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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1238/2023

ATAS/920/2023 du 27.11.2023 ( LAA ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1238/2023 ATAS/920/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 27 novembre 2023

Chambre 6

 

En la cause

A______

représenté par Me Mevlon ALIU, avocat

 

recourant

contre

 

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS

 

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'assuré), né le ______ 1970, de nationalité kosovare, a été victime d'un accident, le 17 août 2020, alors qu'il jouait au football : voulant contrôler le ballon avec le pied en hauteur, il a subi une rupture complète des ischio-jambiers de la cuisse droite.

b. L'assuré percevait alors des indemnités journalières de l'assurance-chômage et réalisait un gain intermédiaire, ayant été licencié de son précédent emploi d'isoleur spécialisé auprès de la société B______ au 31 mars 2020.

c. Les premiers soins lui ont été donnés le 24 août 2020, par le docteur C______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur.

B. a. La CAISSE NATIONALE SUISSE D’ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS (ci-après : la SUVA) a pris en charge le cas.

b. Le 30 septembre 2020, l'assuré a subi une intervention chirurgicale de réinsertion des ischio-jambiers sur trois ancres Healix et neurolyse du nerf sciatique, effectuée par le docteur D______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur au sein des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), qui s'est déroulée sans complications.

c. La lettre de sortie des HUG du 20 octobre 2020 faisant suite au séjour de l'assuré du 30 septembre au 8 octobre 2020 au sein du service de chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil moteur mentionne, à titre de diagnostic principal, une avulsion proximale des trois ischio-jambiers de la cuisse droite et, à titre de diagnostics secondaires, une dyspnée d'origine indéterminée, un probable syndrome d'apnée du sommeil et une dermite génitale irritative. L'évolution a été jugée satisfaisante sur le plan orthopédique.

d. Dans un rapport médical du 28 octobre 2020, la docteure E______, médecin interne aux HUG, a attesté d'une évolution moyennement favorable : la cicatrisation était bonne, mais l'assuré avait des douleurs importantes, il ne parvenait pas à rester assis et devait se tenir debout ou couché, la cicatrice était légèrement érythémateuse et un hématome profond douloureux était toujours présent.

e. Dans son rapport de consultation du 30 octobre 2020, le Dr D______ a relevé que l'évolution se montrait très favorable, avec une rééducation estimée de quatre à cinq mois.

f. La docteure F______, médecin généraliste de l'assuré, a régulièrement attesté de l'incapacité totale de travail de ce dernier et rédigé plusieurs rapports médicaux à l'intention de la SUVA, dans lesquels elle a fait état d'un pronostic réservé et d'une évolution très lente. Le 28 janvier 2021, elle a requis de la SUVA que l'assuré puisse effectuer un séjour auprès de la Clinique romande de réadaptation (ci-après : CRR), car il ressentait des douleurs persistantes au membre inférieur droit et à la hanche droite, malgré les antalgiques et la physiothérapie suivie de manière intensive ; il portait encore une attelle rigide et marchait avec difficulté, à l'aide de deux béquilles. Depuis l'accident, l'assuré souffrait aussi de troubles psychiques assimilables à un syndrome de stress post-traumatique, ce qui justifiait la prise en charge d'un suivi psychothérapeutique aux frais de la SUVA.

g. L'assuré a séjourné à la CRR du 27 avril au 16 juin 2021. Le rapport de la clinique du 8 juillet 2021 retient le diagnostic principal de traumatisme de la cuisse droite avec avulsion complète proximale des trois tendons ischio-jambiers, et les diagnostics secondaires de trouble de l'adaptation avec réaction dépressive prolongée (F43.21), stéatose hépatique modérée, et LUTS (low urinary tract symptoms) d'étiologie indéterminée. Selon le status d'entrée, l'assuré évitait de poser la fesse droite sur le lit ou sur la chaise, marchait avec une canne anglaise et une boiterie d'antalgie ; la palpation de la face postérieure de la cuisse et de la fesse droites était très douloureuse, avec des mouvements de retrait de l'assuré. Le status de sortie mettait en avant une amélioration de l'équilibre unipodal à droite et du schéma de marche, celle-ci se faisant avec deux bâtons de marche à l'extérieur et sans moyens auxiliaires à l'intérieur. À l'entrée, les plaintes de l'assuré se concentraient sur les douleurs de la face postérieure de la cuisse et de la fesse à droite, décrites comme permanentes, même au repos, la position assise et la marche les accentuant ; seule la position allongée en décubitus dorsal, genou fléchi, était confortable. Le rapport mentionne encore qu'une infiltration a été réalisée lors du séjour, qui n'a amené aucune amélioration quant aux douleurs. La participation de l'assuré aux thérapies a été considérée comme élevée et, hormis une discordance entre l'importance des douleurs et du handicap perçu et les lésions organiques objectivables, aucune incohérence n'a été relevée. La stabilisation médicale était attendue dans un délai de quatre à cinq mois, la physiothérapie pouvant encore amener des améliorations. Dans l'intervalle, les limitations fonctionnelles suivantes étaient retenues : port de charges supérieures à 5 kg, ports de charges répétés, marche sans moyen auxiliaire, marche prolongée, marche en terrain irrégulier, position accroupie ou à genoux, réalisation répétée des escaliers, utilisation d'échelle, travail sur les toits, position assise ou debout statique prolongée. Le pronostic de réinsertion dans l'ancienne activité était défavorable et celui dans une activité adaptée respectant les limitations fonctionnelles était théoriquement favorable, avec des facteurs personnels et contextuels (cotation élevée de la douleur, focalisation sur la douleur, sous-estimation des capacités fonctionnelles, état dépressif, absence de formation et de contrat de travail) qui pourraient interférer avec le processus de réorientation. Celui-ci ne pouvait encore débuter vu les progrès attendus au cours des prochains mois.

Le rapport de physiothérapie annexé au rapport de la CRR relève que certains tests n'ont pas pu être réalisés car l'assuré ne tolérait pas la posture assise, qui était source de douleurs importantes.

Quant au consilium psychiatrique, il mentionne un assuré présentant un ralentissement psychomoteur, une thymie abaissée, un comportement algique non-démonstratif, replié sur soi, et inquiet face à son avenir professionnel et l'état de santé de son épouse souffrant d'une maladie évolutive. Un trouble de l'adaptation avec réaction dépressive prolongée est retenu (F43.21), compte tenu de l'inquiétude manifestée par l'assuré par rapport à son avenir professionnel et la longueur de la récupération. L'évolution sur le plan psychique était fortement liée à celle sur le plan somatique.

h. Dans une appréciation psychiatrique du 18 juillet 2021, le docteur G______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie et médecin d'arrondissement de la SUVA, a indiqué qu'il fallait en principe retenir un lien de causalité naturelle dans le cas d'espèce et qu'un traitement psychiatrique serait à la charge de la SUVA.

i. Dans un rapport médical du 19 août 2021, la Dre F______ a indiqué qu'il y avait une petite amélioration de la symptomatologie douloureuse, laquelle s'intensifiait à l'effort et dans certaines positions. Les séances de physiothérapie étaient poursuivies, tout comme la prise d'antalgiques.

j. Dans un rapport ultérieur du 15 octobre 2021, elle a confirmé l'amélioration de l'état de l'assuré, même si les douleurs au membre inférieur droit persistaient, surtout au muscle fessier ipsilatéral, bien que moins intenses et plus supportables. Les douleurs se manifestaient à la marche et en position assise, même de courte durée, ce qui obligeait l'assuré à assumer une position antalgique dans cette position. Un suivi psychiatrique avait été organisé, en raison d'un état anxieux et dépressif. L'assuré présentait donc encore une incapacité de travail totale à cause des limitations fonctionnelles suivantes : il ne pouvait pas stationner longtemps debout, ni soulever et porter des charges, ni fléchir le tronc, ni s'accroupir, ni travailler en position assise.

k. Le 31 janvier 2022, la Dre F______ a relevé que l'assuré marchait désormais sans béquilles et sans boiterie. Le 28 octobre 2021, il avait fait un tentamen et avait été pris en charge par un centre de psychiatrie durant plusieurs semaines. Il était toujours incapable de travailler à cause de son état psychologique et des limitations fonctionnelles qu'elle avait déjà listées dans son rapport du 15 octobre 2021.

