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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3871/2023

ATAS/716/2024 du 19.09.2024 ( LCA ) , REJETE

Recours TF déposé le 30.10.2024, rendu le 06.11.2024, IRRECEVABLE, 4A_566/2024
En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3871/2023 ATAS/716/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 19 septembre 2024

Chambre 5

 

En la cause

A______

représenté par Me Guy ZWAHLEN, avocat

 

 

demandeur

 

contre

GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA

défenderesse

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le demandeur), né le ______ 1986, était employé par la société B______ (ci-après : B______) lorsqu’en date du 18 janvier 2019, il a chuté dans les escaliers alors qu’il travaillait, ce qui a provoqué de multiples contusions.

b. Son employeur B______ était assuré pour les accidents professionnels et non professionnels de ses employés, auprès de la SUVA Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (ci-après : la SUVA), qui a pris en charge les suites de l’accident du 18 janvier 2019.

B. a. Par courrier du 20 mai 2019, la SUVA a informé l’assuré que, de l’avis de son médecin d’arrondissement, une incapacité de travail dans son activité de monteur de faux plafonds n’était plus justifiée. Dès lors, il était apte à travailler à 100% dès le 1er juin 2019. L’indemnité journalière lui serait donc allouée en conséquence.

b. Dans un rapport du 26 juin 2019, faisant suite à un examen de l’assuré pratiqué le 24 juin 2019, le docteur C______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et médecin d’arrondissement de la SUVA, a retenu en substance que l’assuré présentait une arthrose cervicale et que cet état pathologique préexistant, d’étiologie dégénérative, avait été déstabilisé de manière temporaire par l’accident du 18 janvier 2019.

c. Par décision du 9 juillet 2019, la SUVA, se référant à l’appréciation de son médecin d’arrondissement, a estimé que les troubles qui subsistaient aujourd’hui n’étaient plus dus à l’accident mais exclusivement de nature maladive. Aussi a-t-elle mis fin aux prestations d’assurance avec effet au 31 juillet 2019 au soir.

d. Le 7 septembre 2019, l’assuré a formé opposition à cette décision en indiquant qu’il avait encore mal à la nuque, la tête et l’épaule. Aussi invitait-il la SUVA à lui rembourser les frais qu’il avait encourus en août et septembre.

e. Par décision sur opposition du 14 octobre 2019, la SUVA a confirmé
sa décision du 9 juillet 2019 et invité l’assuré à s’adresser à « ses assureurs-maladie ».

f. La décision sur opposition de la SUVA n’a pas été querellée par l’assuré et est entrée en force.

g. Par courrier du 25 octobre 2019 adressé à l’assuré, MUTUEL ASSURANCES SA (ci‑après : MUTUEL ou la défenderesse) a convoqué ce dernier pour un examen médical, en date du 13 novembre 2019, chez le docteur D______, spécialiste FMH en rhumatologie, « afin de pouvoir nous déterminer avec précision sur votre droit à l’indemnité journalière pour perte de gain ».

h. Par courrier, également daté du 25 octobre 2019, MUTUEL a invité l’assuré à déposer une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité compétent, relevant que l’assuré était en « incapacité de travail sans interruption notable depuis le 18 janvier 2019 ».

i. Dans un rapport d’expertise du 14 novembre 2019, le Dr D______ a posé le diagnostic de « status après chute dans les escaliers avec contusions multiples » en précisant que cette affection était sans effet sur la capacité de travail. Comme le Dr C______ l’avait mentionné, il n’y avait pas de limitation de la capacité
de travail chez cet assuré. Interrogé sur l’exigibilité d’une reprise du travail dans l’activité habituelle, respectivement dans une activité adaptée, l’expert a indiqué qu’une reprise était exigible « dès maintenant », y compris dans l’activité habituelle. Cependant, s’il se basait sur le rapport du Dr C______ « du 24 juin 2019 » (recte : du 26 juin 2019), cette conclusion était déjà valable à cette date, pour l’activité habituelle comme pour une activité adaptée.

