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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/68/2019

ATAS/37/2024 du 23.01.2024 ( AI )

En fait
En droit

76rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

A/68/2019 ATAS/37/2024

 

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Ordonnance d’expertise du 23 janvier 2024

Chambre 5

 

En la cause

A______

représenté par Me Butrint AJREDINI, avocat

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

 

intimé

 

 

 


 

 

 

 

EN FAIT

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'assuré ou le recourant), né en 1972, a travaillé en tant que maçon dès le 2 mai 2005 auprès de B______. À ce titre, il était assuré contre les accidents auprès de la SUVA Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après : la SUVA).

b. Selon la déclaration de sinistre remplie par son employeur le 2 août 2007, l'assuré s'était blessé en glissant sur la neige, le 15 février 2007. En voulant amortir sa chute avec le bras droit, il s'était fait mal à l'épaule. Il était en incapacité de travail depuis le 16 juillet 2007. Son salaire mensuel était de CHF 4'980.-.

c. Dans un rapport du 28 août 2007, un médecin du Département de chirurgie des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) a diagnostiqué une tendinite de l'épaule droite, en indiquant que l'assuré avait fait une chute, cinq mois auparavant, suivie de douleurs à l'épaule droite. Le traitement était terminé depuis le 23 juillet 2007.

d. Par décision du 12 septembre 2007, la SUVA a nié le droit aux prestations de l'assuré en contestant l'existence d'un lien de causalité entre l'événement du 15 février 2007 et l'incapacité débutant le 16 juillet 2007.

e. Dans un rapport du 12 septembre 2007, le docteur C______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, a indiqué qu'il y avait peu de limitations fonctionnelles et que l'examen clinique était peu contributif. Une IRM avait révélé une lésion du labrum antérieur-inférieur qui était due à l'accident, et ce médecin a posé le diagnostic de dérangement interne (labrum) de l'épaule droite. Une reprise du travail devait être tentée le jour même.

f. L'assuré s'est opposé à la décision de la SUVA par courrier du 16 septembre 2007.

g. Le docteur D______, spécialiste FMH en chirurgie et médecin d'arrondissement auprès de la SUVA, a examiné l'assuré le 15 juin 2010. Il a recommandé un séjour à la Clinique romande de réadaptation (ci-après : CRR) en vue d'évaluer les capacités fonctionnelles chez l'assuré, dont la capacité de travail restait nulle jusqu'à l'entrée à la CRR. Après avoir revu l’assuré, en date du 1er décembre 2010, le Dr D______ a résumé son dossier ; il a relaté les déclarations de l'assuré, qui allait un peu mieux depuis le dernier examen. Les fourmillements sur les trois derniers doigts avaient diminué, mais il les ressentait encore en cas d'efforts. Il restait dérangé par le manque de force et par quelques douleurs au pourtour de l'épaule, avec irradiation sur tout le bras et l'avant-bras jusqu'au bout des doigts. Après son examen, le Dr D______ a noté que le tableau clinique était marqué par quelques autolimitations ne permettant pas une évaluation tout à fait fiable de la fonction articulaire effective. Un bilan radiologique postopératoire avait démontré un status après acromioplastie, sans ascension de la tête humérale ni sclérose du trochiter. Seule une petite ossification se projetant en sous-acromiale de face avait été constatée. Le médecin d'arrondissement a conclu que l'assuré devrait être reclassé dans une profession ne sollicitant pas l'épaule au-dessus de l'horizontale, ni mouvements répétés des bras ou port de charges supérieures à 10 kg. Il n'était pas tenu compte de facteurs non organiques susceptibles de compromettre un processus de reclassement chez l'assuré, qui semblait quelque peu fixé sur son invalidité. Le Dr D______ a également évalué l'atteinte à l'intégrité à 17.5%, en se référant au taux attribué par la table I à une périarthrite scapulo-humérale de degré moyen à grave.

h. Par téléphone du 3 décembre 2010, l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI ou l’intimé) a informé la SUVA que l'assuré avait eu droit à des mesures d'intervention précoce, mais qu'aucune autre prestation ne lui serait accordée.

i. Par décision du 24 février 2011, la SUVA a accordé à l'assuré une rente de 20%, dès le 1er février 2011, d'un montant de CHF 929.80 auquel s'ajoutait l'allocation de renchérissement de CHF 26.95, fondée sur le revenu perçu par l'assuré l'année précédant l'accident. Le degré d'invalidité résultait de la comparaison du revenu sans invalidité de CHF 69'862.- avec le revenu dans une activité exigible à 100% de CHF 56'167.-. Le revenu d'invalide se fondait sur la moyenne des salaires obtenus dans cinq emplois décrits dans les descriptifs de postes de travail (ci-après : DPT) et adaptés aux limitations fonctionnelles de l'assuré, en tant que collaborateur de production, ouvrier de brasserie et caissier, choisis parmi 72 postes. Les revenus minimaux dans ces emplois étaient de CHF 53'320.-, tandis que les revenus maximaux s’élevaient à CHF 59'014.-. Selon les DPT joints à la décision, aucun de ces emplois n’impliquait de travailler les bras au-dessus de la tête et seul un des postes exigeait le port de charges entre 5 et 10 kg, ce rarement. L'indemnité de CHF 18'690.-, correspondant à une atteinte à l'intégrité de 17.50%, était pour le surplus confirmée.

j. L'assuré s'est opposé à cette décision par courrier du 17 mars 2011. Il a contesté le revenu sans invalidité, lequel ne tenait pas compte du gain accessoire réalisé chez E______. Il a également contesté le degré d'invalidité et l'exigibilité d'une autre activité au plan médical, ainsi que le revenu d'invalide. Il considérait de plus que son atteinte à l'intégrité devait être de 30%.

k. Par décision sur opposition du 7 juin 2011, la SUVA a partiellement admis l'opposition en ce sens que le gain annuel assuré sur lequel était calculée la rente a été fixé à CHF 72'234.-, et confirmé sa décision pour le surplus. Quant à l'absence de mobilité de l'épaule alléguée par l'assuré, elle avait certes été constatée par les médecins de la CRR, mais leur examen n'était pas interprétable compte tenu de la défense active manifestée par l'assuré. Les rapports des médecins de la CRR et du Dr D______ ne contenaient pas de contradictions intrinsèques et leurs conclusions étaient motivées, de sorte qu'ils devaient se voir reconnaître une pleine valeur probante. L'assuré n'amenait du reste pas d'autre élément permettant de mettre en doute leurs avis. Quant au taux de l'indemnité pour atteinte à l'intégrité, la SUVA a souligné qu'il était déterminé par les médecins et fixé par des barèmes de référence. L'assuré n'amenait aucun élément susceptible de remettre en cause l'appréciation du Dr D______, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de s'en écarter.

B. a. L'assuré a interjeté un recours, ouvert auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci‑après : la chambre de céans) sous no de procédure A/2146/2011, contre la décision de la SUVA par acte du 8 juillet 2011, et a conclu sous suite de dépens, préalablement, à ce qu'une expertise pluridisciplinaire soit diligentée, et au fond, à l'annulation de la décision du 7 juin 2011 et à l'octroi d'une rente d'invalidité d'au moins 50% dès le 1er février 2011. Il a relevé que l'appréciation des limitations fonctionnelles par la SUVA ne reposait que sur les rapports des docteurs F______ et D______, alors que tant les médecins de la CRR que le professeur G______ avaient fait état d'importantes douleurs. Il alléguait souffrir encore de ces douleurs, qui se manifestaient dans n'importe quelle activité impliquant son bras droit. Il offrait de prouver qu'il lui était impossible de solliciter son bras droit plus de quelques heures sans interruption, et ce dans n'importe quelle activité adaptée. Il joignait, notamment, à son recours un certificat établi le 17 janvier 2011 par le Prof. G______, indiquant qu'il se plaignait de paresthésies et de douleurs au niveau de son index, qui pourraient être en relation avec un syndrome du tunnel carpien actuellement sous investigation, et que son épaule était douloureuse, avec une élévation maximale à 120°, une rotation externe à 40°, une rotation interne au sacrum et concluant qu'il n'était pas apte à travailler, notamment sur un chantier, cette situation étant due à son épaule droite.

b. Par arrêt du 25 octobre 2011 (ATAS/1000/2011), la chambre de céans a rejeté le recours, dans la procédure A/2146/2011 opposant l’assuré à la SUVA, en considérant que les conclusions du Dr D______ devaient être suivies et que la mise en œuvre d’une expertise sur ce point s’avérait superflue, par appréciation anticipée des preuves. Sur recours, le Tribunal fédéral a confirmé l’arrêt du 25 octobre 2011 (arrêt du Tribunal fédéral 8C_897/2011).

C. a. Suite à la fin de la procédure opposant l’assuré à la SUVA, l’OAI a repris l’instruction de la demande de prestations invalidité, qui avait été déposée par l’assuré le 30 janvier 2009.

b. En date du 8 février 2012, le docteur H______, spécialiste FMH en médecine interne et rhumatologie et expert médical SIM, médecin-conseil du service médical régional (ci-après : le SMR) de l’OAI, a rendu un rapport suite à l’examen clinique rhumatologique du 30 novembre 2011 pratiqué sur l’assuré. Le rapport faisait état de l’anamnèse de l’assuré, son status général, son status ostéoarticulaire et neurologique, ainsi que le dossier radiologique qui était résumé. Le médecin a retenu les diagnostics avec répercussion durable sur la capacité de travail de : douleurs et limitations de l’épaule droite dans le cadre d’une rupture partielle du sus-épineux avec status après deux opérations de l’épaule droite M.75 et de status après pose de trois stents pour maladie coronarienne bi-tronculaire. Pour les diagnostics sans répercussion sur la capacité de travail, le médecin a retenu : des cervicalgies dans le cadre de discrets troubles statiques du rachis M 54.2, un trouble somatoforme douloureux chronique possible, une obésité, une hypertension artérielle traitée ainsi qu’une hyperlipidémie anamnestique. À l’issue de l’appréciation du cas, le Dr H______ a fixé des limites fonctionnelles concernant l’épaule droite, soit pas d’élévation d’abduction de l’épaule droite à plus de 60°, pas de levée de charges de plus de 5 kg avec le MSD, pas de mouvements répétitifs avec le bras droit ; concernant la maladie bi-tronculaire coronarienne, la limitation fonctionnelle était d’éviter le travail nécessitant des efforts. Il a considéré qu’une incapacité de travail de 20% au moins était présente depuis le 15 juillet 2007 et s’agissant du degré d’incapacité de travail, le médecin a considéré qu’elle était complète dans l’activité de maçon du 15 juillet 2007 au 3 mai 2008, puis avait passé à 50% du 5 mai 2008 au 17 juin 2008, puis était redevenue complète depuis le 18 juin 2008. Dans une activité adaptée, la capacité de travail était complète dès le 5 mai 2008. Dès le 18 juin 2008, la capacité de travail dans une activité adaptée était nulle puis, dès le 28 octobre 2008, elle était à nouveau complète jusqu’au 4 novembre 2009. Dès le 4 novembre 2009 jusqu’au 1er décembre 2010, la capacité de travail était nulle dans une activité adaptée, mais dès le 2 décembre 2010, elle était à nouveau complète dans une activité adaptée. En conclusion, sa capacité de travail exigible dans l’activité habituelle était nulle comme maçon et dans une activité adaptée de 100% depuis le 2 décembre 2010.

c. Par courrier du 5 juin 2012, l’OAI a informé l’assuré qu’une évaluation médicale était nécessaire et lui a fixé un rendez-vous chez le docteur I______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie.

d. Le Dr I______ a rendu un rapport d’expertise, en date du 13 septembre 2012, se fondant sur l’entretien qu’il avait eu avec l’assuré le 30 juillet 2012, les tests psychométriques qu’il avait fait passer le même jour et les documents que l’OAI lui avait transmis. Il a fait l’anamnèse du patient et a résumé la situation assécurologique, notamment la procédure précédente devant la SUVA. Il a résumé les problèmes somatiques et rhumatologiques du patient ainsi que le traitement médicamenteux de ce dernier, composé d’antidouleurs, de somnifères, et d’aspirine cardio.

