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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2521/2021

ATAS/599/2023 du 14.08.2023 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2521/2021 ATAS/599/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 14 août 2023

Chambre 6

 

En la cause

 

A______
représentée par Me Pierre-Bernard PETITAT, avocat

 

 

recourante

contre

 

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

 

A.           a. Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née le ______ 1981, originaire d’Italie, titulaire d’une autorisation d’établissement C, a travaillé en Suisse comme assistante administrative, aide de bureau, conseillère de vente et assistante bibliothécaire.

b.   L’assurée a été en incapacité de travail totale depuis le 1er mars 2013, attestée par le docteur B______, FMH médecine interne générale, jusqu’au 31 mars 2015.

B.            a. Le 23 mars 2010, le docteur C______, FMH chirurgie de la main, a constaté un poignet hyperlaxe douloureux, sans lien avec l’accident de juin 2008 (chute sur le poignet droit).

b.   Le 30 octobre 2012, le docteur D______, FMH neurologie, a attesté d’un zona du dermatome S1 gauche, avec des dysesthésies à type de brûlures au toucher.

c.    Le 17 mai 2013, le centre multidisciplinaire d’étude et de traitement de la douleur (ci-après : le centre de la douleur) a rendu un rapport suite à deux consultations de l’assurée les 13 et 28 mai 2013. Il a posé les diagnostics de douleurs musculo-squelettiques diffuses ; s/p fracture du bassin et de deux côtes suite à un accident de moto en 1998 ; s/p multiples fractures au niveau du nez, d’un coude, des deux poignets, de l’annulaire gauche, des deux chevilles et des doigts de pieds à droite ; s/p zona du dermatome S1 gauche en octobre 2012 ; intolérance au lactose ; allergie à l’ibuprofène.

Des douleurs diffuses étaient apparues en 2008, particulièrement intenses dans les membres. L’anamnèse et le status évoquaient la présence de douleurs musculo-squelettiques diffuses pouvant entrer dans le cadre d’une sensibilisation centrale suite à de multiples traumatismes et un zona S1G. La reprise d’une activité de bureau, d’abord à 50% était encouragée, avec fréquents changements de position possibles.

d.   Le 21 mars 2014, le docteur E______, FMH rhumatologie, a attesté d’une entorse à la cheville droite en février 2013, douleurs à cet endroit depuis un an dans un contexte complexe de douleurs multiples, chroniques et diffuses.

e.    Le 27 mars 2014, le département de chirurgie des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) a attesté de plaintes de douleurs et instabilité de la cheville droite ; une stabilisation chirurgicale était indiquée.

f.     Le 9 avril 2014, le Dr E______ a décrit une symptomatologie en relation avec une entorse localisée sinus de tarse sans anomalie des ligaments latéraux de la cheville droite ; une approche chirurgicale n’était pas appropriée.

g.    Le 24 mars 2015, l’assurée a déposé une demande de prestations d’invalidité.

h.   Le 21 avril 2015, la docteure F______, FMH rhumatologie-médecine interne, a rempli un rapport médical AI attestant d’un syndrome douloureux chronique diffus depuis plusieurs années, d’un suivi depuis 2010, d’une dernière consultation en janvier 2014, d’une incapacité de travail due à des douleurs et de la fatigabilité ; il existait une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée, sans travail lourd, à évaluer.

i.      Le 21 mai 2015, le Dr B______ a rempli un rapport médical AI attestant d’une incapacité de travail totale dans toute activité depuis mars 2014 en raison d’un syndrome de douleurs chroniques post-traumatiques (AVP, polytraumatisme dont fracture du bassin) et une instabilité talo-fibulaire gauche post-entorse à répétition.

j.     Le 12 juin 2015, le Dr E______ a rempli un rapport médical AI attestant d’un suivi depuis le 21 mars 2014, d’une incapacité de travail totale dans l’activité habituelle de vendeuse et à évaluer dans une activité adaptée, selon les autres problèmes médicaux (travail assis envisageable). Elle présentait des douleurs et une instabilité chronique de la cheville droite depuis une entorse de février 2013. Une IRM de janvier 2014 montrait la persistance d’une récidive de sinus de tarse droit, soit une lésion chronique.

k.   Par communication du 17 août 2015, l’office de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI) a informé l’assurée que des mesures d’intervention précoce et de réadaptation professionnelle n’étaient pas indiquées.

l.      Le 25 août 2015, le Dr B______ a indiqué un état de santé stationnaire ; la capacité de travail était nulle et le ménage empêché par des douleurs chroniques.

m. Le 7 septembre 2015, le Dr E______ a indiqué qu’il n’avait pas revu l’assurée depuis le 16 mars 2015.

n.   Le 28 septembre 2016, le Dr B______ a attesté d’une affection intestinale de type « colon spastique ».

o.    Par communication du 23 février 2018, l’OAI a informé l’assurée qu’une expertise était nécessaire, laquelle serait effectuée au G______ par les docteurs H______(rhumatologue) et I______ (psychiatre). Le rapport d’expertise du G______ a été rendu le 13 juin 2018.

