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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4091/2023

ATA/533/2025 du 13.05.2025 sur JTAPI/456/2024 ( PE ) , REJETE

Descripteurs : DROIT DES ÉTRANGERS;RESSORTISSANT ÉTRANGER;AUTORISATION DE SÉJOUR;AUTORISATION DE TRAVAIL;LIMITATION DU NOMBRE DES ÉTRANGERS;ACTIVITÉ LUCRATIVE DÉPENDANTE;INTÉRÊT ÉCONOMIQUE;PRIORITÉ DES TRAVAILLEURS INDIGÈNES;RECHERCHE D'EMPLOI;ANNONCE INSÉRÉE DANS LA PRESSE
Normes : LEI.18; LEI.21; LEI.21.al1
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4091/2023-PE ATA/533/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 mai 2025

1ère section

 

dans la cause

 

A______ SA recourante
représentée par Me Marc BALAVOINE, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE L'INSPECTION ET DES RELATIONS DU TRAVAIL intimé

_________




Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 15 mai 2024 (JTAPI/456/2024)


EN FAIT

A. a. A______ SA, anciennement B______SA (ci-après : A______ SA ou la société), est une société anonyme inscrite au registre du commerce genevois depuis le 14 décembre 2011, ayant pour but toutes études d’aménagements urbains et paysagers en Suisse et à l’étranger. Son siège se trouve à C______, à Genève. Elle possède une succursale à D______, dans le canton de Vaud. Son capital-actions s’élève à CHF 312'000.-.

Elle est également active en France. L’établissement principal est sis à E______ en Haute-Savoie.

Selon son site Internet, la société offre des prestations en matière d’architecture du paysage (stratégie conceptuelle, étude de faisabilité, avant-projet, projet, demande en autorisation, appel d’offres entreprises, projet d’exécution et suivi des travaux, mise en service et suivi des entretiens), d’étude environnementale (analyse de la problématique, diagnostic environnemental, aménagements écologiques et plan d’entretien différencié) et de « patrimoine arboré et [plan d’aménagement paysager]  » (relevé de dendrologie, plan d’aménagement paysager, plantations compensatoires, suivi des travaux compensatoires). Elle indique être « totalement équipée des dernières technologies telles que le BIM (Building Information Modeling), le lidar et la réalité virtuelle, afin de visualiser, valider et coordonner efficacement les projets d’aménagements extérieurs innovants et durables ».

b. F______, né le ______ 1985, est ressortissant du Royaume‑Uni au bénéfice d’une carte de séjour française avec « accord Brexit ».

Il est domicilié en France voisine depuis le 17 décembre 2021.

Il travaille pour A______ depuis novembre 2021, selon son profil LINKEDIN et « 2022 » selon son curriculum vitae (ci-après : CV).

B. a. Le 27 août 2019, la société a diffusé sur le site G______ une annonce proposant un poste de travail dans le domaine du BIM.

b. Le 7 juin 2021, la société a fait appel aux services de la plate-forme H______ pour diffuser l’annonce d’un poste à pourvoir de BIM Manager.

c. Le 8 novembre 2021, A______ SA et F______, désigné en qualité de « coordinateur BIM », ont signé un contrat de travail de durée indéterminée prenant effet le jour même ; était prévu, dès l’obtention du permis de travail et jusqu’au 31 décembre 2021, un taux d’occupation de 40 % pour un salaire mensuel brut de CHF 2'240.- puis de 100 % dès le 1er janvier 2022 pour un salaire mensuel brut de CHF 5'600.-.

C. a. Par formulaire « demande pour frontalier » daté du 3 janvier 2022, A______ SA a requis auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) la délivrance d’une autorisation de travail en vue d’employer F______ en qualité de « coordinateur BIM » à temps plein, selon les conditions figurant dans le contrat de travail précité.

b. Par courrier du 4 janvier 2022, l’OCPM a précisé que l’intéressé n’était pas autorisé à travailler avant la réception de son autorisation frontalière.

c. Le 30 mars 2022, l’OCPM a informé la société qu’une autorisation frontalière ne pouvait pas être délivrée aux ressortissants d’États tiers, soit des États non membres de l’union européenne/association européenne de libre échange (ci‑après : UE/AELE) s’il n’était pas au bénéfice d’un droit de séjour durable dans un État voisin et résidaient depuis six mois au moins dans la zone frontalière voisine (art. 25 al. 1 let. a de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et s’ils exerçaient leur activité dans la zone frontalière Suisse (art. 25 al.1 let. b). En l’espèce, F______ résidait depuis moins de six mois en zone frontalière voisine.

