Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/1096/2025 du 07.10.2025 ( FPUBL ) , REJETE
En droit
| RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
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 | POUVOIR JUDICIAIRE A/379/2025-FPUBL ATA/1096/2025 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 7 octobre 2025 | 
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dans la cause
A______ recourant
 représenté par Me Sacha CAMPORINI, avocat
contre
TRANSPORTS PUBLICS GENEVOIS intimés
 représentés par Me Steve ALDER, avocat
_________
A. a. A______, né le ______ 1983, a été engagé par les Transports publics genevois (ci-après : TPG) dès le 1er août 2020 en tant que conducteur d’autobus à un taux d'activité de 100 % pour une durée indéterminée.
b. Le 29 mars 2023, il a obtenu son permis tramway, de sorte qu'à compter du 30 mars 2023, il a été affecté également à la conduite des tramways.
c. En date du 11 octobre 2024, l'office cantonal des véhicules (ci-après : OCV) lui a notifié une décision de retrait du permis de conduire à titre préventif pour une durée indéterminée, nonobstant recours. Une expertise visant à évaluer son aptitude à la conduite, réalisée auprès d’un médecin de niveau 4, était par ailleurs ordonnée.
En date du 29 septembre 2024, il avait été auditionné par la police concernant une procédure pénale et avait admis, lors de son audition, avoir consommé de la cocaïne à une reprise, la veille de cette audition.
Il ressortait du rapport de transmission dressé par la police qu'il avait déjà fait l'objet de plusieurs interventions de leurs services lors desquelles il était « complètement ivre et en état de détresse psychique », soit les 24 avril, 12 mai, 6 juin et 6 août 2024. Il avait mentionné à plusieurs reprises avoir l'envie de se suicider. Il avait répondu avoir des problèmes de santé sans pouvoir dire aux forces de l'ordre ce qu'il avait. Suite au test « DrugWipe », il avait été testé positif à la cocaïne. Il avait également été testé positif à l'éthylotest avec 1.18 mg/l. S'agissant de sa consommation d'alcool, il avait déclaré « […] quand je bois, je bois trop. Je ne sais pas quelle quantité je bois, mais quand je bois je le fais bien. […]. Je bois une à deux fois par semaine lorsque j'ai congé. J'ai congé tous les quatre jours ».
Le 5 avril 2024, une mise en garde lui avait été adressée lui précisant qu'en cas de nouvelle infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) de sa part, l'OCV serait dans l'obligation de prononcer, avec effet immédiat, le retrait de son permis de conduire notamment. Au vu de la gravité des faits reprochés ainsi que de son métier, la décision était prononcée exécutoire nonobstant recours.
L'examen de son dossier incitait l'autorité à concevoir des doutes sérieux quant à son aptitude à la conduite des véhicules à moteur. Une décision finale serait prise lorsque les questions relatives à son aptitude auraient été élucidées ou, en cas de non soumission à l’examen imposé, dans un délai de six mois.
d. Le 16 octobre 2024, A______ a informé les TPG de ce retrait préventif, ensuite de quoi ils l'ont libéré à titre provisoire de son obligation de travailler.
e. Convoqué à un entretien de service le 20 novembre 2024, il ne s'est pas présenté.
B. a. Le même jour, les TPG lui ont notifié un courrier l’informant de leur intention de mettre fin aux rapports de travail, dans le respect du délai de congé de trois mois pour la fin d’un mois.
Les évènements ayant mené au retrait de son permis de conduire et ses déclarations à la police étaient particulièrement inquiétants, s'agissant d'un conducteur professionnel qui assumait la responsabilité de préserver et de respecter la sécurité de ses passagers et des autres usagers de la route. Il devait faire preuve de toute la lucidité et de toute la clarté d'esprit nécessaires pour mobiliser la concentration requise et gérer les risques inhérents à la circulation automobile ou ferroviaire.