L’assurée se plaignait de douleurs lombaires en barre et dans la région iliaque suite à une fracture du bassin en 1998 (accident de la route en Italie), qui l’avait obligée à rester alitée pendant une année, de diminution de la sensibilité des doigts de la main droite suite à une chute en 2008, d’une entorse grave de la cheville droite en février 2013, suite de trois récidives, avec persistance d’une instabilité, de douleurs dans tout le corps, de dorsalgies permanentes, de torsion de la cheville droite, de lâchage de la main droite, de la hanche droite, de gonflement du poignet et des doigts droits, de palpitations, de sensibilité de la peau, d’intolérance au gluten et au lactose, de céphalées, d’essoufflement, d’infections urinaires à répétition, d’oublis, de ruminations, d’anxiété, de fatigue constante, de manque de confiance et de troubles du sommeil.

Sur le plan de la médecine physique et réadaptation, l’examen clinique était dans les limites de la norme et ne permettait pas de retenir un substrat objectif aux nombreuses plaintes de l’assurée ; celle-ci n’était pas majorante à l’examen physique, elle était authentique dans sa souffrance, mais sa perception dramatique de son histoire médicale ne correspondait pas à la réalité objective de son état et de son dossier ; force était de constater qu’il n’y avait pas d’explication organique objective aux douleurs que présentait l’assurée ; même si le dossier et l’anamnèse faisaient état d’une hyperlaxité, elle n’était pas retrouvée à ce jour, sauf au niveau des poignets, le score de Breighton était à zéro ; il n’y avait pas d’élément clinique ou dans le dossier parlant pour un rhumatisme inflammatoire chronique qui avait été éliminé par les investigations réalisées par la Dre F______ en 2013.

Sur le plan psychique, sur la base des éléments anamnestiques et leur observation, les experts retenaient un syndrome douloureux somatoforme persistant (F45.4) ; ce trouble survenait dans un contexte de difficultés professionnelles ; il était accompagné d’une tendance manifeste à la dramatisation des plaintes, tous les événements accidentels prenant des proportions extraordinaires ; l’assurée avait le sentiment de ne plus être prise au sérieux et le sentiment que les médecins n’allaient pas jusqu’au bout de leurs investigations, et ceci pour des raisons de coût ; toutefois, elle estimait que certains médecins la prenaient au sérieux.

Les experts ont posé les diagnostics de syndrome douloureux diffus sans substrat et syndrome douloureux somatoforme persistant (F45.4). Status post-fracture de l’aile iliaque gauche avec consolidation avec déformation, mais sans aucun retentissement fonctionnel ; status post-entorse latérale externe de cheville droite.

La capacité de travail était totale, sans diminution de rendement, dans l’ancienne activité et dans toute activité professionnelle non qualifiée ; il n’y avait pas de limitation fonctionnelle somatique ou psychique

p.   Le 9 juillet 2018, le docteur J______, du service médical régional (ci-après : SMR), a rendu un avis médical estimant que l’expertise du G______ était convaincante et que la capacité de travail était totale dans toute activité.

q.   Par projet de décision du 24 juillet 2018, l’OAI a rejeté la demande de prestations de l’assurée, au motif que l’atteinte à la santé n’était pas invalidante.

r.    Le 12 septembre 2018, l’assurée a écrit à l’OAI qu’elle s’opposait au projet de décision car ses douleurs l’empêchaient de mener une vie professionnelle et handicapaient sa vie privée et les activités ménagères. Elle a communiqué un rapport, en italien, du 28 août 2018 du docteur K______, à L______, Italie.

s.     Le 3 octobre 2018, la docteure M______, du SMR, a rendu un avis médical selon lequel le Dr K______ ne se prononçait pas sur la capacité de travail de l’assurée et que les atteintes mentionnées avaient été analysées par les experts.

t.     Par décision du 4 octobre 2018, l’OAI a rejeté la demande de prestations.