d. Le 11 avril 2022, la société a sollicité une dérogation pour le permis frontalier du précité à l’OCPM. Elle avait besoin de ses compétences dans le cadre de son développement. À compter du mois de mai 2022, l’intéressé serait résidant en zone frontalière depuis plus de six mois. Elle a joint une demande pour frontalier F précisant une date de début de contrat au 1er juin 2022.

e. L’OCPM s’est dit d’accord d’attendre jusqu’au 17 juin 2022, date à laquelle l’intéressé aurait six mois en zone frontalière, afin de pouvoir envoyer son dossier « en commission » auprès du service de la main-d’œuvre étrangère (ci‑après : SMOE) de l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci‑après : OCIRT).

f. Par courriel du 24 juin 2022, le SMOE a informé la société que le dossier leur avait été transmis par l’OCPM. Il sollicitait un certain nombre de pièces.

g. En réponse à la demande précitée, la société a notamment précisé avoir émis des annonces de recherche, essentiellement orientées pour un collaborateur avec des compétences BIM, compte tenu de leurs besoins urgents pour des prestations de modélisation 3D sur les projets en cours. Parmi l’ensemble des candidats, ils avaient auditionné à plusieurs reprises F______. Dès leur premier entretien, il s’était avéré qu’il présentait de nombreuses aptitudes pour le poste recherché par la société, à savoir : 1) maîtriser le logiciel « REVIT » qui permettait une modélisation BIM ; cette compétence métier était d’autant plus intéressante que bon nombre de leurs clients exigeaient qu’ils travaillent en BIM. Il aurait également la possibilité de former leurs équipes en interne sur ce logiciel ; 2) il pratiquait plusieurs langues, dont l’anglais couramment, ce qui était un atout majeur dans la communication avec leurs nombreux clients internationaux ; 3) il possédait un diplôme d’architecte de l’école polytechnique d’architecture et d’urbanisme puis un Master – Msc en BIM Management. À l’échelle de leur bureau, ses compétences étaient essentielles dans le développement de leurs projets urbains et pour les études concernant les constructions plus complexes qui jalonnaient leurs aménagements (poolhouse, garage, jardin d’hiver, buvette, etc.) ; 4) il avait une capacité de management avérée dans la gestion des équipes. I______, cosignataire du courrier, administrateur associé de la société, membre au comité de la SIA Genève, qui siégeait au comité de la Haute école du paysage, d'ingénierie et d'architecture de Genève (ci-après : HEPIA) pour la rédaction et la planification du Plan d’Études Cadre (PEC) 2023, insistait pour que l’HEPIA intègre dans le cursus de formation le logiciel « REVIT ». En l’état, aucun étudiant en paysage dans les quatre prochaines années ne serait formé sur ce logiciel. Ceci justifiait que la société ait recruté un profil permettant d’avoir des notions de paysage et de former en interne l’ensemble des 25 collaborateurs sur ce nouveau logiciel. L’intéressé avait le profil idéal pour les porter dans le développement de leur bureau d’études.

h. Par décision du 13 juillet 2022, l’OCIRT a informé la société qu’après examen du dossier par la commission désignée à cet effet par le conseil d’État, le SMOE ne pouvait pas rendre de décision favorable. L’admission en vue de l’exercice d’une activité lucrative ne servait pas les intérêts économiques de la Suisse. L’ordre de priorité prévu par la loi n’avait pas été respecté. L’employeur n’avait pas démontré qu’aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d’un pays de l’UE/AELE n’avait pu être trouvé. L’employeur n’accordait pas à l’intéressé les conditions de rémunération usuelles à Genève dans la profession et la branche. Le dossier était retourné à l’OCPM. Les dispositions légales pertinentes étaient mentionnées.

D. a. Le 12 août 2022, la société a annoncé, pendant une durée de 15 jours, la vacance du poste de BIM Manager à l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE). Les critères recherchés étaient une expérience de trois ans dans le domaine et l’utilisation des visualisations et des modélisations de l’architecture paysager en 3D sur réalité virtuelle, la maîtrise de « Revit Architecture, Naviswork, Autodesk Design Review, Virtual Reality (CR) et les fichiers COBie pour IFC ».

b. La société a reçu 16 candidatures provenant de Suisse ou des pays membres de l’UE/AELE.

J______ remplissait 64% des critères requis et K______ 46%.