Depuis plusieurs mois au minimum, son hygiène de vie et sa situation personnelle générale étaient de nature à soulever de sérieuses interrogations quant à son aptitude professionnelle à la conduite et il était fortement douteux que les normes et exigences applicables eussent été satisfaites lorsqu'il était en service. Ces doutes étaient de nature à rompre le rapport de confiance qui était indispensable à la continuation des rapports de service, et le principe de précaution exigeait de ne plus lui confier la conduite de véhicules.
Il avait tardé à les informer des difficultés qu'il rencontrait dans sa vie privée et à mettre en place un suivi médical. Depuis le début de son activité, il avait présenté 23 épisodes d'absences pour un total de 284 jours, représentant un taux d'absentéisme de presque 20%, ce qui nuisait au bon fonctionnement du service.
Au vu de tous ces éléments, la poursuite des rapports de service n'apparaissait pas envisageable.
Nourrissant enfin des doutes sur la réalité de certains des certificats médicaux produits, ils ont requis son autorisation de contacter la Docteure B______, sa médecin-traitante, aux fins de vérification.
b. Le 29 novembre 2024, A______ a fait valoir son droit d'être entendu.
Il tenait tout d'abord à présenter ses plus sincères excuses pour les diverses erreurs qu'il avait pu commettre et souhaitait que les TPG lui laissent une chance. Il avait recouru contre la décision de l'OCV qu'il jugeait disproportionnée du fait qu'il n'était pas au volant d'un véhicule à moteur au moment des faits, et il ferait tout ce qui lui était possible pour retrouver au plus vite son permis de conduire. Il avait vécu une relation de couple extrêmement difficile qui avait impacté tant sa vie privée que professionnelle. Ses nombreuses absences étaient majoritairement en lien avec les problèmes rencontrés dans cette relation. Il avait entamé une prise en charge avec un psychologue. Il souhaitait une dernière chance.
c. Par courriel du 16 décembre 2024, la Dre B______ a notamment expliqué que A______ s'était trouvé en arrêt de travail du 22 décembre 2023 au 24 mai 2024 en raison d'un état anxiodépressif lié à son conflit de couple, état qui avait encore entraîné de nouveaux arrêts de travail entre le 19 juillet et le 2 août 2024.
d. Par décision du 27 décembre 2024, reprenant les motifs exposés dans leur lettre d’intention, les TPG ont résilié les rapports de travail de l'intéressé, avec effet au 31 mars 2025, à l'issue du délai de congé de trois mois pour la fin d’un mois. La libération de l'obligation de travailler était maintenue jusqu'au terme des rapports de travail.
C. a. Par acte du 3 février 2025, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant principalement à son annulation et, cela fait, à ce qu'il soit proposé aux TPG sa réintégration, subsidiairement à ce qu'ils soient condamnés à lui verser une indemnité correspondant à huit mois de son dernier traitement brut.
Depuis le début des relations de travail, les TPG n'avaient jamais eu à se plaindre de son comportement et il figurait parmi les bons éléments de l'entreprise. Les évaluations par son supérieur étaient systématiquement positives. Ils n'avaient jamais eu de raison de suspecter la consommation de substance prohibée durant son service.
À partir du printemps 2024, il avait eu d'importantes difficultés de couple, subissant des actes de violence de la part de sa compagne. Ces actes avaient conduit ses voisins à alerter la police qui avait constaté l'état d'alcoolisation du couple.
Stupéfait par la décision de retrait du permis de conduire de l'OCV, il avait formé un recours à son encontre. Parallèlement, il avait sollicité la Dre B______ qui avait fait réaliser des expertises sanguines et urinaires les 15 novembre 2024 et 22 janvier 2025 se révélant négatives à l'alcool et aux stupéfiants. Cette décision de retrait lui avait fait prendre conscience de la situation toxique qu'il avait vécue et il s'était résolu à parler à un professionnel.
