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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4265/2023

ATAS/804/2024 du 17.10.2024 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4265/2023 ATAS/804/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 17 octobre 2024

Chambre 5

 

En la cause

 

A______

représenté par Me Muriel PIERREHUMBERT, avocate

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en ______ 1999, de nationalité nicaraguayenne, a déposé une demande de prestations invalidité pour adultes qui a été reçue, en date du 15 septembre 2020, par l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l'OAI).

b. Il invoquait des difficultés psychiques, « en tout cas depuis 2015 », et mentionnait être suivi, en addictologie, par la fondation B______ ainsi que par le docteur C______, spécialiste FMH en médecine générale.

c. Dans son rapport médical du 12 novembre 2020, la docteure D______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie au sein de la fondation B______, a exposé que l’assuré souffrait d’un trouble du comportement et de troubles émotionnels apparaissant habituellement durant l’enfance et l’adolescence, sans précision (F 98.9), ainsi que de troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de dérivés du cannabis, utilisation nocive pour la santé (F 12.1). Au niveau des limitations fonctionnelles, le développement de la pensée avait certainement été péjoré, sur fond de défaillance narcissique ; dans ce contexte, la relation à l’autre était perturbée au niveau de la capacité au maintien d’une certaine constance. La gestion des difficultés était dysfonctionnelle puisque l’assuré recourait à l’évitement des situations et la persévérance faisait défaut. Ces perturbations expliquaient l’irrégularité dans la constance, observée dans toute situation, ce qui rendait également difficile une prise en charge psychothérapeutique, avec mise en mots et élaboration des difficultés.

d. À la demande du service médical régional (ci-après : le SMR) de l’OAI, la Dre D______ a complété son appréciation, par courrier du 31 mars 2022, exposant avoir eu un entretien avec la mère de l’assuré le 1er novembre 2021 puis avec la mère et l’assuré le 24 janvier 2022 et enfin, avec l’assuré uniquement, le 23 février 2022. En ce début d’année 2022, la journée-type de l’assuré était décrite comme suit : ce dernier se réveillait vers 7h00, parfois se rendormait quelques heures, puis prenait son petit-déjeuner et faisait de petites activités ménagères, à la demande de sa mère. Il prenait son repas de midi avec ses frères puis s’occupait à la maison, soit avec l’un de ses frères, soit avec un ami et sortait parfois chez son amie ou avec des amis. Il n’avait jamais été hospitalisé en milieu psychiatrique et n’avait pas de permis de conduire ; il n’avait pas eu de différends avec la Police, à la connaissance du médecin et il n’était probablement pas suffisamment autonome pour voyager seul à l’étranger. Des mesures de protection de la personnalité n’étaient pas indiquées.

e. Par avis médical du 17 mai 2022, le docteur E______, du SMR, a résumé la situation de l’assuré et a recommandé la réalisation d’une expertise psychiatrique afin d’établir, de manière claire et circonstanciée, l’atteinte psychique à la santé ayant un impact sur la capacité de travail, l’évolution de l’incapacité de travail et la capacité de travail résiduelle.

f. L’OAI a mandaté le professeur F______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, qui a rendu son rapport d’expertise en date du 18 janvier 2023. L’expert posait les diagnostics, ayant une incidence sur la capacité de travail, de troubles mixtes des acquisitions scolaires (F 80.3), dès l’enfance et de traits de personnalité émotionnellement labile, type impulsif (Z 73.1), dès le début de l’âge adulte. Il posait également un diagnostic, sans répercussion sur la capacité de travail, de troubles mentaux du comportement liés à l’utilisation des dérivés du cannabis, syndrome de dépendance (F 12.2). Le tableau clinique était globalement cohérent, sans signe de majoration et l’expertisé était considéré comme authentique, mais désorienté sur le plan existentiel. Les limitations fonctionnelles étaient clairement hétérogènes et concernaient essentiellement la mise en pratique des compétences et connaissances professionnelles, l’adaptation aux règles et la flexibilité. La vitesse de traitement de l’information était l’obstacle majeur pour une réinsertion professionnelle. Les diagnostics posés concernant l’addictologie étaient corrects mais, en revanche, le coefficient intellectuel avait été clairement surévalué, chez un homme qui rapportait des difficultés cognitives dès son plus jeune âge, difficultés qui avaient été objectivées avec le bilan neuropsychologique et qui impactaient également sa cognition sociale. La capacité de travail dans l’activité exercée jusqu’ici était nulle, sans évolution positive à moyen terme. La capacité de travail dans une activité correspondant aux aptitudes de l’expertisé, sous réserve d’un suivi psychothérapeutique préalable pendant six à huit mois, pouvait s’élever à 100%, à raison de huit heures par jour. Il fallait qu’il s’agisse d’une activité simple, ritualisée, sans exigence de vitesse de traitement de l’information ou de gestion d’énoncé complexe. Un suivi psychothérapeutique pouvait améliorer la capacité de travail, en aidant l’assuré dans la gestion de l’impulsivité, de son intolérance aux frustrations et l’ennui et de ses réactions de rupture à la tonalité abandonnique. Compte tenu de ses traits de personnalité, ce suivi était indiqué et largement recommandé, sans danger et pouvant modifier la capacité de travail de manière significative en milieu adapté.