C.           a. Le 7 novembre 2018, l’assurée, représentée par un avocat, a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) à l’encontre de la décision précitée, en relevant qu’elle était fortement atteinte dans sa santé depuis plusieurs années et en sollicitant une rente d’invalidité. Elle a communiqué un rapport du 1er novembre 2018 du ventre de la douleur, attestant de diagnostic de douleurs musculo-squelettiques diffuses depuis 2013 ; probable fibromyalgie ; signes en faveur d’une hypermobilité articulaire bénigne (Ehlers-Danlos). Il était évoqué des douleurs chroniques diffuses sous-tendues par une sensibilisation centrale et entrant dans le cadre d’une probable fibromyalgie ; il convenait encore d’exclure toute autre cause immunologique ou rhumatologique et investiguer une atteinte des petites fibres et une hypermobilité articulaire bénigne.

b.   Le 5 décembre 2018, la recourante a complété son recours, en faisant valoir que l’expertise du G______ n’avait pas pleine valeur probante, notamment au regard des critères jurisprudentiels impératifs pour déterminer le caractère incapacitant ou non des troubles somatoformes douloureux persistants ; le caractère invalidant apparaissait évident ; par ailleurs, il était douteux que l’expert psychiatre puisse fonctionner comme expert, dès lors qu’il avait été son médecin traitant.

c.    Le 14 janvier 2019, l’OAI a conclu au rejet du recours, au motif que l’expertise du G______ avait pleine valeur probante et que l’expert psychiatre, qui n’était plus médecin traitant de la recourante depuis de nombreuses années, n’avait pas été récusé immédiatement par celle-ci, qu’enfin la procédure probatoire structurée de l’ATF 141 V 281 pouvait également être écartée lorsqu’un rapport médical ayant une pleine valeur probante concluait de manière convaincante à l’absence d’incapacité de travail sans qu’une autre évaluation médicale ne le contredise de manière probante, soit faute de qualification médicale, soit parce qu’elle ne revêtait pas de valeur probante pour quelque autre motif.

d.   Le 14 février 2019, la recourante a répliqué en persistant dans ses conclusions. Elle a communiqué :

-       un rapport d’IRM faciale du 13 décembre 2018, concluant à l’absence d’anomalie significative ;

-       un rapport d’échographie mammaire bilatérale du 13 décembre 2018, concluant à un probable kyste ;

-       une prescription de physiothérapie du docteur N______, FMH chirurgie orale et maxillo-faciale ;

-       une convocation de l’assurée le 18 février 2019 pour un examen électroneuromyographique HUG.

Enfin, elle avait débuté une thérapie en décembre 2018 auprès du docteur O______, psychiatre aux HUG.

e.    Le 4 mars 2019, l’assurée a indiqué qu’elle avait rendez-vous en médecine génétique le 20 mars 2019.

f.     Le 11 mars 2019, la chambre de céans a entendu les parties en audience de comparution personnelle.

La recourante a déclaré qu’elle estimait être totalement incapable de travailler en raison de ses douleurs, de vertiges et de blocages. Elle ne pouvait quasiment plus écrire, ni se concentrer. Elle avait de la peine à s’habiller et se doucher. Elle vivait toute seule et elle n’était aidée que par ses deux voisines pour le ménage. Elle avait également des problèmes de sommeil, de la fatigue, des problèmes de concentration, cela devenait invivable.

g.    A la demande de la chambre de céans, le G______ a précisé le 19 mars 2019 quelle partie de la synthèse et discussion avait été rédigée par quel expert et indiqué que l’expert H______ disposait d’une spécialisation en médecine physique et réadaptation.

h.   A la demande de la chambre de céans, les médecins suivants ont donné des renseignements complémentaires :

-       Le 20 mars 2019, la Dre F______ a attesté d’un suivi depuis 2010 et d’un diagnostic de syndrome douloureux chronique diffus ; elle était d’accord avec les constatations et conclusions somatiques de l’expert du G______ ainsi qu’avec le diagnostic de syndrome douloureux diffus sans substrat ; l’assurée présentait les limitations suivantes : pas de port de charge de plus de 20 kg et la nécessité d’alterner parfois les positions (assise/debout).

-       Le 6 avril 2019, le Dr B______ a attesté d’un suivi depuis décembre 2011 pour un syndrome douloureux chronique post-traumatique (polytraumatisme sur accident de moto en août 1998) entrainant une capacité de travail nulle en raison de symptômes douloureux et de fatigue ; il n’était pas d’accord avec les conclusions du Dr H______.