E. a. Par courrier du 2 juin 2023, la société a déposé une demande de permis de travail frontalier pour F______.

Le groupe comptait 33 employés, 24 à Genève, six à D______ et trois en France. Dix étaient de nationalité suisse et 20 disposaient d’une autorisation de travail frontalière. Quatre étaient apprentis. En 2021, la société avait réalisé un chiffre d’affaires total de CHF 2'283'749.-. La projection du chiffre d’affaires pour l’année 2023 s’élevait à 3'000'000.-. La hausse s’expliquait notamment par l’acquisition de nouveaux périmètres d’études où le BIM était imposé pour les aménagements extérieurs (campus L______, notamment). La société souhaitait embaucher un collaborateur en tant que « coordinateur BIM » pour le développement du BIM au sein de ses équipes, afin notamment de pouvoir répondre aux concours suisses et européens qui nécessitaient l’utilisation de ce processus. À titre d’exemple, la société avait été mandatée par L______ pour reprendre un projet uniquement au moyen du BIM. Le lauréat du concours s’était vu retirer la suite des études en phase 32, soit le projet de l’ouvrage, car il ne répondait pas aux attentes BIM du client.

Elle entendait utiliser le BIM pour l’ensemble de ses projets d’ici à deux ans, ce qui impliquait une migration informatique ainsi que la formation de l’ensemble des collaborateurs à son utilisation par le BIM Manager. Le poste nécessitait de disposer de plusieurs années d’expérience comme coordinateur manager BIM.

b. À la demande de l’OCPM, la société a transmis une copie du contrat de travail de l’intéressé, un extrait de son casier judiciaire français de moins de trois mois, un justificatif de domicile délivré par la mairie attestant d’un séjour de plus de six mois en zone frontalière, un formulaire F dûment complété, puis les comptes annuels de la société pour les années 2021 et 2022, la répartition fiscale intercantonale avec le bureau de D______ et son effectif du bureau du personnel de Genève au moment de la requête.

Selon le contrat de travail signé le 18 septembre 2023, il prendrait effet à compter du 1er octobre 2023 pour un taux d’occupation de 100%. La rémunération convenue était de CHF 8'500.- bruts sur douze mois, soit CHF 102'000.- annuels.

c. Le 18 septembre 2023, F______ a signé un nouveau contrat avec la société pour un salaire mensuel brut de CHF 8’500.-.

d. Par décision du 31 octobre 2023, le SMOE a informé la société qu’il ne lui était pas possible de rendre une décision favorable à la suite de la demande d’autorisation de travail pour frontalier déposée en faveur de F______. L’admission en vue de l’exercice d’une activité lucrative ne servait pas les intérêts économiques de la Suisse. L’ordre de priorité n’avait pas été respecté. L’employeur n’avait pas démontré qu’aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d’un pays de l’UE/AELE n’avait pu être trouvé.

F. a. Par acte du 6 décembre 2023, la société a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant, préalablement, à ce que soient ordonnées la production du préavis émis par la commission tripartite pour l’économie avant le prononcé de cette décision ainsi que la comparution personnelle des parties et, sur le fond, à l’annulation de la décision.

Son droit d’être entendue avait été violé : le préavis de la commission tripartite pour l’économie ne lui avait pas été communiqué et ne figurait pas au dossier.

L’art. 18 LEI avait été violé. L’admission de F______ répondait aux intérêts de la Suisse et permettrait de combler un besoin crucial pour le développement d’A______ SA.

La décision querellée violait également l’art. 21 LEI. Elle avait effectué des démarches sur LINKEDIN et diffusé des annonces sur des sites d’offres d’emploi dans le domaine du BIM, notamment sur G______ le 27 août 2019 et H______ le 17 juin 2021. Elle avait en outre annoncé la vacance du poste à l’OCE le 12 août 2022. Aucune des candidatures suisses ou UE/AELE reçues ne disposait de la formation et des compétences techniques suffisantes en matière de BIM.

b. L’OCIRT a conclu au rejet du recours.

c. À l’appui de sa réplique, A______ a produit, notamment :

- une attestation de « soutien professionnel » du 15 mars 2024 d’M______, architecte, expert BIM reconnu aux niveaux cantonal et fédéral, faisant état de l’importance du rôle de Manager BIM de F______ au sein d’A______ SA. Le BIM manager avait une place centrale dans la mise en œuvre et le suivi des processus du BIM et dans la digitalisation des entreprises du secteur du bâtiment et de la construction. Il s’agissait d’un rôle hautement stratégique dans les entreprises du bâtiment, dont le territoire genevois et la Suisse romande manquaient cruellement. La rareté du profil de F______, en tant que manager BIM spécialisé dans l’architecture paysagère devait être soulignée. Il était le seul dans le canton de Genève à posséder ce profil et cette expertise. Il contribuait fortement au succès d’A______ SA. Grâce à l’avantage technologique généré par le travail de ce dernier, A______ SA était en mesure de répondre avec succès à des appels d’offre importants, pour lesquels la méthodologie BIM était un facteur de sélection.

