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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1367/2021

ATAS/386/2023 du 01.06.2023 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1367/2021 ATAS/386/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 1er juin 2023

Chambre 5

 

En la cause

A______

représenté par Me Stéphane CECCONI, avocat

 

 

recourant

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'intéressé ou le recourant), né en ______ 1962, est bénéficiaire de prestations de l’assurance-invalidité et perçoit des prestations complémentaires depuis 2005.

b. Il est marié avec Madame B______ (ci-après : l’épouse ou la conjointe), née en ______ 1967, qui n’a jamais exercé d’activité lucrative. Les époux sont parents de quatre enfants, respectivement nés en 1994 (C______), 1995 (D______), 1996 (E______) et 2000 (F______).

B. a. Par courrier du 6 décembre 2019, le service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l'intimé) a informé l'intéressé qu'il allait fixer un revenu hypothétique pour son épouse qui n'exerçait pas d'activité lucrative. Si aucun changement ne devait intervenir d'ici au 1er juillet 2020, les prestations seraient déterminées selon la feuille de calcul jointe qui fixait des prestations annuelles à zéro en raison d'un gain potentiel de CHF 51'288.-, calculé et retenu pour l'épouse de l'intéressé.

b. En date du 4 mars 2020, le SPC a rendu une décision de prestations complémentaires, égale à zéro pour la période allant de janvier à mars 2020, en raison du fait qu'un gain potentiel correspondant au revenu hypothétique, fixé à CHF 40'991.-, avait été retenu pour la conjointe.

c. Par courrier du 16 avril 2020, le service social santé et enfance de la ville d'Onex, agissant en qualité de mandataire de l'intéressé, a demandé au SPC de supprimer le revenu hypothétique retenu pour l'épouse de ce dernier. Il a invoqué l'existence d'un élément non pris en compte par le SPC, soit une demande de prestations invalidité déposée le 20 mars 2019 par l'épouse. Celle-ci se trouvait en incapacité de travail à 100%, même dans une activité adaptée et ses capacités de gain étaient nulles et ceci pour une durée indéterminée, selon certificat médical du docteur G______, psychiatre, joint au courrier et justifiant l’incapacité de travail totale par une symptomatologie anxio-dépressive.

d. En date du 30 juin et du 1er juillet 2020, un échange de courriels a eu lieu entre le mandataire de l'intéressé et le SPC, le premier informant le second qu'il restait dans l'attente d'une décision du SPC et le second rappelant au premier que seul l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l'OAI) pouvait rendre une décision concernant la capacité de travail de l'épouse de l'intéressé.

e. Diverses échanges d’emails ont eu lieu pendant les mois de juillet et août 2020 puis, en date du 14 août 2020, l'intéressé a procédé à la mise en demeure du SPC de rendre une décision, au plus tard, le 30 août 2020, suite à la demande de suppression du revenu hypothétique datée du 16 avril 2020. Il était demandé au SPC de rendre une décision dès maintenant, fondée sur les éléments à disposition, ce qui était considéré comme possible, « quitte à réévaluer la situation ultérieurement, en fonction de l'avancement de l'instruction du cas d'espèce » auprès de l'OAI.

f. Suite à la mise en demeure, le SPC a rendu une décision du 18 août 2020, par laquelle il a fixé l'établissement du droit à venir de l'intéressé, avec des prestations qui étaient égales à zéro. Le revenu déterminant, calculé à hauteur de CHF 94'797.-, était supérieur au total des dépenses reconnues, soit CHF 60'685.- pour les prestations complémentaires fédérales et CHF 79'736.- pour les prestations complémentaires cantonales, car un gain potentiel de CHF 51'288.- était attribué à l'épouse de l'intéressé. La décision indiquait qu'une opposition pouvait être formulée, dans les 30 jours, auprès du SPC.

g. Par acte de son avocat, déposé en date du 7 septembre 2020, le mandataire de l'intéressé a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) pour déni de justice, se plaignant de l'absence de décision du SPC.

h. Par arrêt du 17 décembre 2020 (ATAS/1242/2020), la chambre de céans a déclaré le recours irrecevable, car prématuré, et a renvoyé la cause au SPC comme objet de sa compétence.

