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Décisions | Chambre civile

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C/7872/2023

ACJC/1007/2024 du 20.08.2024 sur JTPI/4246/2024 ( SDF ) , MODIFIE

Normes : CC.273; CC.176.al1.ch1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/7872/2023 ACJC/1007/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 20 AOÛT 2024

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par la 1ère Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 27 mars 2024, représentée par Me Rachel DUC, avocate, Interdroit avocat-e-s Sàrl, boulevard de Saint-Georges 72, case postale, 1211 Genève 8,

et

Monsieur B______, domicilié ______ [GE], intimé, représenté par Me Isaline OTTOMANO, avocate, Etude Ottomano, rue de Candolle 36, 1205 Genève.

 


EN FAIT

A. Par jugement du 27 mars 2024, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a notamment attribué à A______ la garde principale des enfants C______ et D______ (chiffre 3 du dispositif), maintenu la curatelle d’organisation et de surveillance des relations personnelles (ch. 4), donné acte aux parties de ce qu’elles s’engageaient à poursuivre une médiation parentale auprès de E______ (ch. 5), et réservé à B______ des relations personnelles devant s'exercer, à défaut d'accord contraire des parents, à raison de tous les mercredis, de 09h00 à 19h30, et d'un dimanche sur deux de 10h00 à 18h00, puis, dès le mois de juin 2024, selon les mêmes modalités le mercredi et à raison d'un week-end sur deux, du samedi 18h30 au dimanche 18h30, dès le mois de juillet 2024, selon les mêmes modalités le mercredi et à raison d'un week-end sur deux, du samedi 18h30 au lundi matin et, s'agissant des vacances scolaires, trois jours et trois nuits, définis par les parents avec l'aide de la curatrice, pendant lesquels les enfants seraient en sus avec leur père au mois de juillet 2024, ainsi qu'une semaine entière au mois d'août 2024, les vacances scolaires ultérieures devant être par la suite partagées par moitié entre les parties (ch. 6).

Le Tribunal a par ailleurs attribué les allocations familiales à A______ (ch. 7), condamné B______ à verser en mains de A______ la somme de 420 fr. à titre de contribution complémentaire à l'entretien de C______ et de D______ pour l'année 2023 (ch. 9), ainsi que mensuellement et d'avance, dès le mois de janvier 2024, la somme de 1'000 fr. à titre de contribution à l'entretien de C______ (ch. 10) et 680 fr. à titre de contribution à l'entretien de D______ (ch. 11), constaté que B______ devait à A______ la somme de 42'000 fr. à titre de contribution à son entretien pour l'année 2023 (ch. 12, 1er par.), condamné celui-ci à la lui verser pour autant qu'il ne l'ait pas fait à ce jour (ch. 12, 2ème par.), donné acte à A______ de ce qu'elle considérait que les sommes de 10'758 fr. 20 et 12'467 fr. venaient en déduction de ce montant (ch. 12, 3ème par.), constaté que B______ avait en outre versé en 2023 la somme de 22'500 fr. à titre de contribution à l'entretien de A______ entre juillet et décembre 2023 (ch. 12, 4ème par.), et condamné B______ à verser en mains de A______, mensuellement et d'avance, dès le mois de janvier 2024, la somme de 3'500 fr. à titre de contribution à son entretien (ch. 13).

Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., ont été mis à la charge des parties par moitié chacune. B______ a été condamné à verser 1'500 fr. à l’Etat de Genève et A______, plaidant au bénéfice de l’assistance judiciaire, a été provisoirement dispensée du paiement de sa part en 1'500 fr. (ch. 14). Aucun dépens n’a été alloué (ch. 15).

B. a. Par acte expédié le 15 avril 2024 à la Cour de justice, A______ appelle de ce jugement, reçu le 4 avril 2024, concluant à l'annulation des ch. 6, 12, 1er par., et 13 de son dispositif et, cela fait, à ce qu'un droit de visite soit réservé à B______ devant s'exercer, à défaut d'accord contraire des parents, à raison de tous les mercredis de 9h00 à 19h30 et d'un dimanche sur deux de 10h00 à 18h00, à ce qu'il soit dit que le droit de visite serait élargi en accord avec les parents, par le biais de la médiation auprès de E______, et la curatrice des enfants, en respectant le rythme de ceux-ci, et à ce que la contribution d'entretien en sa faveur soit fixée à 3'750 fr. par mois dès le 1er janvier 2023 et à 3'837 fr. 96 dès le 1er janvier 2024.

Elle sollicite, préalablement, que B______ soit condamné à verser les extraits de l’ensemble de ses comptes bancaires suisses et étrangers entre mai 2023 et avril 2024, et à produire la preuve de son versement de 37'331 fr. 70 sur le compte de F______ SARL entre 2019 et 2021.

b. Par arrêt du 29 avril 2024, la Cour de justice a admis la suspension du caractère exécutoire des chiffres 6, 12, 1er par., et 13, en tant que celui-ci porte sur la période du 1er janvier 2024 au 27 mars 2024, du dispositif du jugement attaqué, et rejeté la requête tendant à l’octroi de l’effet suspensif pour le surplus, les frais liés à ladite décision devant être fixés et répartis dans l’arrêt au fond.

c. B______ conclut à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de son épouse au paiement de tous les frais judiciaires et d'une indemnité de 2'594 fr. 40 en sa faveur à titre de dépens d’appel.

Il produit de nouvelles pièces, soit deux courriels de son employeur du 27 mars 2024 lui faisant parvenir ses fiches de salaires des mois de février et mars 2024, lesdites fiches de salaire, des photographies des enfants prises lors de l’exercice de son droit de visite du 28 avril 2024 et la note d’honoraires de son conseil, s’élevant à 2'594 fr. 40 pour l’activité déployée dans le cadre de la procédure d’appel.

d. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant chacune dans ses conclusions. B______ a versé à la procédure de nouvelles photos des enfants prises le 12 mai 2024.

e. Par courrier du 11 juin 2024, les époux ont été informés de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les éléments suivants résultent de la procédure :

a. A______, née le ______ 1980, et B______ né le ______ 1975, se sont mariés le ______ 2014 à Genève.

Ils sont les parents des mineurs C______ et D______, nés respectivement les ______ 2014 et ______ 2017.

b. Les époux se sont séparés en décembre 2022.

Les enfants vivent depuis lors avec leur mère.

c. Depuis le 1er mars 2023, B______ occupe un appartement de quatre pièces, situé en face de l’immeuble dans lequel se trouve l’appartement conjugal.

d. Le 19 avril 2023, A______ a saisi le Tribunal d'une requête de mesures protectrices de l'union conjugale, concluant notamment à l’attribution de la garde des enfants, à l’octroi en faveur de B______ d’un droit de visite sur ceux-ci « en conformité avec l’intérêt des enfants », à l’attribution des allocations familiales dès le 26 décembre 2022, et à la condamnation de B______ à lui verser des contributions mensuelles d’entretien, dès le 26 décembre 2022, de 1'075 fr. pour C______, 990 fr. pour D______ et 4'237 fr. pour elle-même.

