Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/1035/2024 du 18.12.2024 ( LAA ) , PARTIELMNT ADMIS
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/2934/2022 ATAS/1035/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 18 décembre 2024 Chambre 4 |
En la cause
A______ représenté par Me Gaétan DROZ, avocat
| recourant |
contre
SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS représentée par Me Didier ELSIG, avocat
|
intimée |
A. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant) est né le ______ 1970, originaire du Portugal, arrivé en Suisse en 1998, divorcé et père de deux enfants, nés en 1992 et 1995.
B. a. Le 15 février 2018 alors qu’il procédait à un déménagement avec un monte-meubles, il est tombé du 3ème étage. Il était alors inscrit au chômage et travaillait en mission temporaire de quelques jours pour B______ (ci-après : l’employeuse).
b. Il a été hospitalisé aux Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : les HUG) du 15 au 18 février 2018, en raison d’un traumatisme crânio-cérébral et d’un polytraumatisme et il a été opéré le 18 février 2018.
c. Le 27 février 2018, l’employeuse a signé une attestation de gain intermédiaire indiquant que l’assuré avait travaillé pour elle 18 heures en février 2018, pour un salaire brut de CHF 504.- en application de la convention collective de travail applicable.
d. L’accident a été annoncé à la SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS (ci-après : la SUVA ou l’intimée) le 12 mars 2018 par l’employeuse et le 6 mars 2018, par UNIA Caisse de chômage.
e. Selon un rapport établi le 28 mars 2018, l’assuré a séjourné du 28 février au 28 mars 2018 à l’unité de médecine physique et réadaptation orthopédique des HUG. Au vu du traumatisme (chute de 10 m), il avait été vu par une psychologue, qui avait mis en évidence un trouble de l’adaptation de type anxieux. Certains critères pour un état de stress aigu étaient présents (anxiété, activation neurovégétative, hypervigilance, sursaut durant la nuit, présence d’évitement) au moment de l’évaluation. La perturbation n’entraînait pas une détresse cliniquement significative ni une altération du fonctionnement de l’assuré. Pour des critères temporels, un diagnostic de syndrome de stress post-traumatique (ci‑après : PTSD) ne pouvait pas être posé.
f. Par décision du 10 avril 2018, la SUVA a pris en charge le cas de l’assuré.
g. Le 19 juin 2018, l’assuré a demandé les prestations de l’assurance-invalidité.
h. Dans un rapport du 23 juillet 2018, trois médecins de la consultation ambulatoire de la douleur, dont la docteure C______, spécialiste FMH en anesthésie et en pharmacologie clinique, ont indiqué que l’assuré se décrivait comme casanier, mais qu’il avait des ressources personnelles importantes. Il avait pu s’entourer de personnes le soutenant. Il indiquait encore éprouver du plaisir, notamment lorsqu’il visitait des brocantes. Depuis l’accident, il avait peur du vide et n’avait pas encore réussi à passer dans la rue où il avait eu l’accident. Il appréhendait le futur, surtout sur le plan professionnel, ce qui lui provoquait parfois des ruminations. Son score de dépression sur l’auto-questionnaire de Beck était de 24/63 et était compatible avec un épisode dépressif modéré. Les scores de qualité de vie montraient une diminution globale de tous les aspects de la qualité de vie, avec une diminution très importante des limitations physique et émotionnelle. L’assuré présentait des éléments en faveur d’un PTSD (terreurs nocturnes, peur du lieu d’accident) et des signes de surdosage aux opiacés (somnolence diurne, cauchemars, hallucinations diurnes). Il était proposé un sevrage progressif de la morphine et de poursuivre le traitement EMDR (intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires), au vu des résultats actuels et un suivi à long terme avec un soutien psychologique. La résilience de l’assuré était soulignée par les médecins ainsi que sa capacité à mobiliser ses ressources personnelles et à faire appel à son entourage dans le cadre de son accident.
i. Dans un rapport établi le 2 août 2018, le docteur D______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, a indiqué que l’assuré souffrait d’un PTSD avec les symptômes suivants : flashbacks, troubles du sommeil avec cauchemars, terreurs nocturnes et évitements. Il n’arrivait toujours pas à repasser dans la rue où il avait eu son accident. Il avait des ruminations anxieuses importantes, une anxiété, une anhédonie et une aboulie. Le rapport des HUG évoquait un trouble dépressif moyen, mais le Dr D______, qui n’avait vu l’assuré qu’une fois, ne pouvait se positionner sur ce diagnostic. Le traitement antidouleur de l’assuré était important pour l’instant et il faudrait à l’avenir évaluer si un traitement antidépresseur pourrait aussi diminuer ses douleurs. Il suivait une thérapie de type EMDR avec Madame E______, psychologue, spécialiste en psychothérapie FSP, et ses terreurs nocturnes étaient en phase d’amélioration grâce à celle-ci. Le Dr D______ ajoutait qu’il allait voir l’assuré une fois par mois pour évaluer son état psychique et adapter sa médication si besoin. Sans ces suivis, l’assuré serait très à risque de présenter une péjoration de ses symptômes.
j. Selon une appréciation établie le 29 août 2018 par le docteur F______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie et médecin d’arrondissement de la SUVA, en lien avec la nature de l’accident, sa gravité et la symptomatologie décrite, réactionnelle, et compatible avec un vécu traumatique, il fallait retenir la causalité naturelle dans cette situation.
k. Selon un rapport établi le 7 janvier 2019, l’assuré a séjourné du 12 décembre 2018 au 16 janvier 2019 à la Clinique romande de réadaptation (ci-après : CRR) pour une rééducation intensive et une évaluation globale. Dans ce contexte, le diagnostic de trouble de l’adaptation avec symptômes de type PTSD en voie de résolution avait été posé. L’assuré disait avoir encore des réviviscences du traumatisme et des conduites d’évitement et que sa vie s’était arrêtée le jour de l’accident. Sur le plan psychiatrique, sa colère restait très importante. Il souhaitait retrouver au plus vite une vie normale, mais n’arrivait pas à se projeter dans le futur. Ses stratégies de gestion de la douleur semblaient limitées en dehors des traitements médicamenteux, mais il pouvait compter sur le soutien de sa famille et de son amie. Il n’avait pas été retenu de signes en faveur d’un PTSD. L’assuré avait indiqué avoir évité longtemps les lieux de l’accident et que lorsqu’il y était allé avec son amie, il n’avait finalement eu aucun signe (physique, comportement, flash, etc.). L’assuré avait indiqué qu’une dizaine d’années auparavant il avait été suivi par un psychologue ou un psychiatre suite à un divorce compliqué qui l’avait rendu irritable. Il avait eu du mal à gérer ses émotions et son comportement parfois. Il avait bénéficié pendant quelques mois d’un traitement par EMDR suite à son accident, mais l’avait interrompu en raison d’une amélioration de sa symptomatologie. Il ne prenait pas de psychotropes et ne signalait pas d’antécédents psychiatriques familiaux.
Le docteur U______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, de la CRR, a précisé que depuis l’accident, l’assuré en voulait beaucoup à un collègue qu’il considérait responsable de son accident. Il ne se sentait plus le même, mais aucun trouble psychopathologique patent n’avait été constaté lors de son séjour à la clinique. Les symptômes de type PTSD présentés en début de séjour s’étaient considérablement améliorés sous le traitement par EMDR, même si des modifications de la personnalité et une tendance à l’évitement persistaient encore un peu, raison pour laquelle un trouble de l’adaptation avec symptômes de type PTSD en voie de résolution était retenu. La reprise d’un suivi psychothérapeutique était préconisée.
l. Dans une attestation du 6 juin 2019, E______ a indiqué que l’assuré lui avait été adressé en juin 2018 pour prise en charge concernant des symptômes de stress post-traumatique. Au cours des séances, son état général s’était amélioré et les réactions d’hypervigilance, les cauchemars ainsi que les flashbacks avaient presque totalement disparu. L’assuré avait décidé d’arrêter le suivi à la fin du mois de septembre 2018, estimant que son état s’était suffisamment amélioré. En janvier 2019, devant son humeur fragile, les médecins de la CRR l’avaient encouragé à reprendre un suivi. Certains comportements d’évitement persistaient actuellement et l’assuré présentait une humeur légèrement dépressive, avec une fatigue chronique, des douleurs quotidiennes mais aussi un isolement social à la suite de l’arrêt de son activité professionnelle. Il présentait également de l’anxiété quant à son futur, notamment professionnel et donc financier. Cependant, l’assuré restait positif et son état psychologique général était relativement stable et allait dans le sens d’une amélioration.
m. Le 18 septembre 2019, E______ a indiqué que les réactions d’hypervigilance, les cauchemars ainsi que les flashbacks avaient disparu. L’humeur de l’assuré s’était améliorée malgré la persistance des douleurs physiques importantes au quotidien. Il souffrait toujours d’un isolement social suite à l’arrêt de son activité professionnelle, mais faisait preuve d’une grande adaptation à ce sujet. Concernant son futur, notamment professionnel, les doutes et l’anxiété étaient encore présents. L’assuré se disait motivé à trouver des solutions pour l’avenir. Son état psychologique général s’était clairement amélioré et il avait été décidé d’espacer les séances, en vue d’une fin de prise en charge.
n. Dans un rapport du 20 mai 2020, le docteur H______, chef de clinique du service d’anesthésiologie des HUG, a indiqué avoir suivi l’assuré pour une prise en charge antalgique minimalement invasive de douleurs lombaires mécaniques. Celle-ci avait été effectuée selon plusieurs axes conservateurs. L’assuré décrivait des lombalgies mécaniques, exacerbées à la charge. Ses douleurs étaient en constante amélioration, quoique lente. Depuis plusieurs mois, il avait retrouvé une certaine qualité de sommeil, qui était à nouveau réparateur. En plus de la physiothérapie, à un rythme bihebdomadaire, un traitement par morphine, initialement à haute dose, avait été progressivement diminué jusqu’à se limiter à une prise matinale unique de 10 mg, à laquelle s’ajoutaient des prises ponctuelles d’AINS (anti-inflammatoires non stéroïdiens ; Celebrex 200 mg, en moyenne une à deux fois par jour). L’assuré avait bénéficié aussi d’une psychothérapie qui avait été fort utile pour traiter le PTSD et un travail motivationnel pourrait s’avérer bénéfique.
