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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3112/2024

ATAS/25/2025 du 20.01.2025 ( CHOMAG ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3112/2024 ATAS/25/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 20 janvier 2025

Chambre 6

 

En la cause

 

A______

recourante

 

contre

 

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI

 

 

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l'assurée), née le ______ 1991, de nationalité espagnole et au bénéfice d'un permis C, a travaillé dans le domaine de la restauration (serveuse, responsable de salle et cheffe de rang) en Espagne de 2011 à 2017, puis à Genève dès 2018.

b. Elle est titulaire d'un diplôme de technicienne en service de restauration espagnol délivré le 24 avril 2012.

c. Selon une lettre du Secrétariat d'état à la formation, à la recherche et à l'innovation (SEFRI) [NDR : l'autorité compétente en matière de reconnaissances des diplômes étrangers] du 29 novembre 2023, la profession apprise par l'assurée ne requiert, légalement, aucun titre précis, et est considérée comme une profession non réglementée. En principe, l'exercice d'une telle profession ne nécessite aucune attestation de niveau ni aucune reconnaissance du diplôme étranger.

d. L'assurée a travaillé en qualité de serveuse au sein du restaurant « B______ » du 1er décembre 2019 au 31 décembre 2022.

e. Par lettre du 28 novembre 2022, l'assurée a démissionné de son poste de serveuse au sein de ce dernier établissement pour le 31 décembre 2022 au motif que les horaires de travail du secteur de la restauration n'étaient pas compatibles avec les études qu'elle souhaitait entreprendre afin de changer d'orientation professionnelle.

B. a. Le 28 novembre 2022 également, l'assurée s'est inscrite à l'office régional de placement (ci-après : l'ORP) pour une recherche d'activité à plein temps. Un délai-cadre d'indemnisation a été ouvert en sa faveur du 2 janvier 2023 au 1er janvier 2025.

b. Selon un « contrat d'objectifs de recherche d'emploi » établi par l'ORP le 6 décembre 2022, l'activité recherchée était celle d'auxiliaire de service (restauration) et le nombre minium de recherches d'emploi était fixé à dix par mois.

c. Selon le procès-verbal d'entretien du 6 décembre 2022, le conseiller ORP a indiqué que l'absence de diplôme reconnu en Suisse constituait un frein au retour à l'emploi.

d. Du 20 février au 29 mars 2023, l'assurée a suivi deux formations de garde d'enfants à domicile dispensées par la Croix-Rouge genevoise.

e. Le 9 juin 2023, l'ORP a assigné à l'assurée une mesure de marché du travail (ci-après MMT) du 14 août 2023 au 12 janvier 2024, à savoir un « stage de requalification – programme d'emploi temporaire fédéral », dans le secteur de la petite enfance, afin qu'elle puisse acquérir une nouvelle expérience professionnelle et ainsi augmenter ses compétences dans le domaine de l'enfance.

f. Le 27 juillet 2023, l'ORP a établi un nouveau « contrat d'objectifs de recherche d'emploi » à teneur duquel les activités recherchées par l'assurée étaient celle d'auxiliaire de service (restauration) et d'assistante socio-éducative et accompagnement des enfants. Le nombre minium de recherches d'emploi était toujours fixé à dix par mois.

g. Le 28 septembre 2023, l'ORP a assigné l'assurée à candidater à un poste d'aide de crèche.

h. Par décision du 20 décembre 2023, l'ORP a assigné l'assurée à participer à une évaluation scolaire afin d'évaluer ses acquis scolaires en mathématiques et en français ainsi que ses aptitudes d'apprentissage (raisonnement, logique, concentration, etc.) au regard du programme de formation d'assistante socio-éducative.

i. Selon un rapport du 23 janvier 2024, établi par Madame C______, psychologue conseillère en orientation, les résultats de l'assurée aux tests de mathématiques et de français étaient très supérieurs à la moyenne attendue en fin de scolarité obligatoire. L'assurée possédait assurément les compétences et les aptitudes nécessaires pour entreprendre la formation visée.