Il soulignait le grand professionnalisme de F______, son excellente connaissance du marché genevois et des réglementations helvétiques applicables et sa parfaite intégration à Genève. Ce dernier possédait ainsi tous les atouts permettant de contribuer au développement et au rayonnement du canton ;

- le « Guide des règles de base pour les modèles numériques BIM » de 2024 portant l’en-tête de la section genevoise de la SIA indiquant notamment, dans la rubrique « Contribution », le nom de F______.

d. Par jugement du 15 mai 2024, le TAPI a rejeté le recours.

Le droit d'être entendu n’avait pas été violé. La décision attaquée était suffisamment motivée et l’absence au dossier du préavis de la commission tripartite sur lequel l'OCIRT indiquait s'être fondé n'était pas problématique, ce préavis pouvant être émis oralement, ce qui était le cas en l'espèce.

L’ordre de priorité n’avait pas été respecté. La vacance du poste avait été annoncée à l'OCE neuf mois après la signature du contrat avec l'employé hors UE que la recourante souhaitait spécifiquement engager. L'intitulé du poste avait varié au gré de l'avancement de la formation de l'intéressé afin de correspondre aux compétences de ce dernier et aucune autre candidature parmi les 16 reçues, et nonobstant le fait qu'un autre candidat remplissant 64% des critères requis n'avait été retenue.

La seule annonce du poste à l'OCE et auprès de G______ et H______ était insuffisante, ce d'autant que le poste était très spécifique selon la recourante, de sorte qu'il aurait nécessité des recherches poussées, y compris sur le marché européen. L’intérêt économique de la Suisse à engager l'intéressé n’était pas réalisé, faute d'avoir démontré que cet engagement aurait des retombées économiques et en termes d'emploi positives pour la Suisse.

G. a. Par acte du 17 juin 2024, A______ SA a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Elle a conclu à son annulation. Préalablement, le préavis émis par la commission tripartite devait être produit et une comparution personnelle des parties et l’audition d’M______ devaient être ordonnées.

La recourante a repris, en substance, l’argumentation développée devant le TAPI.

Le BIM manager, également désigné sous le titre de gestionnaire BIM, était chargé d’organiser toutes les étapes essentielles du processus du BIM du côté mandataire. Pour accéder au poste de BIM manager, le candidat devait disposer d’une solide formation universitaire, incluant un Master universitaire spécialisé en BIM. Le poste requérait par ailleurs une expérience professionnelle solide avec une progression à travers les différentes fonctions clés, notamment en tant que BIM technicien et BIM coordinateur.

Le BIM technicien, désigné en pratique par le titre « dessinateur de bâtiments 3D », était chargé d’élaborer les modèles BIM pour les spécialistes concernés. Depuis février 2023, N______ occupait le poste de BIM technicien au sein de la société. Issu du domaine de l’aménagement de cuisine, il était en formation sur les aspects paysagers. Il était amené à participer, en tant qu’exécutant, à des missions impliquant le BIM management.

Depuis 2022, la société avait engagé des investissements d’un montant de CHF 404'180.- dans le développement du logiciel BIM ainsi que CHF 215'142.- dans le matériel BIM afin de renforcer sa compétitivité sur les concours suisses et européens qui exigeaient l’utilisation de cette technologie. Il lui était crucial de disposer d’un BIM manager. F______ possédait des qualifications très spécifiques, « étant donné qu’aucune école en Suisse ou dans un pays membre de l’UE/AELE n’offrait de formation similaire en BIM management ». Aucun des 16 candidats ayant répondu à l’annonce ne possédait une formation aussi spécialisée et une expérience aussi solide. Au vu de l’enjeu stratégique de la technologie BIM, la société ne pouvait pas se permettre d’engager un candidat qui ne remplissait que 64% des critères requis. F______ était régulièrement sollicité en tant qu’expert pour participer à des séances de la SIA. Il était activement impliqué dans l’élaboration de normes fédérales liées au BIM et avait participé à la rédaction du guide de la SIA sur les règles de base adoptées par les modèles numériques BIM.

En refusant une comparution personnelle des parties et l’audition d’M______, le TAPI avait violé son droit d’être entendue.

La décision de l’OCIRT violait son droit d’être entendue puisqu’elle n’avait pas eu accès au préavis de la commission tripartite et que la décision n’était pas suffisamment motivée. Elle avait démontré que les conditions d’une autorisation de travail étaient réalisées sur pas moins de 174 pages. En retour, elle avait reçu une décision d’une demi-page.