o. Le 3 juillet 2020, l’assuré a informé la SUVA qu’il avait chuté dans des escaliers en métal le 23 juin 2020 et qu’il avait tout de suite senti un craquement. Ses douleurs s’étaient intensifiées 10 minutes après l’événement. Selon les examens radiologiques, il avait subi une fracture exactement au même endroit que la précédente. Il avait de fortes douleurs. Il avait été opéré le 26 juin 2020 et on lui avait mis une plaque dans le bras. Il avait encore des douleurs, mais moins qu’avant. Il prenait du Dafalgan, trois fois par jour et un anti-inflammatoire deux fois par jour.
p. Le 10 mars 2021, le docteur I______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, et médecin d’arrondissement de la SUVA, a procédé à un examen de l’assuré. En ce qui concernait la colonne dorsale, il n’y avait plus de progrès notables et on pouvait considérer le cas comme stabilisé. En ce qui concernait le membre supérieur droit, l’évolution était positive et on pouvait s’interroger sur les séquelles persistantes au niveau du poignet, qui pourraient avoir pour origine des lésions qui seraient passées inaperçues. Une IRM et un électromyogramme étaient prescrits dans le but d’éclaircir ce point.
q. Dans un rapport du 4 mai 2021, le docteur J______, du service de chirurgie orthopédique des HUG, a indiqué que l’évolution était favorable concernant le membre supérieur droit de l’assuré, sous réserve des examens encore en cours demandés par le Dr I______. Concernant le rachis, l’assuré ne se plaignait pas de douleur au niveau dorsal, hormis à la palpation du matériel d’ostéosynthèse lors de l’examen clinique. L’assuré présentait cependant toujours des lombalgies d’allure mécanique non déficitaire, sur probable arthrose postérieure bilatérale L4-L5, L5-S1, post-traumatique, pour laquelle il a déjà bénéficié d’une infiltration en décembre 2019, sans réel effet bénéfique selon lui. À noter cependant que le traitement d’opiacés en place à ce moment-là avait tout de même pu être sevré suite à l’infiltration. Actuellement, l’assuré semblait soulagé par la prise d’Ecofenac, 1 à 2 fois par jour, pour ses lombalgies, qui ne le limitaient pas au quotidien. L’assuré n’était pas preneur de poursuivre les exercices de renforcement de la sangle abdominale et dorsolombaire, et la symptomatologie restait similaire. La situation semblait avoir atteint la stabilité. Le pronostic de réinsertion dans l’activité de déménageur était plutôt défavorable.
r. Le docteur K______, spécialiste FMH en neurologie, a rendu un rapport le 24 août 2021, à la demande du Dr I______.
s. Le Dr I______ a également demandé un rapport au docteur L______, spécialiste FMH en chirurgie reconstructive de l’appareil locomoteur, main, poignet coude et nerfs périphériques, qui a établi un rapport au sujet de l’assuré le 2 septembre 2021.
t. Le gestionnaire du dossier a soumis les rapports des médecins précités au Dr I______ le 22 septembre 2021 qui a indiqué que la situation médicale était stabilisée.
u. Dans un rapport établi le 27 octobre 2021, le Dr I______ a confirmé que le cas était stabilisé et que l’assuré, qui avait été très collaborant, n’avait plus de prise en charge médicale. Les métiers de déménageur et de force n’étaient plus exigibles de lui. Dans un métier respectant ses limitations fonctionnelles, il pouvait travailler à 100%, sans perte de rendement. Les limitations étaient : la station debout prolongée, le porte-à-faux, la rotation du tronc rapide ou fréquente, le port de charges avec le membre supérieur droit supérieures à 15 kg et le port fréquent de charges de 10 kg. La manipulation d’objets fins ou en distalité était possible. La manipulation d’objets fragiles ou lourds devait se faire avec les deux mains. Il existait toutefois des limitations contextuelles à la recherche d’un travail dans le cadre des limitations fonctionnelles L’assuré parlait un français tout à fait intelligible et le comprenait, mais il n’avait pas de ressources pour un travail intellectuel avec l’utilisation de l’informatique. Les séquelles étaient essentiellement sur la colonne dorsale et le membre supérieur droit, au niveau de l’avant-bras.
Ce que le Dr J______ décrivait, dans l’apparition d’une arthrose lombaire basse, comme post-traumatique, ne pouvait être retenu en vraisemblance prépondérante, car l’assuré avait 50 ans et avait toujours fait des métiers de force. De plus, l’événement avait concerné majoritairement la colonne dorsale, qui était fixe. Il existait une adaptation par rééquilibrage de l’équilibre sagittal, sans que celui-ci n’ait provoqué d’atteinte, en vraisemblance prépondérante, sur la colonne lombaire. En ce qui concernait la colonne lombaire, le statu quo était acquis depuis longtemps. Au moment de la stabilisation, on était à 42 mois de l’événement. Il existait également une séquelle arthrosique au niveau du coude qui faisait, avec la colonne cervicale, l’objet d’une évaluation de l’atteinte à l’intégrité séparée.
C. a. Le 4 novembre 2021, la SUVA a informé l’assuré que dans la mesure où son examen médical récent avait révélé qu’il n’avait plus besoin de traitement, elle mettait fin au paiement de ses soins médicaux et de l’indemnité journalière avec effet au 31 janvier 2022. Une prise en charge infiltrative au niveau du coude droit était possible, comme l’avait indiqué le Dr L______. Elle examinait actuellement s’il avait droit à d’autres prestations de sa part.
b. Dans une appréciation du 8 novembre 2021, le Dr I______ a évalué l’atteinte à l’intégrité à 15%.
c. Par décision du 10 novembre 2021, la SUVA a informé l’assuré que l’évolution de son état de guérison l’avait poussée à réexaminer son obligation de verser des prestations concernant ses troubles lombaires. Pour ceux-ci, elle mettait fin à ses prestations d’assurance au 10 novembre 2021 car, selon l’appréciation de son médecin d’arrondissement, ils n’avaient plus de lien avec l’accident, dès lors l’état de santé tel qu’il aurait été sans ce dernier pouvait être considéré comme atteint depuis le 10 novembre 2021.
d. Dans un avis établi par le service médical régional (ci-après : SMR) le 23 novembre 2021, il est mentionné que dans un rapport du 22 octobre 2019, le docteur M______, chirurgien orthopédique, médecin chef de clinique aux HUG, avait attesté d’une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle et de 100% dans une activité adaptée. En conclusion, l’assuré était totalement incapable de travailler dès le 15 février 2018 et totalement capable de travailler dans une activité adaptée dès le 22 octobre 2019.
e. Par projet de décision du 10 février 2022, l’OAI a octroyé à l’assuré une rente entière d’invalidité du 1er février au 31 décembre 2019. Dès le 22 octobre 2019, sa capacité de travail était de 100% dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles. À cette date, il ressortait de la comparaison de gains un taux d’invalidité de 9.55%, ce qui ne lui ouvrait pas le droit à une rente d’invalidité. Des mesures d’ordre professionnel n’étaient pas indiquées.
f. Par décision du 21 février 2022, la SUVA a informé l’assuré qu’il ressortait de ses investigations qu’en dépit des séquelles accidentelles, il était en mesure de déployer une activité adaptée à ses limitations. En prenant comme base les chiffres du niveau de compétence 1 de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après : ESS), un revenu de CHF 62'155.- pouvait encore être réalisé. Un abattement de 10% était justifié dans le cas d’espèce. Comparé au gain de CHF 65'586.- réalisable sans l’accident, il en résultait une perte de 5.23%. En conséquence, une diminution notable de la capacité de gain due à l’accident n’existait pas et il n’avait pas droit à une rente d’invalidité.
Compte tenu de l’appréciation médicale, il avait une atteinte à l’intégrité de 15% et il avait droit de ce fait à une indemnisation à ce titre de CHF 22'230.-.
Selon le décompte du 18 février 2022 annexé à la décision, la SUVA effectuait immédiatement le versement à l’assuré de l’IPAI.
g. Le 10 mai 2022, l’assuré a formé opposition au projet de décision de l’OAI, faisant valoir que le dossier ne permettait pas de conclure qu’il était totalement capable de travailler dans une activité adaptée dès octobre 2019. Le seul élément au dossier allant dans cette direction était le rapport du SMR du 23 novembre 2021, qui se référait au rapport établi le 22 octobre 2019 par le Dr M______. Le Dr I______ n’avait mentionné une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée que dès le 28 octobre 2021 et ce, sous toutes réserves. Le Dr M______ avait continué à délivrer des arrêts de travail au-delà d’octobre 2019. En effet, le suivi s’était finalement prolongé très au-delà d’octobre 2019. Une consultation en médecine de la douleur en mai 2022 faisait encore état d’infiltrations périarticulaires opérées en décembre 2019, de la poursuite du traitement morphinique et d’un suivi psychothérapeutique en raison d’un PTSD.
h. Dans un avis du 6 juillet 2022, le SMR a proposé la réalisation d’une expertise bidisciplinaire orthopédique et psychiatrique.
i. Par décision sur opposition du 21 juillet 2022, la SUVA a estimé que la jurisprudence dont l’assuré se prévalait (arrêt du Tribunal fédéral 8C_175/2017) pour conclure à un abattement de 15% se rapportait à une situation qui n’était pas comparable à la sienne.
Sa situation ne justifiait pas l’application d’un taux d’abattement sur le gain hypothétique d’invalide supérieur à 10%, qui tenait déjà suffisamment compte de sa situation. La valeur statistique retenue était suffisamment représentative de ce qu’il était en mesure de réaliser en tant qu’invalide à 52 ans, puisqu’il ne pouvait plus exercer de métiers physiquement trop contraignants. Quant à son âge, il n’apparaissait pas d’emblée qu’il soit susceptible de réduire ses perspectives salariales, ce d’autant plus que les activités adaptées envisagées ne requéraient ni formation ni expérience professionnelle spécifique et qu’elles étaient accessibles indépendamment de son âge.
