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Décisions | Chambre civile

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C/2515/2024

ACJC/878/2024 du 24.06.2024 ( IUS )

Descripteurs : CONTRÔLE SPÉCIAL
Normes : CO.697d
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/2515/2024 ACJC/878/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU LUNDI 24 JUIN 2024

 

Entre

A______ SA, sise ______ [GE], requérante, représentée par Me Raphaël ZOUZOUT, avocat, LEMANIA LAW AVOCATS, rue de Hesse 16, 1204 Genève,

et

B______ SA EN LIQUIDATION, sise ______ [GE], citée, représentée par son liquidateur, Me C______, avocat, C______ & ASSOCIÉS, ______.

 

 


EN FAIT

A. a. B______ SA, EN LIQUIDATION (ci-après : B______ SA) est une société anonyme inscrite au Registre du commerce de Genève, dont le but est la promotion immobilière et toutes prestations de service s'y rapportant.

Son capital-actions est de 100'000 fr., composé de 100 actions nominatives de 1'000 fr., détenu à hauteur de 50% par A______ SA et de 50% par D______ SA, sociétés anonymes toutes deux inscrites au Registre du commerce de Genève.

b. Au gré de son activité, B______ SA est devenue propriétaire de plusieurs biens immobiliers.

c. En raison de conflits entre les actionnaires ayant conduit à diverses procédures judiciaires, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), a, par jugement JTPI/15565/2014 du 4 décembre 2014, prononcé la dissolution de la société et nommé "E______, F______ SA, rue 1______ no. ______, [code postal] Genève" en qualité de liquidateur.

d. Par jugement JTPI/14968/2019 du 29 octobre 2019, le Tribunal a révoqué E______ en sa qualité de liquidateur et nommé Me C______ à ce titre (ci-après : le liquidateur).

e. Lors de l'entrée en fonction de ce dernier, douze objets immobiliers dont B______ SA était propriétaire demeuraient à vendre ou à attribuer. Ce nombre était encore de trois en 2021.

f. Il est admis par les parties que :

- les frais de comptabilité de la liquidation se sont élevés à 85'896 fr. en 2019, à 143'539 fr. en 2020 et à 66'843 fr. en 2021, et

- les frais juridiques de la liquidation se sont montés à 338'079 fr. en 2019, à 283'884 en 2020 et à 198'236 fr. en 2021.

Quant aux honoraires du liquidateur, ils se sont chiffrés, selon les notes d'honoraires, à 113'101 fr. 25 en 2022.

g. Considérant que les frais relatifs à la liquidation (à savoir, selon ses allégations, les frais juridiques, les frais de comptabilité et les honoraires du liquidateur) étaient élevés, A______ SA a, par courrier du 23 novembre 2022, adressé une demande de renseignements à Me C______ et requis le détail, d'ici au 2 décembre suivant, de tous les frais de liquidation, soit en particulier des frais de comptabilité, des frais juridiques, des honoraires du liquidateur et des frais de consultants externes pour les années 2018 à 2022, avec copie des factures y relatives.

h. Par courriel du 30 novembre 2022, Me C______ a fait savoir à A______ SA qu'il répondrait à sa demande de renseignements "le moment venu" et lui a demandé de préciser la nature de l'obligation par laquelle il serait tenu de fournir les informations et les documents visés dans le délai requis.

i. Par courrier adressé le 5 décembre 2022 à Me C______, A______ SA a sollicité une rencontre afin de discuter de sa demande de renseignements.

Elle allègue qu'une réunion - qui n'aurait pas été couronnée de succès - aurait eu lieu au début de l'année 2023; sans admettre cette rencontre, B______ SA admet qu'"il n'est pas impossible que des contacts aient eu lieu entre [Me C______] et le conseil de A______ "début 2023"".

j. Le liquidateur n'a pas donné suite à la demande de renseignements de A______ SA.

k. Par courriel du 5 avril 2023, le liquidateur a proposé aux actionnaires de se voir céder les créances de B______ SA à l'encontre de E______ et de F______ SA au moyen d'une mise aux enchères entre les actionnaires.

Il a précisé, dans un courriel du 15 mai 2023, qu'il prendrait sa décision quant au sort de ces créances sur la base des offres qui lui seraient parvenues d'ici au 22 mai 2023.

l. Par courriel du 24 mai 2023, le liquidateur a informé A______ SA qu'il avait reçu de la part de D______ SA une offre d'achat de ces créances d'un montant de 2 fr. et a octroyé à A______ SA un délai au 26 mai pour surenchérir.

m. Cette dernière lui a répondu le lendemain qu'elle contestait fermement le principe de la mise aux enchères et qu'elle considérait qu'il appartenait au liquidateur de poursuivre les démarches à l'encontre de E______ et de F______ SA afin de préserver les intérêts de B______ SA et de ses actionnaires.

n. Par courriel du 20 juin 2023, le liquidateur a informé A______ SA que les prétentions litigieuses avaient été cédées à D______ SA pour la somme de 2 fr.

o. Le 12 juillet 2023, A______ SA a écrit à l'Administration fédérale des contributions à Berne pour dénoncer ce qu'elle estimait être une prestation appréciable en argent accordée par B______ SA à D______ SA en sa propre défaveur.

