Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/473/2024 du 19.06.2024 ( AI ) , PARTIELMNT ADMIS
En droit
rÉpublique et | 1.1canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/2930/2021 ATAS/473/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 19 juin 2024 Chambre 4 |
En la cause
A______ représenté par Me Marie-Josée COSTA, avocate
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recourant |
contre
OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE |
intimé |
A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né le ______ 1969, est atteint du spina bifida depuis sa naissance. Il a depuis lors fait l’objet d’un suivi médical en raison de paralysies spastiques de ses quatre membres. Il a néanmoins pu suivre une scolarité normale, sauf l’éducation physique.
b. Par décision du 22 décembre 1992, il a été mis au bénéfice d’une rente d’invalidité extraordinaire en tenant compte d’une capacité résiduelle de travail de 30% et d’un taux d’invalidité de 70% à compter de mai 1990.
B. a. Le 29 mars 2007, l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l'OAI ou l’intimé) a procédé à une révision du droit à la rente de l’assuré.
b. Dans un questionnaire du 17 avril 2007, l’assuré a indiqué que son état de santé était toujours le même. De 2004 à 2005, il avait été sans activité et il travaillait actuellement à temps partiel comme auxiliaire pour B______ Ltd à l’Aéroport de Genève.
c. Dans un rapport du 22 juin 2007, le docteur C______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, exerçant à Bâle, a estimé la capacité de travail de l’assuré à 50% au maximum dans le poste de travail occupé dès janvier 2007. Il n’y avait pas eu de changement dans les diagnostics. Son état de santé était stable. L’assuré avait toujours de très grosses difficultés à trouver un travail. Le traitement en cours était une psychothérapie.
d. Le 20 octobre 2007, l’assuré a informé l’OAI ne pas être en possession d’un contrat de travail, car il était agent auxiliaire avec un taux variable (entre 30 et 50%) selon les besoins de l’entreprise et son état de santé.
e. Selon un rapport de réadaptation professionnelle du 12 janvier 2010, le poste que l’assuré occupait actuellement était bien adapté à son état de santé en travaillant entre douze et 20 heures par semaine, plus des remplacements maladie, soit quatre heures par jour trois à cinq fois par semaine. Sur la base des revenus obtenus entre 2007 et 2009, son salaire annuel était extrapolé à CHF 45'239.-.
f. Par décision du 3 mars 2010, l'OAI a retenu, sur la base de l’estimation du médecin traitant de l’assuré du 22 juin 2007, que l’état de santé de celui-ci était stationnaire et que son activité actuelle consistait, selon ses déclarations, en des entretiens de profiling avec des passagers à destination des États-Unis. Normalement, il effectuait entre douze et 20 heures par semaine, plus des remplacements maladie. Sur la base des revenus obtenus entre 2007 et 2009, l’OAI avait constaté une amélioration de sa capacité de gain sur une longue durée. L’assuré occupait un poste de travail bien adapté à son état de santé et des mesures professionnelles ne permettraient pas d’améliorer sa situation. En conséquence, la rente entière qui lui était versée jusque-là était remplacée par un quart de rente, fondé sur un taux d’invalidité de 40%.
g. En 2012, l’assuré a été hospitalisé pour un abcès à la cuisse gauche et une infection au VIH a été détectée.
C. a. Le 3 novembre 2018, l’assuré a demandé la révision de son droit à la rente en raison d’une aggravation de son état de santé.
b. Selon un rapport établi par le Dr C______ le 10 mai 2019, les diagnostics avec effet sur la capacité de travail étaient un spina bifida depuis la naissance ainsi que des troubles de la personnalité mixte depuis la puberté (troubles de la personnalité dépendante, narcissique et anankastique), ainsi qu’un VIH depuis 2012. L’état de santé s’était modifié et l’assuré était incapable de travailler. Trois ans auparavant, il avait progressivement augmenté sa charge de travail d’environ 30% à 100%. Depuis lors, il avait eu de fréquentes maladies infectieuses, en particulier dans les voies respiratoires, et de l’épuisement avec des dépressions. Le Dr C______ avait suivi l’assuré de 1990 à 2007, puis depuis le 28 avril 2016. Fondamentalement, le patient montrait toujours le même schéma. Il trouvait facilement un emploi de 30 à 50%, qui correspondait à sa performance effective, et augmentait ensuite son taux d’activité jusqu’à 100%, parce qu’il faisait du bon travail et voulait montrer ce qu’il pouvait faire. Il dépassait ainsi régulièrement ce qu’il pouvait vraiment faire, ce qui provoquait chez lui un effondrement sur les plans mental et physique ou l’abandon de poste. En été 2016, il avait vécu un épisode dépressif après un poste de travail particulièrement exigeant avec des heures de travail irrégulières. Il avait ensuite accepté un poste à 100% et n’avait pas tardé à être fréquemment malade avec des infections des sinus maxillaire et frontal ainsi que des pneumonies. En été 2018, il avait eu un abcès à la cuisse gauche qui avait dû être opéré, raison pour laquelle il avait été hospitalisé pendant un mois. Depuis son infection par le VIH en 2012, sa défense contre les infections était affaiblie. Il avait un traitement médicamenteux qui l’affaiblissait, le fatiguait et pesait sur lui. L’assuré n’arrivait pas se limiter et se surmenait régulièrement.