L’indexation requise par l’opposant n’influençait pas le résultat, puisqu’elle devait être opérée tant sur les gains de valide que d’invalide, de sorte que la perte de gain, respectivement le degré d’invalidité, demeurait inchangé.
En conséquence, c’était à bon droit que la SUVA avait refusé à l’assuré le droit à une rente d’invalidité. S’agissant de l’IPAI, contrairement à ce que soutenait l’opposant, la SUVA avait tenu compte de la cyphose, qui se situait entre 10 et 20 degrés, et des douleurs résiduelles. Le Dr I______ avait retenu la fourchette correcte : 5-10% (+), relevant une prise en charge médicamenteuse modérée, et choisi finalement la valeur la plus haute de 10%. En outre, le Dr J______ avait confirmé, le 4 mai 2021, l’absence de douleurs au niveau dorsal, hormis à la palpation du matériel d’ostéosynthèse. Les lombalgies d’ailleurs mécaniques avaient été qualifiées de non déficitaires. La SUVA confirmait donc également le taux de l’IPAI à 15%.
D. a. Le 14 septembre 2022, l’assuré a formé recours contre la décision sur opposition de la SUVA du 21 juillet 2022 auprès de la chambre de céans, concluant à sa suspension jusqu’à droit jugé dans la procédure relative à l’assurance-invalidité, son annulation et à ce que l’intimée soit condamnée à lui verser une rente d’invalidité correspondant à un taux d’invalidité de 20%, ainsi qu’à une indemnité pour atteinte à l’intégrité au taux de 35%, soit CHF 51'870.-, avec intérêts à 5% l’an à compter du 15 février 2020, sous déduction de CHF 22'230.- déjà versés, avec suite de frais et dépens.
b. Par réponse du 20 octobre 2022, l’intimée a conclu au rejet du recours.
c. Le 10 janvier 2023, le recourant a répliqué.
d. Les docteurs N______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, et O______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, ont transmis à l’OAI leur rapport d’expertise le 14 février 2023. Selon leur évaluation consensuelle, étaient posés sur le plan orthopédique les diagnostics de status après spondylodèse D3-D7, status après ostéosynthèse d’une fracture du cubitus diaphysaire D, status après plaie de la crête iliaque postérieure D de type Morel-Lavallée. Ces diagnostics conduisaient aux limitations fonctionnelles suivantes : les marches prolongées, les travaux en porte-à-faux, le port de charges répété et supérieures à 10 kg, les travaux nécessitant une importante force de préhension avec le membre supérieur droit. Sur le plan psychiatrique, il n’existait pas d’atteinte cérébro-organique. Sur le plan orthopédique, la capacité de travail était entière, moyennant le respect des limitations fonctionnelles. La capacité de travail était entière sur le plan psychiatrique. Dans l’activité de déménageur, la capacité de travail était nulle sur le plan orthopédique dès le 15 février 2018 et sur le plan psychiatrique, l’assuré pourrait soutenir le maximum d’horaire exigible quotidien.
e. Le 4 avril 2023, l’intimée a dupliqué (procédure LAA).
f. Dans un avis du 17 avril 2023, le SMR a proposé de suivre les conclusions de l’expertise (procédure LAI).
g. Par décision du 4 mai 2023, l’OAI a octroyé à l’assuré une rente entière d’invalidité du 1er février 2019 au 31 mai 2021. Suite à l’audition, il avait procédé à une expertise. Sur cette base, il retenait qu’à l’échéance du délai d’un an, soit au 15 février 2019, la capacité de travail de l’assuré était nulle dans toute activité et que son taux d’invalidité était de 100%. Dès le 15 février 2021, sa capacité de travail était de 100% dans une activité adaptée. Son taux d’invalidité devait être établi en retenant un revenu sans invalidité CHF 68’057.- et un revenu avec invalidité CHF 58’795.-, ce qui donnait un taux de 13.61%. Le droit à une rente entière était en conséquence supprimé trois mois après l’amélioration de son état de santé intervenue le 15 février 2021, soit dès le 1er juin 2021, en raison d’un taux d’invalidité inférieure à 40%.
h. Le 5 juin 2023, l’assuré a formé recours contre la décision de l’OAI précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, concluant à son annulation et à l’octroi d’une rente entière sans limite dans le temps, avec suite de dépens.
i. Par arrêt du 8 mai 2024 (ATAS/326/2024), la chambre de céans a rejeté le recours interjeté contre la décision de l’OAI du 4 mai 2023 reconnaissant une pleine valeur probante à l’expertise administrative du 14 février 2023.
L’analyse des indicateurs de gravité faites par l’expert psychiatre n’apparaissait en outre pas contraire au dossier et aucun rapport médical au dossier ne remettait sérieusement en cause la conclusion de l’expert psychiatre, selon laquelle la capacité de travail du recourant dans une activité adaptée était de 100%, à tout le moins dès le 15 février 2021.
La chambre de céans a également considéré que l’abattement de 10% fixé par l’OAI était justifié pour tenir compte des limitations fonctionnelles du recourant dès lors qu’il avait 50 ans au moment déterminant, soit en février 2021, et que seules des activités simples et répétitives étaient exigibles de lui, lesquelles ne nécessitaient pas de compétence ni de formation particulières.
Cet arrêt est entré en force de chose jugée.
j. Par ordonnance du 7 mai 2024, la chambre de céans a requis, dans le cadre de la présente procédure (LAA), la production du dossier de l’assurance-invalidité du recourant.
k. Le 8 juillet 2024, le recourant a relevé que son grief à l’intimée d’avoir sous-évaluer son gain de valide se voyait validé par la décision de l’OAI, qui avait été confirmée par la chambre de céans le 8 mai 2024, laquelle avait retenu un revenu sans invalidité de CHF 68'057.-. Il convenait de retenir ce montant de gain de valide pour le recourant, en application de la jurisprudence selon laquelle une appréciation divergente de l’assurance-accidents et de l’assurance-invalidité quant au taux d’invalidité ne peut intervenir qu’à titre exceptionnel et seulement s’il existe des motifs suffisants, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.
S’agissant du gain hypothétique d’invalide du recourant, à nouveau, la décision rendue par l’OAI, confirmée par la chambre de céans, démontrait que l’intimée avait été trop optimiste en retenant un revenu avec invalidité de CHF 58'795.- malgré un taux d’abattement de 10% qui était contesté. Le gain hypothétique d’invalide du recourant tel que retenu par l’OAI, mais après imputation d’un taux d’abattement de 15% et non de 10%, se montait à CHF 55'527.-. C’était tout au plus ce montant qui pourrait être retenu par la chambre de céans, ramené au gain de valide de CHF 68'057.-, il en résultait un taux d’invalidité de 18.4%, ce qui lui ouvrait le droit à une rente.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pour la période du 15 juillet au 15 août inclusivement (art. 38 al. 4 let. b LPGA et art. 89C let. b LPA), le recours est recevable.
2. Le litige porte sur le droit du recourant à une rente d’invalidité de 20% et à une IPAI de 35%.
3. Le droit du recourant à une rente d’invalidité sera examiné en premier lieu.
3.1
3.1.1 Le 1er janvier 2017 est entrée en vigueur la modification du 25 septembre 2015 de la LAA. Dans la mesure où l'accident est survenu après cette date, le droit du recourant aux prestations d'assurance est soumis au nouveau droit (cf. al. 1 des dispositions transitoires relatives à la modification du 25 septembre 2015 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_662/2016 du 23 mai 2017 consid. 2.2). Les dispositions légales seront citées ci-après dans leur teneur en vigueur à compter du 1er janvier 2017.
3.1.2 Si l'assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10% au moins par suite d’un accident, il a droit à une rente d'invalidité, pour autant que l’accident soit survenu avant l’âge ordinaire de la retraite (art. 18 al. 1 LAA). Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA ; méthode ordinaire de la comparaison des revenus).
Selon l'art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1) ; seules les conséquences de l'atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d'une incapacité de gain ; de plus, il n'y a incapacité de gain que si celle-ci n'est pas objectivement surmontable (al. 2).
Selon l'art. 19 al. 1 LAA, le droit à la rente prend naissance dès qu'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de l'assuré et que les éventuelles mesures de réadaptation de l'assurance-invalidité ont été menées à terme. Le droit au traitement médical et aux indemnités journalières cesse dès la naissance du droit à la rente.
3.1.3 Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA). En règle ordinaire, il s'agit de chiffrer aussi exactement que possible ces deux revenus et de les confronter l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité. Dans la mesure où ils ne peuvent être chiffrés exactement, ils doivent être estimés d'après les éléments connus dans le cas particulier, après quoi l'on compare entre elles les valeurs approximatives ainsi obtenues (méthode générale de comparaison des revenus ; ATF 137 V 334 consid. 3.3.1).
Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 consid. 4.1 et les références).
3.1.4 Pour déterminer le revenu sans invalidité, il convient d'établir ce que l'assuré aurait, au degré de la vraisemblance prépondérante, réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas devenu invalide. Le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible. Partant de la présomption que l'assuré aurait continué d'exercer son activité sans la survenance de son invalidité, ce revenu se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu par l'assuré avant l'atteinte à la santé, en prenant en compte également l'évolution des salaires jusqu'au moment de la naissance du droit à la rente ; des exceptions ne peuvent être admises que si elles sont établies au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 144 I 103 consid. 5.3 ; 139 V 28 consid. 3.3.2 et les références ; 135 V 297 consid. 5.1 et les références ; 134 V 322 consid. 4.1 et les références). Toutefois, lorsque la perte de l'emploi est due à des motifs étrangers à l'invalidité, le salaire doit être établi sur la base de valeurs moyennes. Autrement dit, dans un tel cas, n'est pas déterminant pour la fixation du revenu hypothétique de la personne valide le salaire que la personne assurée réaliserait actuellement auprès de son ancien employeur, mais bien plutôt celui qu'elle réaliserait si elle n'était pas devenue invalide. Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, un tel cas d’exception se présente par exemple lorsque le poste de travail que l’assuré occupait avant la survenance de l’atteinte à la santé n’existe plus au moment de l’évaluation de l’invalidité, lorsqu’il n’aurait pas pu conserver son poste en raison des difficultés économiques, en cas de faillite ou de restructuration de l’entreprise (arrêt du Tribunal fédéral 8C_746/2023 du 7 juin 2024 consid. 4.3 et les références).
