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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3669/2022

ATAS/236/2023 du 03.04.2023 ( LPP ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3669/2022 ATAS/236/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 3 avril 2023

6ème Chambre

 

En la cause

HELVETIA FONDATION COLLECTIVE DE PREVOYANCE DU PERSONNEL, sise St. Alban-Anlage 26, BÂLE

 

 

demanderesse

 

contre

A______, sise à GENÈVE

 

 

défenderesse

 


EN FAIT

 

A. a. La société anonyme A______ (ci-après: la société) a été inscrite au registre du commerce de Genève (ci-après : RC) le 30 janvier 2006, avec siège à Genève, et ayant pour but social la gestion administrative, financière et religieuse d'A______.

b. Par convention d’affiliation, signée respectivement en date du 13 avril 2017, pour la signature de la société, et du 11 mai 2017, pour la signature des organes de HELVETIA FONDATION COLLECTIVE DE PREVOYANCE DU PERSONNEL (ci-après : HELVETIA), l'employeur s'est affilié pour assurer la prévoyance professionnelle de l'ensemble du personnel de la société, à partir du 1er septembre 2016.

c. La société a résilié le contrat de prévoyance avec HELVETIA au 31 décembre 2021.

B. a. HELVETIA a envoyé à la société plusieurs sommations, en incluant CHF 300.- de frais de gestion supplémentaires et indiquant que le taux des intérêts moratoires était de 5% :

-          Le 9 avril 2019 une sommation pour le paiement de CHF 73'498.15 de cotisations impayées au 8 avril 2019 ;

-          Le 10 novembre 2020 une sommation pour un solde de CHF 60'762.70 de cotisations impayées au 9 novembre 2020 ;

-          Le 23 février 2021, une sommation pour le paiement de CHF 65'587.95 en raison de cotisations impayées au 22 février 2021 ;

-          Le 7 avril 2021, une sommation pour le paiement de CHF 5'587.95 de cotisations impayées au 5 avril 2021 ;

-          Le 7 septembre 2021, une sommation pour le paiement de CHF 22'731.40 d'arriérés de cotisations au 6 juin 2021 ;

-          Le 12 avril 2022, une sommation pour le paiement de CHF 129'220.45 de cotisations impayées au 11 avril 2022.

b. Le 24 mai 2022, HELVETIA a adressé à la société une sommation de payer CHF 131'151.55 à titre d'arriérés de cotisations dues au 23 mai 2022, incluant des frais de rappels et des frais administratifs. Le taux des intérêts moratoires était de 5%. Un délai de 14 jours était imparti pour s'exécuter.

c. Le 20 juin 2022, HELVETIA a notifié à la société un commandement de payer, poursuite n° 22 213550 L, auquel la société a fait opposition, pour le montant de CHF 131'151.55, avec des intérêts à 5% dès le 2 juin 2022. Des intérêts de CHF 2'899.35, des frais de sommations/administratifs de CHF 500.- et des frais de commandement de payer de CHF 190.- s'y ajoutaient.

d. Le 31 août 2022, HELVETIA a communiqué à la société un extrait de compte du 1er janvier 2020 au 31 août 2022, mentionnant un report de solde au 1er janvier 2020 de CHF 65'586.30 et un solde de CHF 131'854.85 à charge de la société au 31 août 2022.

C. a. Par acte du 4 novembre 2022, HELVETIA a saisi la chambre de céans d’une demande en paiement dirigée contre la société, tendant à sa condamnation au paiement de la somme de CHF 131'151.55, augmentée d'intérêts de CHF 2'899.35, d'intérêts à 5% sur la créance en capital à partir du 2 juillet 2021, d'une « indemnité de procédés » de CHF 500.- et de frais d'établissement d'un commandement de payer de CHF 190.-. La demanderesse a également demandé qu’il soit prononcé la mainlevée définitive, dans la poursuite n° 22 213550 L, à concurrence de la créance précitée, hormis les frais du commandement de payer, sous suite de frais et dépens. Selon son règlement, elle pouvait réclamer CHF 500.- à titre de frais pour avoir entamé une poursuite. S’agissant des intérêts à 5%, ils étaient également convenus contractuellement sous ch. 5.4 du contrat d’affiliation.

b. La défenderesse n'a pas répondu à la demande dans le délai imparti au 6 décembre 2022, et prolongé au 9 janvier 2023.