La décision querellée ne reposait sur aucun motif justifié. Il avait immédiatement informé son supérieur hiérarchique de la décision de retrait préventif du permis de conduire. Il avait en parallèle entrepris toutes les démarches juridiques et médicales pour obtenir rapidement la restitution de son permis, lequel devrait lui être rendu dans les mois à venir. Les dépistages sanguins et urinaires réalisés tendaient à démontrer l'absence d'addiction et confirmaient ses dires concernant une consommation très ponctuelle. Il avait libéré son médecin traitant du secret médical à l'endroit du médecin-conseil des TPG aux fins de garantir la plus grande transparence quant à sa situation médicale. Il n'avait jamais consommé de stupéfiants ou d'alcool durant ses horaires de travail. En lui reprochant de ne pas leur avoir fait part des difficultés personnelles qu'il traversait, les TPG violaient l'art. 328 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220). Il était en effet libre de ne pas s'en ouvrir à son employeur et la situation aurait dû conduire à une écoute bienveillante en lieu et place d'un licenciement durant les fêtes de fin d'année.
La décision querellée violait de toute manière le principe de la proportionnalité, dès lors que la possibilité d'un reclassement provisoire et des mesures d'accompagnements auraient été dans un rapport de proportionnalité adéquat au vu du contexte global du cas. Pour les mêmes raisons, l'autorité avait versé dans l'arbitraire, étant précisé que dans deux situations jugées par la chambre de céans, l'autorité avait fait précéder le licenciement d'avertissements.
Au cas où l'autorité intimée s'opposait à une proposition de réintégration, il conviendrait de fixer l'indemnité pour refus d'intégration à huit mois de salaire au vu de l'ensemble des faits de la cause.
b. Les TPG ont conclu au rejet du recours.
Tout au long de la relation contractuelle, A______ avait été au bénéfice de 23 certificats médicaux totalisant 270 jours d'absence. Il avait également eu plusieurs accidents qui avaient impliqué diverses incapacités de travail. Il avait travaillé le 7 juin 2024, soit un jour après que la police avait constaté qu'il était « complètement ivre », circonstance qui permettait sérieusement de douter de son aptitude à la conduite lors de sa prise de service le jour en question.
La décision de résiliation se fondait sur cinq motifs selon l'art. 71 al. 1 du statut du personnel des TPG (ci-après : SP), à savoir l'impossibilité pour l'intéressé d'exercer son activité de conducteur compte tenu du retrait de son permis de conduire dont la durée était indéterminée, le principe de précaution en matière de sauvegarde de la sécurité publique, les doutes sérieux et raisonnables quant à son aptitude à la conduite professionnelle, l'information tardive à l'employeur de sa situation et la mise en place relativement récente d'un suivi médical. Ils auraient été fondés à résilier les rapports de service au seul motif du retrait de son permis de conduire en application de l'art. 2 du contrat de travail les liant qui prévoit expressément qu'en cas de retrait du permis de conduire, les TPG se réservaient le droit de mettre un terme aux rapports de service.
Même si cette problématique n'avait pas directement fondé la décision querellée, le taux d'absentéisme important, proche de 20%, avait eu également un impact important sur la bonne marche des TPG. Le comportement de l'intéressé après le prononcé de la décision litigieuse était également inquiétant, dénotant notamment une absence de prise de conscience quant à la gravité de la situation, ce qui avait pour conséquence d'accentuer encore la rupture du lien de confiance.
Rien dans le SP ne subordonnait la résiliation des rapports de travail pour motif fondé à une éventuelle sanction disciplinaire préalable. La résiliation en cas de perte du permis de conduire était par ailleurs une conséquence prévue par le contrat de travail qu'ils avaient conclu.