-       Le 23 avril 2019, le Dr O______ a attesté d’un suivi depuis le 6 décembre 2018 pour un syndrome douloureux somatoforme persistant et un épisode dépressif moyen. Il n’était pas d’accord avec le volet psychiatrique de l’expertise du G______ car l’assurée souffrait aussi d’un trouble dépressif moyen avec tristesse quotidienne, diminution du plaisir, découragement, fatigabilité, troubles du sommeil et difficultés à se projeter dans l’avenir. Son trouble dépressif était effectivement lié à ses douleurs intenses et handicapantes qui favorisaient son isolement social et rendaient sa capacité de travail nulle. Il existait des limitations fonctionnelles en ce qui concernait la reprise de son activité professionnelle (tristesse et découragement en lien avec ses douleurs, baisse de la motivation et de l’énergie, diminution du plaisir, fatigabilité, troubles du sommeil, intolérance au stress, isolement social), qui rendaient sa capacité de travail nulle pour toute activité professionnelle.

En l’état, l’assurée ne prenait pas d’antidépresseur car elle craignait la prise de poids mais restait ouverte à cette option thérapeutique. Le trouble somatoforme et l’état dépressif étaient résistants aux différentes mesures thérapeutiques entreprises.

-       Le 9 mai 2019, la docteure P______ de la consultation ambulatoire de la douleur des HUG a indiqué un suivi à trois reprises en mai 2013 et octobre 2018 pour un syndrome douloureux somatoforme persistant. Les douleurs et leurs répercussions fonctionnelles et psychiques réduisaient fortement les capacités fonctionnelles de l’assurée exigeant des efforts physiques répétés ou le port de charges ; elles entrainaient aussi des modifications psychiques ; elles limitaient sa capacité de stationnement debout immobile, la durée de marche, les mouvements répétitifs et le port de charge ; une capacité de travail totale n’était pas envisageable en octobre 2018 ; le Dr H______ ne tenait pas compte de la littérature internationale, validée par l’OMS dans le domaine des douleurs chroniques ; le syndrome douloureux diffus n’était pas sans substrat puisque des tests électro-physiologiques et radiologiques (non pratiqués à Genève en routine) objectivaient des modifications anatomiques et fonctionnelles au niveau de la corne postérieure de la moelle et au niveau des aires cérébrales dans les douleurs chroniques.

i.      Le 4 avril 2019, l’assurée a communiqué un rapport d’ENMG du 18 février 2019, concluant à une diminution du seuil de la douleur significative par rapport aux normes. L’assurée pourrait souffrir d'une neuropathie des petites fibres par gain de fonction qui pouvait se manifester par ce tableau clinique. Elle était, de ce fait, adressée en médecine génétique pour essayer d'approfondir ce point.

j.     Les 13 et 20 mai 2019, l’assurée a observé que le Dr H______ n’était pas rhumatologue et que le Dr I______, ancien psychiatre traitant, ne pouvait fonctionner comme expert ; l’expertise du G______ n’avait déjà, pour ces motifs, pas de valeur probante. La Dre F______ avait reconnu de façon incompréhensible une capacité de travail alors qu’elle l’avait encouragée à effectuer des démarches à l’OAI, estimant sa capacité de travail nulle. Dès lors, que cette médecin travaillait pour le G______, il convenait d’apprécier son avis avec circonspection. Par ailleurs, les Drs B______, O______ et P______ estimaient sa capacité de travail nulle ; enfin, elle était en investigation d’une éventuelle neuropathie des petites fibres.

k.   Les 2 et 21 mai 2019, la Dre M______, du SMR, a rendu un avis selon lequel l’appréciation de la Dre P______ concernant la capacité de travail de l’assurée ne reposait pas sur des éléments médicaux objectifs et que les douleurs avaient été prises en compte par les experts, avec analyse des indicateurs de la jurisprudence en vigueur.

l.      Le 5 décembre 2019, l’assurée a communiqué un rapport du 1er novembre 2019 du docteur Q______ du service de médecine génétique des HUG, selon lequel l’exploration génétique réalisée (rapport du 8 août 2019) n’avait pas permis de mettre en évidence une causalité génétique au phénotype de l’assurée ; une nouvelle réanalyse bio-informatique serait indiquée, vu l’évolution constante des connaissances scientifiques dans le domaine ; l’assurée était adressée au service de neurologie des HUG pour le suivi du diagnostic clinique et électro physiologique.