C. a. Suite au renvoi de la cause, le SPC a examiné l’opposition de l’intéressé puis a rendu une décision sur opposition du 8 mars 2021 confirmant sa précédente décision du 18 août 2020. Après avoir examiné le certificat médical du 7 avril 2020 rédigé par le Dr G______, le SPC considérait que cet avis médical ne suffisait pas à conclure à une capacité de gain nulle dans toute activité de la conjointe de l’intéressé. Par ailleurs, le SPC relevait qu’après avoir contacté l’OAI, ce dernier avait confirmé que la demande de prestations déposée le 20 mars 2019 se trouvait toujours en cours d’instruction, sans qu’il puisse être déterminé, à ce jour, la nature invalidante des atteintes à la santé dont souffrait l’épouse de l’intéressé. Enfin, le SPC constatait qu’aucune recherche d’emploi n’avait été produite et qu’aucun élément n’avait démontré que l’épouse de l’intéressé cherchait de l’aide auprès des organismes de placement. Par conséquent, on ne pouvait pas considérer que l’inactivité de la conjointe était due à des problèmes de santé ou à des motifs conjoncturels et l’opposition était rejetée.

b. Par acte de son avocat du 21 avril 2021, l’intéressé a interjeté recours contre la décision sur opposition du 8 mars 2021 au motif que le SPC ne pouvait pas tenir compte du gain potentiel de son épouse en raison de son état de santé qui l’empêchait d’exercer une activité. De surcroît, l’épouse était âgée de 54 ans, ne parlait pas bien le français et ne disposait d’aucune formation lui permettant d’exercer une activité professionnelle.

c. Par réponse du 16 août 2021, le SPC a conclu au rejet du recours et a rappelé que l’épouse de l’intéressé vivait depuis plus de 20 ans en Suisse et n’avait jamais cherché à trouver un emploi ou à participer, d’une manière quelconque, à la société. Ainsi, ce n’était pas en raison de problèmes de santé que cette dernière n’avait pas pu travailler durant toutes ces années et il n’appartenait pas au SPC, partant à la collectivité, d’assumer la passivité de l’épouse.

d. Parallèlement, le SPC avait rendu une seconde décision, datée du 5 juillet 2021, laquelle retenait également un revenu hypothétique pour l’épouse de l’intéressé.

e. Ce dernier a fait opposition à la décision du 5 juillet 2021, ce qui a conduit le SPC a rendre une décision sur opposition, en date du 20 septembre 2021, écartant l’opposition de l’intéressé et confirmant la décision du 5 juillet 2021, au motif que l’épouse de l’intéressé était apte au placement et qu’il se justifiait de retenir un gain hypothétique dont la quotité avait été calculée en se fondant sur la jurisprudence en la matière et sur les échelles de salaires publiés par l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après : ESS). La conclusion était la même que celle prise dans la décision du 16 août 2021, à savoir que ce n’était pas en raison de ses problèmes de santé mais en raison de sa passivité que l’épouse de l’intéressé n’avait pas travaillé durant les 20 dernières années, ce qui justifiait la prise en compte d’une capacité de gain hypothétique.

f. Par acte de son avocat daté du 22 octobre 2021, l’intéressé a interjeté recours (numéro de procédure A/3622/2021) contre la décision sur opposition du 20 septembre 2021 en reprenant, en substance, les arguments déjà développés dans le cadre du précédent recours du 21 avril 2021.

g. Par ordonnance du 8 novembre 2021, la chambre de céans a considéré que les deux procédures susmentionnées concernaient les mêmes parties et la même situation de fait, soit la question d’un gain potentiel de l’épouse à retenir dans le calcul des prestations complémentaires de l’intéressé et a joint les deux causes sous numéro de la présente procédure A/1367/2021.