L’épouse a notamment exposé que B______ avait été inconstant depuis la séparation en alternant les périodes où il ne voulait plus parler à ses enfants avec celles où il voulait les voir tous les jours en se rendant à leur domicile et en les effrayant.

e. Par requête de mesures protectrices de l'union conjugale du 5 mai 2023, modifiée le 23 juin 2023, B______ a sollicité que la garde des enfants soit attribuée à A______ et qu’il lui soit réservé un droit de visite devant s’exercer du mardi soir au jeudi matin toutes les semaines, un weekend sur deux du vendredi soir au lundi matin et la moitié des vacances scolaires. Il a également conclu à ce qu’une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles soit instaurée et à ce qu’il soit ordonné aux parties de suivre une médiation parentale et/ou familiale. Sur le plan financier, il a notamment demandé à ce qu’il lui soit donné acte de son engagement à verser des contributions mensuelles d'entretien 670 fr. pour C______, 600 fr. pour D______, et 1'500 fr. pour A______.

f. Par courriel du 6 mai 2023, adressé au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant avec le titre « Demande d'aide pour mes enfants et moi », A______ s’est plainte du comportement de son époux, qu’elle ne reconnaissait plus. Elle subissait depuis neuf mois, quotidiennement et sans interruption, « la peur, les pressions, manipulations, accusations, injures religieuses [et] calomnies ». Elle et les enfants n’étaient pas battus, mais ils vivaient des « violences inouïes, invisibles, silencieuses ». Elle ne désirait pas comprendre ce qui poussait B______ à être « cette personne toxique, manipulatrice, instable et dangereuse aujourd'hui pour les enfants ». Elle ne souhaitait plus qu’il voie C______ et D______, au vu de son comportement instable qui perdurait et de la réaction des enfants qui en avaient désormais peur.

g. Les enfants n’ont que très peu vu leur père durant le mois d'avril 2023, et plus du tout depuis le 31 mai 2023, A______ justifiant cette absence de relations personnelles entre les enfants et leur père par les craintes exprimées par ceux-là à l'égard de celui-ci.

h. Dans son rapport du 16 juin 2024, le Service de protection des mineurs (ci-après : SPMi) a préconisé de prendre acte de l'engagement des époux de suivre une médiation parentale dans le cadre de leur séparation et dans l'intérêt de leurs enfants.

Entendu par le SPMi, B______ a relaté avoir subi de la violence physique, verbale et psychologique de la part de sa femme en présence de leurs enfants. Il était suivi à cet égard depuis août 2022. Il a décrit également des crises de la part de la mère, dont tous les voisins pourraient témoigner. Avant la séparation, la mère avait, selon lui, également usé de violence envers leurs enfants : gifles, fessées, tirage de cheveux et d'oreilles. Depuis deux ans et demi, un changement dans la pratique de la religion musulmane de la mère créait des différends entre les deux parents. B______ s'est décrit comme un père investi et présent depuis la naissance de leurs enfants. Il désirait continuer à exercer ses droits et devoirs de père malgré le divorce. Il souhaitait une garde alternée, mais compte tenu du refus de la mère, il était d’accord de lui concéder la garde avec un droit de visite élargi le concernant. Il voyait les enfants de moins en moins. A______ ne leur permettait pas de maintenir une relation.

A______ a dit au SPMi subir de la violence psychologique de la part de B______. Elle avait vu son mari changer. Il l'avait filmée, à plusieurs reprises, en pleurs sur le sol. Il aurait dit à leur entourage qu'elle faisait des crises et était « folle ». Il proférait des insultes à caractère religieux. A______ décrivait C______ comme un enfant « hypersensible », très affecté par la situation, qui ne voulait plus voir son père. Elle tentait toutefois de le motiver, mais se sentait tiraillée, car elle comprenait aussi le fait que les enfants réclamaient une pause sans voir leur père.

Rencontré le 5 juin 2023, C______ a affirmé que son père avait fait beaucoup de « choses graves ». Il lui avait fait fumer une cigarette. Voir son père le « stress[ait] ». C______ a dit ne pas connaître l’odeur d’alcool mais que son père sentait l’alcool. Ça le dérangeait quand son père venait le voir sur le terrain de foot. Il le lui avait déjà dit. C______ a ajouté qu'il voulait « faire une pause » d'un mois, de deux mois, d'autant de temps dont il aurait besoin, sans voir son père. Son père avait montré une bible à D______ et « il essay[ait] de lui retourner le cerveau ».

En conclusion, le SPMi a retenu que les enfants étaient pris dans un conflit de loyauté majeur, dans le cadre de la séparation parentale, qui impactait leur relation à leur père. Les parents avaient accepté la mise en place d'une médiation parentale. A______ exigeait néanmoins de ne pas se retrouver à des rendez-vous communs avec son époux. Les parents avaient également donné leur accord afin que le SPMi puisse les accompagner sous la forme d'un appui éducatif. La mise en place d'une Action éducative en milieu ouvert (AEMO) avait également été évoquée avec les parents qui s'étaient dits preneurs dans la recherche de solutions en faveur de leurs enfants.

i. Lors de l'audience du 23 juin 2023, B______ a indiqué que ce que décrivait C______ était déformé. Il donnait l'exemple de la cigarette en précisant qu'il s'agissait en réalité d'un « pop », soit l'équivalent d'une cigarette électronique sans nicotine, parfumée, qu'on voyait souvent dans les mains des ados, qu'il s'agissait d'une démarche éducative pour lui faire comprendre qu'il ne fallait pas qu'il le fasse, mais il reconnaissait spontanément que ce n'était pas nécessairement une démarche très intelligente avec un enfant asthmatique. Il a encore évoqué la graduation récente des enfants au jujitsu. Il s'y était rendu, mais les enfants s'étaient cachés derrière leur mère et ne lui avaient pas dit bonjour. Il était parti au bout de 15 à 20 minutes en raison du malaise.

A______ a indiqué que les enfants n'avaient pas vu leur père au mois de juin au motif qu'ils étaient terrorisés. Elle les avait toujours encouragés à appeler leur père, mais ils refusaient. C______ et elle avaient été marqués par l’épisode de la cigarette et elle en avait pleuré pendant une heure. Lors de la graduation, les enfants étaient en larmes. C______ n'avait pas pu suivre son cours. Il était en pleurs. D______ avait failli « se faire pipi dessus ». A______ avait bloqué le numéro de B______ sur le téléphone de C______, parce que celui-ci, stressé, venait vers elle en pleurant lorsqu'il recevait des messages de son père.

Les parties ont confirmé souhaiter une médiation parentale. Elles avaient toutes deux pris contact avec E______.

j. Par ordonnance rendue le 27 juin 2023 sur mesures provisionnelles, le Tribunal a notamment attribué à A______ la garde des enfants C______ et D______, instauré une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles, donné acte aux parties de ce qu'elles s'engageaient à entreprendre une médiation parentale auprès de E______, réservé à B______ des relations personnelles devant être mises en œuvre aussi rapidement que possible et devant s'exercer, sauf objection des curateurs au moment du passage à l'étape suivante, à raison d'une heure hebdomadaire au Point Rencontre, en modalités « 1 pour 1 » deux semaines consécutives, à raison d'une heure et demi hebdomadaire au Point Rencontre, en modalités « accueil », lors des deux semaines suivantes, à raison d'une journée hebdomadaire au Point Rencontre, en modalités « passage », lors des deux semaines suivantes, à raison du samedi matin au dimanche soir au Point Rencontre, en modalités « passage », lors des quatre semaines suivantes, et à raison ensuite d'un weekend sur deux, du vendredi soir au lundi matin, sans passage au Point Rencontre. Le Tribunal a en outre attribué à A______ les allocations familiales et condamné B______ à lui verser, mensuellement et d'avance, dès le mois de juillet 2023, 780 fr. à titre de contribution à l'entretien de C______, 680 fr. à titre de contribution à l'entretien de D______ et 4'200 fr. à titre de contribution à son entretien.