Le travail de guide touristique était vraiment satisfaisant pour lui, mais il ne pouvait plus l’exercer en raison des longues journées de travail qui dépassaient de loin ses capacités réelles. Il avait recherché des emplois dans des domaines similaires, à l’aéroport ou aux Chemins de fer fédéraux suisses (CFF), mais il avait toujours atteint ses limites et était retombé dans des maladies physiques, un épuisement mental et la dépression. Son côté narcissique ne pouvait accepter cela, car il était conscient qu’il pourrait en principe faire beaucoup plus. Il y avait un conflit entre ses capacités théoriques et réelles. Le côté compulsif de l’assuré renforçait l’augmentation de son engagement au travail, ce qui le rendait encore plus vulnérable. Il supportait très mal le stress ainsi que la pression, face auxquels il réagissait immédiatement avec des maladies. Il était totalement incapable de travailler comme guide touristique depuis le 24 septembre 2018.
Il pourrait travailler au maximum à 50% dans une activité adaptée, avec une charge de travail limitée à deux heures à la fois environ et avec de longs temps de récupération. Physiquement, il était performant à 0% à cause du spina bifida.
c. Dans un rapport du 19 novembre 2019, le service de pneumologie des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : les HUG) a indiqué suivre l’assuré depuis août 2018 dans le cadre d’une affection respiratoire à répétition. L’atteinte strictement pneumologique n’entraînait pas d’incapacité de travail.
d. Le 26 novembre 2019, la docteure D______, médecin interne, du service des maladies infectieuses des HUG, a indiqué que l’assuré était suivi pour une infection VIH diagnostiquée en 2012, laquelle était bien contrôlée par traitement antirétroviral. Il était en bon état général et le status médical était sans particularité des points de vue cardiologique, pneumologique, abdominal et ORL. Il présentait de nombreuses lésions cutanées qui étaient suivies par les dermatologues des HUG. Il était asymptomatique à l’heure actuelle et il n’y avait pas d’atteinte particulière à sa capacité de travail.
e. Dans un rapport du 1er novembre 2019, le Dr C______ a indiqué au SMR qu’en ce moment, l’assuré était surtout physiquement réduit, car la pneumonie dont il souffrait ainsi que son traitement médicamenteux (antibiotiques et pour le VIH) le fatiguaient. Il ne pouvait travailler que dans une mesure réduite en raison de son infirmité et de ses maladies physiques. Son côté compulsif, qui exigeait qu’il travaille parfaitement, le fatiguait encore plus. Il se trouvait donc dans un cercle vicieux. Rien n’était possible pour le moment. Lorsqu’il serait guéri de sa pneumonie, il voulait, si ses forces le lui permettaient, reprendre le travail et prévoir des voyages.
Le fait d’être constamment confronté à ses limites et d’être conscient de ne pas pouvoir mener une vie normale consommait de l’énergie psychique. La question de l’énergie était le problème central de l’assuré, que ce soit mentalement ou physiquement. Il serait apte au travail et productif de 30 à 50%, lorsqu’il serait remis de sa pneumonie. Il avait besoin de longues et fréquentes périodes de récupération. Tout travail physique était exclu en raison du spina bifida. Il ne devait pas entrer en contact avec d’autres personnes, à cause du risque d’infection. En raison de sa fatigabilité, sa charge de travail quotidienne possible était réduite à trois à quatre heures, avec un rendement de 50 à 80%. L’idéal serait un travail de trois à quatre heures par jour pouvant être réparti sur toute la journée avec la possibilité de récupérer.
f. Le 5 juin 2020, le Dr C______ a indiqué que l’assuré était très déprimé, sans espoir, agité, nerveux et désespéré, principalement en raison de la procédure en lien avec l’assurance-invalidité, qui prenait beaucoup de temps, et du fait qu’il n’avait plus d’argent pour vivre, ce qui l’inquiétait pour son avenir financier. Entre-temps, il avait perdu son emploi, ce qui n’avait pas amélioré son état d’esprit. Il était gravement suicidaire et complètement renfermé dans son appartement à cause de sa dépression et de la pandémie. Depuis le rapport de novembre 2019, son état s’était considérablement détérioré. Pour le moment, il n’y avait pas de consultation, car l’assuré n’osait pas quitter sa maison ni utiliser les transports en commun, à cause de la pandémie et en raison de son état psychique. Aucun travail n’était possible même dans les conditions les plus idéales. L’assuré prenait une quantité énorme de médicaments prescrits par les HUG.
g. Le 5 août 2020, l’OAI a informé l’assuré que les docteures E______, spécialiste FMH en neurologie, et F______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, du BEM Riviera Sàrl (ci-après : le BEM), de Montreux, avaient été mandatées pour procéder à une expertise de son cas.
h. Selon le rapport d’expertise du BEM du 9 décembre 2020, il n’y avait pas de diagnostic incapacitant au niveau somatique. Sur le plan psychique, étaient retenus comme diagnostics incapacitants un trouble de la personnalité anankastique, un trouble anxieux sans précision et un épisode dépressif d’intensité moyenne. Au plan psychique, l’assuré avait de très faibles ressources. Les facteurs de surcharge étaient la passivité. Au plan somatique, la capacité de travail dans l’activité habituelle (activité majoritairement sédentaire d’employé d’une agence de voyages) était entière, à condition que le lieu de travail soit proche du domicile. Au plan psychique, la capacité de travail était de 50% dans l’activité habituelle et de 70% dans une activité adaptée, en raison du besoin de l’assuré de faire des pauses et de prendre des moments pour ne pas s’épuiser, étant précisé que l’activité habituelle était adaptée sur le plan somatique.