Issue des tests psychométriques, l’échelle d’Hamilton 17 sur la dépression a donné un score de 9-10 se situant dans la fourchette de la dépression légère et l’échelle d’Hamilton sur l’anxiété a donné un score de 8-9, le fixant dans l’échelle de l’anxiété mineure. Selon l’expert, l’assuré était attentif, répondait de manière claire et précise et sa mimique était congruente au contenu du discours. Il ne présentait pas de dépressivité marquée mais plutôt une émotivité ; il n’y avait pas d’anhédonie, d’aboulie, ou d’apragmatisme. Sur le plan de la personnalité, l’expert a conclu qu’il n’y avait pas d’indice en faveur d’un trouble majeur de la personnalité. Sur le plan de l’amplification des symptômes, l’expert a considéré que l’assuré faisait preuve de peu d’initiatives individuelles et paraissait déjà préfixé dans sa situation de futur invalide. Il s’exprimait sur un ton souvent dramatique et démonstratif et émettait des plaintes permanentes, notamment à l’égard du médecin qui ne le guérissait pas. Le niveau de participation a été considéré comme insuffisant en général, avec des incohérences assez frappantes, une attitude revendicatrice, pas d’initiative individuelle, pas de volonté de coopération individuelle et un but recherché assez discernable (attitude plus ou moins consciente) de tirer du profit de la maladie, le statut d’invalide lui offrant apparemment des solutions pratiques à des problèmes de réalité. En conclusion du rapport, l’expert a considéré qu’au plan physique, il y avait des plaintes somatiques diverses au niveau de l’épaule droite, des céphalées, des douleurs à l’hémi-crâne droit, avec une tendance à l’amplification des symptômes, mais sur le plan psychique et mental, il n’y avait pas de symptômes en faveur d’un état anxio-dépressif cliniquement significatif, en dépit de plaintes sur des troubles subjectifs de l’attention et de la concentration. Au plan social, le sujet était plutôt passif/agressif, montrant peu de motivation ; s’agissant de la capacité résiduelle de travail, l’expert l’a estimée à 100%, d’un point de vue psychiatrique, dans l’activité exercée jusqu’alors. Il a considéré qu’un traitement psychiatrique n’était pas indiqué, en l’absence de demande en ce sens.

e. Le SMR de l’OAI a rendu un rapport en date du 8 octobre 2012, suite à l’expertise psychiatrique et l’examen médical sur le plan rhumatologique. Reprenant le contenu des rapports, le docteur J______ a conclu à une capacité de travail exigible de 0% comme maçon, mais de 100% dans une activité adaptée, depuis le 2 décembre 2010.

f. En date du 20 juin 2016, le Prof. G______, exerçant à la clinique des Grangettes, a émis un certificat rappelant les causes des troubles de la santé, signalant des douleurs dans les tendons de la coiffe des rotateurs, mentionnant que le patient travaillait à 50%, dès le 28 janvier 2014 avec un travail temporaire à l’aéroport, puis depuis avril 2014, en tant que chauffeur-livreur à 50%, mais que vu son état douloureux chronique et le handicap entraînant une diminution de mobilité et de force au niveau de son épaule droite, il contestait les évaluations de la SUVA qui jugeait qu’il était 100% apte à travailler dans une activité adaptée.

g. Par certificat du 4 juillet 2016, le docteur K______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, a mentionné que l’assuré avait été suivi sur le plan psychothérapeutique par une psychologue, sous sa délégation, du 21 juin 2013 au 3 mars 2014, parallèlement à des consultations psychiatriques par ses soins, et ajoutait que l’assuré avait fait l’objet d’une prescription psychotrope de Escitaloprame, 10 mg par jour.

h. Par rapport final du 2 mars 2018, la gestionnaire de la division réadaptation professionnelle de l’OAI a noté que la pleine exigibilité retenue avait été confirmée par le stage COPAI suivi par l’assuré du 6 juin au 3 juillet 2011 - en dépit des contestations de l’assuré - mais que les mesures suivies pour favoriser une activité en qualité de métreur n’avaient pas pu être prorogées, car elles n’auraient pas été de nature à diminuer le dommage, ni à favoriser la reprise d’une activité adaptée. Le degré d’invalidité retenu était insuffisant pour ouvrir le droit à une rente.

D. a. Un projet d’acceptation de rente et de refus de mesures professionnelles et d’octroi d’une rente d’invalidité limitée a été communiqué à l’assuré en date du 3 avril 2018. Le droit à d’autres mesures d’ordre professionnel était nié et une rente entière basée sur un taux d’invalidité de 100% était octroyée, pour la période allant du 1er août 2009 au 31 mars 2010 uniquement. Le statut de l’assuré était celui d’une personne se consacrant à temps complet à son activité professionnelle, et selon les constatations du SMR, une incapacité de travail totale dans toute activité était reconnue depuis le 15 juillet 2007 (début du délai d’attente d’un an). Dans une activité adaptée, le SMR était d’avis que la capacité de travail de l’assuré était de 100% depuis le 2 décembre 2010. Après comparaison du revenu sans invalidité et du revenu avec invalidité, la perte de gain correspondait à un taux de 20%, ce qui n’ouvrait pas de droit à la rente d’invalidité. Par courrier du 19 mai 2018, l’assuré s’est opposé au projet de décision.

b. En date du 21 novembre 2018, l’OAI a rendu une décision fondée sur le précédent projet de décision, notamment quant à la période limitée pendant laquelle une rente était servie et au rejet de toute autre prestation d’invalidité, l’assuré étant considéré comme apte au travail à 100% depuis le 2 décembre 2010.

E. a. Par courrier du 7 janvier 2019, posté le même jour, l’assuré a recouru contre la décision du 21 novembre 2018. Il indiquait être suivi par le docteur L______ en raison d’une dépression et remettait en copie les constats et éléments médicaux de ses deux derniers accidents. Il faisait valoir que sa situation de santé physique s’était péjorée, ainsi que son état psychique, et considérait qu’une nouvelle expertise médicale était nécessaire. En annexe à son recours, il joignait plusieurs pièces médicales, soit :

-          un courrier du 13 décembre 2018 du docteur M______, spécialiste FMH en cardiologie, concernant le contrôle cardiologique annuel et concluant que la situation cardiologique de l’assuré était stable et qu’il devait poursuivre son traitement habituel, avec, en annexe, le rapport de coronarographie et angioplastie de l’artère circonflexe proximale et de l’artère coronaire droite distale du 14 décembre 2017 ;

-          une déclaration de sinistre adressée à la SUVA, pour un accident du 15 novembre 2013, montrant plusieurs consultations de décembre 2013 à septembre 2015 chez un médecin qui n’était pas mentionné ;

-          un résumé de séjour du 18 novembre 2013, concernant la consultation du même jour pour un examen clinique de l’épaule gauche et de la cheville gauche avec comme proposition de suivi que l’assuré devait prendre contact avec son orthopédiste ;

-          un bilan de radiographie du 4 décembre 2013 fait par le docteur N______, concernant le bilan de la coiffe des rotateurs et de l’articulation acromio-claviculaire suite à un traumatisme faisant état, en conclusion, d’une petite rupture de 7 mm de la face articulaire du supra épineux associée à une bursite ;

-          une déclaration de sinistre adressée à la SUVA pour un accident du 10 avril 2018, montrant plusieurs consultations d’avril à novembre 2018, chez le docteur O______, spécialiste FMH en médecine physique et réadaptation.

b. Par réponse du 5 février 2019, l’OAI a conclu au rejet du recours, considérant que les éléments apportés ne permettaient pas de faire une appréciation différente du cas.

c. Par courrier du 19 décembre 2019, la chambre de céans a demandé à l’assuré de se déterminer sur les raisons pour lesquelles il demandait une expertise médicale et sur quels points cette dernière devait porter. Par courrier du 7 janvier 2020, l’assuré a fait état de troubles psychiques, de troubles à l’épaule, de problèmes à la hanche, et de problèmes cardiaques.

d. Par courrier du 29 juin 2020, la chambre de céans a informé les parties qu’elle avait l’intention de confier une mission d’expertise psychiatrique, rhumatologique et orthopédique au Docteurs P______, spécialiste FMH en psychiatrie, Q______, spécialiste FMH en rhumatologie, et R______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur. Les parties n’ont pas fait valoir de motifs de récusation.

e. Par courrier du 22 décembre 2020, la chambre de céans a communiqué aux parties un projet de mission d’expertise et de libellé des questions. L’OAI a proposé quelques modifications qui ont été intégrées dans la mission d’expertise.

f. Début mai 2021, le Dr Q______ a informé la chambre de céans qu’il ne pourrait finalement pas mener à bien cette expertise et qu’il y renonçait par conséquent.

g. La chambre de céans a ainsi mandaté en lieu et place le docteur S______. Les parties ont indiqué les 2 et 3 juin 2021 ne pas avoir de motif de récusation à faire valoir à l’encontre du Dr S______.

h. Par ordonnance d’expertise du 23 juin 2021, la chambre de céans a mandaté les Drs S______ (rhumatologie), R______ (chirurgie orthopédique) et la Dre P______ (psychiatrie) pour effectuer une expertise multidisciplinaire, en les invitant à compléter leurs expertises respectives par une appréciation consensuelle du cas.

i. Le Dr S______ a rendu son rapport d’expertise rhumatologique et de médecine interne en date du 24 mai 2022. Après avoir résumé les pièces du dossier concernant les différents rapports médicaux depuis août 2008, le Dr S______ a effectué une anamnèse et a exposé ses constatations cliniques, notamment après avoir examiné l’assuré en date du 2 décembre et du 21 décembre 2021. Il a retenu deux problèmes médicaux qui, selon lui, empêchaient l’assuré de travailler ; en premier lieu, une maladie coronarienne chronique qui avait déjà nécessité la pose de six stents et des douleurs chroniques au niveau de l’épaule droite, suite à un accident de 2007 ; ledit problème cardiaque semblait très bien pris en charge et pas remis en cause dans l’ensemble des documents consultés. En second lieu, un problème orthopédique beaucoup plus discuté, l’assuré ayant bénéficié de deux interventions chirurgicales avec une bonne évolution pour certains orthopédistes et une mauvaise pour d’autres. Après avoir effectué une arthro IRM de l’épaule gauche et de l’épaule droite, l’expert a retenu une péjoration des lésions au niveau des deux épaules, principalement au niveau de l’épaule droite, les lésions correspondant aux douleurs décrites par l’assuré, sous réserve d’une façon histrionique de mettre en évidence l’atteinte chronique des épaules. En résumé, l’assuré présentait une atteinte chronique des coiffes des rotateurs, plus importante à droite, une tendinite chronique du moyen fessier gauche, une maladie coronarienne chronique, raison pour laquelle sa capacité de travail était nulle définitivement dans son activité de maçon depuis juillet 2007. Les limitations fonctionnelles retenues étaient les suivantes :

- pas de port de charges de plus de 5 kg ;

- ne pas devoir soulever des charges de plus de 5 kg ;

- ne pas devoir faire des mouvements répétés avec les épaules ;

- ne pas devoir se déplacer sur des échafaudages et monter sur des échelles ;

- ne pas devoir se déplacer sur un terrain non plat ;

- ne pas devoir se déplacer sur plus de 500 m ;

- ne pas devoir faire un travail qui comporte un stress psychologique ou physique ;

- pouvoir travailler en position assise avec la possibilité de changer de position toutes les heures.

Moyennant le respect des limitations fonctionnelles supra, l’expert a estimé la capacité de travail de l’assuré dans une activité adaptée à 50%, en tenant compte de la fatigabilité liée à son problème cardiaque. Il estimait que la capacité de 50% dans une activité adaptée était présente depuis juillet 2010, soit six mois après sa deuxième intervention chirurgicale.

j. Le Dr R______ a rendu son rapport d’expertise orthopédique en date du 31 mai 2022. Après avoir résumé les pièces du dossier concernant les différents rapports médicaux depuis août 2007, le Dr R______ a effectué une anamnèse et a exposé ses constatations cliniques, notamment après avoir examiné l’assuré en date du 18 octobre 2021. À cette occasion, l’assuré a été invité à décrire une journée-type ; il a exposé se lever entre 9h30 et 10h, parfois à midi, prendre le petit-déjeuner préparé par sa fille, puis regarder la télévision avec parfois une sortie de 15 mn pour marcher et s’asseoir sur un banc. Une à deux fois par semaine, il a dit se rendre à un petit jardin qu’il entretient avec sa fille, à pied, pour s’occuper de l’arrosage et de la récolte des légumes. En dehors d’éventuelles séances de physiothérapie, l’assuré a déclaré ne rien faire l’après-midi et se coucher le soir autour de 22h. L’expertisé a dit vivre seul et ne s’occuper de rien dans son ménage, sa fille prenant en charge les tâches ménagères.