j. Au moyen du dépôt d'un formulaire daté du 3 avril 2024, l'assurée a demandé à l'OCE la prise en charge d'une formation d'assistante socio-éducative et accompagnement d'enfant du 12 juillet 2024 au 16 juillet 2027 par le biais d'une allocation de formation (ci-après : AFO) afin qu'elle puisse « obtenir son CFC et couvrir ses charges fixes (loyer et factures) ».

k. Selon le contrat d'apprentissage du 3 avril 2024, la formation envisagée était le Certificat fédéral de capacité (CFC) d'assistante socio-éducative, filière duale en entreprise. Le salaire brut mensuel convenu était de CHF 800.- la première année, de CHF 1'010.- la deuxième année et de CHF 1'588.- la troisième année.

l. Par décision du 22 juillet 2024, l'ORP a rejeté la demande d'AFO de l'assurée au motif qu'elle était déjà titulaire d'une formation professionnelle, à savoir un diplôme de technicienne en services de restauration acquis en Espagne.

m. Le 7 août 2024, l'assurée a formé opposition à la décision précitée, en faisant valoir en substance que, dans le cadre des différents emplois occupés dans le domaine de la restauration, elle avait été confrontée à des environnements de travail difficiles (harcèlement, reproches et menaces) l'ayant amenée à développer des angoisses généralisées et une incapacité à travailler dans ce domaine d'activité. Elle avait tout de même continué à travailler ponctuellement dans la restauration en « tenant le coup », espérant que sa demande de reconversion professionnelle soit acceptée. Une reconversion professionnelle en qualité d'assistante socio-éducative était ainsi devenue une nécessité tant du point de vue psychologique que professionnel. Une nouvelle orientation professionnelle était par ailleurs cruciale afin d'assurer sa réinsertion durable dans le monde du travail, tout en tenant compte de son état de santé. Elle a joint à son opposition un certificat médical du 29 juillet 2024 établi par la docteure D______, spécialiste FMH en médecine générale, indiquant qu'elle ne pouvait plus travailler dans la restauration pour des raisons médicales.

n. Par décision du 23 août 2024, l'OCE a rejeté l'opposition formée le 7 août 2024, motif pris que l'assurée était au bénéfice d'un diplôme de technicienne en services de restauration délivré en Espagne en 2012 et qu'elle avait effectué régulièrement, depuis son inscription au chômage, des gains intermédiaires en qualité de serveuse, démontrant ainsi qu'elle n'éprouvait pas de grandes difficultés à trouver un emploi correspondant à sa formation. Par ailleurs, le certificat médical produit à l'appui de l'opposition était en contradiction totale avec les recherches d'emploi effectuées par l'assurée et ses activités en gain intermédiaire, de sorte qu'il ne pouvait justifier la demande d'AFO. Enfin, si l'on pouvait comprendre que l'assurée désirait changer de secteur d'activité, il n'appartenait toutefois pas à l'assurance-chômage de prendre en charge cette nouvelle formation.

C. a. Par acte daté du 23 septembre 2024 mais déposé à la Poste le 20 septembre 2024, l'assurée, non représentée, a interjeté recours contre la décision précitée devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice. Elle a conclu, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à ce qu'il soit fait droit à sa demande d'allocation de formation. En substance, elle a expliqué avoir été contrainte de démissionner de son dernier emploi de serveuse en raison d'un environnement de travail extrêmement difficile, à savoir le harcèlement permanent du chef de cuisine qui n'avait cessé de la menacer et de lui faire des reproches. Elle avait expliqué à son conseiller ORP son incapacité de travailler dans le domaine de la restauration et son envie de reconversion professionnelle dans le secteur de la petite enfance en qualité d'assistante socio-éducative. Si, à compter du mois de juillet 2023, le contrat de recherche d'emploi avait été modifié en incluant la profession d'aide de crèche, les recherches d'emploi dans le domaine de la restauration devaient rester prédominantes, de sorte qu'elle avait continué à postuler à des offres d'emploi dans ce secteur malgré son incapacité de travail dans le domaine de la restauration. Par ailleurs, si elle avait effectivement effectué des missions dans le domaine de la restauration du 28 mars 2023 au 20 avril 2024, il ne s'agissait toutefois que de 14 demi-journées sur une période de 14 mois. À l'appui de son recours, elle a joint, outre des documents déjà produits dans le cadre de la procédure administrative, les décomptes de salaires établis par la société E______ relatifs aux missions effectuées en 2023 et 2024 en qualité de serveuse. Elle a également produit un rapport médical de la Dre D______ du 27 août 2024 à teneur duquel l'intéressée présentait une contre-indication médicale au travail en restauration et que, suite à plusieurs épisodes de harcèlement dans ce contexte professionnel, la recourante avait développé un trouble anxieux, de sorte qu'une réexposition à ce milieu pouvait aggraver ce trouble psychologique.