Il était peu vraisemblable qu'une reprise, même à long terme, puisse être envisagée dans la mesure où A______ ne semblait pas encore avoir passé l'expertise, de sorte que son aptitude à la conduite n'avait pas encore pu être établie. Sa consommation excessive d'alcool et occasionnelle de cocaïne, son état anxiodépressif, la longue liste de ses absences, ainsi que la rupture du lien de confiance ne permettaient pas d'envisager une alternative. Il ne saurait ainsi leur être reproché de ne pas avoir recherché à le reclasser en leur sein préalablement à une résiliation des rapports de service.
La différence d'ancienneté avec les conducteurs visés dans les deux arrêts cités par le recourant justifiait la différence de traitement. Par ailleurs, et surtout, lesdits conducteurs ne s'étaient pas vu retirer leur permis de conduire à titre préventif.
c. A______ a répliqué le 28 mai 2025, relevant que la décision querellée n'était pas motivée par ses absences durant la période d'emploi et que d'autres fonctions pouvaient être aisément proposées aux chauffeurs s'étant vu retirer le permis de conduire.
d. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).
2. Le recourant sollicite préalablement une audience de conciliation, son audition, et celle de témoins, soit de C______, responsable de son groupe au sein des TPG, et de D______, conseiller RH. Il sollicite leurs témoignages afin d'exposer notamment le travail de qualité qu'il a effectué, d'une part, et d'autre part, les raisons pour lesquelles le reclassement vers un poste ne requérant pas de permis de conduire ne lui a pas été proposé.
2.1 Aux termes de l’art. 65A al. 1 LPA, les juridictions administratives peuvent en tout temps procéder à une tentative de conciliation.
2.2 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit n'empêche pas la juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3).
En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1) ni celui d'entendre des témoins (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1).
2.3 En l’espèce, l’autorité intimée a confirmé sa décision de résiliation des rapports de service dans sa réponse et a indiqué que le comportement du recourant après son prononcé la confortait encore dans son appréciation.
Toute tentative de conciliation apparaît dès lors vaine à ce stade et il ne sera pas donné suite à la requête dans ce sens du recourant.
Celui-ci a eu la possibilité de faire valoir ses arguments et de produire toute pièce utile devant la chambre de céans qui dispose d’un dossier complet lui permettant de trancher les questions pertinentes pour la solution du litige.
Il ne sera donc pas procédé aux actes d'instruction sollicités.
3. L’objet de la présente cause concerne la conformité au droit de la résiliation des rapports de service du recourant. Le recourant soutient que son licenciement ne reposerait sur aucun motif justifié.
3.1 Aux termes de la loi sur les Transports publics genevois du 21 novembre 1975 (LTPG - H 1 55), les TPG, établissement de droit public genevois (art. 1 al. 1 LTPG), sont dotés de la personnalité juridique et sont autonomes dans les limites fixées par la LTPG (art. 2 al. 1 LTPG).
3.2 Selon l'art. 2.2 du contrat de travail du 23 juillet 2020 liant les parties, l'employé s'engage à conserver, pendant toute la durée des rapports de service, toutes les autorisations nécessaires à l'exercice de ses fonctions, notamment son permis de conduire. En cas de retrait, les TPG se réservent le droit de mettre un terme aux rapports de service conformément à l'art. 71 SP.
3.3 Conformément à l’art. 2 SP, les rapports de travail sont régis par la loi fédérale sur le travail dans les entreprises de transports publics du 8 octobre 1971 (LDT - RS 822.21), la LTPG, la loi fédérale sur la protection des données du 19 juin 1992 (LPD - RS 235.1), la loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes du 24 mars 1995 (LEg - RS 151.1) ainsi que par le SP, son règlement d’application et ses règlements particuliers et instructions de service (al. 1). Tous les employés sont liés aux TPG par un rapport de droit public (al. 2). Le CO, notamment son titre dixième (du contrat de travail), s’applique à titre de droit public supplétif (al. 3).
3.4 S'il est conducteur d'un véhicule servant aux transports professionnels de personnes, l'employé ne doit pas consommer des boissons alcooliques pendant le travail et dans les six heures qui précèdent celui-ci (art. 8 al. 3 SP).