m. Par arrêt du 2 mars 2020 (ATAS/165/2020), la chambre de céans a partiellement admis le recours, annulé la décision litigieuse et renvoyé la cause à l’OAI pour une instruction médicale complémentaire afin d’analyser les indicateurs jurisprudentiels pertinents pour évaluer le caractère invalidant des diagnostics retenus par le G______.

n.   Le 5 octobre 2020, le Dr O______ a attesté d’un isolement social important de l’assurée et un diagnostic totalement incapacitant depuis en tous les cas octobre 2018 de syndrome douloureux somatoforme persistant et épisode dépressif moyen.

o.    L’OAI a sollicité le G______ pour effectuer un complément d’expertise et l’assurée s’est opposée à la désignation du G______.

p.   Par décision incidente du 18 novembre 2020, l’OAI a maintenu un complément d’expertise auprès du G______ (Drs R______, FHM psychiatrie et psychothérapie, et H______).

q.   Le 26 janvier 2021, le docteur S______, FHM allergologie et immunologie clinique, maladies rhumatismales et médecine interne, a attesté d’une syndrome d’eczéma-dermatite atopique et un syndrome d’hyperlaxité ligamentaire.

r.    Le 21 avril 2021, le G______ a rendu un rapport d’expertise, complété par un volet de médecine interne (Drs R______, H______ et T______, FMH médecine interne). Ils ont retenu comme nouveau diagnostic celui de trouble anxieux et dépressif mixte et une capacité de travail de 100% dans toute activité, avec une absence de limitations fonctionnelles et estimé que l’assurée présentait une organisation pathologique de la personnalité ainsi que la présence de ressources physiques et psychiques, et de certaines incohérences.

s.     Le 6 mai 2021, le SMR a estimé que ce rapport d’expertise confirmait son avis du 9 juillet 2018.

t.     Par projet de décision du 11 mai 2021, l’OAI a rejeté la demande de prestations, faute d’atteinte à la santé invalidante.

u.   Le 8 juin 2021, l’assurée a observé qu’elle présentait des douleurs réelles et handicapantes, une cheville droite instable, des crises de céphalées, un trouble dépressif moyen, des troubles du sommeil, un syndrome d’hyperlaxité ligamentaire attesté par le Dr S______ et qu’elle était en désaccord avec les experts.

v.    Par décision du 21 juin 2021, l’OAI a rejeté la demande de prestations.

D.           a. Le 26 juillet 2021, l’assurée, représentée par un avocat, a recouru auprès de la chambre de céans à l’encontre de la décision précitée, en concluant, principalement, a son annulation et à l’octroi d’une rente entière d’invalidité, subsidiairement, à l’ordonnance d’une expertise judiciaire. L’expertise du G______ n’était pas probante ; un diagnostic de fibromyalgie avait été écarté à tort par les experts, tout comme le syndrome d’Ehlers-Danlos et une claustrophobie ; ses médecins traitants estimaient sa capacité de travail comme nulle.

b.   Le 24 août 2021, l’OAI a conclu au rejet du recours en considérant que l’expertise du G______ était probante.

c.    L’assurée n’a pas répliqué dans le délai imparti.

d.   Le 26 avril 2022, l’assurée a produit des pièces médicales, soit notamment :

-       deux rapports du Dr B______ des 4 octobre 2021 et 14 avril 2022, attestant d’une capacité de travail nulle de l’assurée depuis 2012 en raison d’un syndrome douloureux chronique post-traumatique ;

-       une attestation et un rapport du Dr S______ des 9 décembre 2021 et 4 février 2022, attestant d’un asthme allergique et de l’impossibilité pour l’assurée de prendre les transports en commun ;

-       un rapport de la docteure U______, FMH neurologie, du 27 janvier 2022, attestant de plaintes de migraines quotidiennes.

e.    Le 2 mai 2022, la chambre de céans a entendu les parties en audience de comparution personnelle.

f.     La recourante a indiqué qu'elle était convoquée pour un test génétique en août 2022.

g.    A la demande de la chambre de céans, le Dr S______ a attesté d'un syndrome d'hyperlaxité ligamentaire chez la recourante, avec la présence d'une inflammation au niveau des zones d'ancrage des structures tendineuses et une dysrégulation des systèmes de régulation endogène de la douleur ; il contestait la conclusion du Dr H______ évoquant un syndrome douloureux diffus sans substrat ; il ne pouvait pas évaluer la capacité de travail de la recourante, n'étant pas son médecin traitant.


