Skip to main content

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3397/2021

ATAS/1163/2022 du 22.12.2022 ( PC ) , AUTRE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3397/2021 ATAS/1163/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 22 décembre 2022

5ème Chambre

En la cause

Monsieur A______, domicilié c/o Monsieur B______, à Genève, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Michael RUDERMANN

 

 

recourant

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'intéressé ou le recourant), né en ______ 1964, a été mis au bénéfice d'une demi-rente d'invalidité à compter du 1er septembre 2019.

b. Par jugement du 8 mai 2019, le Tribunal de première instance du canton de Genève a, entre autres, prononcé le divorce de l'intéressé et de son épouse, condamné cette dernière à payer CHF 146'570.- à l'intéressé au titre de la liquidation du régime matrimonial, dit que, moyennant paiement de ce montant, le régime matrimonial des parties était liquidé et qu'elles n'avaient plus aucune prétention à faire valoir l'une envers l'autre de ce chef, et condamné l'ex-épouse à payer à l'intéressé une indemnité équitable de CHF 45'532.85.

c. Par arrêt du 1er septembre 2020, la chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après : la CJC), statuant sur appel de l'ex-épouse et appel joint de l'intéressé contre le jugement du 8 mai 2019, a partiellement admis l'appel de l'ex-épouse et annulé ce jugement en tant qu'il portait en particulier sur la liquidation du régime matrimonial des parties. Statuant à nouveau, l'autorité cantonale a notamment donné acte, à l'ex-épouse, de son engagement de verser à l'intéressé, au titre de la liquidation du régime matrimonial, un montant équivalant à 30 % de la plus-value éventuelle réalisée sur la vente de sa propriété immobilière (maison d'hôtes) sise au Maroc dans les trente jours suivant la vente, l'y a condamnée en tant que de besoin et dit que, moyennant l'exécution par l'ex-épouse de son engagement précité, le régime matrimonial des parties était liquidé et que celles-ci n'avaient plus aucune prétention à faire valoir l'une envers l'autre de ce chef. La CJC a confirmé le jugement entrepris pour le surplus.

B. a. Par décision du 27 mai 2021, le service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l’intimé) a alloué à l'intéressé des prestations complémentaires fédérales dès le 1er septembre 2019. Les plans de calcul joints retenaient en termes de montant présenté, au titre de la fortune, une épargne de CHF 192'551.40 pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2019, puis des biens dessaisis à hauteur de CHF 163'071.05 dès le 1er janvier 2020 et de CHF 153'071.05 dès le 1er janvier 2021.

b. Par décision du même jour, le SPC a accordé à l'intéressé des prestations d'aide sociale mensuelles de CHF 1'249.- dès le 1er juin 2021. Le plan de calcul y annexé incluait également en termes de montant présenté, au titre de la fortune, des biens dessaisis à hauteur de CHF 153'071.05.

c. Par pli du 28 juin 2021 complété le 16 juillet suivant, l'intéressé a formé opposition auxdites décisions.

d. Le 25 août 2021, il a transmis au SPC un avis de réception de la Chancellerie de la IIe Cour de droit civil du Tribunal fédéral attestant du dépôt d'un recours contre l'arrêt précité de la CJC.

e. Par décision sur opposition du 3 septembre 2021, le SPC a confirmé les deux décisions du 27 mai 2021, en expliquant que la somme retenue à titre de bien dessaisi correspondait au montant que l'ex-épouse devrait verser à l'intéressé au moyen de la vente de sa propriété immobilière selon l'arrêt de la CJC du 1er septembre 2020, montant qui ne devrait le cas échéant qu'être augmenté au vu des conclusions prises par l'intéressé dans son recours au Tribunal fédéral.

C. a. Par acte du 6 octobre 2021, l'intéressé, représenté par son avocat, a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) contre la décision sur opposition du 3 septembre 2021, en concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation ainsi qu'à celle des décisions du 27 mai 2021, à la constatation qu'il n'y avait pas lieu d'inclure, dans les plans de calcul, une épargne de CHF 192'102.85 pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2019 ni un dessaisissement de CHF 163'071.05 dès janvier 2020, et au renvoi du dossier à l'intimé pour nouveaux calculs des prestations complémentaires et d'aide sociale à compter du 1er septembre 2019.

b. Dans sa réponse du 3 novembre 2021, l'intimé a conclu à l'admission partielle du recours dans la mesure où le montant résultant de la liquidation du régime matrimonial constituait une créance et non un bien dessaisi. Comme le recours au Tribunal fédéral n'avait à sa connaissance pas d'effet suspensif, il a considéré que cette créance était exigible et qu'elle devait être prise en compte dans les plans de calcul à compter de septembre 2020, date de la reddition de l'arrêt de la CJC. Afin que ces calculs soient établis précisément, l'intimé a sollicité que le recourant transmette une estimation de la valeur du bien immobilier sis au Maroc actuelle ou du moins postérieure au mois de septembre 2020.