Sur appel de l’époux, la Cour de justice a, par arrêt du 3 octobre 2023, modifié la contribution due à l’entretien de A______ dès le mois de juillet 2023, réduisant son montant mensuel à 3'750 fr.

k. Dans l’intervalle, sur requête de la curatrice, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant a autorisé, le 4 août 2023, le maintien des relations personnelles entre C______ et D______ avec leur père au sein du Point Rencontre, en modalités « 1 pour 1 » pour une durée allant jusqu'au 28 août 2023 au minimum, dans l'attente de la mise en place d'un suivi thérapeutique avec G______ [consultations familiales]. Cette requête était motivée par le fait que la relation entre C______ et son père était si difficile qu'il n'était pas envisageable de passer en mode « accueil ». C______ était dans un état émotionnel préoccupant et adressait sans cesse des reproches à son père. Une reprise de lien dans un lieu thérapeutique s'imposait.

l. Par courriers adressés au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant les 17 et 25 août 2023, la curatrice a préconisé de suspendre les relations personnelles entre B______ et les enfants, d'enjoindre les parents à entreprendre un travail de médiation à E______, ainsi qu’un travail thérapeutique chez G______ afin de travailler en profondeur les relations intrafamiliales, et d'instaurer une reprise de lien par l'intermédiaire du Point Rencontre, d'entente entre la curatrice, E______ et G______, en fonction de l'avancement du processus thérapeutique. Cette requête était motivée par l'état physique et psychique des enfants, notamment C______, résultant du conflit parental ouvert, massif et exacerbé. Seules deux visites en modalités « 1 pour 1 » avaient été organisées à cette date. Les craintes de A______, notamment, alimentaient l'inquiétude et la loyauté des enfants.

m. Par courrier du 4 septembre 2023, constatant que l'exercice des relations personnelles au travers du Point Rencontre n'avait eu comme conséquence que de détériorer les rapports entre lui et les enfants, B______ a accepté de renoncer provisoirement à l'exercice des relations personnelles.

n. Par ordonnance du 15 septembre 2023, le Tribunal a suspendu provisoirement les relations personnelles entre B______ et les enfants, enjoint les parties à entreprendre une médiation parentale auprès de E______ et un travail thérapeutique chez G______ afin de travailler en profondeur les relations intrafamiliales et dit que la reprise des relations personnelles entre B______ et les enfants s'organiserait au Point Rencontre, d'entente entre les curateurs, E______ et G______, en fonction de l'avancement des processus susmentionnés.

Le Tribunal a indiqué qu’il était préoccupé par la manière dont les enfants étaient confrontés au conflit parental. Il donnait suite aux préconisations des curateurs puisque les deux parents y consentaient, avec la précision qu'il attendait des parties, pour le bien de leurs enfants, qu'elles fassent tout leur possible pour que cette situation ne perdure pas.

o. Dans son rapport du 28 septembre 2023, le Point Rencontre a indiqué que quatre visites avaient été exercées les 12, 19, 26 juillet et 2 août 2023.

o.a Avant la visite du 12 juillet 2023, A______ avait contacté le Point Rencontre pour partager ses inquiétudes et se renseigner sur le lieu et son fonctionnement. A l'annonce de l'arrivée de son père, C______ avait pleuré et s'était accroché à sa mère qui avait tenté de le rassurer. D______ en avait fait de même. L'intervenante leur avait demandé de la suivre tout en les rassurant. Les enfants avaient lâché leur mère et avaient suivi l'intervenante. En entrant dans la salle de visite, B______ s'était levé et était venu accueillir ses enfants en leur ouvrant les bras. Voyant ses enfants pleurer, il les avait questionnés sur la raison de ces pleurs. D______ s'était rapidement calmée et s'était assise à côté de son père autour de la table. C______ avait continué de pleurer et avait dit à son père qu'il ne voulait ni le voir ni lui parler.

L'intervenante avait proposé à B______ de laisser son fils se calmer et tenté à son tour de le rassurer. L'enfant s'était peu à peu calmé. Rapidement, D______ s'était rapprochée de son père, en lui faisant des sourires. Durant toute la visite, elle avait dessiné des cœurs en écrivant "D______ et papa".

C______ avait regardé les interactions père-fille. Au cours de la visite, il avait exprimé sa colère à l'égard de son père sur différentes choses, notamment un événement passé sur un terrain de foot et un problème d'ordre religieux. Alors que son père s'excusait et tentait de s'expliquer, C______ avait dit à son père: « de toute façon ici tu diras toutes des choses bien et après tu changeras d'avis, c'est toujours comme ça ».

A l'issue de la période de visite, B______ avait dit au revoir à sa fille. Père et fille s'étaient fait des câlins et des bisous. Lorsque B______ avait demandé à dire au revoir à son fils, ce dernier avait refusé.

o.b Lors de la visite du 19 juillet 2023, les enfants étaient arrivés « collés » à leur mère. A______ avait expliqué que C______ avait vomi dans la voiture en lien avec le stress de la visite, qu'il ne souhaitait pas voir son père et qu'elle avait mis deux jours à le préparer.

L'intervenante avait rappelé à C______ qu'elle serait présente toute la visite et avait accompagné les enfants auprès de leur père. Ils s'étaient installés vers lui. Rapidement, C______ avait dit qu'il ne souhaitait pas lui parler. Il avait commencé à énumérer des reproches à son père, soit que celui-ci n'acceptait pas sa religion et qu'il n'avait jamais fait des choses bien pour lui.

D______ avait investi les activités que B______ avaient apportées. C______ avait refusé de participer en répétant les reproches à son père. Il s'était positionné vers la fenêtre de la salle et avait insisté pour partir. Il s'était mis à pleurer et à supplier. En voyant son frère dans cet état, D______ s'était mise à pleurer et à consoler son frère. Au vu de l'état émotionnel des enfants, A______ avait été contactée pour rechercher les enfants.

o.c Lors de la visite du 26 juillet 2023, A______ avait indiqué à l'intervenant que son fils s'était senti mal durant le trajet. Lors des retrouvailles, les enfants n'avaient pas salué leur père et C______ avait exprimé qu'il ne souhaitait pas être assis près de lui. Puis, les deux enfants avaient dit qu'ils ne voulaient pas le voir. B______ avait alors présenté à sa fille le cahier de dessins sur lequel elle avait fait des cœurs lors de la dernière visite. D______ avait cherché à déchirer le cahier.

o.d Lors de la visite du 2 août, A______ a expliqué que cela avait été très compliqué de faire venir les enfants (pleurs, maux de ventre, refus exprimés verbalement). D______ et C______ n'avaient pas répondu au « bonjour » de leur père. Les enfants avaient répété qu'ils voulaient arrêter de venir au Point Rencontre et C______ avait demandé à plusieurs reprises d'appeler sa mère. Les enfants n'avaient ensuite plus voulu rester dans la salle en présence de leur père. D______ avait tenu des propos en rapport avec la religion.

o.e La visite du 9 août 2023 n'avait pas été exercée, les enfants ayant refusé de rentrer dans les locaux. La visite du 16 août 2023 avait été annulée officiellement.

p. Dans son rapport du 3 octobre 2023, le Service d'évaluation et d'accompagnement de la séparation parentale (ci-après : SEASP) a préconisé de confier la garde de fait des enfants à A______, d'ordonner aux parents d'effectuer un travail de reprise de lien entre père et enfants dans un lieu thérapeutique, puis de fixer un droit de visite à B______ selon les modalités proposées par la curatrice en fonction de l'évolution de la situation, de maintenir la curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles et d'exhorter les parents à poursuivre la médiation entamée à E______.

Il résulte de ce rapport que les enfants ont été témoins des conflits extrêmes et récurrents entre leurs parents, durant de nombreux mois. Ils avaient assisté aux insultes, aux cris, aux pleurs, aux accusations et rien ne leur avait été épargné des problèmes du couple, malgré leur très jeune âge. C______ et D______ étaient les premières victimes du comportement de leurs parents, alors que chacun d'eux continuait de rejeter l'entière responsabilité sur l'autre. Dans un tel contexte, il était difficile d'imaginer qu'ils auraient pu être épargnés d'un conflit de loyauté extrême lors de la séparation parentale.

A______ démontrait un positionnement et surtout l'utilisation d'un langage disproportionné face à tout évènement en relation avec le père, n'hésitant pas à dire qu'ils étaient « terrorisés », « traumatisés » ou « retenus contre leur gré ». Cette difficulté à gérer ses propres émotions créait une ambiance angoissante et stressante. Au vu de ses propres inquiétudes et reproches envers B______, l'amenant à refuser un entretien commun, à ne pas lui dire bonjour dans la rue ou à changer de trottoir en le voyant, il semblait difficile d'attendre des enfants qu'ils soient eux-mêmes prêts à le rencontrer, à lui parler et à se sentir rassurés.