l. Par téléphone du 3 février 2022, l'assuré a annoncé à la SUVA qu'il avait chuté en arrière sur un radiateur, alors qu'il était debout sur une chaise en train d'arroser des plantes et avait eu des vertiges, ce qui lui avait occasionné des blessures au bas du dos.

m. L'assuré a repris un travail à 30% depuis le 16 mars 2022 auprès de la société H______ en tant que calorifugeur. Selon les notes de l'entretien échangé avec un spécialiste de la SUVA le 18 avril 2022, tant l'évènement du 17 août 2020 que celui du 3 février 2022 justifiaient une incapacité de travail de 70%.

n. Dans un rapport du 22 juillet 2022, la docteure I______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, a indiqué que l'assuré avait fait une tentative de suicide en novembre 2021, alors qu'un changement médicamenteux était en cours. Il relatait être confronté toute la journée à une situation insupportable depuis son accident en août 2020, car il ne pouvait plus venir en aide à son épouse, qui souffrait d'une maladie physique invalidante et d'une dépression. Il se sentait en échec, s'isolait de sa famille et de ses amis et perdait progressivement tout intérêt pour la vie. Il avait repris en mars 2022 son travail à temps partiel avec l'aide du traitement médicamenteux, ce dont il était très content, mais ne pouvait augmenter le taux à cause de la fatigue et de troubles de la concentration. Le diagnostic posé était celui d'épisode dépressif sévère, en rémission partielle (F32.2).

o. Par décision du 17 août 2022, non contestée, la SUVA a nié que les troubles lombaires persistant au-delà du 31 août 2022 soient en lien de causalité avec l'accident du 3 février 2022.

p. En septembre 2022, l'assuré s'est vu adresser une lettre de convocation à des examens en psychiatrie et orthopédie dans les bureaux de la SUVA, auxquels il ne s'est pas rendu.

q. Dans une appréciation médicale du 28 septembre 2022, le Dr G______ a indiqué que la causalité naturelle n'était plus engagée entre l'accident qui était intervenu deux ans auparavant, relativement mineur, et la symptomatologie psychique. L'évolution était en effet atypique et très clairement liée à un contexte familial délétère. Il fallait poursuivre la reprise du travail sur un mode progressif pour aboutir à un 100% en décembre 2022, étant relevé que c'était principalement la symptomatologie psychiatrique qui empêchait une reprise plus importante.

r. Le 3 octobre 2022, le docteur J______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur et médecin d'arrondissement de la SUVA, a procédé à une appréciation médicale du cas sur dossier et a relevé que la médecin traitante décrivait depuis longtemps une évolution stationnaire, alors qu'à l'issue du séjour à la CRR une stabilisation était attendue pour novembre 2021. Il n'y avait pas d'explication rationnelle à l'intensité des douleurs, de type fonctionnelles, qui n'avaient pas de support organique. La loge des ischio-jambiers n'était pas particulièrement innervée et il ne pouvait donc pas y avoir de douleur élective, en-dehors de l'inflammation locale due à la fonte musculaire. Le cas était stabilisé. Le métier exercé antérieurement ne paraissait plus exigible et on pouvait retenir les suggestions de la Dre F______ quant aux limitations fonctionnelles, qui étaient néanmoins plus détaillées dans le rapport de la CRR. Il les listait donc de la manière suivante : port de charges supérieures à 20 kg, port de charges répété supérieures à ces valeurs, marche prolongée et en terrain irrégulier, position statique prolongée, en particulier celle assise, position accroupie et à genoux, utilisation répétée d'escaliers, travail en hauteur, sur des toits ou des échelles. L'exigibilité dans une activité respectant ces limitations fonctionnelles était de 100%, sans perte de rendement. La poursuite de la physiothérapie était sans intérêt, la fonction musculaire n'étant plus améliorable, et la fonction articulaire n'ayant pas été touchée. Pour cette raison, il n'existait pas non plus d'indemnité pour atteinte à l'intégrité évaluable selon les tables.

s. L'assuré a présenté de nouveaux arrêts de travail à 100% délivrés par la Dre F______ dès le 16 octobre 2022.

t. Par lettre du 24 octobre 2022, la SUVA a informé l'assuré que son cas était médicalement stabilisé du point de vue somatique. Le métier antérieur d'étancheur n'était plus exigible et l'exigibilité était totale, sans perte de rendement, dans une activité respectant les limitations fonctionnelles établies par le Dr J______. Elle allait ainsi mettre fin au paiement des soins médicaux et de l'indemnité journalière, avec effet au 30 novembre 2022.

u. Par lettre du 21 novembre 2022, la Dre F______ a indiqué que l'état de l'assuré n'était pas stabilisé, malgré une discrète amélioration de la gestion de la douleur au membre inférieur droit. Il était suivi par le docteur K______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, qui conseillait vivement la poursuite de la physiothérapie intensive et la prise d'antalgiques. Elle requérait la continuation de la prise en charge du dossier pour encore deux ou trois mois.

v. Le 27 novembre 2022, l'assuré a chuté et s'est réceptionné sur le bord de la baignoire, ce qui lui a occasionné une fracture non déplacée de la première pièce coccygienne.

w. La SUVA a indiqué, par courrier du 10 février 2023, qu'elle ne pouvait allouer de prestations d'assurance pour ce cas, le dernier jour travaillé pour l'entreprise H______ remontant au 30 septembre 2022, soit plus de 31 jours avant l'accident.

x. Par décision du 18 janvier 2023, la SUVA a fixé le taux d'invalidité de l'assuré à 8%, par comparaison entre le revenu avant invalidité de CHF 71'788.- et le revenu avec invalidité de CHF 66'073.-. Les deux salaires étaient basés sur les statistiques de l'enquête suisse sur les salaires (ci-après : ESS), le premier correspondant au salaire du domaine de la construction, et le second, au salaire total, tous les deux pour un niveau de compétence 1. Aucun abattement n'était admis sur le revenu d'invalide. La SUVA a par conséquent rejeté le droit à une rente d'invalidité et a par ailleurs refusé le droit à une indemnité pour atteinte à l'intégrité, au motif qu'il n'y avait pas d'atteinte importante à l'intégrité physique de l'assuré.

y. Le 16 février 2023, sous la plume de son mandataire, l'assuré a formé opposition à l'encontre de la décision précitée, tant concernant le refus d'une rente d'invalidité que le refus d'une indemnité pour atteinte à l'intégrité. Il a produit un rapport médical du 24 janvier 2023 du Dr K______ qui faisait état d'une fracture non déplacée du coccyx à la suite de l'évènement du 27 novembre 2022, due à une faiblesse des ischio-jambiers droits suite à l'intervention du 30 septembre 2020. L'opération aux HUG avait été différée à cause d'une prise en charge tardive. Une imagerie par résonance magnétique (ci-après : IRM) et un scanner réalisés le 30 novembre 2022 avaient mis en avant des stigmates de réinsertion des ischio-jambiers à droite, associés à une atrophie modérée et à une involution lipomateuse de type 2-3 selon Goutallier du ventre musculaire des ischio-jambiers à droite, ainsi qu'une involution adipeuse de grade 2 selon Goutallier du grand fessier à droite. Ces dégénérescences justifiaient probablement une invalidité supérieure à 10%. L'assuré a également produit une attestation de son physiothérapeute, Monsieur L______, du 23 novembre 2022, soulignant qu'il était nécessaire, au vu des progrès et de la capacité de récupération du patient, de continuer la prise en charge rééducative. Celle-ci avait en premier lieu eu pour but de restituer la souplesse musculaire des ischio-jambiers afin de retrouver une flexion de hanche possible, ce qui avait demandé beaucoup de temps et était encore nécessaire, car l'amplitude était de 45°. En parallèle, des exercices visant à retrouver la force musculaire avaient été intégrés dès que possible ; ils avaient été rythmés par des douleurs importantes et des difficultés à prendre les positions nécessaires. L'assuré avait en particulier toujours éprouvé de grandes difficultés à s'asseoir, ce qu'il ne pouvait toujours pas faire correctement.