 

h.   Le 31 mai 2022, la docteure V______, médecin adjointe dans le service de médecine génétique des HUG, a indiqué qu'il était suspecté un syndrome d'Ehlers Danlos (EDS) type hypermobile ; si une autre atteinte du tissu conjonctif était suspectée, une analyse moléculaire pourrait être effectuée.

i.      Le 16 juin 2022, le SMR a expliqué que même si les douleurs étaient objectivées, elles nécessiteraient l'analyse des indicateurs de la jurisprudence ; les atteintes évoquées par le Dr B______ étaient connues des experts ; l'hyperréactivité bronchique n'était pas incapacitante ; les céphalées faisaient partie du syndrome douloureux chronique ; il n'était pas nécessaire d'attendre le résultat de tests génétiques.

j.     Le 22 juin 2022, la recourante a observé que le Dr S______ confirmait le syndrome d'hyperlaxité ligamentaire.

k.    Le 22 juin 2022, l'OAI a persisté dans ses conclusions.

l.      Le 16 septembre 2022, la Dre V______ a indiqué qu'une demande de remboursement d'une analyse moléculaire large du syndrome douloureux était en cours.

m.  Le 13 décembre 2022, la Dre V______ a indiqué qu'elle attendait la réponse de l'assurance-maladie, laquelle a accepté, le 21 janvier 2023, la prise en charger d'une analyse de gènes.

n.    A la demande de la chambre de céans, la Dre V______ a rendu un rapport le 30 mai 2023, dans lequel elle attestait que la recourante ne remplissait pas suffisamment de critères pour poser le diagnostic d'ESD hypermobile.

L'analyse moléculaire des gènes connus responsables de neuropathies, héréditaires, d'atteinte du tissu conjonctif, de syndromes douloureux, de fièvres périodiques et d'hématuries héréditaires, n'avait pas permis d'identifier de variant pathogène. Le tableau clinique était compatible avec un diagnostic de trouble du spectre hypermobile entrainant une hypermobilité articulaire généralisée, symptomatique et douloureuse. Elle ne pouvait se prononcer sur les limitations fonctionnelles et la capacité de travail de la recourante, du ressort du médecin traitant.

o.    Le 22 juin 2023, le SMR a observé que le diagnostic de trouble du spectre hypermobile n'avait pas pu être corrélé avec une anomalie génétique et l'analyse des indicateurs faite par les experts était pertinente.

p.   Le 22 juin 2023, l'OAI a confirmé l'appréciation médicale des experts.

q.   Le 23 juin 2023, la recourante a observé qu'elle était en arrêt de travail depuis dix ans, comme l'attestait le Dr B______. Elle persistait dans ses conclusions.

 


E.        

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

Toutefois, les modifications légales contenues dans la LPGA constituent, en règle générale, une version formalisée dans la loi de la jurisprudence relative aux notions correspondantes avant l'entrée en vigueur de la LPGA ; il n'en découle aucune modification du point de vue de leur contenu, de sorte que la jurisprudence développée à leur propos peut être reprise et appliquée (ATF 130 V 343 consid. 3).

1.3 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]). Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss LPA).

2.             Le litige porte sur le droit de la recourante a une rente d’invalidité, singulièrement sur la question de l’évaluation de sa capacité de travail.

3.              

3.1 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

3.2 En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois-quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28 al. 2 LAI).

4.              

4.1 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté ; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c ; ATF 102 V 165 consid. 3.1 ; VSI 2001 p. 223 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).

La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanent d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, tel le CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 et 141 V 281 consid. 2.2 et 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_841/2016 du 30 novembre 2017 consid. 4.5.2).

Les principes jurisprudentiels développés en matière de troubles somatoformes douloureux sont également applicables à la fibromyalgie (ATF 132 V 65 consid. 4.1), au syndrome de fatigue chronique ou de neurasthénie (ATF 139 V 346 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_662/2009 du 17 août 2010 consid. 2.3 in SVR 2011 IV n° 26 p. 73), à l'anesthésie dissociative et aux atteintes sensorielles (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 9/07 du 9 février 2007 consid. 4 in SVR 2007 IV n° 45 p. 149), à l’hypersomnie (ATF 137 V 64 consid. 4) ainsi qu'en matière de troubles moteurs dissociatifs (arrêt du Tribunal fédéral 9C_903/2007 du 30 avril 2008 consid. 3.4), de traumatisme du type « coup du lapin » (ATF 141 V 574 consid. 5.2 et ATF 136 V 279 consid. 3.2.3) et d’état de stress post-traumatique (ATF 142 V 342 consid. 5.2). En revanche, ils ne sont pas applicables par analogie à la fatigue liée au cancer (cancer-related Fatigue) (ATF 139 V 346 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_73/2013 du 2 septembre 2013 consid. 5).