c. Dans sa réplique du 18 novembre 2021, le recourant a indiqué ne pas adhérer à la proposition de l'intimé. L'octroi ou non de l'effet suspensif au recours pendant devant le Tribunal fédéral n'avait pas d'incidence sur l'issue de la présente cause. D'une part, l'arrêt de la CJC était certes exécutoire mais non définitif, la Haute Cour n'ayant pas encore rendu son arrêt. D'autre part, à ce jour, il n'avait pas encore perçu la créance qui lui avait été reconnue par les instances civiles, laquelle était soumise à une double condition suspensive (soit, la vente du bien immobilier et l'exigibilité du pourcentage qui lui était dû sur cette vente dans les trente jours suivant la cession de ce bien). Faute de toute vente actuellement dudit bien, qui ne lui appartenait pas et sur lequel il n'avait donc aucun pouvoir de disposition, il n'existait aucun dessaisissement. Par ailleurs, aucune estimation sérieuse de la valeur du bien immobilier ne pouvait être effectuée ; la conjoncture était difficile, et le marché de l'immobilier saturé. Il y avait, dès lors, lieu de faire abstraction de cette créance dans les plans de calculs.

d. Le 20 juin 2022, le recourant a informé la chambre de céans que, par arrêt du 18 février 2022 (5A_897/2020), le Tribunal fédéral avait déclaré son recours contre l'arrêt de la CJC du 1er septembre 2020 irrecevable.

e. Dans son écriture du 12 juillet 2022, le recourant a exposé que l'arrêt d'irrecevabilité du Tribunal fédéral n'avait aucune conséquence sur l'issue de son recours contre la décision sur opposition du 3 septembre 2021, et a persisté dans ses conclusions.

f. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

1.1 En revanche, ce n'est pas la chambre de céans (cf. art. 134 LOJ), mais la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la CJCA) qui est compétente pour statuer sur les recours dirigés contre les décisions sur opposition en matière de prestations d’aide sociale en application de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04), même lorsque ces décisions sont rendues par le SPC, agissant pour le compte de l’Hospice général, organe d’exécution de la LIASI, pour les prestations d’aide sociale en faveur des personnes en âge AVS, au bénéfice d'une rente de l'assurance-invalidité ou au bénéfice de prestations complémentaires familiales (art. 3 al. 1 et 2 et art. 52 LIASI ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_1041/2012 du 11 juillet 2013 consid. 1.2 ; ATAS/631/2021 du 17 juin 2021 consid. 1a et les références).

1.2 Selon l'art. 11 al. 3 a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), si l'autorité décline sa compétence, elle transmet d'office l'affaire à l'autorité compétente et en avise les parties.

1.3 En l'espèce, la compétence de la chambre de céans pour juger du cas d’espèce est établie dans la mesure où la décision litigieuse du 3 septembre 2021 a trait aux prestations complémentaires (fédérales). Par contre, la chambre de céans n'est pas compétente pour statuer sur le recours formé contre cette décision en tant qu'elle concerne les prestations d'aide sociale. Il convient dès lors, conformément à l'art. 11 al. 3 LPA, de transmettre le dossier à la CJCA comme objet de sa compétence pour qu'elle statue sur le recours formé contre la décision sur opposition du 3 septembre 2021 relative aux prestations d'aide sociale.

2.             Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC).

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours (du 6 octobre 2021) a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

4.             Dans le cadre de la réforme de la LPC, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, de nombreuses dispositions ont été modifiées (FF 2016 7249 ; RO 2020 585).

4.1 D’après les principes généraux en matière de droit transitoire, on applique, en cas de changement de règles de droit et sauf réglementation transitoire contraire, les dispositions en vigueur lors de la réalisation de l’état de fait qui doit être apprécié juridiquement et qui a des conséquences juridiques (ATF 140 V 41 consid. 6.3.1 et les références).

4.2 Selon l'al. 1 des dispositions transitoires de la modification du 22 mars 2019 (réforme des prestations complémentaires), l’ancien droit reste applicable pendant trois ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente modification aux bénéficiaires de prestations complémentaires pour lesquels la réforme des prestations complémentaires entraîne, dans son ensemble, une diminution de la prestation complémentaire annuelle ou la perte du droit à celle-ci.

4.3 En vertu de l'art. 9a al. 1 let. a LPC en vigueur depuis le 1er janvier 2021, les personnes seules dont la fortune nette est inférieure au seuil de CHF 100'000.- ont droit à des prestations complémentaires.

