Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/427/2024 du 06.06.2024 ( AI ) , REJETE
En droit
rÉpublique et | 1.1canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
| ||
A/1435/2023 ATAS/427/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 6 juin 2024 Chambre 3 |
En la cause
A______
| recourante |
contre
OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE | intimé |
A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), née en 1981, de nationalité suisse, a souffert, dès 1999, de troubles du comportement alimentaire et de dépression.
b. Le 27 février 2003, elle a déposé auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI) une première demande de prestations.
c. Par décision du 27 mars 2007, l’OAI lui a reconnu le droit à une demi-rente d’invalidité limitée dans le temps, du 1er janvier 2001 (versement effectif dès le 1er février 2002, en raison de la tardiveté de la demande) au 31 mars 2004. Cette décision était fondée principalement sur les conclusions d’un examen clinique psychiatrique réalisé par le docteur B______. Celui-ci, dans un rapport du 31 janvier 2006, avait retenu les diagnostics de trouble de la personnalité émotionnellement instable et d’anorexie mentale atypique en rémission partielle, ayant entraîné une incapacité de travail de 50% de janvier 2000 à décembre 2003.
B. a. Par la suite, l’assurée a suivi des études de géologie à l’étranger, puis une formation en gemmologie, avant de travailler comme assistante administrative dans l’urbanisme, chargée de faillite auprès de l’Office des poursuites durant quatre ans, puis secrétaire juridique dans une étude d’avocats.
b. En mai 2017, elle a déposé une deuxième demande de prestations, en invoquant un épisode dépressif débuté en novembre 2016.
c. Par décision du 26 septembre 2018, l’OAI lui a nié le droit à toute prestation, l’incapacité de travail ayant duré moins d’une année.
Cette décision était fondée principalement sur les conclusions d’un rapport d’expertise psychiatrique rendu le 8 juin 2017 par le docteur C______. Celui-ci avait retenu les diagnostics d’épisode dépressif sévère récurrent en rémission partielle, d’épisode dépressif moyen, de troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation d’alcool (syndrome de dépendance, utilisation continue), de troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de sédatifs ou d’hypnotiques (syndrome de dépendance, en utilisation continue) et de traits de la personnalité émotionnellement labile, partiellement décompensés. Était aussi évoquée une suspicion de trouble de la personnalité de type borderline. Une reprise du travail était préconisée pour le 1er septembre 2017. L’amélioration attendue avait été confirmée par la psychiatre traitante, la docteure D______, à compter de juin 2017 (cf. certificat du 15 mars 2018).
C. a. En janvier 2021, l’assurée, qui avait repris dans l’intervalle une activité d’assistante de direction chez E______, a déposé une troisième demande de prestations, en invoquant une incapacité de travail totale depuis le 3 septembre 2018.
b. Les éléments suivants ont été recueillis lors de l’instruction, notamment :
- Dans un rapport du 7 février 2021, les Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) ont conclu à une pancréatite aigüe oedémato-interstitielle non compliquée.
- Dans un rapport du 22 mars 2021, la docteure F______, gastroentérologue, a indiqué que sa patiente présentait des épisodes de pancréatite aigüe dans un contexte de consommation éthylique, une stéatose hépatique, des crises d’épilepsie et des troubles psychiques. Elle a précisé qu’en dehors des périodes de crises, sa patiente, sur le plan digestif, était apte à travailler. Tel n’était selon elle en revanche pas le cas d’un point de vue psychique.
- Dans un rapport du 26 mars 2021, le docteur G______, spécialiste FMH en rhumatologie, a mentionné une histoire de polyarthralgies depuis septembre 2017 au niveau des mains, des poignets, du coude et de l’épaule droits, des chevilles à caractère inflammatoire, mais sans syndrome inflammatoire, ni signe clinique à l’échographie, donc mal définie. Ce médecin, interrogé sur la capacité de sa patiente à exercer son activité habituelle, l’a fixée à 0% depuis le 30 août 2017. Il a souligné les difficultés rencontrées par sa patiente au niveau des mains.