j. Lors d’une « séance médicale » s’étant tenue le 3 décembre 2019 à l’initiative de MUTUEL, le docteur E______, médecin-conseil de cet assureur, a estimé qu’il n’y avait pas d’atteinte à la santé.

k. Par courrier du 6 décembre 2019, MUTUEL a indiqué que son médecin-conseil avait constaté sur la base des éléments médicaux en sa possession qu’il n’existait aucun motif médical empêchant une reprise à 100% de l’activité professionnelle habituelle au plus tard au mois de juin 2019. Ces mêmes constatations avaient également motivé le refus de la SUVA de verser des prestations. En conséquence, aucune indemnité journalière ne serait versée à partir du 1er août 2019.

l. Le 17 juin 2020, le Dr D______ a reçu une nouvelle fois l’assuré en vue de réaliser une seconde expertise à la lumière d’autres rapports médicaux, en partie postérieurs à la précédente expertise. Selon le rapport d’expertise du 18 juin 2020 rendu à la lumière de ces développements, l’appréciation faite dans le cadre de la première expertise restait d’actualité, en ce sens qu’il n’y avait pas de limitation de la capacité de travail chez cet assuré ; aucun bilan ni clinique, ni d’imagerie n’avait mis en évidence de lésion organique bien claire, susceptible d’expliquer le « tableau chronique persistant ». Invité à se prononcer sur l’exigibilité d’une reprise du travail dans l’activité habituelle, respectivement dans une activité adaptée, le Dr D______ a indiqué qu’une reprise était exigible, dès maintenant, comme il l’avait déjà mentionné en novembre 2019 dans le cadre de sa première expertise.

m. Par avis du 13 juillet 2020, le docteur F______, spécialiste FMH en médecine interne générale et médecin-conseil de MUTUEL, a estimé que la seconde expertise du Dr D______ confirmait en tous points la précédente. Aussi a-t-il conclu qu’il n’y avait aucun diagnostic incapacitant et que les conclusions de la première expertise du Dr D______ étaient toujours valables.

n. Par courriel du 3 août 2020, l’assuré s’est enquis de l’avancement de son dossier. Il était dans une situation difficile, tant au niveau de son état de santé que sur le plan financier.

o. Par courrier de son mandataire du 22 janvier 2021, l’assuré s’est adressé à MUTUEL en demandant une reconsidération au motif que les symptômes pour lesquels « une prise en charge avait été octroyée » persistaient toujours à ce jour.

p. Par courrier du 5 février 2021, MUTUEL a répondu au mandataire de l’assuré, en précisant qu’elle avait bien reçu son courrier relatif à l’incapacité de travail de son mandant, qui avait débuté le 18 janvier 2019 et que la demande était en cours de traitement.

q. Le 4 mars 2021, MUTUEL a écrit au conseil de l’assuré pour lui annoncer qu’elle maintenait sa prise de position du 6 décembre 2019.

C. a. Par mémoire de son mandataire, déposé en date du 22 novembre 2023, l’assuré a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) d’une demande en paiement contre MUTUEL, concluant à ce que celle-ci soit condamnée à lui verser des indemnités journalières pour un montant total de CHF 88’074.50, correspondant à 730 jours d’indemnités journalières à CHF 120.65 par jour et cela avec intérêts à 5% l’an, dès le 5 mars 2021.

Se référant au refus d’entrer en matière de MUTUEL du « 5 mars 2021 », le demandeur a fait valoir en substance qu’il présentait toujours à ce jour une incapacité de travail totale et que c’était donc à tort qu’il avait été privé de ses indemnités journalières par la défenderesse, qui n’avait pas tenu compte des certificats médicaux qu’il avait produits.

b. Par réponse du 20 décembre 2023, MUTUEL a considéré que la demande était irrecevable. Après sa fusion par absorption avec la société GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA, MUTUEL ASSURANCES SA avait été radiée du registre du commerce le 22 juin 2021. En conséquence, elle n’avait plus, ni la personnalité juridique, ni la capacité d’être partie à la procédure.