Cette dénonciation a conduit à l'ouverture d'un contrôle fiscal, lequel est en cours.

p. Par courriel du 25 août 2023, Me C______ a annoncé aux actionnaires que la liquidation par ses soins avait pris fin. Il leur a transmis le bilan final de liquidation dressé au 30 juin 2023 avec le rapport d'audit, ainsi que le grand livre des opérations comptables, et a proposé la tenue d'une assemblée générale aux fins d'approuver ce bilan et donner décharge aux organes.

q. Lors de l'assemblée générale extraordinaire qui s'est tenue le 20 septembre 2023, les deux actionnaires étaient présents. Elle a eu lieu sous la présidence du liquidateur, qui a désigné H______ comme secrétaire de l'assemblée; le président et le secrétaire ont tous deux signé le procès-verbal y relatif, dont le contenu n'a fait l'objet d'aucune observation ou contestation de la part de A______ SA.

Cette dernière allègue que lors de cette assemblée, les actionnaires ont posé des questions relatives au contrôle fiscal en cours, aux frais de liquidation, ainsi qu'au bilan final de liquidation, et que le liquidateur n'aurait pas apporté d'éléments de réponse. B______ SA s'en rapporte sur ce point au contenu du procès-verbal de l'assemblée générale, lequel ne fait cependant pas état de questions posées.

Par courrier remis en mains propres au président de l'assemblée générale et annexé au procès-verbal de l'assemblée, A______ SA a indiqué contester la comptabilité et le bilan de liquidation - qui ne reflèteraient pas la réalité -, l'attribution suggérée des bénéfices de liquidation, ainsi que les frais de liquidation. Compte tenu des vaines demandes de renseignements qui auraient été transmises au liquidateur, notamment par courrier du 23 novembre 2022, l'actionnaire a indiqué qu'elle entendait faire usage de son droit à l'institution d'un "contrôle spécial tel que prévu aux art. 697a et ss CO", en particulier à "l'art. 697a CO", et a sollicité le vote de l'assemblée générale sur cette question.

Cette proposition a été soumise au vote et refusée par l'assemblée générale.

B. a. Par acte déposé le 20 décembre 2023 au Tribunal, A______ SA a requis, sous suite de frais judiciaires et dépens, la nomination d'un expert indépendant chargé de réaliser un examen spécial au sein de B______ SA concernant :

i) les frais de liquidation, soit en particulier les frais de comptabilité, les frais juridiques, les honoraires du liquidateur et les frais de consultants externes pour les années 2018 à ce jour,

ii) la cession des prétentions à l'encontre de F______ SA et de E______ à D______ SA,

iii) la gestion de la liquidation, et

iv) l'établissement du bilan final de liquidation,

et de répondre aux questions suivantes :

a. à d. les frais de comptabilité, les frais juridiques, les honoraires du liquidateur et les frais de consultants externes pour les années 2018 à ce jour sont-ils justifiés, sont-ils dans l'intérêt de B______ SA et respectent-ils le cadre du mandat de la liquidation ?

e. quel est le résultat du contrôle fiscal ?

f. la cession des prétentions à l'encontre de F______ SA et E______ à D______ SA devrait-elle être considérée comme constitutive d'une prestation appréciable en argent faite par la société à l'actionnaire D______ SA et la répartition du bénéfice de liquidation entre actionnaires se verrait-elle changer ?

g. et h. cette cession était-elle justifiée, respectait-elle le cadre du mandat de liquidation et à quelles conditions et sur quel fondement a-t-elle été effectuée ?

i. A______ SA a-t-elle été désavantagée dans le cadre de la liquidation ?

j. lors de la réalisation de l'examen spécial, d'autres faits importants en lien avec la gestion de la liquidation et le partage équitable des actifs de B______ SA ont-ils été constatés ? le cas échéant, lesquels ?

b. Par jugement JTPI/878/2024 rendu le 18 janvier 2024, le Tribunal a déclaré irrecevable ladite requête pour défaut de compétence ratione materiae.

c. A______ SA a redéposé sa requête à la Cour de justice (ci-après : la Cour) le 31 janvier 2024.

Par pli conjoint, elle a indiqué à la Cour que, ce faisant, elle avait agi dans le délai d'un mois prévu à l'art. 63 CPC et avait ainsi maintenu la litispendance, la requête étant dès lors réputée avoir été déposée en date du 20 décembre 2023.

d. Par courrier du 11 mars 2024, A______ SA a informé la Cour de ce que :

- sur requête de D______ SA, le Tribunal avait, par jugement JTPI/2141/2024 du 15 février 2024, désigné Me I______ en qualité de commissaire chargé de la liquidation de B______ SA pour cause de carence dans l'organisation au sens de l'art. 731b CO, et

- elle avait, par courrier du même jour, demandé audit commissaire de suspendre son intervention et au Tribunal de se prononcer en ce sens dans l'attente du dénouement des procédures pendantes devant la Cour et l'Administration fiscale fédérale.

e. Dans sa réponse du 18 mars 2024, B______ SA a conclu au déboutement de A______ SA de toutes ses conclusions, avec suite de frais judiciaires et dépens.

Elle a, à cette occasion, produit, notamment, toutes les notes d'honoraires du liquidateur, celles-ci couvrant la période allant du 21 octobre 2019 au 20 septembre 2023 et comportant uniquement les montants des honoraires dus, sans le détail des prestations effectuées.

f. Par réplique du 4 avril 2024, A______ SA a persisté dans ses conclusions.

g. Les parties ont été informées par la Cour de ce que la cause était gardée à juger par courriers du 24 avril 2024.