- Dans un rapport des HUG du 30 juillet 2021, il a été conclu à des crises psychogènes non épileptiques (PNES), ainsi qu’à des crises d’épilepsie généralisées symptomatiques (le 8 février 2019, le 16 mai 2019, le 20 juin 2019, puis deux fois en mai 2021). Il a été fait mention, à titre de comorbidités, d’un trouble anxio-dépressif avec deux tentamen, en 2016 et 2018, d’une polyarthrose, d’un syndrome de Gitelman, d’une stéatose hépatique d’origine toxique sur éthylisme chronique, d’une pancréatite à répétition (cinq épisodes dès 2017) d’origine probablement éthylique, elle aussi, d’une dépendance aux benzodiazépines et d’une polyarthrite. Il a été précisé que les crises généralisées étaient pour la plupart symptomatiques, en lien avec des sevrages d’alcool ou des troubles électrolytiques. Un traitement avait été instauré.
- Dans un rapport du 7 décembre 2021, le docteur H______, médecin traitant depuis 2019, a fait état d’une évolution fluctuante du point de vue somatique avec perturbation hépatique importante, corrigée en août 2021, pancréatite aigüe, crises d’épilepsie et crises de polyarthralgies. S’agissant des limitations fonctionnelles de travail, il a émis l’avis qu’elles devaient être définies par un psychiatre.
- Dans un rapport du 25 mai 2022, la docteure I______, du service de neurologie des HUG, a indiqué que les crises psychogènes fonctionnelles non épileptiques n’avaient pas de répercussion sur la capacité de travail, si elles étaient bien contrôlées. S’agissant des problèmes psychiatriques, elle a préconisé de s’adresser au spécialiste. Le traitement des troubles psychiatriques pouvait amener un bon pronostic. Concernant les crises d’épilepsie généralisées, elle a préconisé à titre de traitement principal l’éviction des facteurs provoquants (sevrage d’alcool, troubles électrolytiques) et un traitement par Prégabaline, précisant que, là encore, le pronostic pouvait être bon si les facteurs étaient contrôlés. La première évaluation avait montré une bonne reprise sous Prégabaline. Une crise épileptique pouvait entrainer un risque de chute, de traumatisme, puis de la fatigue. L’assurée était susceptible de reprendre une activité professionnelle à 100% dans une activité adaptée permettant d’éviter les risques (pas de travail en hauteur, impliquant des machineries lourdes ou dans les transports), si les crises étaient contrôlées. Le principal problème semblait être d’ordre psychiatrique.
- Dans un rapport du 6 juin 2022, la docteure J______, psychiatre traitante, a retenu les diagnostics de trouble de l’adaptation, trouble de la personnalité sans précision et antécédent d’anorexie mentale. Selon elle, la capacité de travail était de 50% au maximum d’un point de vue strictement psychiatrique, sans tenir compte des pathologies somatiques. Depuis le début de la prise en charge, en juillet 2021, l’assurée avait cessé sa consommation d’alcool. Elle était sous traitement (psychotropes, antidépresseurs et benzodiazépines).
- Le SMR, dans un rapport du 22 novembre 2022, se basant sur les rapports des médecins traitants, a retenu les diagnostics de trouble de l’adaptation, trouble de la personnalité sans précision, crises psychogènes non épileptiques et crises épileptiques, crises de pancréatite aigüe oedémato-interstitielle (ayant entrainé des hospitalisations en décembre 2018, janvier 2020, mars 2020 et février 2021) et stéatose hépatique sévère d’origine toxique (alcool). Le SMR a admis une totale incapacité de travail dans toute activité à compter du 3 septembre 2018, réduite à 50% dès le 19 juillet 2021. Les limitations fonctionnelles retenues ont été les suivantes : difficultés dans les relations sociales, thymie et sommeil dépendant de l’état physique fluctuant et des douleurs, activité devant tenir compte des crises comitiales (pas de travail en hauteur, pas d’utilisation de machines, limitation de la conduite et transport, pas de travail de nuit ou d’horaires irréguliers).
Le SMR a noté que l’assurée avait un passé chaotique et marqué par de nombreuses violences physiques (viols, tentative d’assassinat par son conjoint). L’assurée, qui avait subi des agressions répétées de la part de son dernier conjoint, avait développé des problèmes de santé, une épilepsie retenue comme psychogène par les spécialistes neurologues, une polyarthrite, une stéatose hépatique, des épisodes de pancréatite, ainsi qu’un syndrome de Gitelman. Elle s’automutilait au niveau des bras et se trouvait dans une spirale autodestructrice. Elle rencontrait des difficultés à sortir de sa zone de sécurité, dans les relations sociales, sa thymie et son sommeil dépendaient de son état physique fluctuant et de ses douleurs.