g. Dans son rapport du 31 janvier 2023, le SMR a considéré que le rapport d’expertise était un travail convaincant, qui tenait compte des critères en vigueur depuis juin 2015 en matière de troubles psychiques et autres. Il était mentionné que l’assuré consommait du cannabis et de l’alcool de façon festive, mais suffisante pour interférer avec un programme de formation et/ou de réadaptation. Aucune de ces mesures ne devait donc être portée à charge de l’institution avant qu’une abstinence ne soit testée par ses médecins, sur une période minimum d’une année. Le mandat de réadaptation de jeunes de moins de 25 ans mentionnait qu’une FPI, soit une mesure de réadaptation, était envisageable. Il était néanmoins précisé que l’assuré présentait des déficits cognitifs importants qui le plaçaient dans une zone d’intelligence limite, proche du retard mental léger. L’intelligence était limitée sur tous les aspects, mais notamment au niveau de la vitesse de traitement de l’information, et sur cette toile de fond psycho-développementale, on retrouvait une utilisation nocive pour la santé de cannabis à l’adolescence, qui avait nécessité des soins addictologiques, ainsi que la présence de traits de personnalité émotionnellement labile, de type impulsive, avec sentiment de vide, intolérance aux frustrations, impulsivité mal maîtrisée, tout en précisant que le lien entre ses traits de personnalité et l’utilisation abusive du cannabis était bien établi. S’agissant de l’exigence d’un suivi psychothérapeutique qui avait été évoquée par l’expert, le SMR estimait qu’il était réalisé par l’équipe spécialisée de la fondation B______.

h. Dans un rapport postérieur, daté du 20 juillet 2023, le SMR s’est fondé sur un rapport médical de la Dre D______, du 26 avril 2021, qui indiquait notamment que « depuis plusieurs mois, nous tentons une nouvelle fois de mettre en place une activité occupationnelle mais sans succès » pour en déduire qu’actuellement, l’assuré était clairement en incapacité de suivre une formation. Il ajoutait que des tentatives multiples d’insérer l’assuré dans un milieu protégé ou de suivre une formation professionnelle avaient déjà été mises en place, sur plusieurs années, par des spécialistes « ayant pignon sur rue » mais les tentatives n’avaient pas abouti, du fait de l’atteinte à la santé de l’assuré, en rapport avec sa consommation de cannabis et d’alcool.

B. a. Par projet de décision du 30 août 2023, l’OAI a proposé l’octroi d’une rente d’invalidité extraordinaire, en précisant que le droit à des mesures professionnelles n’était pas reconnu étant donné l’incapacité totale de travail.

b. Par courrier du 3 octobre 2023, l’OAI a signifié à l’assuré que la procédure d’audition était terminée et que la caisse cantonale genevoise de compensation allait procéder au calcul de sa rente et lui ferait parvenir une décision sujette à recours.

c. En date du 23 octobre 2023, l’OAI a rendu un nouveau projet de décision qui annulait et remplaçait celui du 3 octobre 2023 et qui aboutissait à un refus de rente et de mesures d’ordre professionnel. Il était mentionné que l’incapacité de gain était totale, dès le premier jour du mois qui suivait le 18e anniversaire, ce qui signifiait pour l’assuré, né en juillet 1999, que la survenance du cas d’assurance était fixée au 1er août 2017. Dès cette date, le droit à une rente, s’élevant à 100% d’une rente entière d’invalidité, était ouvert. Cependant, il manquait une condition, en ce sens qu’il fallait que, lors de la survenance de l’invalidité, l’assuré eût déjà complété une année de résidence en Suisse ; or, au 1er août 2017, l’assuré ne remplissait pas cette condition, de sorte qu’un droit à la rente ordinaire ou extraordinaire d’invalidité ne pouvait pas lui être reconnu.

d. Par décision du 29 novembre 2023, l’OAI a confirmé le refus de rente et de mesures professionnelles, pour les motifs déjà exposés dans le projet de décision du 23 octobre 2023.