À l’issue de l’examen clinique, l’expert a constaté qu’il n’y avait quasiment aucune mobilité active de l’épaule droite avec des douleurs et que l’épaule gauche avait une bonne mobilité active mais chaque mouvement testant la force déclenchait des douleurs. Concernant les membres inférieurs, il y avait d’importantes douleurs de la périe hanche gauche, chaque test clinique au niveau de la hanche déclenchant des douleurs mêmes si ces dernières n’étaient pas spécifiques de la périe hanche. S’agissant des chevilles, les douleurs étaient plus importantes à droite qu'à gauche, avec une mobilité active malgré tout conservée, l’examen clinique évoquant une pathologie de l’articulation sous-talienne des deux côtés. Il a retenu les diagnostics suivants :

-        pour l’épaule droite, une lésion labrale de type SLAP constatée sur l’arthro-IRM du 7 août 2007 ; un état après réinsertion chirurgicale du bourrelet labral, le 11 février 2008 ; un état après acromioplastie, résection du centimètre externe de la clavicule et ténodèse du long chef du biceps, le 4 novembre 2009 et une lésion interstitielle du tendon sous-scapulaire et sous-épineux sur l’arthro-IRM du 13 décembre 2021. Il a retenu deux problèmes médicaux.

-        Pour l’épaule gauche, une lésion partielle du tendon sous-scapulaire, visualisée sur l’IRM du 25 octobre 2016 et une partition de l’acromion, asymptomatique, également visualisée sur l’IRM du 25 octobre 2016.

-        Pour la hanche gauche, une tendinopathie, moyen fessier gauche, diagnostiquée le 10 avril 2018.

-        Pour la cheville gauche, une arthrose sous-talienne, diagnostiquée sur l’IRM du 13 décembre 2016.

-        Pour la cheville droite, une arthrose sous-talienne, évoquée dans le rapport d’échographie du 28 août 2018.

L’expert R______ a retenu les limitations fonctionnelles suivantes :

-        pour l’épaule droite, pas d’élévation répétitive du bras droit au-dessus des épaules et pas de port de charges de plus de 5 kg.

-        Pour l’épaule gauche, pas d’élévation répétitive du bras gauche au-dessus des épaules et pas de port de charges de plus de 10 kg.

-        Pour la hanche gauche, pas de marche prolongée et pas de montée ou de descente des escaliers répétée.

-        Pour les chevilles gauche et droite, pas de marche en terrain instable.

L’expert a considéré que la capacité de travail dans l’activité habituelle était nulle dès le 15 juillet 2007.

Dans une activité adaptée, respectant les limitations fonctionnelles dont l’apparition est différenciée dans le temps, l’expert a considéré que la capacité de travail de l’assuré était entière dès le 4 mai 2010.

k. La Dre P______ a rendu son rapport d’expertise psychiatrique en date du 15 juin 2022. Après avoir résumé les pièces du dossier concernant les différents rapports médicaux depuis août 2007, la Dre P______ a procédé à trois entretiens avec l’assuré, d’une durée de 90 mn chacun, les 22 mars, 5 avril et 17 mai 2022 complétés par un entretien téléphonique avec la docteure W______, le Dr L______ et la psychologue T______.

L’experte a réalisé une anamnèse familiale ainsi qu’une anamnèse personnelle portant sur l’anamnèse professionnelle et sociale, l’anamnèse somatique et enfin l’anamnèse psychiatrique. Elle a relaté les données subjectives et les plaintes de l’expertisé et a mentionné ses constatations objectives.

Elle a retenu trois diagnostics, en premier lieu un trouble dépressif récurrent, épisode actuel moyen avec syndrome somatique F33.11, en deuxième lieu un syndrome douloureux somatoforme persistant F45.4 et enfin une agoraphobie avec trouble panique.

L’experte psychiatre a émis un pronostic réservé devant la complexité de la situation de l’assuré, avec interaction entre les différents troubles psychiques et somatiques.

La Dre P______ a retenu les limitations fonctionnelles suivantes :

-        pour le trouble dépressif, une baisse nette de l’élan vital avec fatigabilité, difficulté à maintenir l’attention, tension interne, intolérance à la frustration, difficultés interpersonnelles. Ces limitations étant présentes de manière importante depuis 2018, date de la rechute dépressive avec un début de l’installation situé en 2017.

-        Pour le syndrome douloureux somatoforme persistant, des autolimitations au niveau de l’usage des membres, notamment le bras droit, difficultés à se concentrer, à maintenir son attention, étant centré sur le fonctionnement du corps et la perception des douleurs, la fatigabilité. Ces limitations étant présentes depuis 2007 – 2008 avec une péjoration actuellement liée à une généralisation des plaintes.

-        Pour le trouble anxieux, une anxiété envahissante avec des manifestations neurovégétatives de type sensation de vertiges, besoin de fuir, évitement de situations redoutées, difficulté à maintenir son attention, lesdites limitations existant depuis 2019.

L’experte psychiatre a considéré que les plaintes étaient objectivées, que le tableau clinique était cohérent, qu’il s’agissait d’une évolution cohérente, en prenant en considération les interactions entre les comorbidités psychiatriques et les troubles physiques. Il n’y avait pas de discordances entre les plaintes et le comportement de la personne expertisée, entre les limitations alléguées et ce qui était connu des activités et de la vie quotidienne de la personne. Cette dernière était engagée dans les traitements prescrits et présentait une bonne observance à ces derniers. Il n’existait pas de trouble de la personnalité à première vue. Les ressources résiduelles de l’assuré étaient très limitées devant les problématiques physiques. Sur le plan psychique, les ressources résiduelles de l’assuré étaient faibles ; sur le plan mental, l’assuré ne présentait pas de difficultés et ses ressources semblaient bonnes ; sur le plan social et familial, les ressources étaient pauvres, l’assuré n’ayant pas de réseau social ou amical mais paraissant capable de s’organiser au niveau social et sur le plan familial, les ressources étaient présentes mais l’assuré entretenait une relation de dépendance vis-à-vis de sa famille et notamment de sa fille.

L’experte a considéré que la capacité de travail dans l’activité habituelle était nulle en raison des limitations d’ordre physique et a renvoyé à l’avis des deux autres experts sur la date à laquelle la capacité de travail dans l’activité habituelle était nulle.

Dans une activité adaptée, respectant les limitations fonctionnelles, l’experte a considéré que dans un cadre très hypothétique, l’assuré pourrait exercer une activité allant à 30% dans un cadre adapté à ses limitations, soit une activité ne nécessitant pas un effort d’attention ou de concentration, ni d’interactions interpersonnelles, avec des tâches répétitives, dans un encadrement bienveillant, pouvant accepter que l’assuré puisse prendre le temps de se reposer si fatigabilité ou exacerbation anxieuse ou algique, pouvant tolérer un absentéisme plus ou moins régulier pour différentes raisons de santé. Ces limitations venaient s’ajouter aux limitations fonctionnelles posées par le Dr S______ dans son expertise en p. 21. L’experte ajoutait toutefois qu’il était difficile d’imaginer, dans le cadre actuel du marché concurrentiel du travail, une activité pouvant correspondre à toutes ces limitations et qu’une telle activité, très partielle, hypothétique, pouvait représenter, en elle-même, un facteur de stress chez un assuré très sensible à ce qui se passait dans son corps et pourrait, malheureusement, entretenir son état de santé instable. Ainsi, l’experte estimait que l’assuré était en incapacité totale d’intégrer une activité professionnelle lucrative quel que soit le domaine d’activité, depuis 2018. Entre 2010 et 2017, elle considérait que l’assuré avait une capacité de travail, dans une activité adaptée, de 50%.

En résumé, sur le plan psychiatrique, la capacité de travail dans une activité adaptée était partielle, soit à 50% depuis 2010, et était nulle depuis 2018.

l. La Dre P______ n’ayant pas eu l’occasion d’échanger avec le Dr S______, la chambre de céans lui a demandé, par courrier du 28 juin 2022, de contacter les deux autres experts et de lui faire parvenir la copie du consilium avec délai au 15 août 2022.

m. Par courrier du 27 juillet 2022, la Dre P______ a fait parvenir à la chambre de céans les résultats du consilium avec les deux autres experts, dont il résultait qu’elle confirmait son évaluation de la capacité de travail, soit une incapacité de travail, dans une activité adaptée de 50% depuis 2010, et une incapacité de travail totale depuis 2018.

n. Après avoir reçu copie des rapports d’expertise et du consilium, les parties se sont déterminées.

o. Par courrier du 23 septembre 2022, l’intimé a relaté avoir soumis les rapports d’expertise et le consilium des experts à son SMR qui, dans sa détermination du 23 septembre 2022, a pris des conclusions auxquelles l’OAI s’est rallié intégralement. Dans son avis médical du 23 septembre 2022, sous la plume de la docteure U______, le SMR a exprimé son désaccord avec l’appréciation du Dr S______ sur le plan cardiologique, aucune incapacité de travail ne pouvant être retenue avant, éventuellement, 2019 date annoncée de l’infarctus, soit postérieurement à la décision. Ainsi, d’un point de vue rhumatologique et orthopédique, une capacité de travail entière dans une activité adaptée était tout à fait exigible en tenant compte des limitations fonctionnelles somatiques retenues par les experts. Sur le plan psychiatrique, le SMR a considéré qu’il n’y avait pas lieu de retenir une incapacité de travail antérieurement au mois d’octobre 2018, date de l’aggravation sur le plan psychiatrique, aggravation motivant une incapacité de travail partielle, et non totale. En conclusion, l’OAI a rappelé que la décision querellée avait été rendue en date du 21 novembre 2018 et que c’était, dès lors, la situation médicale antérieure à cette date qui était déterminante pour juger de la présente cause. Par conséquent, l’éventuelle aggravation de l’état de santé du recourant, d’un point de vue cardiologique et psychiatrique, devait faire l’objet d’une procédure distincte.

p. Dans ses observations du 14 octobre 2022, le conseil du recourant s’est, en substance, rallié aux conclusions des experts et a conclu à une incapacité totale de travailler depuis le 1er avril 2010, en raison de problèmes cardiaques et psychiques notamment.

F. a. Par arrêt du 10 novembre 2022, la chambre de céans s’est ralliée aux conclusions des experts et notamment de l’experte psychiatre, considérant que son rapport d’expertise du 27 juillet 2022 présentait une pleine valeur probante, et a dit que le recourant avait droit à un trois quarts de rente d’invalidité dès le 1er avril 2010 et à une rente entière d’invalidité, dès le 1er octobre 2018.

b. Sur recours de l’OAI, le Tribunal fédéral a partiellement admis ce dernier par arrêt du 15 juin 2023 (8C_740/2022) considérant, notamment, que l’experte psychiatre avait tenu compte à deux reprises des mêmes affections, admettant, dans un premier temps, qu’elles entrainaient une incapacité de travail de 70% puis, dans un second temps, qu’elles entrainaient une incapacité de travail de 100%. S’y ajoutait le fait que l’experte s’était prononcée sur un domaine qui n’était pas le sien, à savoir la capacité résiduelle pouvant être mise en valeur sur le marché du travail, ce qui échappait à son domaine de compétence (arrêt du Tribunal fédéral 8C_740/2022 consid. 4.3.1). En ce qui concernait la période comprise entre le 1er avril 2010 et le 30 septembre 2018, l’appréciation de l’experte ne résistait pas non plus à l’examen car l’incapacité de travail retenue de 50% durant cette période n’était pas suffisamment motivée. De plus, cette évaluation faisait fi de nombreux éléments qui faisaient douter d’une telle incapacité de travail durant l’intégralité de ladite période, en raison des seules troubles psychiques de l’assuré. Dès lors, on ne pouvait pas se fonder sur ladite expertise pour décider que l’assuré présentait une incapacité de travail complète dès le 1er octobre 2018. Le Tribunal fédéral a estimé que l’on ne pouvait pas non plus se fonder sur l’expertise du Dr I______ et a renvoyé la cause à la chambre de céans afin d’ordonner une nouvelle expertise psychiatrique.

c. Par courrier du 26 juillet 2023, la chambre de céans a informé les parties qu’elle envisageait de mandater le professeur V______, spécialiste FMH en psychiatrie, aux fins de lui confier la nouvelle expertise psychiatrique ordonnée par le Tribunal fédéral.

d. Un projet de mandat a été transmis aux parties, qui ont fait valoir leurs observations, respectivement en date du 8 et du 11 septembre 2023.

 

 

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.        Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Toutefois, dans la mesure où le recours était, au 1er janvier 2021, pendant devant la chambre de céans, il reste soumis à l'ancien droit (cf. art. 83 LPGA).

4.        Le délai de recours est de 30 jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

5.        Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

6.        a. Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté ; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c ; ATF 102 V 165 consid. 3.1 ; VSI 2001 p. 223 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral I 786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).