i. Selon une note de travail du 28 mai 2021, le salaire de l’assuré dans la dernière activité avant licenciement était de CHF 73'450.-, soit CHF 36'725.- à 50%. La capacité de travail dans une activité adaptée était de 70%, ce qui correspondait à CHF 42'693.-, selon l’ESS (Enquête suisse sur la structure des salaires), avec un abattement de 10%. Le plus haut revenu exigible était retenu, à savoir CHF 42’693.-. Comparé avec le revenu sans invalidité, le taux d’invalidité était de 48%, ce qui correspondait au droit à un quart de rente pour l’assuré.
j. L’OAI a rendu un projet de décision le 1er juin 2021 refusant l’augmentation de la rente d’invalidité de l’assuré.
k. Le 1er juillet 2021, ce dernier a formé opposition au projet de décision de l’OAI, concluant à l’octroi d’une rente entière d’invalidité et en produisant un rapport établi par le Dr C______ le 22 juin 2021, selon lequel l’assuré n’était même pas capable de travailler à 50%. Son état se détériorait et il y avait peu de chances de guérison.
l. Par décision du 17 août 2021, l’OAI a maintenu son projet de décision du 1er juin 2020.
D. a. L’assuré a formé recours contre la décision de l’OAI auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) le 7 septembre 2021, concluant à son annulation, à ce qu’une expertise médicale judiciaire soit ordonnée et à l’octroi d’une rente entière d’invalidité dès janvier 2019, avec suite de dépens.
Il contestait disposer encore d’une capacité de travail et les revenus retenus pour calculer le degré d’invalidité. Subsidiairement, il contestait le calcul du taux d’invalidité.
b. Le recourant a été entendu par la chambre de céans le 28 septembre 2022.
c. Par ordonnance du 15 août 2023 (ATAS/598/2023), la chambre de céans a ordonné une expertise qu’elle a confiée à la docteure G______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, ainsi qu’à la docteure H______, spécialiste en médecine interne générale. Elle a notamment relevé que l’experte psychiatre avait estimé surprenant que le Dr C______ n’ait jamais instauré de traitement antidépresseur, ce qui apparaissait contradictoire avec le fait qu’elle avait mentionné précédemment que le recourant lui avait indiqué avoir pris une fois des antidépresseurs.
L’experte psychiatre avait relevé que l’assuré était suivi par le Dr C______ depuis 2012 et qu’il n’était pas au bénéfice d’un traitement médicamenteux, sans commenter ce fait, qui était pourtant contredit par le rapport du Dr C______ du 1er novembre 2019, qui attestait que le recourant prenait des antibiotiques et des médicaments pour traiter le VIH. L’anamnèse à laquelle l’experte avait procédé apparaissait ainsi incomplète. La question du traitement médicamenteux du recourant aurait mérité des questions complémentaires de l’experte, tant au recourant qu’au Dr C______. Cette critique du travail de l’experte donnait un certain poids au sentiment du recourant de ne pas avoir été entendu par celle-ci. Il avait en effet indiqué à la chambre de céans que l’experte s’était positionnée en hauteur, de façon humiliante, qu’elle prenait des notes sur son ordinateur, qu’elle lui avait posé des questions sans le regarder et qu’elle passait à la question suivante, s’il ne répondait pas dans les trois secondes. Le recourant avait encore fait valoir qu’alors que l’expertise avait pour but de déterminer l’évolution de son état de santé à compter d’octobre 2018, date de l’annonce de son aggravation, les experts n’avaient pas pris en compte qu’il souffrait d’une grave pneumonie, qui était encore traitée par de puissants antibiotiques au moment de la réalisation de l’expertise, soit plus de deux ans après.
Dans l’expertise du BEM du 9 décembre 2020, la pneumonie était mentionnée dans le résumé des rapports établis les 20 mai et 1er novembre 2019 par le Dr C______, dans le résumé du rapport établi par le docteur I______, du service de pneumologie des HUG, du 19 novembre 2019, et dans le résumé médico-assécurologique commun. Cela étant, il fallait constater que cette maladie n’était effectivement pas mentionnée dans le résumé médico-assécurologique commun, qui ne se référait qu’au rapport du Dr C______ du 10 mai 2019, mais pas à celui du 1er novembre 2019, qui évoquait la pneumonie du recourant. Cette maladie n’était pas non plus mentionnée dans les diagnostics somatiques, même non invalidants, ce qui n’apparaissait pas correct. Cette maladie devait en effet être prise en compte par les experts pour déterminer si elle était incapacitante en soi, étant relevé que dans son rapport du 1er novembre 2019, le Dr C______ indiquait qu’à ce moment, le recourant était surtout physiquement réduit, car il souffrait d’une pneumonie qui le fatiguait. Ils devaient également se prononcer sur son influence sur la capacité globale de travailler du recourant, à titre de comorbidité, ou dans ses ressources, dans le cadre de l’appréciation de la capacité de travail sur le plan psychiatrique (effet de la fatigue notamment), ce que le bref rapport établi du 19 novembre 2019 par le service de pneumologie des HUG ne permettait pas d’exclure, quand bien même il retenait que l’atteinte strictement pneumologique n’entraînait pas d’incapacité de travail. Les experts n’avaient d’ailleurs pas non plus mentionné le VIH dans les diagnostics de leur appréciation consensuelle.
Il apparaissait en outre que la pneumonie pouvait également avoir une incidence sur l’atteinte psychique du recourant, puisque selon ce dernier, son traitement antidépresseur avait dû être interrompu pendant environ deux ans, en raison des antibiotiques pris pour soigner la pneumonie. Or, l’experte s’était référée au rapport établi le 1er novembre 2019 par le Dr C______, sans mentionner ni discuter la pneumonie évoquée dans ce rapport.