c. Sollicitée par la chambre de céans, la demanderesse a précisé que les intérêts moratoires se fondaient sur le ch. 5.4 du contrat d'affiliation. La date du 2 juillet 2021, date à laquelle les intérêts moratoires à hauteur de 5% commençaient à courir, correspondait à la date de résiliation du contrat d'adhésion par la défenderesse. Quant aux intérêts à hauteur de CHF 2'899.35 mentionnés dans le commandement de payer, il s'agissait des intérêts qui avaient été accumulés jusqu'à la mise en poursuite. En effet, le ch. 5.4 du règlement d'affiliation dérogeait à l'interdiction de porter en compte des intérêts pour cause de retard dans le paiement des intérêts moratoires. Par ailleurs, dès lors que la défenderesse ne s'était jamais exprimée sur la plainte, elle requérait, conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, des exigences modérées quant à la justification de la créance.

d. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce, ainsi qu’aux prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e du Code des obligations [CO - RS 220]; art. 52, 56a, al. 1, et art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 [LPP - RS 831.40] ; art. 142a du Code civil [CC - RS 210]).

1.2 Aux termes de l'art. 73 LPP, chaque canton désigne un tribunal qui connaît, en dernière instance cantonale, des contestations opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit (al. 1, 1ère phrase). Le for de l'action est au siège ou domicile suisse du défendeur ou au lieu de l'exploitation dans lequel l'assuré a été engagé (al. 3).

1.3 En l’espèce, la présente cause oppose une institution de prévoyance professionnelle à une employeuse, dont le siège se situe dans le canton de Genève, en lien avec les cotisations dues par cette dernière.

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             L’ouverture de l’action prévue à l’art. 73 al. 1 LPP n’est soumise, comme telle, à l’observation d’aucun délai (ATAS/929/2017 du 18 octobre 2017 consid. 2 et les références citées).

La demande respecte en outre la forme prévue à l’art. 89B al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA – E 5 10) qui régit la procédure en matière de prévoyance professionnelle à Genève. Partant, elle est recevable.

3.              

3.1 En matière de prévoyance professionnelle, le juge saisi d'une action doit se prononcer sur l'existence ou l'étendue d'un droit ou d'une obligation dont une partie prétend être titulaire contre l'autre partie (arrêt du Tribunal fédéral des assurances B.91/05 du 17 janvier 2007 consid. 2.1).

L'objet du litige devant la juridiction cantonale est déterminé par les conclusions de la demande introduite (arrêt du Tribunal fédéral des assurances B 72/04 du 31 janvier 2006 consid. 1.1). C'est ainsi la partie qui déclenche l'ouverture de la procédure qui détermine l'objet du litige (maxime de disposition). L'état de fait doit être établi d'office selon l'art. 73 al. 2 LPP seulement dans le cadre de l'objet du litige déterminé par la partie demanderesse. La maxime inquisitoire ne permet pas d'étendre l'objet du litige à des questions qui ne sont pas invoquées (ATF 129 V 450 consid. 3.2).

Le juge n'est toutefois pas lié par les conclusions des parties ; il peut ainsi adjuger plus ou moins que demandé à condition de respecter leur droit d'être entendu (arrêt du Tribunal fédéral des assurances B.59/03 du 30 décembre 2003 consid. 4.1).

3.2 Le litige porte sur le bien-fondé de la requête de la demanderesse, par laquelle cette dernière réclame le paiement de CHF 131'151.55 concernant des cotisations impayées, de CHF 2'899.35 d'intérêts, de 5% d'intérêts sur la créance en capital à partir du 2 juillet 2021, de CHF 500.- d'indemnité de procédure, de CHF 190.- de frais de poursuite, ainsi que la levée définitive de l’opposition à la poursuite n° 22 213550 L dans cette proportion (à l'exception des frais du commandement de payer décomptés préalablement des paiements de la défenderesse).

4.              

4.1 La LPP institue un régime d’assurance obligatoire des salariés (art. 2 al. 1 LPP).

Selon l’art. 11 al. 1 LPP, tout employeur occupant des salariés soumis à l’assurance obligatoire doit être affilié à une institution de prévoyance inscrite dans le registre de la prévoyance professionnelle.