La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanant d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, tel le CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; ATF 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1 ; ATF 130 V 396 consid. 5.3 et 6).

b. Dans l’ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d'évaluation de la capacité de travail, respectivement de l'incapacité de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d'affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d'évaluation au moyen d'un catalogue d'indicateurs (ATF 141 V 281 consid. 4). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d'évaluation aux autres affections psychiques (ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Aussi, le caractère invalidant d'atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d'un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au sein desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l'art (ATF 143 V 409 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 3 et les références).

Le Tribunal fédéral a en revanche maintenu, voire renforcé la portée des motifs d'exclusion définis dans l'ATF 131 V 49, aux termes desquels il y a lieu de conclure à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit aux prestations d'assurance, si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une exagération des symptômes ou d'une constellation semblable, et ce même si les caractéristiques d'un trouble au sens de la classification sont réalisées. Des indices d'une telle exagération apparaissent notamment en cas de discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande de soins, de grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psycho-social intact (ATF 141 V 281 consid. 2.2.1 et 2.2.2 ; ATF 132 V 65 consid. 4.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2016 du 14 juin 2016 consid. 3.2).

c. L'organe chargé de l'application du droit doit, avant de procéder à l'examen des indicateurs, analyser si les troubles psychiques dûment diagnostiqués conduisent à la constatation d'une atteinte à la santé importante et pertinente en droit de l'assurance-invalidité, c'est-à-dire qui résiste aux motifs dits d'exclusion tels qu'une exagération ou d'autres manifestations d'un profit secondaire tiré de la maladie (cf. ATF 141 V 281 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 5.2.2 et la référence).

d. Pour des motifs de proportionnalité, on peut renoncer à une appréciation selon la grille d’évaluation normative et structurée si elle n’est pas nécessaire ou si elle est inappropriée. Il en va ainsi notamment lorsqu’il n’existe aucun indice en faveur d’une incapacité de travail durable ou lorsque l’incapacité de travail est niée sous l’angle psychique sur la base d’un rapport probant établi par un médecin spécialisé et que d’éventuelles appréciations contraires n’ont pas de valeur probante du fait qu’elles proviennent de médecins n’ayant pas une qualification spécialisée ou pour d’autres raisons (arrêt du Tribunal fédéral 9C_101/2019 du 12 juillet 2019 consid. 4.3 et la référence ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_724/2018 du 11 juillet 2019 consid. 7). En l’absence d’un diagnostic psychiatrique, une telle appréciation n’a pas non plus à être effectuée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_176/2018 du 16 août 2018 consid. 3.2.2).

7.        Selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d'évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d'une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d'autre part, des potentiels de compensation (ressources) (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L'accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d'exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence). 

Il y a lieu de se fonder sur une grille d’analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).

Ces indicateurs sont classés comme suit :

I. Catégorie « degré de gravité fonctionnelle »

Les indicateurs relevant de cette catégorie représentent l’instrument de base de l’analyse. Les déductions qui en sont tirées devront, dans un second temps, résister à un examen de la cohérence (ATF 141 V 281 consid. 4.3).

A. Axe « atteinte à la santé »

1. Caractère prononcé des éléments et des symptômes pertinents pour le diagnostic

Les constatations relatives aux manifestations concrètes de l’atteinte à la santé diagnostiquée permettent de distinguer les limitations fonctionnelles causées par cette atteinte de celles dues à des facteurs non assurés. Le point de départ est le degré de gravité minimal inhérent au diagnostic. Il doit être rendu vraisemblable compte tenu de l’étiologie et de la pathogenèse de la pathologie déterminante pour le diagnostic (ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.1).

L'influence d'une atteinte à la santé sur la capacité de travail est davantage déterminante que sa qualification en matière d'assurance-invalidité (ATF 142 V 106 consid. 4.4). Diagnostiquer une atteinte à la santé, soit identifier une maladie d'après ses symptômes, équivaut à l'appréciation d'une situation médicale déterminée qui, selon les médecins consultés, peut aboutir à des résultats différents en raison précisément de la marge d'appréciation inhérente à la science médicale (ATF 145 V 361 consid. 4.1.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_212/2020 du 4 septembre 2020 consid. 4.2 et 9C_762/2019 du 16 juin 2020 consid. 5.2).

2. Succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à ces derniers

Le déroulement et l'issue d'un traitement médical sont en règle générale aussi d'importants indicateurs concernant le degré de gravité du trouble psychique évalué. Il en va de même du déroulement et de l'issue d'une mesure de réadaptation professionnelle. Ainsi, l'échec définitif d'une thérapie médicalement indiquée et réalisée selon les règles de l'art de même que l'échec d'une mesure de réadaptation - malgré une coopération optimale de l'assuré - sont en principe considérés comme des indices sérieux d'une atteinte invalidante à la santé. À l'inverse, le défaut de coopération optimale conduit plutôt à nier le caractère invalidant du trouble en question. Le résultat de l'appréciation dépend toutefois de l'ensemble des circonstances individuelles du cas d'espèce (arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2.1.3 et la référence).

3. Comorbidités

La présence de comorbidités ou troubles concomitants est un indicateur à prendre en considération en relation avec le degré de gravité fonctionnel (arrêt du Tribunal fédéral 9C_650/2019 du 11 mai 2020 consid. 3.3 et la référence). On ne saurait toutefois inférer la réalisation concrète de l'indicateur « comorbidité » et, partant, un indice suggérant la gravité et le caractère invalidant de l'atteinte à la santé, de la seule existence de maladies psychiatriques et somatiques concomitantes. Encore faut-il examiner si l'interaction de ces troubles ayant valeur de maladie prive l'assuré de certaines ressources (arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 consid. 5.2.3 et la référence). Il est nécessaire de procéder à une approche globale de l’influence du trouble avec l’ensemble des pathologies concomitantes. Une atteinte qui, selon la jurisprudence, ne peut pas être invalidante en tant que telle (cf. ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_98/2010 du 28 avril 2010 consid. 2.2.2, in : RSAS 2011 IV n° 17, p. 44) n’est pas une comorbidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_1040/2010 du 6 juin 2011 consid. 3.4.2.1, in : RSAS 2012 IV n° 1, p. 1), mais doit à la rigueur être prise en considération dans le cadre du diagnostic de la personnalité (ATF 141 V 281 consid. 4.3.2). Ainsi, un trouble dépressif réactionnel au trouble somatoforme ne perd pas toute signification en tant que facteur d’affaiblissement potentiel des ressources, mais doit être pris en considération dans l’approche globale (ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.3).

Même si un trouble psychique, pris séparément, n'est pas invalidant en application de la nouvelle jurisprudence, il doit être pris en considération dans l'appréciation globale de la capacité de travail, qui tient compte des effets réciproques des différentes atteintes. Ainsi, une dysthymie, prise séparément, n'est pas invalidante, mais peut l'être lorsqu'elle est accompagnée d’un trouble de la personnalité notable. Par conséquent, indépendamment de leurs diagnostics, les troubles psychiques entrent déjà en considération en tant que comorbidité importante du point de vue juridique si, dans le cas concret, on doit leur attribuer un effet limitatif sur les ressources (ATF 143 V 418 consid. 8.1).

B. Axe « personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles)

Le « complexe personnalité » englobe, à côté des formes classiques du diagnostic de la personnalité qui vise à saisir la structure et les troubles de la personnalité, le concept de ce qu’on appelle les « fonctions complexes du moi » qui désignent des capacités inhérentes à la personnalité, permettant des déductions sur la gravité de l’atteinte à la santé et de la capacité de travail (par exemple : auto-perception et perception d’autrui, contrôle de la réalité et formation du jugement, contrôle des affects et des impulsions, intentionnalité et motivation ; cf. ATF 141 V 281 consid. 4.3.2). Étant donné que l’évaluation de la personnalité est davantage dépendante de la perception du médecin examinateur que l’analyse d’autres indicateurs, les exigences de motivation sont plus élevées (ATF 141 V 281 consid. 4.3.2).

Le Tribunal fédéral a estimé qu’un assuré présentait des ressources personnelles et adaptatives suffisantes, au vu notamment de la description positive qu’il avait donnée de sa personnalité, sans diminution de l'estime ou de la confiance en soi et sans peur de l'avenir (arrêt du Tribunal fédéral 8C_584/2016 du 30 juin 2017 consid. 5.2).

C. Axe « contexte social »

Si des difficultés sociales ont directement des conséquences fonctionnelles négatives, elles continuent à ne pas être prises en considération. En revanche, le contexte de vie de l’assuré peut lui procurer des ressources mobilisables, par exemple par le biais de son réseau social. Il faut toujours s’assurer qu’une incapacité de travail pour des raisons de santé ne se confond pas avec le chômage non assuré ou avec d’autres difficultés de vie (ATF 141 V 281 consid. 4.3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 consid. 5.2.3).

Lors de l'examen des ressources que peut procurer le contexte social et familial pour surmonter l'atteinte à la santé ou ses effets, il y a lieu de tenir compte notamment de l'existence d'une structure quotidienne et d'un cercle de proches […]. Le contexte familial est susceptible de fournir des ressources à la personne assurée pour surmonter son atteinte à la santé ou les effets de cette dernière sur sa capacité de travail, nonobstant le fait que son attitude peut rendre plus difficile les relations interfamiliales (arrêt du Tribunal fédéral 9C_717/2019 du 30 septembre 2020 consid. 6.2.5.3). Toutefois, des ressources préservées ne sauraient être inférées de relations maintenues avec certains membres de la famille dont la personne assurée est dépendante (arrêt du Tribunal fédéral 9C_55/2020 du 22 octobre 2020 consid. 5.2).

II. Catégorie « cohérence »

Il convient ensuite d’examiner si les conséquences qui sont tirées de l’analyse des indicateurs de la catégorie « degré de gravité fonctionnel » résistent à l’examen sous l’angle de la catégorie « cohérence ». Cette seconde catégorie comprend les indicateurs liés au comportement de l’assuré (ATF 141 V 281 consid. 4.4). À ce titre, il convient notamment d’examiner si les limitations fonctionnelles se manifestent de la même manière dans la vie professionnelle et dans la vie privée, de comparer les niveaux d’activité sociale avant et après l’atteinte à la santé ou d’analyser la mesure dans laquelle les traitements et les mesures de réadaptation sont mis à profit ou négligés. Dans ce contexte, un comportement incohérent est un indice que les limitations évoquées seraient dues à d’autres raisons qu’une atteinte à la santé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.3).

A. Limitation uniforme du niveau des activités dans tous les domaines comparables de la vie

Il s’agit ici de se demander si l’atteinte à la santé limite l’assuré de manière semblable dans son activité professionnelle ou dans l’exécution de ses travaux habituels et dans les autres activités (par exemple, les loisirs). Le critère du retrait social utilisé jusqu’ici doit désormais être interprété de telle sorte qu’il se réfère non seulement aux limitations mais également aux ressources de l’assuré et à sa capacité à les mobiliser. Dans la mesure du possible, il convient de comparer le niveau d’activité sociale de l’assuré avant et après la survenance de l’atteinte à la santé (ATF 141 V 281 consid. 4.4.1).

B. Poids de la souffrance révélé par l’anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation

L'interruption de toute thérapie médicalement indiquée sur le plan psychique et le refus de participer à des mesures de réadaptation d'ordre professionnel sont des indices importants que l’assuré ne présente pas une évolution consolidée de la douleur et que les limitations invoquées sont dues à d'autres motifs qu'à son atteinte à la santé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_569/2017 du 18 juillet 2018 consid. 5.5.2).

La prise en compte d’options thérapeutiques, autrement dit la mesure dans laquelle les traitements sont mis à profit ou alors négligés, permet d’évaluer le poids effectif des souffrances. Tel n’est toutefois pas le cas lorsque le comportement est influencé par la procédure assécurologique en cours. Il ne faut pas conclure à l’absence de lourdes souffrances lorsque le refus ou la mauvaise acceptation du traitement recommandé est la conséquence d’une incapacité (inévitable) de l’assuré à reconnaître sa maladie (anosognosie). Les mêmes principes s’appliquent pour les mesures de réadaptation. Un comportement incohérent de l'assuré est là aussi un indice que la limitation fonctionnelle est due à d’autres raisons qu’à l'atteinte à la santé assurée (ATF 141 V 281 consid. 4.4.2).

8.        Selon la jurisprudence applicable jusqu’ici, un syndrome de dépendance primaire à des substances psychotropes (dont l’alcool) ne pouvait conduire à une invalidité au sens de la loi que s’il engendrait une maladie ou occasionnait un accident ou s’il résultait lui-même d’une atteinte à la santé physique ou psychique ayant valeur de maladie. Cette jurisprudence reposait sur la prémisse que la personne souffrant de dépendance avait provoqué elle-même fautivement cet état et qu'elle aurait pu, en faisant preuve de diligence, se rendre compte suffisamment tôt des conséquences néfastes de son addiction et effectuer un sevrage ou à tout le moins entreprendre une thérapie par (cf. notamment ATF 124 V 265 consid. 3c).