b. Par réponse du 15 octobre 2024, l'intimé a conclu au rejet du recours en faisant valoir que celui-ci n'apportait aucun élément nouveau permettant de revoir la décision attaquée.

c. Le 17 octobre 2024, la chambre de céans a transmis cette écriture à la recourante pour d'éventuelles observations complémentaires.

 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56ss LPGA ; art. 62ss de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

2.             Le litige porte sur le point de savoir si la recourante a droit à des allocations de formation pendant la durée de son apprentissage d'assistante socio-éducative.

3.              

3.1 Selon l'art. 1a al. 2 LACI, la loi sur l'assurance-chômage obligatoire vise à prévenir le chômage imminent, à combattre le chômage existant et à favoriser l'intégration rapide et durable des assurés dans le marché du travail. Tel est le but des mesures relatives au marché du travail régies par les art. 59ss LACI (ATAS/660/2016 du 23 août 2016 consid. 5).

3.2 Selon l'art. 59 LACI, l’assurance alloue des prestations financières au titre des mesures relatives au marché du travail en faveur des assurés et des personnes menacées de chômage (al. 1). Ces mesures comprennent des mesures de formation (section 2), des mesures d’emploi (section 3) et des mesures spécifiques (section 4) (al. 1bis). Les mesures relatives au marché du travail visent à favoriser l’intégration professionnelle des assurés dont le placement est difficile pour des raisons inhérentes au marché de l’emploi. Ces mesures ont notamment pour but : a. d’améliorer l’aptitude au placement des assurés de manière à permettre leur réinsertion rapide et durable ; b. de promouvoir les qualifications professionnelles des assurés en fonction des besoins du marché du travail ; c. de diminuer le risque de chômage de longue durée ; d. de permettre aux assurés d’acquérir une expérience professionnelle (al. 2).

Ces buts constituent aussi en quelque sorte des conditions préalables d'octroi des mesures de marché du travail. Pour avoir droit à une mesure, l'assuré devra en outre remplir les conditions générales et spécifiques mentionnées dans la clause générale à l'art. 59 al. 3 LACI. Selon cette disposition, pour pouvoir participer aux mesures de marché du travail, l'assuré doit remplir toutes les conditions du droit à l'indemnité de chômage mentionnées à l'art. 8 al. 1 LACI, pour autant que la loi n'en dispose pas autrement (let. a), et remplir les conditions spécifiques de la mesure sollicitée (let. b) (arrêt du Tribunal fédéral 8C_392/2016 du 28 novembre 2016 consid. 3.1 et les références).

3.3 Selon l'art. 66a al. 1 LACI, l’assurance peut octroyer des allocations pour une formation d’une durée maximale de trois ans à l’assuré qui est âgé de 30 ans au moins (let. b) et n’a pas achevé de formation professionnelle reconnue en Suisse ou éprouve de grandes difficultés à trouver un emploi correspondant à sa formation (let. c). Dans des cas fondés, l’organe de compensation peut autoriser une dérogation à l’al. 1 concernant la durée de formation et la limite d’âge (art. 66a al. 2 LACI). Ne peuvent bénéficier des allocations de formation les assurés qui possèdent un diplôme d’une haute école ou d’une école supérieure spécialisée reconnu en Suisse, ou ont suivi une formation de trois ans au moins, sans diplôme, dans l’un de ces établissements (art. 66a al. 3 let. a LACI) ou qui ont réussi un examen professionnel fédéral ou un examen professionnel fédéral supérieur (art. 66a al. 3 let. b LACI). L’allocation n’est octroyée que si l’assuré a conclu avec l’employeur un contrat de formation qui prévoit un programme sanctionné par un certificat (art. 66a al. 4 LACI).