Si la chambre de céans ne déclarait pas irrecevable la demande en paiement, elle était invitée à constater que les indemnités journalières réclamées étaient de toute manière prescrites, si bien que la demande devait être rejetée.

Enfin, si la demande du 22 novembre 2023 n’était pas déclarée irrecevable ou rejetée en raison de la prescription des indemnités journalières réclamées, la défenderesse requérait respectueusement un nouveau délai pour se prononcer sur le fond.

c. Par duplique (recte : réplique) du 11 avril 2024, le demandeur, assisté d’un nouveau mandataire, a persisté dans ses conclusions et conclu, préalablement, à ce que la qualité de MUTUEL ASSURANCES SA en tant que défenderesse soit rectifiée et remplacée par GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA.

d. Le 24 avril 2024, la chambre de céans a interpellé les parties et, se fondant sur son devoir d’interpellation, leur a fixé un délai au 3 mai 2024 pour se prononcer sur la compétence de la chambre de céans.

e. Par détermination du 29 avril 2024, MUTUEL a estimé que le Tribunal administratif de première instance connaissait en première instance des litiges portant sur des assurances complémentaires à l’assurance-accidents obligatoire prévue par la loi fédérale sur l’assurance-accidents. Toutefois, le contrat d’assurance complémentaire dont il était question portait uniquement sur la maladie et non sur l’accident car B______ avait conclu un contrat d’indemnités journalières afin de couvrir uniquement la maladie, ce qui ressortait de la pièce n° 15a de la défenderesse, soit de la police d’assurance conclue avec B______.

f. Par détermination du 7 mai 2024, le demandeur a fait valoir en substance que sa demande était fondée sur une assurance complémentaire à l’assurance-maladie obligatoire prévue par la loi fédérale sur l’assurance-maladie. Étant donné que la contestation était relative à une assurance complémentaire de ce type, la chambre de céans était compétente pour connaître du litige qui lui était soumis.

g. Le 14 mai 2024, une copie de ce courrier a été transmise pour information à la défenderesse.

h. La cause a été gardée à juger, ce dont les partes ont été informées.

i. Les autres faits seront mentionnés, si nécessaire, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l’art. 7 du Code de procédure civile suisse du 19 décembre 2008 (CPC – RS 272) et à l’art. 134 al. 1 let. c de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ – E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations relatives aux assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale prévue par la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10), relevant de la loi fédérale sur le contrat d’assurance du 2 avril 1908 (loi sur le contrat d’assurance, LCA – RS 221.229.1).

Dans la mesure où le « contrat d’indemnité journalière selon la LCA » ici en cause, couvre uniquement l’incapacité de travail due à la maladie (cf. pièce 15a défenderesse), la chambre de céans est compétente à raison de la matière pour statuer sur la demande.

1.2 Sauf disposition contraire de la loi, pour les actions dirigées contre les personnes morales, le for est celui de leur siège (art. 10 al. 1 let. b CPC), étant précisé que l’art. 17 al. 1 CPC consacre la possibilité d’une élection de for écrite.

En l’occurrence, l’art. 33 des « conditions générales de l’assurance collective d’une indemnité journalière en cas de maladie selon la LCA » (ci-après : CGA) prévoit qu’en cas de contestations, le preneur d’assurance, l’assuré ou l’ayant droit, peut choisir soit les tribunaux de son domicile suisse, soit ceux du siège de l’assureur, soit ceux du lieu de travail suisse pour l’assuré domicilié à l’étranger.

Le demandeur ayant son domicile à Genève, la chambre de céans est compétente à raison du lieu pour connaître de la demande.

1.3 Les litiges relatifs aux assurances complémentaires à l’assurance-maladie ne sont pas soumis à la procédure de conciliation préalable de l’art. 197 CPC lorsque les cantons ont prévu une instance cantonale unique selon l’art. 7 CPC (ATF 138 III 558 consid. 4.5 et 4.6 ; ATAS/577/2011 du 31 mai 2011), étant précisé que le législateur genevois a fait usage de cette possibilité (art. 134 al. 1 let. c LOJ).