La convention dite d’affiliation (« Anschlussvertrag ») d’un employeur à une fondation collective ou à une fondation commune est un contrat sui generis fondé sur l’art. 11 LPP (ATF 120 V 299 consid. 4a et les références), pour la conclusion duquel il y a lieu d'appliquer les règles du droit des obligations (ATF 129 III 476 consid. 1.4 et les références). L’employeur affilié à une institution de prévoyance par un tel contrat est tenu de verser à celle-ci les cotisations qu’elle fixe dans ses dispositions réglementaires (art. 66 al. 1 phr. 1 LPP).

Conformément à l’art. 66 al. 2 LPP, l’employeur est le débiteur de la totalité des cotisations envers l’institution de prévoyance.

4.2 Selon l'art. 4 LPP, les salariés et les indépendants qui ne sont pas soumis à l'assurance obligatoire peuvent se faire assurer à titre facultatif conformément à la présente loi (al. 1). L'art. 44 al. 1 LPP prévoit que les indépendants peuvent se faire assurer auprès de l’institution de prévoyance qui assure leurs salariés ou dont ils relèvent à raison de leur profession.

4.3 En l’espèce, selon le contrat d’affiliation liant les parties, la défenderesse s’est engagée à verser les contributions facturées par la demanderesse. Les obligations de la défenderesse relativement au « paiement des cotisations/échéance » sont précisées au chapitre 5 (ch. 5.1 à 5.7) des conditions de la convention. En particulier, à teneur du ch. 5.1 in initio, « l'employeur s'engage à verser les contributions facturées par [la demanderesse] à la Fondation ». Selon le ch. 5.4, « tout solde en faveur de la Fondation à la fin d'une année, ainsi que les intérêts débiteurs, sont reportés à l'année civile suivante à titre de créance en capital. Tout solde en faveur de l'entreprise affiliée, y compris les intérêts éventuels créditeurs sont comptabilisés à titre de paiement d'acompte pour les contributions de l'année suivante » (al. 3). « Pour la fin de l'année civile, la Fondation établit un relevé du compte d'encaissement. Le solde indiqué sur ce relevé sera considéré comme approuvé dans la mesure où l'entreprise affiliée ne le conteste pas par écrit dans un délai de 4 semaines après réception du relevé » (al. 4).

 

 

5.              

5.1 Selon l’art. 22 LPA, les parties sont tenues de collaborer à la constatation des faits dans les procédures qu’elles introduisent elles-mêmes, dans celles où elles y prennent des conclusions indépendantes ainsi que dans les autres cas prévus par la loi. Cette réglementation cantonale est conforme aux exigences posées à l’art. 61 LPGA (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 453/04 du 21 juillet 2005 consid. 2.2.3).

5.2 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n'entrent raisonnablement en considération (ATF 139 V 176 consid. 5.3 et les références). Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b ; 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

5.3 En matière de prévoyance professionnelle, la maxime inquisitoire est applicable. Elle ne dispense toutefois pas les parties de leur obligation de collaborer et en conséquence d’apporter à la procédure, dans la mesure où cela apparait raisonnablement exigible, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués (ATF 139 V 176 consid. 5.2 ; ATF 138 V 86 consid. 5.2.3 ; voir également en ce qui concerne l’art. 43 LPGA : ATF 145 V 90 consid. 3.2). En outre, la maxime inquisitoire ne libère pas les parties du principe du fardeau de la preuve ; autrement dit, en cas d'absence de preuve d’un fait, c'est à la partie qui en a le fardeau d'en supporter les conséquences, sauf si l'impossibilité de prouver ce fait peut être imputée à la partie adverse (ATF 139 V 176 consid. 5.2 ; ATF 117 V 261 consid. 3b ; ATF 115 V 133 consid. 8a).

Dans cette optique, il est possible de s’inspirer du principe général consacré à l’art. 8 CC selon lequel chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit (en ce sens : ATF 146 V 51 consid. 5.1 ; ATF 145 V 90 consid. 3.2 ; ATF 115 V 133 consid. 8a ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_412/2011 du 30 avril 2012 consid. 3.2). En conséquence, la partie qui fait valoir un droit doit prouver les faits fondant ce dernier, tandis que le fardeau de la preuve relatif aux faits supprimant le droit, respectivement l'empêchant, incombe à la partie qui affirme la perte du droit ou qui conteste son existence ou son étendue (ATF 141 III 241 consid. 3 ; ATF 139 III 13 consid. 3.1.3.1 ; ATF 139 III 7 consid. 2.2). Après l'échange d'écritures, il incombe ensuite au juge d'établir spontanément les faits pertinents ou déterminants pour assurer une application correcte de la loi, les parties ayant le devoir de collaborer à la constatation des faits (arrêt du Tribunal fédéral des assurances B.59/03 précité consid. 4.1).