C. a. Par acte posté en date du 28 décembre 2023, l’assuré a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans), faisant valoir qu’il se trouvait en Suisse depuis 2012 et était suivi par un psychologue depuis 2015. Suite à divers examens, on lui avait diagnostiqué un trouble du comportement en 2016. Le permis B avait été obtenu, pour toute la famille, en 2017. Au vu de ces nouvelles informations, il concluait à ce que son dossier soit « réexaminé ».

b. Par réponse du 27 février 2024, l’OAI a modifié sa décision dans le sens où il était admis que le recourant était domicilié en Suisse avant la survenance de son invalidité. Néanmoins, le résultat était confirmé car l’assuré ne remplissait pas « comme enfant » de manière rétrospective, les conditions pour avoir droit à des mesures de réadaptation, en raison de son état de santé. Dès lors, au vu du parcours scolaire et du suivi médical de l’assuré, aucun élément objectif au dossier ne permettait d’admettre que l’assuré, lorsqu’il était enfant, aurait pu concrètement bénéficier de mesures de réadaptation. Partant, l’intimé concluait au rejet du recours.

c. Par réplique de son mandataire, du 8 avril 2024, le recourant a conclu à l’annulation de la décision querellée et à ce qu’il soit dit qu’il avait droit à des prestations invalidité et pouvait bénéficier d’une rente, ainsi que de mesures d’ordre professionnel, sous suite de frais et dépens. Subsidiairement, il était conclu à ce que le dossier soit renvoyé à l’intimé pour qu’il rouvre l’instruction du dossier et le complète sur les questions en lien avec le droit de bénéficier de mesures de réadaptation durant la période précédant son 20e anniversaire. La chronologie du dossier était reprise et le recourant faisait valoir que ce n’était pas la situation avant l’âge de 18 ans mais avant l’âge de 20 ans qui devait être examinée en rapport avec la réadaptation et alléguait que les conclusions du SMR étaient contraires à celles du rapport d’expertise.

d. Par duplique du 28 mai 2024, l’OAI a admis que l’âge à prendre en compte était bien celui de 20 ans et non pas de 18 ans, ce qui ne modifiait nullement les conclusions sur le fond de l’examen du droit à la rente extraordinaire, dans la mesure où le recourant n’aurait pas pu concrètement bénéficier de mesures de réadaptation au vu de son parcours scolaire et de son suivi médical. Pour le surplus, l’OAI persistait dans ses conclusions.

e. Par observations spontanées du 10 juin 2024, le recourant a persisté dans ses conclusions, revenant sur le fait que les appréciations de l’intimé, quant à l’impossibilité d’une réadaptation professionnelle pendant la période précédant l’âge de 20 ans, ne correspondaient pas à celles retenues par l’expert.

f. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

g. Les autres faits et documents seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Le délai de recours est de 30 jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

2.             Le litige porte sur la question du bien-fondé du refus de l’intimé de reconnaître à l’assuré le droit à une rente de l’assurance-invalidité ou à des mesures d’ordre professionnel.

3.              

3.1 Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI ‑ RS 831.201 ; RO 2021 706) sont entrées en vigueur.

En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2. et les références).

En l’occurrence, la survenance de l’invalidité étant antérieure au 31 décembre 2021, l’ancien droit reste applicable.

3.2 Selon l’art. 1b LAI, sont assurées conformément à la présente loi les personnes qui sont assurées à titre obligatoire ou à titre facultatif en vertu des art. 1a et 2 de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10).

3.3 En vertu de l’art. 6 al. 2 LAI, les étrangers ont droit aux prestations de l’assurance-invalidité, sous réserve de l’art. 9 al. 3, aussi longtemps qu’ils conservent leur domicile et leur résidence habituelle (art. 13 LPGA) en Suisse, mais seulement s’ils comptent, lors de la survenance de l’invalidité, au moins une année entière de cotisations ou dix ans de résidence ininterrompue en Suisse.