Les art. 18 et 21 LEI avaient été violés. Enfin, elle persistait à solliciter la comparution personnelle des parties et l’audition du témoin.

b. L’OCIRT a conclu au rejet du recours.

c. Dans sa réplique du 28 août 2024, la recourante a insisté sur la nécessité d’entendre M______. Ce dernier, architecte et membre actif de la SIA, collaborait régulièrement avec F______, sollicité en tant qu’expert dans des séances organisées par la SIA. Le témoin possédait une vision globale des évolutions technologiques et des besoins spécifiques du secteur de l’architecture paysagère. Son audition fournirait à la chambre de céans une compréhension approfondie des enjeux du BIM en Suisse romande ainsi que des lacunes du marché de l’emploi local et la nécessité d’importer des compétences spécialisées pour pallier ces insuffisances. Le BIM Management était un domaine stratégique pour l’avenir de l’architecture dans lequel F______ avait démontré à plusieurs reprises son expertise unique. L’audition de la recourante et du témoin devait permettre à la chambre de céans d’évaluer objectivement l’art et la pertinence de ce profil en Suisse.

d. Dans le délai fixé aux parties au 6 mars 2025, par la juge déléguée, pour déposer leur liste de témoins comprenant notamment leurs coordonnées et le temps d’audition sollicité, la recourante a indiqué renoncer à solliciter l’audition d’M______. Elle requérait sa propre audition. Elle pourrait être représentée par O______, administrateur secrétaire, et I______, administrateur président, titulaires d’une signature collective à deux.

L’OCIRT a indiqué n’avoir pas de témoins à présenter et rappelé qu’un témoignage n’était pas de nature à pouvoir pallier le défaut du respect de l’ordre de priorité.

e. Sur ce, les parties ont été informées qu’en l’absence de demande d’audition de témoins, la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             La recourante sollicite son audition.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

2.2 En l’espèce, le dossier contient les éléments utiles permettant de statuer en connaissance de cause. La recourante a eu la possibilité de se déterminer par écrit à plusieurs reprises durant la procédure et de produire toute pièce utile. Comme elle l’a relevé, elle a déposé de nombreux documents et s’est exprimée « en 174 pages ». Dans ces conditions, il ne sera pas donné suite à sa demande d’audition qui n’apparaît pas nécessaire étant rappelé qu’elle n’a pas de droit à être entendue oralement.

2.3 Pour les mêmes motifs, le TAPI n’a pas violé le droit d’être entendue de la recourante, étant précisé qu’il pouvait, par appréciation anticipée des preuves, considérer que l’audition du témoin n’était pas nécessaire, compte tenu des considérants qui suivent.

3.             La recourante se plaint par ailleurs d’une violation de son droit d’être entendue aux motifs, d’une part qu’elle n’a pas eu accès au préavis de la commission tripartite et, d’autre part, que la décision n’était pas suffisamment motivée.

3.1 L'autorité cantonale intimée émet un préavis dans le cadre des permis délivrés sur la base de l'art. 18 LEI. C'est le secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM) qui prend la décision d'octroi ou de refus de l'autorisation, avec la faculté de suivre ou non le préavis cantonal (art. 30 et 40 al. 2 LEI ; art. 83 al. 1 let. a, 85 al. 1 et 86 al. 1 OASA).

3.2 À teneur de l’art. 4 al. 1 du règlement d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 9 mars 2009 (RaLEtr - F 2 10.01), la commission tripartite pour l'économie (ci-après : la commission), dépendant du conseil de surveillance du marché de l'emploi, instituée par la loi sur le service de l'emploi et la location de services, du 18 septembre 1992, est chargée de rendre un préavis concernant les demandes d'autorisation de travail qui doivent faire l'objet d'une décision préalable de l’OCIRT, au sens de l'art. 6 RaLEtr.

3.3 L’OCIRT rend la décision préalable en matière de marché du travail après consultation de la commission (art. 6 al. 4 RaLEtr).

3.4 La chambre de céans a déjà eu l’occasion de préciser que l’art. 6 al. 4 RaLEtr ne pose pas l’exigence d’un préavis écrit. La commission tripartite doit être consultée par l’OCIRT, mais ce dernier reste l’autorité décisionnaire. La forme de cette consultation peut parfaitement se faire en soumettant à la commission un dossier et en recueillant simplement son avis au cours de l’une de ses séances (ATA/420/2012 du 3 juillet 2012 consid. 5).

3.5 En l’espèce, le préavis a été formulé oralement, à l’issue de la séance hebdomadaire de la commission tripartite. Dans ces conditions, le grief de violation du droit d’être entendu sur cette question n’est pas fondé.

Par ailleurs, si la motivation de la décision de l’OCIRT tient effectivement en cinq lignes, elle mentionne que l’admission en vue de l’exercice d’une activité lucrative ne sert pas les intérêts économiques de la Suisse selon l’art. 18 LEI et que l’ordre de priorité n’a pas été respecté avec la précision que l’employeur n’a pas démontré qu’aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d’un pays de l’UE/AELE n’a pu être trouvé.