EN DROIT

1. 1.1 La Chambre civile de la Cour de justice est compétente pour statuer en instance cantonale unique sur l'institution d'un examen spécial en vertu de l'art. 697d CO (art. 5 al. 1 let. g CPC; art. 120 al. 1 let. a LOJ).

1.2 Relevant de la procédure contentieuse (art. 697e al. 1 CO), la présente requête est régie par la maxime des débats (art. 255 let. b CPC a contrario) et la maxime de disposition (art. 58 CPC; ACJC/571/2023 du 2 mai 2023 consid. 2.2).

La procédure sommaire s'applique à l'institution d'un examen spécial de la société anonyme (art. 250 let. c ch. 8 CPC). Le degré de preuve est par ailleurs limité à la vraisemblance (arrêts du Tribunal fédéral 4A_129/2013 du 20 juin 2013 consid. 7.2.1; 4A_359/2007 du 26 novembre 2007 consid. 2.2).

2. La requérante sollicite l'institution d'un examen spécial au sens de l'art. 697d CO.

S'agissant des conditions préalables à sa requête, elle soutient qu'elle a agi dans le délai de trois mois depuis la tenue de l'assemblée générale du 20 septembre 2023. De plus, si le courrier du 20 septembre 2023 ne fait référence qu'à la demande de renseignements du 23 novembre 2022 (relative aux frais de liquidation) et à l'établissement du bilan final de liquidation, elle considère que l'examen spécial sollicité dans sa requête est identique à celui proposé lors de l'assemblée générale, dès lors que, lors de cette assemblée, les questions du contrôle fiscal, des frais de liquidation et de l'établissement du bilan final de liquidation auraient été abordées, sans qu'aucune réponse satisfaisante n'ait été donnée. Elle considère également qu'en proposant l'institution d'un examen spécial lors de l'assemblée générale, elle a implicitement demandé l'obtention préalable de renseignements, satisfaisant ainsi à cet aspect de la subsidiarité procédurale.

La citée fait, pour sa part, valoir que la requête doit être rejetée du fait que, dans son courrier du 20 septembre 2023, la requérante a sollicité l'institution d'un "contrôle spécial" sur la base des dispositions du CO abrogées au 31 décembre 2022. Elle relève en outre que la requérante s'est bornée à déposer un courrier lors de l'assemblée générale du 20 septembre 2023, sans que la demande de renseignements du 23 novembre 2022, qui y est mentionnée, n'y soit annexée ou son contenu indiqué, que la demande de contrôle spécial du 20 septembre 2023 (dans laquelle elle se contente de contester "la comptabilité et le bilan de liquidation qui ne reflètent pas la réalité et donc l'attribution suggérée des bénéfices de liquidation ainsi que les frais de liquidation") ne mentionne pas les faits déterminés sur lesquels sa demande devrait porter et que la mission d'expertise requise devant la Cour ne correspond pas à la proposition soumise à l'assemblée générale.

2.1

2.1.1 L'examen spécial, régi depuis le 1er janvier 2023 par les art. 697c à h CO (anciennement nommé contrôle spécial et régi par les art. 697a à g aCO), est une des mesures prévues par la loi pour donner aux actionnaires un droit de contrôle sur la marche de la société (ATF 138 III 252 consid. 3.1).

Lors de l'assemblée générale, tout actionnaire peut demander des renseignements au conseil d'administration sur les affaires de la société et à l'organe de révision sur l'exécution et le résultat de sa vérification; les renseignements doivent être fournis dans la mesure où ils sont nécessaires à l'exercice des droits de l'actionnaire (art. 697 al. 1 et 4 ab initio CO).

Tout actionnaire qui a déjà exercé son droit à être renseigné ou son droit de consultation peut proposer à l'assemblée générale de faire examiner par des experts indépendants des faits déterminés si cela est nécessaire à l'exercice de ses droits (art. 697c al. 1 CO).

Si l'assemblée générale ne donne pas suite à la proposition, des actionnaires - représentant 5% du capital-actions ou des voix dans les sociétés dont les actions sont cotées en bourse ou 10% du capital-actions ou des voix dans les autres sociétés – peuvent, dans un délai de trois mois, demander au tribunal d'ordonner un examen spécial (art. 697d al. 1 CO).

La requête demandant l’institution d’un examen spécial peut porter sur toute question qui a fait l’objet d’une demande de renseignements ou de consultation ou qui a été soulevée durant les débats de l’assemblée générale concernant la proposition d’institution d’un examen spécial, dans la mesure où la réponse est nécessaire à l’exercice des droits de l’actionnaire (art. 697d. al. 2 CO).

2.1.2 Le droit à l'institution d'un examen spécial suppose ainsi, notamment, que le requérant soit actionnaire de la société, qu'il dispose de la participation minimale requise, qu'il ait préalablement fait valoir son droit aux renseignements (première condition de subsidiarité formelle), qu'il ait proposé à l'assemblée générale d'instituer un tel contrôle (seconde condition de subsidiarité formelle) et qu'il agisse dans le délai de trois mois à compter du refus de l'assemblée générale d'instituer ce contrôle. Il y a lieu d'examiner ces conditions formelles dans un premier temps, avant de se pencher sur les conditions matérielles de cette mesure (ACJC/841/2021 du 11 juin 2021 consid. 3.1.2).

2.1.3 En vertu du principe de la confiance, il faut admettre qu'en proposant uniquement l'institution d'un contrôleur spécial (selon la dénomination de l'ancien droit), l'actionnaire demande implicitement l'obtention préalable de renseignements, satisfaisant ainsi à cet aspect de la subsidiarité procédurale (Pauli Pedrazzini, CR-CO II, 2017, n. 33 ad art. 697a aCO).