Quant à B______, il ne semblait pas en mesure de prendre conscience de sa propre responsabilité et tendait à minimiser les évènements ou les paroles qu'il avait pu tenir en présence des enfants. Il estimait ainsi que ses propos et ses actes ne pouvaient pas expliquer les difficultés relationnelles présentes.

Dans les faits, il apparaissait que les parents étaient tous deux investis et présents pour la prise en charge des enfants avant la séparation. Désormais, le lien entre père et enfants était rompu depuis plusieurs mois et malgré l'intervention de la curatrice et du Point Rencontre, il n'avait pas été possible à ce jour de faire évoluer la situation. Dès lors, au vu de la situation actuelle et du fait que les parents s'accordaient pour que la garde des enfants soit confiée à leur mère, il était proposé que l'organisation actuelle puisse perdurer.

Concernant les relations entre père et enfants, il était impossible de projeter une évolution pour l'avenir. En effet, même les visites au Point Rencontre avaient dû être interrompues, les enfants présentant trop de mal-être avant, pendant et à la suite de celles-ci. Un travail thérapeutique pour accompagner la reprise de lien était donc indispensable et allait être mis en place avec l'aide de la curatrice. Cette dernière pourrait suivre la bonne évolution de ce travail et faire des propositions à l'autorité compétente pour faire évoluer les modalités de visite. Partant, la curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles devait être confirmée.

Les parents présentaient tous deux d'importantes difficultés personnelles dans le cadre de cette séparation. Leur suivi psychologique respectif, à H______ et I______ [associations], était principalement centré sur la violence vécue durant la vie de couple. Il convenait que ces suivis puissent être poursuivis et qu'ils puissent aborder, de manière plus globale, la différenciation entre le vécu en couple et le rôle de parent, ou encore les blessures toujours présentes et la gestion des émotions. En parallèle, le travail de médiation entamé auprès de E______ devait se poursuivre, dans le but de permettre progressivement une reprise de la communication parentale.

La situation familiale était inquiétante au vu de sa cristallisation particulièrement rapide, notamment en terme de polarisation des relations entre parent et enfants. Malgré les mesures prises très rapidement par le Tribunal et par le réseau de professionnels, la situation avait continué à se dégrader au niveau des liens entre père et fils notamment. Le fait que C______ présentait une lecture totalement négative de son vécu avec son père et également une vision erronée de la réalité était particulièrement préoccupant. Ainsi, si une évolution rapide des liens entre père et enfants, dans le cadre de l'accompagnement thérapeutique n'était pas perceptible, alors la question d'une expertise psychiatrique du fonctionnement familial pourrait être posée.

q. Par courrier du 7 décembre 2023, la curatrice a indiqué au Tribunal que la reprise de lien dans un lieu thérapeutique avait pu débuter fin septembre 2023 avec l'intervention de J______ [centre de consultations familiales]. A fin novembre, J______ considérait que la médiatisation du droit de visite n'avait plus lieu d'être et que le Point Rencontre n'était plus nécessaire. C______ avait retrouvé progressivement une complicité avec son père et D______ s'était également rapprochée et acceptait ses manifestations d'affection. Les parents reconnaissaient les résultats et bienfaits des différentes interventions de médiation et de soutien. Ils aspiraient à une coparentalité apaisée et organisaient petit à petit des moments permettant au père de se réapproprier son rôle.

r. Par ordonnance du 17 janvier 2024, le Tribunal a annulé l’ordonnance de mesure provisionnelles du 15 septembre 2023 s’agissant de la suspension des relations personnelles du père avec les enfants et des modalités de reprise de celles-ci. Cela fait, il a réservé à B______ des relations personnelles avec les enfants devant s'exercer provisoirement d'entente avec A______ et les curateurs.

s. Par courrier du 14 mars 2024, la curatrice a souligné la bonne collaboration des deux parents et leur volonté de voir s'installer une forme de « normalité » dans les relations du père avec les enfants. Les deux enfants évoluaient bien et C______ avait d'excellents résultats scolaires. La situation était stable et les parties étaient dans un processus de consolidation des liens.

Le travail de médiation, via E______, portait ses fruits et les deux parents semblaient dans une bonne dynamique. Ils adoptaient une politique des petits pas, A______ étant souvent à l'initiative de petits moments où B______ reprenait une place dans le quotidien des enfants. Actuellement, ce dernier voyait les enfants, tous les mercredis dès le déjeuner et les accompagnaient à leurs activités respectives. Il avait aussi la possibilité de les rencontrer le dimanche en journée. A______ encourageait d'autres moments, en fonction des évènements et des possibilités.

Toutefois, si un rapprochement certain entre le père et ses enfants était en cours, la curatrice estimait qu'il était prématuré d'envisager une prise en charge excédant la demi-journée. Les enfants n’étaient pas été suffisamment prêts pour un droit de visite usuel et encore moins pour une garde partagée. Il était nécessaire d'augmenter progressivement le droit de visite du père, afin que chacun soit suffisamment rassuré et à l'aise. D'ailleurs, les deux parents s’étaient engagés auprès du médiateur à respecter le rythme des enfants.

t.a Dans ses conclusions du 21 mars 2024, A______ a notamment invité le Tribunal à maintenir la curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles, à octroyer un droit de visite à B______ en faveur des enfants à raison des mercredis, de 12h00 à 13h30 pour C______ et de 12h00 à 16h00 pour D______, d'un dimanche sur deux, de 11h00 à 16h00, de deux après-midis durant les vacances scolaires, en sus du mercredi et d'un dimanche sur deux.

Sur le plan financier, elle a demandé à ce que les contributions d'entretien dues par son époux, pour la période allant du 26 décembre 2022 au prononcé du jugement, correspondent aux montants fixés par ordonnance du Tribunal du 27 juin 2023 et arrêt de la Cour de justice du 3 octobre 2023, à ce qu’il soit constaté que les contributions d'entretien qui auraient dû être versées du 26 décembre 2022 au 30 juin 2023, soit 31'260 fr., sont compensées par les montants retirés par elle sur les comptes épargne des enfants le 2 mai 2023 (4'860 fr. et 3'480 fr.) et par les montants versés en sa faveur par B______ durant cette même période (10'758 fr .20 + 12'467 fr. à titre de loyer), et à ce que B______ soit condamné à lui verser, à compter du prononcé du jugement, allocations familiales en sus, 1'002 fr. par mois pour l'entretien de C______, 654 fr. par mois pour l’entretien de D______, portés à 854 fr. par mois aux 10 ans de l’enfant, et 3'837 fr. 96 par mois pour son propre entretien.

t.b B______ a quant à lui conclu à ce que ses relations personnelles avec les enfants soient fixées dans l'immédiat et pour une durée d'un mois, à raison de tous les mercredis, de 09h00 à 20h30, et d'un dimanche sur deux de 10h00 à 18h00, puis à raison des mêmes modalités les mercredis et un week-end sur deux, du samedi 18h30 au dimanche 18h30, puis aux alentours du début des vacances d'été, selon les mêmes modalités le mercredi, mais à raison d'un week-end sur deux, du samedi 18h30 au lundi matin, ainsi que pendant la moitié des vacances scolaires.

S'agissant des aspects financiers, B______ s'est engagé à verser des contributions mensuelles d’entretien de 1'000 fr. pour C______, 680 fr. pour D______ et 1'500 fr. pour son épouse dès l'entrée en force du jugement.

t.c B______ a indiqué que les instants passés avec les enfants étaient très courts et que c'était très difficile pour lui. Ils se passaient très bien avec D______, mais c'était plus difficile avec C______. Il fallait toujours un petit moment pour se ré-apprivoiser, mais ensuite « ça rigolait » et ça se passait bien.