En conséquence, si certes la motivation est succincte, la recourante a pu comprendre les raisons qui justifiaient le refus de sa requête. Elle a d’ailleurs pu motiver de façon fouillée le recours formulé à l’encontre de celle-ci. Le grief de violation du droit d’être entendu au motif d’une motivation insuffisante n’est pas fondé.

4.             L'objet du litige porte sur le refus de l'OCIRT de délivrer à la société recourante une autorisation de séjour avec activité lucrative en faveur d’une personne de nationalité britannique.

4.1 La LEI et ses ordonnances, en particulier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants britanniques.

4.2 Selon l'art. 11 al. 1 LEI, tout étranger qui entend exercer en Suisse une activité lucrative doit être titulaire d'une autorisation, quelle que soit la durée de son séjour ; il doit la solliciter auprès de l'autorité compétente du lieu de travail envisagé.

4.3 L'art. 18 LEI prévoit qu'un étranger peut être admis en vue de l'exercice d'une activité lucrative salariée aux conditions suivantes : son admission sert les intérêts économiques du pays (let. a) ; son employeur a déposé une demande (let. b) ; les conditions fixées aux art. 20 à 25 LEI sont remplies (let. c) lesquelles concernent respectivement les mesures de limitation (art. 20), l'ordre de priorité (art. 21), les mesures concernant les demandeurs d'emploi (art. 21a), les conditions de rémunération et de travail et le remboursement des dépenses des travailleurs détachés (art. 22), les qualifications personnelles (art. 23), le logement (art. 24) et l'admission de frontaliers (art. 25).

Lesdites conditions sont cumulatives (ATA/361/2020 du 16 avril 2020 consid. 4b et les arrêts cités).

Les autorités compétentes bénéficient d'un large pouvoir d'appréciation. En raison de sa formulation potestative, l’art. 18 LEI ne confère aucun droit à l'autorisation sollicitée (arrêt du Tribunal fédéral 2C_30/2020 du 14 janvier 2020 consid. 3.1 ; ATA/1413/2024 du 3 décembre 2024 consid. 3.5 et les références citées). De même, un employeur ne dispose d'aucun droit à engager un étranger en vue de l'exercice d'une activité lucrative en Suisse (arrêts du Tribunal fédéral 2D_57/2015 du 21 septembre 2015 consid. 3 ; 2D_4/2015 du 23 janvier 2015 consid. 3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 3).

Selon le ch. 4.3.1 des Directives du SEM, domaine des étrangers, 2013, état au 1er avril 2025 (ci-après : directives LEI) – qui ne lient pas le juge, mais dont celui‑ci peut tenir compte pour assurer une application uniforme de la loi envers chaque administré et pourvu qu'elles respectent le sens et le but de la norme applicable (ATA/819/2024 du 9 juillet 2024 consid. 4.2.6) – l'autorité doit apprécier le cas en tenant compte en particulier de la situation sur le marché du travail, de l'évolution économique durable et de la capacité de l'étranger concerné de s'intégrer.

4.4 En vertu de l’art. 21 al. 1 LEI, un étranger ne peut être admis en vue de l'exercice d'une activité lucrative que s'il est démontré qu'aucun travailleur en Suisse ni aucun ressortissant d'un État avec lequel a été conclu un accord sur la libre circulation des personnes correspondant au profil requis n'a pu être trouvé.

L'admission de ressortissants d'États tiers n'est possible que si, à qualifications égales, aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d'un État de l'UE ou de l'AELE ne peut être recruté (Message du Conseil fédéral du 8 mars 2002 concernant la loi sur les étrangers, FF 2002 3469 ss, spéc. p. 3537 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-2907/2010 du 18 janvier 2011 consid. 7.1 et la jurisprudence citée). Il s'ensuit que le principe de la priorité des travailleurs résidants doit être appliqué à tous les cas, quelle que soit la situation de l'économie et du marché du travail (arrêt du Tribunal fédéral 2C_434/2014 du 8 août 2014 consid. 2.2 ; ATA/978/2024 du 20 août 2024 consid. 2.4).

Les employeurs sont tenus d’annoncer le plus rapidement possible aux office régionaux de placement (ORP) les emplois vacants, qu’ils présument ne pouvoir repourvoir qu’en faisant appel à du personnel venant de l’étranger. Les offices de placement jouent un rôle clé dans l’exploitation optimale des ressources offertes par le marché du travail sur l’ensemble du territoire suisse. L'employeur doit, de son côté, entreprendre toutes les démarches nécessaires – annonces dans les quotidiens et la presse spécialisée, recours aux médias électroniques et aux agences privées de placement – pour trouver un travailleur disponible. On attend des employeurs qu’ils déploient des efforts en vue d’offrir une formation continue spécifique aux travailleurs disponibles sur le marché suisse du travail (Directives du SEM, ch. 4.3.3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-1123/2013 du 13 mars 2014 consid. 6.4 ; ATA/494/2017 précité ; ATA/24/2015 du 6 janvier 2015).