Il n'est pas nécessaire que l'actionnaire qui formule une demande de renseignements soit celui qui saisisse l'assemblée générale d'une proposition d'institution d'un contrôle spécial (ATF 133 III 133 consid. 3.2, in JT 2007 I 296).

2.1.4 Le procès-verbal de l’assemblée générale doit contenir les demandes de renseignements formulées lors de l’assemblée générale, les réponses données (art. 702 al. 2 ch. 4 CO), l’énoncé de la proposition en contrôle spécial, ainsi que le résultat de la votation. La procédure judiciaire obligatoire peut ensuite être engagée. Le procès-verbal sert de preuve que la proposition a été formulée lors de l’assemblée générale et quant à l’objet de dite proposition (Pauli Pedrazzini, op. cit., n. 24 ad art. 697a aCO). Lors de requêtes concernant des informations qui ne sont pas d'emblée à disposition ou qui consistent en un large catalogue de questions, il peut être indiqué de soumettre la demande de renseignements, par écrit, préalablement à l'assemblée générale. Lors de demandes de renseignements formulées lors de l'assemblée générale, il doit être exigé des actionnaires qu'ils indiquent clairement, autant que l'état de leur connaissance le leur permet, sur quels éléments ils souhaiteraient recevoir de plus amples éclaircissements (ATF 140 III 610 consid. 2.2, in JT 2015 II 433123 III 261 consid. 3a, in JT 1999 I 27).

Le requérant ne peut pas se contenter de rendre vraisemblable le fait d'avoir exercé son droit à être renseigné ou à consulter les pièces avant de déposer la demande de contrôle spécial à l'assemblée générale, mais il doit le prouver (ATF 143 III 610 consid. 4.3.4).

2.1.5 Si l’acte introductif d’instance retiré ou déclaré irrecevable pour cause d’incompétence est réintroduit dans le mois qui suit le retrait ou la déclaration d’irrecevabilité devant le tribunal ou l’autorité de conciliation compétent, l’instance est réputée introduite à la date du premier dépôt de l’acte (art. 63 al. 1 CPC).

2.2

2.2.1 En l'espèce, la requérante est actionnaire de la société citée et détient 50% de son capital-actions. Elle dispose ainsi de la qualité et de la participation minimale pour solliciter l'institution d'un examen spécial.

La requérante a saisi le Tribunal d'une requête en ce sens le 20 décembre 2023, puis la Cour le 31 janvier 2024 à la suite du prononcé du jugement d'irrecevabilité JTPI/878/2024 rendu le 18 janvier 2024 par le Tribunal. Elle a ainsi agi dans les trois mois à compter de l'assemblée générale du 20 septembre 2023, lors de laquelle sa proposition d'instituer cette mesure n'avait pas été acceptée. La requête a en conséquence été déposée dans le délai imposé par l'art. 697d al. 1 CO.

2.2.2 Se pose, en revanche, la question du respect des conditions de subsidiarité formelle.

Dans son courrier remis lors de l'assemblée générale du 20 septembre 2023, la requérante a sollicité l'institution d'un contrôle spécial selon l'ancien droit en se référant à "plusieurs demandes de renseignements (…) transmises notamment par courrier du 23 novembre 2022, sans retour". Le fait qu'elle se soit référée à l'ancienne dénomination et aux anciennes bases légales est sans importance si les conditions de l'examen spécial prévu par le nouveau droit s'avéraient remplies.

Dans ledit courrier, la requérante n'a certes pas expressément précisé les points sur lesquels elle souhaitait que porte cette mesure, se contentant d'indiquer préalablement qu'elle contestait la comptabilité et le bilan de liquidation - qui ne reflèteraient pas la réalité -, l'attribution suggérée des bénéfices de liquidation, ainsi que les frais de liquidation.

Cela étant, la requérante avait adressé une demande de renseignements au liquidateur le 23 novembre 2022, dans laquelle elle avait requis le détail de tous les frais de liquidation, soit en particulier des frais de comptabilité, des frais juridiques, des honoraires du liquidateur et des frais de consultants externes pour les années 2018 à 2022, avec copie des factures y relatives. Elle n'a pas été renseignée sur ces questions avant la tenue de l'assemblée générale du 20 septembre 2023. Il ne ressort pas du procès-verbal de cette assemblée que des réponses auraient été apportées à cette occasion à ce sujet. Compte tenu de la référence à sa demande de renseignements du 23 novembre 2022 dans sa proposition du 20 septembre 2023, il convient de retenir que la requérante entendait clairement que la mesure sollicitée porte (à l'instar de sa demande de renseignements préalable du 23 novembre 2022) sur tous les frais de liquidation, soit en particulier des frais de comptabilité, des frais juridiques, des honoraires du liquidateur et des frais de consultants externes depuis 2018, de sorte que les conditions de subsidiarité formelle sont réalisées sur cette question.

S'agissant des autres sujets (à savoir la comptabilité de la liquidation, le bilan de liquidation et l'attribution suggérée des bénéfices de liquidation), il ne ressort pas du procès-verbal de l'assemblée générale du 20 septembre 2023 que des questions auraient été posées sur ces points, si bien que la première condition de subsidiarité formelle ne semble pas réalisée. Quand bien même tel serait le cas, la requête devrait en tout état être rejetée s'agissant de ces points au regard des considérations qui suivent (cf. infra consid. 2.3 en lien avec la condition de subsidiarité matérielle; cf. infra consid. 2.4 en lien avec la condition de l'identité entre le contenu de la proposition d'institution d'un examen spécial à l'Assemblée générale et la requête faite au juge; cf. infra consid. 3.2.2 en lien avec les exigences de précision requise).