6.             En l’occurrence, dans son extrait de compte du 1er janvier 2020 au 31 août 2022, la demanderesse a récapitulé l’ensemble des mouvements de débit et de crédit, mentionnant les factures pour les contributions sociales, les frais de rappels, les frais administratifs, les frais de réquisition de poursuite ainsi que les intérêts.

Le total des montants dus par la défenderesse à la demanderesse ressort de l’extrait de compte susmentionné ; la chambre de céans considère que ce document présente un degré de vraisemblance prépondérante et le montant réclamé, soit CHF 131'151.55, doit être admis.

La défenderesse s’est engagée à payer les cotisations sociales facturées par la demanderesse et n’a jamais fait valoir aucun motif justifiant qu’elle se soustraie au paiement, pas plus qu’elle n’a contesté les montants qui lui étaient réclamés par la demanderesse. Elle a, plusieurs fois, tardé à régler le montant des cotisations réclamées. La demanderesse a établi, par extrait de compte, les versements de la défenderesse et le montant de sa créance envers celle-ci, jusqu’au crédit du 31 août 2022. Or, la défenderesse n'a pas répondu à la demande dans le cadre de la présente procédure, de sorte qu'il convient d'admettre qu'elle ne conteste pas les montants réclamés.

7.              

7.1 La perception de frais administratifs, notamment à charge de l'employeur est possible pour autant qu’elle figure dans un règlement (ATF 124 II 570 consid. 2 ; ATF 124 II 570 consid. 2 et 3 ; cf. aussi les arrêts du Tribunal fédéral B 44/00 du 19 mars 2001 et 9C_687/2017 du 2 février 2018).

7.2 En l’occurrence, aux termes du ch. 2.1 des conditions de la convention, « les droits et les devoirs respectifs des parties contractantes ressortent des dispositions de la présente convention d'affiliation, ainsi que de celles du règlement pour frais, de gestion, de l'acte de fondation, du règlement électoral et du règlement d'organisation ». De même qu'à son ch. 2.2, le contrat d’affiliation stipule que le document de conclusion et le règlement pour les frais de gestion font partie intégrante de la convention d'affiliation.

Le règlement pour frais de gestion prévoit sous le ch. 2.1 « Frais pour travaux administratifs spéciaux » des frais de CHF 300.- pour une sommation par lettre signature en rapport avec le paiement des cotisations arriérées encore dues et de CHF 500.- pour une réquisition de poursuite (non compris les frais officiels).

Compte tenu de ce qui précède, la chambre de céans constate que le règlement pour frais de gestion autorise la demanderesse à réclamer des frais administratifs compris dans le montant de la créance ainsi que le paiement, non seulement des primes échues, mais également des frais pour une réquisition de poursuite, soit en l'occurrence CHF 500.-.

8.              

8.1 L'intérêt conventionnel est la dette d'intérêt stipulée contractuellement à la charge du débiteur d'une somme d'argent indépendamment de sa demeure. L'emprunteur d'une somme d'argent est généralement tenu de verser des intérêts en rémunération de la jouissance de cette somme alors même qu'il n'est pas en demeure de la restituer (ATAS/1055/2021 du 13 octobre 2021 consid. 5.b. ; Luc THÉVENOZ, in Commentaire romand, Code des obligations I, 2021, n. 3 ad art. 104 CO).

8.2 La convention d’affiliation mentionne à son ch. 5.4 la possibilité que des intérêts débiteurs soient facturés pour des paiements effectués avec retard, sans procédure de recouvrement.

Toutefois, la demanderesse sollicite des intérêts de retard de CHF 2'899.35 calculés sur la période du 1er janvier au 2 juin 2022. Or, une fois le contrat résilié pour le 31 décembre 2021, les dispositions contractuelles, dont le ch. 5.4 de la convention d’affiliation qui prévoit que tous les comptes portent intérêts et que ces derniers sont crédités à la fin de l’année d’assurance, ne pouvaient plus s'appliquer. La demanderesse ne pouvait donc pas ajouter à la dette de cotisations les intérêts calculés sur ce montant au 2 juin 2022, dès lors que les intérêts conventionnels n'étaient plus exigibles suite à la résiliation des rapports d'assurance au 31 décembre 2021 (en ce sens : ATAS/1055/2021 précité).

