jusqu’en mars 2020 et durant les mois de juin et juillet 2020. C______ a affirmé que les locataires auraient cessé de régler ce montant depuis mai 2019.

i. Par courrier du 7 mai 2020, le Département du développement économique de Genève a informé A______ et B______ de ce que, sur la base de l’accord tripartite signé, il prendrait à sa charge la somme de 1'416 fr. 50 correspondant à la moitié de la créance totale que le bailleur consentait à abandonner pour le loyer du mois d’avril 2020, de sorte qu’elles étaient exonérées du paiement du loyer pour avril 2020. La participation de l’Etat de Genève serait versée directement au bailleur.

j. Par courriers du 9 juillet 2020 adressés au conseil de A______ et à B______, C______ les a mises en demeure de s’acquitter d’un arriéré de 17'250 fr. correspondant aux fermages de l’arcade pour les mois de mai, juin et juillet 2020 – qui n’avaient pas été consignés, ainsi qu’aux loyers pour le parking pour 15 mois. C______ a par ailleurs rappelé l’échéance du contrat au 31 juillet 2020.

k. Par requêtes déposées le 14 août 2020 par-devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers, déclarées non conciliées à l’audience de la Commission du 5 novembre 2020 et portées devant le Tribunal le 7 décembre 2020, C______, représenté par son fils E______, a conclu à l’évacuation de A______ et B______ de l’arcade et de la place de stationnement, ainsi qu’au paiement de :

- 5'000 fr. plus intérêts à 5% l’an dès le 1er mai 2020 à titre d’arriérés de fermage pour l’arcade 

- 2’250 fr. plus intérêts à 5% l’an dès le 1er juillet 2020 à titre d’arriérés de fermage pour l’arcade;

- 10'000 fr. plus intérêts à 5% l’an dès le 1er décembre 2020 à titre d’indemnité pour occupation illicite de l’arcade;

- 750 fr. plus intérêts à 5% l’an dès le 1er décembre 2020 à titre d’indemnité pour occupation illicite de la place de stationnement;

- 5’000 fr. pour tous les nouveaux mois d’occupation illicite de l’arcade à partir du 1er janvier 2021;

- 150 fr. pour tous les nouveaux mois d’occupation illicite de l’arcade à partir du 1er janvier 2021;

- 10’000 fr. pour tous les nouveaux mois d’occupation illicite de l’arcade et de la place de stationnement à partir du 1er janvier 2021, à titre de dommages et intérêts.

C______ a exposé que A______ et B______ n’avaient pas consigné le fermage de l’arcade pour le mois de mai 2020 et ne s’étaient pas acquittées des loyers de la place de stationnement depuis le mois de mai 2019.

Il a admis avoir été exonéré du loyer principal pour l’arcade pour le mois d’avril 2020.

l. Parallèlement, par lettre du 28 janvier 2021, le Département du développement économique a informé A______ et B______ que l’Etat de Genève prenait à sa charge la somme de 1'415 fr. pour les loyers de novembre et décembre 2020. Ladite participation serait versée directement à C______.

m. Dans leur réponse du 14 mai 2021, A______ et B______ ont conclu à la constatation de ce que C______ n’était pas valablement représenté par E______ et au déboutement de celui-là de toutes ses conclusions.

Elles ont considéré que le montant total de la créance de C______ pour les fermages était douteux vu que celui-ci n’avait pas pris en compte l’exonération du loyer principal pour les mois de novembre et décembre 2020.

Elles ont contesté devoir le fermage, tant de l’arcade que de la place de stationnement, durant les périodes de fermeture de l’établissement en raison du COVID-19, en se prévalant (subsidiairement en ce qui concerne l’arcade) de la clausula rebus sic stantibus, et (plus) subsidiairement d’un défaut de la chose louée. Elles ont en outre allégué que la place de stationnement avait été mise à leur disposition à bien plaire et qu’elles s’étaient acquittées d’un montant de 150 fr. pendant l’utilisation de celle-ci.

n. Par ordonnance du 1er juillet 2021, la procédure a été suspendue jusqu’à droit jugé dans une cause opposant les parties sur la question de la fin du contrat (C/3______/2020).

o. Les locaux litigieux ont été libérés par A______ et B______ le 31 décembre 2021.

p. La cause C/3______/2020 s’étant achevée par un retrait, la présente procédure a été reprise par ordonnance du 19 janvier 2022.

q. A l’audience du 24 mars 2022 devant le Tribunal, C______ a conclu au paiement de 75'000 fr. avec intérêts dès le 1er février 2021, à titre d’arriérés de fermages de l’arcade (15 mois), de 4'950 fr. avec intérêts dès le 1er février 2021, à titre de loyers de la place de stationnement (33 mois), ainsi qu’à 180'000 fr. avec intérêts dès le 1er février 2021, à titre de dommages et intérêts.