3.5 Selon l’art. 71 SP, la direction peut mettre fin aux rapports de service pour des motifs dûment justifiés en respectant les délais de congé (ch. 1). Est considéré comme dûment justifié, tout motif démontrant que la poursuite des rapports de service n’est pas, objectivement, dans l’intérêt du bon fonctionnement de l’entreprise (ch. 2). Aucun motif abusif au sens de l'art. 336 CO ne peut être considéré comme justifié (ch. 3).
Le délai de résiliation du contrat par l’autorité d’engagement est de trois mois entre la 2e et la 9e année de service (art. 68 ch. 2 let. c SP).
Aux termes de l’art. 72 al. 1 SP, s'il retient que le licenciement ne repose pas sur un motif justifié, le juge peut proposer à l'entreprise la réintégration du salarié. Si l'entreprise s'y oppose ou s'il renonce à une telle proposition, le juge fixera une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à un ni supérieur à huit salaires mensuels (al. 1).
3.6 L'art. 71 SP équivaut au licenciement pour motif fondé prévu par les art. 21 al. 3 et 22 de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05). Comme pour les fonctionnaires de l'administration cantonale, il n'est pas imposé aux TPG de démontrer que la poursuite des rapports de service est rendue impossible, mais uniquement qu'elle n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'entreprise. L'intérêt public au bon fonctionnement des TPG sert en effet de base à la notion de motif dûment justifié qui doit exister pour justifier un licenciement en application de l'art. 71 SP (ATA/1417/2024 du 3 décembre 2024 consid. 3.4 ; ATA/67/2024 du 23 janvier 2024 consid. 3.4 ; ATA/1839/2019 du 20 décembre 2019 consid. 7c).
Ledit motif (ou motif fondé s’agissant des art. 21 al. 3 et 22 LPAC) est un élément objectif indépendant de la faute du membre du personnel. La résiliation pour motif fondé, qui est une mesure administrative, ne vise pas à punir mais à adapter la composition de la fonction publique dans un service déterminé aux exigences relatives au bon fonctionnement dudit service (ATA/1417/2024 précité consid. 3.4 précité et les références citées).
Le licenciement ordinaire implique que le comportement de l’employé – dont les manquements sont aussi reconnaissables pour des tiers – perturbe le bon fonctionnement du service, ou qu’il soit propre à ébranler le rapport de confiance avec le supérieur, mais ne présuppose pas nécessairement une violation fautive des devoirs de service (arrêt du Tribunal fédéral 8C_392/2019 du 24 août 2020 consid. 4.1 et 4.2). Les justes motifs de renvoi des fonctionnaires ou employés de l'État peuvent procéder de toutes les circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, excluent la poursuite des rapports de service, même en l'absence de faute. De toute nature, ils peuvent relever d'événements ou de circonstances que l'intéressé ne pouvait pas éviter, ou au contraire d'activités, de comportements ou de situations qui lui sont imputables (arrêt du Tribunal fédéral 8C_676/2021 du 27 juin 2022 consid. 2.3).
3.7 La notion de motifs fondés doit être concrétisée, dans chaque situation, à la lumière des circonstances du cas d’espèce. L’employeur jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour juger si les manquements d’un fonctionnaire sont susceptibles de rendre la continuation des rapports de service incompatible avec le bon fonctionnement de l’administration (ATA/980/2025 du 9 septembre 2025 consid. 4.2 ; ATA/530/2024 du 30 avril 2024 consid. 5.3).
3.8 Conducteur professionnel, le recourant est également soumis à la législation en matière de circulation routière.
D’une manière générale, tout conducteur de véhicule automobile doit posséder l’aptitude et les qualifications nécessaires à la conduite (art. 14 al. 1 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 - LCR - RS 741.01). Est apte à la conduite celui qui, notamment, ne souffre d’aucune dépendance qui l’empêche de conduire un véhicule automobile en toute sécurité (art. 14 al. 2 let. c LCR). Toute personne qui n’a pas les capacités physiques et psychiques nécessaires pour conduire un véhicule parce qu’elle est sous l’influence de l’alcool, de stupéfiants, de médicaments ou pour d’autres raisons, est réputée incapable de conduire pendant cette période et doit s’en abstenir (art. 31 al. 2 LCR).