1.4 Pour le reste, la demande respecte les conditions formelles prescrites par les art. 130 et 244 CPC ainsi que les autres conditions de recevabilité prévues par l’art. 59 CPC, de sorte qu’elle est recevable.

2.              

2.1 À titre liminaire, il convient de se pencher sur la capacité pour défendre de GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA, sachant que le demandeur a ouvert action contre MUTUEL ASSURANCES SA.

2.2 La question de la qualité pour défendre relève, comme dans un procès civil,
du fondement matériel de l’action (cf. ATAS/1277/2012 du 23 octobre 2012
consid. 4a et la référence citée). A la qualité pour défendre, ou la légitimation passive, la personne qui est débitrice du droit matériel allégué. La légitimation passive relève ainsi du droit de fond puisqu’elle a trait au fondement matériel de l’action, mais elle n’emporte pas encore décision sur l’existence de la prétention de la demanderesse, que ce soit quant à son principe ou quant à la mesure dans laquelle elle la fait valoir. L’absence de légitimation passive conduit au rejet de la demande (ATF 111 V 342 consid. 1c ; 114 II 345 consid. 3a).

Selon l’art. 83 al. 4 CPC, en l’absence d’aliénation de l’objet du litige, la substitution de partie est subordonnée au consentement de la partie adverse ; les dispositions spéciales prévoyant la succession d’un tiers aux droits ou obligations des parties sont réservées.

Les « dispositions spéciales » réservées à l’art. 83 al. 4, 2e phr. CPC constituent des hypothèses susceptibles de toucher indifféremment le demandeur ou le défendeur, et se réfèrent à tous les cas de succession à titre universel qui, par définition, entraînent un changement de légitimation survenant par le seul effet de la loi, sans que la volonté des parties ne joue de rôle (cf. Nicolas JEANDIN, in Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 28 ad art. 83 et les références). Il en va notamment ainsi en cas de fusion ou de scission de sociétés (art. 22 et 52 de la loi fédérale sur la fusion, la scission, la transformation et le transfert de patrimoine du 3 octobre 2003 [loi sur la fusion, LFus ‑ RS 221.301]). Sous réserve des hypothèses visées à l’art. 83 al. 4, 2e phr. CPC, la substitution de partie n’est pas un moyen pour le demandeur pour corriger ses erreurs de procédure dans la désignation de celui qui a qualité pour agir ou pour défendre (ATF 142 III 782 consid. 3.2.2).

La désignation inexacte d’une partie – que ce soit de son nom ou de son siège – ne vise que l’inexactitude purement formelle, qui affecte sa capacité d’être partie, même si la désignation erronée correspond à un tiers qui existe réellement
(ATF 131 I 57 consid. 2.2). Elle peut être rectifiée lorsqu’il n’existe dans l’esprit du juge et des parties aucun doute raisonnable sur l’identité de la partie, notamment lorsque l’identité résulte de l’objet du litige (arrêt du Tribunal fédéral 4A_242/2016 du 5 octobre 2016 consid. 3.4, non publié in ATF 142 III 623 ; arrêts du tribunal fédéral 4A_560/2015 du 20 mai 2016 consid. 4.2 ; 4A_116/2015 du 9 novembre 2015 consid. 3.5.1, non publié in ATF 141 III 539 ; ATF 131 I 57 consid. 2.2 ; 114 II 335 consid. 3). Cela présuppose évidemment que la requête de conciliation, respectivement la demande, aient été effectivement communiquées à la partie qui a la qualité pour défendre, et non à un tiers, en d’autres termes qu’elle en ait eu connaissance, à défaut de quoi il n’est évidemment pas possible de lui imputer qu’elle aurait compris ou dû comprendre, selon les règles de la bonne foi, que l’action a été ouverte contre elle (arrêt du Tribunal fédéral 4A_560/2015 précité consid. 4.3.1 in fine).