A______ et B______ ont conclu préalablement à ce qu’une audition des parties soit ordonnée et principalement au déboutement de C______. Elles ont en outre excipé de compensation à concurrence de 30'000 fr. et de 85'000 fr.

r. Par arrêt du 11 octobre 2021, statuant sur une demande introduite par A______ à l’encontre de C______ (C/4______/2019), la Cour a ordonné la libération des loyers consignés en faveur de C______.

Le total de la consignation des loyers s’élevait à 85'000 fr. au 14 juin 2021.

s. A l’audience du 4 novembre 2022, A______ et B______ ont notamment émis le souhait de discuter avec C______ afin de régler le litige. Elles avaient payé le fermage lorsqu’elles n’avaient pas été empêchées d’utiliser les locaux en raison du COVID-19.

t. Par courrier du 12 avril 2023, le conseil de C______ a informé le Tribunal d’un mauvais état de santé de son client, sollicitant de pouvoir le représenter à l’audience suivante. Un certificat médical en langue turque était joint.

u. Par courrier du 17 avril 2023, le conseil de C______ a répété que celui-ci avait des problèmes de santé et ne pouvait se présenter à une audience. Il a précisé ses conclusions en paiement comme suit :

- 75'000 fr. avec intérêts dès le 1er février 2021, à titre de fermages et d’indemnités pour occupation illicite de l’arcade, pour les mois de mai, novembre et décembre 2020, janvier à décembre 2021 – hormis juin 2021 – et janvier 2022 (15 x 5'000 fr.);

- 4'950 fr. avec intérêts dès le 1er septembre 2020, à titre de loyers et d’indemnités pour occupation illicite de la place de stationnement durant les mois de mai 2019 à janvier 2022 (33 x 150 fr.);

- 180'000 fr., avec intérêts dès le 1er février 2021, à titre de dommages et intérêts.

v. Par courrier adressé au Tribunal le 3 mai 2023, le conseil de A______ et B______ a notamment émis un doute au sujet du certificat médical de C______, sollicitant la comparution du précité. Subsidiairement, il a conclu à pouvoir conclure et plaider par écrit.

w. Par ordonnance du 7 août 2023, le Tribunal a retenu que la comparution personnelle de C______, domicilié dans un pays lointain et malade, ne s’imposait pas au vu de la nature du litige et a convoqué la cause pour les plaidoiries finales.

x. Lors de l’audience du 6 octobre 2023, le Conseil de C______ a plaidé et persisté dans ses conclusions (75'000 fr. d’arriérés de fermages et indemnités pour occupation illicite, soit 15 mois à 5'000 fr. par mois, portant intérêts à 5% l’an dès le 1er mai 2020; 4'950 fr. d’arriérés de loyers et indemnités pour occupation illicite pour la place de parking, soit 33 mois à 150 fr. par mois, portant intérêts à 5% l’an dès le 1er septembre 2020; et 180’000 fr. de dommages et intérêts, portant intérêts à 5% l’an dès le 1er avril 2021). A______ et B______ ont également persisté dans leurs conclusions en déboutement de C______. Les parties ont respectivement répliqué et dupliqué.

La cause a été gardée à juger à l’issue de l’audience.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, les contestations portant sur l'usage d'une chose louée sont de nature pécuniaire (arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

En l'espèce, les sommes litigieuses s’élèvent à 67'170 fr. et 4'950 fr., de sorte que la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr.

La voie de l’appel est donc ouverte.

1.2 Selon l'art. 311 CPC, l'appel est introduit auprès de l'instance d'appel dans les trente jours à compter de la notification de la décision, laquelle doit être jointe au dossier d'appel.

L'appel a été interjeté dans le délai prescrit par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable sous cet angle.

1.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC; Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd. 2010, n. 2314 et 2416; Retornaz in : Procédure civile suisse, Les grands thèmes pour les praticiens, Neuchâtel, 2010, p. 349 ss, n. 121).

2. Les appelantes ont produit quatre pièces nouvelles, à savoir les comptes de résultats de leur entreprise pour les années 2018 à 2021. Elles allèguent également des faits en lien avec ces pièces, qui n’ont pas été introduits en procédure de première instance.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuves nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b). Les deux conditions sont cumulatives (Jeandin, Code de procédure civile commenté, Bâle, 2011, n. 6 ad art. 317 CPC).