Lorsque la personne assurée, en bonne santé, ne travaillerait plus à son ancien poste, le revenu de valide doit être déterminé, conformément à la pratique, au moyen des valeurs statistiques (arrêt du Tribunal fédéral 8C_214/2023 du 20 février 2024 consid. 4.2.1 et les références).
3.1.5 On évaluera le revenu que l'assuré pourrait encore réaliser dans une activité adaptée avant tout en fonction de la situation concrète dans laquelle il se trouve. Lorsqu'il a repris l'exercice d'une activité lucrative après la survenance de l'atteinte à la santé, il faut d'abord examiner si cette activité est stable, met pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle et lui procure un gain correspondant au travail effectivement fourni, sans contenir d'élément de salaire social. Si ces conditions sont réunies, on prendra en compte le revenu effectivement réalisé pour fixer le revenu d'invalide (ATF 139 V 592 consid. 2.3 et les références ; 135 V 297 consid. 5.2 et les références).
En l'absence d'un revenu effectivement réalisé – soit lorsque la personne assurée, après la survenance de l'atteinte à la santé, n'a pas repris d'activité lucrative ou alors aucune activité normalement exigible –, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base de salaires fondés sur les données statistiques résultant de l'ESS (ATF 148 V 174 consid. 6.2 et les références ; 143 V 295 consid. 2.2 et les références).
Il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table ESS TA1_tirage_skill_level, à la ligne « total secteur privé » (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 126 V 75 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_58/2021 du 30 juin 2021 consid. 4.1.1).
Il convient de se référer à la version de l'ESS publiée au moment déterminant de la décision querellée (ATF 143 V 295 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2016 du 4 août 2017 consid. 6.3).
Les tableaux TA1, T1 et T17 de l’ESS 2022 ont été publiés le 29 mai 2024, l’ESS 2020 le 23 août 2022 ; l’ESS 2018, le 21 avril 2020 ; l’ESS 2016, le 26 octobre 2018 (étant précisé que le tableau T1_tirage_skill_level a été corrigé le 8 novembre 2018).
Dans un arrêt de principe, le Tribunal fédéral a récemment estimé qu’il n'y a pas de motif sérieux et objectif de modifier la jurisprudence selon laquelle la détermination du revenu d'invalide sur la base des valeurs statistiques se fonde en principe sur la valeur centrale, respectivement médiane, de l'ESS (ATF 148 V 174 consid. 9.2.3 et 9.2.4).
En règle générale, la comparaison des revenus des assurés exerçant une activité lucrative (art. 16 LPGA) doit être effectuée de manière à ce que les deux revenus hypothétiques provenant de l'activité lucrative (revenu de valide et revenu d'invalide) soient calculés le plus précisément possible et comparés l'un à l'autre, ce qui permet de déterminer le degré d'invalidité à partir de la différence de revenu. Toutefois, si le revenu de valide et le revenu d'invalide sont calculés à partir du même salaire statistique, il n'est pas nécessaire de les déterminer avec précision. Dans ce cas, le degré d'invalidité correspond en effet au degré d'incapacité de travail, compte tenu d'une éventuelle déduction du salaire fondé sur les statistiques, qui ne doit pas dépasser 25%. Il ne s’agit pas d’une « comparaison en pour-cent » au sens de l'ATF 114 V 310 consid. 3a, mais d’une simplification purement arithmétique (arrêt du Tribunal fédéral 8C_111/2023 du 12 octobre 2023 consid. 6.2 et les références).
La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références ; 135 V 297 consid. 5.2 ; 134 V 322 consid. 5.2 et les références). Une telle déduction ne doit pas être opérée automatiquement, mais seulement lorsqu'il existe des indices qu'en raison d'un ou de plusieurs facteurs, l'intéressé ne peut mettre en valeur sa capacité résiduelle de travail sur le marché du travail qu'avec un résultat économique inférieur à la moyenne (ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références ; 146 V 16 consid. 4.1 et les références ; 126 V 75 consid. 5b/aa). Il n'y a pas lieu de procéder à des déductions distinctes pour chacun des facteurs entrant en considération; il faut bien plutôt procéder à une évaluation globale, dans les limites du pouvoir d'appréciation, des effets de ces facteurs sur le revenu d'invalide, compte tenu de l'ensemble des circonstances du cas concret (ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références ; 126 V 75 consid. 5b/bb et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_608/2021 du 26 avril 2022 consid. 3.3 et les références). D'éventuelles limitations liées à la santé, déjà comprises dans l'évaluation médicale de la capacité de travail, ne doivent pas être prises en compte une seconde fois dans l’appréciation de l’abattement, conduisant sinon à une double prise en compte du même facteur (cf. ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références ; 146 V 16 consid. 4.1 et ss. et les références). L'étendue de l'abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d'appréciation (ATF 132 V 393 consid. 3.3).
À cet égard, le pouvoir d'examen de l’autorité judiciaire cantonale n'est pas limité à la violation du droit (y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation), mais s'étend également à l'opportunité de la décision administrative). En ce qui concerne l'opportunité de la décision en cause, l'examen porte sur le point de savoir si une autre solution que celle que l'autorité, dans un cas concret, a adoptée dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation et en respectant les principes généraux du droit n'aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. À cet égard, le tribunal des assurances sociales ne peut pas, sans motif pertinent, substituer sa propre appréciation à celle de l'administration; il doit s'appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 137 V 71 consid. 5.2 et la référence).
Concernant l'abattement pour les limitations fonctionnelles, on rappellera qu'une réduction au titre du handicap dépend de la nature des limitations fonctionnelles présentées et n'entre en considération que si, sur un marché du travail équilibré, il n'y a plus un éventail suffisamment large d'activités accessibles à l'assuré (ATF 148 V 419 consid. 6 et les références).
L'absence prolongée du marché du travail n'est en effet pas déterminante dans le contexte d'une activité adaptée relevant de tâches manuelles simples, comme prise en considération dans le jugement entrepris en référence à l'ESS 2014, niveau 1 (arrêts du Tribunal fédéral 9C_777/2015 du 12 mai 2016 consid. 5.3, 8C_351/2014 du 14 août 2014 consid. 5.2.4.2 et 8C_594/2011 du 20 octobre 2011 consid. 5).
Au vu des activités simples du niveau de compétence 1, on ne saurait retenir qu’un assuré, au bénéfice d'un permis d'établissement, vivant en Suisse depuis plus de 36 ans au moment de la décision sur opposition, aurait des perspectives de gain moindres que celles d'un travailleur ayant la nationalité suisse (cf. ATF 126 V 75 consid. 5a/cc), quand bien même il maîtriserait mal le français et n'aurait pas de formation dans les activités en question, qui ne nécessitent ni formation ni expérience professionnelle spécifiques (arrêt du Tribunal fédéral 8C_682/2023 du 24 avril 2024 consid. 4.3.2 et les références).
Le point de savoir si, dans le domaine de l'assurance-accidents obligatoire, l'âge avancé peut constituer un critère d'abattement ou si l'influence de l'âge sur la capacité de gain doit être prise en compte uniquement dans le cadre de la réglementation particulière de l'art. 28 al. 4 OLAA, n'a pas encore été tranché par le Tribunal fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 8C_682/2023 du 24 avril 2024 consid. 4.3.2 et les références).
Selon la jurisprudence, l'âge d'un assuré ne constitue pas en soi un facteur de réduction du salaire statistique. Autrement dit, il ne suffit pas de constater qu'un assuré a dépassé la cinquantaine au moment déterminant du droit à la rente pour que cette circonstance justifie de procéder à un abattement. Le Tribunal fédéral a insisté sur ce point et a affirmé que l'effet de l'âge combiné avec un handicap doit faire l'objet d'un examen dans le cas concret, les possibles effets pénalisants au niveau salarial induits par cette constellation aux yeux d'un potentiel employeur pouvant être compensés par d'autres éléments personnels ou professionnels tels que la formation et l'expérience professionnelles de l'assuré concerné (ATF 148 V 419 consid. 8.2 et la référence).
Dans un arrêt récent rendu en matière d’assurance-invalidité, le Tribunal fédéral a rappelé qu’en ce qui concerne le critère de l'âge comme facteur d'abattement du salaire statistique, il y a lieu de tenir compte de l'interdépendance des facteurs personnels et professionnels entrant en ligne de compte qui contribuent à désavantager la personne assurée sur le marché du travail après une absence prolongée. Il est en effet notoire que les personnes atteintes dans leur santé, qui présentent des limitations même pour accomplir des activités légères, sont désavantagées sur le plan de la rémunération par rapport aux travailleurs jouissant d'une pleine capacité de travail et pouvant être engagés comme tels ; ces personnes doivent généralement compter sur des salaires inférieurs à la moyenne. Aussi, en présence d'un assuré de plus de 50 ans, la jurisprudence insiste sur l'effet de l'âge combiné avec un handicap, qui doit faire l'objet d'un examen dans le cas concret (arrêt du Tribunal fédéral 9C_341/2023 du 29 janvier 2024 consid. 6.2.3 et les références).