A______ a considéré que la situation actuelle était presque miraculeuse compte tenu de celle vécue en juin 2023. Les enfants ne pleuraient plus et ils allaient bien. Les choses évoluaient dans le bon sens. Elle avait beaucoup travaillé avec E______, avec les enfants, mais sans son époux. Elle se fiait à son instinct et il lui était arrivé plusieurs fois d'aller au-delà de ce que qui était suggéré dans le cadre de la médiation. Elle appliquait, au vu de la fragilité de la situation, la méthode des « petits pas » pour aller au rythme des enfants.

t.d Le Tribunal a gardé la cause à juger, à l’issue de l’audience du 21 mars 2024.

u. Dès le mois d’avril 2024, B______ a exercé son droit de visite tous les mercredis de 9h00 à 19h30 et un dimanche sur deux de 10h00 à 18h00.

Selon A______, les visites ne se dérouleraient pas bien. Les enfants étaient en conflit permanent avec l’intimé, ce dernier ne sachant pas comment s’y prendre. Le mercredi 24 avril 2024, D______ l’avait appelée en larmes pour qu’elle vienne la chercher, ce qu’elle avait fait à 12h30.

B______ conteste ces allégués, soutenant que les visites se passent bien. Lui et les enfants partageaient des moments de complicité. Il produit plusieurs photographies des enfants prises lors des visites des dimanches 28 avril et 12 mai 2024, montrant les enfants sereins et heureux de participer aux activités proposées par leur père.

v. La situation financière des parties s’établit comme suit :

v.a B______ est employé de F______ SARL depuis 36 ans à un taux d'activité de 100%. D’après son certificat de salaire, il a perçu en 2023 un salaire net de 130'279 fr, soit environ 10’860 fr. par mois.

Il ressort de ses décomptes bancaires qu'il a reçu en sus de son employeur les sommes de 20'000 fr. le 13 février et de 17'331 fr. 70 le 24 mars 2023. Selon une attestation écrite de F______ Sàrl du 4 juillet 2023, ces montants correspondent au retrait par B______ des sommes dont il disposait sur un compte courant ouvert auprès de la société.

Les charges mensuelles de B______, hors impôts, telles que retenues par le Tribunal et non contestées en appel, se montent jusqu’au 31 décembre 2023 à 4'790 fr., comprenant le montant de base OP (1'200 fr.), le loyer (2'340 fr.), K______ (22 fr. 75), sa prime d'assurance-maladie (473 fr.), un forfait assurances/télévision/internet (200 fr.), le remboursement d'un prêt (480 fr. 40) et ses frais de transport (70 fr.). Dès le 1er janvier 2024, elles s’élèvent à 4’820 fr., sa prime d’assurance-maladie ayant augmenté de 37 fr. 75 (510 fr. 75 – 473 fr.).

La charge fiscale de l’époux, non contestée, est d’environ 1'000 fr. par mois en 2023 et 900 fr. par mois en 2024.

v.b A______ est titulaire d'une licence en communication et d'un master en marketing et management. Elle n’a eu que peu d’activité lucrative depuis son arrivée en Suisse en 2012. Elle recherche actuellement un travail, démontrant avoir dans cette optique effectué diverses offres, sans succès. Elle ne perçoit pas d'indemnités de chômage et bénéficie de l'aide de l'Hospice général.

Ses charges mensuelles, hors impôts, telles que retenues par le Tribunal, s'élèvent jusqu’au 31 décembre 2023 à environ 3'420 fr., comprenant le montant de base OP (1'350 fr.), son loyer (1'288 fr.), sa prime d'assurance-maladie (508 fr. 90 fr.), un forfait assurances/télévision/internet (200 fr.) et ses frais de transport (70 fr.), puis à 3'510 fr., sa prime d’assurance-maladie mensuelle étant désormais de 549 fr. 55 et l’épouse devant assumer des frais médicaux non remboursés de 30 fr. par mois, ainsi que 21 fr. par mois pour K______. Le Tribunal a en sus estimé la charge fiscale de l’épouse à 50 fr. par mois pour l’année 2023.

A______ allègue des charges mensuelles, hors impôts, de 3'505 fr. [recte : 3'460 fr.], soit 1'350 fr. de montant de base OP, 1'288 fr. de loyer, 594 fr. 55 [recte : 549 fr. 55] de prime d’assurance-maladie, 39 fr. 08 de frais médicaux non remboursés, 20 fr. 65 de K______, 70 fr. de transport, 36 fr. 66 d’assurance-ménage, 27 fr. 92 de SERAFE et 78 fr. 85 d’abonnements téléphonie mobile et internet. Elle estime en outre sa charge fiscale à 333 fr. par mois.

Sa prime mensuelle d’assurance-maladie obligatoire était de 508 fr. 90 en 2023. Elle a augmenté à 549 fr. 55 en 2024.

v.c Les primes d’assurance-maladie des enfants totalisent 364 fr. par mois en 2023 et 389 fr. par mois en 2024.

w. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré qu’il se justifiait d’élargir le droit de visite du père sur les enfants, dès lors que le lien avait été renoué, que les enfants n'avaient, depuis la séparation, jamais été confrontés auprès de leur père à un autre danger que celui du discours négatif à l'égard de leur mère en raison du conflit parental – danger auquel ils étaient au demeurant aussi confrontés chez la mère –, et que le maintien d’un droit de visite restreint aurait réduit les chances de faire progresser sérieusement la complicité entre le père et ses enfants et aurait perpétué le message donné aux enfants depuis décembre 2022, à savoir qu'ils ne seraient pas en sécurité auprès de leur père. Ce n'était qu'en favorisant un élargissement des relations personnelles plus soutenu, que la situation, dont les deux parents étaient responsables, aurait pu se normaliser. Plus souvent les enfants verraient leur père, plus rapidement ils seraient en mesure de se sentir bien avec lui, le tout moyennant que A______ leur insuffle la confiance nécessaire et que B______ joue le rôle du père aimant, soutenant et concerné qu'il affirmait légitimement vouloir jouer.

Sur le plan financier, le Tribunal n’a pas retenu de revenu hypothétique à l’encontre de l’épouse. Il a fixé les contributions dues par le père à l’entretien des enfants du 1er janvier au 31 décembre 2023 à 780 fr., respectivement 680 fr., ce qui représentait un total de 17'520 fr. Après déduction des montants retirés par l’épouse sur les comptes des enfants et des montants versés par B______ en 2023, ce dernier devait encore un solde de 420 fr. à tire de contributions d’entretien des enfants pour 2023.

Pour fixer la contribution d’entretien de l’épouse pour l’année 2023, le Tribunal a déduit du salaire mensuel de B______, estimé à 10'857 fr., ses charges hors impôts (4'790 fr.), les contributions d’entretien dues alors aux enfants (780 fr. + 680 fr.) et les charges hors impôts de A______ (3'417 fr.), ce qui donnait un solde mensuel de 1'190 fr. Dès lors que sa charge d’impôts était estimée à 1'000 fr. par mois et celle de son épouse à 50 fr. par mois, la contribution due à l’entretien de celle-ci était arrêtée à 3'500 fr. par mois, ce qui annualisé représentait 42'000 fr.

Pour l’année 2024, la contribution à l’entretien de C______ était augmentée à 1'000 fr. par mois, puisqu’il avait atteint l’âge de 10 ans. Celle de D______ restait inchangée (680 fr. par mois). Quant à celle de l’épouse, il n’y avait pas lieu de la modifier, puisqu’après paiement de ses charges, hors impôts, des pensions dues aux enfants et d’une contribution due à l’entretien de A______ de 3'500 fr., B______ disposait d’un solde mensuel de l’ordre de 850 fr. (10'857 fr. - 4'820 fr. - 1'680 fr. - 3'500 fr. = 857 fr.) qui lui aurait servi à assumer ses impôts, estimés à 900 fr. par mois.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les jugements de mesures protectrices de l'union conjugale, considérés comme des décisions provisionnelles au sens de l'art. 308 al. 1 let. b CPC (ATF 137 III 475 consid. 4.1), dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Interjeté en l'espèce dans le délai utile de dix jours, (art. 142 al. 1 et 3, 271 let. a et 314 al. 1 CPC), suivant la forme écrite prescrite par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC), à l'encontre d'une décision rendue sur mesures protectrices de l'union conjugale, dans une cause de nature non patrimoniale dans son ensemble, puisque portant notamment sur la réglementation des relations personnelles (cf. arrêts du Tribunal fédéral 5A_781/2015 du 14 mars 2016 consid. 1 et 5A_331/2015 du 20 janvier 2016 consid. 1), l'appel dirigé contre les chiffres 6, 12, 1er par., et 13 du dispositif du jugement du 27 mars 2024 est recevable.

