Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/571/2024 du 15.07.2024 ( CHOMAG ) , REJETE
En droit
rÉpublique et | 1.1canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
| ||
A/1241/2024 ATAS/571/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 15 juillet 2024 Chambre 6 |
En la cause
A______
| recourant |
contre
OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI
|
intimé |
A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'assuré), né le ______1963, s'est inscrit à l'office cantonal de l'emploi (ci-après : OCE) et un délai-cadre d'indemnisation s'est ouvert en sa faveur dès le 2 février 2023.
b. Par décision du 11 mai 2023, le service des prestations cantonales en cas de maladie (PCM) de l'OCE a indiqué à l'assuré que sa caisse de chômage l'avait informé de son incapacité à compter du 21 mars 2023, que depuis le 19 avril 2023 il avait épuisé son droit aux prestations fédérales pour incapacité et qu'il dépendait dès lors des PCM, après un délai d'attente de deux jours ouvrables, soit du 20 au 21 avril 2023.
B. a. Le 18 octobre 2023, le service des PCM de l'OCE a rendu une décision demandant à l'assuré le remboursement de la somme de CHF 6'948.20. Lors de l'établissement du dossier de l'assuré, un gain assuré de CHF 4'117.-, ayant prévalu lors d'une prise en charge antérieure, avait été retenu pour base du versement de ses prestations. Or, la caisse de chômage l'avait indemnisé depuis le 2 février 2023, date d'ouverture du délai-cadre, avec un gain assuré de CHF 2'236.- et le montant total net des prestations versées rétroactivement à tort s'élevait à CHF 6'948.20.
b. Par acte du 31 octobre 2023, l'assuré s'est opposé à la décision précitée. Il a indiqué que depuis la fin de l'année 2019, il était chauffeur B______, que cette entreprise était en conflit avec l'état depuis de nombreuses années et que finalement un jugement avait été rendu par le Tribunal fédéral le 30 mai 2022, reconnaissant le statut de salarié aux chauffeurs B______. Au moment de la perception des PCM en avril 2023, il croyait que la situation s'était régularisée, soit que B______ avait déclaré l'entier des revenus versés à ses chauffeurs et payé les cotisations sociales rétroactivement. Or, apparemment, tel n'était pas le cas. En tout état de cause, son gain assuré devait être tel que celui figurant lors des premiers décomptes. Par ailleurs, il sollicitait la remise totale de l'obligation de restituer la somme réclamée en raison de sa bonne foi et de sa situation économique difficile.
c. Par décision du 7 mars 2024, l'OCE a rejeté l'opposition. L'assuré n'avait apporté aucun argument démontrant que la demande de remboursement du 18 octobre 2023 n'avait pas lieu d'être ou que le montant demandé en restitution était incorrect. Le fait que le Tribunal fédéral ait statué le 30 mai 2022 sur le statut de salarié des chauffeurs B______ n'était pas pertinent en l'espèce. Lorsque l'assuré s'était inscrit au chômage, il avait été informé de son gain assuré et avait été indemnisé par la caisse de chômage sur la base de ce gain assuré en février, mars et avril 2023. Le fait que le service des PCM l'ait indemnisé à tort n'avait aucun lien avec la procédure judiciaire concernant les chauffeurs B______ mais relevait d'une erreur de calcul dudit service que l'assuré était en mesure de réaliser. L'assuré avait été indemnisé les premiers mois par la caisse de chômage sur la base d'un gain assuré de CHF 2'236.- et ensuite le service des PCM l'avait indemnisé à tort sur la base d'un gain assuré de CHF 4'117.-. Le litige concernait la demande de remboursement du 18 octobre 2023 et non pas la demande de remise, de sorte que la question de la bonne foi de l'intéressé n'était pas pertinente.
C. a. Le 15 avril 2024, l'assuré a recouru auprès de la chambre de céans à l'encontre de la décision précitée. Il a expliqué ne pas être responsable de la situation, qu'il ne savait pas que le montant de ses prestations était supérieur à celui qu'il aurait dû recevoir car il ne connaissait rien à l'administration ni aux lois. S'il avait su que le montant qu'il recevait était incorrect, il aurait réagi. Il s'agissait d'une erreur administrative. Il n'avait pas de travail depuis deux ans, son seul revenu était les PCM et il n'était pas en mesure de restituer l'argent demandé.
b. Par réponse du 13 mai 2024, l'intimé a intégralement persisté dans sa décision du 7 mars 2024.
c. Invité par la chambre de céans à déposer d'éventuelles observations jusqu'au 5 juin 2024, le recourant ne s'est pas manifesté.
d. Sur ce, la cause a été gardée à juger.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).
En vertu de l’art. 134 al. 3 let. b LOJ, la chambre des assurances sociales connaît en outre des contestations prévues à l’art. 49 al. 3 de la loi en matière de chômage du 11 novembre 1983 en matière de prestations cantonales complémentaires (LMC - J 2 20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le présent recours est recevable (art. 49 al. 3 LMC, art. 89B de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 - LPA ; RS E 5 10).
2. Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de restitution d'un montant de CHF 6'948.20, réclamée au recourant.
3.
3.1 L'art. 7 let. a LMC prévoit à titre de prestations complémentaires cantonales de chômage les prestations en cas d’incapacité passagère de travail, totale ou partielle.
Selon l'art. 11 al. 1 LMC, les prestations sont égales aux indemnités de chômage perçues immédiatement avant l'incapacité de travail; la réalisation d'un gain intermédiaire est réservée.
3.2 En vertu de l'art. 19 LMC et de l'art. 25 LPGA, applicable par analogie, l'autorité compétente peut exiger la restitution de prestations indûment versées.