2.3

2.3.1 Le contenu de la proposition d'un contrôle spécial doit correspondre à celui de la demande en renseignements (condition de subsidiarité matérielle). Ainsi, ce qui n'est pas susceptible de faire l'objet d'une demande en renseignements ou en consultation ne peut jamais être examiné dans le cadre d'un contrôle spécial (Pauli Pedrazzini, op. cit., n. 34 à 35 ad art. 697a aCO). Les renseignements requis à l'occasion du contrôle spécial doivent être couverts par la demande de renseignements préalable qui leur donne un cadre général (Killias/Bertholet, Le contrôle spécial, in Aspects actuels du droit de la société anonyme, CEDIDAC, 2005, p. 252).

Il se déduit de cette condition de subsidiarité que l'objet du contrôle spécial doit présenter un lien de connexité matérielle avec la demande de renseignements qui l'a précédé. Cette connexité, appréciée de manière restrictive, n'est pas simple à établir. Pourtant, l'actionnaire qui envisage de requérir une telle mesure doit en tenir compte au moment où il pose ses questions à l'assemblée générale. Lorsqu'il fait usage de son droit aux renseignements lors de l'assemblée générale, l'actionnaire doit formuler ses questions avec une certaine précision; elles doivent correspondre "au moins dans les grandes lignes" à celles qui seraient ensuite posées dans le cadre du contrôle spécial (Hari/Hänni, Quelques procédures particulières du droit de la société anonyme, in La personne morale et l'entreprise en procédure, 2014, p. 140). Des questions complémentaires ou plus précises sont admissibles pour autant que le conseil d'administration ait pu s'attendre de bonne foi à celles-ci au vu de la demande de renseignements initiale (Hänni, La responsabilité des administrateurs hors de la faillite de la société anonyme, 2016, p. 241, n. 647).

2.3.2 En l'occurrence, la proposition d'institution d'un contrôle spécial du 20 septembre 2023 n'indique pas précisément sur quelles questions la mesure devrait porter concernant la comptabilité de la liquidation, le bilan de liquidation et l'attribution suggérée des bénéfices de liquidation. De plus, la demande de renseignements préalables ne visait pas ces derniers points. Ainsi, la condition de subsidiarité matérielle n'est pas non plus réalisée s'agissant de ces sujets.

2.4

2.4.1 Après la proposition, le contenu du contrôle spécial ne saurait être élargi; l'actionnaire est cependant libre de restreindre l'objet, par exemple en renonçant à des questions. Une identité stricte entre la formation de la proposition à l'assemblée générale et celle au juge n'est pas exigée, des précisions matérielles ou des corrections pouvant être apportées (Pauli Pedrazzini, op. cit., n. 34 à 35 ad art. 697a aCO).

2.4.2 A titre superfétatoire, il sera également relevé que, contrairement aux problématiques du bilan de liquidation et des frais de liquidation, la requête du 20 décembre 2023 au Tribunal porte, notamment, sur des sujets (la cession des prétentions à D______ SA et la gestion de la liquidation) et des questions (toutes les questions posées à l'expert hormis celles concernant les frais de liquidation) qui n'étaient pas expressément ou implicitement contenues dans la proposition du 20 septembre 2023.

2.5 Au vu de ce qui précède, la requête doit être rejetée à ce stade déjà en tant qu'elle vise l'examen de la cession des prétentions à D______ SA, de la gestion de la liquidation et de l'établissement du bilan de liquidation, ainsi que les questions posées à l'expert (questions a à j), hormis celles concernant les frais de liquidation (questions a à d) (cf. ci-dessous).

Par surabondance de motivation, il sera toutefois examiné si la question de l'établissement du bilan de liquidation remplirait les exigences de précision requise (cf. infra consid. 3.2.2).

3. La requérante sollicite l'instauration d'un examen spécial concernant les frais de liquidation, soit en particulier les frais de comptabilité, les frais juridiques, les honoraires du liquidateur et les frais de consultants externes pour les années 2018 à ce jour, l'expert devant répondre aux questions de savoir si ces frais sont justifiés, s'ils sont dans l'intérêt de B______ SA et s'ils respectent le cadre du mandat de liquidation.

Elle considère que, dans le cadre du second mandat de liquidateur, les frais juridiques, les frais de comptabilité et les honoraires du liquidateur sont excessifs. Elle ne se prononce pas sur les frais de consultants externes. Elle soutient que, pour pouvoir faire valoir ses éventuels droits, elle doit être en mesure d'établir si ces frais sont justifiés ou non et que c'est dans cette optique qu'elle a requis le détail de ces frais et les factures correspondantes.

Elle estime également avoir été lésée dans l'établissement du bilan final de liquidation, relevant ne pas avoir approuvé la comptabilité depuis 2008. Elle considère qu'il est, pour elle, crucial d'avoir connaissance d'une possible violation du devoir d'égalité de traitement entre les actionnaires dans le cadre de la liquidation afin, le cas échéant, de pouvoir faire valoir ses droits.

Elle relève que ces questions seraient susceptibles de tomber sous le coup des art. 678 et 754 CO, dont les actions ne seraient pas prescrites.