Les experts avaient admis une aggravation de son état de santé en 2019-2020, sans en tirer des conséquences sur sa capacité de travail. L’experte psychiatre avait indiqué que l’état de santé s’était modifié entre 2018 et 2020 avec une récupération de sa capacité de travail. Or, à la question suivante, elle avait répondu que l’incapacité de travail de l’assuré était restée identique tant dans l’activité habituelle que dans une activité adaptée, ce qui paraissait contradictoire.
Les conclusions de l’experte neurologue n’avaient pas été contestées sur le plan purement neurologique et elles devaient être considérées comme probantes. Il apparaissait toutefois nécessaire que l’examen somatique du recourant soit complété pour prendre en compte ses atteintes infectiologiques dans l’appréciation globale de sa capacité de travail et l’évolution de celle-ci depuis novembre 2018.
d. Dans son rapport du 27 novembre 2023, la Dre H______ n’a pas posé de diagnostic avec répercussion sur la capacité de travail et a posé comme diagnostic sans répercussion sur la capacité de travail, des lésions de Kaposi dès 2012, une pneumonie en 2018, un nodule pulmonaire d’actinomyces diagnostiqué en 2019, une atteinte des petites voies aériennes sur tabagisme (2020), une bronchomalacie asymptomatique (2020), une infirmité moteur cérébrale depuis l’enfance et une hypertension artérielle traitée et HIV sous thérapie dès 2012. Elle concluait que le recourant était capable d’exercer son ancienne activité lucrative et qu’il n’y avait pas de limitation fonctionnelle somatique dans une activité de bureau. Il présentait une légère boiterie en lien avec son infirmité congénitale depuis l’enfance.
e. Dans son rapport du 5 décembre 2023, la Dre G______ a posé le diagnostic avec répercussion sur la capacité de travail de trouble mixte de la personnalité (F61.0), apparu probablement dès l’adolescence et le jeune âge adulte. Elle a posé comme diagnostics sans répercussion sur la capacité de travail un trouble dépressif récurrent, actuellement en rémission, premier épisode probablement au début de l’âge adulte (F33.4). Les troubles mixtes de la personnalité de l’expertisé (dépendance, narcissique, obsessionnel-compulsif) généraient des difficultés pour terminer les tâches, augmentait la tension interne et le sentiment de pression, créait des difficultés à déléguer le travail et des tensions avec les collègues du fait d’un certain niveau de rigidité. Ils généraient également un besoin de pouvoir et de reconnaissance au travail et rendait difficile le fait d’exprimer un désaccord, de peur de ne pas être apprécié et validé, générant par moment des symptômes de la lignée dépressive et un sentiment de non reconnaissance sur le plan professionnel. Les conséquences plus globales de ce diagnostic pouvaient alors être un sentiment de fatigue générale et d’épuisement menant à des arrêts maladie ou à quitter un emploi. De ce fait, la capacité de travail dans l’activité habituelle était de 50% au maximum.
Dans une activité adaptée, on retrouvait les mêmes conséquences sur la capacité de travail mais avec moins d’impact sur le travail et le maintien d’une activité sur plusieurs années. La capacité de travail dans une activité adaptée, c’est-à-dire sous forme de demi-journées avec la possibilité de faire des pauses régulièrement, était au minimum de 50% dans un premier temps. Ce pourcentage pourrait être éventuellement augmenté à terme à 60 ou 70% après évaluation. On pouvait imaginer qu’il serait alors nécessaire de mettre en place un coaching au travail pour aider le recourant à éviter les écueils dans lesquels ses troubles mixtes de la personnalité pouvaient le mener. Sur le plan psychiatrique, depuis mars 2010, il semblait qu’en général et en dehors des épisodes de rechute dépressive, le recourant présentait une incapacité de travail à 50%. Il ressortait clairement de son parcours professionnel que lorsque son taux d’activité dépassait un 50%, il n’arrivait pas à le maintenir du fait de ses difficultés psychiques.
L’exigibilité d’une activité lucrative adaptée était de 50% depuis 2010. Le domaine d’activité adapté serait un travail de bureau sans port de charges et sans nécessité de se déplacer. Il serait également nécessaire de travailler des demi-journées de quatre heures au maximum avec la possibilité de faire des pauses.
f. Le 10 janvier 2024, l’intimé a considéré que l’expertise judiciaire était convaincante. Toutefois, dans la mesure où l’experte psychiatre retenait une capacité de travail de 50% avec une augmentation progressive à 70%, tout en retenant une exigibilité de 50% depuis 2010, il lui semblait opportun de la questionner sur la progression indiquée, quel laps de temps serait nécessaire pour passer d’un 50% à un 70% ? Une capacité de 70% était-elle exigible et si oui depuis quand ?
g. Le 9 janvier 2024, le recourant a relevé que l’experte psychiatre ne se prononçait pas vraiment sur l’évolution de son état de santé et qu’elle se déterminait essentiellement sur son état actuel, ce qui violait non seulement la jurisprudence en la matière mais également la mission d’expertise qui prévoyait expressément que l’experte devait se prononcer clairement sur l’évolution à compter de 2010. L’experte ne mentionnait pas de taux de capacité ou d’incapacité de travail pendant les périodes de rechute dépressive, soit notamment entre 2018 et 2020, et se limitait à retenir une incapacité de travail de 50% dans les périodes hors épisode de rechute dépressive. Si dans les moments de stabilité le recourant avait présenté une incapacité de travail de 50% comme le retenait l’experte, cela impliquait que lors des épisodes de rechute dépressive, il était totalement incapable de travailler. Au jour de l’examen, l’experte retenait une capacité de 50% dans une activité adaptée, soit un travail de bureau qui devait permettre une activité sous forme de demi-journées, avec en plus la possibilité de faire des pauses régulièrement, ce qui impliquait qu’il fallait prendre en compte une diminution de rendement même avec une activité à 50%.