Sont par ailleurs recevables la réponse de l’intimé (art. 314 al. 1 CPC) ainsi que les écritures subséquentes et spontanées des parties, déposées conformément au droit inconditionnel de réplique (ATF 146 III 97 consid. 3.4.1).

1.2 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), mais uniquement dans la limite des griefs qui sont formulés (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4).

La procédure sommaire étant applicable, la cognition du juge est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit (ATF 138 II 636 consid. 4.3.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_812/2015 du 6 septembre 2016 consid. 5.2), en se fondant sur les moyens de preuve immédiatement disponibles, tout en ayant l'obligation de peser les intérêts respectifs des parties
(ATF 139 III 86 consid. 4.2; 131 III 473 consid. 2.3).

1.3 Les maximes d'office et inquisitoire illimitée sont applicables aux questions concernant les enfants mineurs (art. 55 al. 2, 58 al. 2 et 296 CPC).

En ce qui concerne la contribution d'entretien en faveur du conjoint, la procédure est soumise à la maxime de disposition (ATF 128 III 411 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_831/2016 du 21 mars 2017 consid. 4.4) et à la maxime inquisitoire sociale (arrêt du Tribunal fédéral 5A_645/2016 du 18 mai 2017 consid. 3.2.3 et les références).

1.4 Les éléments nouvellement fournis devant la Cour en lien avec les relations personnelles du père avec les enfants sont recevables, étant rappelé que dans les causes de droit de la famille concernant des enfants mineurs, tous les faits et moyens de preuve nouveaux sont admis en appel, même si les conditions prévues par l'art. 317 al. 1 CPC ne sont pas réalisées (ATF 144 III 349 consid. 4.2).

Les fiches de salaires des mois de février et mars 2024 de l’intimé sont également recevables, celui-ci ayant reçu ces documents de son employeur après le 21 mars 2024, date à laquelle la cause a été gardée à juger par le Tribunal (art. 317 al. 1 CPC).

2. L’appelante demande, pour la première fois en appel, la production par son époux des extraits de l’ensemble de ses comptes bancaires suisses et étrangers entre mai 2023 et avril 2024, et de la preuve de son versement de 37'331 fr. 70 sur le compte de son employeur entre 2019 et 2021, ce afin de déterminer ses revenus. Selon l’appelante, le montant de 37'331 fr. 70 reçu en février et mars 2023 sur le compte bancaire de l’époux constituerait une rémunération – cachée - et non pas le remboursement de sommes détenues par l’époux sur un compte courant ouvert auprès de son employeur.

2.1 Conformément à l'art. 316 al. 3 CPC, l'instance d'appel peut librement décider d'administrer des preuves. Le juge peut, par une appréciation anticipée des preuves déjà disponibles, refuser d'administrer une preuve supplémentaire offerte par une partie s'il considère que celle-ci serait impropre à ébranler sa conviction (ATF 141 I 60 consid. 3.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_82/2022 du 26 avril 2022 consid. 5.1 et les références citées).

L'autorité jouit d'un large pouvoir d'appréciation (ATF 142 III 413 consid. 2.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_37/2017 du 10 juillet 2017 consid. 3.1.2).

2.2 En l’espèce, la question de savoir si les conclusions préalables de l’appelante, formulée pour la première fois devant la Cour, sont recevables peut rester indécise, dans la mesure où il n’y serait en tout état de cause pas donné suite.

En effet, le dossier contient l’avis de taxation du couple pour l’année 2021, les certificats de salaire de l’intimé pour les années 2022 et 2023, ses fiches de salaires pour les mois de janvier à mars 2024 et l’extrait de son compte bancaire pour la période allant de novembre 2022 à mai 2023, de sorte que la Cour s’estime suffisamment renseignée sur les revenus réalisés par l’intimé depuis la séparation des parties en décembre 2022. Par ailleurs, même s’il était ordonné à l’intimé de produire des justificatifs établissant le versement des sommes de 20'000 fr. et 17'331 fr. 70 auprès de son employeur entre 2019 et 2021, l’éventuelle non-production de ces documents ne modifierait pas l'appréciation de la Cour sur sa situation financière. La valeur probante des autres pièces au dossier, et notamment celle de l’attestation de l’employeur du 4 juillet 2023 - certifiant que ces montants ne constituent pas une rémunération - et celle du certificat de salaire 2023 - ne faisant pas état de ses sommes -, l’emporteraient. La cause est soumise à la procédure sommaire dont le but est de favoriser un règlement rapide des litiges sur la base d'un examen limité à la vraisemblance des faits.

3. L’appelante reproche au premier juge de s’être écarté des recommandations de la curatrice et d’avoir prévu un élargissement du droit de visite trop rapide et rigide.

3.1.1 L'art. 273 al. 1 CC prévoit que le père ou la mère qui ne détient pas l'autorité parentale ou la garde ainsi que l'enfant mineur ont réciproquement le droit d'entretenir les relations personnelles indiquées par les circonstances.

Le droit aux relations personnelles est considéré à la fois comme un droit et un devoir des parents, mais aussi comme un droit de la personnalité de l'enfant, qui doit servir en premier lieu l'intérêt de celui-ci; dans chaque cas, la décision doit donc être prise de manière à répondre le mieux possible à ses besoins, l'intérêt des parents étant relégué à l'arrière-plan (ATF 142 III 617 consid. 3.2.3; 141 III 328 consid. 5.4; 131 III 209 consid. 5; arrêt du Tribunal fédéral 5A_177/2022 du 14 septembre 2022 consid. 3.1.1). Le rapport de l'enfant avec ses deux parents est essentiel et peut jouer un rôle décisif dans le processus de sa recherche d'identité (ATF 130 III 585 consid. 2.2.2; 127 III 295 consid. 4a; arrêt du Tribunal fédéral 5A_699/2021 du 21 décembre 2021 consid. 6.1).

3.1.2 Pour trancher le sort des enfants, le juge peut avoir recours aux services de protection de l'enfant ou de la jeunesse pour demander un rapport sur la situation familiale, une enquête sociale pouvant avoir son utilité en cas de situation conflictuelle et de doute sur la solution adéquate pour les enfants
(ATF 142 III 617 précité consid. 3.2.3; arrêts du Tribunal fédéral 5A_277/2021 du 30 novembre 2021 consid. 4.1.2; 5A_381/2020 du 1er septembre 2020 consid. 4.1).

Le juge n'est pas lié par les conclusions du SEASP ou du SPMi. Le rapport de ces services (lequel constitue une preuve au sens des art. 168 et 190 CPC) est soumis, à l'instar des autres preuves, au principe de la libre appréciation consacré par l'art. 157 CPC (Hafner, Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 2017, n° 4 ad art. 190 CPC; Weibel/Naegeli, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2016, n° 8 ad art. 190 CPC). Cependant, une portée particulière peut être conférée au rapport d'évaluation sociale, qui prend en compte toute une série d'éléments objectifs, basés sur les déclarations des intervenants scolaires, médicaux ou sociaux; il contient également des appréciations subjectives, lesquelles dénotent souvent une grande expérience en la matière, mais ne sauraient remplacer le pouvoir de décision du juge (ACJC/899/2023 du 29 juin 2023 consid. 3.1.2; ACJC/596/2023 du 9 mai 2023 consid. 3.1.4; ACJC/321/2023 du 7 mars 2023 consid. 5.1).