Les AFO permettent aux chômeurs âgés en principe de 30 ans au moins d'acquérir une formation professionnelle de base de type apprentissage. Elles consistent en une subvention salariale versée durant la formation, pour permettre aux chômeurs qui souhaitent se former de bénéficier d'un revenu comparable à celui qu'ils réaliseraient sans qualifications sur le marché du travail. Le but de cette mesure est de prévenir le chômage de longue durée qui frappe souvent les chômeurs ayant des lacunes dans la formation professionnelle de base. En permettant aux chômeurs de rattraper une formation, les AFO contribuent à améliorer les conditions-cadres de l'économie de notre pays qui emploie prioritairement des personnes qualifiées. Bien qu'onéreuse (car se déroulant sur une longue période), cette mesure permet sans doute à l'assurance-chômage de réaliser des économies financières à long terme en contribuant à prévenir des périodes de chômage répétées ou de longue durée. La limite d'âge fixée en principe à 30 ans est justifiée par le fait qu'une formation professionnelle implique un sacrifice financier qui est difficilement supportable par des personnes qui ont plus de 30 ans et qui ont généralement des obligations financières que n'ont pas les jeunes adultes, souvent encore pris en charge par leurs parents (RUBIN Boris, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014 art. 66a-66c n° 1).

Avec les AFO, la loi fédérale du 23 juin 1995 a introduit des mesures nouvelles, destinées à prévenir et combattre le chômage. Jusqu'alors, tant la formation professionnelle que le perfectionnement professionnel en général n'incombaient pas à l'assurance-chômage (ATF 112 V 398 consid. 1a). Depuis lors et selon l'intention du législateur, il convient de permettre aux chômeurs de plus de 30 ans de rattraper une formation. Des lacunes dans la qualification professionnelle et surtout l'absence d'une formation professionnelle de base constituent en effet des facteurs prépondérants de risque de chômage, aussi bien en ce qui concerne la survenance que la durée. Or, qu'il s'agisse de la politique de l'emploi ou de la politique financière, il a paru préférable de soutenir des mesures de formation visant à diminuer ces risques plutôt que de payer des indemnités de chômage. Ces allocations de formation, versées durant une période maximale de trois ans, doivent permettre le rattrapage d'une formation de base ou l'adaptation de cette dernière aux conditions du marché du travail (voir aussi SVR 1999 ALV n° 24 p. 57, consid. 1). Les mesures relatives au marché du travail (MMT) visent toutes à favoriser l'intégration professionnelle des assurés dont le placement est difficile pour des raisons inhérentes au marché de l'emploi. Dès lors qu'elles doivent améliorer l'employabilité et correspondre à une indication du marché du travail, les AFO ne sauraient être attribuées à des chômeurs qui n'en auraient pas besoin, c'est-à-dire à ceux qui pourraient facilement être engagés compte tenu du marché du travail local et des compétences professionnelles dans le cas concret (arrêt du Tribunal fédéral 8C_392/2016 précité consid. 3.3 et la référence).

Dans un arrêt du 19 janvier 2001, concernant le cas d'une assurée au bénéfice d'un diplôme universitaire non reconnu en Suisse, ayant exercé le métier de vendeuse en Suisse, inscrite au chômage depuis le 1er novembre 1997 et ayant déposé une demande d'allocation de formation le 15 juin 1998 pour pouvoir entreprendre un apprentissage d'employée de commerce, le Tribunal fédéral a confirmé que l'intéressée n'appartenait pas au cercle des assurés visés par l'art. 66a al. 3 LACI dès lors qu'elle ne pouvait se prévaloir d'un diplôme d'une haute école reconnu sur le marché du travail suisse (arrêt du Tribunal fédéral C 22/00 du 19 janvier 2001 consid. 1b).