h. Par réplique du 30 novembre 2021, le recourant a sollicité son audition ainsi que celle de son épouse et du Dr G______ et a persisté intégralement dans ses conclusions.

i. Par observations complémentaires du 4 avril 2022, le recourant a transmis à la chambre de céans plusieurs pièces concernant la demande de prestation invalidité de l’épouse et a notamment fait valoir que l’OAI avait mandaté une expertise bi-disciplinaire en rhumatologie et en psychiatrie pour déterminer la capacité de gain de la conjointe.

j. Par courrier du 12 avril 2022, l’intimé a considéré que les pièces médicales n’amenaient aucun élément nouveau si ce n’est d’établir que l’épouse de l’intéressé allait faire l’objet d’une expertise médicale.

k. Par courrier aux parties du 23 juin 2022, la chambre de céans a informé ces dernières qu’elle avait l’intention de suspendre la procédure, selon l’art. 14 LPA, jusqu’à droit connu sur les résultats de l’expertise bi-disciplinaire mandatée par l’OAI.

l. Les parties ne s’y étant pas opposées, la chambre de céans a suspendu la procédure, par arrêt incident du 29 juin 2022, jusqu’à la réception et l’apport du rapport d’expertise bi-disciplinaire demandé par l’OAI et concernant l’épouse du recourant.

m. Par courrier du 4 avril 2023, la chambre de céans a interpellé le recourant sur la transmission de l’expertise bi-disciplinaire de l’OAI.

n. Ce dernier a transmis les documents demandés et notamment le rapport d’expertise bi-disciplinaire ainsi qu’une décision de refus de prestations de l’OAI datée du 31 août 2022. En dépit des conclusions du rapport d’expertise bi-disciplinaire et de la décision négative de l’OAI, le recourant considérait que l’état de santé de son épouse ne lui permettait pas d’intégrer un poste non qualifié, car ce type d’emploi faisait nécessairement appel à la force physique. Dès lors, il persistait dans ses conclusions visant à ce qu’aucune capacité de gain hypothétique ne soit retenue pour son épouse.

o. Par observations du 9 mai 2023, le SPC s’est fondé sur l’expertise médicale bi-disciplinaire et a relevé qu’il n’y avait aucun problème incapacitant sur le plan rhumatologique et que la situation psychiatrique de la conjointe de l’intéressé était sans particularité et n’était pas incapacitante. Rejoignant les conclusions de l’OAI, le SPC constatait que l’épouse de l’intéressé avait toujours été capable de travailler à 100%, ce qui justifiait que le SPC persistât à conclure au rejet des recours.

p. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

q. Les autres faits seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA).

Des modifications législatives et réglementaires sont entrées en vigueur au 1er janvier 2021 dans le cadre de la réforme des PC (LPC, modification du 22 mars 2019, RO 2020 585, FF 2016 7249 ; OPC-AVS/AI [ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 - RS 831.301], modification du 29 janvier 2020, RO 2020 599).

Du point de vue temporel, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire, le droit applicable est déterminé par les règles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits, étant précisé que le juge n'a en principe pas à prendre en considération les modifications du droit postérieures à la date déterminante de la décision administrative litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et les références ; ATF 136 V 24 consid. 4.3 ; ATF 130 V 445 consid. 1 et les références ; ATF 129 V 1 consid. 1.2 et les références).

Dans la mesure où le recours porte sur la capacité de gain de l’épouse du recourant, antérieurement au 1er janvier 2021, le présent litige reste soumis à l'ancien droit, en l'absence de dispositions transitoires prévoyant une application rétroactive du nouveau droit. Les dispositions légales et réglementaires seront donc citées ci-après dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020.

4.             Le délai de recours est de 30 jours (art. 60 al. 1 LPGA ; art. 43 LPCC ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10] et art. 43 LPCC).

Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA ; art. 9 de la loi sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 14 octobre 1965 [LPFC - J 4 20] ; art. 43 LPCC).