Le Tribunal fédéral a jugé notamment, à propos d'un assuré ayant atteint 62 ans à la naissance du droit à la rente, qu'il n'y avait pas d'indices suffisants pour retenir qu'un tel âge représentait un facteur pénalisant par rapport aux autres travailleurs valides de la même catégorie d'âge, eu égard aux bonnes qualifications professionnelles de celui-ci (arrêt du Tribunal fédéral 8C_439/2017 du 6 octobre 2017). Dans un arrêt concernant une assurée âgée de 58 ans au moment de la naissance d’un éventuel droit à la rente, le Tribunal fédéral a rappelé que dans la mesure où les activités envisagées du niveau de compétence 1 ne requièrent ni formation, ni expérience professionnelle spécifique, les effets pénalisants au niveau salarial induits par l'âge ne peuvent pas être considérés comme suffisamment établis. En outre, ces emplois non qualifiés sont, en règle générale, disponibles indépendamment de l’âge de l’intéressé sur un marché du travail équilibré (arrêt du Tribunal fédéral 8C_608/2021 du 26 avril 2022 consid. 4.3.2 et les références).
Dans un arrêt 8C_597/2020 du 16 juin 2021, le Tribunal fédéral a constaté qu'après la cessation d'activité de son ancien employeur, l'assuré, âgé de 59 ans au moment déterminant, avait accompli plusieurs missions temporaires alors qu'il était au chômage, de sorte qu'on pouvait admettre qu'il disposait d'une certaine capacité d'adaptation sur le plan professionnel, susceptible le cas échéant de compenser les désavantages compétitifs liés à son âge, surtout dans le domaine des emplois non qualifiés qui étaient, en règle générale, disponibles indépendamment de l’âge de l'intéressé sur le marché du travail équilibré. Dans un cas précédent, le Tribunal fédéral est arrivé à la même conclusion chez un assuré âgé de 62 ans qui disposait d'une formation de mécanicien en machines et qui avait travaillé de nombreuses années comme préposé à l'épuration (arrêt du Tribunal fédéral 8C_597/2020 du 16 juin 2021 consid. 5.2.2 et les références).
Le Tribunal fédéral a précisé qu’un abattement est applicable non seulement lorsque le revenu d’invalide se fonde sur les salaires statistiques, mais également lorsqu’il se base sur le salaire que l’assuré percevait sans atteinte à la santé. En effet, tant qu'il n'est pas concrètement réalisé, un revenu d'invalide reste, par nature hypothétique, et ne tient pas compte des difficultés qui peuvent survenir lors de l'exploitation de la capacité de travail résiduelle. Dans ce cas, le besoin de correction ne s'écarte pas fondamentalement du cas où le revenu d'invalide est fixé selon les salaires statistiques (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_380/2022 du 25 septembre 2023 consid. 4.4.5).
3.1.6 Le taux d'invalidité doit être arrondi au pourcentage supérieur ou inférieur selon les règles mathématiques reconnues. Si le résultat est inférieur ou égal à x.49...%, il convient donc de l’arrondir à x%. Cela vaut également dans l'assurance-accidents, même si l'arrondi à l'unité supérieure ou inférieure (hormis la valeur de référence de 10% [cf. art. 18 al. 1 LAA]) représente une perte ou un gain de quelques francs sur le montant mensuel de la rente (ATF 131 V 121 consid. 3.2 et 3.3 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_167/2022 du 18 août 2022 consid. 5.4).
3.1.7 La notion d'invalidité est, en principe, identique en matière d'assurance-accidents, d'assurance militaire et d'assurance-invalidité. Dans ces trois domaines, elle représente la diminution permanente ou de longue durée, résultant d'une atteinte à la santé assuré, des possibilités de gain sur le marché du travail équilibré qui entrent en ligne de compte pour l'assuré (ATF 126 V 288 consid. 2). Depuis le 1er janvier 2003, la définition de l'invalidité est uniformément codifiée à l'art. 8 al. 1 LPGA selon lequel est réputée invalidité l'incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou de longue durée. En raison de l'uniformité de la notion d'invalidité, il convient d'éviter que pour une même atteinte à la santé, assurance-accidents, assurance militaire et assurance-invalidité n'aboutissent à des appréciations divergentes quant au taux d'invalidité. Cela n'a cependant pas pour conséquence de les libérer de l'obligation de procéder dans chaque cas et de manière indépendante à l'évaluation de l'invalidité. En aucune manière un assureur ne peut se contenter de reprendre simplement et sans plus ample examen le taux d'invalidité fixé par l'autre assureur car un effet obligatoire aussi étendu ne se justifierait pas (cf. ATF 133 V 549 consid. 6 ; 131 V 362 consid. 2.2).
D'un autre côté l'évaluation de l'invalidité par l'un de ces assureurs ne peut être effectuée en faisant totalement abstraction de la décision rendue par l'autre. À tout le moins, une évaluation entérinée par une décision entrée en force ne peut pas rester simplement ignorée.
3.2
3.2.1 En l’espèce, la chambre de céans retient que le recourant fait valoir à tort que le montant du gain d’invalide devait être fixé selon l’ESS 2020 et non sur la base de l’ESS 2018, car selon la jurisprudence précitée, il convient de se référer à la version de l'ESS publiée au moment de la décision querellée. Celle-ci ayant été prise par l’intimée le 21 juillet 2022, soit avant la publication de l’ESS 2020 qui a eu lieu le 23 août 2022, le revenu d’invalide du recourant doit être fondé sur l’ESS 2018.
3.2.2 L’OAI a fixé le degré d’invalidité du recourant le 19 avril 2023 en prenant en compte l’année 2021. Les données sur lesquelles il a fondé son calcul ne sont pas déterminantes dans le cadre de la fixation de la rente à laquelle a droit le recourant en application de la LAA, puisque l’intimée a fixé ce droit en prenant en compte l’année 2022, date de stabilisation de l’état de santé du recourant, notion qui n’est pas applicable dans le domaine de l’assurance-invalidité.
3.2.3 Le recourant estime qu’un abattement de 15% au minimum en lieu et place de 10% aurait dû être retenu par l’intimée, en raison de ses limitations fonctionnelles (marche, de port de charges, manipulation d’objets fins et/ou fragiles ou lourds), de son âge (52 ans), de sa nationalité étrangère, de son éloignement du marché du travail depuis plus de quatre ans suite à son grave accident de février 2018, du fait qu’il n’est pas de nationalité suisse et qu’il écrit mal le français.
L’intimée a fait valoir que selon la jurisprudence, l’âge d’un assuré ne constituait pas un facteur de réduction du salaire statistique. Il ne suffisait pas de constater qu’un assuré avait dépassé la cinquantaine au moment déterminant du droit à la rente pour que cette circonstance justifie de procéder à un abattement. Compte tenu de la jurisprudence de plus en plus restrictive du Tribunal fédéral en la matière, l’abattement aurait dû être fixé à 5% seulement.
La chambre de céans retient que dès lors qu’une activité simple et répétitive est exigible du recourant, ni son âge, ni sa nationalité étrangère, ni son absence du marché du travail pendant quelques années ne justifiaient un abattement supplémentaire à 10%, qui prenait correctement en compte ses limitations fonctionnelles, au vu de la jurisprudence en la matière.
L'argumentation du recourant ne met pas en évidence des circonstances susceptibles d'établir qu’un abattement de 15% sur le salaire statistique aurait dû être retenu au titre de revenu d'invalide. Les arrêts auxquels il fait référence, dans lesquels le Tribunal fédéral a admis, dans des cas particuliers, un abattement de 15% pour des personnes âgées de 59 et 54 ans, ne suffisent pas à établir que l’intimée aurait procédé à une appréciation inappropriée de son cas, étant relevé qu’il était âgé de 52 ans en 2022, année prise en compte par l’intimée pour établir son taux d’invalidité. Son absence du marché du travail apparaît en outre d’une longueur relative. Enfin, compte tenu également des activités professionnelles qu'il exerce depuis de nombreuses années en Suisse, il n’apparaît pas que le recourant ne serait pas en mesure d'exercer des activités physiques légères ne nécessitant pas de connaissances linguistiques ou scolaires particulières.
Le recourant conteste également le gain d’invalide pris en compte par l’intimée, faisant valoir que le calcul de celle-ci conduisait au constat que le salaire statistique exigible de lui s’élèverait prétendument à CHF 69'061.50 après indexation alors même que celui-ci réalisait un revenu annuel de CHF 65'586.-. Dès lors, à croire ses calculs, le recourant aurait pendant des années travaillé pour un salaire inférieur au salaire qu’il aurait pu réaliser en pleine santé et ceci sciemment.
Ce grief doit être écarté dans la mesure où le Tribunal fédéral a estimé récemment qu’il n'y a pas de motif sérieux et objectif de modifier la jurisprudence selon laquelle la détermination du revenu d'invalide sur la base des valeurs statistiques se fonde en principe sur la valeur centrale, respectivement médiane, de l'ESS (ATF 148 V 174 consid. 9.2.3 et 9.2.4).
3.2.4 S’agissant du gain de valide, le recourant a fait valoir que l’intimée avait retenu un gain de valide de CHF 65'520.-, indexé à CHF 65'586.- par an, alors que l’OAI avait retenu le salaire de CHF 67'997.-.
L’intimée a fait valoir que son calcul se fondait sur le salaire réalisé par le recourant auprès de son ancien employeur.
La chambre de céans considère que dans la mesure où le recourant était inscrit au chômage lors de son accident et qu’il n’était engagé par l’employeuse que pour un temps très limité en gain intermédiaire, il faut retenir qu’en bonne santé, il n’aurait pas continué à travailler pour cette dernière et qu’il faut dès lors déterminer son revenu de valide sur la base des valeurs statistiques, comme l’a fait l’OAI.
Il se justifie ainsi de prendre comme revenu sans invalidité, le revenu (avec invalidité) annuel établi par la SUVA le 19 février 2022 sur la base des ESS 2018, indexé à 2022 et en tenant compte de l’horaire hebdomadaire normal de la branche économique, soit un revenu annuel de CHF 69'061.50, ce qui comparé au revenu avec invalidité de CHF 62'155.- donne un taux d’invalidité de 10%, ouvre le droit du recourant à une rente invalidité de ce montant.
3.2.5 Le recourant fait encore valoir que les salaires nominaux avaient baissé de 0.2% (0.6 pour les hommes) en 2021, que l’indice suisse des salaires 2022 n’avait pas encore été publié et qu’en l’état, l’indexation était estimée à 1.1%.