La position de l’experte sur le rendement était toutefois confuse, puisqu’elle indiquait que la diminution de rendement était incluse dans le taux de capacité de travail, ce qui était contradictoire avec ses conclusions précédentes qui mentionnaient spécifiquement une activité sur des demi-journées, plus une diminution de rendement en raison de la nécessité de faire des pauses.
L’experte ne développait en rien comment une pneumonie aussi grave que celle du recourant, qui avait nécessité deux ans d’antibiotiques n’aurait pas eu d’effet sur sa capacité de travail par le passé. Les atteintes physiques avaient par ailleurs été manifestement sous-estimées.
Dans l’appréciation consensuelle, il était soudainement fait état d’une capacité de travail de 70% sur le plan psychique dans une activité adaptée, tout en précisant qu’il faudrait débuter à 50% sur des demi-journées puis augmenter jusqu’à 70% au maximum, ce qui différait des conclusions de l’expertise psychiatrique.
Dans l’activité habituelle, il était retenu une capacité de travail de 50% pour des raisons psychiques.
Il fallait relever que sur le plan psychique, la différence entre l’activité adaptée et habituelle reposait uniquement sur le temps de travail diminué. En effet, dans son rapport, l’experte psychiatre partait du principe que l’activité habituelle était un emploi de bureau comme celle exercée par le passé par le recourant lorsqu’il travaillait comme agent de voyage et, dans celle-ci, il était retenu une capacité de travail de 50% au maximum.
L’augmentation du taux d’activité était une simple hypothèse, l’experte psychiatre précisant que toute tentative devrait être accompagnée de mesure et suivi par une nouvelle évaluation de l’état de santé.
Il était contradictoire de parler dans l’appréciation consensuelle, sur le plan psychiatrique, d’une capacité de travail différente de celle retenue dans l’expertise psychiatrique sans la moindre motivation.
h. Le 25 janvier 2024, la chambre de céans a demandé à l’experte psychiatre de compléter son rapport en tenant compte des observations des parties sur son expertise.
i. Le 5 février 2024, l’experte psychiatre a précisé, s’agissant de l’évolution de l’état de santé du recourant depuis 2010, qu’elle était classique d’un trouble dépressif récurrent qui était une maladie chronique. En effet, il avait présenté les rechutes et rémissions habituelles que l’on observait dans cette pathologie. Le trouble mixte de personnalité du recourant évoluait peu à son âge. Le suivi psychiatrique et psychothérapeutique depuis l’âge de 18 ans l’avait aidé dans ses difficultés de gestion émotionnelle tant dans sa vie sociale et amoureuse que professionnelle et il n’aurait probablement pas pu continuer à travailler sans ce suivi.
Concernant le taux d’incapacité de travail pendant les rechutes dépressives, l’experte avait retenu que depuis mars 2010, il semblait qu’en général et en dehors des épisodes de rechutes dépressives, le recourant présentait une incapacité de travail de 50%. Cela sous-entendait que lors des épisodes de rechutes dépressives, il était très probablement en incapacité de travail à 100%. L’évaluation psychiatrique de ce taux à postériori ne pouvait que se fonder sur les dires de l’expertisé et de son psychiatre à l’époque.
Concernant la question du pourcentage d’activité du travail habituel et adapté, l’experte précisait que dans la situation du recourant, il semblait que l’activité habituelle en tant qu’agent de voyage était une activité adaptée à partir du moment où elle permettait de faire des pauses régulières, c’est-à-dire une pause de cinq à dix minutes environ deux fois sur une journée maximale de quatre heures de travail d’affilée. Cela étant relativement court (au total entre dix et vingt minutes de pauses sur quatre heures), on ne pouvait pas parler de diminution de rendement. Le taux de l’activité adaptée habituelle était ainsi confirmé à 50%. Il pourrait être augmenté à 60 ou 70% après réévaluation par un expert psychiatre. Cette augmentation du taux n’était ainsi pas encore exigible et dépendrait de l’évolution de la santé de l’expertisé.
j. Le 28 février 2024, le recourant a retenu que suite au complément d’expertise du 5 février 2024, une incapacité totale de travail devait être admise à tout le moins à compter du 15 octobre 2018, date depuis laquelle il avait été mis en arrêt de travail total en raison de son état de santé. Cette incapacité totale de travail avait duré jusqu’au jour des expertises judiciaires. Par la suite, il y avait lieu de prendre en compte une incapacité de travail de 50%. L’experte psychiatre sous-estimait le besoin de pauses et leur durée et il fallait retenir une diminution de rendement en plus de la capacité de travail partielle retenue. Il avait besoin de pauses bien plus longues. Il fallait encore retenir un abattement maximal compte tenu des spécificités de son cas. Le recourant persistait en conséquence intégralement dans ses conclusions antérieures.
k. Le 29 février 2024, l’intimé a indiqué n’avoir pas de motif de s’écarter des précisions apportées par l’experte psychiatre quant à la capacité de travail exigible.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]). Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss LPA).
2.
2.1 Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705).
En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).
En l’occurrence, le litige porte sur le droit à l’augmentation du quart de rente d’invalidité du recourant à une rente entière dès janvier 2019 en raison d’une aggravation de son état de santé qui serait survenue antérieurement au 31 décembre 2021, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur ancienne teneur.