Il revient à l'employeur de démontrer avoir entrepris des recherches sur une grande échelle afin de repourvoir le poste en question par un travailleur indigène ou ressortissant d'un État membre de l'UE ou de l'AELE conformément à l'art. 21 al. 1 LEI et qu'il s'est trouvé dans une impossibilité absolue de trouver une personne capable d'exercer cette activité (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-6074/2010 du 19 avril 2011 consid. 5.3 ; ATA/1368/2018 du 18 décembre 2018 et les références citées).

L'employeur doit être en mesure de rendre crédibles les efforts qu'il a déployés, en temps opportun et de manière appropriée, en vue d'attribuer le poste en question à des candidats indigènes ou à des candidats ressortissants de l’UE/AELE. Des ressortissants d’États tiers ne seront contactés que dans le cas où les efforts entrepris n’ont pas abouti. Il convient dès lors de veiller à ce que ces démarches ne soient pas entreprises à la seule fin de s’acquitter d’une exigence. Elles doivent être engagées suffisamment tôt, dans un délai convenable avant l’échéance prévue pour la signature du contrat de travail. En outre, il faut éviter que les personnes ayant la priorité ne soient exclues sur la base de critères professionnels non pertinents tels que des séjours à l’étranger, des aptitudes linguistiques ou techniques qui ne sont pas indispensables pour exercer l’activité en question, etc. (Directives du SEM, ch. 4.3.2.2.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-1123/2013 précité consid. 6.4).

Même si la recherche d'un employé possédant les aptitudes attendues de la part de l’employeur peut s'avérer ardue et nécessiter de nombreuses démarches auprès des candidats potentiels, de telles difficultés ne sauraient à elles seules, conformément à une pratique constante des autorités en ce domaine, justifier une exception au principe de la priorité de recrutement énoncée à l'art. 21 LEI (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-8717/2010 du 8 juillet 2011 consid. 8.1 ; ATA/1368/2018 précité).

La seule publication d'une annonce auprès de l'OCE, bien que diffusée également dans le système EURopean Employment Services (EURES), ne peut être considérée comme une démarche suffisante (ATA/1147/2018 du 30 octobre 2018 consid. 11). Par ailleurs, des démarches intervenues après un refus d'octroi d'autorisation de séjour avec activité lucrative doivent être considérées comme entreprises dans le seul but de s'acquitter des exigences légales (ATA/2/2015 du 6 janvier 2015 consid. 2c).

4.5 À teneur de l'art. 96 LEI, les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son degré d'intégration (al. 1). Lorsqu'une mesure serait justifiée, mais qu'elle n'est pas adéquate, l'autorité compétente peut donner un simple avertissement à la personne concernée en lui adressant un avis comminatoire (al. 2).

4.6 La chambre administrative ne connaît pas de l'opportunité des décisions prises en matière de police des étrangers, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une mesure de contrainte (art. 61 al. 2 LPA ; art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10, a contrario ; ATA/819/2024 du 9 juillet 2024 consid. 4.1).

4.7 En l’espèce, la recourante a diffusé une annonce pour un poste dans le domaine du BIM sur le site G______ le 27 août 2019 puis a fait appel aux services de la plate-forme H______ le 7 juin 2021 pour un poste de BIM manager. Le 8 novembre 2021 elle a signé un premier contrat avec F______.

Sa demande pour frontalier du 3 janvier 2022 a été refusée le 13 juillet 2022 par l’OCIRT lequel relevait notamment le non-respect de l’ordre de priorité prévu par la loi.

Un mois plus tard, le 12 août 2022, la société a annoncé, pendant une durée de 15 jours, la vacance du poste de BIM manager à l’OCE. Elle a reçu 16 candidatures provenant de Suisse ou des pays membres de l’UE/AELE.

Une année après, le 2 juin 2023, elle a déposé une demande de permis de travail frontalier pour F______, laquelle a été refusée par décision du 31 octobre 2023, objet de la présente procédure.

Il ressort de la jurisprudence que des démarches intervenues après un refus d’octroi d’autorisation de séjour avec activité lucrative doivent être considérées comme entreprises dans le seul but de s’acquitter des exigences légales. À ce titre, la portée des démarches entreprises en août 2022 auprès de l’OCE doit être relativisée. De surcroît, à teneur tant du CV du travailleur concerné que surtout de son profil LINKEDIN, celui-ci travaille régulièrement pour la recourante depuis novembre 2021. La volonté de la recourante que la publication soit suivie d’effet et qu’elle procède à une analyse complète et fine des dossiers qui lui étaient soumis par ce biais doit être en conséquence nuancée.