3.2 En l’espèce, il résulte des rapports des SPMi et SEASP des 16 juin et 3 octobre 2023 que les parents étaient tous deux investis dans la prise en charge des enfants avant la séparation, mais qu’à la suite de celle-ci, ils présentaient tous deux d’importantes difficultés personnelles. Les enfants avaient été pris dans un conflit de loyauté majeur dans le cadre de la séparation parentale, ce qui avait impacté la relation avec leur père. Ils avaient été témoins des litiges récurrents entre les parents, soit d’insultes, cris, pleurs et accusations de l’un(e) envers l’autre. La mère faisait notamment preuve d’un langage disproportionné face à tout événement en relation avec le père, ce qui créait une ambiance angoissante pour les enfants. Au vu de ses inquiétudes et des reproches envers son époux, qui l’amenait à refuser un entretien commun, à ne pas le saluer dans la rue ou à changer de trottoir en le voyant, on ne pouvait attendre des enfants qu’ils soient eux-mêmes prêts à le rencontrer, à lui parler et à se sentir rassurés. Quant à l’intimé, il rencontrait des difficultés à prendre conscience de sa propre responsabilité, tendant à minimiser les événements ou les paroles qu’il avait pu tenir en présence des enfants. Les parents n’avaient pas été à même de protéger les enfants du conflit parental, créant ainsi un climat de reproches et de méfiance, duquel les enfants n’étaient pas capables, au vu de leur âge, de se distancier.

Les relations de l’intimé avec les enfants se sont ainsi détériorées quelques mois après la séparation des époux. Elles ont été totalement interrompues d’avril à juin 2023 et difficiles durant l’été 2023, seules quatre rencontres ayant pu avoir lieu au Point de Rencontre. Le droit de visite a été à nouveau interrompu à la mi-août 2023 dès lors que les enfants refusaient catégoriquement de voir leur père.

L’intervention des tiers, notamment le processus de médiation, a par la suite permis aux parents de progresser dans leur coparentalité, ce qui a favorisé la reprise des relations personnelles entre le père et les enfants à la fin septembre 2023. Les tensions se sont apaisées, permettant aux mineurs de partager davantage de moments avec leur père. Dès la fin du mois de novembre 2023, les enfants ont retrouvé progressivement une complicité avec l’intimé.

Il ressort du courrier de la curatrice du 14 mars 2024 que les mineurs évoluent bien et que l’aîné a d’excellents résultats scolaires. A cette date, le père voyait les enfants tous les mercredis dès le déjeuner et les accompagnait à leurs activités respectives ; il avait également la possibilité de les rencontrer le dimanche en journée. La curatrice a alors estimé qu’il était prématuré d’envisager une prise en charge des enfants par l’intimé excédant la demi-journée.

A l’instar du Tribunal, la Cour considère néanmoins qu’un élargissement du droit de visite, certes progressif, mais plus étendu, est nécessaire pour favoriser le sentiment de sécurité et de confiance des enfants envers leur père.

Depuis le mois d’avril 2024, l’intimé exerce son droit de visite tous les mercredis de 9h00 à 19h30 et un dimanche sur deux de 10h00 à 18h00. Cet élargissement, qui correspond au premier palier prévu par le jugement entrepris, semble bien se dérouler. L’appelante ne fait état que d’un épisode survenu depuis lors, au cours duquel la cadette aurait pleuré et exigé que sa mère vienne la chercher. Or, on ne saurait déduire de cet événement isolé, qui ne présente aucune gravité vraisemblable, que les relations entre le père et les enfants auraient cessé de progresser favorablement. L’appelante ne demande du reste pas que l’exercice du droit de visite, tel qu’exercé actuellement, soit restreint. Il résulte au demeurant des photographies versées au dossier que l’intimé est investi dans son rôle de père et qu’il profite des moments de rencontre avec les enfants pour organiser des activités, auxquels ceux-ci participent avec plaisir, en vue de consolider les liens les unissant.

L’appelante demande que l’élargissement du droit de visite, allant au-delà de ces modalités, soit décidé en accord avec les parents, par le biais de la médiation auprès de E______, et la curatrice des enfants, en respectant le rythme de ces derniers. Au vu de ce qui précède, la fixation des prochaines étapes d’élargissement du droit de visite apparaît néanmoins nécessaire, afin de conforter les parents et les enfants dans l’évolution positive des liens unissant ces derniers à l’intimé. Rien ne s’oppose au demeurant à ce que le droit de visite inclue désormais également des nuits auprès de l’intimé. Compte tenu de la suspension du caractère exécutoire du jugement, il y a toutefois lieu de modifier le calendrier prévu par le premier juge afin de respecter un élargissement progressif. Le droit de visite de l’intimé sera donc étendu, en sus des mercredis, à un week-end sur deux, du samedi 18h30 au dimanche 18h30 dès le mois de novembre 2024, puis à un week-end sur deux, du samedi 18h30 au lundi matin, dès le mois de décembre 2024. Les vacances scolaires seront en outre partagées par moitié entre les parties dès le mois de décembre 2024.

L’attention des parents est, une nouvelle fois, attirée sur le fait que l’évolution positive des relations personnelles entre l’intimé et les mineurs, essentielle à leur bon développement, suppose que les deux parents tiennent, devant les enfants, un discours valorisant et positif à l’égard de l’autre afin de conforter ceux-ci dans leur sentiment de bien-être et de confiance envers leur père.

Au vu de ce qui précède, le chiffre 6 du jugement entrepris sera modifié en conséquence.

4. L’appelante demande que la contribution à son entretien soit fixée à 3'750 fr. par mois durant l’année 2023 et à 3'837 fr. par mois dès le 1er janvier 2024. Elle reproche au premier juge d’avoir mal estimé les revenus mensuels perçus par l’époux en 2023 et de ne pas avoir tenu compte de sa charge fiscale en 333 fr. par mois dans son budget. La modification rétroactive de sa contribution d’entretien ne se justifiait pas et était manifestement inéquitable. Elle avait pour conséquence que l’appelante devait rembourser à son époux la somme de 3'425 fr. 20, à titre de trop perçu, alors que son budget était déficitaire.

4.1.1 Selon l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC, lorsque le juge constate que la suspension de la vie commune est fondée, il fixe la contribution pécuniaire à verser par un époux à l'autre.

Le principe et le montant de la contribution d'entretien due selon l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC se déterminent en fonction des facultés économiques et des besoins respectifs des époux. Même lorsqu'on ne peut plus sérieusement compter sur une reprise de la vie commune, l'art. 163 CC demeure la cause de l'obligation d'entretien (ATF 145 III 169 consid. 3.6; 140 III 337 consid. 4.2.1; 138 III 97 consid. 2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_255/2022 du 6 juillet 2023 consid. 3.1).

Le juge doit donc partir de la convention, expresse ou tacite, que les conjoints ont conclue au sujet de la répartition des tâches et des ressources entre eux (art. 163 al. 2 CC).

4.1.2 Le Tribunal fédéral a posé, pour toute la Suisse, une méthode de calcul uniforme des contributions d'entretien du droit de la famille – soit la méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent, dite en deux étapes
(ATF 147 III 265, 147 III 293 et 147 III 301).

Selon cette méthode, on examine les ressources et besoins des personnes intéressées, puis les ressources sont réparties entre les membres de la famille concernés de manière à couvrir, dans un certain ordre, le minimum vital du droit des poursuites ou, si les ressources sont suffisantes, le minimum vital élargi du droit de la famille, puis l'excédent éventuel (ATF 147 III 265 consid. 7).