4.4 En l'occurrence, en tant que la décision litigieuse porte sur les prestations complémentaires pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2020, la LPC est applicable dans sa version en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020. S'agissant des prestations complémentaires dès le 1er janvier 2021, si la réforme de la LPC était appliquée, le droit du recourant auxdites prestations devrait être supprimé selon l'intimé, qui a considéré que la fortune du recourant était supérieure au seuil fixé à l'art. 9a al. 1 let. a LPC. L'intimé a donc appliqué le droit en vigueur avant la réforme, plus favorable au recourant, ce qui n'est au demeurant pas contesté.

5.             Le délai de recours est de trente jours (art. 60 al. 1 LPGA ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

Interjeté dans les forme (art. 61 let. b LPGA) et délai légaux, le recours contre la décision sur opposition du 3 septembre 2021 en tant qu'elle concerne les prestations complémentaires (fédérales) est recevable.

6.             Le litige porte sur le point de savoir si la créance du recourant issue de la liquidation du régime matrimonial doit être incluse dans le calcul des prestations complémentaires (fédérales) dont il bénéficie depuis le 1er septembre 2019.

7.             Sur le plan fédéral, les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent les conditions personnelles prévues aux art. 4, 6 et 8 LPC ont droit à des prestations complémentaires. Ont ainsi droit aux prestations complémentaires notamment les personnes qui perçoivent une rente de l'assurance-invalidité, conformément à l'art. 4 al. 1 let. c LPC.

7.1 Les prestations complémentaires fédérales se composent de la prestation complémentaire annuelle et du remboursement des frais de maladie et d’invalidité (art. 3 al. 1 LPC). L’art. 9 al. 1 LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants.

7.2 Selon l'art. 11 al. 1 LPC, les revenus déterminants comprennent notamment : le produit de la fortune mobilière et immobilière (let. b) ; un quinzième de la fortune nette, dans la mesure où elle dépasse CHF 37'500.- pour les personnes seules (let. c) ; les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s'est dessaisi (let. g).

7.3 Les prestations complémentaires ont pour but de garantir la couverture des besoins vitaux des personnes qui, malgré les prestations de l'AVS ou de l'assurance-invalidité, ne disposent pas de ressources suffisantes pour subvenir à leurs besoins. Si elles disposent d'une fortune leur permettant de couvrir tout ou une partie de ces besoins, il n'appartient pas aux prestations complémentaires d'y pourvoir. Le législateur a en effet estimé qu'il était équitable que les bénéficiaires de prestations complémentaires emploient, sous réserve des franchises prévues par la loi, une partie de leur fortune pour la couverture de leur entretien courant. La part de la fortune qui dépasse le montant de la franchise est ainsi « transformée en revenu » (Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, 2015, p. 142, n. 42 ad art. 11 LPC).

La transformation de la fortune en revenu suppose que celle-ci se compose - à tout le moins s'agissant de la partie prise en considération à titre de revenu - de liquidités (argent liquide ou créances exigibles). Il en résulte qu'outre les liquidités effectivement disponibles, seules les valeurs patrimoniales qui peuvent être transférées à des tiers de manière onéreuse, cédées ou converties en liquidités d'une autre manière, peuvent être prises en compte lors de la fixation du revenu déterminant. Les éléments de fortune qui ne peuvent être convertis en argent ne doivent pas être retenus lors de la détermination de la fortune au sens de l'art. 11 al. 1 let. c LPC, dès lors qu'ils ne peuvent être affectés au financement des besoins vitaux (Ralph JÖHL/Patricia USINGER-EGGER, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Band XIV, Soziale Sicherheit, 3ème éd. 2016, p. 1842-1843 n. 161).

La fortune, au sens de l'art. 11 al. 1 let. b et c LPC, comprend toutes les choses mobilières et immobilières ainsi que les droits personnels et réels qui sont la propriété de l'assuré et qui peuvent être transformés en espèces (par le biais d'une vente ou d'un nantissement par exemple) pour être utilisés (Urs MÜLLER, Bundesgesetz über Ergäzungsleistungen zur Alters-, Hinterlassenen- und Invalidenversicherung, 2006 n. 35 ; JÖHL/ USINGER-EGGER, op cit., p. 1844 s n. 163). Ainsi, font notamment partie de la fortune : les gains à la loterie, la valeur de rachat d'une assurance-vie, l'épargne, les actions, les obligations, les successions, les versements en capital d'assurances, l'argent liquide (MÜLLER, op. cit., n. 35).

La notion englobe le produit transférable en Suisse d'une fortune qui se trouve à l'étranger (ch. 3431.01 des directives de l'office fédéral des assurances sociales concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, dans leur état au 1er janvier 2020).

La fortune déterminante englobe tous les actifs que l'assuré a effectivement reçus et dont il peut disposer sans restriction, sous réserve d'un dessaisissement de fortune (ATF 127 V 248 consid. 4a ; ATF 122 V 19 consid. 5a et les références).