Dans un arrêt du 11 juillet 2019 (ATF 145 V 215), le Tribunal fédéral est parvenu à la conclusion que sa pratique en matière de syndrome de dépendance ne peut plus être maintenue. D’un point de vue médical, les syndromes de dépendance et les troubles liés à la consommation de substances diagnostiqués lege artis par un spécialiste doivent également être considérés comme des atteintes (psychiques) à la santé significatives au sens du droit de l’assurance invalidité (consid. 5.3.3 et 6).

Le caractère primaire ou secondaire d’un trouble de la dépendance n’est plus décisif pour en nier d’emblée toute pertinence sous l’angle du droit de l’assurance-invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.1.1). Par conséquent, il s’agit, comme pour toutes les autres troubles psychiques, de déterminer selon une grille d’évaluation normative et structurée (à cet égard, ATF 141 V 281) si, et le cas échéant, dans quelle mesure un syndrome de dépendance diagnostiqué par un spécialiste influence dans le cas concret la capacité de travail de l’assuré. La gravité de la dépendance dans un cas particulier peut et doit être prise en compte dans la procédure de preuve structurée (ATF 145 V 215 consid. 6.3). Ceci est d'autant plus important que dans le cas des troubles de la dépendance – comme dans celui d'autres troubles psychiques – il y a souvent un mélange de troubles ayant valeur de maladie ainsi que de facteurs psychosociaux et socio-culturels. L’obligation de diminuer le dommage (art. 7 LAI) s'applique également en cas de syndrome de dépendance, de sorte que l’assuré peut être tenu de participer activement à un traitement médical raisonnablement exigible (art. 7 al. 2 let. d LAI). S’il ne respecte pas son obligation de diminuer le dommage, mais qu’il maintient délibérément son état pathologique, l’art. 7b al. 1 LAI en liaison avec l'art. 21 al. 4 LPGA permet le refus ou la réduction des prestations (consid 5.3.1).

9.        Selon la jurisprudence rendue jusque-là à propos des dépressions légères à moyennes, les maladies en question n'étaient considérées comme invalidantes que lorsqu'on pouvait apporter la preuve qu'elles étaient « résistantes à la thérapie » (ATF 140 V 193 consid 3.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_841/2016 du 8 février 2017 consid. 3.1 et 9C_13/2016 du 14 avril 2016 consid. 4.2).

Dans l'ATF 143 V 409 consid. 4.2, le Tribunal fédéral a rappelé que le fait qu'une atteinte à la santé psychique puisse être influencée par un traitement ne suffit pas, à lui seul, pour nier le caractère invalidant de celle-ci ; la question déterminante est en effet celle de savoir si la limitation établie médicalement empêche, d'un point de vue objectif, la personne assurée d'effectuer une prestation de travail. À cet égard, toutes les affections psychiques doivent en principe faire l'objet d'une procédure probatoire structurée au sens de l'ATF 141 V 281 (ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Ainsi, le caractère invalidant des atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d'un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au sein desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l'art (ATF 143 V 409 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_142/2018 du 24 avril 2018 consid. 5.2).

Dans les cas où, au vu du dossier, il est vraisemblable qu'il n'y a qu'un léger trouble dépressif, qui ne peut déjà être considéré comme chronifié et qui n'est pas non plus associé à des comorbidités, aucune procédure de preuve structurée n'est généralement requise (arrêt du Tribunal fédéral 9C_14/2018 du 12 mars 2018 consid 2.1).

10.    Selon la jurisprudence, une dysthymie (F34.1) est susceptible d'entraîner une diminution de la capacité de travail lorsqu'elle se présente avec d'autres affections, à l'instar d'un grave trouble de la personnalité. Pour en évaluer les éventuels effets limitatifs, ces atteintes doivent en principe faire l'objet d'une procédure probatoire structurée selon l'ATF 141 V 281 (arrêt du Tribunal fédéral 9C_599/2019 du 24 août 2020 consid. 5.1 et la référence).

11.    Des traits de personnalité signifient que les symptômes constatés ne sont pas suffisants pour retenir l’existence d’un trouble spécifique de la personnalité. Ils n'ont, en principe, pas valeur de maladie psychiatrique et ne peuvent, en principe, fonder une incapacité de travail en droit des assurances au sens des art. 4 al. 1 LAI et 8 LPGA (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 5.3 et les références).

12.    Les principes jurisprudentiels développés en matière de troubles somatoformes douloureux sont également applicables à la fibromyalgie (ATF 132 V 65 consid. 4.1), au syndrome de fatigue chronique ou de neurasthénie (ATF 139 V 346 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_662/2009 du 17 août 2010 consid. 2.3 in SVR 2011 IV n° 26 p. 73), à l'anesthésie dissociative et aux atteintes sensorielles (arrêt du Tribunal fédéral I 9/07 du 9 février 2007 consid. 4 in SVR 2007 IV n° 45 p. 149), à l’hypersomnie (ATF 137 V 64 consid. 4), ainsi qu'en matière de troubles moteurs dissociatifs (arrêt du Tribunal fédéral 9C_903/2007 du 30 avril 2008 consid. 3.4), de traumatisme du type « coup du lapin » (ATF 141 V 574 consid. 5.2 et ATF 136 V 279 consid. 3.2.3) et d’état de stress post-traumatique (ATF 142 V 342 consid. 5.2). En revanche, ils ne sont pas applicables par analogie à la fatigue liée au cancer (cancer-related Fatigue) (ATF 139 V 346 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_73/2013 du 2 septembre 2013 consid. 5).

13.    En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois-quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

14.    En vertu des art. 28 al. 1 et 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à la date dès laquelle l’assuré a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne pendant une année sans interruption notable et qu’au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins, mais au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA. Selon l’art. 29 al. 3 LAI, la rente est versée dès le début du mois au cours duquel le droit prend naissance.

15.    a. Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3 ; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

b. Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

c. Le juge ne s'écarte pas sans motifs impératifs des conclusions d'une expertise médicale judiciaire, la tâche de l'expert étant précisément de mettre ses connaissances spéciales à la disposition de la justice afin de l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné. Selon la jurisprudence, peut constituer une raison de s'écarter d'une expertise judiciaire le fait que celle-ci contient des contradictions, ou qu'une surexpertise ordonnée par le tribunal en infirme les conclusions de manière convaincante. En outre, lorsque d'autres spécialistes émettent des opinions contraires aptes à mettre sérieusement en doute la pertinence des déductions de l'expert, on ne peut exclure, selon les cas, une interprétation divergente des conclusions de ce dernier par le juge ou, au besoin, une instruction complémentaire sous la forme d'une nouvelle expertise médicale (ATF 125 V 351 consid. 3b/aa et les références).

d. Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Dans une procédure portant sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurances sociales, lorsqu'une décision administrative s'appuie exclusivement sur l'appréciation d'un médecin interne à l'assureur social et que l'avis d'un médecin traitant ou d'un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes même faibles quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l'un ou sur l'autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l'art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 135 V 465 consid. 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_301/2013 du 4 septembre 2013 consid. 3).

e. Une appréciation médicale, respectivement une expertise médicale établie sur la base d'un dossier n’est pas en soi sans valeur probante. Une expertise médicale établie sur la base d'un dossier peut avoir valeur probante pour autant que celui-ci contienne suffisamment d'appréciations médicales qui, elles, se fondent sur un examen personnel de l'assuré (RAMA 2001 n° U 438 p. 346 consid. 3d). L’importance de l’examen personnel de l’assuré par l’expert n’est reléguée au second plan que lorsqu’il s’agit, pour l’essentiel, de porter un jugement sur des éléments d’ordre médical déjà établis et que des investigations médicales nouvelles s’avèrent superflues. En pareil cas, une expertise médicale effectuée uniquement sur la base d’un dossier peut se voir reconnaître une pleine valeur probante (arrêt du Tribunal fédéral 8C_681/2011 du 27 juin 2012 consid. 4.1 et les références).

f. Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 [RAI - RS 831.201] ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve ; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

g. En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

h. On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2).

i. Les constatations médicales peuvent être complétées par des renseignements d’ordre professionnel, par exemple au terme d'un stage dans un centre d'observation professionnel de l'assurance-invalidité, en vue d'établir concrètement dans quelle mesure l'assuré est à même de mettre en valeur une capacité de travail et de gain sur le marché du travail. Il appartient alors au médecin de décrire les activités que l'on peut encore raisonnablement attendre de l'assuré compte tenu de ses atteintes à la santé (influence de ces atteintes sur sa capacité à travailler en position debout et à se déplacer ; nécessité d'aménager des pauses ou de réduire le temps de travail en raison d'une moindre résistance à la fatigue, par exemple), en exposant les motifs qui le conduisent à retenir telle ou telle limitation de la capacité de travail. En revanche, il revient au conseiller en réadaptation, non au médecin, d'indiquer quelles sont les activités professionnelles concrètes entrant en considération sur la base des renseignements médicaux et compte tenu des aptitudes résiduelles de l'assuré. Dans ce contexte, l'expert médical et le conseiller en matière professionnelle sont tenus d'exercer leurs tâches de manière complémentaire, en collaboration étroite et réciproque (ATF 107 V 17 consid. 2b ; SVR 2006 IV n° 10 p. 39).

En cas d'appréciation divergente entre les organes d'observation professionnelle et les données médicales, l'avis dûment motivé d'un médecin prime pour déterminer la capacité de travail raisonnablement exigible de l'assuré (arrêt du Tribunal fédéral I 531/04 du 11 juillet 2005, consid. 4.2). En effet, les données médicales permettent généralement une appréciation plus objective du cas et l'emportent, en principe, sur les constatations qui peuvent être faites à l'occasion d'un stage d'observation professionnelle, qui sont susceptibles d’être influencées par des éléments subjectifs liés au comportement de l'assuré pendant le stage (arrêt du Tribunal fédéral 9C_462/2009 du 2 décembre 2009 consid. 2.4). Au regard de la collaboration, étroite, réciproque et complémentaire selon la jurisprudence, entre les médecins et les organes d'observation professionnelle (cf. ATF 107 V 17 consid. 2b), on ne saurait toutefois dénier toute valeur aux renseignements d'ordre professionnel recueillis à l'occasion d'un stage pratique pour apprécier la capacité résiduelle de travail de l'assuré en cause. Au contraire, dans les cas où l'appréciation d'observation professionnelle diverge sensiblement de l'appréciation médicale, il incombe à l'administration, respectivement au juge - conformément au principe de la libre appréciation des preuves - de confronter les deux évaluations et, au besoin de requérir un complément d'instruction (ATF 9C_1035/2009 du 22 juin 2010 consid. 4.1, in SVR 2011 IV n° 6 p. 17 ; ATF 9C_833/2007 du 4 juillet 2008, in Plädoyer 2009/1 p. 70 ; arrêt du Tribunal fédéral I 35/03 du 24 octobre 2003 consid. 4.3 et les références, in Plädoyer 2004/3 p. 64 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_512/2013 du 16 janvier 2014 consid. 5.2.1).

16.    En ce qui concerne les facteurs psychosociaux ou socioculturels et leur rôle en matière d'invalidité, ils ne figurent pas au nombre des atteintes à la santé susceptibles d'entraîner une incapacité de gain au sens de l'art. 4 al. 1 LAI. Pour qu'une invalidité soit reconnue, il est nécessaire, dans chaque cas, qu'un substrat médical pertinent, entravant la capacité de travail (et de gain) de manière importante, soit mis en évidence par le médecin spécialisé. Plus les facteurs psychosociaux et socioculturels apparaissent au premier plan et imprègnent l'anamnèse, plus il est essentiel que le diagnostic médical précise s'il y a atteinte à la santé psychique qui équivaut à une maladie. Ainsi, il ne suffit pas que le tableau clinique soit constitué d'atteintes qui relèvent de facteurs socioculturels ; il faut au contraire que le tableau clinique comporte d'autres éléments pertinents au plan psychiatrique tels, par exemple, une dépression durable au sens médical ou un état psychique assimilable, et non une simple humeur dépressive. Une telle atteinte psychique, qui doit être distinguée des facteurs socioculturels, et qui doit de manière autonome influencer la capacité de travail, est nécessaire en définitive pour que l'on puisse parler d'invalidité. En revanche, là où l'expert ne relève pour l'essentiel que des éléments qui trouvent leur explication et leur source dans le champ socioculturel ou psychosocial, il n'y a pas d'atteinte à la santé à caractère invalidant (ATF 127 V 294 consid. 5a in fine).