5.             L’objet du litige est le bien-fondé de la prise en compte, par l’intimé, d’un gain hypothétique de l’épouse dans le calcul du revenu déterminant du recourant.

6.              

6.1 Les revenus hypothétiques, provenant d'une activité lucrative, fixés schématiquement à l'art. 14a al. 1 OPC-AVS/AI, représentent une présomption juridique. L'assuré peut renverser cette présomption en apportant la preuve qu'il ne lui est pas possible de réaliser de tels revenus ou qu'on ne peut l'exiger de lui (arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2007 du 26 juin 2008 consid. 5.2). Il existe en effet des cas dans lesquels un assuré n'est pas en mesure de mettre en valeur sa capacité de travail résiduelle pour des raisons étrangères à l'invalidité (ATF 117 V 153 consid. 2c).

6.2 Pour examiner la question de savoir si l'assuré peut exercer une activité lucrative et si on est en droit d'attendre de lui qu'il le fasse, il convient de tenir compte conformément au but des prestations complémentaires, de toutes les circonstances objectives et subjectives qui entravent ou compliquent la réalisation d'un tel revenu. Les critères décisifs ont notamment trait à l'âge de la personne, à son état de santé, à ses connaissances linguistiques, à sa formation professionnelle, à l'activité exercée jusqu'ici, au marché de l'emploi, et le cas échéant, au temps plus ou moins long pendant lequel elle aura été éloignée de la vie professionnelle (ATF 117 V 290 consid. 3a ; arrêts du Tribunal fédéral des assurances P/17/01 du 16 juillet 2001 consid. 1c et P 88/01 du 8 octobre 2002 consid. 2.1).

6.3 S’agissant plus particulièrement du critère ayant trait à l'état de santé de l’assuré, il faut rappeler que les organes d'exécution en matière de prestations complémentaires ne disposent pas des connaissances spécialisées pour évaluer l'invalidité d'une personne. C'est notamment pour ce motif qu'ils sont liés par les évaluations de l'invalidité effectuées par les organes de l'assurance-invalidité lorsqu'ils fixent le revenu exigible des assurés partiellement invalides au sens de l'art. 14a OPC-AVS/AI (ATF 117 V 202 consid. 2b). Il n'en demeure pas moins que cette jurisprudence sur la force obligatoire de l'évaluation de l'invalidité par les organes de l'assurance-invalidité ne s'applique qu'à la condition que ceux-ci aient eu à se prononcer sur le cas et que l'intéressé ait été qualifié de personne partiellement invalide par une décision entrée en force. Mais même dans ce cas, les organes d'exécution en matière de prestations complémentaires doivent se prononcer de manière autonome sur l'état de santé de l'intéressé lorsqu'est invoquée une modification intervenue depuis l'entrée en force du prononcé de l'assurance-invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_68/2007 du 14 mars 2008 consid. 5.3).

6.4 La chambre de céans a estimé que, dans l’hypothèse où une demande de révision était en cours d’instruction auprès de l’OAI, en raison de l’allégation d’une aggravation de l’état de santé du bénéficiaire de prestations, il n’appartenait pas au SPC de se substituer à l’OAI et d’effectuer les investigations relatives à son état de santé. Le cas échéant, le SPC modifierait ses décisions en fonction des résultats de l’instruction diligentée par les organes de l’OAI (ATAS/976/2013 ; ATAS/1072/2011 ; ATAS/1014/2010).

7. Selon les directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI (ci-après : DPC – valables dès le 1er janvier 2011), l'art. 14a OPC-AVS/AI établit une présomption légale aux termes de laquelle les assurés partiellement invalides sont foncièrement en mesure d’obtenir les montants limites prévus. Cette présomption peut être renversée par l’assuré s’il établit que des facteurs objectifs ou subjectifs, étrangers à l’AI, lui interdisent ou compliquent la réalisation du revenu en question (DPC n° 3424.06).