2.3 En l’espèce, il ressort de l’extrait du registre du commerce du Bas-Valais (pièce 59 défenderesse) que les actifs et passifs envers les tiers de MUTUEL ASSURANCES SA ont été repris par GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA et que MUTUEL ASSURANCES SA a été radiée par suite de fusion le 22 juin 2021. Il s’ensuit qu’une substitution des parties au profit de GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA a eu lieu de plein droit. Au demeurant, dans son écriture du 29 avril 2024, GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA reconnaît être partie au « contrat d’indemnité journalière selon la LCA » ici en cause, rappelant ainsi qu’elle a succédé à MUTUEL ASSURANCES SA, dont elle a d’ailleurs produit la correspondance échangée avec le demandeur avant la fusion précitée. Dans ces circonstances, il n’existe aucun doute raisonnable sur le fait que le demandeur a désigné par inadvertance l’assureur qui était partie au contrat d’assurance précité jusqu’à la fusion du 22 juin 2021, soit MUTUEL ASSURANCES SA, et que c’était en réalité GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA qu’il entendait assigner en justice le 22 novembre 2023. En conséquence, la chambre de céans rectifiera la qualité des parties, MUTUEL ASSURANCES SA étant devenue, le 22 juin 2021, GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA.

3.             La LCA a fait l’objet d’une révision entrée en vigueur le 1er janvier 2022 (modification du 19 juin 2020 ; RO 2020 4969 ; RO 2021 357).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle qui était en vigueur lors de réalisation de l’état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence).

Selon la disposition transitoire relative à cette modification, seules les prescriptions en matière de forme (let. a) et le droit de résiliation au sens des
art. 35a et 35b (let. b) s’appliquent aux contrats qui ont été conclus avant l’entrée en vigueur de cette modification. S’agissant des autres dispositions de la LCA, elles s’appliquent uniquement aux nouveaux contrats (Message concernant la révision de la loi fédérale sur le contrat d’assurance, FF 2017 4812).

En l’occurrence, le contrat entre B______ et la défenderesse a été conclu avant le 1er janvier 2022 et l’objet du litige ne porte ni sur des prescriptions en matière de forme, ni sur le droit de résiliation au sens des art. 35a et 35b LCA, de sorte que les dispositions de la LCA applicables seront citées dans leur ancienne teneur.

4.             Sachant que la décision sur opposition du 14 octobre 2019 de la SUVA – niant le maintien du lien de causalité entre l’incapacité de travail invoquée et l’accident du 18 janvier 2019 au-delà du 31 juillet 2019 – est entrée en force, le litige porte sur le point de savoir si, du fait de la persistance de l’incapacité de travail invoquée, le demandeur peut bénéficier d’indemnités journalières pour cause de maladie à partir du 1er août 2019.

5.             À titre préalable se pose la question, soulevée par la défenderesse, de la prescription.

5.1 Le nouveau droit de la prescription est entré en vigueur le 1er janvier 2020. S’agissant du droit transitoire, le nouvel art. 49 du Titre final du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) a la teneur suivante : lorsque le nouveau droit prévoit des délais de prescription plus longs que l’ancien droit, le nouveau droit s’applique dès lors que la prescription n’est pas échue en vertu de l’ancien droit (al. 1). Lorsque le nouveau droit prévoit des délais de prescription plus courts que l’ancien droit, l’ancien droit s’applique (al. 2). L’entrée en vigueur du nouveau droit est sans effets sur le début des délais de prescription en cours, à moins que la loi n’en dispose autrement (al. 3). Au surplus, la prescription est régie par le nouveau droit, dès son entrée en vigueur (al. 4).

Selon l’art. 46 al. 1, 1ère phr. LCA (dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021), les créances qui dérivent du contrat d’assurance se prescrivent par deux ans à dater du fait d’où naît l’obligation.

Selon l’art. 46 LCA, modifié le 19 juin 2020 (RO 2020 4969), en vigueur depuis le 1er janvier 2022, sous réserve de l’al. 3, les créances qui découlent du contrat d’assurance se prescrivent par cinq ans à compter de la survenance du fait duquel naît l’obligation (al. 1, 1ère phr.). Les créances qui découlent du contrat d’assurance collective d’indemnités journalières en cas de maladie, se prescrivent par deux ans à compter de la survenance du fait duquel naît l’obligation (al. 3).