Il ressort surtout de la jurisprudence qu’il revient à l’employeur de démontrer avoir entrepris des recherches sur une grande échelle afin de pourvoir le poste en question et qu’il s’est vu dans une impossibilité absolue de trouver une personne capable d’exercer l’activité concernée. Or, les démarches entreprises par la recourante apparaissent, quoiqu’elle en dise, légères. Elles consistent en une annonce sur le site G______ le 27 août 2019, une annonce sur la plate-forme H______ le 7 août 2021, ainsi que, suite au refus essuyé le 13 juillet 2022, la publication, pendant une durée de 15 jours, de la vacance du poste de BIM manager à l’OCE. Ces quelques démarches ne satisfont à l’évidence pas les exigences posées par l’art. 21 LEI et la jurisprudence.

Certaines de ces recherches ont par ailleurs été effectuées que suite à l’engagement, le 8 novembre 2021, de F______.

Comme l’a déjà retenu la chambre de céans (ATA/565/2024 du 7 mai 2024), il aurait appartenu à l’employeur d’entreprendre des recherches plus poussées et de plus grande envergure sur les marchés du travail tant en Suisse que de l’UE/AELE, par exemple en faisant appel à des agences de recrutement et en publiant des annonces sur des sites Internet spécialisés, en Suisse et en Europe, et dans la presse spécialisée. La recourante n’a, au demeurant, pas non plus recouru à des outils simples, notamment les réseaux sociaux, sous réserve de LINKEDIN, selon ce qu’elle allègue. De telles démarches complémentaires à celles faites se seraient d’autant plus justifiées si, comme le soutenait la société, le poste était très spécifique et susceptible de lui apporter une importante plus-value.

Le fait que F______ connaissait déjà l’entreprise et ses méthodes de travail ne dispensait nullement la société de respecter la procédure prescrite. Cet élément ne justifiait pas non plus, à lui seul, une dérogation à l'ordre de priorité. Un tel raisonnement reviendrait à admettre qu’un employeur puisse ainsi contourner la loi et placer les autorités devant le fait accompli.

L’employeur doit en conséquence se voir reprocher de ne pas avoir entrepris des démarches suffisantes pour trouver un candidat ou une candidate suisse ou ressortissants de l’UE/AELE.

Enfin, aucun élément ne permet de considérer que l’activité de F______ serait susceptible d’avoir des retombées économiques importantes pour la Suisse au sens de l’art. 18 let. a LEI ni encore qu’elle revêtirait un intérêt scientifique ou économique prépondérant au sens de l’art. 21 al. 3 LEI. En effet, il n’est pas démontré que l’apport du précité contribuerait de manière substantielle à des investissements ou influerait la diversification de l’économie régionale et internationale. La recourante a par ailleurs renoncé à faire venir le seul témoin qu’elle avait proposé pour attester, dans un document non signé, de la spécificité de son profil. Par ailleurs, si M______ attestait que F______ « était le seul dans le canton de Genève à posséder un profil de manager BIM spécialisé dans l’architecture paysagère » cela impliquait, a contrario, que hors du canton de Genève, d’autres personnes ont les qualifications et l’expertise requises, confirmant ainsi que la formation n’est pas si unique que ce que la recourante soutient.

Pour le surplus, l’attestation d’M______ insiste sur la contribution du précité au succès de la recourante et à sa renommée, ainsi que sur le professionnalisme du travailleur concerné, éléments non pertinents dans l’analyse des conditions des art. 18, singulièrement 21 LEI.

Dans ces circonstances, l'OCIRT pouvait retenir, sans violer la loi ni commettre d’abus de son pouvoir d’appréciation, que la société n’avait pas démontré se trouver dans l'impossibilité d’embaucher un travailleur correspondant aux exigences du poste sur le marché local ou européen, après avoir entrepris toutes les recherches utiles pouvant être exigées d'elle.

En l’absence du respect de l’ordre de priorité de l'art. 21 al. 1 LEI, qui constitue une condition légale cumulative à d’autres (art. 18 let. c cum 21 al. 1 LEI) en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour avec activité lucrative, la décision de l’OCIRT est conforme au droit.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1’000.- sera mis à la charge de la recourante, qui ne se verra pas allouer d’indemnité de procédure (art. 87 LPA).


* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 17 juin 2024 par A______ SA contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 15 mai 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1’000.- à la charge d’A______ SA ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Marc BALAVOINE, avocat de la recourante, à l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.


Genève, le 

 

 


la greffière :

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.