3.4 L’art. 6 al. 2 LAI constitue une règle de droit interne qui s’applique sous réserve des dispositions de l’accord sur la libre circulation des personnes (accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes - ALCP - RS 0.142.112.681) avec l’UE, de la Convention AELE et des autres conventions internationales de sécurité sociale conclues par la Suisse. Demeure également réservé l’arrêté fédéral concernant le statut des réfugiés et des apatrides dans l’assurance-vieillesse et survivants et dans l’assurance-invalidité du 4 octobre 1962 (RS 831.31.11). L’art. 6 al. 2 LAI vise donc les assurés qui ne tombent pas sous le coup de ces réglementations (Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur l’assurance-invalidité [LAI], 2018, n. 5 ad art. 6). À cet égard, il sied de préciser qu’il n’existe pas, en l’espèce, de règles spéciales qui seraient applicables en lieu et place de l’art. 6 al. 2 LAI, étant relevé en particulier qu’il n’existe pas de convention bilatérale de sécurité sociale entre la Suisse et le Nicaragua.

L’art. 9 al. 3 LAI, auquel l’art. 6 al. 2 LAI fait référence, dispose ce qui suit :

Les ressortissants étrangers âgés de moins de 20 ans révolus et qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse ont droit aux mesures de réadaptation – dont font partie les mesures médicales (art. 8 al. 3 let. a LAI) et les mesures d’ordre professionnel (art. 8 al. 3 let. b LAI) – s’ils remplissent eux‑mêmes les conditions prévues à l’art. 6 al. 2 LAI, ou si :

a)      lors de la survenance de l’invalidité, leur père ou mère compte, s’il s’agit d’une personne étrangère, au moins une année entière de cotisations ou dix ans de résidence ininterrompue en Suisse et si

b)      eux-mêmes sont nés invalides en Suisse ou, lors de la survenance de l’invalidité, résident en Suisse sans interruption.

3.5 Le droit aux prestations de l’assurance-invalidité se fonde sur la notion d’invalidité figurant à l’art. 8 al. 1 LPGA (auquel renvoie l’art. 4 al. 1 LAI), soit une incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident, soit une diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (art. 7 al. 1 LPGA).

3.6 Le droit à une rente extraordinaire n’est, en principe, pas ouvert aux ressortissants étrangers de pays avec lesquels la Suisse n’a pas conclu de convention de sécurité sociale. Selon l’art. 39 al. 1 LAI (que réserve l’art. 6 al. 1 phr. 2 LAI), le droit aux rentes extraordinaires de l’assurance-invalidité est déterminé conformément aux dispositions de la LAVS.

Ainsi, à teneur de l’art. 42 al. 1 LAVS, il est ouvert aux ressortissants suisses ayant leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse (art. 13 LPGA) qui comptent le même nombre d’années d’assurance que les personnes de leur classe d’âge, mais n’ont pas droit à une rente ordinaire parce qu’ils n’ont pas été soumis à l’obligation de verser des cotisations pendant une année entière au moins.

Selon l’art. 39 al. 3 LAI, ont aussi droit à une rente extraordinaire les invalides étrangers et apatrides qui remplissent, comme enfants, les conditions fixées à l’art. 9 al. 3 LAI.

Aux termes de cet article, les ressortissants étrangers âgés de moins de 20 ans qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse au sens de l’art. 13 LPGA ont droit aux mesures de réadaptation, s’ils remplissent eux-mêmes les conditions prévues à l’art. 6 al. 2 LAI (qui porte sur les conditions d’octroi d’une rente ordinaire, dont il n’est pas contesté qu’elles ne sont pas remplies en l’occurrence) ou si :

a. lors de la survenance de l’invalidité, leur père ou mère compte, s’il s’agit d’une personne étrangère, au moins une année entière de cotisations ou dix ans de résidence ininterrompue en Suisse, et si

b. eux-mêmes sont nés invalides en Suisse ou, lors de la survenance de l’invalidité, résidaient en Suisse sans interruption depuis une année au moins ou depuis leur naissance.

Comme le résument les Directives concernant les rentes de l’assurance vieillesse, survivants et invalidité fédérale édictées par l’office fédéral des assurances sociales (ci-après : DR), sont mises au bénéfice de la rente extraordinaire d’invalidité les personnes invalides de naissance ou dès leur enfance qui sont domiciliées en Suisse ; il s’agit des personnes invalides depuis leur naissance ou qui sont devenues invalides selon un taux justifiant l’octroi d’une rente avant le 1er décembre de l’année suivant celle au cours de laquelle elles ont atteint 22 ans révolus, mais qui n’ont pas acquis le droit à une rente ordinaire (ch. 7006 DR).