17.    Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

18.    Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

19.    Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a ; ATF 122 III 219 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101 ; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; ATF 122 V 157 consid. 1d).

20.    Le fait qu'une personne non atteinte dans sa santé décide de travailler à temps partiel est sans influence sur le choix de la méthode d'évaluation de l'invalidité – et dès lors n'entraîne pas l'application de la méthode mixte –, sauf si cette personne consacre à ses travaux habituels le temps libre supplémentaire dont elle dispose. Si un assuré, en mesure sur le plan de la santé d’exercer une activité lucrative à plein temps, décide de son propre gré de réduire son horaire de travail pour s’accorder plus de loisirs, l’assurance-invalidité n'a pas à intervenir. Les activités de loisirs sont ainsi exclues de la définition des travaux habituels (ATF 131 V 51 consid. 5.1.2 et 5.2, précisé par l’ATF 142 V 290 consid. 7 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_432/2016 du 10 février 2017 consid. 5.1). La limitation dans le domaine lucratif doit être prise en considération de façon proportionnelle – en fonction de l'étendue de l’hypothétique taux d’activité lucrative à temps partiel (consid. ATF 142 V 290 consid. 7).

21.    a. Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu réaliser s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA).

La comparaison des revenus s'effectue, en règle ordinaire, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité (méthode générale de comparaison des revenus ; ATF 128 V 29 consid. 1 ; ATF 104 V 135 consid. 2a et 2b).

Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente ; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 et ATF 128 V 174).

b. Pour fixer le revenu sans invalidité, il faut établir ce que l'assuré aurait – au degré de la vraisemblance prépondérante – réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas invalide (ATF 139 V 28 consid. 3.3.2 et ATF 135 V 297 consid. 5.1). Ce revenu doit être évalué de manière aussi concrète que possible si bien qu’il convient, en règle générale, de se référer au dernier salaire que l'assuré a obtenu avant l'atteinte à la santé, en tenant compte de l'évolution des circonstances au moment de la naissance du droit à la rente et des modifications susceptibles d'influencer ce droit survenues jusqu'au moment où la décision est rendue (ATF 129 V 222 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_869/2017 du 4 mai 2018 consid. 2.2). Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières qu'il peut se justifier qu'on s'en écarte et qu'on recoure aux données statistiques résultant de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après : ESS) éditée par l'Office fédéral de la statistique (ci-après : l'OFS) (arrêt du Tribunal fédéral I 201/06 du 14 juillet 2006 consid. 5.2.3 et I 774/01 du 4 septembre 2002). Tel sera le cas lorsqu'on ne dispose d'aucun renseignement au sujet de la dernière activité professionnelle de l'assuré ou si le dernier salaire que celui-ci a perçu ne correspond manifestement pas à ce qu'il aurait été en mesure de réaliser, selon toute vraisemblance, en tant que personne valide ; par exemple, lorsqu'avant d'être reconnu définitivement incapable de travailler, l'assuré était au chômage ou rencontrait d'ores et déjà des difficultés professionnelles en raison d'une dégradation progressive de son état de santé ou encore percevait une rémunération inférieure aux normes de salaire usuelles. On peut également songer à la situation dans laquelle le poste de travail de l'assuré avant la survenance de l'atteinte à la santé n'existe plus au moment déterminant de l'évaluation de l'invalidité (arrêts du Tribunal fédéral I 168/05 du 24 avril 2006 consid. 3.3 et B 80/01 du 17 octobre 2003 consid. 5.2.2).

c. Quant au revenu d'invalide, il doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l'intéressé (ATF 135 V 297 consid. 5.2). Lorsque l'assuré n'a pas repris d'activité, ou aucune activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, contrairement à ce qui serait raisonnablement exigible de sa part, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base de données statistiques, telles qu'elles résultent de l’ESS (ATF 126 V 75 consid. 3b/aa et bb). Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table ESS TA1, à la ligne « total secteur privé » (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 124 V 321 consid. 3b/bb). La valeur statistique - médiane - s'applique alors, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu'elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu'ils seraient en mesure de réaliser en tant qu'invalides dès lors qu'il recouvre un large éventail d'activités variées et non qualifiées (branche d'activités), n'impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (cf. arrêts du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1 et 9C_242/2012 du 13 août 2012 consid. 3). Il convient de se référer à la version de l'ESS publiée au moment déterminant de la décision querellée (ATF 143 V 295 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2016 du 4 août 2017 consid. 6.3). À cet égard, l’ESS 2018 a été publiée le 21 avril 2020 ; l’ESS 2016, le 26 octobre 2018 (étant précisé que le tableau T1_tirage_skill_level a été corrigé le 8 novembre 2018) ; et l’ESS 2014, le 15 avril 2016.

d. Toutefois, lorsque cela apparaît indiqué dans un cas concret pour permettre à l'assuré de mettre pleinement à profit sa capacité résiduelle de travail, il y a lieu parfois de se référer aux salaires mensuels de secteurs particuliers (secteur 2 [production] ou 3 [services]), voire à des branches particulières. Tel est notamment le cas lorsqu’avant l'atteinte à la santé, l'assuré a travaillé dans un domaine pendant de nombreuses années et qu'une activité dans un autre domaine n'entre pas en ligne de compte. En outre, lorsque les circonstances du cas concret le justifient, on peut s'écarter de la table TA1 (secteur privé) pour se référer à la table TA7 (secteur privé et secteur public [Confédération] ensemble), si cela permet de fixer plus précisément le revenu d'invalide et que le secteur en question est adapté et exigible (ATF 133 V 545, et les références citées).

e. La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). L'étendue de l'abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d'appréciation (ATF 132 V 393 consid. 3.3). Cette évaluation ressortit en premier lieu à l'administration, qui dispose pour cela d'un large pouvoir d'appréciation. Le juge doit faire preuve de retenue lorsqu'il est amené à vérifier le bien-fondé d'une telle appréciation. L'examen porte alors sur le point de savoir si une autre solution que celle que l'autorité, dans le cas concret, a adoptée dans le cadre de son pouvoir d'appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n'aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. Pour autant, le juge ne peut, sans motif pertinent, substituer son appréciation à celle de l'administration ; il doit s'appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 126 V 75 consid. 6 ; ATF 123 V 150 consid. 2 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_337/2009 du 18 février 2010 consid. 7.5).

f. Depuis la 10e édition des ESS (ESS 2012), les emplois sont classés par l'OFS par profession en fonction du type de travail qui est généralement effectué. L'accent est ainsi mis sur le type de tâches que la personne concernée est susceptible d'assumer en fonction de ses qualifications (niveau de ses compétences) et non plus sur les qualifications en elles-mêmes. Quatre niveaux de compétence ont été définis en fonction de neuf groupes de profession (voir tableau T17 de l'ESS 2012 p. 44) et du type de travail, de la formation nécessaire à la pratique de la profession et de l'expérience professionnelle (voir tableau TA1_skill_level de l'ESS 2012 ; ATF 142 V 178 consid. 2.5.3 p. 184). Le niveau 1 est le plus bas et correspond aux tâches physiques et manuelles simples, tandis que le niveau 4 est le plus élevé et regroupe les professions qui exigent une capacité à résoudre des problèmes complexes et à prendre des décisions fondées sur un vaste ensemble de connaissances théoriques et factuelles dans un domaine spécialisé (on y trouve par exemple les directeurs/trices, les cadres de direction et les gérant[e]s, ainsi que les professions intellectuelles et scientifiques). Entre ces deux extrêmes figurent les professions dites intermédiaires (niveaux 3 et 2). Le niveau 3 implique des tâches pratiques complexes qui nécessitent un vaste ensemble de connaissances dans un domaine spécialisé (notamment les techniciens, les superviseurs, les courtiers ou encore le personnel infirmier). Le niveau 2 se réfère aux tâches pratiques telles que la vente, les soins, le traitement des données, les tâches administratives, l'utilisation de machines et d'appareils électroniques, les services de sécurité et la conduite de véhicules (arrêt du Tribunal fédéral 9C_370/2019 du 10 juillet 2019 consid. 4.1 et les références).

g. Bien que l'âge soit inclus dans le cercle des critères déductibles depuis la jurisprudence de l'ATF 126 V 75 – laquelle continue de s'appliquer (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_470/2017 du 29 juin 2018 consid. 4.2) – il ne suffit pas de constater qu'un assuré a dépassé la cinquantaine au moment déterminant du droit à la rente pour que cette circonstance justifie de procéder à un abattement. Encore récemment, le Tribunal fédéral a rappelé que l'effet de l'âge combiné avec un handicap doit faire l'objet d'un examen dans le cas concret, les possibles effets pénalisants au niveau salarial induits par cette constellation aux yeux d'un potentiel employeur pouvant être compensés par d'autres éléments personnels ou professionnels tels que la formation et l'expérience professionnelle de l'assuré concerné (arrêt du Tribunal fédéral 8C_227/2017 précité consid. 5). Il a considéré qu'un assuré ayant accompli plusieurs missions temporaires, alors qu'il était inscrit au chômage consécutivement à la cessation d'activité de son ancien employeur, disposait d'une certaine capacité d'adaptation sur le plan professionnel susceptible de compenser les désavantages compétitifs liés à son âge (59 ans au moment déterminant), surtout dans le domaine des emplois non qualifiés qui sont, en règle générale, disponibles indépendamment de l'âge de l'intéressé sur le marché équilibré du travail (arrêt du Tribunal fédéral 8C_227/2017 du 17 mai 2018 consid. 5 ; voir aussi arrêts du Tribunal fédéral 8C_403/2017 du 25 août 2017 consid. 4.4.1 et 8C_805/2016 du 22 mars 2017 consid. 3.4.3). À l'inverse, dans un autre arrêt récent rendu en matière d'assurance-invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_470/2017 du 29 juin 2018 consid. 4.2), le Tribunal fédéral a retenu un taux d'abattement de 10% dans le cas d'un assuré âgé de 61 ans qui, durant de longues années, avait accompli des activités saisonnières dans le domaine de la plâtrerie et dont le niveau de formation était particulièrement limité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_103/2018 du 25 juillet 2018 consid. 5.2). En revanche, il a contesté un abattement dans le cas d’un assuré âgé de 55 ans au motif que ses excellentes qualifications personnelles, professionnelles et académiques constituaient un avantage indéniable en terme de facilité d’intégration sur le marché du travail (arrêt du Tribunal fédéral 9C_375/2019 du 25 septembre 2019 consid. 7.3).

h. Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de constater que le travail à plein temps n'est pas nécessairement mieux rémunéré que le travail à temps partiel ; dans certains domaines d'activités, les emplois à temps partiel sont en effet répandus et répondent à un besoin de la part des employeurs, qui sont prêts à les rémunérer en conséquence (ATF 126 V 75 consid. 5a/cc ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 8C_49/2018 du 8 novembre 2018 consid. 6.2.2.2). Cela étant, si selon les statistiques, les femmes exerçant une activité à temps partiel ne perçoivent souvent pas un revenu moins élevé proportionnellement à celles qui sont occupées à plein temps (cf., p. ex., arrêt du Tribunal fédéral 9C_751/2011 du 30 avril 2012 consid. 4.2.2), la situation se présente différemment pour les hommes ; le travail à temps partiel peut en effet être synonyme d'une perte de salaire pour les travailleurs à temps partiel de sexe masculin (arrêt du Tribunal fédéral 8C_805/2016 du 22 mars 2017 consid. 3.2).

i. Selon le tableau T 18 « Salaire mensuel brut (valeur centrale) selon le taux d'occupation, la position professionnelle et le sexe » de l'ESS 2014, on constate en effet que les travailleurs occupés entre 50% et 74% perçoivent un salaire mensuel de CHF 5'714.- (calculé sur la base d'un taux d'occupation de 100%), soit un salaire moins élevé que celui versé en cas d'emploi à temps plein (taux d'occupation de 90% ou plus), lequel se monte à CHF 6'069.-. Dans la mesure où les statistiques démontrent que les travailleurs occupés entre 50% et 74% reçoivent un salaire mensuel inférieur de 5,84% à celui versé aux hommes travaillant à temps plein (taux d'occupation de 90% ou plus), il se justifie de procéder à un abattement supplémentaire pour ce motif (arrêt du Tribunal fédéral 9C_10/2019 du 29 avril 2019 consid. 5.2.2).