L’intimée a pris en compte pour 2021 et 2022 l’indice de 0.1%, précisant que ce pourcentage correspondait à l’estimation trimestrielle actuelle.
Cette question peut rester ouverte, dès lors que les revenus à prendre en compte pour fixer les taux d’invalidité du recourant sont fixés sur la même tabelle statistique et qu’il n’est donc pas nécessaire de procéder à l’indexation des revenus à comparer.
4. Il convient d’examiner en second lieu le droit du recourant à une IPAI.
4.1
4.1.1 Aux termes de l'art. 24 LAA, si par suite d'un accident, l'assuré souffre d'une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique, il a droit à une indemnité équitable pour atteinte à l'intégrité (al. 1). L'indemnité est fixée en même temps que la rente d'invalidité ou, si l'assuré ne peut prétendre une rente, lorsque le traitement médical est terminé (al. 2). D'après l'art. 25 LAA, l'indemnité pour atteinte à l'intégrité est allouée sous forme de prestation en capital (al. 1, 1ère phrase) ; elle ne doit pas excéder le montant maximum du gain annuel assuré à l'époque de l'accident et elle est échelonnée selon la gravité de l'atteinte à l'intégrité (al. 1, 2e phrase). Elle est également versée en cas de maladie professionnelle (cf. art. 9 al. 3 LAA). Le Conseil fédéral édicte des prescriptions détaillées sur le calcul de l'indemnité (al. 2).
L’IPAI vise à compenser le préjudice immatériel (douleurs, souffrances, diminution de la joie de vivre, limitation des jouissances offertes par l'existence etc.) qui perdure au-delà de la phase du traitement médical et dont il y a lieu d'admettre qu'il subsistera la vie durant (ATF 133 V 224 consid. 5.1 et les références). Elle se caractérise par le fait qu'elle est exclusivement fixée en fonction de facteurs médicaux objectifs, valables pour tous les assurés, et sans égard à des considérations d'ordre subjectif ou personnel. En cela, elle se distingue de l'indemnité pour tort moral du droit civil, qui procède de l'estimation individuelle d'un dommage immatériel au regard des circonstances particulières du cas. Cela signifie que pour tous les assurés présentant un status médical identique, l'atteinte à l'intégrité est la même, et sans égard à des considérations d'ordre subjectif ou personnel (ATF 115 V 137 consid. 1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_656/2022 du 5 juin 2023 consid. 3.2 et les références ; 8C_703/2008 du 25 septembre 2009 consid. 5.1 et les références).
L'atteinte à l'intégrité au sens de l'art. 24 al. 1 LAA consiste généralement en un déficit corporel (anatomique ou fonctionnel) mental ou psychique. La gravité de l'atteinte, dont dépend le montant de l'indemnité, se détermine uniquement d'après les constatations médicales. L'évaluation incombe donc avant tout aux médecins qui doivent, d'une part, constater objectivement quelles limitations subit l'assuré et, d'autre part, estimer l'atteinte à l'intégrité en résultant (arrêt du Tribunal fédéral 8C_656/2022 du 5 juin 2023 consid. 3.4 et les références).
Contrairement à l’évaluation du tort moral, la fixation de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité peut se fonder sur des critères médicaux d’ordre général, résultant de la comparaison de séquelles similaires d’origine accidentelle, sans qu’il soit nécessaire de tenir compte des inconvénients spécifiques qu’une atteinte entraîne pour l’assuré concerné. En d’autres termes, le montant de l’IPAI ne dépend pas des circonstances particulières du cas concret, mais d’une évaluation médico-théorique de l’atteinte physique ou mentale, abstraction faite des facteurs subjectifs (ATF 115 V 147 consid. 1 ; 113 V 218 consid. 4b et les références ; voir aussi 125 II 169 consid. 2d).
Selon l’art. 36 OLAA, édicté conformément à la délégation de compétence de l’art. 25 al. 2 LAA, une atteinte à l'intégrité est réputée durable lorsqu'il est prévisible qu'elle subsistera avec au moins la même gravité pendant toute la vie (al. 1, 1ère phrase) ; elle est réputée importante lorsque l'intégrité physique ou mentale subit, indépendamment de la diminution de la capacité de gain, une altération évidente ou grave (al. 1, 2e phrase). L’indemnité pour atteinte à l'intégrité est calculée selon les directives figurant à l'annexe 3 à l'OLAA (al. 2). En cas de concours de plusieurs atteintes à l'intégrité physique ou mentale, dues à un ou plusieurs accidents, l'indemnité pour atteinte à l'intégrité est fixée d'après l'ensemble du dommage (al. 3, 1ère phrase).
Cette disposition a été jugée conforme à la loi en tant qu'elle définit le caractère durable de l'atteinte (ATF 133 V 224 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 401/06 du 12 janvier 2007 consid. 2.2). Le caractère durable de l'atteinte doit être à tout le moins établi au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 124 V 29 consid. 4b/cc). Quant au caractère important de l'atteinte, le ch. 1 de l'annexe 3 à l'OLAA précise que les atteintes à l'intégrité qui sont inférieures à 5% selon le barème ne donnent droit à aucune indemnité. Il faut en conclure qu'une atteinte est réputée importante si elle atteint au moins ce pourcentage (Thomas FREI et Juerg P. BLEUER, Évaluation d'atteintes à l'intégrité multiples, in SUVA Medical 2012, p. 202).
L'évaluation de l'atteinte à l'intégrité se fonde sur les constats médicaux, de sorte qu'il incombe, dans un premier temps, au médecin de se prononcer, en tenant compte des atteintes énumérées à l'annexe 3 de l'OLAA et dans les tables de la SUVA, sur la question de savoir si, et dans quelle mesure, il existe un dommage. Il appartient toutefois à l'administration ou au tribunal de procéder à l'évaluation juridique, sur la base des constatations médicales, de l'existence d'une atteinte à l'intégrité, de déterminer si le seuil de gravité est atteint et, dans l'affirmative, l'étendue de l'atteinte. Bien que l’administration et le tribunal doivent s'en tenir aux données médicales, l'évaluation de l'atteinte à l'intégrité, en tant que fondement du droit aux prestations, relève, en fin de compte, de leur domaine de compétence (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_746/2022 du 18 octobre 2023 consid. 4.2 et les références ; sur la répartition des tâches entre le médecin et l'administration ou le tribunal, cf. également ATF 140 V 193 consid. 3.2).
Depuis le 1er janvier 2016, le montant maximum du gain assuré s’élève à CHF 148'200.- par an et à CHF 406.- par jour (art. 22 al. 1 de l’ordonnance sur l'assurance-accidents du 20 décembre 1982 [OLAA - RS 832.202]).
En cas de rechute ou de séquelles tardives, la base de calcul déterminante pour le calcul de l'indemnité pour atteinte à l'intégrité due est le montant maximum du gain annuel assuré au jour de l'accident (ATF 127 V 456 consid. 4).
L’annexe 3 à l'OLAA comporte un barème – reconnu conforme à la loi et non exhaustif (ATF 124 V 29 consid. 1b et les références ; 124 V 209 consid. 4a/bb et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_745/2022 du 29 juin 2023 consid. 3.2 et la référence) – des lésions fréquentes et caractéristiques, évaluées en pourcent (ATF 124 V 209 consid. 4bb).
La Division médicale de la SUVA a établi plusieurs tables d'indemnisation des atteintes à l'intégrité selon la LAA (disponibles sur www.suva.ch). Ces tables n'ont pas valeur de règles de droit et ne sauraient lier le juge. Toutefois, dans la mesure où il s'agit de valeurs indicatives, destinées à assurer autant que faire se peut l'égalité de traitement entre les assurés, elles sont compatibles avec l'annexe 3 à l'OLAA (ATF 132 II 117 consid. 2.2.3 ; 124 V 209 consid. 4a/cc ; 116 V 156 consid. 3a).
Contrairement aux rentes d'invalidité, les IPAI peuvent être réduites en raison d'un état préexistant, même si cet état n'a eu aucune incidence sur la capacité de gain de la personne assurée avant l'accident (arrêt du Tribunal fédéral 8C_91/2023 du 28 septembre 2023 consid. 7.1 et les références).
En revanche, l'art. 36 al. 2 LAA limite l'application du principe de la causalité en ce sens seulement qu'un état de santé préexistant, qui n'a jamais eu d'influence sur la capacité de travail, ne saurait être pris en considération afin de justifier la réduction des rentes d’invalidité (cf. arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 79/03 du 18 décembre 2003 consid. 4.2).
La casuistique suivante ressort de la jurisprudence :
- amputations (doigts) : 5% (ATAS/1112/2011 du 24 novembre 2011 ; cf. également RAMA 1997 p. 207) ; 7.5% (ATF 113 V 218) ;
- arthrose légère et troubles fonctionnels des membres inférieurs : 5% (ATAS/546/2008 du 7 mai 2008 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_687/2011 du 28 juin 2012) ;
- fracture du radius gauche avec mobilité restreinte du poignet : 5% (arrêt du Tribunal fédéral 8C_687/2011 du 28 juin 2012) ;
- amputation transmétacarpienne de l'index droit : 7.5% (ATF 113 V 220 consid. 3a) ;
- amputation partielle de trois doigts de la main droite chez un droitier et limitation fonctionnelle du bras droit en raison d'une très grave contusion de l'avant-bras : 25% (RAMA 1987 p. 306) ;
- lésion de la colonne vertébrale : 30 % (RAMA 1995 p. 192) ;
- perte de la vision unilatérale (30 %) et déformation esthétique du globe oculaire (5 %) : 35 % (RAMA 1992 p. 85) ;
- paraplégie incomplète (douleurs dorsales, parésie persistante à une jambe, troubles fonctionnels de la vessie et de l'intestin, troubles d'ordre sexuel) : 40 % (RAMA 1989 p. 357).