La chambre de céans a déjà eu l'occasion de relever que le fait qu'un conducteur n’ait jamais été contrôlé positif à l’alcool durant ses heures de travail ou que ses collègues n’aient jamais constaté un état d’ébriété ou une odeur d’alcool, ne suffit pas à remettre en question le résultat des tests sanguins (ATA/293/2022 du 22 mars 2022 consid. 7a).
3.9 En l’espèce, la résiliation des rapports de service est fondée sur cinq motifs, à savoir l'impossibilité pour le recourant d'exercer son activité de conducteur compte tenu du retrait de son permis de conduire, dont la durée est indéterminée, le principe de précaution en matière de sauvegarde de la sécurité publique, les doutes sérieux et raisonnables quant à son aptitude à la conduite professionnelle, l'information tardive de l'employeur de sa situation et la mise en place relativement récente d'un suivi médical.
Le recourant ne conteste pas que le retrait de son permis de conduire pour une durée indéterminée l'empêche objectivement d'exercer ses activités de conducteur d'autobus et de tramway pour lesquelles il a été engagé par les TPG. Or l'art. 2 du contrat de travail, intitulé « clause résolutoire », fonde le droit de résilier les rapports de service en application de l'art. 71 SP si le conducteur est privé de son permis de conduire pendant la durée des rapports de service. S'il a allégué dans son acte de recours que son permis devrait lui être restitué rapidement, force est de constater que tel n'est toujours pas le cas à ce jour, soit une année après le prononcé de ce retrait intervenu le 11 octobre 2024.
Par ailleurs, il ressort de la décision de l'OCV du 11 octobre 2024 qu'il s'était présenté à une audition de police sous l'emprise de cocaïne et qu'il avait reconnu une consommation excessive d'alcool. Il avait été testé positif à l'éthylotest avec un taux d'alcool de 1.18 mg/l expiré, soit un taux se situant bien au-dessus de la limite légale pour la conduite. La police était par ailleurs intervenue à quatre reprises à son domicile entre les mois d'avril et août 2024, alors qu'il était « complètement ivre et en état de détresse psychique ». L'intimé a relevé qu'il avait travaillé le 7 juin 2024 à partir de 10h55, soit le lendemain d'une intervention de police, ce qui permet sérieusement de douter de son aptitude à la conduite lors de sa prise de service le jour en question.
Au vu de ces éléments, l'on ne saurait retenir comme lui que les dépistages qu'il a effectués les 15 novembre 2024 et 22 janvier 2025 viendraient confirmer qu'il n'aurait une consommation que très ponctuelle. Il sied au contraire de retenir que ces comportements sont objectivement graves et, cumulés à sa situation psychique et physique, sont incompatibles avec ses devoirs de conducteur professionnel. Le fait qu'il n'ait jamais consommé d'alcool ou de stupéfiants durant ses horaires de travail comme il le soutient n'y change rien, le recourant semblant au contraire ne pas prendre conscience que même la prise d'alcool ou de substances psychotropes le jour précédant son service au volant d’un autobus des TPG peut avoir des effets sur sa capacité de conduire, avec le risque concret de mettre ainsi en danger de nombreuses personnes, usagères des TPG ou des routes du canton. Ces circonstances soulignent la négligence, voire le manque de conscience professionnelle, du recourant. Elles sont ainsi propres à ébranler le rapport de confiance de l’employeur à son égard, vu son activité professionnelle, les risques qui y sont associés, tout particulièrement de sécurité routière, et la responsabilité incombant aux TPG de s’assurer de la capacité de ses chauffeurs à assumer leurs obligations de manière conforme à la loi et en prenant en compte toutes les précautions nécessaires à la sécurité des passagers et des autres usagers de la route. Certes, il explique cette consommation et sa situation par les difficultés conjugales qu'il a subies. Toutefois, cela ne saurait imposer une mansuétude particulière comme il le fait valoir, au regard de l'intérêt public lié à la sauvegarde de la sécurité et de la santé des usagers des TPG et de la route.