2.2 L’art. 17 al. 1 LPGA dispose que si le taux d’invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée.
Tout changement important des circonstances propres à influencer le degré d’invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l’art. 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l’état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 134 V 131 consid. 3; 130 V 343 consid. 3.5). Tel est le cas lorsque la capacité de travail s'améliore grâce à une accoutumance ou à une adaptation au handicap (ATF 141 V 9 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 9C_622/2015 consid. 4.1). Il n'y a pas matière à révision lorsque les circonstances sont demeurées inchangées et que le motif de la suppression ou de la diminution de la rente réside uniquement dans une nouvelle appréciation du cas (ATF 141 V 9 consid. 2.3; 112 V 371 consid. 2b; 112 V 387 consid. 1b). Un motif de révision au sens de l'art. 17 LPGA doit clairement ressortir du dossier. La réglementation sur la révision ne saurait en effet constituer un fondement juridique à un réexamen sans condition du droit à la rente (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 111/07 du 17 décembre 2007 consid. 3 et les références). Un changement de jurisprudence n'est pas un motif de révision (ATF 129 V 200 consid. 1.2).
Le point de savoir si un changement notable des circonstances s’est produit doit être tranché en comparant les faits tels qu’ils se présentaient au moment de la dernière révision de la rente entrée en force et les circonstances qui régnaient à l’époque de la décision litigieuse. C’est en effet la dernière décision qui repose sur un examen matériel du droit à la rente avec une constatation des faits pertinents, une appréciation des preuves et une comparaison des revenus conformes au droit qui constitue le point de départ temporel pour l’examen d’une modification du degré d’invalidité lors d’une nouvelle révision de la rente (ATF 133 V 108 consid. 5.4; ATF 130 V 343 consid. 3.5.2).
Si les conditions de la révision sont données, les prestations sont, conformément à l’art. 17 al. 1 LPGA, modifiées pour l’avenir dans le sens exigé par le nouveau degré d’invalidité. Chaque loi spéciale peut fixer le point de départ de la modification ou encore exclure une révision en s’écartant de la LPGA (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 806/04 du 15 mars 2005 consid. 2.2.).
Dans le domaine de l’assurance-invalidité, le point de départ d’une modification du droit aux prestations est fixé avec précision.
Selon l’art. 88a RAI, si la capacité de gain ou la capacité d’accomplir les travaux habituels de l’assuré s’améliore ou que son impotence ou encore le besoin de soins ou le besoin d’aide découlant de son invalidité s’atténue, ce changement n’est déterminant pour la suppression de tout ou partie du droit aux prestations qu’à partir du moment où on peut s’attendre à ce que l’amélioration constatée se maintienne durant une assez longue période. Il en va de même lorsqu’un tel changement déterminant a duré trois mois déjà, sans interruption notable et sans qu’une complication prochaine soit à craindre.
Si la capacité de gain de l’assuré ou sa capacité d’accomplir les travaux habituels se dégrade, ou si son impotence ou encore le besoin de soins ou le besoin d’aide découlant de son invalidité s’aggrave, ce changement est déterminant pour l’accroissement du droit aux prestations dès qu’il a duré trois mois sans interruption notable. L’art. 29bis est toutefois applicable par analogie (al. 2).
Le juge ne s'écarte pas sans motifs impératifs des conclusions d'une expertise médicale judiciaire, la tâche de l'expert étant précisément de mettre ses connaissances spéciales à la disposition de la justice afin de l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné. Selon la jurisprudence, peut constituer une raison de s'écarter d'une expertise judiciaire le fait que celle-ci contient des contradictions, ou qu'une surexpertise ordonnée par le tribunal en infirme les conclusions de manière convaincante. En outre, lorsque d'autres spécialistes émettent des opinions contraires aptes à mettre sérieusement en doute la pertinence des déductions de l'expert, on ne peut exclure, selon les cas, une interprétation divergente des conclusions de ce dernier par le juge ou, au besoin, une instruction complémentaire sous la forme d'une nouvelle expertise médicale (ATF 125 V 351 consid. 3b/aa et les références).
2.3 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; 126 V 353 consid. 5b; 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).
2.4 Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu réaliser s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA).
La comparaison des revenus s'effectue, en règle ordinaire, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité (méthode générale de comparaison des revenus; ATF 128 V 29 consid. 1 ; 104 V 135 consid. 2a et 2b).
Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 et 128 V 174).
Le revenu d'invalide, il doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l'intéressé (ATF 135 V 297 consid. 5.2). Lorsque l'assuré n'a pas repris d'activité, ou aucune activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, contrairement à ce qui serait raisonnablement exigible de sa part, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base de données statistiques, telles qu'elles résultent de l’ESS (ATF 143 V 295 consid. 2.2 et la référence ; 135 V 297 consid. 5.2 et les références). Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table TA1 de l’ESS, à la ligne « total secteur privé » (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa), étant précisé que, depuis l'ESS 2012, il y a lieu d'appliquer le tableau TA1_skill_ level (ATF 142 V 178). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 126 V 75 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_58/2021 du 30 juin 2021 consid. 4.1.1). La valeur statistique - médiane - s'applique alors, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu'elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu'ils seraient en mesure de réaliser en tant qu'invalides dès lors qu'il recouvre un large éventail d'activités variées et non qualifiées (branche d'activités), n'impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (cf. arrêts du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1 et 9C_242/2012 du 13 août 2012 consid. 3). Il convient de se référer à la version de l'ESS publiée au moment déterminant de la décision querellée (ATF 143 V 295 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2016 du 4 août 2017 consid. 6.3).