z. Par décision sur opposition du 16 mars 2023, la SUVA a rejeté l'opposition de l'assuré. Elle a nié que la décision querellée fût insuffisamment motivée et a relevé que les troubles psychiques n'étaient pas à sa charge, à défaut d'être en lien de causalité naturelle avec l'accident. En tout état, le lien de causalité adéquate n'était pas non plus donné, car aucun des critères jurisprudentiels n'était rempli, alors qu'il s'agissait d'un accident de gravité moyenne, à la limite de la banalité. Elle avait par ailleurs nié, par décision du 17 août 2022, que les troubles lombaires persistants au-delà du 31 août 2022 étaient en lien de causalité avec l'accident du 3 février 2022 et avait refusé, le 10 février 2023, de servir les prestations pour l'évènement du 27 novembre 2022, la couverture d'accident faisant alors défaut. Contrairement à ce que prétendait l'assuré, les limitations fonctionnelles fixées à la CRR et par le médecin d'assurance ne l'empêchaient pas de rester assis, ni debout, ni de marcher ou porter des charges légères, mais lui proscrivaient plutôt les positions figées, les déplacements en terrain accidenté et le fait d'effectuer des tâches lourdes. La SUVA s'était par ailleurs référée au niveau de compétence 1 pour déterminer le revenu d'invalide de l'assuré. Or, les activités simples et répétitives ressortant de ce niveau ne requéraient ni formation, ni expérience professionnelle spécifique, de sorte que c'était à juste titre qu'elle n'avait pas procédé à un abattement sur le salaire statistique. Quant à l'indemnité pour atteinte à l'intégrité, il ne se justifiait pas, sur une question essentiellement médicale, de s'écarter des conclusions du Dr J______, en l'absence d'élément objectif permettant de mettre en doute leur bien-fondé.

C. a. Le 11 avril 2023, l'assuré, représenté par son conseil, a interjeté recours à l'encontre de la décision précitée devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans). Il a conclu, principalement, à ce que la décision du 18 janvier 2023 soit annulée, à ce qu'une rente annuelle d'invalidité de CHF 71'788.- lui soit attribuée à partir du 1er décembre 2022 jusqu'à l'âge de la retraite, à ce qu'une indemnité en capital pour atteinte à l'intégrité physique de CHF 155'610.- lui soit attribuée et à ce que la SUVA soit déboutée de toutes conclusions contraires, sous suite de frais et dépens. Subsidiairement, la rente annuelle d'invalidité devait se monter à CHF 52'405.-. L'intimée avait violé son obligation d'instruction, car elle n'avait pas tenu compte des rapports de ses médecins traitants et de son physiothérapeute, mais avait basé sa décision sur deux appréciations de ses médecins internes ayant une faible force probante, n'émanant pas de médecins indépendants et ayant été établies en son absence. Il présentait une incapacité totale de travail depuis l'accident du 17 août 2020, ce qui justifiait l'octroi d'une rente de CHF 71'788.-, subsidiairement une rente de CHF 52'405.-, s'il fallait par extraordinaire retenir une capacité de travail de 30% vu la reprise de l'ancienne activité à ce taux. De plus, le lien de causalité naturelle et adéquate entre l'accident et l'état dépressif sévère était donné, chacun des critères mis en avant par la jurisprudence étant réalisé. Enfin, une indemnité pour atteinte à l'intégrité devait être allouée à un taux de 50%, en référence à la perte d'une jambe au-dessus du genou, et à un taux de 80% pour l'atteinte psychique.

b. Par mémoire de réponse du 10 mai 2023, l'intimée a conclu au rejet du recours. Les critères jurisprudentiels de la causalité adéquate n'étaient à l'évidence pas remplis, de sorte que le fait que la psychiatre traitante du recourant retenait un lien de causalité naturelle n'était pas déterminant. Le recourant se fondait de plus à tort sur les principes régissant l'assurance-invalidité pour définir sa perte de gain. En tout état, il n'avait été blessé qu'au membre inférieur droit, ce qui n'empêchait pas l'exercice en plein d'un travail sédentaire alternant les positions assise et debout. Compte tenu des activités multiples que recouvraient les secteurs de la production et des services, pour un niveau de compétence 1, un abattement sur le salaire statistique ne se justifiait pas. S'agissant de l'indemnité pour atteinte à l'intégrité, le recourant n'apportait aucun élément médical pertinent pour contester son refus, étant précisé que l'IRM et le scanner réalisés le 30 novembre 2022 l'avaient été dans le sillage de l'accident du 27 novembre 2022, non-couvert par l'assurance-accidents.

c. Par réplique du 6 juin 2023, le recourant a souligné qu'avant l'accident il était en mesure de travailler et subvenir aux besoins de sa famille, en particulier de ceux de sa femme qui souffrait d'une grave maladie, ce qui le rendait heureux et fier. À cause de l'accident, sa mobilité était à jamais entravée et son incapacité à travailler et pouvoir s'occuper de son épouse l'avait plongé dans une profonde dépression. Contrairement à ce qu'affirmait l'intimée, il y avait donc un rapport de causalité manifeste entre l'accident et son incapacité de travailler due à son immobilité et sa profonde dépression.

d. Le 16 octobre 2023, la chambre de céans a tenu une audience de comparution personnelle des parties.

Le représentant de l'intimée a notamment indiqué que l'accident de novembre 2022 avait finalement été couvert en septembre 2023, dans le cadre d'un autre dossier. Par ailleurs, il a expliqué la pratique concernant la convocation d'assurés à un examen médical final.

Le recourant a produit des pièces, soit :

-          Deux certificats médicaux de la Dre I______ du 6 octobre 2023, attestant d'un état de stress post-traumatique suite à l'agression qu'il aurait subie dans un poste de police au Kosovo et du développement progressif d'un état dépressif sévère consécutivement à l'accident d'août 2020, le recourant s'étant senti en échec, n'arrivant depuis lors plus à travailler et à aider son épouse, elle-même invalide, ni même à gérer son administratif (courrier non ouvert depuis des mois).

-          Lettre de sortie des soins aigus du service de psychiatrie de liaison et d'intervention de crise des HUG du 29 septembre 2023, posant les diagnostics de luxation traumatique du coude à gauche (le 4 août 2023) et de trouble dépressif récurrent avec épisode actuel sévère et éléments de stress post-traumatique (F33.2).

-          Attestation de travail de H______ du 6 octobre 2023, expliquant que le recourant a été salarié de la société du 16 mars au 31 décembre 2022 en qualité de calorifugeur spécialisé à 30%, avec un dernier salaire perçu en septembre 2022.

-          Lettre du 15 février 2022 de fin de traitement du département de psychiatrie des HUG, mentionnant une hospitalisation du recourant d'une semaine et sa participation à un programme de crise, à la suite d'une tentative de suicide par abus médicamenteux, et posant le diagnostic d'épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques.

e. Par ordonnance du 17 octobre 2023, la chambre de céans a requis la production du dossier en mains de l'office de l'assurance-invalidité (ci-après : OAI). Il en ressort notamment que l'OAI a ordonné la mise en œuvre d'une expertise bidisciplinaire en rhumatologie et en psychiatrie et que le recourant a été convoqué par les experts le 10 octobre 2023.

f. Le dossier de l'OAI a été transmis par la chambre de céans à l'intimée.

g. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connait en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-accidents, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2017 est entrée en vigueur la modification du 25 septembre 2015 de la LAA. Dans la mesure où l'accident est survenu après cette date, le droit du recourant aux prestations d'assurance est soumis au nouveau droit (cf. al. 1 des dispositions transitoires relatives à la modification du 25 septembre 2015 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_662/2016 du 23 mai 2017 consid. 2.2). Les dispositions légales seront citées ci-après dans leur teneur en vigueur à compter du 1er janvier 2017.

4.             Le délai de recours est de 30 jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

5.             Le litige porte sur le droit du recourant à une rente d'invalidité et à une indemnité pour atteinte à l'intégrité, ainsi que le lien de causalité entre ses troubles psychiques et l'accident du 17 août 2020.

6.              

6.1 Aux termes de l'art. 6 al. 1 LAA, l'assureur-accidents verse des prestations à l'assuré en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraine la mort (art. 4 LPGA).

La responsabilité de l'assureur-accidents s'étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 335 consid. 1 ; 118 V 286 consid. 1b et les références) et adéquate avec l'événement assuré (ATF 125 V 456 consid. 5a et les références).

6.2 L'exigence afférente au rapport de causalité naturelle est remplie lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans l'événement dommageable de caractère accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout, ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière (ATF 148 V 138 consid. 5.1.1 et les références). Il n'est pas nécessaire, en revanche, que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé ; il suffit qu'associé éventuellement à d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage parait possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1 ; 119 V 335 consid. 1 ; 118 V 286 consid. 1b et les références).