À cela s’ajoute le fait que le recourant n’a pas d’emblée pris la juste mesure de la gravité de son comportement, et ce malgré les responsabilités importantes incombant à sa fonction de chauffeur professionnel de personnes au sein des TPG. Il apparaît que les problèmes qu'il associe à la relation de couple toxique qu'il a vécue datent à tout le moins de la fin de l'année 2023 puisque la Dre B______ a expliqué qu'il s'était trouvé en arrêt de travail du 22 décembre 2023 au 24 mai 2024 en raison d'un état anxiodépressif lié à son conflit de couple. Or, les interventions de la police, dès le premier contrôle du 24 avril 2024, auraient à tout le moins dû déclencher une prise de conscience de sa part, ce qui n'a pas été le cas. Ce n'est qu'à la suite du retrait de son permis de conduire et après que l'autorité intimée a eu connaissance de sa situation qu'il a mis en place un suivi médical dans le but de recouvrer un état de santé compatible avec l'exercice de ses fonctions.
Dans ces circonstances, la décision querellée repose bien sur des motifs fondés selon l'art. 71 al. 1 SP.
4. Le recourant reproche une violation du principe de la proportionnalité, faisant valoir que la possibilité d'un reclassement provisoire et des mesures d'accompagnement auraient été dans un rapport de proportionnalité adéquat au vu du contexte global du cas. Pour les mêmes raisons, l'autorité avait versé dans l'arbitraire et violé le principe de l’égalité de traitement au regard des affaires jugées dans les ATA/293/2022 du 22 mars 2022 et ATA/576/2014 du 29 juillet 2014 où elle avait fait précéder le licenciement d'avertissements.
4.1 Les rapports de service étant soumis au droit public, leur résiliation doit respecter les principes constitutionnels généraux, notamment les principes de la légalité, de l'égalité, de la proportionnalité, de la bonne foi et de l'interdiction de l'arbitraire (ATA/980/2025 précité consid. 4.2 ; ATA/530/2024 précité consid. 5.4).
4.2 Le principe de la proportionnalité (art. 5 al. 2 Cst.) exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne puissent pas être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité) ; en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et il exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts ; ATF 143 I 403 consid. 5.6.3 ; 142 I 76 consid. 3.5.1).
4.3 Une décision est arbitraire au sens de l’art. 9 Cst. lorsqu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou lorsqu’elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité. La chambre administrative ne s’écarte de la solution retenue par l’autorité que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable, qu’elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, si elle a été adoptée sans motif objectif ou en violation d’un droit certain. L’arbitraire ne résulte pas du seul fait qu’une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu’elle serait préférable. Pour qu’une décision soit annulée pour cause d’arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 138 I 232 consid. 6.2 ; 136 I 316 consid. 2.2.2 ; ATA/979/2025 du 9 septembre 2025 consid. 3.4).
4.4 Une décision viole le principe de l'égalité consacré à l'art. 8 al. 1 Cst. lorsqu'elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu'elle omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante (ATF 142 V 316 consid. 6.1.1 ; 141 I 153 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_392/2019 précité consid. 4.4.2).
4.5 En l'espèce, les griefs tirés d’une violation des principes de la proportionnalité et de l’égalité de traitement doivent être écartés. En effet, comme le recourant l'admet, une violation fautive des devoirs de service ne conduit pas uniquement au prononcé de sanctions disciplinaires, mais peut également aboutir à un licenciement ordinaire pour motif fondé en cas de rupture du lien de confiance ou empêchant le bon fonctionnement de l’entité concernée.