La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 135 V 297 consid. 5.2 ; 134 V 322 consid. 5.2 et les références; 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). Il n'y a pas lieu de procéder à des déductions distinctes pour chacun des facteurs entrant en considération ; il faut bien plutôt procéder à une évaluation globale, dans les limites du pouvoir d'appréciation, des effets de ces facteurs sur le revenu d'invalide, compte tenu de l'ensemble des circonstances du cas concret (ATF 148 V 174 consid. 6.3. et les références). D'éventuelles limitations liées à la santé, déjà comprises dans l'évaluation médicale de la capacité de travail, ne doivent pas être prises en compte une seconde fois dans l’appréciation de l’abattement, conduisant sinon à une double prise en compte du même facteur (cf. ATF 146 V 16 consid. 4.1 et ss. et les références). L'étendue de l'abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d'appréciation (ATF 132 V 393 consid. 3.3).
Les limitations fonctionnelles justifiant une diminution de rendement déjà prises en compte dans l'évaluation de la capacité de travail n'ont pas à être retenues une seconde fois lors de la détermination de l'abattement (arrêt du Tribunal fédéral 9C_778/2020 du 27 août 2021 consid. 6 et la référence).
Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de constater que le travail à plein temps n'est pas nécessairement mieux rémunéré que le travail à temps partiel; dans certains domaines d'activités, les emplois à temps partiel sont en effet répandus et répondent à un besoin de la part des employeurs, qui sont prêts à les rémunérer en conséquence (ATF 126 V 75 consid. 5a/cc; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 8C_49/2018 du 8 novembre 2018 consid. 6.2.2.2). Cela étant, si selon les statistiques, les femmes exerçant une activité à temps partiel ne perçoivent souvent pas un revenu moins élevé proportionnellement à celles qui sont occupées à plein temps (cf., p. ex., arrêt du Tribunal fédéral 9C_751/2011 du 30 avril 2012 consid. 4.2.2), la situation se présente différemment pour les hommes; le travail à temps partiel peut en effet être synonyme d'une perte de salaire pour les travailleurs à temps partiel de sexe masculin (arrêt du Tribunal fédéral 8C_805/2016 du 22 mars 2017 consid. 3.2).
Un abattement sur le revenu d’invalide n’est en principe pas appliqué pour des personnes assurées dont la dernière activité impliquait des travaux physiquement contraignants et qui, après la survenance d’une atteinte à la santé, ne peuvent exercer plus qu’un travail légèrement ou moyennement contraignant, mais sans limitation de l’horaire de travail ni baisse de rendement, parce que le salaire statistique retenu dans leur cas est tiré d’un tableau de l’ESS correspondant à un faible niveau d’exigence englobant un grand nombre de tâches légères ou moyennement lourdes et que la personne assurée n’a pas à subir de ce seul fait une diminution de son revenu (arrêt du Tribunal fédéral 8C_381/2017 du 7 août 2017 consid. 4.2.2 et références citées).
3.
3.1 Le 29 février 2024, l’intimé a estimé n’avoir pas de motif de s’écarter de l’expertise judicaire complétée.
Le 28 février 2024, le recourant a estimé l’expertise partiellement probante et fait valoir que suite au complément d’expertise du 5 février 2024, une incapacité totale de travail devait être admise à tout le moins à compter du 15 octobre 2018, date depuis laquelle il avait été mis en arrêt de travail total en raison de son état de santé, jusqu’au jour des expertises judiciaires.
Le 5 février 2024, l’experte psychiatre a précisé qu’en dehors des épisodes de rechutes dépressives, l’expertisé présentait une incapacité de travail de 50% et que lors des épisodes de rechutes dépressives, il était très probablement en incapacité de travail à 100%. L’évaluation psychiatrique de ce taux a posteriori ne pouvait que se fonder sur les dires de l’expertisé et de son psychiatre à l’époque.
En l’occurrence, dès lors que le recourant a demandé la révision de son dossier le 3 novembre 2018, son droit à une rente ne peut être modifié que dès cette date au plus tôt (art. 88bis al. 1 let. a RAI). Seule sa capacité de travail depuis lors et jusqu’à la date de la décision querellée est pertinente, ainsi que son évolution jusqu’au jour de la décision querellée, le 17 août 2021. Il convient de l’établir sur la base des rapports médicaux du Dr C______, comme l’a préconisé l’experte psychiatre, étant précisé que cette appréciation est du ressort médical. Le 10 mai 2019, le Dr C______ a estimé que le recourant était totalement incapable de travailler comme guide touristique depuis le 24 septembre 2018. Le 1er novembre 2019, le Dr C______ a estimé que le recourant serait capable de travailler entre 30 à 50% quand il serait remis de sa pneumonie et, le 5 juin 2020, qu’il était totalement incapable de travailler pour des raisons psychiques. Dans la mesure où le service de pneumologie des HUG a attesté le 19 novembre 2019, que l’atteinte strictement pneumologique du recourant n’entraînait pas d’incapacité de travail, il se justifie de s’éloigner des conclusions du Dr C______ du 1er novembre 2019 et de retenir que le recourant était capable de travailler à son taux habituel du 1er novembre 2019 au 5 juin 2020. L’expertise de la Dre H______, jugée probante, confirme cette conclusion, puisqu’elle retient que le recourant a eu une pneumonie en 2018, qui a été traitée par antibiotiques, et qu’il n’y a pas eu d’incapacité durable sur le plan somatique.