4.1.2 Lorsqu'un cas d'assurance est réglé sans avoir recours à une expertise dans une procédure au sens de l'art. 44 LPGA, l'appréciation des preuves est soumise à des exigences sévères: s'il existe un doute même minime sur la fiabilité et la validité des constatations d'un médecin de l'assurance, il y a lieu de procéder à des investigations complémentaires (ATF 145 V 97 consid. 8.5 et les références ; 142 V 58 consid. 5.1 et les références ; 139 V 225 consid. 5.2 et les références ; 135 V 465 consid. 4.4 et les références). En effet, si la jurisprudence a reconnu la valeur probante des rapports médicaux des médecins-conseils, elle a souligné qu'ils n'avaient pas la même force probante qu'une expertise judiciaire ou une expertise mise en œuvre par un assureur social dans une procédure selon l'art. 44 LPGA (ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références).
Selon une jurisprudence constante, les médecins d'arrondissement ainsi que les spécialistes du centre de compétence de la médecine des assurances de la CNA sont considérés, de par leur fonction et leur position professionnelle, comme étant des spécialistes en matière de traumatologie, indépendamment de leur spécialisation médicale (arrêt du Tribunal fédéral 8C_626/2021 du 19 janvier 2022 consid. 4.3.1 et les références).
Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références; cf. ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).
4.2
4.2.1 Le recourant fait valoir que le taux de l’IPAI aurait dû être au minimum de 35% et pas de 15%, se référant à l’annexe 3 de l’OLAA, qui prévoyait qu’une atteinte très grave et douloureuse au fonctionnement de la colonne vertébrale donnait droit à une IPAI de 50%. Le tableau 7 de la SUVA prévoyait également que des fractures cervicales, dorsales ou lombaires avec cyphose de 10° à 20° impliquaient une IPAI allant jusqu’à 25%, voire 35%, en cas de douleurs permanentes plus ou moins intenses. Quant à l’arthrose du membre supérieur droit, le tableau 5 de la SUVA imposait une IPAI de 5% à 10% si elle était d’intensité moyenne et de 10% à 25% si elle était d’intensité grave. Or il ressortait du dossier qu’en mai 2021 encore, le recourant présentait des lombalgies pour lesquels les traitements étaient inefficaces. Les douleurs dorsolombaires étaient encore souvent présentes selon les rapports médicaux. Un rapport du 27 octobre 2021 faisait également état de douleurs en éclairs imprévisibles à l’avant-bras droit et au poignet droit.
L’estimation de l’IPAI du Dr I______ du 27 octobre 2021 ne faisait pas mention du degré de gravité de la cyphose, qualifiée par celui-ci de « saillie type Buffaloneck ». Par le passé, la cyphose dont souffrait le recourant avait été estimée, à la CRR, à 72° et 70° par les docteurs P______, spécialiste FMH en rhumatologie, et Q______, médecin assistante, et à 39° par la Dre Q______ (recte : le docteur R______, spécialiste FMH en médecine physique et réadaptation).
Cette cyphose était manifestement douloureuse et les rapports médicaux successifs faisaient état de lombalgies y compris au repos. Il y était encore fait mention dans le rapport de consultation du 4 mai 2021, établi par les HUG, selon lequel le patient présentait toujours des lombalgies d’allure mécaniques non déficitaires sur probable arthrose postérieure bilatérale L4-L5, L5-S1 post-traumatique, pour laquelle il avait déjà bénéficié d’une infiltration bilatérale en décembre 2019, sans réel effet bénéfique selon lui. De plus, selon le rapport de la Dre S______ du 7 avril 2021, le recourant présentait souvent des douleurs dorso-lombaires. Ses lombalgies avaient été traitées d’abord à la morphine puis au Celebrex.
Ainsi, et conformément au tableau 7 de la SUVA, il s’agissait à minima d’une IPAI de 20% qui devait être retenue concernant l’atteinte à la colonne vertébrale du recourant.
Concernant son atteinte au coude, il convenait de relever que le recourant s’était également plaint de dysesthésie (cf. notamment le courrier du Dr T______ du 10 mars 2021) mais également d’une perforation du TFCC à proximité de l’attache radiale du poignet droit entrainant des douleurs irradiantes du poignet au serrage (cf. rapport d’IRM du poignet du 17 mars 2021).
En conséquence, l’ensemble de ce tableau devait conduire à retenir une IPAI minimale de 15% pour le membre supérieur droit, soit une IPAI cumulée de 35% au minimum et non de 15%.
S’agissant de l’IPAI, l’intimée a indiqué que contrairement à ce que soutenait le recourant, elle avait tenu compte des douleurs résiduelles ressenties par celui-ci dans l’estimation de l’atteinte à l’intégrité. Les rapports auxquels se référait le recourant faisaient déjà partie intégrante du dossier en possession du Dr I______ lors de l’examen de son cas. L’indemnité pour atteinte à l’intégrité devait être confirmée faute d’argument concret plaidant contre l’avis du médecin d’arrondissement.
4.2.2 En l'occurrence, la chambre de céans relève que les conclusions relatives à l'IPAI établies par le Dr I______ le 27 octobre 2021 font partie de son appréciation globale du même jour, qui reposait sur un examen du recourant et tenait compte des pièces médicales le concernant jusqu'au 2 septembre 2021. L’appréciation du Dr I______ sur l’IPAI n'est pas dépourvue de motivation, dès lors qu’il a indiqué, s’agissant de l’atteinte au membre supérieur droit, s’être référé au tableau 5 relatif aux atteintes à l’intégrité résultant d’arthrose, qui mentionnait pour une arthrose moyenne au coude un taux de 5 à 10% et qu’il avait fixé le taux d’atteinte à 5% car il s’agissait d’une atteinte moyenne légère.
Concernant la colonne vertébrale, le Dr I______ a retenu une atteinte de 10%, sur la base du tableau 7, précisant que le recourant avait bénéficié d’une stabilisation pour fractures dorsales multi-étagées avec une cyphose augmentée du fait de l’événement entre 10 et 20° et en tenant compte d’une prise en charge médicamenteuse modérée + (douleurs modérées après mobilisation, rares ou nulles au repos et accentuées par les efforts).
Le taux global des atteintes était ainsi de 15%.
Le recourant fait valoir qu’il ressortait du dossier qu’en mai 2021 encore, il présentait des lombalgies pour lesquelles les traitements étaient inefficaces et que les douleurs dorsolombaires étaient encore souvent présentes selon les rapports médicaux. Un rapport du 27 octobre 2021 faisait également état de douleurs en éclairs imprévisibles à l’avant-bras droit et au poignet droit.
Le rapport établi le 4 mai 2021 par le Dr J______ n’entre pas en contradiction avec les conclusions du Dr I______, puisqu’il fait état d’une évolution favorable du membre supérieur droit du recourant et du fait que celui-ci présentait des lombalgies à la mobilisation seulement, que le traitement d’opiacés en place à ce moment-là avait pu être sevré suite à l’infiltration faite en décembre 2018 et que le recourant semblait soulagé par la prise d’Ecofenac, 1 à 2 fois par jour, pour ses lombalgies, qui ne le limitaient pas au quotidien.
Le rapport de la Dre S______ du 7 avril 2021, selon lequel le recourant présentait souvent des douleurs dorsolombaires, sans plus de motivation, et qui indiquait qu’elle s’attendait à une réduction de ses douleurs au coude et poignet droits ne suffit pas à remettre en cause les conclusions du Dr I______.
Il ressort en outre du rapport principal du Dr I______ du 27 octobre 2021 que le recourant lui avait déclaré qu’il ne faisait plus de physiothérapie et qu’il ne prenait du Celebrex que de temps en temps. Il avait parfois des lombalgies. Les conclusions du Dr I______ sur les douleurs lombaires apparaissent ainsi cohérentes avec les déclarations du recourant.
Le rapport principal du Dr I______ du 27 octobre 2021 mentionnait que le recourant avait indiqué souffrir lors de l’utilisation de son membre supérieur droit de douleurs en éclairs imprévisibles. Il ne s’agit donc pas là d’un constat médical. Le Dr I______ a en revanche indiqué avoir constaté que les mobilités du poignet du recourant étaient sans particularité, ni douleurs particulières. Il a également constaté une cyphose segmentaire dorsale de la zone d’ostéosynthèse jusqu’à la base de la colonne cervicale, avec une saillie type « Buffaloneck » non douloureuse, avec une lordose compensatrice sous-jacente.
Le recourant a fait valoir que la cyphose avait été estimée à 72° et à 70° par le Dr P______ et la Dre Q______.
À teneur du rapport établi par ces derniers le 7 février 2019, ceux-ci mentionnaient, sous la rubrique « Examens radiologiques effectués avant l’hospitalisation », une étude « l’équilibre sagittal sous EOS du 3 avril 2018 », qui avait mis notamment en évidence une cyphose T4-T12 de 72° et une lordose de L1-S1 de 71°. Les médecins de la CRR relevaient ensuite qu’aucune nouvelle intervention n’était proposée, qu’il n’y avait pas d’AMO à prévoir avant deux ans et qu’au niveau du rachis, une correction de la cyphose pourrait être discutée, mais qu’il s’agissait d’une intervention lourde dont le résultat sur une partie des douleurs n’était pas certain. S’agissant de la colonne lombaire, les médecins se référaient au consilium spécialisé.
Le Dr R______ a indiqué dans son rapport du 21 décembre 2018 intitulé « Consilium de l’appareil locomoteur » avoir retrouvé à l’examen clinique un trouble statique avec une cyphose dorsale haute prononcée et un léger déséquilibre dans le plan sagittal. Le recourant allait garder des limitations pour ce qui concernait le port de charges et le maintien des positions statiques debout ou assise. L’indication d’une chirurgie correctrice de la cyphose post-traumatique pourrait se discuter chez ce patient cohérent dont les plaintes cervico-dorsales hautes étaient à son avis en lien avec des tensions myotendineuses.
La chambre de céans retient que ces rapports de la CRR ne remettent pas en cause les conclusions motivées du Dr I______ sur le taux d’atteinte à l’intégrité du recourant, dans la mesure où ils ont été rédigés près de trois ans avant les rapports de ce dernier et qu’ils ne se prononcent pas sur cette question.