2.2 En l’espèce, les comptes de résultats se rapportent à des années antérieures à la procédure d’appel et même, partiellement, à l’introduction de la procédure de première instance. Ces documents sont datés respectivement des 29 octobre 2019 (bilan 2018) et 7 juin 2022 (bilan 2021) et non datés (bilans 2019 et 2020) et sont donc antérieurs à l’audience du 6 octobre 2023, date à laquelle la cause a été gardée à juger par le Tribunal. Ces pièces auraient pu être versées à la procédure, en première instance, par les appelantes. Celles-ci n’expliquent pas pourquoi tel n’a pas été le cas. De plus, les faits allégués pour la première fois par les appelantes, qui se rapportent à une période antérieure au moment où le Tribunal a gardé la cause à juger pouvaient et devaient être allégués antérieurement. Ils ne sont dès lors pas recevables en appel. Il s’ensuit que les appelantes n’ont pas fait preuve de la diligence requise, de sorte que ni les pièces nouvelles, ni les faits qui s’y rattachent ne sont recevables.

3. Les appelantes reprochent au Tribunal d’avoir omis à tort le montant du loyer et de n’avoir pas pris en considération leurs déclarations en audience.

3.1 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit; en particulier, le juge d'appel contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

3.2 Aux termes de l’art. 311 al. 1 CPC, l’appel doit être motivé. L’appelant a ainsi le fardeau d'expliquer les motifs pour lesquels le jugement attaqué doit être annulé et modifié, par référence à l'un et/ou l'autre motif(s) prévu(s) à l'art. 310 CPC. La maxime inquisitoire (art. 55 al. 2 et 247 al. 2 CPC) et la maxime d'office (art. 58 al. 2 CPC) ne dispensent pas l'appelant de motiver correctement. Un simple renvoi aux écritures et pièces de première instance ne serait pas conforme à l'exigence de motivation de l'art. 311 al. 1 CPC. L'instance supérieure doit pouvoir comprendre ce qui est reproché au premier juge, sans avoir à rechercher des griefs par elle-même, ce qui exige une certaine précision quant à l'énoncé et à la discussion des griefs (ACJC/150/2019 consid. 3.1; Jeandin in: bohnet/haldy/jeandin/-schweizer/tappy, Code de procédure civile commenté 2019, n. 3 ad art. 311 et les références citées).

3.3 En l’espèce, les appelantes se contentent d’énumérer les faits manquants à leur sens, sans expliquer en quoi ils seraient pertinents, de sorte que ce grief n’est pas recevable.

4. Les appelantes estiment que le Tribunal n’a pas considéré à tort que la clausula rebus sic stantibus doit s’appliquer à la différence entre le loyer dû au propriétaire et le droit de gérance, soit le gain du sous-bailleur.

4.1 En l’espèce, les appelantes n’expliquent pas en quoi consisterait la différence pertinente entre ces deux notions et par quel raisonnement il serait possible d’aboutir à une autre conclusion que celle du Tribunal. Il en découle que ce grief n’est pas conforme aux exigences de motivation, de d’autant plus que les appelantes sont représentées par un avocat, et est par conséquent irrecevable.

L’appel n’est donc pas recevable.

4.2 Quand bien même ce grief serait recevable, il devrait être rejeté.

4.2.1 Le bail à ferme est un contrat par lequel le bailleur s'oblige à céder au fermier, moyennant un fermage, l'usage d'un bien ou d'un droit productif et à lui en laisser percevoir les fruits ou les produits (art. 275 CO). La mise en « gérance libre », c'est-à-dire la cession, par le biais d'un sous-contrat, de l'usage d'un établissement public prêt à être exploité avec son matériel, sa clientèle et son réseau de fournisseurs est un contrat de bail à ferme (ATF 128 III 419 consid. 2.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_98/2023 du 12 mai 2023 consid. 1.1; ACJC/1424/2020 du 12.10.2020 consid. 2.1.1; Lachat, Le bail des cafés et des restaurants, in 18e séminaire sur le droit du bail, Neuchâtel 2014, p. 227, ch. 15).

La sous-location est un contrat par lequel le locataire cède, moyennant le paiement d'un loyer, l'usage de la chose louée à un tiers (le sous-locataire) avec le consentement du bailleur (art. 262 al. 1 CO). La sous-location est un contrat de bail à part entière, distinct du bail principal, soumis en principe aux règles des art. 253 ss CO (ATF 139 III 353 consid. 2.1.2; ACJC/1424/2020 du 12.10.2020 consid. 2.1.1).

La cession de l'usage de la chose louée, respectivement la cession de l'usage et de la jouissance de l'objet affermé, ainsi que le droit d'en jouir et partant de l'exploiter et d'en retirer les fruits naturels et civils, constituent un élément essentiel de la sous-location, respectivement du bail à ferme (ACJC/1424/2020 du 12.10.2020 consid. 2.1.1 ; CPra Bail, 2ème éd. 2017 – Bohnet/Dietschy-Martenet, art. 253 CO n. 59 et CPra Bail, 2ème éd. 2017 - Carron, art. 275 CO n. 31).