Par arrêt du 26 novembre 2008, concernant une assurée titulaire d'un CFC d'employée de commerce délivré en 1977, mais ayant ensuite travaillé comme aide-soignante pendant trois ans, veilleuse dans un service psychiatrique pendant 17 ans et réceptionniste pendant quatre et demi avant de s'inscrire au chômage, le Tribunal fédéral a retenu que le fait que l'assurée soit restée au chômage durant plus d'une d'année en dépit des nombreuses postulations qu'elle avait effectuées auprès d'employeurs correspondant à son profil (cabinets de médecins et hôpitaux) permettait d'en déduire qu'il existait une situation défavorable du marché dans son domaine d'activité antérieur rendant plus difficile sa réinsertion professionnelle (arrêt du Tribunal fédéral 8C_301/2008 du 26 novembre 2008 consid. 5).

Selon un arrêt vaudois du 8 octobre 2020, l'allocation de formation en vue de l'obtention d'un CFC d'employé de commerce avait été refusée par le service de l'emploi à un assuré né en 1991, de nationalité étrangère, au bénéfice d’un permis B, ayant obtenu un diplôme de maturité professionnelle étranger et ayant travaillé comme aide-carreleur, chauffeur-livreur et aide-peintre, au motif que la condition du placement difficile n’était pas remplie, dans la mesure il avait pu exercer une activité professionnelle sans CFC depuis son arrivée en Suisse puis du gain intermédiaire. Sur recours, la cour des assurances sociales du Tribunal cantonal a annulé la décision litigieuse au motif que le recourant peinait à trouver un emploi tant dans le domaine de sa formation de base que comme aide-peintre, carreleur ou chauffeur-livreur. En effet, depuis son inscription au chômage en avril 2018, il avait seulement bénéficié d’un stage d’essai en tant qu’aide-peintre d'une durée de dix jours, lequel avait été prolongé sous forme de contrat de mission de deux mois, mais n’a pas été en mesure de retrouver un emploi fixe, malgré les recherches d’emploi effectuées. Il ne faisait aucun doute que le fait de n’avoir jamais exercé dans son domaine de compétences depuis l’obtention de son diplôme à l'étranger en 2011 et de n’avoir bénéficié que d’une relativement courte expérience en tant qu’aide-peintre rendait son placement difficile. Par ailleurs, rien au dossier ne venait contredire le fait que le recourant n’avait pas retrouvé un travail pour une autre raison que son manque de formation, de sorte qu’on pouvait bel et bien parler de placement difficile (arrêt de la cour des assurances sociales du Tribunal cantonal vaudois ACH 129/19 - 121/2020 du 8 octobre 2020 consid. 4).

3.4 À teneur du bulletin LACI MMT du Secrétariat d’Etat à l’économie (ci-après : SECO ; dans sa version du 1er août 2024), les formations, formations continues et reconversions de demandeurs d’emploi de l’assurance-chômage doivent toujours être opportunes pour le marché du travail (voir ATF 111 V 276 ; 128 V 198). En outre, il convient de tenir compte du principe de proportionnalité (voir ATF 119 V 254). Dans la mesure où elles sont opportunes pour le marché du travail et respectent le principe de proportionnalité, les formations continues, reconversions et formation de demandeurs d’emploi de l’assurance-chômage sont activement encouragées (Bulletin LACI MMT, ch. A4a). Les formations qui correspondent à une formation formelle complète reconnue d’après le système éducatif suisse ne sont accessibles que dans le cadre d’AFO (Bulletin LACI MMT, ch. A4b).

3.4.1 Le critère déterminant pour l’octroi d’AFO est l’intérêt de l’assuré à obtenir une formation professionnelle reconnue soit par un CFC, soit sous une forme équivalente placée sous la responsabilité des cantons (Bulletin LACI MMT, ch. F2).

Selon le ch. F3 du Bulletin LACI MMT, peuvent bénéficier des allocations de formation les assurés qui, cumulativement, sont au chômage et justifient, durant le délai-cadre de cotisation, d’une période de cotisation de douze mois au moins ou qui sont libérés des conditions relatives à la période de cotisations (art. 59 al. 3 LACI), sont âgés de 30 ans révolus au moment où est versée la première AFO et n’ont pas achevé de formation professionnelle ou éprouvent de grandes difficultés à trouver un emploi correspondant à leur formation (art. 66a al. 1 let. c LACI).