La citée considère, pour sa part, que, si les frais de liquidation sont certes importants, ils sont justifiés par l'ampleur du travail nécessité, que tant les documents régulièrement remis aux actionnaires (comptes annuels avec les grands livres) que l'intégralité des notes d'honoraires du liquidateur produites à l'appui de sa réponse devraient leur permettre de faire valoir leurs éventuels droits.

S'agissant de la comptabilité depuis 2008, elle soutient que la requérante n'a jamais fait valoir de griefs précis à l'encontre des comptes qui lui ont été régulièrement notifiés et souligne que la requête en tant qu'elle porte sur l'établissement du bilan de liquidation ne respecte pas l'exigence selon laquelle l'examen spécial ne peut porter que sur des faits déterminés.

3.1

3.1.1 Le tribunal ordonne un examen spécial lorsque les requérants rendent vraisemblable que des fondateurs ou organes ont enfreint les dispositions de la loi ou des statuts et que cette violation est de nature à porter préjudice à la société ou aux actionnaires (art. 697d al. 3 CO).

Si le tribunal donne suite à la requête, il désigne les experts indépendants qui exécuteront l’examen spécial et définit l’objet de l’examen (art. 697e al. 2 CO).

3.1.2 Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral qui demeure, à cet égard, applicable sur ce point au nouveau droit, le contrôle spécial doit avoir pour objet des faits déterminés. Il s'agira par exemple d'établir le contenu de contrats ou l'existence de relations de "parenté", de préciser si des fonds ont été retirés, ou encore de constater les salaires des organes, sans se prononcer sur leur légitimité. L'expert indépendant ne saurait résoudre des questions juridiques telles que l'illicéité d'un comportement, ni porter des jugements de valeur sur la gestion ou d'autres décisions d'appréciation. Le contrôle spécial ne doit pas revêtir la forme d'une enquête généralisée. Il peut cependant porter sur des faits nombreux, pour autant que le type d'événements à examiner soit clairement défini (par exemple, un certain type de transactions), tout comme la période visée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_631/2020 du 15 juin 2021 consid. 3.1.2).

Constater une disproportion dans un échange de prestations, respectivement des distributions de bénéfices sujettes à restitution selon l'art. 678 al. 2 CO, est une question de droit qui ne saurait être l'objet d'un contrôle spécial. En revanche, un expert peut être amené à préciser quelles prestations une société a fournies à des actionnaires, administrateurs ou personnes qui leur sont proches, à quelles conditions et sur quel fondement. Il s'agit de constatations de faits entrant dans le champ du contrôle (arrêt du Tribunal fédéral 4A_631/2020 précité consid. 5.2.5).

Il n'est pas admissible de demander un examen à des fins purement exploratoires dans l'espoir de découvrir des irrégularités dont le requérant ne sait rien. Le contrôle spécial ne peut par ailleurs avoir pour but de procéder à un examen complet des comptes en se substituant à l'organe de révision (ATF 138 III 252 consid. 3.1; 133 III 453 consid. 7.5).

La vérification de la gestion et de la comptabilité sont possibles, mais elle doit porter sur des objets bien précis. Le contrôleur ne doit examiner que des événements concrets qui doivent avoir été individualisés dans la demande; il ne peut en particulier évaluer la gestion dans son ensemble (Pauli Pedrazzini, op. cit., n. 10 et 13 ad art. 697a aCO; Killias/Bertholet, op. cit., p. 250).

3.1.3 Le requérant doit justifier d'un intérêt actuel digne de protection : l'information requise doit lui permettre d'exercer ses droits d'actionnaire en connaissance de cause, en particulier l'action en responsabilité (art. 754 CO) et l'action en restitution de prestations indues (art. 678 CO). L'intérêt digne de protection peut faire défaut lorsque les droits de l'actionnaire sont prescrits ou périmés, ou lorsque les informations sollicitées ont déjà été obtenues. Il existe en revanche lorsque l'actionnaire peut raisonnablement douter de l'exactitude ou de l'exhaustivité des renseignements obtenus, respectivement de la légitimité du motif de refus opposé (arrêt du Tribunal fédéral 4A_631/2020 précité consid. 3.1.3).

Les membres du conseil d’administration et toutes les personnes qui s’occupent de la gestion ou de la liquidation répondent à l’égard de la société, de même qu’envers chaque actionnaire ou créancier social, du dommage qu’ils leur causent en manquant intentionnellement ou par négligence à leurs devoirs (art. 754 al. 1 CO). Les actions en responsabilité régies par les dispositions qui précèdent se prescrivent par trois ans à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi que de la personne responsable et, dans tous les cas, par dix ans à compter du jour où le fait dommageable s’est produit ou a cessé. Ce délai est suspendu pendant la procédure visant l’institution d’un examen spécial et l’exécution de celui-ci (art. 760 al. 1 CO).

Les actionnaires, les membres du conseil d’administration, les personnes qui s’occupent de la gestion et les membres du conseil consultatif ainsi que les personnes qui leur sont proches sont tenus de restituer les dividendes, les tantièmes, les autres parts de bénéfice, les rémunérations, les intérêts intercalaires, les réserves légales issues du capital ou du bénéfice et les autres prestations qu’ils ont perçus indûment (art. 678 al. 1 CO). Le droit à la restitution se prescrit par trois ans à compter du jour où la société ou l’actionnaire en a eu connaissance et, dans tous les cas, par dix ans à compter de la naissance de ce droit. Ce délai est suspendu pendant la procédure visant l’institution d’un examen spécial et son exécution (art. 678a al. 1 CO).