Le seul fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu'après la survenance d'un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident. Il convient en principe d'en rechercher l'étiologie et de vérifier, sur cette base, l'existence du rapport de causalité avec l'événement assuré (raisonnement « post hoc, ergo propter hoc » ; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb ; RAMA 1999 n° U 341 p. 408 consid. 3b).

6.3 Le droit à des prestations suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entrainer un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 148 V 138 consid. 5.1.1 et les références).

En présence d’une atteinte à la santé physique, le problème de la causalité adéquate ne se pose guère, car l’assureur répond aussi des complications les plus singulières et les plus graves qui ne se produisent habituellement pas selon l’expérience médicale (ATF 127 V 102 consid. 5b/bb et les références). En revanche, il en va autrement lorsque des symptômes, bien qu'apparaissant en relation de causalité naturelle avec un événement accidentel, ne sont pas objectivables du point de vue organique. Dans ce cas, il y a lieu d'examiner le caractère adéquat du lien de causalité en se fondant sur le déroulement de l'événement accidentel, compte tenu, selon les circonstances, de certains critères en relation avec cet événement (ATF 117 V 359 consid. 6 ; 117 V 369 consid. 4b ; 115 V 133 consid. 6 ; 115 V 403 consid. 5). En présence de troubles psychiques apparus après un accident, on examine les critères de la causalité adéquate en excluant les aspects psychiques (ATF 115 V 133 consid. 6c/aa ; 115 V 403 consid. 5c/aa), tandis qu'en présence d'un traumatisme de type « coup du lapin » à la colonne cervicale (ATF 117 V 359 consid. 6a), d'un traumatisme analogue à la colonne cervicale (SVR 1995 UV n° 23 consid. 2) ou d'un traumatisme cranio-cérébral (ATF 117 V 369 consid. 4b), on peut renoncer à distinguer les éléments physiques des éléments psychiques (sur l'ensemble de la question, ATF 127 V 102 consid. 5b/bb et SVR 2007 UV n° 8 p. 27 consid. 2 et les références).

En application de la pratique sur les conséquences psychiques des accidents (ATF 115 V 133), l’examen de ces critères doit se faire au moment où l'on ne peut plus attendre de la continuation du traitement médical en rapport avec l'atteinte physique une amélioration de l'état de santé de l'assuré, ce qui correspond à la clôture du cas selon l'art. 19 al. 1 LAA (arrêt du Tribunal fédéral 8C_683/2017 du 24 juillet 2018 consid. 5). L’amélioration de l’état de santé se détermine notamment en fonction de l’augmentation ou de la récupération probable de la capacité de travail réduite par l’accident, étant précisé que l’amélioration attendue par la continuation du traitement médical doit être significative. Des améliorations mineures ne suffisent pas. Cette question doit être examinée de manière prospective. La clôture séparée d’un cas d’assurance-accidents pour les troubles psychiques d’une part et les troubles somatiques d’autre part n’entre pas en ligne de compte (arrêt du Tribunal fédéral 8C_235/2020 du 15 février 2021 consid. 2.3 et les références).

Dans la mesure où le caractère naturel et le caractère adéquat du lien de causalité doivent être remplis cumulativement pour octroyer des prestations d'assurance-accidents, la jurisprudence admet de laisser ouverte la question du rapport de causalité naturelle dans les cas où ce lien de causalité ne peut de toute façon pas être qualifié d'adéquat. En revanche, il n'est pas admissible de reconnaitre le caractère adéquat d'éventuels troubles psychiques d'un assuré avant que les questions de fait relatives à la nature de ces troubles (diagnostic, caractère invalidant) et à leur causalité naturelle avec l'accident en cause soient élucidées au moyen d'une expertise psychiatrique concluante (ATF 147 V 207 consid. 6.1 et les références).

Par conséquent, si le juge des assurances sociales – saisi d’un examen du lien de causalité adéquate à l'égard de troubles psychiques alors que la question de la causalité naturelle a été laissée ouverte –, parvient à la conclusion que l'appréciation de l'assureur-accidents est erronée sur un ou plusieurs critères et que l'admission du lien du causalité adéquate pourrait entrer en considération, il doit, avant de statuer définitivement sur ce dernier point, instruire ou faire instruire par l'assureur-accidents les questions de fait relatives à la nature de ces troubles (diagnostic, caractère invalidant) et à leur causalité naturelle (ATF 148 V 138 consid. 5.5).

7.             Dans le cas de troubles psychiques additionnels à une atteinte à la santé physique, le caractère adéquat du lien de causalité suppose que l'accident ait eu une importance déterminante dans leur déclenchement. La jurisprudence a tout d'abord classé les accidents en trois catégories, en fonction de leur déroulement : les accidents insignifiants ou de peu de gravité (par ex. une chute banale) ; les accidents de gravité moyenne et les accidents graves. Pour procéder à cette classification, il convient non pas de s'attacher à la manière dont l'assuré a ressenti et assumé le choc traumatique, mais bien plutôt de se fonder, d'un point de vue objectif, sur l'événement accidentel lui-même (ATF 140 V 356 consid. 5.3 ; 115 V 133 consid. 6 ; 115 V 403 consid. 5). Sont déterminantes les forces générées par l'accident et non pas les conséquences qui en résultent ou d'autres circonstances concomitantes qui n'ont pas directement trait au déroulement de l'accident, comme les lésions subies par l'assuré ou le fait que l'événement accidentel a eu lieu dans l'obscurité (cf. ATF 148 V 301 consid. 4.3.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_595/2015 du 23 août 2016 consid. 3 et les références). La gravité des lésions subies – qui constitue l'un des critères objectifs pour juger du caractère adéquat du lien de causalité – ne doit être prise en considération à ce stade de l'examen que dans la mesure où elle donne une indication sur les forces en jeu lors de l'accident (arrêts du Tribunal fédéral 8C_398/2012 du 6 novembre 2012 consid. 5.2 in SVR 2013 UV n° 3 p. 8 et 8C_435/2011 du 13 février 2012 consid. 4.2 in SVR 2012 UV n° 23 p. 84 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_622/2015 du 25 août 2016 consid.3.3).

Selon la jurisprudence (ATF 115 V 403 consid. 5), lorsque l'accident est insignifiant (l'assuré s'est par exemple cogné la tête ou s'est fait marcher sur le pied) ou de peu de gravité (il a été victime d'une chute banale), l'existence d'un lien de causalité adéquate entre cet événement et d'éventuels troubles psychiques peut, en règle générale, être d'emblée niée. Selon l'expérience de la vie et compte tenu des connaissances actuelles en matière de médecine des accidents, on peut en effet partir de l'idée, sans procéder à un examen approfondi sur le plan psychique, qu'un accident insignifiant ou de peu de gravité n'est pas de nature à provoquer une incapacité de travail (ou de gain) d'origine psychique. L'événement accidentel n'est ici manifestement pas propre à entrainer une atteinte à la santé mentale sous la forme, par exemple, d'une dépression réactionnelle. On sait par expérience que de tels accidents, en raison de leur importance minime, ne peuvent porter atteinte à la santé psychique de la victime. Dans l'hypothèse où, malgré tout, des troubles notables apparaitraient, on devrait les attribuer avec certitude à des facteurs étrangers à l'accident, tels qu'une prédisposition constitutionnelle. Dans ce cas, l'événement accidentel ne constituerait en réalité que l'occasion pour l'affection mentale de se manifester.

Lorsque l'assuré est victime d'un accident grave, il y a lieu, en règle générale, de considérer comme établie l'existence d'une relation de causalité entre cet événement et l'incapacité de travail (ou de gain) d'origine psychique. D'après le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, un accident grave est propre, en effet, à entrainer une telle incapacité. Dans ces cas, la mise en œuvre d'une expertise psychiatrique se révélera la plupart du temps superflue.

Sont réputés accidents de gravité moyenne les accidents qui ne peuvent être classés dans l'une ou l'autre des catégories décrites ci-dessus. Pour juger du caractère adéquat du lien de causalité entre de tels accidents et l'incapacité de travail (ou de gain) d'origine psychique, il ne faut pas se référer uniquement à l'accident lui-même. Il sied bien plutôt de prendre en considération, du point de vue objectif, l'ensemble des circonstances qui sont en connexité étroite avec l'accident ou qui apparaissent comme des effets directs ou indirects de l'événement assuré. Ces circonstances constituent des critères déterminants dans la mesure où, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, elles sont de nature, en liaison avec l'accident, à entrainer ou aggraver une incapacité de travail (ou de gain) d'origine psychique.