Aux termes de l'art. 25 al. 1 1ère phrase LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. Selon la jurisprudence, cela implique que soient réunies les conditions d'une reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA) ou d'une révision procédurale (art. 53 al. 1 LPGA) de la décision par laquelle les prestations ont été accordées (ATF 130 V 318 consid. 5.2).
Selon un principe général du droit des assurances sociales, l'administration peut reconsidérer une décision formellement passée en force de chose jugée et sur laquelle une autorité judiciaire ne s'est pas prononcée quant au fond, à condition qu'elle soit sans nul doute erronée et que sa rectification revête une importance notable. Par le biais de la reconsidération, on corrigera une application initiale erronée du droit, de même qu'une constatation erronée résultant de l'appréciation des faits (ATF 117 V 17 consid. 2c ; 115 V 314 consid. 4a/cc). En outre, par analogie avec la révision des décisions rendues par les autorités judiciaires, l'administration est tenue de procéder à la révision d'une décision entrée en force formelle lorsque sont découverts des faits nouveaux ou de nouveaux moyens de preuve, susceptibles de conduire à une appréciation juridique différente (ATF 126 V 23 consid. 4b et les références citées). Cela vaut aussi pour les prestations qui ont été accordées sans avoir fait l'objet d'une décision formelle (décision implicite prise dans le cadre d'une procédure simplifiée au sens de l'art. 51 al. 1 LPGA ; ATF 132 V 412 consid. 5).
Le droit de demander la restitution s'éteint un an après le moment où l'institution d'assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation (art. 25 al. 2 1ère phrase LPGA). Il s'agit de délais (relatif et absolu) de péremption, qui doivent être examinés d'office (ATF 133 V 579 consid. 4.1 ; 119 V 431 consid. 3a). Le délai relatif est de trois ans selon l'art. 25 al. 2 LPGA dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2021.
Le délai de péremption est sauvegardé une fois pour toutes lorsque l'autorité a accompli l'acte conservatoire que prescrit la loi. Est déterminant pour la sauvegarde du délai de péremption, le moment où la caisse a rendu sa décision de restitution (arrêt du Tribunal fédéral 8C_213/2016 du 4 novembre 2016 consid. 4.2 et les références).
Lorsque la restitution est imputable à une faute de l'administration, on ne saurait considérer comme point de départ du délai d'une année le moment où l'erreur a été commise par l'administration, mais le moment auquel celle-ci aurait dû, dans un deuxième temps (par exemple à l'occasion d'un contrôle) se rendre compte de son erreur en faisant preuve de l'attention requise. En effet, si l'on plaçait le moment de la connaissance du dommage à la date du versement indu, cela rendrait souvent illusoire la possibilité pour l'administration de réclamer le remboursement de prestations allouées à tort en cas de faute de sa part (ATF 124 V 380 consid. 1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_968/2012 du 18 novembre 2013 consid. 2.2 ; 8C_719/2008 du 1er avril 2009 consid. 4.1).
4.
4.1 En l'espèce, les conditions d'une reconsidération sont réunies. En effet, selon la jurisprudence, l'octroi illégal de prestations est réputé sans nul doute erroné (ATF 126 V 399 consid. 2b/bb et les références ; DTA 2002 n° 27 consid. 1a). Dans le cas concret, du 20 avril au 25 septembre 2023, des prestations ont été versées au recourant par le service PCM de l'OCE sur la base d'un gain assuré de CHF 4'117.-. Or, sa caisse de chômage l'avait indemnisé depuis le 2 février 2023, date d'ouverture de son délai-cadre, avec un gain assuré de CHF 2'236.-, de sorte que le gain pris en compte de CHF 4'117.- était erroné, ce que le recourant ne conteste pas. L'OCE a donc reconsidéré les prestations versées pour la période du 20 avril au 25 septembre 2023 avec un gain assuré de CHF 2'236.-. Le montant total net des prestations versées à tort s'élève à CHF 6'948.20.
La condition de l'importance notable de la rectification est de toute évidence réalisée lorsqu'on est en présence d'une prestation périodique (ATF 119 V 475 consid. 1c et les arrêts cités), étant rappelé qu'une somme de CHF 706.- est déjà considérée comme suffisamment importante par le Tribunal fédéral (DTA 2000 n° 40 p. 208 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C.11/05 du 16 août 2005 consid. 5.2 qui porte sur un montant indu de CHF 1'805.95).
La demande de restitution de l'OCE du 18 octobre 2023 a été déposée dans les délais légaux.
Partant, la demande de restitution de la somme de CHF 6'948.20 doit être confirmée.
4.2 Le recourant invoque sa bonne foi ainsi que son indigence.
Ce faisant, le recourant demande la remise de l'obligation de restituer. Celle-ci ne peut toutefois pas, à ce stade, être examinée, soit les conditions de la bonne foi de l'intéressé et les difficultés économiques de celui-ci (art. 19 al. 2 LMC), car elle ne peut être traitée sur le fond que si la décision de restitution est entrée en force, ce qui n'est en l'occurrence pas encore le cas, la remise et son étendue faisant l'objet d'une procédure distincte (cf. art. 4 al. 4 de l'Ordonnance du 11 septembre 2002 sur la partie générale du droit des assurances sociales [OPGA, RS 830.11], arrêts du Tribunal fédéral 8C_799/2017 ; 8C_814/2017 du 11 mars 2019 consid. 6 et les références).
Ainsi, il convient de transmettre la demande de remise de l'obligation de restituer à l'intimé, comme objet de sa compétence.
5. En conséquence, le recours est rejeté.
Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. Le rejette.
3. Transmet à l'intimé la demande de remise de l'obligation de restituer comme objet de sa compétence.
4. Dit que la procédure est gratuite.
5. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Adriana MALANGA |
| La présidente
Valérie MONTANI |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le