9.              

9.1 Conformément à l’art. 66 al. 2 LPP, l’institution de prévoyance peut majorer d’un intérêt moratoire les cotisations payées tardivement.

9.1.1 Le débiteur qui est en demeure pour le paiement d'une somme d'argent doit l'intérêt moratoire à 5% l'an, même si un taux inférieur avait été fixé pour l’intérêt conventionnel (art. 104 al. 1 et 2 CO ; ATF 130 V 414 consid. 5.1 ; ATF 127 V 377 consid. 5e/bb et les références).

Aux termes de l'art. 102 al. 1 CO, le débiteur d'une obligation exigible est mis en demeure par l'interpellation du créancier. Lorsque le jour de l'exécution a été déterminé d'un commun accord, ou fixé par l'une des parties en vertu d'un droit à elle réservé et au moyen d'un avertissement régulier, le débiteur est mis en demeure par la seule expiration de ce jour (art. 102 al. 2 CO).

9.1.2 L'art. 105 al. 3 CO interdit la composition (anatocisme) de l'intérêt moratoire. Les parties peuvent cependant convenir d'ajouter un intérêt moratoire échu au capital et faire courir un intérêt sur le tout : il s'agit en principe d'une novation. Celle-ci peut être convenue d'avance, notamment par une convention de compte courant (art. 117 CO ; Luc THÉVENOZ, op. cit., n. 6 et 7 ad art. 105 CO, et les références ; aussi ATAS/1055/2021 précité consid. 5c).

9.2 En l'occurrence, la demanderesse réclame des intérêts moratoires de 5% l'an sur la créance en capital dès le 2 juillet 2021.

9.2.1 Selon le ch.5.4 de la convention d'affiliation, « tout solde en faveur de la Fondation à la fin d'une année, ainsi que les intérêts débiteurs, sont reportés à l'année civile suivante à titre de créance en capital. [ ] Le solde indiqué sur ce relevé sera considéré comme approuvé dans la mesure où l'entreprise affiliée ne le conteste pas par écrit dans un délai de 4 semaines après réception du relevé » (al. 3 et 4).

9.2.2 Des intérêts calculés au taux de 5% sont admissibles au regard de l'art. 104 CO.

La date du 2 juillet 2021 correspondrait, selon la demanderesse, à la date de résiliation du contrat par la défenderesse. Or, on ne saurait considérer que la seule résiliation du rapport contractuel fait courir des intérêts moratoires (en ce sens : ATAS/1055/2021 précité). Au contraire, une interpellation précisant la somme encore due était indispensable. La demanderesse a formellement interpellé la défenderesse le 24 mai 2022, en lui fixant un délai de 14 jours pour s'exécuter. Partant, il y a lieu de considérer que le solde de la créance, qui a fait l’objet d’une sommation, portera intérêt à partir du 9 juin 2022, soit le lendemain du dernier jour fixé à la défenderesse pour s'acquitter du solde dû, selon le courrier du 24 mai 2022.

Les intérêts pour retard compris dans le montant de la créance en capital, et arrêtés au 31 décembre 2021, peuvent ainsi faire l'objet d'intérêts moratoires.

10.         En ce qui concerne les frais de poursuite de CHF 190.-, ils sont d'office supportés par le débiteur lorsque la poursuite aboutit (art. 68 al. 1 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite [LP - RS 281.1]).

11.         Le montant total s’élève ainsi à CHF 131'151.55 (capital) + CHF 500 (frais de sommations) + CHF 190.- (frais de poursuite), soit au total CHF 131'841.55.

La défenderesse sera condamnée à payer le montant de CHF 131'841.55 réclamé par la demanderesse, avec un intérêt moratoire de 5% l'an dès le 9 juin 2022.

12.          

12.1 Reste à examiner la conclusion de la demanderesse tendant l'obtention de la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 22 213550 L.

12.1.1 Les décisions des autorités administratives fédérales portant condamnation à payer une somme d'argent sont exécutées par la voie de la poursuite pour dettes et sont, une fois passées en force, assimilées à des jugements exécutoires au sens de l'art. 80 al. 2 ch. 2 LP (Pierre-Robert GILLIÉRON, Commentaire de la LP, 1999 p. 1226 ch. 45).