Pour admettre l’existence du lien de causalité en présence d’un accident de gravité moyenne, il faut donc prendre en considération un certain nombre de critères, dont les plus importants sont les suivants (ATF 115 V 133 consid. 6c/aa ; 115 V 403 consid. 5c/aa):

- les circonstances concomitantes particulièrement dramatiques ou le caractère particulièrement impressionnant de l’accident ;

- la gravité ou la nature particulière des lésions physiques, compte tenu notamment du fait qu'elles sont propres, selon l'expérience, à entrainer des troubles psychiques ;

- la durée anormalement longue du traitement médical ;

- les douleurs physiques persistantes ;

- les erreurs dans le traitement médical entrainant une aggravation notable des séquelles de l’accident ;

- les difficultés apparues au cours de la guérison et des complications importantes ;

- le degré et la durée de l’incapacité de travail due aux lésions physiques.

Tous ces critères ne doivent pas être réunis pour que la causalité adéquate soit admise. De manière générale, lorsqu'il s'agit d'un accident de gravité moyenne, il faut un cumul de trois critères sur les sept, ou au moins que l'un des critères retenus se soit manifesté de manière particulièrement marquante (arrêt du Tribunal fédéral 8C_816/2021 du 2 mai 2022 consid. 3.3 et la référence). Un seul d’entre eux peut être suffisant, notamment si l’on se trouve à la limite de la catégorie des accidents graves. Inversement, en présence d’un accident se situant à la limite des accidents de peu de gravité, les circonstances à prendre en considération doivent se cumuler ou revêtir une intensité particulière pour que le caractère adéquat du lien de causalité soit admis (ATF 129 V 402 consid. 4.4.1 et les références ; 115 V 133 consid. 6c/bb ; 115 V 403 consid. 5c/bb).

8.              

8.1 En l'espèce, même si l'intimée a retenu que l'accident du 17 août 2020 était de catégorie moyenne, à la limite des cas bénins, il n'est pas exclu de penser qu'il devrait plutôt être classifié dans les accidents de peu de gravité, compte tenu des forces en jeu dans le déroulement de celui-ci. Le recourant s'est en effet déchiré les ischio-jambiers de la cuisse droite alors qu'il jouait au football, en levant le pied en hauteur, sans subir de choc avec un adversaire.

Pour mémoire, a été qualifiée de peu de gravité une glissade de l'assuré durant un match de football avec réception sur les mains et craquement dans la nuque, sa tête étant partie en arrière (ATAS/47672005 du 31 mai 2005). Ont été qualifiés d’accident de gravité moyenne à la limite des accidents de peu de gravité, la collision entre deux joueurs lors d’une partie de football (ATAS/583/2007 du 8 mai 2007), un coup de pied d'un adversaire donné dans le gros orteil au lieu de taper dans le ballon (ATAS/824/2015 du 3 novembre 2015) et a été qualifié d’accident de gravité moyenne stricto sensu le cas d'un assuré qui, alors qu'il assistait à un match de football, a pratiquement totalement perdu la vision à son œil gauche à la suite d'un projectile tiré par un policier à l'occasion de confrontations entre groupes de supporters (arrêt du Tribunal fédéral U 343/04 du 10 août 2005 consid. 2.2.2). Cette classification de l'évènement du 17 août 2022 en tant qu'accident de peu de gravité suffirait en principe à dénier l'existence d'un lien de causalité adéquate entre celui-ci et les troubles psychiques du recourant.

8.2 Cela étant, à supposer que l'accident du 17 août 2020 doive être qualifié d'accident de gravité moyenne, il se situerait effectivement à la limite des accidents de peu de gravité et le lien de causalité adéquate devrait également être nié. En effet, les critères évoqués par la jurisprudence ne se cumuleraient pas de façon suffisante et aucun d'entre eux ne revêtirait une intensité particulière.

S'agissant des circonstances concomitantes à l'accident particulièrement dramatiques, ce critère n'est manifestement pas rempli, aucun choc violent n'ayant eu lieu.

Le critère de la gravité ou de la nature particulière des lésions physiques ne se trouve pas non plus rempli, une rupture des ischio-jambiers n'étant pas particulièrement grave ni ne touchant un organe auquel l'être humain attache une importance subjective particulière (par exemple la perte d'un œil ou certains cas de mutilations à la main dominante) (arrêt du Tribunal fédéral 8C_235/2020 du 15 février 2021 consid. 4.3.2 et les références).

Le critère de la durée anormalement longue du traitement médical n'est lui aussi pas donné, compte tenu du fait que l'aspect temporel n'est pas seul décisif ; sont également à prendre en considération la nature et l'intensité du traitement, et si l'on peut en attendre une amélioration de l'état de santé de l'assuré. La prise de médicaments antalgiques et la prescription de traitements par manipulations, même pendant une certaine durée, ne suffisent pas à fonder ce critère (arrêt du Tribunal fédéral 8C_804/2014 du 16 novembre 2015 consid. 5.2.2 et la référence). Or, en l'occurrence, le recourant a subi une seule intervention chirurgicale et son traitement est depuis lors essentiellement conservateur.

Concernant le critère des erreurs dans le traitement médical entrainant une aggravation notable des séquelles de l’accident, bien que la tardiveté de la prise en charge chirurgicale soit évoquée dans le dossier (notamment par le Dr K______ dans son rapport du 24 janvier 2023 et par le recourant lors de son audition devant la chambre de céans), il n'existe aucun élément médical au dossier permettant de retenir qu'il s'agirait d'une erreur médicale à proprement parler et qu'elle aurait conduit à une aggravation de l'état du recourant. La réalisation de ce critère doit ainsi être niée (tout comme, par exemple dans l'arrêt du Tribunal fédéral 8C_277/2019 du 22 janvier 2020 consid. 5.2).

On ne discerne pas non plus que des difficultés ou des complications importantes soient apparues au cours de la guérison puisque, sur le plan opératoire, les suites de l'intervention ont été normales, étant relevé qu'il doit exister des motifs particuliers ayant entravé la guérison même s'il n'a pas été possible de supprimer les douleurs de l'intéressé, ni même de rétablir une capacité de travail entière (arrêt du Tribunal fédéral 8C_249/2018 du 12 mars 2019 consid.5.2.5 et les références).

Quant au critère du degré et de la durée de l'incapacité de travail due aux lésions physiques, il doit se rapporter aux seules lésions physiques et ne se mesure pas uniquement au regard de la profession antérieurement exercée par l'assuré. Ainsi, il n'est pas rempli lorsque l'assuré est apte, même après un certain laps de temps, à exercer à plein temps une activité adaptée aux séquelles accidentelles qu'il présente (arrêt du Tribunal fédéral 8C_93/2022 du 19 octobre 2022 consid. 5.3 et la référence). Ce critère est en principe admis en cas d’incapacité totale de travail de près de trois ans (arrêts du Tribunal fédéral 8C_600/2020 du 3 mai 2021 consid. 4.2.4 et 8C_547/2020 du 1er mars 2021 consid. 5.1 et les références). Ce critère n’est en revanche pas rempli dans le cas d’un assuré qui s’est trouvé en incapacité de travail totale pendant un peu plus d’une année (arrêt du Tribunal fédéral 8C_209/2020 du 18 janvier 2021 consid. 5.2.2), pendant un an et demi (arrêt du Tribunal fédéral 8C_627/2019 du 10 mars 2020 consid. 5.4.5), pendant 20 mois (arrêt du Tribunal fédéral 8C_93/2022 du 19 octobre 2022 consid. 5.3), pendant 21 mois (arrêt du Tribunal fédéral 8C_600/2020 précité consid. 4.2.4) ou encore pendant deux ans et quatre mois (arrêt du Tribunal fédéral 8C_547/2020 précité consid. 5.3 et 5.4). En l'occurrence, le recourant s'est trouvé en incapacité de travail pendant un peu plus de deux ans, du 17 août 2020 au 24 octobre 2022, date à laquelle son état de santé a été jugé stabilisé, ce qu'il ne conteste pas. Cette durée n'est pas suffisante, eu égard à la jurisprudence susvisée, pour retenir que le critère est rempli, ce d'autant plus que le recourant a travaillé durant près de sept mois à 30%. De plus, même si, comme il sera vu ci-après (cf. infra consid. 19), un doute subsiste quant à la capacité de travail du recourant dans une activité adaptée et son taux, une totale incapacité de travail ne semble pas se profiler en l'état.