Une unilatéralité de fait ou une restriction de la main dominante peut justifier un abattement compris entre 20% et 25% (arrêts du Tribunal fédéral 9C_363/2017 du 22 juin 2018 consid. 4.3 et 9C_396/2014 du 15 avril 2015 consid. 5.2).

j. Cependant, lorsqu'il apparaît que l'assuré touchait un salaire nettement inférieur aux salaires habituels de la branche pour des raisons étrangères à l'invalidité et que les circonstances ne permettent pas de supposer qu'il s'est contenté d'un salaire plus modeste que celui qu'il aurait pu prétendre, il y a lieu d'en tenir compte dans la comparaison des revenus en opérant un parallélisme des revenus à comparer (ATF 134 V 322 consid. 4.1 et les arrêts cités). Le revenu effectivement réalisé doit être considéré comme nettement inférieur aux salaires habituels de la branche lorsqu'il est inférieur d'au moins 5% au salaire statistique usuel dans la branche (ATF 135 V 297 consid. 6.1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_692/2010 du 31 janvier 2011 consid. 3.2). En pratique, le parallélisme des revenus à comparer peut être effectué soit au regard du revenu sans invalidité en augmentant de manière appropriée le revenu effectivement réalisé ou en se référant aux données statistiques, soit au regard du revenu d'invalide en réduisant de manière appropriée la valeur statistique (ATF 134 V 322 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_692/2010, op. cit., consid. 3.4).

k. En cas d’absence de désignation des activités compatibles avec les limitations du recourant, le Tribunal fédéral a jugé qu'il eût été certainement judicieux que l'office AI donnât au recourant, à titre d'information, des exemples d'activités adaptées qu'il peut encore exercer, mais qu’il convient néanmoins d'admettre que le marché du travail offre un éventail suffisamment large d'activités légères, dont on doit convenir qu'un nombre significatif sont adaptées aux limitations du recourant et accessibles sans aucune formation particulière (arrêt du Tribunal fédéral 9C_279/2008 du 16 décembre 2008 consid. 4).

Lorsqu'il s'agit d'examiner dans quelle mesure un assuré peut encore exploiter économiquement sa capacité de gain résiduelle sur le marché du travail entrant en considération pour lui (art. 16 LPGA), on ne saurait subordonner la concrétisation des possibilités de travail et des perspectives de gain à des exigences excessives. Il s'ensuit que pour évaluer l'invalidité, il n'y a pas lieu d'examiner la question de savoir si un invalide peut être placé eu égard aux conditions concrètes du marché du travail, mais uniquement de se demander s'il pourrait encore exploiter économiquement sa capacité résiduelle de travail lorsque les places de travail disponibles correspondent à l'offre de la main d'oeuvre (VSI 1998 p. 293). On ne saurait toutefois se fonder sur des possibilités de travail irréalistes. Il est certes possible de s'écarter de la notion de marché équilibré du travail lorsque, notamment l'activité exigible au sens de l'art. 16 LPGA, ne peut être exercée que sous une forme tellement restreinte qu'elle n'existe quasiment pas sur le marché général du travail ou que son exercice impliquerait de l'employeur des concessions irréalistes et que, de ce fait, il semble exclu de trouver un emploi correspondant (cf. RCC 1991 p. 329 ; RCC 1989 p. 328 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_286/2015 du 12 janvier 2016 consid. 4.2 et 9C_659/2014 du 13 mars 2015 consid. 5.3.2). Le caractère irréaliste des possibilités de travail doit alors découler de l'atteinte à la santé – puisqu'une telle atteinte est indispensable à la reconnaissance d'une invalidité (cf. art. 7 et 8 LPGA) – et non de facteurs psychosociaux ou socioculturels qui sont étrangers à la définition juridique de l’invalidité (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_175/2017 du 30 octobre 2017 consid. 4.2).

D'après ces critères, il y a lieu de déterminer dans chaque cas et de manière individuelle si l'assuré est encore en mesure d'exploiter une capacité de travail résiduelle sur le plan économique et de réaliser un salaire suffisant pour exclure une rente. Ni sous l'angle de l'obligation de diminuer le dommage, ni sous celui des possibilités qu'offre un marché du travail équilibré aux assurés pour mettre en valeur leur capacité de travail résiduelle, on ne saurait exiger d'eux qu'ils prennent des mesures incompatibles avec l'ensemble des circonstances objectives et subjectives (arrêt du Tribunal fédéral 9C_1066/2009 du 22 septembre 2010 consid. 4.1 et la référence).

l. Dans l’hypothèse où un assuré présente une entière capacité de travail dans toute activité lucrative ou lorsque les revenus avec et sans invalidité sont basés sur la même tabelle statistique, les revenus avant et après invalidité sont calculés sur la même base. Il est dès lors superflu de les chiffrer avec exactitude, le degré d’invalidité se confondant avec celui de l’incapacité de travail, sous réserve d’une éventuelle réduction du salaire statistique (ATF 119 V 475 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_312/2016 du 13 mars 2017 consid. 5.4 ; arrêts du Tribunal fédéral I 43/05 du 30 juin 2006 consid. 5.2). Même s'il n'est pas indispensable de déterminer avec précision les salaires de références, il n'en demeure pas moins que, dans cette situation, l'évaluation de l'invalidité repose sur des données statistiques. Par conséquent, une réduction supplémentaire du revenu d'invalide (abattement) est possible en fonction des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (cf. ATF 126 V 75 consid. 7b).

m. En cas de baisse de rendement, l'abattement doit être appliqué à la part du salaire statistique que l’assuré est toujours susceptible de réaliser malgré sa baisse de rendement et ne saurait en aucun cas être additionné au taux de la diminution de rendement, puis il convient de déduire le résultat obtenu de ladite part salariale. La différence obtenue correspond à la perte de gain effective et donne le taux d'invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_692/2017 du 12 mars 2018 consid. 5).

Selon la jurisprudence, le résultat exact du calcul du degré d’invalidité doit être arrondi au chiffre en pour cent supérieur ou inférieur selon les règles applicables en mathématiques. En cas de résultat jusqu'à x,49%, il faut arrondir à x% et pour des valeurs à partir de x,50%, il faut arrondir à x+1% (ATF 130 V 121 consid. 3.2).

n. Dans la mesure où ces revenus ne peuvent être chiffrés exactement, ils doivent être estimés d'après les éléments connus dans le cas particulier, après quoi l'on compare entre elles les valeurs approximatives ainsi obtenues. Lorsqu'on procède à une évaluation, celle-ci ne doit pas nécessairement consister à chiffrer des valeurs approximatives ; une comparaison de valeurs exprimées simplement en pour-cent peut aussi suffire. Le revenu hypothétique réalisable sans invalidité équivaut alors à 100%, tandis que le revenu d'invalide est estimé à un pourcentage plus bas, la différence en pour-cent entre les deux valeurs exprimant le taux d'invalidité (comparaison en pour-cent ; ATF 119 V 475 consid. 2b ; ATF 114 V 313 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_312/2016 du 13 mars 2017 consid. 5.4.1).

o. Si l'on ne peut déterminer ou évaluer sûrement les deux revenus en cause, il faut, en s'inspirant de la méthode spécifique pour personnes sans activité lucrative (art. 28a al. 2 LAI en corrélation avec les art. 27 RAI et 8 al. 3 LPGA), procéder à une comparaison des activités et évaluer le degré d'invalidité d'après l'incidence de la capacité de rendement amoindrie sur la situation économique concrète (procédure extraordinaire d'évaluation de l'invalidité). La différence fondamentale entre la procédure extraordinaire d'évaluation et la méthode spécifique réside dans le fait que l'invalidité n'est pas évaluée directement sur la base d'une comparaison des activités ; on commence par déterminer, au moyen de cette comparaison, quel est l'empêchement provoqué par la maladie ou l'infirmité, après quoi l'on apprécie séparément les effets de cet empêchement sur la capacité de gain. Une certaine diminution de la capacité de rendement fonctionnelle peut certes, dans le cas d'une personne active, entraîner une perte de gain de la même importance, mais n'a pas nécessairement cette conséquence. Si l'on voulait, dans le cas des personnes actives, se fonder exclusivement sur le résultat de la comparaison des activités, on violerait le principe légal selon lequel l'invalidité, pour cette catégorie d'assurés, doit être déterminée d'après l'incapacité de gain (ATF 128 V 29 consid. 1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_312/2016, op. cit., consid. 5.4.2).

p. Lorsqu'il s'agit d'évaluer l'invalidité d'un assuré qui se trouve proche de l'âge donnant droit à la rente de vieillesse, il faut procéder à une analyse globale de la situation et se demander si, de manière réaliste, cet assuré est en mesure de retrouver un emploi sur un marché équilibré du travail. Cela revient à déterminer, dans le cas concret qui est soumis à l'administration ou au juge, si un employeur potentiel consentirait objectivement à engager l'assuré, compte tenu notamment des activités qui restent exigibles de sa part en raison d'affections physiques ou psychiques, de l'adaptation éventuelle de son poste de travail à son handicap, de son expérience professionnelle et de sa situation sociale, de ses capacités d'adaptation à un nouvel emploi, du salaire et des contributions patronales à la prévoyance professionnelle obligatoire, ainsi que de la durée prévisible des rapports de travail (arrêt du Tribunal fédéral 9C_366/2014 du 19 novembre 2014 consid. 5.2).

Pour apprécier les chances d'un assuré proche de l'âge de la retraite de mettre en valeur sa capacité résiduelle de travail sur le marché de l'emploi, il convient de se placer au moment où l'on constate que l'exercice (partiel) d'une activité lucrative est exigible du point de vue médical, soit dès que les documents médicaux permettent d'établir de manière fiable les faits y relatifs (ATF 138 V 457 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_366/2014 du 19 novembre 2014 consid. 5.3). Si on ne peut pas attendre d’un assuré proche de l'âge de la retraite qu’il reprenne une activité adaptée, le degré d'invalidité doit être déterminé en fonction de sa capacité de travail résiduelle dans l'activité qu’il exerçait avant la survenance de son atteinte à la santé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_913/2012 du 9 avril 2013 consid. 5.3 et 5.4).

À titre d’exemples, le Tribunal fédéral a considéré qu’il était exigible d’un assuré de 60 ans ayant travaillé pour l’essentiel en tant qu’ouvrier dans l’industrie textile qu’il se réinsère sur le marché du travail malgré son âge et ses limitations fonctionnelles (travaux légers et moyens avec alternance des positions dans des locaux fermés ; arrêt du Tribunal fédéral I 376/05 du 5 août 2005 consid. 4.2), de même que pour un soudeur de 60 ans avec des limitations psychiques et physiques, notamment rhumatologiques et cardiaques, qui disposait d’une capacité de travail de 70% (arrêt du Tribunal I 304/06 du 22 janvier 2007 consid. 4.2). Notre Haute Cour a en revanche nié la possibilité de valoriser sa capacité de travail résiduelle d’un assuré de 61 ans, sans formation professionnelle, qui n’avait aucune expérience dans les activités fines médicalement adaptées et ne disposait que d’une capacité de travail à temps partiel, soumise à d’autres limitations fonctionnelles, et qui selon les spécialistes ne présentait pas la capacité d’adaptation nécessaire (arrêt du Tribunal fédéral I 392/02 du 23 octobre 2003 consid. 3.3), ainsi que dans le cas d’un assuré de 64 ans capable de travailler à 50% avec de nombreuses limitations fonctionnelles (arrêt du Tribunal fédéral I 401/01 du 4 avril 2002 consid. 4c). Le Tribunal fédéral est parvenu au même constat dans le cas d’un agriculteur de 57 ans qui ne pourrait exercer d’activité adaptée sans reconversion professionnelle et qui ne disposait subjectivement pas des capacités d’adaptation nécessaires à cette fin (arrêt du Tribunal fédéral 9C_578/2009 du 29 décembre 2009 consid. 4.3.2).

22.    Ni le déconditionnement issu d'un mode de vie sédentaire et inactif, ni celui lié à une longue interruption de l'activité professionnelle ne suffisent en tant que tels pour admettre une diminution durable de la capacité de travail dans toute activité (cf. arrêts du Tribunal fédéral I 524/04 du 28 juin 2005 consid. 5 et I 597/03 du 22 mars 2004 consid. 4.1). En revanche, lorsque le déconditionnement se révèle être la conséquence directe et inévitable d'une atteinte à la santé, son incidence sur la capacité de travail ne saurait d'emblée être niée. À cet égard, les éléments empêchant la réadaptation et la réintégration professionnelles qui ne sont pas dus à l'atteinte à la santé n'ont pas à être pris en considération. Si la mise en valeur de la capacité résiduelle de travail dépend cependant d'une mesure préalable liée à l'état de santé, et réservée du point de vue médical, il y a lieu d'en tenir compte pour évaluer ladite capacité de travail. Ainsi, lorsque le corps médical fixe une capacité résiduelle de travail, tout en réservant que celle-ci ne pourra être atteinte que moyennant l'exécution préalable de mesures de réadaptation, il n'y a pas lieu de procéder à une évaluation du taux d'invalidité sur la base de la capacité résiduelle de travail médico-théorique avant que lesdites mesures n'aient été exécutées (arrêts du Tribunal fédéral 9C_141/2009 du 5 octobre 2009 consid. 2.3.1, SVR 2010 IV n° 9 p. 27 et 9C_163/2009 du 10 septembre 2010 consid. 4.1, SVR 2011 IV n° 30 p. 86 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_809/2017 du 27 mars 2018 consid. 5.2).