Il en est de même des décisions passées en force des autorités administratives cantonales de dernière instance qui statuent, dans l'accomplissement de tâches de droit public à elles confiées par la Confédération, en application du droit fédéral, mais qui ne statuent pas définitivement en vertu du droit fédéral - autrement dit, dont les décisions sont susceptibles d'un recours administratif auprès d'une autorité fédérale ou d'un recours de droit administratif (GILLIÉRON, op. cit., p. 1227 ; Carl JEAGER, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, 1999 p. 621). Par autorités administratives fédérales, et par extension autorités administratives cantonales de dernière instance, il faut entendre les tribunaux fédéraux et les autres autorités ou organisations indépendantes de l'administration fédérale en tant qu'elles statuent dans l'accomplissement de tâches de droit public à elles confiées par la Confédération (art. 1 al. 2 let. b et e de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 ; PA - RS 172.021).

La chambre des assurances sociales statuant en dernière instance cantonale et dans l'accomplissement de tâches de droit public peut, selon ce qui précède, prononcer la mainlevée définitive d'une opposition à un commandement de payer puisque, statuant au fond, la condamnation au paiement est assimilée à un jugement exécutoire. Cette solution est d'ailleurs la conséquence du fait que, dans les matières qui sont de son ressort, le juge des assurances est effectivement le juge ordinaire selon l'art. 79 LP et qu'il a qualité pour lever une opposition à la poursuite en statuant sur le fond (ATF 109 V 46 consid. 4).

12.1.2 À teneur de l'art. 88 al. 2 LP, le droit du créancier de requérir la continuation de la poursuite se périme par un an à compter de la notification du commandement de payer (1ère phrase) ; si opposition a été formée, ce délai ne court pas entre l'introduction de la procédure judiciaire ou administrative et le jugement définitif (2ème phrase).

12.2 En l’occurrence, le commandement de payer a été notifié à la défenderesse le 20 juin 2022, date à partir de laquelle le délai de péremption d’un an a commencé à courir (ATF 125 III 45 consid. 3b). Par conséquent, la poursuite n’était pas périmée lorsque la demanderesse a saisi la chambre de céans, le 4 novembre 2022.

En outre, la défenderesse n’a soulevé aucune exception énumérée à l’art. 81 LP (extinction de la dette, obtention d’un sursis ou de la prescription) et n’a réagi, ni aux mises en demeure de la demanderesse, ni aux courriers de la chambre de céans.

La mainlevée définitive de l’opposition au commandement de payer sera ainsi prononcée, dans la poursuite n° 22 213550 L, à concurrence du montant de CHF 131'841.55 avec un intérêt moratoire de 5% l'an dès le 9 juin 2022.

13.         Par ailleurs, aucune indemnité de dépens ne sera accordée à la demanderesse dans la mesure où les caisses de pension n’ont en principe pas droit à des dépens (ATF 126 V 143 consid. 4a) et que la demanderesse n’est pas représentée par un avocat.

14.         Au vu de ce qui précède, la demande en paiement du 4 novembre 2022 est admise et la défenderesse condamnée à verser à la demanderesse la somme de CHF 131'151.55 avec intérêts à 5% l'an dès le 9 juin 2022, augmentée des frais de poursuite de CHF 190.- ainsi que des frais administratifs de CHF 500.-.

La mainlevée définitive de l’opposition faite au commandement de payer dans la poursuite n° 22 213550 L à concurrence de CHF 131'841.55 avec intérêts à 5% dès le 9 juin 2022, est prononcée.

Pour le reste, la procédure est gratuite (art. 89H al. 1 LPA).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare la demande recevable.

Au fond :

2.      L'admet partiellement.

3.      Condamne la défenderesse à payer à la demanderesse les sommes suivantes :

-          CHF 131'151.55 avec intérêts à 5% dès le 9 juin 2022 ;

-          CHF 190.- de frais de poursuite ;

-          CHF 500.- correspondant aux frais administratifs.

4.      Prononce la mainlevée définitive de l’opposition faite au commandement de payer dans la poursuite n° 22 213550 L, à concurrence de CHF 131'841.55 avec intérêts à 5% dès le 9 juin 2022.

5.      Dit que la procédure est gratuite.

6.      Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le