En particulier, l'art 257 CO précise que le loyer est la rémunération due par le locataire au bailleur pour la cession de l'usage de la chose. Cette disposition, qui complète l'art. 253 CO, rappelle la nature synallagmatique du contrat de bail et s'applique également aux baux de sous-location (ACJC/1424/2020 du 12.10.2020 consid. 2.1.1 ; CPra Bail, 2ème éd. 2017 - Bieri, art. 257 n. 1).

4.2.2 Selon la règle pacta sunt servanda, les termes du contrat doivent en principe être respectés. Selon la clausula rebus sic stantibus, une adaptation du contrat peut entrer en ligne de compte lorsque les circonstances dans lesquelles il a été conclu se sont modifiées à tel point que le maintien du contrat ne saurait être exigé. Il peut s'agir de rapports contractuels de longue durée au cours desquels les circonstances de fait ou les conditions juridiques ont subi des transformations profondes (ACJC/501/2024 du 16 avril 2024 consid. 3.1.4; Winiger, in Commentaire romand du code des obligations I, n. 193 ad art. 18 CO).

Le principe de la clausula rebus sic stantibus veut que le juge puisse intervenir, à la demande du débiteur, lorsque le changement des circonstances rompt à tel point l’équilibre entre prestation et contre-prestation qu’en ne renonçant pas à ses prétentions contractuelles, le créancier exploite usurairement le déséquilibre créé et abuse manifestement de son droit (ATF 128 III 428; 107 II 343,
JdT 1982 II 272 consid. 2; 62 II 42 consid. 2). 

La prestation reste possible, mais devient absolument disproportionnée à la contre-prestation, en raison d’un changement juridique ou factuel des circonstances (ACJC/501/2024 du 16 avril 2024 consid. 3.1.4 ; Bohnet, Bail à loyer pour locaux commerciaux et Ordonnance 2 COVID-19, p. 17 et les références citées). 

Selon la jurisprudence et la doctrine, une intervention du juge dans un contrat doit rester exceptionnelle : « Une intervention du juge dans le contrat entre en ligne de compte seulement exceptionnellement, à savoir, si, par des circonstances postérieures et imprévisibles, il s'est produit une disproportion si évidente entre la prestation et la contre-prestation, que l'insistance d'une partie sur sa prétention paraît abusive » (ATF 101 II 17 consid. 1b; ACJC/501/2024 du 16.04.2024 consid. 3.1.4; Winiger, op. cit., n. 194 ad art. 18).

4.2.3 En l’espèce, les parties ont conclu un bail à ferme, impliquant la mise à disposition des locaux et de l’entreprise, en échange du paiement du loyer des locaux et d’une redevance liée à l’exploitation de l’entreprise.

La question d’une application différente de la clausula rebus sic stantibus au contrat de bail à loyer et de bail à ferme et à un traitement de la redevance du loyer différent strictement lié aux locaux, ainsi que l’évoquent les appelantes, n’a toutefois pas à être examinée en l’occurrence, dans la mesure où les conditions nécessaires ne sont pas réunies. En effet, s’il n’est pas contesté que leur établissement a été contraint de fermer à certaines périodes durant la pandémie de COVID-19, les appelantes n’ont produit aucun document comptable permettant d’évaluer l’ampleur des pertes évoquées. Faute d’éléments factuels dans le cas d’espèce, il est par conséquent impossible d’évaluer si le contrat présentait un déséquilibre et une disproportion entre les prestations si importants qu’une adaptation du contrat s’avérait nécessaire. Les appelantes n’ont pas non plus exposé en quoi une telle disproportion était existante, ni argumenté en ce sens dans leur appel. Il en découle que l’application de la clausula rebus sic stantibus ne pourrait quoi qu’il en soit être admise en l’espèce, indépendamment d’une distinction entre bail à loyer et bail à ferme, respectivement entre loyer et redevance de gérance.

5. Dans sa réponse, l’intimé conclut au paiement de la somme de 4'950 fr. en sus de la confirmation du jugement attaqué.

Toutefois, l’intimé n’expose pas en quoi le Tribunal aurait erré en considérant que la place de stationnement ne faisait pas l’objet d’un contrat de bail. Il se contente de substituer son appréciation des faits à ceux qui ont été établis par le Tribunal, sans motivation ni fondement. Par conséquent, cette conclusion nouvelle est irrecevable.

6. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

Déclare irrecevable l'appel interjeté le 1er mars 2024 par A______ et B______ contre le jugement JTBL/864/2023 rendu le 15 décembre 2023 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/16351/2020.

Dit que la procédure est gratuite.

 

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente ; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Monsieur Nicolas DAUDIN, Madame Zoé SEILER, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.