L’assuré n’a pas de formation professionnelle lorsqu’il n’est pas titulaire d’un document officiel attestant de sa formation ou de ses connaissances professionnelles (CFC, AFP, diplôme, etc.). Les personnes qui ne sont pas titulaires d’une formation professionnelle reconnue en Suisse peuvent également avoir droit aux AFO selon l’art. 66a LACI (Bulletin LACI MMT, ch. F4).

L’assuré éprouve de grandes difficultés à trouver un emploi correspondant à sa formation lorsqu’il apparaît que, compte tenu de la situation du marché du travail, aucun emploi convenable correspondant à sa formation ne peut lui être assigné, et que l’assuré a en vain recherché un emploi dans sa profession d’origine (Bulletin LACI MMT, ch. F5).

Les AFO ne peuvent pas être allouées dans les deux cas suivants (art. 66a al. 3 LACI) : lorsque l’assuré possède un diplôme d’une haute école ou d’une haute école spécialisée reconnu en Suisse (exemple : ingénieur HES, diplômé ESCEA, titulaire d’un diplôme universitaire, titulaire d’une formation supérieure qui relève de la compétence cantonale [par ex : professions pédagogiques], etc.) ou lorsque l’assuré a déjà suivi une formation de 3 ans au moins auprès de l’un de ces établissements, mais n’a pas obtenu de diplôme (Bulletin LACI MMT, ch. F13).

Les diplômes obtenus à l’étranger, ainsi que les formations de trois ans au moins suivies à l’étranger, tombent également sous le coup de l’art. 66a al. 3 LACI, pour autant qu’un niveau approprié correspondant à un diplôme ou une formation suivie en Suisse, puisse être établi par équivalence (Bulletin LACI MMT, ch. F16).

3.4.2 Plusieurs conditions matérielles, mentionnées à l’art. 66a et 66c LACI, et à l’art.90a al. 1 OACI, doivent être remplies pour que les AFO puissent être octroyées. Parmi elles, l’autorité compétente doit s’assurer, avant de prononcer une décision positive, que la formation correspond aux aptitudes, intérêts et compétences de l’assuré. Lorsqu’il y a un doute à ce propos, un examen complémentaire par le service d’orientation professionnelle sera requis (Bulletin LACI MMT, ch. F18 let. e).

Pour les assurés bénéficiant d’AFO, le délai-cadre est prolongé jusqu’au terme de la formation pour laquelle l’allocation a été octroyée (art. 66c, al. 4, LACI). Cette prolongation prend naissance dès le moment où l’assuré commence sa formation (Bulletin LACI MMT, ch. F39).

3.4.3 Les circulaires du SECO ont force obligatoire pour les organes de l’assurance-chômage mais pas pour le juge, qui les applique néanmoins pour autant qu’elles puissent être interprétées de manière conforme au droit (ATF 129 V 68 consid. 1.1.1 par analogie). Il s’en écarte toutefois lorsqu’elles ne sont pas compatibles avec les dispositions légales applicables (ATF 125 V 377 consid. 1c ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_226/2007 du 16 mai 2008 consid. 6.2).

3.5 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités revêtent une importance significative ou entrent raisonnablement en considération (ATF 144 V 427 consid. 3.2 et la référence ; 139 V 176 consid. 5.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

4.             En l'espèce, l'intimé a rejeté la demande d'allocation de formation aux motifs que la recourante était au bénéfice d'un diplôme de technicienne en services de restauration obtenu en Espagne en 2012 et que la condition du placement difficile n'était pas remplie dès lors qu'elle avait réalisé des gains intermédiaires en travaillant régulièrement comme serveuse depuis son inscription au chômage.

4.1 Il convient d'examiner ci-après les conditions d'octroi de l'allocation de formation prévues par l'art. 66a LACI.

4.1.1 En l'occurrence, la recourante était âgée de 32 ans au moment de la décision litigieuse, de sorte qu’elle remplit la condition de l'âge minimum requis pour l’octroi d’une allocation de formation au sens de l'art. 66a al. 1 let. b LACI.