Selon la jurisprudence relative à l’art. 46 LCA révisé, à part la durée du délai de prescription, qui a été portée de deux ans à cinq ans, la réserve de l’al. 3 et des modifications rédactionnelles, la nouvelle teneur n’a rien changé à la disposition en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021 ; « l’obligation » est celle de l’assureur de fournir les prestations prévues dans le contrat d’assurance. Le « fait » marquant
le point de départ du délai de prescription est la réalisation du risque qui donne naissance à cette obligation de l’assureur. Ce « fait » n’est pas le même pour les prétentions issues des diverses catégories d’assurances (cf. arrêt du Tribunal fédéral 4A_22/2022 du 21 février 2023 consid. 5.2 et 5.2.1 et les arrêts cités). Pour les indemnités journalières par suite de maladie, l’obligation de prester de l’assureur naît, selon la jurisprudence, de l’incapacité de travail causée par une maladie, attestée par un médecin, et de l’expiration du délai d’attente (ATF 139 III 418 = JdT 2016 II 355 consid. 3). Le point de départ du délai de prescription est ainsi fixé de manière objective (ATF 139 III 418 consid. 3, arrêt du Tribunal fédéral 4A_228/2016 du 16 janvier 2017 consid. 2.1).

Lorsque l’assuré peut réclamer une indemnité distincte pour chaque jour, ces prestations ne se prescrivent pas en bloc mais séparément, dès le jour pour lequel chacune d’elles est exigible après l’attestation médicale de l’incapacité de travail et l’expiration du délai d’attente (revirement de jurisprudence, ATF 139 III 418 consid. 3 et 4). Pour que chaque indemnité journalière se prescrive séparément,
il faut toutefois que l’assuré puisse exiger le paiement de chaque indemnité journalière en continu. Tel n’est pas le cas lorsque l’obligation de prester de l’assureur dépend de conditions supplémentaires ou lorsque la répartition en indemnités journalières ne vise qu’à calculer l’ensemble des prestations, mais que la prestation ne peut être exigée qu’en bloc, ou à tout le moins pour une période couvrant plusieurs indemnités journalières (ATF 139 III 418 consid. 4.2).

Pour déterminer le « fait d’où naît l’obligation », soit le point de départ du délai de prescription, dans le cas concret, il faut donc analyser le contrat conclu par les parties pour en dégager tout d’abord le risque assuré, puis les éléments constitutifs qui doivent être réunis pour que l’assureur ait l’obligation d’indemniser l’assuré en raison de ce risque (arrêt du Tribunal fédéral 4A_488/2017 du 9 octobre 2018 consid. 4.1 et les références).

5.2 Selon l’art. 135 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations – RS 220), la prescription est interrompue lorsque le débiteur reconnaît la dette, notamment en payant des intérêts ou des acomptes, en constituant un gage ou en fournissant une caution (ch. 1) ou lorsque le créancier fait valoir ses droits par des poursuites, par une requête de conciliation, par une action ou une exception devant un tribunal ou un tribunal arbitral ou par une intervention dans une faillite (ch. 2).

Contrairement au droit public, où le délai de prescription est sauvegardé par tout acte préalable par lequel le créancier fait valoir de manière appropriée sa créance contre le débiteur et notamment par une simple déclaration écrite (voir ATF 135 V 74 consid. 4.2.1 et 133 V 579 consid. 4), en matière de droit privé, le délai de prescription ne peut être interrompu que par le biais des actes cités à l’art. 135 CO, lequel contient une liste exhaustive (Pascal PICHONNAZ, in Commentaire romand, Code des obligations I, 2021, n. 25 ad art. 135 CO). L’ouverture d’action au sens de l’art. 135 ch. 2 CO est une notion de droit fédéral ; elle se définit comme tout acte introductif ou préparatoire par lequel le créancier s’adresse pour la première fois au juge, dans les formes requises, afin d’obtenir la reconnaissance du droit qu’il invoque (ATF 118 II 487 consid. 3 ; 114 II 336 consid. 3a ; 110 II 389 consid. 2a).