7.4 Il y a dessaisissement (au sens de l'art 11 al. 1 let. g LPC) lorsque la personne concernée a renoncé à des éléments de revenu ou de fortune sans obligation juridique et sans avoir reçu en échange une contre-prestation équivalente, ces deux conditions étant alternatives (ATF 140 V 267 consid. 2.2 et les références ; ATF 134 I 65 consid. 3.2 et les références ; ATF 131 V 329 consid. 4.2 et les références). Pour vérifier s'il y a contre-prestation équivalente et pour fixer la valeur d'un éventuel dessaisissement, il faut comparer la prestation et la contre-prestation à leurs valeurs respectives au moment de ce dessaisissement (ATF 120 V 182 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_67/2011 du 29 août 2011 consid. 5.1). Il y a également dessaisissement lorsque le bénéficiaire a droit à certains éléments de revenu ou de fortune mais n'en fait pas usage ou s'abstient de faire valoir ses prétentions, ou encore lorsqu'il renonce à exercer une activité lucrative possible pour des raisons dont il est seul responsable (ATF 140 V 267 consid. 2.2 et les références).

8.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

9.             En l'occurrence, il ressort de l'arrêt de la CJC du 1er septembre 2020, entré en force, que le recourant dispose d'une créance matrimoniale, en ce sens que son ex-épouse devra lui verser, au titre de la liquidation de leur régime matrimonial, un montant équivalant à 30% de la plus-value éventuelle réalisée sur la vente de la propriété immobilière de celle-ci, sise au Maroc, dans les trente jours suivant ladite vente.

Force est de constater que le recourant est titulaire d'une créance conditionnelle dont les effets sont en suspens jusqu'à l'arrivée d'un événement futur (la vente de la propriété immobilière de l'ex-épouse) et incertain (la plus-value éventuelle réalisée sur cette vente).

En d'autres termes, il s'agit d'une créance dont l'exigibilité dépend de la plus-value réalisée sur la vente de la propriété immobilière de l'ex-épouse.

Dans son écriture du 12 juillet 2022, le recourant a indiqué que la vente du bien immobilier en cause n'avait pas encore eu lieu. Les relevés de son compte bancaire au dossier pour les années 2020 et 2021 n'enregistrent aucun virement en sa faveur de la part de son ex-épouse.

Ainsi, contrairement à ce que prétend l'intimé, la créance résultant de la liquidation du régime matrimonial ne peut pas entrer dans la fortune déterminante du recourant pour le calcul des prestations complémentaires tant et aussi longtemps qu'elle n'est pas exigible, respectivement disponible. Par ailleurs, dans la mesure où le recourant ne peut faire valoir sa prétention matrimoniale contre son ex-épouse qu'après la vente par cette dernière de sa propriété immobilière, on ne peut pas encore admettre qu'il y a un dessaisissement de fortune. Dans le cas inverse, la thèse défendue par l'intimé revient à inclure dans ledit calcul une fortune mobilière dont le recourant ne dispose pas ou ne peut pas encore disposer pour subvenir à ses besoins vitaux.

10.         Par conséquent, le recours est admis, la décision litigieuse du 3 septembre 2021 en tant qu'elle concerne les prestations complémentaires est annulée et la cause renvoyée à l'intimé pour nouvelle décision pour la période dès le 1er septembre 2019 sans intégration de ladite créance dans les plans de calcul (ce jusqu'à la plus-value réalisée sur la vente de la propriété immobilière de l'ex-épouse, renseignement que l'autorité peut obtenir le cas échéant auprès de celle-ci [art. 20 al. 2 let. c LPA]).

11.         Au vu de ce qui précède, il n'est pas nécessaire, comme le voudrait l'intimé, que le recourant produise une estimation de la valeur dudit bien immobilier (ATF 122 II 464 consid. 4a).

12.         Le recourant étant représenté par un avocat et obtenant gain de cause, une indemnité lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]), arrêtée à CHF 1'000.-.

13.         Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours contre la décision sur opposition du 3 septembre 2021 recevable en tant que la décision traite des prestations complémentaires.

2.        Se déclare incompétente, à raison de la matière, en tant que ce recours porte sur les prestations d'aide sociale.

3.        Transmet le dossier de la cause à la chambre administrative de la Cour de justice, comme objet de sa compétence, pour qu'elle statue sur le recours formé contre la décision sur opposition du 3 septembre 2021, relative aux prestations d'aide sociale.

Au fond :

4.        Admet le recours contre la décision sur opposition du 3 septembre 2021 en tant qu'elle concerne les prestations complémentaires.

5.        L'annule et renvoie le dossier à l'intimé pour nouvelle décision au sens des considérants.

6.        Alloue au recourant une indemnité de CHF 1000.- à titre de dépens, à la charge de l'intimé.

7.        Dit que la procédure est gratuite.

8.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

Philippe KNUPFER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le