4.1.2 Pour rappel, la jurisprudence du Tribunal fédéral prévoit que les MMT, dont font partie les AFO, visent à favoriser l'intégration professionnelle des assurés dont le placement est difficile pour des raisons inhérentes au marché de l'emploi (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_392/2016 précité consid. 3.3 et la référence).

Il s'agit donc d'examiner, dans le cas concret, si la recourante a effectivement besoin de l'AFO pour améliorer son employabilité ou si elle peut facilement être engagée compte tenu du marché du travail local et de ses compétences professionnelles.

Il ressort des pièces du dossier que la recourante s'est inscrite au chômage en novembre 2022 et a été sans emploi dès le 1er janvier 2023. Or, entre janvier 2023 et juin 2024, la recourante a postulé, chaque mois, à une dizaine de postes relevant du domaine de la restauration (serveuse, commis de salle, cheffe de rang, cheffe barmaid/mixologue, assistante du maître d'hôtel, entre autres), mais n’a pas été en mesure de retrouver un emploi fixe dans l'intervalle (cf. formulaires mensuels de recherche d'emploi complétés par la recourante). En outre, à teneur des procès-verbaux d'entretien, il est constaté que le conseiller ORP a assigné la recourante à un seul emploi durant la période de chômage susvisée, à savoir un poste d'aide de crèche en date du 27 septembre 2023 (cf. pièces 36 et 65 – intimé). La chambre de céans relève en outre qu'aucune offre d'emploi relevant du domaine de la restauration n'a été assignée ou même proposée à la recourante durant la période de chômage susmentionnée, la mention « pas de poste » ayant été indiquée par le conseiller ORP en face de la case « propositions d'emploi – assignations en cours » des procès-verbaux d'entretien, à l'exception de l'assignation au poste d'aide de crèche précité. Quant au gain intermédiaire réalisé auprès de la société E______, les décomptes de salaires des années 2023 et 2024 établies par cet employeur indiquent que la recourante a perçu un salaire brut de CHF 495.35 pour une activité déployée les 1, 5, 8 et 26 avril 2023, de CHF 641.85 pour un travail effectué les 13 et 25 mai 2023, de CHF 196.40 versé en août 2023 (travail des 17 juin, 29 juillet et 12 août 2023), de CHF 96.15 pour une activité déployée le 27 janvier 2024, de CHF 82.40 pour des heures travaillées le 4 février 2024 et de CHF 164.80 pour une activité déployée les 6 et 20 avril 2024. Ces montants de salaire brut tendent ainsi à démontrer, au degré de la vraisemblance prépondérante, que la recourante n'a travaillé que quelques heures sur un total de treize jours. L'activité de serveuse ainsi déployée par la recourante sur une période de chômage de 16.5 mois (du 1er février 2023 au 12 août 2024) apparait comme particulièrement courte et ne permet pas d'écarter une difficulté de placement sur le marché du travail malgré les nombreuses recherches d’emploi effectuées par l'intéressée dans le domaine de la restauration (cf. pièce 13 – intimé [contrat cadre de travail conclu avec la société E______ le 1er février 2023] ; pièce 60 – intimé [courrier de l'OCE d'annulation du dossier du 22 août 2024] ; extraits des comptes de salaires 2023 et 2024 établis par E______ et produits par la recourante à l'appui de son recours). À ce propos, le conseiller ORP a expressément indiqué que l'absence de diplôme reconnu en Suisse constituait un frein pour le retour à l'emploi (cf. procès-verbal d'entretien du 6 décembre 2022).

Au vu de ces éléments et conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, le placement de la recourante doit être qualifié de difficile pour des raisons inhérentes au marché de l'emploi (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_301/2008 du 26 novembre 2008 consid. 5).

Par conséquent, ce motif ne permettait pas de justifier le refus d’allocations de formation prononcé par l'intimé.