Dans sa jurisprudence récente (ATF 143 V 409 consid. 4.5 et ATF 143 V 418 consid. 6 et 7), le Tribunal fédéral a modifié sa pratique lors de l'examen du droit à une rente d'invalidité en cas de troubles psychiques. La jurisprudence développée pour les troubles somatoformes douloureux, selon laquelle il y a lieu d'examiner la capacité de travail et la capacité fonctionnelle de la personne concernée dans le cadre d'une procédure structurée d'administration des preuves à l'aide d'indicateurs (ATF 141 V 281), s'applique dorénavant à toutes les maladies psychiques, y compris troubles dépressifs de degré léger ou moyen (ATF 143 V 409 consid. 4.5.1). En effet, celles-ci ne peuvent en principe être déterminées ou prouvées sur la base de critères objectifs que de manière limitée.

4.2 La capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d'évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d'une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d'autre part, des potentiels de compensation (ressources) (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L'accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d'exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence). 

Il y a lieu de se fonder sur une grille d’analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).

-     Catégorie « Degré de gravité fonctionnel » (ATF 141 V 281 consid. 4.3),

A.    Complexe « Atteinte à la santé » (consid. 4.3.1)

Expression des éléments pertinents pour le diagnostic (consid. 4.3.1.1), succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à cet égard (consid. 4.3.1.2), comorbidités (consid. 4.3.1.3).

B.     Complexe « Personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles; consid. 4.3.2) 

C.     Complexe « Contexte social » (consid. 4.3.3)

-     Catégorie « Cohérence » (aspects du comportement; consid. 4.4) 

Limitation uniforme du niveau d'activité dans tous les domaines comparables de la vie (consid. 4.4.1), poids des souffrances révélé par l'anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation (consid. 4.4.2).

Les indicateurs appartenant à la catégorie « degré de gravité fonctionnel » forment le socle de base pour l’évaluation des troubles psychiques (ATF 141 V 281 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2).

5.              

5.1 Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1). La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 ; ATF 115 V 133 consid. 2 ; ATF 114 V 310 consid. 3c ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_442/2013 du 4 juillet 2014 consid. 2).

5.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. A cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3 ; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

5.3 Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

5.4 Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Dans une procédure portant sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurances sociales, lorsqu'une décision administrative s'appuie exclusivement sur l'appréciation d'un médecin interne à l'assureur social et que l'avis d'un médecin traitant ou d'un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes même faibles quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l'un ou sur l'autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l'art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 135 V 465 consid. 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_301/2013 du 4 septembre 2013 consid. 3).

5.5 Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

5.6 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

5.7 On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. A cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2).

6.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

7.             Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

8.             En l'occurrence, à la suite de l'arrêt de renvoi de la chambre de céans, l'intimé a mis en œuvre une expertise pluridisciplinaire auprès du G______ (psychiatrie - médecine physique et réadaptation et médecine interne).

8.1 Le rapport du G______ du 21 avril 2021, fondé sur toutes les pièces du dossier, comprenant une anamnèse, la description des plaintes de la recourante, un status complet, des diagnostics clairs et bien motivés, ainsi que l'analyse des indicateurs pertinents, répond aux critères jurisprudentiels précités pour qu'il lui soit reconnu une pleine valeur probante.

8.2 La recourante conteste la valeur probante de l'expertise du G______. Elle relève l'absence de diagnostic psychiatrique alors que le Dr O______ posait celui d'épisode dépressif moyen et que l'anamnèse évoquait une claustrophobie. Les experts écartaient à tort le diagnostic de fibromyalgie pourtant évoqué par les Dres F______ et P______ et celui d'EDS pourtant confirmé par le Dr S______. Elle souligne aussi que c'est en raison de ses problèmes psychiques qu'elle tenait parfois des propos contradictoires ou exagérés.

8.2.1 S'agissant de la fibromyalgie, le Dr H______ a expliqué que le diagnostic de syndrome douloureux chronique était retenu, plutôt que celui de fibromyalgie, le médecin rhumatologue traitant ne l'ayant pas posé. Quoiqu'il en soit, tant le diagnostic de fibromyalgie, que la recourante veut se voir reconnaître, que celui de syndrome douloureux chronique doivent être évalués selon les indicateurs pertinents, de sorte que si celui de fibromyalgie était retenu, les conclusions des experts du G______, fondées sur lesdits indicateurs, n'en seraient pas modifiées.