Pour pouvoir prétendre à une rente extraordinaire d’invalidité, le ressortissant étranger invalide de naissance ou dès son enfance ne doit pas avoir forcément séjourné en Suisse depuis sa naissance. Les conditions d’octroi sont réalisées lorsque la personne concernée est entrée en Suisse avant le 1er janvier suivant l’accomplissement de ses 20 ans révolus. Toutefois, la rente extraordinaire AI ne peut être versée qu’une fois échu le délai de carence requis (ch. 7007 DR).

Ont également droit à une rente extraordinaire d’invalidité les étrangers invalides qui, dans leur enfance, remplissaient les conditions d’octroi de mesures de réadaptation et qui pourraient ou auraient pu bénéficier de telles mesures de l’AI au plus tard jusqu’à leur 20e anniversaire (ch. 7011 DR ; ATF 140 V 246).

Les personnes étrangères invalides de naissance ou depuis leur enfance peuvent ainsi prétendre à une rente extraordinaire d’invalidité au plus tôt dès le mois qui suit leur 18e anniversaire si elles ont bénéficié ou auraient pu bénéficier jusque-là de mesures de réadaptation du fait qu’elles remplissaient les conditions de l’art. 9 al. 3 LAI (ch. 7012 DR).

En revanche, ces personnes n’ont pas droit à une rente extraordinaire de l’AI lorsque, avant leur 20e anniversaire, elles ne pouvaient prétendre à des prestations en nature, soit parce qu’elles n’étaient pas invalides au sens de la loi, soit parce qu’elles ne remplissaient pas les conditions d’assurance (ch. 7013 DR).

Le but de l'art. 39 al. 3 LAI est de permettre aux invalides étrangers et apatrides domiciliés en Suisse, qui ont bénéficié ou auraient pu bénéficier de mesures de réadaptation de l'AI jusqu'à l'âge de leur majorité, de continuer à pouvoir bénéficier des prestations de l'assurance-invalidité au-delà de la majorité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_156/2010 du 20 avril 2011 consid. 4.2.3). Les termes « remplissaient comme enfants les conditions fixées à l'art. 9 al. 3 » visent, d'une part, les exigences relatives à l'année entière de cotisations et aux années de résidence en Suisse du ressortissant étranger, respectivement de son père ou de sa mère (conditions d'assurance). Ils impliquent, d'autre part, que l'intéressé a bénéficié ou aurait pu bénéficier de mesures de réadaptation, soit que le droit à ces mesures lui a été ou aurait pu lui être reconnu, parce qu'il satisfaisait ou aurait pu satisfaire aux conditions matérielles de la prestation de réadaptation visée par l'art. 9 LAI (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2013 du 6 juin 2014 consid. 7.3.1).  

Le point de savoir si les conditions d'assurance étaient réalisées et si la personne concernée a eu droit ou aurait concrètement pu avoir droit à des mesures de réadaptation doit être examiné de manière rétrospective : il faut se demander si « comme enfant », l'intéressé satisfaisait à ces exigences. Selon la jurisprudence, tel n'est pas le cas lorsque pour la période courant avant son 18e anniversaire, l'intéressé ne pouvait prétendre à des mesures de réadaptation d'ordre médical ou professionnel, parce qu'il avait bénéficié d'un traitement médical ayant pour objet l'affection en tant que telle (cf. art. 12 al. 1 LAI a contrario) et que son état de santé n'aurait pas permis de mettre en œuvre des mesures de réadaptation professionnelles (arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2013 op. cit. consid. 7.3.1). 

Selon le Tribunal fédéral, il y a lieu d'admettre que les termes « comme enfant » de cette disposition signifient « avant l'âge de 20 ans révolus » (arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2013 op. cit. consid. 7.3.2).

4.              

4.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

4.2 Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu’il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu’ils n’auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu’il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3).

5.

5.1 À titre préalable, il convient de rappeler que, dans le cadre de sa réponse du 27 février 2024, l’OAI a modifié sa décision en admettant que le recourant était domicilié en Suisse avant la survenance de son invalidité mais a maintenu le refus de toute prestation en raison du fait qu’une rente extraordinaire n’était possible qu’aux conditions fixées à l’art. 9 al. 3 LAI, soit que l’assuré ait eu droit, comme enfant (soit avant l’âge de 20 ans révolus), aux mesures de réadaptation.