4.1.3 Outre le fait que le placement de la recourante était difficile, force est de constater que l'intéressée ne peut se prévaloir d'un diplôme d'une haute école reconnu sur le marché du travail suisse au sens de l'art. 66a al. 1 let. c LACI. En effet, selon la lettre du SEFRI du 29 novembre 2023, sa profession de technicienne en restauration ne requiert aucun titre précis et est considérée comme une profession non réglementée dont l'exercice ne nécessite aucune attestation de niveau ni aucune reconnaissance de diplôme étranger. Sa situation ne correspond par ailleurs à aucun des motifs d'exclusion du cercle des bénéficiaires d'une AFO prévus par l'art. 66a al. 3 LACI.

S'agissant de l'absence de formation professionnelle, la chambre de céans relèvera en particulier que les AFO ont été introduites dans le but de prévenir le chômage de longue durée qui frappe souvent les chômeurs de plus de 30 ans ayant des lacunes dans la formation professionnelle de base ainsi que de permettre à l'assurance-chômage de réaliser des économies financières à long terme en contribuant à prévenir des périodes de chômage répétées ou de longue durée (cf. RUBIN Boris, op. cit., art. 66a-66c, n. 1). Or, la situation de la recourante correspond manifestement au cas visé par la loi dès lors qu'elle n'est titulaire d'aucune formation de base reconnue en Suisse et que cette absence de formation constitue un des facteurs prépondérants de risque de chômage, aussi bien en ce qui concerne la survenance que la durée (cf. Message à l'appui de la deuxième révision partielle de l'assurance-chômage du 29 novembre 1993, FF 1994 I 340; p. 363). L'octroi de l'AFO demandée par la recourante apparaît ainsi conforme aux buts visés par la loi.

4.1.4 Par ailleurs, la chambre de céans retiendra que la dernière condition posée par l'art. 66a al. 4 LACI est manifestement remplie : la recourante a en effet conclu un contrat d'apprentissage d'une durée de trois ans suite à un stage de cinq mois dans le secteur de la petite enfance, alors même qu'elle n'avait aucune expérience professionnelle dans ce domaine et qu'au terme de l'apprentissage susvisé, elle se verra délivrer un CFC d'assistante socio-éducative qui améliorera manifestement son employabilité et qui correspond à une indication du marché du travail. Il est en outre relevé que cette formation correspond aux aptitudes, intérêts et compétences de la recourante (Bulletin LACI MMT, ch. F18 let. e) dès lors qu'elle a réussi avec succès l'évaluation scolaire effectuée en vue de son intégration au programme de formation d'assistante socio-éducative, la psychologue en charge de cette évaluation ayant attesté du fait que l'intéressée possédait assurément les compétences et les aptitudes nécessaires pour entreprendre la formation visée (cf. rapport de Mme F______ du 23 janvier 2024).

4.1.5 Au vu des circonstances particulières du cas d'espèce décrites ci-dessus, c'est à tort que l'intimé a refusé d'octroyer l'allocation pour formation demandée par la recourante.

4.2 Au surplus, la chambre de céans relève que l'appréciation médicale de la Dre D______ du 27 août 2024, à teneur de laquelle l'intéressée présentait une contre-indication médicale au travail en restauration (un trouble anxieux pouvant être aggravé par une réexposition à ce milieu professionnel), n'apparaît pas pertinente dans l'analyse des conditions de l'octroi de l'AFO demandée dès lors que, selon la jurisprudence fédérale, l'assurance-chômage ne doit pas verser de prestations lorsque le placement de l'assuré se trouve être aggravé non par des motifs propres au marché du travail mais par une atteinte à la santé (DTA 1998 p. 212 consid. 4 p. 217 ; RUBIN Boris, op. cit., art. 60, n. 15).

4.3 Compte tenu de ce qui précède, le recours est admis et la décision sur opposition litigieuse annulée. Il sera dit que la recourante a droit à l’AFO pour sa formation d’assistante socio-éducative.

5.             Il n’y a pas lieu de percevoir de frais judiciaires, la procédure étant gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario), ni d’allouer de dépens, la recourante ayant agi sans le concours d’un mandataire professionnel (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Annule la décision sur opposition de l'intimé du 23 août 2024.

4.        Dit que la recourante a droit à l’allocation de formation, au sens des considérants.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le