23.    a. Aux termes de l’art. 88a al. 1 RAI, si la capacité de gain s’améliore, il y a lieu de considérer que ce changement supprime, le cas échéant, tout ou partie de son droit aux prestations dès qu’on peut s’attendre à ce que l’amélioration constatée se maintienne durant une assez longue période. Il en va de même lorsqu’un tel changement déterminant a duré trois mois déjà, sans interruption notable et sans qu’une complication prochaine soit à craindre.

b. Aux termes de l’art. 88a al. 2 RAI, si l’incapacité de gain ou la capacité d’accomplir les travaux habituels ou l’impotence ou le besoin de soins découlant de l’invalidité d’un assuré s’aggrave, il y a lieu de considérer que ce changement accroît, le cas échéant son droit aux prestations dès qu’il a duré trois mois sans interruption notable. L’art. 29bis est toutefois applicable.

24.    Les frais qui découlent de la mise en œuvre d'une expertise judiciaire pluridisciplinaire confiée à un Centre d'observation médicale de l'assurance-invalidité (ci-après : COMAI) peuvent le cas échéant être mis à la charge de l'assurance-invalidité (cf. ATF 139 V 496 consid. 4.3). En effet, lorsque l'autorité judiciaire de première instance décide de confier la réalisation d'une expertise judiciaire pluridisciplinaire à un COMAI parce qu'elle estime que l'instruction menée par l'autorité administrative est insuffisante (au sens du consid. 4.4.1.4 de l'ATF 137 V 210), elle intervient dans les faits en lieu et place de l'autorité administrative qui aurait dû, en principe, mettre en œuvre cette mesure d'instruction dans le cadre de la procédure administrative. Dans ces conditions, les frais de l'expertise ne constituent pas des frais de justice au sens de l'art. 69 al. 1 bis LAI, mais des frais relatifs à la procédure administrative au sens de l'art. 45 LPGA qui doivent être pris en charge par l'assurance-invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_312/2016 du 13 mars 2017 consid. 6.2).

Cette règle, qu'il convient également d'appliquer dans son principe aux expertises judiciaires mono- et bi-disciplinaires (cf. ATF 139 V 349 consid. 5.4), ne saurait entraîner la mise systématique des frais d'une expertise judiciaire à la charge de l'autorité administrative. Encore faut-il que l'autorité administrative ait procédé à une instruction présentant des lacunes ou des insuffisances caractérisées et que l'expertise judiciaire serve à pallier les manquements commis dans la phase d'instruction administrative. En d'autres mots, il doit exister un lien entre les défauts de l'instruction administrative et la nécessité de mettre en œuvre une expertise judiciaire (ATF 137 V 210 consid. 4.4.2). Tel est notamment le cas lorsque l'autorité administrative a laissé subsister, sans la lever par des explications objectivement fondées, une contradiction manifeste entre les différents points de vue médicaux rapportés au dossier, lorsqu'elle a laissé ouverte une ou plusieurs questions nécessaires à l'appréciation de la situation médicale ou lorsqu'elle a pris en considération une expertise qui ne remplissait manifestement pas les exigences jurisprudentielles relatives à la valeur probante de ce genre de documents (voir par exemple arrêt du Tribunal fédéral 8C_71/2013 du 27 juin 2013 consid. 2). En revanche, lorsque l'autorité administrative a respecté le principe inquisitoire et fondé son opinion sur des éléments objectifs convergents ou sur les conclusions d'une expertise qui répondait aux réquisits jurisprudentiels, la mise à sa charge des frais d'une expertise judiciaire ordonnée par l'autorité judiciaire de première instance, pour quelque motif que ce soit (à la suite par exemple de la production de nouveaux rapports médicaux ou d'une expertise privée), ne saurait se justifier (ATF 139 V 496 précité consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_312/2016 du 13 mars 2017 consid. 6.3).

25.    En l’espèce, la présente ordonnance d’expertise psychiatrique fait suite à l’arrêt du Tribunal fédéral du 15 juin 2023, plus particulièrement les considérants 4.3.1 et 4.3.2 par lesquels le Tribunal fédéral a critiqué l’expertise psychiatrique de la Dre P______.

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant préparatoirement

I.         Ordonne une expertise médicale de Monsieur A______. Commet à ces fins le professeur V______, spécialiste FMH en psychiatrie, avenue X______, à Genève.

II.      Dit que la mission d’expertise sera la suivante :

A.  Prendre connaissance du dossier de la cause, notamment l’arrêt du Tribunal fédéral du 15 juin 2023 déniant une valeur probante aux expertises des docteurs I______ et P______.

B.  Si nécessaire, prendre tous renseignements auprès des médecins ayant traité la personne expertisée, en particulier K______ (psychiatre), L______ (psychiatre), ainsi que les experts I______ (psychiatre) et P______ (psychiatre).

C.  Examiner et entendre la personne expertisée et si nécessaire, ordonner d'autres examens.

D.  Charge le Prof. V______, psychiatre, d’établir un rapport détaillé comprenant les éléments suivants :

1.             Anamnèse détaillée (avec la description d’une journée-type)

2.             Plaintes de la personne expertisée

3.             Status et constatations objectives

4.             Diagnostics (selon un système de classification reconnu)

Précisez quels critères de classification sont remplis et de quelle manière (notamment l’étiologie et la pathogenèse)

4.1 Avec répercussion sur la capacité de travail

4.1.1   Dates d'apparition

4.2    Sans répercussion sur la capacité de travail

4.2.1 Dates d'apparition

4.3 Quel est le degré de gravité de chacun des troubles diagnostiqués (faible, moyen, grave) ?

4.4    L’état de santé de la personne expertisée s’est-il amélioré / détérioré depuis 2011 ?

4.5         Dans quelle mesure les atteintes diagnostiquées limitent-elles les fonctions nécessaires à la gestion du quotidien (n’inclure que les déficits fonctionnels émanant des observations qui ont été déterminantes pour le diagnostic de l’atteinte à la santé, en confirmant ou en rejetant des limitations fonctionnelles alléguées par la personne expertisée) ?

4.6         Y a-t-il exagération des symptômes ou constellation semblable (discordance substantielle entre les douleurs décrites et le comportement observé ou l’anamnèse, allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, absence de demande de soins médicaux, plaintes très démonstratives laissant insensible l'expert, allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact) ?

4.7         Dans l’affirmative, considérez-vous que cela suffise à exclure une atteinte à la santé significative ?

5. Limitations fonctionnelles

5.1. Indiquer les limitations fonctionnelles en relation avec chaque diagnostic

5.1.1 Dates d'apparition

5.2 Les plaintes sont-elles objectivées ?

6. Cohérence

6.1 Est-ce que le tableau clinique est cohérent, compte tenu du ou des diagnostic(s) retenu(s) ou y a-t-il des atypies ?

6.2 Est-ce que ce qui est connu de l'évolution correspond à ce qui est attendu pour le ou les diagnostic(s) retenu(s) ?

6.3 Est-ce qu'il y a des discordances entre les plaintes et le comportement de la personne expertisée, entre les limitations alléguées et ce qui est connu des activités et de la vie quotidienne de la personne expertisée ? En d’autres termes, les limitations du niveau d’activité sont-elles uniformes dans tous les domaines (professionnel, personnel) ?

6.4 Quels sont les niveaux d’activité sociale et d’activités de la vie quotidienne (dont les tâches ménagères) et comment ont-ils évolué depuis la survenance de l’atteinte à la santé ?

6.5 Dans l’ensemble, le comportement de la personne expertisée vous semble-t-il cohérent et pourquoi ?

7. Personnalité

7.1 Est-ce que la personne expertisée présente un trouble de la personnalité selon les critères diagnostiques des ouvrages de référence et si oui, lequel ? Quel code ?

7.2 Est-ce que la personne expertisée présente des traits de la personnalité pathologiques et, si oui, lesquels ?

7.3 Le cas échéant, quelle est l'influence de ce trouble de personnalité ou de ces traits de personnalité pathologiques sur les limitations éventuelles et sur l'évolution des troubles de la personne expertisée ?

7.4 La personne expertisée se montre-t-elle authentique ou y a-t-il des signes d'exagération des symptômes ou de simulation ?

8. Ressources

8.1 Quelles sont les ressources résiduelles de la personne expertisée sur le plan somatique ?

8.2 Quelles sont les ressources résiduelles de la personne expertisée sur les plans :

a) psychique

b) mental

c) social et familial. En particulier, la personne expertisée peut-elle compter sur le soutien de ses proches ?

9. Capacité de travail

9.1 Dater la survenance de l’incapacité de travail durable dans l’activité habituelle pour chaque diagnostic, indiquer son taux pour chaque diagnostic et détailler l’évolution de ce taux pour chaque diagnostic.

9.2 La personne expertisée est-elle capable d’exercer son activité lucrative habituelle ?

9.2.1 Si non, ou seulement partiellement, pourquoi ? Quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ?

9.2.2 Depuis quelle date sa capacité de travail est-elle réduite / nulle ?

9.3 La personne expertisée est-elle capable d’exercer une activité lucrative adaptée à ses limitations fonctionnelles ? 

9.3.1 Si non, ou dans une mesure restreinte, pour quels motifs ? Quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ?

9.3.2 Si oui, quel est le domaine d’activité lucrative adaptée ? À quel taux ? Depuis quelle date ?

9.3.3 Dire s’il y a une diminution de rendement et la chiffrer.

9.4 Comment la capacité de travail de la personne expertisée a-t-elle évolué depuis septembre 2012 ?

9.5 Des mesures médicales sont-elles nécessaires préalablement à la reprise d’une activité lucrative ? Si oui, lesquelles ?

9.6 Quel est votre pronostic quant à l’exigibilité de la reprise d’une activité lucrative ?

10. Traitement

10.1 Examen du traitement suivi par la personne expertisée et analyse de son adéquation.

10.2 Est-ce que la personne expertisée s'est engagée ou s'engage dans les traitements qui sont raisonnablement exigibles et possiblement efficaces dans son cas ou n'a-t-elle que peu ou pas de demande de soins ?

10.3 En cas de refus ou mauvaise acceptation d’une thérapie, cette attitude doit-elle être attribuée à une incapacité de la personne expertisée à reconnaître sa maladie ?

10.4 Propositions thérapeutiques et analyse de leurs effets sur la capacité de travail de la personne expertisée.

10.5 En cas de prise de traitement antalgique et psychotrope, faire un dosage sanguin afin de vérifier la compliance et en apprécier les résultats.

11. Appréciation d'avis médicaux du dossier

11.1 Êtes-vous d’accord avec l’expertise du Dr I______ du 13 septembre 2012 ? En particulier avec les diagnostics posés, les limitations fonctionnelles constatées et l’estimation d’une capacité de travail de 100% ? Si non, pourquoi ?

11.2 Êtes-vous d'accord avec l’appréciation de la docteure Y______ du 12 août 2016 (service médical régional de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève) ? En particulier avec les diagnostics posés, les limitations fonctionnelles constatées et l’estimation d’une capacité de travail de 100% ? Si non, pourquoi ?

11.3 Êtes-vous d'accord avec l’expertise de la Dre P______ du 15 juin 2022 et son complément du 27 juillet 2022 ? En particulier avec les diagnostics posés, les limitations fonctionnelles constatées et l’estimation d’une capacité de travail de 100% ? Si non, pourquoi ?

12. Quel est le pronostic ?

13. Des mesures de réadaptation professionnelle sont-elles envisageables ?

14. Faire toutes autres observations ou suggestions utiles.

E.   Invite l’expert à faire une appréciation consensuelle du cas avec les co-experts S______, spécialiste FMH en rhumatologie, place Z______, à Genève, et R______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, avenue AA______ à Meyrin, s’agissant de toutes les problématiques ayant des interférences entre elles, notamment l’appréciation de la capacité de travail résiduelle.

F.   Invite l’expert à déposer, dans les meilleurs délais, un rapport en trois exemplaires auprès de la chambre de céans.

III. Réserve le fond ainsi que le sort des frais jusqu’à droit jugé au fond.

 

La greffière

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

Philippe KNUPFER

 

 

Une copie conforme de la présente ordonnance est notifiée aux parties le