Au plan somatique, l’assurée présentait des douleurs abdominales en rapport avec des épisodes de pancréatite aigüe et une stéatose hépatique sévère d’origine toxique ayant nécessité des hospitalisations. Le Dr G______ avait retenu des polyarthralgies inflammatoires sans signe de synovite, traitées par des cures courtes de corticoïdes lors des périodes inflammatoires avec une totale incapacité de travail dans toute activité. Du point de vue neurologique, l’assurée était suivie par les HUG. Le traitement instauré jouait un rôle important sur le plan psychologique, ce qui permettait d’éliminer en grande partie les crises psychogènes non épileptiques selon le neurologue. La Dresse I______ avait attesté d’une capacité de travail 100% dans une activité adaptée respectant les limitations fonctionnelles des crises comitiales si celles-ci étaient bien contrôlées par le traitement. Le médecin traitant, le Dr H______, ne se prononçait pas précisément sur le taux de capacité de travail, mais indiquait qu’il dépendait de l’état psychique et du retentissement des différentes atteintes somatiques.
En résumé, l’assurée, en incapacité totale de travail depuis le 3 septembre 2018, suite à une agression survenue le 31 août 2018, avait développé des atteintes somatiques incapacitantes dans un contexte de compensation alcoolique et de tentamen. Depuis la prise en charge psychiatrique, son état de santé pouvait être retenu comme relativement stabilisé, avec recouvrement d’une capacité de travail de 50% dès le 19 juillet 2021.
c. Par décision du 5 avril 2023, l’OAI a reconnu à l’assurée le droit à une rente entière d’invalidité du 1er juillet au 30 septembre 2021, diminuée à une demi-rente à compter du 1er octobre 2021.
Il est en effet ressorti de l’instruction médicale que l’assurée avait été en incapacité totale de travail à compter du 3 septembre 2018. L’ouverture du droit à la rente a cependant été repoussée au 1er juillet 2021, la demande de prestations n’ayant été déposée qu’en date du 27 janvier 2021.
Puis, l’état de santé de l’assurée s’est amélioré, de sorte qu’elle a recouvré une capacité de travail de 50% dans toute activité à compter du 19 juillet 2021, ce qui a motivé la réduction de la rente, après trois mois.
Il a été constaté que des mesures professionnelles n’étaient pas nécessaires.
D. a. Par écriture du 27 avril 2023, l’assurée a interjeté recours contre cette décision.
Elle allègue qu’elle est toujours en arrêt de travail à 100%, que son état de santé se dégrade, que son épilepsie empire, qu’elle souffre de douleurs musculaires et osseuses qui l’obligent à prendre de la morphine et se réfère à un rapport de son médecin traitant, dont elle explique que s’il a été fourni tardivement, c’est en raison de la surcharge de travail du praticien. Elle argue qu’elle est épuisée et que cela l’angoisserait énormément de devoir déposer une nouvelle demande de prestations.
Elle allègue avoir de nouveau été hospitalisée pour une crise de polyarthrite foudroyante qui a fini par attaquer ses yeux. Elle explique qu’elle est épuisée par ses problèmes de santé, qu’elle ne peut jamais savoir quand une crise se présentera, qu’elle ne peut faire aucun projet d’avenir et qu’il lui est difficile, dans ces conditions, de pouvoir imaginer reprendre un travail, même à 50%.
A l’appui de sa position, elle produit :
- un rapport rédigé le 23 mars 2023 par le docteur K______, spécialiste FMH en médecine générale, faisant état d’une totale incapacité de travail depuis septembre 2018, en raison d’un trouble anxio-dépressif avec insomnies, d’une épilepsie et d’une pancréatite chronique avec une stéatose hépatique ; le médecin indique qu’il n’y a pas eu d’amélioration dans l’état de santé de sa patiente ; selon lui, conserver une position statique assise ou debout de manière prolongée est impossible, tout comme soulever des charges, monter et descendre des escaliers ; le médecin explique que sa patiente dispose de capacités intellectuelles, mais que son incapacité est physique et psychologique ; selon lui l’épilepsie, les troubles digestifs et le tableau anxio-dépressif s’opposent à une réadaptation ;
- divers rapports de la consultation d’épileptologie des HUG déjà versés au dossier;
- un rapport d’électro-encéphalographie ne montrant aucune anomalie significative.
b. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 22 mai 2023, a conclu au rejet du recours.