Par conséquent, l’objet du litige ne porte désormais que sur la question de savoir si, avant l’âge de 20 ans, l’assuré avait droit à des mesures de réadaptation (art. 9 al. 3 LAI), de telles mesures ne pouvant prendre naissance que si elles sont indiquées en raison de l’âge et de la santé du recourant (art. 10 al. 2 LAI).

5.2 En l’espèce, le recourant expose dans sa première écriture, postée le 28 décembre 2023, qu’il est en Suisse depuis 2012, qu’un psychologue le suit depuis 2015 et que son trouble du comportement aurait été diagnostiqué en 2016.

À teneur du rapport médical de la Dre D______, du 12 novembre 2020, l’assuré est arrivé en Suisse, depuis le Nicaragua, dans le courant de l’année 2010. Il a intégré le cycle d’orientation mais a présenté des difficultés d’apprentissage et de comportement dès la première année (absentéisme, retard, ne travaille pas) puis, après un changement de cycle d’orientation, a intégré le centre de la transition professionnelle (ci-après : CTP). L’évolution sur le plan des acquisitions a été considérée comme très lente jusqu’à ce qu’en 2015, dans le cadre d’un suivi pédopsychologique et d’une investigation du quotient intellectuel, il soit mis en évidence des résultats se situant dans l’écart-type inférieur. À la fin de l’année 2015, dans un contexte de consommation de cannabis initiée dès son arrivée au cycle, le suivi par la fondation B______ a commencé. En 2017, des tentatives de faire des stages, puis de trouver un apprentissage en dual, avec la poursuite du CTP, ont échoué malgré un soutien important de la part du réseau psychosocial. À la fin de l’année 2017, la nécessité de trouver une structure de soins a été mise au premier plan, la question de la formation étant clairement surévaluée. Malgré les réticences de la fondation B______, l’assuré a entamé un suivi à Cap Formation, où il a effectué des cours de remise à niveau et un stage en conciergerie. Il était toutefois noté que l’assuré restait très irrégulier, ne parvenait pas être constant, ni à adopter une posture professionnelle adéquate. À la fin de l’année 2019, le constat était à nouveau fait de l’incapacité d’une insertion professionnelle et la question de la demande de prestations invalidité était une fois de plus évoquée pour être finalisée en 2020.

L’intimé a fixé la survenance de l’invalidité au 1er juillet 2017, ce qui est admis par le recourant (réplique, p. 8, dernier §). La chambre de céans confirme qu’elle considère que c’est dans le courant de l’année 2017, suite aux différents échecs de mise en place de stages et d’un apprentissage dual que l’invalidité s’est cristallisée. Partant, la date du 1er août 2017 peut être retenue, ce qui établit, à satisfaction de droit, que l’invalidité du recourant s’est déclarée avant l’âge de 20 ans révolus.

5.3 Dans son mandat de réadaptation daté du 1er mars 2021, le service de réadaptation de l’OAI constate que les difficultés rencontrées par l’assuré sont lourdes et que dans son rapport médical, la Dre D______ ne se prononce pas sur la capacité de l’assuré à suivre une formation professionnelle dans le but d’intégrer le marché de l’emploi.

Il est précisé que l’assuré est quasiment anosognosique de ses difficultés et limitations et recommandé de présenter le dossier au SMR et de demander à la Dre D______ de préciser la capacité de l’assuré à suivre une formation professionnelle.

En réponse à cette question, la Dre D______ a précisé, dans un courrier du 26 avril 2021, que l’assuré présente une incapacité, observée depuis plusieurs années, à s’ancrer dans toute activité qu’elle soit professionnelle, occupationnelle ou thérapeutique. Il est mentionné qu’actuellement, l’assuré est clairement en incapacité de suivre une formation. S’agissant des limitations fonctionnelles, la psychiatre précise que les troubles psychiques ne permettent pas à l’assuré de suivre toute forme d’activité qui requiert une certaine constance tant il ne parvient pas à maintenir une régularité et une continuité suffisantes.

Dans un formulaire d’informations complémentaires à la demande de prestations invalidité, complété par l’assuré en date du 7 mai 2021, celui-ci confirme n’avoir jamais achevé de formation, ne pas avoir suivi de mesures de marché du travail, ne pas avoir exercé des activités de réinsertion, ni avoir effectué un stage d’évaluation à l’emploi.