Néanmoins, en dépit de cette présomption, aucun revenu hypothétique n’est pris en compte chez le bénéficiaire de prestations complémentaires à l’une ou l’autre des conditions suivantes :

- si, malgré tous ses efforts, sa bonne volonté et les démarches entreprises, l’assuré ne trouve aucun emploi ; cette hypothèse peut être considérée comme réalisée lorsqu’il s’est adressé à un office régional de placement et prouve que ses recherches d’emploi sont suffisantes qualitativement et quantitativement ;

- lorsqu’il touche des allocations de chômage ;

- s’il est établi que, sans la présence continue de l’assuré à ses côtés, l’autre conjoint devrait être placé dans un home ou un établissement hospitalier ;

- si l’assuré a atteint sa 60e année (DPC n° 3424.07).

En l’occurrence, selon la teneur des pièces du dossier et des informations fournies par les parties, il apparaît qu’aucune des quatre conditions rappelées supra n’est réalisée par l’épouse du recourant.

8.             La procédure est régie par le principe inquisitoire, d'après lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Celui-ci comprend en particulier l'obligation de ces dernières d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 ; VSI 1994, p. 220 consid. 4). Car si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve. En cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en supporter les conséquences (ATF 117 V 261 consid. 3), sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut être imputée à l'adverse partie (ATF 124 V 372 consid. 3 ; RAMA 1999 n° U 344 p. 418 consid. 3).

9.              

9.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

9.2 Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 469 consid. 4a ; ATF 122 III 223 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) (SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 94 consid. 4b ; ATF 122 V 162 consid. 1d).

10.         En l’espèce, le recourant fait grief à l’intimé d’avoir pris en compte, dans le calcul des prestations complémentaires, un gain hypothétique pour son épouse, sans avoir tenu compte de sa santé, de sa situation personnelle et des éléments extra médicaux.

L’intimé, de son côté, considère qu’il n’est pas établi que des troubles de la santé diminuent la capacité de travail de l’épouse de l’intéressé et que c’est en raison de sa passivité que cette dernière n’exerce pas d’activité professionnelle.

10.1 Dans le cadre de sa demande de prestations invalidité, l’OAI a considéré que l’épouse de l’intéressé ne présentait pas d’atteinte à la santé invalidante au sens de la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - 831.20). Dans un premier temps, la conjointe a recouru contre cette décision avant de se raviser et de retirer son recours, en date du 27 février 2023.

La décision de l’OAI se fonde, notamment, sur l’expertise bi-disciplinaire rhumatologique et psychiatrique du 8 juin 2022.

10.2 Sur le plan rhumatologique, l’expert, en substance, a diagnostiqué un syndrome de déconditionnement global avec dysbalance musculaire, ce qui ne provoquait aucun problème incapacitant au sens médico-théorique dans une activité adaptée. À l’examen somatique, les plaintes rapportées par l’expertisée n’étaient pas retrouvées à l’exception d’une tendinopathie de l’épaule gauche qui justifiait un traitement par voie d’infiltration, laissé au choix du rhumatologue. Par ailleurs, il n’était pas retrouvé de tableau de lombosciatalgies gauche invalidantes tel que décrit par le médecin traitant rhumatologue de l’expertisée. L’expert concluait que l’expertisée n’était pas limitée dans les domaines de la vie courante car elle vaquait à ses occupations, s’occupait de son ménage, passait la serpillière et l’aspirateur, était aidée par ses filles pour les tâches lourdes et les courses étaient faites par son mari. Elle pouvait, dans une activité adaptée, travailler 8h30 par jour en tenant compte du fait que la performance serait réduite de 20% pendant trois mois, compte tenu du fait qu’elle n’avait jamais exercé d’activité professionnelle et qu’il lui faudrait ce temps d’adaptation en raison du déconditionnement physique. Après trois mois, sa capacité de travail serait de 100%.