8.2.2 Concernant le diagnostic d’EDS, l’analyse moléculaire effectuée par la Dre V______ a exclu un tel diagnostic génétique et retenu un trouble du spectre ligamentaire. L’analyse génétique à laquelle s’est soumise la recourante n’a ainsi pas permis d’objectiver une maladie, comme relevé par la Dre V______. Or, comme relevé par le SMR, le trouble du spectre hypermobile, dans la mesure où il est susceptible de provoquer un état douloureux, doit être évalué, pour objectiver son caractère incapacitant, au moyen des indicateurs jurisprudentiels pertinents, comme l’ont fait les experts du G______. Par ailleurs, aucun médecin n’établit que le symptôme d’hypermobilité articulaire de ce trouble aurait un impact sur la capacité de travail, ce que la recourante n’invoque pas non plus, l’aspect incapacitant étant uniquement relié au syndrome douloureux.

8.2.3 Quant au diagnostic d’épisode dépressif moyen posé par le Dr O______ le 5 octobre 2020, il n’est pas motivé et ne permet pas de mettre en doute le diagnostic de trouble anxieux et dépressif mixte posé par le Dr R______. S’agissant du diagnostic de claustrophobie, évoqué par le Dr R______, la recourante n’indique pas en quoi il serait incapacitant.

8.2.4 Les experts ont retenu les diagnostics suivants : sur le plan de la médecine interne (polyatopie ; allergie aux aminopénicillines ; surcharge pondérale ; probable syndrome de l’intestin irritable ; vessie hyperactive ; céphalées chroniques à prédominance de céphalées de tension ; hyperplasie nodulaire focale ; ostéopénie) ; sur le plan de la médecine physique et réadaptation (syndrome douloureux chronique [MG30.0] et syndrome algo-dysfonctionnel temporo-mandibulaire) ; sur le plan psychique (troubles anxieux et dépressifs mixtes [F41.2] et syndrome douloureux somatoforme persistant [F45.4]).

8.2.5 En présence d’un syndrome douloureux chronique et de diagnostics psychiatriques, les experts ont procédé à l’analyse des indicateurs jurisprudentiels précités. À cet égard, le Dr H______ a relevé que le traitement pouvait être intensifié, la recourante étant dans une prise en charge essentiellement passive ; la fatigue évoquée n’avait pas été observée. Elle s’appuyait sur sa famille, une voisine et une amie, ses ressources externes étant réduites ; elle disposait de ressources physiques qu’elle pourrait mieux mobiliser ; selon le Dr T______, il existait une incohérence entre les plaintes multiples et l’absence de constatation d’une altération de l’état général, de postures antalgiques, de fatigabilité ; enfin le Dr R______ a relevé que le taux de Cymbalta était en dessous de la fourchette thérapeutique ; il n’y avait jamais eu de traitement psychiatrique ambulatoire intensif. Il y avait des divergences entre les symptômes décrits et l’examen clinique ; la fatigue, l’humeur anxieuse et dépressive n’étaient pas retrouvées à l’examen clinique ; il existait de nombreuses incohérences.

Les trois experts ont relevé des comportements de majoration. La recourante était capable de communiquer, de respecter un cadre, elle avait des capacités d’adaptation, de la flexibilité ; elle était psychiquement endurante et faisait valoir ses droits ; elle était claire, indépendante, avait des capacités de prise de décision, de jugement et avait de bonnes capacités relationnelles. L’évaluation consensuelle des experts du 21 avril 2021 (à l’aune des indicateurs pertinents) concluait à l’absence de diagnostics incapacitants et à une capacité de travail de 100% dans l’activité habituelle.

8.2.6 La recourante ne conteste pas spécifiquement l’analyse des indicateurs, hormis le constat d’une démonstrativité excessive, qu’elle impute aux symptômes de sa maladie. Cette critique, fondée sur la seule déclaration de la recourante, ne remet pas en cause le constat des experts.

8.3 Au demeurant, la conclusion des experts du G______ doit être suivie et la recourante reconnue capable de travailler à un taux de 100% dans toute activité.

9.             Partant, la recourante présente un degré d’invalidité nul, de sorte que la décision litigieuse lui refusant tout droit à des prestations d’invalidité ne peut qu’être confirmée et le recours rejeté.

Bien que la procédure ne soit pas gratuite en matière d’assurance-invalidité (art. 69 al. 1bis LAI), il n’y a pas lieu de percevoir un émolument, la recourante étant au bénéfice de l’assistance juridique (art. 12 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le