Contrairement à ce que le recourant fait valoir, il n’y a pas lieu de retenir une diminution de rendement en sus de la capacité de travail de 50%, car l’experte psychiatre a précisé de manière convaincante que la diminution de rendement était incluse dans la capacité de travailler à 50% sur des demi-journées et que les pauses nécessaires entraient dans le cadre des pauses habituelles sur une demi-journée de travail.
Sur la base des conclusions de l’experte psychiatre, il y a ainsi lieu de retenir que la capacité de travail du recourant était de 50% du 1er novembre 2019 au 5 juin 2020.
Le recourant a été à nouveau à 100% en incapacité de travail du 5 juin 2020 jusqu’au jour de l’expertise, le 5 décembre 2023, date à laquelle l’experte psychiatre a estimé qu’il était capable de travailler à 50%.
3.2 Le recourant a droit à une rente entière d’invalidité pendant les périodes pendant lesquelles il était totalement incapable de travailler.
S’agissant de la période pendant laquelle sa capacité était de 50%, soit du 1er février 2020 (trois mois après l’amélioration de son état de santé du 1er novembre 2019) au 1er septembre 2020 (trois mois après la nouvelle aggravation de son état de santé dès le 5 juin 2020), il convient de calculer son droit à une rente. Selon la note de détermination du degré d’invalidité établie par l’intimé le 28 mai 2021, le revenu avec invalidité à prendre en compte en 2018 était de CHF 67'767.- selon le tableau TA1_tirage_skill_level, pour une activité de niveau 1 (pour un plein temps) avec un abattement de 10%.
Le recourant fait valoir qu’il avait droit un abattement maximum sur le revenu avec invalidité en raison du fait que compte tenu de ses atteintes à la santé, il était illusoire de retenir qu’il pouvait exercer une activité TA1, de niveau 1 du fait que seule une activité légère était possible. Il fallait également tenir compte des importantes limitations fonctionnelles et du taux d’occupation très réduit.
L’experte H______ n’a retenu comme limitation fonctionnelle qu’une légère boiterie qui limitait la marche et l’expertise judiciaire retient que le recourant est capable d’exercer son ancienne activité lucrative à 50% et qu’il n’a pas de limitation fonctionnelle somatique dans une activité de bureau. L’on ne peut ainsi soutenir que le recourant a d’importantes limitations fonctionnelles sur le plan somatique. Ses limitations psychiques sont déjà prises en compte dans la capacité de travail réduite. En outre, contrairement à ce que soutient le recourant, une activité TA1, niveau 1, n’inclut pas que des postes de travail lourds et manuels. Le marché du travail offre en effet un éventail suffisamment large d'activités légères accessibles sans aucune formation particulière, selon la jurisprudence.
L’abattement de 10% retenu par l’intimé prend en compte de manière correcte la situation du recourant, à savoir sa légère boiterie et le fait qu’il ne peut travailler qu’à temps partiel.
Il n’est enfin pas nécessaire d’actualiser des chiffres pris en compte en 2018 à 2020, car cela serait sans conséquence sur le taux d’invalidité, dès lors que tant les revenus avec que sans invalidité doivent être indexés.
Si l’on compare le revenu avec invalidité précité pris à 50%, moins un abattement de 10%, avec le revenu sans invalidité de CHF 82'000.-, qui n’a pas été remis en cause par le recourant, le taux d’invalidité est de 62.80%, ce qui lui ouvre le droit à un trois quarts de rente d’invalidité.
Le recourant a ainsi droit à une rente entière depuis le 1er décembre 2018 (trois mois après l’aggravation de son état de santé établie le 24 septembre 2018), puis à un trois quarts de rente dès le 1er février 2020 (trois mois après l’amélioration de son état dès le 1er novembre 2019) au 31 aout 2020 (trois mois après l’aggravation de son état dès le 5 juin 2020), puis une rente entière d’invalidité dès le 1er septembre 2020.
L’amélioration de son état constatée lors de l’expertise judiciaire en 2023 n’entre pas dans l’objet du litige, qui s’arrête au 17 août 2021 (date de la décision querellée).
4.
4.1 Le recourant obtenant partiellement gain de cause, il a droit à des dépens qui seront fixés à CHF 4'000.- (art. 61 let. g LPGA).
4.2 Les frais qui découlent de la mise en œuvre d'une expertise judiciaire pluridisciplinaire peuvent être mis à la charge de l’OAI (cf. ATF 139 V 349 consid. 5.4), si ce dernier a procédé à une instruction présentant des lacunes ou des insuffisances caractérisées et que l'expertise judiciaire sert à pallier des manquements commis dans la phase d'instruction administrative (ATF 137 V 210 consid. 4.4.2).
En l’espèce, les frais de l’expertise judiciaire seront mis à la charge de l’intimé, dès lors que celui-ci a suivi une expertise qui présentait des insuffisances caractérisées.
4.3 Un émolument de CHF 500.- (art. 69 al. 1bis LAI) sera mis à la charge de l’intimé.
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
A la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. L’admet partiellement-
3. Annule la décision du 17 août 2021.
4. Dit que le recourant a droit à une rente entière d’invalidité dès le 1er décembre 2018, puis à un trois quarts de rente dès 1er février 2020, puis à une rente entière dès le 1er septembre 2020.
5. Alloue CHF 4'000.- au recourant à titre de dépens, à la charge de l’intimé.
6. Met les frais de l’expertise judiciaire de CHF 11'746.32.-, selon les factures des 27 novembre 2023, 5 décembre 2023 et 5 février 2024 des Dresses H______ et G______, à la charge de l’intimé.
7. Met un émolument de CHF 500.- à la charge de l’intimé.
8. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Julia BARRY |
| La présidente
Catherine TAPPONNIER |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le