10.3 Sur le plan psychique, l’expert a relevé, en substance, que la capacité de travail était entière depuis toujours car il n’existait pas de psychopathologie incapacitante dans cette situation. Il a mentionné les ressources dont bénéficiait l’expertisée, concluant que cette dernière « détenait » un environnement social fonctionnel et soutenant, qu’elle était flexible et capable d’adaptation, pouvant adapter son comportement, sa réflexion et son vécu à des situations changeantes. Parmi les difficultés auxquelles elle devait faire face, il était mentionné qu’elle ne savait pas faire usage de compétences spécifiques et qu’elle n’avait pas de formation professionnelle particulière.

10.4 S’agissant des appréciations médicales des médecins traitants, la rhumatologue, la docteure H______, spécialiste FMH en rhumatologie et médecine interne générale, a fait part de son étonnement de la conclusion de l’expertise dans son courrier du 8 décembre 2022 en alléguant que l’expertisée souffrait de longue date de lombosciatalgies qui l’empêchaient de se mouvoir et de vaquer à ses occupations quotidiennes. S’y ajoutaient des douleurs au niveau de son épaule gauche en raison d’une tendinopathie ; elle concluait qu’elle ne l’imaginait pas pouvoir travailler alors qu’elle n’arrivait même pas à s’occuper de ses tâches quotidiennes.

Le nouveau médecin traitant psychiatre de l’expertisée, le docteur I______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, s’est exprimé dans un courrier du 2 février 2023, mentionnant que la vie sociale de l’expertisée n’avait jamais été investie, qu’elle était femme au foyer et accomplissait les tâches ménagères, tout en menant une vie centrée sur sa famille. S’agissant du rapport d’expertise de l’OAI, le médecin traitant ne retenait aucun diagnostic à caractère incapacitant et convergeait avec les conclusions de l’expert psychiatre. Il mentionnait que la patiente et son mari l’avaient plusieurs fois sollicité pour appuyer leur demande de prestations invalidité et qu'il leur avait, à chaque fois, exprimé ses réserves quant aux critères pour l’octroi d’une rente invalidité, tout en clarifiant sa position. Il leur avait également proposé de consulter un autre spécialiste pour avoir un second avis.

Au vu de ces éléments, et en tenant compte du fait que l’épouse du recourant a, dans un premier temps, contesté la décision de l’OAI avant de se raviser et de retirer son recours, on peut présumer que cette dernière était consciente de la faiblesse de son argumentation.

La chambre de céans ne voit aucune raison de s’écarter de la décision de l’OAI et des conclusions des experts mandatés par cet office, au seul motif que le rhumatologue de l’expertisée ne partage pas les conclusions de l’expert en rhumatologie.

On rappellera qu’en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a ; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

10.5 La chambre de céans ne décèle aucune contradiction dans le rapport d’expertise pouvant mettre en doute sa valeur probante ; de même, elle relève que le médecin traitant psychiatre partage les conclusions de son confrère mandaté par l’OAI et qu’en ce qui concerne le médecin traitant rhumatologue, il ne soulève pas d’élément objectif et vérifiable permettant d’avoir un doute sur les conclusions de son confrère expert. Dès lors, son appréciation différente ne remet pas en question les conclusions des experts et il sied de constater qu’il est établi, au degré de la vraisemblance prépondérante, que l’épouse du recourant dispose d’une capacité de travail entière sur le plan de la santé.

10.6 S’agissant des autres points soulevés par le recourant pour mettre en doute la prise en compte d’un gain hypothétique, ce dernier mentionne que son épouse est âgée de 55 ans et ne parle pas le français, pas plus qu’elle n’avait de formation professionnelle, et qu’elle n’a jamais travaillé.

Préalablement, il sied de relever que ces éléments n’ont aucun rapport avec des troubles de la santé et doivent être considérés comme des éléments psychosociaux.