Concernant son atteinte au coude, le recourant a fait valoir qu’il s’était également plaint de dysesthésie, en se référant au rapport du Dr T______ du 10 mars 2021 et d’une perforation du TFCC à proximité de l’attache radiale du poignet droit, entrainant des douleurs irradiantes du poignet au serrage, référence faite au rapport d’IRM du poignet du 17 mars 2021.
Le 10 mars 2021, c’est le Dr I______ qui demandait au Dr T______ de recevoir le recourant pour un avis neurologique. Le Dr T______ ayant indiqué le 15 juillet 2021 qu’il était surchargé, c’est finalement le Dr K______ qui a rendu un rapport le 24 août 2021, concluant que l’examen neurologique des membres supérieurs du recourant était normal pour les neurographies (nerfs médian, cubital, radial, musculo-cutané et brachial-cutané interne), mais qu’il mettait en évidence dans le muscle extenseur commun des doigts des signes de dénervation-réinnervation ancienne, sous forme de potentiels de trop grande taille. Ces anomalies informaient qu’il y avait eu une atteinte nerveuse périphérique axonale qui avait bien récupéré. Néanmoins, le muscle concerné fonctionnait avec un nombre d’axones réduit, chacun innervant plus de fibres musculaires que la norme, ce qui pouvait provoquer de la fatigue des crampes et des douleurs. Il était possible que cela soit à l’origine des douleurs du recourant, mais celui-ci les décrivait plus au bord cubital de l’avant-bras et les douleurs pourraient dès lors être de nature orthopédique.
Il résulte de ce rapport qu’il n’est pas établi, au degré de la vraisemblance prépondérante, que les douleurs du recourant soient en lien de causalité naturelle avec l’accident en cause, ce lien n’étant que possible selon le Dr K______. Par ailleurs, ce rapport ne se prononce pas sur le taux d’atteinte à l’intégrité et ne remet pas en cause les conclusions du Dr I______, qui a retenu que le recourant souffrait de douleurs liées à son atteinte au coude.
Le Dr I______ a également demandé un rapport au Dr L______. La chambre de céans constate que dans son rapport 2 septembre 2021, ce médecin ne se prononce pas non plus sur le taux d’atteinte à l’intégrité du recourant et qu’il n’en ressort pas d’éléments faisant douter des conclusions du Dr I______. En effet, le Dr L______ décrivait une absence de douleurs au repos et une bonne évolution globale au niveau de son membre supérieur droit et il relevait comme séquelles un léger déficit d’extension au niveau de son coude et des douleurs compatibles avec un épicondyle latéral réactionnel. Il n’y avait pas de douleurs au niveau du matériel d’ostéosynthèse. On pouvait envisager de la physiothérapie et éventuellement une injection de cortisone au niveau de l’épicondylite latérale selon l’évolution afin de soulager le recourant, qui était par ailleurs peu demandeur d’une prise en charge au niveau de son coude.
En conclusion, il convient de confirmer le taux d’atteinte à l’intégrité de 15% retenu par l’intimée sur la base du rapport du Dr I______.
4.3 Le recourant fait encore valoir qu’il a droit à un intérêt moratoire sur l’IPAI.
4.3.1 Selon l’intimée, des intérêts moratoires n’étaient pas dus en matière d’assurance sociale, sauf disposition contraire (ATF 117 V 151, 113 V 50). Depuis le 1er janvier 2003, l'art. 26 al. 2 LPGA prévoit que des intérêts moratoires sont dus pour toute créance de prestations d'assurances sociales à l'échéance d'un délai de 24 mois à compter de la naissance du droit, mais au plus tôt douze mois à partir du moment où l'assuré a fait valoir ce droit, pour autant qu'il se soit entièrement conformé à l'obligation de collaborer qui lui incombe. Le taux de l'intérêt moratoire est de 5% par an (art. 7 al. 1 de l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 11 septembre 2002 ([OPGA ; RS 830.11]). Selon la doctrine et à la jurisprudence, l'obligation de payer des intérêts moratoires commence 24 mois après la naissance du droit en tant que tel pour l'ensemble des prestations courues jusque-là, et non pas seulement deux ans après l'exigibilité de chaque prestation (ATF 133 V 9 consid. 3.6).
La jurisprudence avait néanmoins admis le versement d’un intérêt compensatoire en dehors de tout acte ou omission de l’administration dans le cadre de l’art. 24 LAA. Il pouvait en effet arriver que l’IPAI ne puisse pas être allouée en même temps que la rente d’invalidité, malgré la règle de l’art. 24 al. 2 LAA, parce qu’au moment de la fixation de la rente, il n’était pas encore possible de se prononcer avec certitude sur les conditions d’octroi à l’indemnité. En pareil hypothèse, l’assuré pouvait prétendre à un intérêt de 5% l’an aussi longtemps que la décision était différée (ATF 113 V 48).
Dans le cas d’espèce, la décision de l’intimée du 21 février 2022 portait tant sur le droit à une rente d’invalidité qu’au droit à une IPAI. Le décompte relatif à l’IPAI daté du 28 février 2022 et confirmant le versement d’une somme de CHF 22'230.- avait été directement annexé à la décision et le versement avait dès lors suivi son cours, de sorte que l’assuré ne pouvait prétendre à un intérêt moratoire.
Le recourant allègue que les arrêts cités par l’intimée avaient été rendus en 1991 et en 1987 et qu’ils étaient tous deux antérieurs à l’entrée en vigueur de la LPGA, le 1er janvier 2003. Or, avant l’entrée en vigueur de la LPGA, il n’y avait pas de place en principe pour des intérêts moratoires dans le domaine des assurances sociales dans la mesure où ils n’étaient pas prévus par la législation, notamment la LAA. Depuis le 1er janvier 2003, l’art. 26 al. 2 LPGA prévoyait que des intérêts moratoires étaient dus pour toute créance de prestation d’assurance sociale à l’échéance d’un délai de 24 mois à compter de la naissance du droit, et au plus tôt douze mois à partir du moment où l’assuré avait fait valoir ce droit, pour autant qu’il se soit entièrement conformé à l’obligation de collaborer qui lui incombait. À titre d’exemple de cas dans lesquels l’IPAI portait intérêt, le recourant citait l’ATAS/380/2021 du 27 avril 2021 et l’ATAS/1013/2020 du 26 octobre 2020 ainsi que l’arrêt du Tribunal fédéral 8C_361/2022 du 13 octobre 2022. Ainsi, des intérêts moratoires étaient dus à tout le moins à compter du 4 février 2020, soit 24 mois après la naissance du droit conformément à l’art. 26 al. 2 LPGA.
L’accident ayant eu lieu le 15 février 2018, l’intérêt moratoire était dû à tout le moins à compter du 15 février 2020.
4.3.2 Selon l'art. 26 al. 2 LPGA, des intérêts moratoires sont dus pour toute créance de prestations d'assurances sociales à l'échéance d'un délai de 24 mois à compter de la naissance du droit, mais au plus tôt douze mois à partir du moment où l'assuré fait valoir ce droit, pour autant qu'il se soit entièrement conformé à l'obligation de collaborer qui lui incombe.
De par la loi, le versement d'intérêts moratoires pour les créances de prestations d'assurances sociales est subordonné au respect des trois conditions cumulatives suivantes : le délai de 24 mois à compter de la naissance du droit, le délai de douze mois à partir du moment où l'assuré fait valoir son droit, le devoir incombant à l'assuré de collaborer (Sylvie Pétremand, Commentaire romand, Loi sur la partie générale des assurances sociales, 2018, n° 31 ad art. 26 LPGA).
Compte tenu des deux délais prévus à l'art. 26 al. 2 LPGA, des intérêts moratoires sont dus au plus tôt douze mois après que l'assuré a fait valoir son droit, dans la mesure où, à ce moment-là, le délai de 24 mois depuis la naissance du droit est écoulé (PÉTREMAND, op cit., n° 38 ad art. 26 LPGA).
L'obligation de payer des intérêts moratoires commence 24 mois après la naissance du droit en tant que tel pour l'ensemble des prestations courues jusque-là, et non pas seulement deux ans après l'exigibilité de chaque prestation (ATF 133 V 9 consid. 3.6 ; ATAS/559/2019 du 24 juin 2019 consid. 11a).
Selon l'art. 7 de de l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 [OPGA - RS 830.11]), le taux de l’intérêt moratoire est de 5% par an (al. 1). L’intérêt moratoire est calculé par mois sur les prestations dont le droit est échu jusqu’à la fin du mois précédent. Il est dû dès le premier jour du mois durant lequel le droit à l’intérêt moratoire a pris naissance et jusqu’à la fin du mois durant lequel l’ordre de paiement est donné (al. 2).
4.3.3 En l'occurrence, le droit à l’IPAI du recourant est né le 1er février 2022. Il n’avait pas droit à des intérêts moratoires avant le 1er février 2024 selon l’art. 26 al. 2 LPGA. Dans la mesure où l’IPAI versée en 2022, suite à la décision de l’intimée du 21 février 2022, portait tant sur le droit à une rente d’invalidité qu’au droit à une IPAI et qu’il ressort du décompte relatif à l’IPAI daté du 28 février 2022 et que l’intimée lui avait versé la somme de CHF 22'230.- à ce titre, le recourant ne peut prétendre à des intérêts moratoires.
5. Au vu de ce qui précède, le recours est partiellement admis et la décision querellée réformée, dans le sens que le recourant a droit à une rente d’invalidité de 10% dès le 1er février 2022.
Le recourant obtenant partiellement gain de cause et étant assisté d’un conseil, il a droit à des dépens qui seront fixés à CHF 2'000.- et mis à la charge de l’intimée (art. 61 let. g LPGA).
La procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. L’admet partiellement.
3. Réforme la décision sur opposition du 21 juillet 2022 dans le sens que le recourant a droit à une rente d’invalidité de 10% dès le 1er février 2022.
4. La confirme pour le surplus.
5. Alloue au recourant une indemnité de CHF 2'000.-, à la charge de l’intimée.
6. Dit que la procédure est gratuite.
7. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Julia BARRY |
| La présidente
Catherine TAPPONNIER |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le