Enfin, s'agissant du critère des douleurs persistantes, il faut que des douleurs importantes aient existé sans interruption notable durant tout le temps écoulé entre l'accident et la clôture du cas au sens de l'art. 19 al. 1 LAA. L'intensité des douleurs est examinée au regard de leur crédibilité, ainsi que de l'empêchement qu'elles entrainent dans la vie quotidienne (ATF 134 V 109 consid. 10.2.4). S'il est difficile de juger, dans le cas d'espèce, de l'intensité des douleurs persistantes présentées par le recourant, il sied de constater que l'admission de ce critère ne suffirait en tout état pas pour admettre un lien de causalité adéquate entre l'accident et les troubles psychiques.

La très éventuelle reconnaissance, en sus, du critère du degré et de la durée de l'incapacité de travail due aux lésions physiques ne modifierait pas non plus le résultat de l'examen, seuls deux critères pouvant à la rigueur être admis, sans qu'ils revêtent une intensité particulière.

8.3 Par conséquent, le lien de causalité adéquate entre l'accident et les troubles psychiques doit être nié, de sorte que la question de la causalité naturelle peut demeurer ouverte. C'est donc à bon droit que l'intimée a examiné le droit du recourant à des prestations de l'assurance-accidents exclusivement au regard des atteintes somatiques dont il souffre.

9.             L'assuré a droit au traitement médical approprié des lésions résultant de l'accident (art. 10 al. 1 LAA). S'il est totalement ou partiellement incapable de travailler (art. 6 LPGA) à la suite d’un accident, il a droit à une indemnité journalière (art. 16 al. 1 LAA). Le droit à l'indemnité journalière nait le troisième jour qui suit celui de l'accident. Il s’éteint dès que l’assuré a recouvré sa pleine capacité de travail, dès qu’une rente est versée ou dès que l’assuré décède (art. 16 al. 2 LAA).

10.          

10.1 Si l'assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10% au moins par suite d’un accident, il a droit à une rente d'invalidité, pour autant que l’accident soit survenu avant l’âge ordinaire de la retraite (art. 18 al. 1 LAA, dans sa teneur en vigueur à compter du 1er janvier 2017). Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA ; méthode ordinaire de la comparaison des revenus).

Selon l'art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1) ; seules les conséquences de l'atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d'une incapacité de gain ; de plus, il n'y a incapacité de gain que si celle-ci n'est pas objectivement surmontable (al. 2).

10.2 Selon l'art. 19 al. 1 LAA, le droit à la rente prend naissance dès qu'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de l'assuré et que les éventuelles mesures de réadaptation de l'assurance-invalidité ont été menées à terme. Le droit au traitement médical et aux indemnités journalières cesse dès la naissance du droit à la rente.

Ce qu’il faut comprendre par sensible amélioration de l’état de santé au sens de l’art. 19 al. 1 LAA se détermine en fonction de l’augmentation ou du rétablissement de la capacité de travail à attendre pour autant qu’elle ait été diminuée par l’accident, auquel cas l’amélioration escomptée par un autre traitement doit être importante. Des améliorations insignifiantes ne suffisent pas (ATF 134 V 109 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_402/2007 du 23 avril 2008 consid. 5.1.2.1). L'amélioration que doit amener une poursuite du traitement médical doit être significative. Ni la possibilité lointaine d'un résultat positif de la poursuite d'un traitement médical ni un progrès thérapeutique mineur à attendre de nouvelles mesures – comme une cure thermale – ne donnent droit à sa mise en œuvre. Il ne suffit pas non plus qu'un traitement physiothérapeutique puisse éventuellement être bénéfique pour la personne assurée. Dans ce contexte, l'état de santé doit être évalué de manière prospective (arrêt du Tribunal fédéral 8C_95/2021 du 27 mai 2021 consid. 3.2 et les références). Il faut en principe que l’état de santé de l’assuré puisse être considéré comme stable d’un point de vue médical (arrêt du Tribunal fédéral 8C_591/2022 du 14 juillet 2023 consid. 3.2 et la référence).

Dès qu'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l’état de santé de l'assuré et qu'aucune mesure de réadaptation de l'assurance-invalidité n'entre en considération, il appartient à l'assureur-accidents de clore le cas en mettant fin aux frais de traitement ainsi qu'aux indemnités journalières et en examinant le droit à une rente d'invalidité et à une indemnité pour atteinte à l'intégrité (ATF 134 V 109 consid. 4.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_39/2020 du 19 juin 2020 consid. 3.2 et les références).

11.          

11.1 Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA). En règle ordinaire, il s'agit de chiffrer aussi exactement que possible ces deux revenus et de les confronter l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité. Dans la mesure où ils ne peuvent être chiffrés exactement, ils doivent être estimés d'après les éléments connus dans le cas particulier, après quoi l'on compare entre elles les valeurs approximatives ainsi obtenues (méthode générale de comparaison des revenus ; ATF 137 V 334 consid. 3.3.1).

11.2 Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente ; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 consid. 4.1 et les références).

11.3 Pour déterminer le revenu sans invalidité, il convient d'établir ce que l'assuré aurait, au degré de la vraisemblance prépondérante, réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas devenu invalide. Le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible. Partant de la présomption que l'assuré aurait continué d'exercer son activité sans la survenance de son invalidité, ce revenu se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu par l'assuré avant l'atteinte à la santé, en prenant en compte également l'évolution des salaires jusqu'au moment de la naissance du droit à la rente (ATF 144 I 103 consid. 5.3 ; 139 V 28 consid. 3.3.2 et les références ; 135 V 297 consid. 5.1 et les références ; 134 V 322 consid. 4.1 et les références). Toutefois, lorsque la perte de l'emploi est due à des motifs étrangers à l'invalidité, le salaire doit être établi sur la base de valeurs moyennes. Autrement dit, dans un tel cas, n'est pas déterminant pour la fixation du revenu hypothétique de la personne valide le salaire que la personne assurée réaliserait actuellement auprès de son ancien employeur, mais bien plutôt celui qu'elle réaliserait si elle n'était pas devenue invalide (arrêt du Tribunal fédéral 8C_50/2022 du 11 août 2022 consid. 5.1.1 et la référence).

12.         Aux termes de l'art. 24 LAA, si par suite d'un accident, l'assuré souffre d'une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique, il a droit à une indemnité équitable pour atteinte à l'intégrité (al. 1). L'indemnité est fixée en même temps que la rente d'invalidité ou, si l'assuré ne peut prétendre une rente, lorsque le traitement médical est terminé (al. 2). D'après l'art. 25 LAA, l'indemnité pour atteinte à l'intégrité est allouée sous forme de prestation en capital (al. 1, 1ère phrase) ; elle ne doit pas excéder le montant maximum du gain annuel assuré à l'époque de l'accident et elle est échelonnée selon la gravité de l'atteinte à l'intégrité (al. 1, 2ème phrase). Elle est également versée en cas de maladie professionnelle (cf. art. 9 al. 3 LAA). Le Conseil fédéral édicte des prescriptions détaillées sur le calcul de l'indemnité (al. 2).

13.          

13.1 L'indemnité pour atteinte à l'intégrité vise à compenser le préjudice immatériel (douleurs, souffrances, diminution de la joie de vivre, limitation des jouissances offertes par l'existence etc.) qui perdure au-delà de la phase du traitement médical et dont il y a lieu d'admettre qu'il subsistera la vie durant (ATF 133 V 224 consid. 5.1 et les références). Elle se caractérise par le fait qu'elle est exclusivement fixée en fonction de facteurs médicaux objectifs, valables pour tous les assurés, et sans égard à des considérations d'ordre subjectif ou personnel. En cela, elle se distingue de l'indemnité pour tort moral du droit civil, qui procède de l'estimation individuelle d'un dommage immatériel au regard des circonstances particulières du cas. Cela signifie que pour tous les assurés présentant un status médical identique, l'atteinte à l'intégrité est la même, et sans égard à des considérations d'ordre subjectif ou personnel (ATF 115 V 137 consid. 1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_656/2022 du 5 juin 2023 consid. 3.2 et les références ; 8C_703/2008 du 25 septembre 2009 consid. 5.1 et les références).