Dans un arrêt du Tribunal fédéral 5A_104/2018 du 2 février 2021, rendu en matière de contribution d’entretien dans le cadre d’une demande de divorce, les juges de Mon-Repos ont considéré que c’était la propre capacité contributive des conjoints qui devait primer et qu’il y avait une incombance de s’insérer ou de se réinsérer dans le marché du travail, respectivement d’augmenter le taux d’une activité déjà exercée. On était, ainsi, en droit d’exiger de chacun des conjoints qu’il épuise totalement sa capacité de gain, soit une activité exercée à 100%, le cas échéant en retenant un revenu hypothétique, et on ne pouvait s’écarter de ce principe que lorsque l’époux devait s’occuper de ses enfants. Avec ce nouveau modèle, le Tribunal fédéral tenait compte de l’évolution de la société et du fait que désormais, chaque parent était, à tout le moins, partiellement, capable de travailler, que ce soit dans le cadre d’un ménage commun ou d’un ménage séparé. L’offre permanente de formation continue permettait d’optimiser ses opportunités personnelles sur le marché du travail, ce qui était devenu monnaie courante. Ainsi, il se justifiait de renoncer formellement à la « règle des 45 ans » car même si l’âge était souvent un facteur décisif dans le cas de l’examen de la capacité à trouver un emploi sur le marché du travail, il n’était désormais plus un critère indépendant des autres et n’entraînait pas une présomption en faveur ou contre la prise ou la reprise d’un emploi.

En l’état, le recourant se contente d’alléguer des généralités sans démontrer ni même rendre vraisemblable que son épouse a vainement cherché à trouver du travail, ce qui lui aurait été refusé, notamment pour des raisons d’âge ou de compétence professionnelle.

Or, en cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en supporter les conséquences (ATF 117 V 261 consid. 3). Le recourant a échoué à démontrer que son épouse était incapable, pour des raisons de santé, de travailler, pas plus qu’il n’a pu démontrer qu’elle avait vainement cherché un emploi et qu’elle n’en avait pas trouvé en raison de son âge et/ou de son manque de maîtrise de la langue française et/ou de son défaut de formation professionnelle.

Le recourant critique le principe de la prise en compte d’un revenu hypothétique mais ne remet pas en cause la quotité de ce dernier. À cet égard, on rappellera qu’il est admissible de se fonder sur les tableaux ESS pour calculer un éventuel gain hypothétique.

10.7 Partant, le grief du recourant concernant le rejet du principe de la prise en compte d’un gain hypothétique de son épouse doit être écarté.

10.8 S’agissant de la demande d’audition du recourant, de sa conjointe et des médecins traitants, afin de démontrer l’incapacité de travail, il convient de rappeler qu’en raison du lien familial étroit qui lie l’intéressé à son épouse, cette dernière ne pourrait être entendue qu’à titre de renseignements selon l’art. 31 let. a et f LPA avec la « distance nécessaire » découlant du lien entre l’intéressé et la personne entendue (Code annoté de procédure administrative genevoise, Stéphane GRODECKI et Romain JORDAN, Berne, 2017, ad. art. 31, N. 446).

En se fondant sur une appréciation anticipée des preuves, la chambre de céans considère qu’il n’est pas nécessaire d’y donner suite (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a ; ATF 122 III 219 consid. 3c), pas plus qu’il n’est nécessaire d’entendre les médecins traitants, qui se sont déjà déterminés par écrit et dont l’appréciation est connue de la chambre de céans. Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 Cst. ; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; ATF 122 V 157 consid. 1d).

À l’aune de ce qui précède, la chambre de céans considère qu’il est établi, au degré de la vraisemblance prépondérante, que le SPC était en droit de considérer que l’épouse du recourant dispose d’une capacité de travail et de tenir compte d’un gain hypothétique de la conjointe dans le cadre du calcul des prestations complémentaires.

10.9 Partant, la décision du SPC ne prête pas le flanc à la critique et le recours doit être rejeté.

11. Pour le surplus, en l’absence de loi spéciale prévoyant des frais judiciaires, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA en lien avec l’art. 1 al. 1 de la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 [loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0]).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le