5.3 En l’espèce, il ressort de la page de garde de la couverture d’assurance souscrite par B______ auprès de la défenderesse que sur les cinq types d’assurance à choix sur ce document pré-imprimé (« indemnité journalière selon la LCA ; assurance-accidents selon LAA ; assurance complémentaire à la LAA ; prévoyance professionnelle ; assurance-maladie complémentaire »), l’assurance effectivement convenue concerne uniquement « [l’]indemnité journalière selon la LCA ». Celle-ci couvre les conséquences économiques d’une incapacité de travail pour cause de maladie à hauteur de 80% du salaire assuré durant 730 jours sous déduction d’un délai d’attente de deux jours (cf. pièce 15a, défenderesse, p. 3/6).

Selon les CGA, auxquelles la police d’assurance souscrite renvoie, les prestations sont allouées par cas d’assurance, au maximum pour une durée de 730 jours en coordination LPP (art. 6 ch. 2 let. a CGA), l’incapacité de travail déterminante devant être d’au moins 25% (art. 13 ch. 1 let. a CGA). Par « cas d’assurance », on entend la survenance d’une incapacité donnant droit à des prestations ayant pour cause une ou plusieurs atteintes à la santé (art. 3 ch. 9 CGA). Lorsque l’incapacité en cours n’est plus due à un accident mais à une maladie, ou inversement, le délai d’attente est applicable au nouveau risque (accident, maladie), sauf lorsque les deux risques sont couverts par le même assureur (art. 13 ch. 11 let. d CGA). Selon l’art. 3 ch. 3 CGA, la maladie est définie comme toute atteinte involontaire à la santé physique, mentale ou psychique, médicalement et objectivement décelable, qui n’est pas due à un accident ou à ses suites et qui exige un examen, un traitement médical ou engendre une incapacité (art. 3 ch. 3, 1ère phr. CGA). Sauf indication contraire, le terme incapacité concerne autant l’incapacité de travail que l’incapacité de gain (art. 3 ch. 6 CGA). Enfin, l’art. 27 ch. 1 CGA précise que l’assureur intervient subsidiairement à tout autre assureur social ou privé couvrant la perte de salaire/gain, et ceci dans les limites de la couverture prévue dans la police.

Il n’est en l’occurrence pas contesté par les parties que le « fait d’où naît l’obligation » au sens de l’art. 46 al. 1 LCA (dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021, ici applicable) est une incapacité de travail médicalement justifiée qui, compte tenu de la cessation du lien de causalité avec l’accident du 18 janvier 2019 (cf. décision 9 juillet 2019 de la SUVA, confirmée sur opposition le 14 octobre 2019 puis entrée en force), n’avait pas à être prise en charge par l’assureur-accidents au-delà du 31 juillet 2019. En effet, cette incapacité reposait depuis sur des causes étrangères à l’accident et, par voie de conséquence, sur la maladie (cf. art. 3 ch. 3 CGA), fondant ainsi une obligation de la défenderesse de prester.

Indépendamment du bien-fondé de l’incapacité totale de travail invoquée par le demandeur pour la période à partir du 1er août 2019 (cf. réplique, p. 7 ; pièces 8 et 9 demandeur), qui est de toute manière contestée par les rapports d’expertise du
Dr D______ auxquels la défenderesse renvoie, cette dernière admet qu’elle aurait été tenue de prester au mieux du 1er août 2019 jusqu’à l’épuisement du droit aux prestations le 30 juillet 2021, soit durant 730 jours, et qu’en l’occurrence, à défaut d’acte interruptif de prescription entre le 1er août 2021 (dernier jour du délai de prescription de deux ans en ce qui concerne la première indemnité journalière réclamée en paiement, soit celle du 1er août 2019) et le 30 juillet 2023 (dernier jour de prescription en ce qui concerne la dernière indemnité journalière pouvant le cas échéant être réclamée, soit celle 30 juillet 2021), l’action du demandeur, ouverte le 22 novembre 2023, est de toute manière prescrite.