Dans son curriculum vitae, daté de l’année 2021, l’assuré mentionne une activité en carrosserie et peinture, d’une semaine en 2015, une activité de mécanicien en motocycles, d’une semaine en 2016, une activité de cuisinier, d’une semaine en 2017 et une activité d’agent en intendance, chargé du nettoyage d’une école, de trois mois entre 2018 et 2019. Son dernier livret scolaire en classe d’insertion professionnelle, pendant l’année scolaire 2015-2016, mentionne notamment un apprentissage en dents de scie, un manque de concentration et le fait que son agitation constante ne lui a pas permis d’acquérir les compétences requises pour les outils informatiques. L’appréciation globale est tout de même que l’assuré a bien progressé pendant cette année.

Le formulaire d’évaluation du comportement du CTP, pendant la transition professionnelle duale de 2017-2018, fait état, pendant la première période, des difficultés de l’assuré quant à ses recherches de stage et la gestion de son travail. Pendant la deuxième période, il est noté qu’il a été malheureusement souvent absent durant le deuxième trimestre, mais qu’il effectue cependant son travail en classe avec application. Il est encouragé à faire preuve de la même autonomie quant à la gestion de son projet professionnel afin de pouvoir s’engager dans la voie professionnelle souhaitée.

Lorsqu’il a été amené à rédiger son mandat de réadaptation, en mars 2021, le service de réadaptation de l’OAI s’était déjà fondé sur le diagnostic de la Dre D______ selon laquelle une réelle prise en charge psychothérapeutique avec mise en mots et élaboration des difficultés ne pouvait pas être mise en place, en raison de l’inconstance et de l’irrégularité au sein du suivi et des difficultés psychiques et cognitives du patient (mandat de réadaptation du 1er mars 2021 citant le rapport médical de la Dre D______ du 12 novembre 2020, ch. 10).

Dès lors, la chambre de céans considère qu’il est établi, au degré de la vraisemblance prépondérante, que le recourant n’était, avant l’âge de 20 ans, en raison de ses troubles psychiques, pas apte à suivre une mesure de réadaptation professionnelle.

5.4 Le recourant allègue qu’un suivi psychothérapeutique aurait dû être mis en place par l’intimé, avant l’âge de 20 ans, moyennant quoi il aurait été apte à suivre une mesure de réadaptation professionnelle.

Dans cette optique, il convient de rappeler qu’à teneur de l’art. 12 al. 1 LAI, jusqu’à l’âge de 20 ans, l’assuré a droit aux mesures médicales qui n’ont pas pour objet le traitement de l’affection comme telle, mais sont directement nécessaires à sa réadaptation professionnelle (…) et sont de nature à améliorer de façon durable et importante sa capacité de gain (…) ou à les préserver d’une diminution notable.

Dans son arrêt du 6 juin 2014 (9C_756/2013 consid. 7.5.1) le Tribunal fédéral a rappelé que lorsqu'il s'agit de mineurs, la jurisprudence a précisé que des mesures médicales pouvaient déjà être utiles de manière prédominante à la réadaptation professionnelle et, malgré le caractère encore provisoirement labile de l'affection, pouvaient être prises en charge par l'AI si, sans ces mesures, la guérison serait accompagnée de séquelles ou s'il en résulterait un état défectueux stable d'une autre manière, ce qui nuirait à la formation professionnelle, diminuerait la capacité de gain ou aurait ces deux effets en même temps (p. ex., arrêt du Tribunal fédéral 9C_729/2008 du 17 avril 2009 consid. 2.2 et les arrêts cités, in SVR 2009 IV n° 40 p. 116).

Ainsi, le recourant souligne que l’expert considère qu’il a une capacité de travail dans une activité correspondant à ses aptitudes de 100%, sous réserve d’un suivi psychothérapeutique préalable, pendant six à huit mois (expertise, p. 19 et 20, ch. 8.2).

L’expert ajoute à la question de « mesures médicales à prendre pouvant améliorer de façon sensible la capacité de travail » qu’un suivi psychologique est requis pour aider l’assuré dans la gestion de son impulsivité, de son intolérance aux frustrations et l’ennui, ainsi que de ses réactions de rupture à tonalité abandonnique. Compte tenu de ces traits de personnalité, ce suivi est indiqué, largement recommandé, sans danger et pouvant modifier la capacité de travail de manière significative en milieu adapté (expertise p. 20 et 21, ch. 8.3).