S’agissant des pièces médicales produites par la recourante, il se réfère à un avis du SMR du 16 mai 2023 qui arrive à la conclusion que ces documents ne lui permettent pas de modifier son appréciation du cas, car n’amenant aucun nouvel élément médical objectif : les diagnostics cités et leurs répercussions ont déjà été pris en compte.
c. Par écriture du 10 juillet 2023, l’assurée a persisté dans ses conclusions en l’octroi d’une rente d’invalidité pleine et entière.
Elle reproche à l’intimé de n’avoir tenu compte, pour évaluer son état de santé, ni du rapport émis par son rhumatologue, le Dr G______, en 2021, ni des avis de son gastroentérologue.
d. Les autres faits seront repris - en tant que de besoin - dans la partie "en droit" du présent arrêt.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Le délai de recours est de 30 jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).
Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.
2. Le litige se limite à la question du bien-fondé de la décision de l’OAI de réduire la rente entière accordée à la recourante à une demi-rente à compter du 1er octobre 2021.
3.
3.1 Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI ‑ RS 831.201 ; RO 2021 706) sont entrées en vigueur.
En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2. et les références).
En l’occurrence, la modification de rente étant antérieure au 31 décembre 2021, l’ancien droit reste applicable.
3.2 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008.
En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.
Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28 al. 2 LAI).
3.3 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c ; 102 V 165 consid. 3.1; VSI 2001 p. 223 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral I 786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).
La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanent d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, tel le CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1; 130 V 396 consid. 5.3 et 6).
3.3.1 Selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d'évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d'une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d'autre part, des potentiels de compensation (ressources) (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L'accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d'exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence).
3.3.2 Il y a lieu de se fonder sur une grille d’analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).
- Catégorie « Degré de gravité fonctionnel » (ATF 141 V 281 consid. 4.3),
A. Complexe « Atteinte à la santé » (consid. 4.3.1)
Expression des éléments pertinents pour le diagnostic (consid. 4.3.1.1), succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à cet égard (consid. 4.3.1.2), comorbidités (consid. 4.3.1.3).
B. Complexe « Personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles; consid. 4.3.2)
C. Complexe « Contexte social » (consid. 4.3.3)
- Catégorie « Cohérence » (aspects du comportement; consid. 4.4)
Limitation uniforme du niveau d'activité dans tous les domaines comparables de la vie (consid. 4.4.1), poids des souffrances révélé par l'anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation (consid. 4.4.2).
Les indicateurs appartenant à la catégorie « degré de gravité fonctionnel » forment le socle de base pour l’évaluation des troubles psychiques (ATF 141 V 281 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2).
3.3.3 Le trouble de l'adaptation est une atteinte à la santé psychique qui n'est, en principe, pas considérée comme une maladie de longue durée et donc potentiellement invalidante. Un trouble de l'adaptation dure rarement plus de six mois (arrêt du Tribunal fédéral 9C_408/2023 du 23 avril 2024 consid. 5.2 et les références).
Cependant, selon la Classification internationale des maladies et des problèmes de santé connexes, 10e révision (CIM-10), le psychiatre peut préciser le diagnostic de trouble de l'adaptation au moyen de sept subdivisions, avec l'ajout d'un quatrième caractère. Ainsi, il peut diagnostiquer par exemple un trouble de l'adaptation, avec réaction dépressive brève (F43.20) ou avec réaction dépressive prolongée (F43.21). Or, à la différence du trouble de l'adaptation avec réaction dépressive brève, le trouble de l'adaptation avec réaction dépressive prolongée (F43.21) peut persister au-delà de six mois. Dès lors, le trouble de l'adaptation peut sous certaines circonstances - qu'il appartient au psychiatre d'établir conformément à la procédure probatoire définie à l'ATF 141 V 281 -, être relevant pour l'octroi d'une rente de l'assurance-invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_408/2023 du 23 avril 2024 consid. 5.2 et les références).
3.4
3.4.1 Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1). La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. Dans le cas des maladies psychiques, les indicateurs sont importants pour évaluer la capacité de travail, qui - en tenant compte des facteurs incapacitants externes d’une part et du potentiel de compensation (ressources) d’autre part -, permettent d’estimer la capacité de travail réellement réalisable (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_286/2020 du 6 août 2020 consid. 4 et la référence).