La chambre de céans considère qu’au regard des pièces du dossier, la position
de la défenderesse apparaît conforme aux dispositions contractuelles mises en exergue ci-dessus, ainsi qu’à la jurisprudence précitée (cf. consid. 5.1), et ne prête donc pas le flanc à la critique, si ce n’est qu’elle revient à faire abstraction du délai d’attente de deux jours stipulé (cf. pièce 15a défenderesse, p. 3/6), lequel reporterait la première indemnité exigible au 3 août 2019. Ce point n’est toutefois pas décisif pour l’issue du litige, la dernière indemnité journalière pouvant le
cas échéant être réclamée demeurant celle du 30 juillet 2021, compte tenu de l’imputation du délai d’attente sur la durée des prestations de 730 jours.

Le demandeur ne conteste pas – à juste titre – l’absence d’acte interruptif de prescription entre le 1er août 2021 (ou le 3 août 2021) et le 30 juillet 2023. Il soutient en revanche que selon l’art. 46 al. 3 LCA dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2022, la prescription de deux ans ne s’applique que pour « les cas [de] maladie » et qu’en l’occurrence, comme il s’agit à l’origine d’un « cas accident », ce serait un délai de prescription de cinq ans qui s’appliquerait, de sorte que pour la première indemnité journalière, qui était exigible pour le 1er août 2019, la prescription ne pourrait être acquise que le 1er août 2024.

La position du demandeur ne saurait être suivie : elle revient en effet à faire fi du principe selon lequel le dies a quo du délai de prescription dépend du moment où sont réunis tous les éléments constitutifs fondant l’obligation de prester, ce qui suppose, pour l’assurance ici en cause, qu’il y ait une incapacité de travail causée par une maladie, attestée par un médecin, et que le délai d’attente ait expiré (cf. ATF 139 III 418 = JdT 2016 II p. 355 consid. 3 précité). Le risque assuré étant, en l’espèce, une incapacité de travail causée par la maladie, l’argument tiré du fait qu’il s’agissait à l’origine d’un cas « accident » n’est donc pas pertinent. Pour le surplus, l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2022, de l’art. 46 LCA révisé ne change rien au fait que pour la dernière indemnité journalière qui pouvait le cas échéant être réclamée, la prescription était déjà acquise le 30 juillet 2023, soit à l’échéance d’un délai de deux ans, le nouvel art. 46 al. 3 LCA n’ayant pas modifié cette durée.

Enfin, on ne saurait considérer que la défenderesse commet un abus de droit en se prévalant de la prescription, dès lors qu’elle n’a pas amené astucieusement le demandeur à ne pas agir en temps utile, ni eu un comportement donnant à l’intéressé l’assurance qu’il serait payé et l’incitant donc à renoncer à entreprendre des démarches juridiques pendant le délai de prescription (voir notamment l’arrêt du Tribunal fédéral 5C.68/2000 du 13 juillet 2000 consid. 3a).

Dans ces conditions, en l’absence de tout acte interruptif de prescription, force
est de constater que les prétentions du demandeur en relation avec le versement d’indemnités journalières à partir du 1er août 2019 sont prescrites. La chambre de céans se dispensera en conséquence d’apprécier la valeur probante des rapports médicaux que les parties ont produits à l’appui de leur positions respectives.

6.              

6.1 Au vu de ce qui précède, la demande doit être rejetée.

6.2 Pour le surplus, il n’est pas alloué de dépens à la charge du demandeur (art. 22 al. 3 let. b de la loi d’application du code civil suisse et d’autres lois fédérales en matière civile du 11 octobre 2012 [LaCC – E 1 05]) ni perçu de frais judiciaires (art. 114 let. e CPC).

 

*****


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

Préalablement :

1.     Rectifie la qualité des parties, MUTUEL ASSURANCES SA étant devenue, le 22 juin 2021, GROUPE MUTUEL ASSURANCES GMA SA.

À la forme :

2.      Déclare la demande recevable.

Au fond :

3.        La rejette.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile (Tribunal fédéral suisse, avenue du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14), sans égard à sa valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. b LTF). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoqués comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) par le greffe le