L’application du principe d’égalité de traitement suppose que la situation du recourant soit semblable à celle des chauffeurs de bus concernés dans les arrêts ATA/293/2022 et ATA/576/2014 évoqués par le recourant. Or, comme l’ont relevé les TPG dans leur écriture, tel n’est pas le cas en raison notamment de la différence d’ancienneté, les conducteurs dans lesdits arrêts ayant présenté des problèmes d'alcool et de consommation de cannabis, respectivement plus de 20 ans, et près de 15 ans après leur entrée en fonction aux TPG, contrairement au recourant qui était dans sa quatrième année de service. Par ailleurs, et surtout, lesdits conducteurs ne s'étaient pas vu retirer leur permis de conduire à titre préventif. Dès lors, ce grief ne peut qu’être écarté, la durée des rapports d’engagement et le retrait du permis de conduire étant des facteurs objectifs susceptibles de justifier un traitement différent de la situation du recourant.
Les TPG ont également fait valoir que sa consommation excessive d'alcool et occasionnelle de cocaïne, son état anxiodépressif et la longue liste de ses absences étaient également de nature à impacter le recourant dans l'exercice d'une autre fonction au sein des TPG. À cela s'ajoute que la rupture du rapport de confiance engendrée par son comportement ne permet pas davantage d'envisager d'alternative. Ils n’ont ainsi pas violé le principe de la proportionnalité en prononçant un licenciement ordinaire pour les motifs susmentionnés, sans envisager au préalable de l’affecter à d’autres tâches au sein de leur entreprise. Au surplus, la chambre de céans a déjà relevé qu’il était particulièrement difficile pour les TPG de trouver des places de travail pour les employés inaptes à la conduite professionnelle (ATA/974/2023 précité ; ATA/78/2020 du 28 janvier 2020 consid. 4b et ATA/1839/2019 du 20 décembre 2019 consid. 12).
Pour les mêmes raisons, et dans la mesure où elle repose sur des motifs fondés, elle ne saurait être taxée d'arbitraire et n’apparaît pas contraire à un autre principe constitutionnel.
Compte tenu de ce qui précède, c’est sans violer le droit ni abuser de leur pouvoir d’appréciation que les TPG ont considéré que la rupture du lien de confiance commandait qu’il soit mis fin aux rapports de service, leur poursuite n’étant objectivement pas dans l’intérêt du bon fonctionnement de cette entreprise.
Le recours sera par conséquent rejeté, ce qui rend sans objet les autres conclusions du recourant tendant à l’octroi d’une indemnité et à sa réintégration.
5. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité ne sera accordée aux intimés, dont la taille permet de disposer d'un service juridique apte à assumer leur défense pour un litige de cette nature, sans avoir à recourir aux services d'un avocat (ATA/78/2020 du 28 janvier 2020 consid. 7 et les arrêts cités).
Compte tenu des conclusions du recours, la valeur litigieuse est supérieure à CHF 15'000.- (art. 112 al. 1 let. d de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110).
* * * * *
PAR CES MOTIFS
 LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 3 février 2025 par A______ contre la décision des Transports publics genevois du 27 décembre 2024 ;
au fond :
le rejette ;
met un émolument de CHF 1'000.- à la charge de A______ ;
dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;
dit que, conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les 30 jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;
le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;
communique le présent arrêt à Me Sacha CAMPORINI, avocat du recourant, ainsi qu'à Me Steve ALDER, avocat des intimés.
Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Patrick CHENAUX, Michèle PERNET, juges.
Au nom de la chambre administrative :
| le greffier-juriste : 
 
 F. SCHEFFRE 
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 | le président siégeant : 
 
 C. MASCOTTO | 
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
| Genève, le 
 
 
 
 
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 | la greffière : 
 
 
 
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