Dans ses conclusions, l’expert psychiatre considère que l’assuré disposerait d’une capacité de travail dans une activité adaptée de 100%, sous réserve d’un suivi psychothérapeutique préalable pendant six à huit mois.

La valeur probante de l’expertise a été reconnue par le recourant et par l’intimé et n’est pas remise en question par la chambre de céans.

Partant, il convient d’admettre que le recourant avait droit, dès la survenance de l’invalidité, à des mesures médicales et notamment à un suivi psychothérapeutique tel que celui préconisé par l’expert F______.

5.5 Le recourant considère que, si la mesure médicale au sens de l’art. 12 al. 1 LAI, soit le suivi psychothérapeutique recommandé par l’expert, avait été mis en place pendant six à huit mois, dès le 1er août 2017, il aurait été en mesure d’atteindre l’objectif qu’il espérait, c’est-à-dire exercer une activité professionnelle.

Le SMR estime qu’un tel suivi a été mis en place « concernant l’exigence d’un suivi psychothérapeutique, évoquée par l’expert, nous estimons qu’elle est réalisée par l’équipe spécialisée de la Fondation B______ » (rapport SMR du 31 janvier 2023, p. 3 tout dernier §).

Or, cette affirmation ne semble pas entièrement partagée par la psychiatre du recourant, qui s’interroge sur le caractère suffisant et adapté du suivi psychothérapeutique qu’elle a effectué, et qui déclare qu’il « est impossible de dire si un suivi [psychothérapeutique] plus régulier aurait permis une amélioration de la situation » (rapport médical de la Dre D______ du 12 novembre 2020, ch. 10).

Dans son rapport d’expertise, p. 17, sous ch. 7.2, l’expert considère que « la thérapie addictologique était correcte et a permis de diminuer la consommation de cannabis. Toutefois, la dimension de la maturation de sa personnalité et de la gestion de son impulsivité n’a pas été suffisamment abordée ».

Ce constat remet en question l’affirmation du SMR vue supra, qui considère que le suivi psychothérapeutique effectué par la fondation B______ était adapté.

Partant, il convient de clarifier ce point et de compléter le mandat d’expertise en posant cette question au Prof. F______, à savoir : peut-on considérer que l’exigence d’un suivi psychothérapeutique adapté, d’une durée de six à huit mois, a été correctement remplie à l’égard de l’assuré, avant que ce dernier n’atteigne l’âge de 20 ans révolus ?

S’agissant de la prise de position du SMR, largement critiquée par le recourant, selon laquelle aucune mesure de formation ou de réadaptation ne devrait être portée à la charge de l’OAI avant qu’une abstinence de l’assuré ne soit testée par ses médecins, sur une période de minimum une année, il convient également de poser cette question au Prof. F______, dans le cadre du complément de l’expertise, soit : de déterminer s’il était nécessaire, avant que l’assuré n’atteigne l’âge de 20 ans, que ce dernier s’abstienne pendant une année de consommer de l’alcool et du cannabis, pour être apte à des mesures de réadaptation d’ordre médical ou professionnel.

Lorsque le juge constate qu'une expertise est nécessaire, il doit en principe la mettre en œuvre lui-même. Un renvoi à l'administration reste cependant possible lorsqu'il est justifié par l'examen d'un point qui n'a pas du tout été investigué (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4).

Le renvoi se justifie d’autant plus dans le cas d’espèce qu’il s’agit de compléter l’expertise réalisée, sous la houlette de l’intimé, par le Prof. F______.

6.              

6.1 Compte tenu de ce qui précède, il convient de renvoyer la cause à l’OAI, pour complément d’expertise auprès du Prof. F______, au sens des considérants et nouvelle décision.

6.2 Le recourant, assisté par un mandataire professionnellement qualifié et obtenant partiellement gain de cause, a ainsi droit à une indemnité à titre de participation à ses frais et dépens, que la chambre de céans fixera à CHF 1’500.- (art. 61 let. g LPGA ; art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA ‑ RS E 5 10.03]).

6.3 Étant donné que, depuis le 1er juillet 2006, la procédure n'est plus gratuite (art. 69 al. 1bis LAI), au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.-.

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Renvoie la cause à l’intimé, pour complément d’expertise et nouvelle décision au sens des considérants.

4.        Alloue au recourant, à charge de l’intimé, un montant de CHF 1'500.- à titre de participation aux frais et dépens.

5.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le