Dans le calcul des besoins, le point de départ est le minimum vital du droit des poursuites, comprenant l'entretien de base selon les normes d'insaisissabilité (NI 2023, RS/GE E 3 60.04), auquel sont ajoutées les dépenses incompressibles, soit les frais de logement, la prime d'assurance-maladie de base, les frais de transport et les frais de repas pris à l'extérieur (ATF 147 III 265 précité consid. 7.2).

Dans la mesure où les ressources financières le permettent, l'entretien convenable doit être élargi au minimum vital du droit de la famille. Les postes suivants entrent généralement dans cette catégorie : les impôts, les forfaits de télécommunication, les assurances, les frais de formation continue indispensable, les frais de logement correspondant à la situation financière (plutôt que fondés sur le minimum d'existence), un montant adapté pour l'amortissement des dettes et les primes d'assurance-maladie complémentaire, ainsi que les dépenses de prévoyance privée des travailleurs indépendants (ATF 147 III 265 consid. 7.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_509/2022 du 6 avril 2023 consid. 6.4.2).

Dans tous les cas, le minimum vital du droit des poursuites du débiteur doit être préservé (ATF 147 III 265 consid. 7.3; arrêts du Tribunal fédéral 5A_799/2021 du 12 avril 2022 consid. 3.2.1; 5A_1040/2020 du 8 juin 2021 consid. 3.1.1).

4.1.3 L'art. 173 al. 3 CC prévoit que les contributions d'entretien peuvent être réclamées pour l'avenir et pour l'année qui précède l'introduction de la requête.

4.2 En l’espèce, l’appelante fait grief au premier juge de ne pas avoir tenu compte dans les revenus de l’intimé des montants de 20'000 fr. et 17'331 fr. reçus de son employeur les 13 février et 24 mars 2023. Ce dernier a néanmoins attesté, par courrier du 4 juillet 2023, qu'il s'agissait de montants dont l'intimé disposait sur son compte courant ouvert dans les livres de la société et qu'il a retirés lors de ces deux versements. Le seul fait que l’intimé travaille auprès du même employeur depuis 36 ans ne permet pas de douter de la véracité de cette attestation. L’appelante ne se prévaut au demeurant d’aucun autre élément pour rendre vraisemblable que l’époux percevrait régulièrement des revenus cachés, non déclarés par son employeur. C’est donc à juste titre que le Tribunal n’a pas tenu compte de ces versements dans la détermination des ressources de l’intimé.

L’appelante soutient en outre qu’une contribution de 3'500 fr. par mois, telle que fixée par le premier juge, ne couvrirait pas ses charges, qu’elle estime à 3'793 fr. par mois, charge fiscale de 333 fr. par mois incluse - étant précisé que le total de 3'837 fr. indiqué dans ses écritures comptabilise, par erreur, une prime d’assurance-maladie de 594 fr. 55 au lieu de 549 fr. 55.

Or, il n’y a actuellement pas lieu de tenir compte d’une charge fiscale dans le budget de l’appelante. En effet, ses impôts annuels peuvent être estimés à 25 fr., compte tenu de la perception des allocations familiales (622 fr. par mois), des contributions d’entretien en faveur des enfants (1'000 fr. par mois et 680 fr. par mois) et d’une contribution à son propre entretien de l’ordre de 3'500 fr. par mois, ainsi que des déductions usuelles (notamment les primes d’assurance-maladie) à faire valoir (estimation selon la calculette mise à disposition par l'Administration fiscale cantonale; www.ge.ch/imposition-famille/deductions-vos-enfants). La situation reste inchangée pour la période antérieure, soit du 1er janvier au 31 décembre 2023.

Partant, une contribution d’entretien de 3'500 fr. par mois, telle que fixée par le Tribunal, permet à l’épouse de couvrir toutes ses charges, ces dernières totalisant, selon sa propre estimation, 3'460 fr. (3'793 fr. – 333 fr. [impôts allégués]).

Le montant de 3'500 fr. par mois sera donc confirmé.

4.3 L’appelante reconnaît avoir reçu de l’intimé, en 2023, à titre de contribution à son propre entretien, 10'758 fr. 20 entre la séparation et le versement des contributions d’entretien fixées sur mesures provisionnelles, 12'467 fr. à titre de paiement de loyer durant cette même période et 22'500 fr. à la suite du prononcé des mesures provisionnelles, soit un total de 45'725 fr., ce qui, réparti sur douze mois, représente une somme de 3'810 fr. par mois. Elle indique qu’elle aurait perçu en outre 120 fr. de trop en 2024, si le montant de la contribution en 3'500 fr. était confirmé.

L’appelante se plaint du fait que la modification rétroactive du montant de la contribution d’entretien en 3'500 fr. aura ainsi pour conséquence qu’elle devra rembourser à son époux un trop perçu de 3'425 fr. 20, après compensation de la créance des enfants en 420 fr. pour les contributions dues à leur entretien pour 2023 (ch. 9 du dispositif du jugement entrepris).

Elle ne remet néanmoins pas en cause le dies a quo de la contribution d’entretien, concluant elle-même à une contribution de 3'750 fr. par mois - soit d’un montant inférieure aux 3'810 fr. perçus en 2023 -, avec effet rétroactif au 1er janvier 2023. Elle ne demande au demeurant pas l’annulation de tout le chiffre 12 du dispositif du jugement – relatif à la contribution due pour elle en 2023 – mais uniquement de son premier paragraphe en tant qu’il concerne le montant de 3'500 fr. par mois annualisé.

Par conséquent, le dies a quo du 1er janvier 2023 n’étant pas critiqué, les chiffres 12, 1er par., et 13 du jugement entrepris seront entièrement confirmés.

5. 5.1 La modification du jugement entrepris ne commande pas de revoir la décision du Tribunal sur les frais de première instance (art. 318 al. 3 CPC), laquelle ne fait l'objet d'aucun grief motivé et est conforme aux normes applicables (art. 31 RTFMC; art. 107 al. 1 let. c CPC).

5.2 Les frais judiciaires des appels, y compris ceux relatifs à l’arrêt sur effet suspensif, seront arrêtés à 1'200 fr. (art. 5, 31 et 37 RTFMC) et mis à la charge des parties à raison d'une moitié chacune compte tenu de la nature familiale du litige (art. 107 al. 1 let. c CPC). L'appelante plaidant au bénéfice de l'assistance judiciaire, les frais mis à sa charge seront provisoirement supportés par l'Etat de Genève, qui pourra en réclamer le remboursement ultérieurement (art. 122 al. 1 let. b, 123 CPC). L'intimé sera condamné à verser la somme de 600 fr. aux Services financiers du Pourvoir judiciaire à titre de frais judiciaires d'appel.

Pour les mêmes motifs d'équité liés à la nature du litige, chaque partie supportera ses propres dépens d'appel.

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A______ contre les chiffres 6, 12, 1er par., et 13 du dispositif du jugement JTPI/4246/2024 rendu le 27 mars 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/7872/2023.

Au fond :

Annule le chiffre 6 du dispositif de ce jugement et, statuant à nouveau sur ce point :

Réserve à B______ des relations personnelles devant s'exercer, à défaut d'accord contraire des parents, à raison de tous les mercredis, de 09h00 à 19h30, et d'un dimanche sur deux de 10h00 à 18h00.

Dit que, dès le mois de novembre 2024, elles seront fixées selon les mêmes modalités le mercredi et à raison d'un week-end sur deux, du samedi 18h30 au dimanche 18h30.

Dit que, dès le mois de décembre 2024, elles seront fixées selon les mêmes modalités le mercredi et à raison d'un week-end sur deux, du samedi 18h30 au lundi matin.

Dit que les vacances scolaires seront partagées par moitié entre les parties dès le mois de décembre 2024.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'200 fr. et les met à la charge de A______ et B______ pour moitié chacun.

Dit que les frais judiciaires mis à la charge de A______ sont provisoirement supportés par l'Etat de Genève.

Condamne B______ à verser 600 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire à titre de frais judiciaires d'appel.

 

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005
(LTF;
RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile, les moyens étant limités selon l'art. 98 LTF.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.