Cette disposition prohibe le versement de dividendes cachés, soit de prestations de la société à l'actionnaire lorsqu'elles sont en disproportion évidente avec leur contre-prestation et la situation économique de la société (arrêt du Tribunal fédéral 4A_174/2007 du 13 septembre 2007 consid. 4.3.1). Le critère principal consiste à déterminer si la prestation litigieuse aurait été fournie aux mêmes conditions à un tiers indépendant. La disproportion devant être évidente, seuls les abus sont sanctionnés. Cette condition est toutefois plus facile à retenir si la société se trouve dans une situation financière précaire (Chenaux/Gachet,
CR-CO II, n. 33, 36 et 42 ad art. 678 aCO).

Les conditions de cette action (perception indue, disproportion évidente) ne peuvent en revanche pas faire l'objet du contrôle spécial (Pauli Pedrazzini, op. cit., n. 10 ad art. 697a aCO).

La jurisprudence admet le concours entre l'action en restitution et l'action en responsabilité des art. 754 ss CO (Chenaux/Gachet, op. cit., n. 86 ad art. 678 aCO).

La condition de vraisemblance constitue un point crucial. Le droit pourrait rester lettre morte si les conditions étaient trop strictes. A l'inverse, des conditions trop libérales seraient contraires à l'intention du législateur pour qui la mesure ne doit pas être imposée trop facilement. La vraisemblance concerne le droit comme le fait. Quant aux faits, il faut rendre vraisemblables des actions ou des omissions déterminées des fondateurs ou des organes. Il n'est pas nécessaire de convaincre pleinement le tribunal de l'existence de ces faits. Une certaine probabilité suffit même si le tribunal admet que ces faits pourraient ne pas être réalisés (ATF 138 III 252 consid. 3.1; 120 II 393 consid. 4c).

Le requérant ne peut pas se contenter d'exprimer des soupçons ou d'affirmer qu'il y a eu des comportements contraires aux obligations de gestion (arrêt du Tribunal fédéral 4C.190/2005 du 6 septembre 2006 consid. 3.4.). Il lui incombe de rendre vraisemblable que le comportement ou l'omission des organes viole une disposition légale ou statutaire précise et d'indiquer en quoi consiste cette violation (ATF 138 III 252 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_215/2010 du 27 juillet 2010 consid. 3.1.3).

3.2

3.2.1 En l'espèce, s'agissant, en premier lieu, des frais de liquidation, la requérante motive sa requête quant aux frais juridiques, aux frais de comptabilité et aux honoraires du liquidateur. Dès lors qu'elle n'indique pas que les frais de consultants externes seraient disproportionnés ou injustifiés, la requête sera rejetée en ce qui les concerne.

La citée admet, dans le cadre de la présente procédure, que les frais de liquidation sont importants, mais se borne à déclarer qu'ils sont justifiés au regard de l'activité nécessitée. Hormis les notes d'honoraires du liquidateur, elle n'a produit aucune pièce permettant à la requérante de se rendre compte, avec la précision requise, de l'activité déployée. S'agissant en particulier des honoraires du liquidateur, les notes y relatives produites devant la Cour par le liquidateur mentionnent uniquement les montants desdits honoraires, sans indication des prestations effectuées et du temps consacré pour chaque prestation, de sorte que la requérante n'est pas en mesure de déterminer quelle activité a été déployée par l'intéressé et d'évaluer si le temps consacré est proportionné ou non aux services rendus.

Il convient ainsi d'admettre que la requérante dispose d'un intérêt digne de protection à l'instauration d'un examen spécial portant sur les frais de liquidation relatifs aux frais juridiques, aux frais de comptabilité et aux honoraires du liquidateur et sur la question de savoir si ces frais sont justifiés par pièces (factures, demandes de provisions, descriptifs d'activités et timesheet), ces éléments lui étant nécessaires pour déterminer si elle pourrait exercer une éventuelle action en restitution des prestations au sens de l'art. 678 al. 2 CO, voire une action en responsabilité au sens de l'art. 754 CO. La requête sera, en revanche, rejetée en tant qu'elle tend à déterminer si ces frais sont dans l'intérêt de la citée et respectent le cadre du mandat de liquidation, ces questions ne portant pas sur des faits déterminés, mais nécessitant une appréciation de l'expert qui dépasse le cadre permis de sa mission.

3.2.2 En ce qui concerne, en second lieu, l'établissement du bilan final de liquidation (étant rappelé que, sur ce point, les conditions de subsidiarité formelle et matérielle ne sont pas remplies; cf. supra consid. 2.2.2 et 2.3.2), la requête ne vise en tout état pas non plus à élucider des faits déterminés, conformément au but légal de l'examen spécial, mais à opérer un contrôle général du bilan final de liquidation et de la comptabilité y relative dans le but de découvrir des irrégularités. Or, le contrôle spécial ne peut, selon la jurisprudence, servir à un tel examen. Si, à l'appui de sa motivation à l'égard du bilan final de liquidation, la requérante allègue ne pas avoir approuvé les comptes depuis 2008, il sera, à toutes fins utiles, relevé que ses démarches en vue d'obtenir des renseignements n'a jamais porté spécifiquement sur la question de la comptabilité.