L'atteinte à l'intégrité au sens de l'art. 24 al. 1 LAA consiste généralement en un déficit corporel (anatomique ou fonctionnel) mental ou psychique. La gravité de l'atteinte, dont dépend le montant de l'indemnité, se détermine uniquement d'après les constatations médicales. L'évaluation incombe donc avant tout aux médecins qui doivent, d'une part, constater objectivement quelles limitations subit l'assuré et, d'autre part, estimer l'atteinte à l'intégrité en résultant (arrêt du Tribunal fédéral 8C_656/2022 du 5 juin 2023 consid. 3.4 et les références).

Contrairement à l’évaluation du tort moral, la fixation de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité peut se fonder sur des critères médicaux d’ordre général, résultant de la comparaison de séquelles similaires d’origine accidentelle, sans qu’il soit nécessaire de tenir compte des inconvénients spécifiques qu’une atteinte entraine pour l’assuré concerné. En d’autres termes, le montant de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité ne dépend pas des circonstances particulières du cas concret, mais d’une évaluation médico-théorique de l’atteinte physique ou mentale, abstraction faite des facteurs subjectifs (ATF 115 V 147 consid. 1 ; 113 V 218 consid. 4b et les références ; voir aussi 125 II 169 consid. 2d).

13.2 Selon l’art. 36 OLAA, édicté conformément à la délégation de compétence de l’art. 25 al. 2 LAA, une atteinte à l'intégrité est réputée durable lorsqu'il est prévisible qu'elle subsistera avec au moins la même gravité pendant toute la vie (al. 1, 1ère phrase) ; elle est réputée importante lorsque l'intégrité physique ou mentale subit, indépendamment de la diminution de la capacité de gain, une altération évidente ou grave (al. 1, 2ème phrase). L’indemnité pour atteinte à l'intégrité est calculée selon les directives figurant à l'annexe 3 à l'OLAA (al. 2). En cas de concours de plusieurs atteintes à l'intégrité physique ou mentale, dues à un ou plusieurs accidents, l'indemnité pour atteinte à l'intégrité est fixée d'après l'ensemble du dommage (al. 3, 1ère phrase).

Cette disposition a été jugée conforme à la loi en tant qu'elle définit le caractère durable de l'atteinte (ATF 133 V 224 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral U 401/06 du 12 janvier 2007 consid. 2.2). Le caractère durable de l'atteinte doit être à tout le moins établi au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 124 V 29 consid. 4b/cc). Quant au caractère important de l'atteinte, le ch. 1 de l'annexe 3 à l'OLAA précise que les atteintes à l'intégrité qui sont inférieures à 5% selon le barème ne donnent droit à aucune indemnité. Il faut en conclure qu'une atteinte est réputée importante si elle atteint au moins ce pourcentage (Thomas FREI et Juerg P. BLEUER, Évaluation d'atteintes à l'intégrité multiples, in SUVA Medical 2012, p. 202).

Le taux d'une atteinte à l'intégrité doit être évalué exclusivement sur la base de constatations médicales (ATF 115 V 147 consid. 1 ; 113 V 218 consid. 4b ; RAMA 2004 p. 415 ; arrêt du Tribunal fédéral U 134/03 du 12 janvier 2004 consid. 5.2).

14.         L’annexe 3 à l'OLAA comporte un barème – reconnu conforme à la loi et non exhaustif (ATF 124 V 29 consid. 1b et les références ; 124 V 209 consid. 4a/bb et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_745/2022 du 29 juin 2023 consid. 3.2 et la référence) – des lésions fréquentes et caractéristiques, évaluées en pour cent (ATF 124 V 209 consid. 4bb).

15.         L'indemnité allouée pour les atteintes à l'intégrité énumérées à cette annexe est fixée, en règle générale, en pour cent du montant maximum du gain assuré (ch. 1 al. 1 de l'annexe 3).

Pour les atteintes à l'intégrité spéciales ou qui ne figurent pas dans la liste, le barème est appliqué par analogie, en fonction de la gravité de l'atteinte (ch. 1 al. 2 annexe 3 OLAA). On procédera de même lorsque l’assuré présente simultanément plusieurs atteintes à l’intégrité physique, mentale ou psychique. Les atteintes à l’intégrité pour lesquelles un taux inférieur à 5% serait appliqué selon le barème ne donnent droit à aucune indemnité. Les atteintes à l’intégrité sont évaluées sans les moyens auxiliaires – à l’exception des moyens servant à la vision (ch. 1 al. 2 de l'annexe 3). La perte totale de l’usage d’un organe est assimilée à la perte de celui-ci. En cas de perte partielle d’un organe ou de son usage, l’indemnité pour atteinte à l’intégrité est réduite en conséquence ; toutefois aucune indemnité ne sera versée dans les cas où un taux inférieur à 5% du montant maximum du gain assuré serait appliqué (ch. 2 de l'annexe 3).

La Division médicale de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) a établi plusieurs tables d'indemnisation des atteintes à l'intégrité selon la LAA (disponibles sur www.suva.ch). Ces tables n'ont pas valeur de règles de droit et ne sauraient lier le juge. Toutefois, dans la mesure où il s'agit de valeurs indicatives, destinées à assurer autant que faire se peut l'égalité de traitement entre les assurés, elles sont compatibles avec l'annexe 3 à l'OLAA (ATF 132 II 117 consid. 2.2.3 ; 124 V 209 consid. 4a/cc ; 116 V 156 consid. 3a).

16.          

16.1 La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l'accident, l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité physique ou mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l'assuré à des prestations, l'administration ou le juge a besoin de documents que le médecin doit lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 132 V 93 consid. 4 et les références ; 125 V 256 consid. 4 et les références). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1).

16.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre (ATF 143 V 124 consid. 2.2.2). L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux (ATF 125 V 351 consid. 3b).

16.3 Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Lorsqu'un cas d'assurance est réglé sans avoir recours à une expertise dans une procédure au sens de l'art. 44 LPGA, l'appréciation des preuves est soumise à des exigences sévères : s'il existe un doute même minime sur la fiabilité et la validité des constatations d'un médecin de l'assurance, il y a lieu de procéder à des investigations complémentaires (ATF 145 V 97 consid. 8.5 et les références ; 142 V 58 consid. 5.1 et les références ; 139 V 225 consid. 5.2 et les références ; 135 V 465 consid. 4.4 et les références). En effet, si la jurisprudence a reconnu la valeur probante des rapports médicaux des médecins-conseils, elle a souligné qu'ils n'avaient pas la même force probante qu'une expertise judiciaire ou une expertise mise en œuvre par un assureur social dans une procédure selon l'art. 44 LPGA (ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_691/2021 du 24 février 2022 consid. 3.4).

Dans une procédure portant sur l’octroi ou le refus de prestations d’assurances sociales, lorsqu’une décision administrative s’appuie exclusivement sur l’appréciation d’un médecin interne à l’assureur social et que l’avis d’un médecin traitant ou d’un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes mêmes faibles quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l’un ou sur l’autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l’art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 139 V 225 consid. 5.2 et les références ; 135 V 465 consid. 4.6).

16.4 Une appréciation médicale, respectivement une expertise médicale établie sur la base d'un dossier n’est pas en soi sans valeur probante. Une expertise médicale établie sur la base d'un dossier peut avoir valeur probante pour autant que celui-ci contienne suffisamment d'appréciations médicales qui, elles, se fondent sur un examen personnel de l'assuré (arrêt du Tribunal fédéral 8C_469/2020 du 26 mai 2021 consid. 3.2 et les références). L’importance de l’examen personnel de l’assuré par l’expert n’est reléguée au second plan que lorsqu’il s’agit, pour l’essentiel, de porter un jugement sur des éléments d’ordre médical déjà établis et que des investigations médicales nouvelles s’avèrent superflues. En pareil cas, une expertise médicale effectuée uniquement sur la base d’un dossier peut se voir reconnaitre une pleine valeur probante (arrêt du Tribunal fédéral 8C_681/2011 du 27 juin 2012 consid. 4.1 et les références).

16.5 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 135 V 465 consid. 4.5 et les références ; 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

17.         Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 142 V 435 consid. 1 et les références ; 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références ; cf. 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6. 1 et la référence).

18.         Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparait nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

19.          

19.1 En l'occurrence, l'intimée a retenu que le recourant est capable de travailler à 100% sans perte de rendement dans une activité adaptée, en s'appuyant sur l'avis de son médecin d'arrondissement du 3 octobre 2022, lequel s'est prononcé sur la base du dossier, sans avoir procédé à un examen clinique du recourant.