3.4.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. A cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3). Il faut en outre que le médecin dispose de la formation spécialisée nécessaire et de compétences professionnelles dans le domaine d’investigation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_555/2017 du 22 novembre 2017 consid. 3.1 et les références).
3.4.3 Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1).
3.4.4 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).
3.4.5 Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).
4.
4.1 La recourante conteste la réduction de la rente entière à une demi-rente en alléguant qu’elle est toujours en arrêt de travail à 100%, que son épilepsie empire et qu’elle souffre de douleurs musculaires et osseuses. Elle se réfère en particulier au rapport du Dr K______, son médecin-traitant.
4.2 Le Dr K______ retient les diagnostics de trouble anxio-dépressif avec deux tentamen en 2016 et 2018, pancréatite aigüe en 2017, syndrome de Gitelman (2019), épilepsie généralisée, polyarthrite et dépendance aux benzodiazépines, induisant les limitations fonctionnelles suivantes : pas de position assise ou debout prolongée, pas de port de charges, pas d’escaliers.
Force est de constater, à l’instar du SMR, que les diagnostics mentionnés sont déjà connus et ont été pris en considération pour évaluer la capacité résiduelle de travail de l’assurée. On relèvera que, contrairement au médecin traitant, non spécialiste, le psychiatre traitant, lui, n’a retenu qu’un trouble de l’adaptation et un trouble de la personnalité conduisant, d’un point de vue psychiatrique, à une incapacité de travail limitée à 50% au maximum. Le SMR a suivi les conclusions du psychiatre traitant, lesquelles paraissaient cohérentes avec les activités quotidiennes de l’assurée. D’un point de vue psychique, l’intimé a donc adopté une position favorable à la recourante, en admettant qu’un trouble de l’adaptation, il est vrai associé à un trouble de la personnalité, puisse être considéré comme invalidant.
Sur le plan somatique, le rapport de consultation du 13 septembre 2022 du service d’épileptologie des HUG, confirme le diagnostic de PNES et crises d’épilepsie généralisées symptomatiques (premier épisode en février 2019, deuxième en mai 2019, troisième en juin 2019, deux autres en mars 2021, un nouvel épisode le 6 septembre 2022). Il est proposé un suivi aux HUG avec le docteur L______, spécialisé dans la prise en charge des PNES, en plus du suivi psychiatrique habituel. Là encore, le SMR a déjà pris en compte cette atteinte et retenu les limitations fonctionnelles y relatives (consistant à éviter les situations de mise en danger). En respectant lesdites limitations, il n’y a pas de répercussion sur la capacité de travail, ainsi qu’en a attesté la Dre I______, neurologue. Les crises semblent bien maîtrisées puisqu’elles ne surviennent qu’à raison de deux fois par an, tout au plus. A cet égard, on notera que l’allégation de la recourante selon laquelle son épilepsie s’aggraverait n’est confirmée par aucun document au dossier. Sur le plan neurologique, c’est dès lors à juste titre que l’intimé n’a retenu aucune diminution de la capacité de travail.
Quant au rapport du Dr G______, également invoqué par la recourante, il est antérieur à l’amélioration retenue par l’intimé, puisqu’il remonte à mars 2021. Quoi qu’il en soit, s’il conclut effectivement à une totale incapacité de travail en raison des polyarthralgies, il admet que celles-ci ne sont accompagnées ni d’un syndrome inflammatoire, ni de signes cliniques, ce que confirme le rapport de consultation du 3 septembre 2021 du Dr M______, qui indique n’avoir mis en évidence, en se basant sur l’anamnèse, la clinique et la biologie, aucun syndrome inflammatoire rhumatologique sous-jacent.
On ne saurait dans ces conditions reprocher à l’intimé d’avoir retenu une amélioration depuis le début du suivi psychiatrique par la Dre J______, date coïncidant avec la cessation de la consommation d’alcool. Celle-ci a conduit à l’amélioration documentée par le psychiatre traitant et au recouvrement d’une capacité de travail de 50% dans toute activité à compter du 19 juillet 2021, ce qui a motivé la réduction de la rente, après trois mois, conformément à l’art. 88a al. 1 RAI.
Eu égard aux considérations qui précèdent, le recours est rejeté, étant rappelé que si une aggravation devait survenir, il serait loisible à l’assurée de déposer une nouvelle demande de prestations.
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. Le rejette.
3. Met un émolument de CHF 200.- à la charge de la recourante.
4. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Diana ZIERI |
| La présidente
Karine STECK
|
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le