3.3 Compte tenu de ce qui précède, la requête sera admise en tant qu'elle concerne les frais de liquidation relatifs aux frais de comptabilité, aux frais juridiques et aux honoraires du liquidateur, l'expert spécial devant être chargé de la mission d'examiner ces frais et de déterminer s'ils sont justifiés par pièces.

4. La requête d'institution d'un examen spécial étant partiellement admise, la Cour nommera un expert spécial en la personne de J______, p.a. Fiduciaire K______, rue 2______ no. ______, [code postal] Genève.

Un délai au 15 octobre 2024 lui sera imparti pour remettre à la Cour un rapport rendant compte du résultat de son contrôle de manière détaillée (art. 697g al. 1 CO), étant précisé qu'il lui incombera, préalablement à l'établissement dudit rapport, d'entendre la citée sur les résultats du contrôle spécial (art. 697f al. 3 CO).

Conformément à l'art. 697f al. 4 CO, l'expert spécial sera rappelé à son devoir de confidentialité en relation avec les informations récoltées dans le cadre de sa tâche.

S'il l'estime nécessaire, il devra faire figurer dans son rapport les faits qui pourraient porter atteinte au secret des affaires. La décision finale relative à l'élimination ou au maintien de ces passages incombe à la Cour dans le cadre de la procédure d'épuration prévue par l'art. 697g al. 2 CO (Pauli Pedrazzini, op. cit., n. 7 ad art. 697e aCO).

5. 5.1 Selon l'art. 697h, les coûts induits par l’examen spécial sont à la charge de la société; celle-ci est tenue de procéder aux éventuelles avances de frais (al. 1); si des circonstances particulières le justifient, le tribunal peut mettre tout ou partie des frais à la charge des requérants (al. 2).

5.2 In casu, lesdits coûts seront mis à la charge de la citée.

La Cour condamnera dès lors celle-ci à verser à J______, (Fiduciaire K______), une première avance de 5'000 fr.

L'expert spécial sera autorisé à solliciter de la partie citée des provisions régulières tant et aussi longtemps que son mandat n'aura pas pris fin.

6. Les frais judiciaires de la présente procédure seront arrêtés à 3'000 fr. (art. 95 al. 1 et 96 CPC; art. 26 RTFMC) et compensés avec l'avance de frais du même montant fournie par la requérante, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Cette dernière obtenant gain de cause sur le principe de l'instauration d'un examen spécial, mais étant toutefois déboutée de ses conclusions dans une large mesure, lesdits frais seront répartis par moitié entre les parties (art. 106 al. 2 CPC). La citée sera, par conséquent, condamnée à verser 1'500 fr. à la requérante à titre de remboursement des frais judiciaires.

Compte tenu de l'issue du litige, chaque partie supportera ses propres dépens, étant relevé que les activités déployées par les conseils respectifs des parties apparaissent d'ampleur équivalente.

7. Dans les procédures en reddition de comptes, la pratique est d'apprécier la valeur litigieuse en fonction des prétentions pécuniaires auxquelles les renseignements ou documents requis peuvent servir de fondement (ATF 126 III 445 consid. 3b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_640/2016 du 25 septembre 2017 consid. 1 et les arrêts cités).

En l'espèce, compte tenu de la demande d'institution d'un examen spécial intentée en vue d'agir en répétition de prestations indues et en responsabilité à l'encontre du liquidateur de la citée et des montants invoqués, il sera retenu que la valeur litigieuse est supérieure à 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

Statuant en instance unique par voie de procédure sommaire :

Admet partiellement la requête tendant à l'institution d'un examen spécial formée par A______ SA le 20 décembre 2023.

Nomme J______, p.a. Fiduciaire K______, rue 2______ no. ______, [code postal] Genève, en qualité d'expert spécial de B______ SA, EN LIQUIDATION.

Dit que J______ aura, en sa qualité d'expert spécial, la mission d'examiner les frais de liquidation depuis 2018 à ce jour relatifs aux frais de comptabilité, aux frais juridiques et aux honoraires du liquidateur, et de déterminer si ces frais sont justifiés par pièces.

Rappelle l'expert spécial à ses devoirs de confidentialité, s'agissant des informations qu'il récoltera dans le cadre de sa tâche.

Condamne B______ SA, EN LIQUIDATION à supporter les frais et honoraires de J______ encourus en sa qualité d'expert spécial.

Condamne B______ SA, EN LIQUIDATION à verser à J______ une provision d'un montant de 5'000 fr. dès l'entrée en force du présent arrêt.

Autorise J______ à ne pas se mettre en œuvre avant le versement en ses mains de l'avance initiale de ses frais et honoraires.

Autorise d'ores et déjà J______ à solliciter directement de B______ SA, EN LIQUIDATION toute avance complémentaire nécessaire à la couverture des frais et honoraires de son activité d'expert spécial, au fur et à mesure de l'accomplissement de celle-ci.

Impartit à J______ un délai au 15 octobre 2024 pour remettre son rapport à la Cour.

Arrête les frais judiciaires à 3'000 fr., les met à la charge des parties à hauteur de la moitié chacune et les compense avec l'avance versée par A______ SA, laquelle demeure entièrement acquise à l'Etat de Genève.

Condamne B______ SA, EN LIQUIDATION à verser à A______ SA la somme de 1'500 fr. à titre de remboursement partiel de l'avance de frais judiciaires.


 

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Madame Paola CAMPOMAGNANI, Madame Stéphanie MUSY, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.

 

 

 

Le président :

Cédric-Laurent MICHEL

 

La greffière :

Sandra CARRIER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.