L'appréciation du Dr J______ retient les limitations fonctionnelles suivantes, en référence directe à celles listées par la CRR dans son rapport du 8 juillet 2021 : pas de port de charges supérieures à 20 kg (contre 5 kg selon les experts de la CRR), pas de port de charges répété supérieures à ces valeurs, éviter la marche prolongée et en terrain irrégulier, la position statique prolongée et particulièrement celle assise, la position accroupie et à genoux, l'utilisation répétée d'escaliers, le travail en hauteur, sur des toits ou des échelles.

19.2 Or, il sied de constater que les experts de la CRR avaient retenu des limitations fonctionnelles provisoires, car la situation du recourant n'était pas stabilisée sur le plan médical et des aptitudes fonctionnelles, une telle stabilisation étant attendue dans un délai de quatre à cinq mois, après la poursuite du traitement physiothérapeutique. Ils jugeaient par ailleurs le pronostic de réinsertion dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles seulement théoriquement favorable, des facteurs personnels et contextuels pouvant interférer avec le processus de réorientation et des progrès étant attendus au cours des prochains mois.

De plus, dans le cadre de son opposition, le recourant a produit un rapport de son orthopédiste, le Dr K______, du 24 janvier 2023, mettant en évidence les résultats de l'IRM et du scanner réalisés le 30 novembre 2022 et concluant à une probable invalidité supérieure à 10%, ainsi qu'un rapport de son physiothérapeute du 23 novembre 2022 indiquant que la rééducation avait permis une progression mais que, malgré tout, le recourant ne pouvait toujours pas s'asseoir correctement. Il a également produit l'IRM et le scanner du 30 novembre 2022, concluant à des stigmates de réinsertion des ischio-jambiers à droite, associés à une atrophie modérée et à une involution lipomateuse de type 2-3 selon Goutallier du ventre des ischio-jambiers à droite et à une involution adipeuse de grade 2 selon Goutallier du grand fessier à droite.

Ces documents n'ont pas été soumis au médecin d'arrondissement, ni dans le cadre de la procédure d'opposition, ni dans le cadre du recours interjeté devant la chambre de céans.

19.3 La chambre de céans n'est pas convaincue par l'instruction du cas menée par l'intimée. En effet, si, selon les explications données en audience, sa pratique de ne pas convoquer systématiquement un assuré pour un examen médical final peut se justifier dans les cas où il y a eu une évaluation à la CRR et si aucun autre élément médical n'est amené par les médecins traitants, en l'espèce, le médecin d'arrondissement avait jugé utile d'examiner le recourant et une convocation lui avait été envoyée. Par ailleurs, le rapport de la CRR ne fixait pas les limitations fonctionnelles définitives du recourant, sa situation médicale n'étant alors pas stabilisée. Même si les experts de la CRR envisageaient un potentiel d'amélioration, il revenait à l'intimée de faire procéder à un examen final par son médecin d'arrondissement afin de vérifier quelle était la situation médicale du recourant plus d'une année après et si l'amélioration pressentie s'était ou non réalisée. De plus, la Dre F______ avait continué d'attester d'une incapacité de travail du recourant ultérieurement à son séjour à la CRR et les nouveaux éléments médicaux amenés par le recourant à l'occasion de son opposition devaient conduire l'intimée à compléter l'instruction. L'IRM et le scanner du 30 novembre 2022 mettaient en effet en évidence une involution lipomateuse et adipeuse de la région des ischio-jambiers et le Dr K______, spécialiste orthopédiste, attestait d'une faiblesse résiduelle justifiant probablement une invalidité supérieure à 10%. Même si l'utilisation du terme « invalidité » est peu opportune, la notion revêtant un caractère économique, le Dr K______ a ainsi clairement manifesté qu'il ne considérait pas correcte l'exigibilité de 100% du recourant retenue dans une activité adaptée.

À ceci s'ajoute que le physiothérapeute traitant soulignait la difficulté du recourant à maintenir la position assise, ce qui avait déjà été relevé lors du séjour à la CRR et par la Dre F______. L'intimée devait donc instruire plus précisément la question de savoir quelle était, plus d'une année après l'évaluation de la CRR, la durée possible du maintien de la position assise par le recourant, afin, cas échéant, de préciser les limitations fonctionnelles, voire de juger d'un éventuel impact sur son rendement.

19.4 Par ailleurs, le fait que le recourant ne se soit pas présenté aux examens en psychiatrie et en chirurgie orthopédique auxquels il avait été convoqué ne permettait pas à l'intimée de faire l'impasse sur une instruction complémentaire, étant relevé qu'une seule lettre commune de convocation lui avait été adressée et que, selon le rapport médical de la Dre I______ du 6 octobre 2023, l'état dépressif sévère qui affecte le recourant entraine des lacunes sur le plan administratif, avec des difficultés à gérer son courrier. L'intimée aurait ainsi dû convoquer une nouvelle fois le recourant.

19.5 Au vu des éléments qui précèdent, il n'existe pas, en l'état, d'éléments médicaux suffisamment fiables pour statuer sur le cas, même sous l'angle de la vraisemblance prépondérante. L'appréciation médicale de l'intimée, en tant qu'elle est fondée sur le seul dossier du recourant, dans un contexte où il avait fait l'objet d'une évaluation à la CRR plus d'une année auparavant alors que son état n'était pas stabilisé, et qui se trouve en partie contredite par les médecins traitants, ne remplit pas les exigences requises pour se voir reconnaitre une pleine valeur probante, étant rappelé que ces exigences sont sévères lorsqu'un cas d'assurance est réglé sans avoir recours à une expertise.

Les rapports médicaux apportés par le recourant, singulièrement le rapport du Dr K______ du 24 janvier 2023, ne permettent pas non plus de se prononcer de manière suffisamment éclairée sur le cas, compte tenu de leur brièveté et de l'absence de motivation sérieuse quant à la question centrale de la capacité de travail du recourant dans une activité adaptée. Ils sont au surplus muets concernant une éventuelle atteinte à l'intégrité.

19.6 Étant tenue par la maxime inquisitoire applicable en matière d'assurances sociales (art. 43 LPGA), l'intimée aurait ainsi dû instruire de manière plus approfondie le cas avant de fixer l'exigibilité du recourant dans une activité adaptée et de se prononcer sur l'indemnité pour atteinte à l'intégrité, ce d'autant que, pour cette dernière, l'évaluation médicale revêt une importance considérable.

Compte tenu des insuffisances de l'instruction réalisée par l'intimée, il se justifie de lui renvoyer la cause afin qu'elle mette en œuvre les mesures complémentaires nécessaires et procède, a minima, à un examen final du recourant. Dans le cadre du renvoi de la cause, l'intimée pourra par ailleurs prendre connaissance de l'expertise rhumatologique mise en œuvre par l'OAI et en tirer les éventuelles conclusions pertinentes.

20.         Enfin, la chambre de céans invite l'intimée à vérifier la fixation du revenu sans invalidité du recourant. Si, dans ce cadre, la référence aux salaires tirés de l'ESS n'est pas critiquable compte tenu du fait que le recourant était au chômage lors de l'accident du 17 août 2020 et qu'il n'avait aucune perspective réaliste d'être réengagé par son ancien employeur, ce dernier ayant, selon les explications fournies en audience par le recourant, réorienté ses activités et licencié tout le groupe de salariés de Genève, il est permis de s'interroger sur le niveau de compétence retenu. En effet, dans ses deux précédents emplois avant l'accident, le recourant occupait le poste de chef de chantier et disposait, compte tenu de son expérience, d'un salaire plus élevé que celui d'un ouvrier isoleur, ce qui se confirme à la lecture du contrat de travail auprès d'B______ (en comparaison avec les salaires fixés par la convention collective de travail applicable). Dans ces circonstances, l'intimée devra examiner si elle maintient le niveau de compétence 1 ou si elle se réfère au niveau de compétence 2, en motivant son point de vue, sachant que le calcul réalisé avant le prononcé de la décision du 18 janvier 2023 ne contient aucune explication à cet égard.

21.         Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis et la décision du 16 mars 2023 sera annulée.

Le recourant obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 1'500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision de l'intimée du 16 mars 2023.

4.        Renvoie la cause à l'intimée pour instruction complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

5.        Condamne l'intimée à verser au recourant une indemnité de CHF 1'500.- à titre de dépens.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le