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Décisions | Chambre civile

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C/8764/2022

ACJC/218/2024 du 08.02.2024 sur JTPI/1116/2023 ( SDF ) , JUGE

Recours TF déposé le 28.03.2024, 5A_204/2024
Rectification d'erreur matérielle : Dispositif (p.13) modifié le 07.03.2024
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/8764/2022 ACJC/218/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU JEUDI 8 FÉVRIER 2024

 

Entre

Monsieur A______, p.a., ______ [GE], appelant d'un jugement rendu par la 4ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 23 janvier 2023,

et

Madame B______, domiciliée ______ [GE], intimée, représentée par Me Corinne NERFIN, avocate, BORY & ASSOCIES AVOCATS, Cour Saint-Pierre 7, case postale, 1211 Genève 3.

 

 

 

 

 

 

 

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/1116/2023 du 23 janvier 2023, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, autorisé les époux B______ et A______ à vivre séparés (chiffre 1 du dispositif), attribué à A______ la jouissance exclusive du domicile conjugal sis no. ______, route 1______ à [code postal] Genève (ch. 2), condamné A______ à verser à B______, par mois et d’avance, une somme de 4'000 fr. au titre de contribution à son entretien, à partir du 15 septembre 2021 (ch. 3), condamné A______ à payer à B______ la somme de 5'000 fr. à titre de provisio ad litem (ch. 4), donné acte aux parties de ce qu'elles s'accordent sur la restitution à B______ de ses effets personnels (ch. 5), prononcé ces mesures pour une durée indéterminée (ch. 6), arrêté les frais judiciaires à 1'000 fr., mis à la charge de A______, condamné à payer à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du pouvoir judiciaire, le montant de 1'000 fr. (ch. 7), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 8), condamné les parties à respecter et à exécuter les dispositions du jugement (ch. 9) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 10).

B. a. Par acte expédié à la Cour de justice (ci-après: la Cour) le 6 février 2023, A______ a formé appel contre ce jugement, reçu le 25 janvier 2023, concluant à son annulation, et, cela fait, à ce qu'il soit dit qu'il n'y a pas lieu au versement d'une contribution d'entretien entre époux et à ce que B______ soit condamnée en tous les frais et dépens de la procédure.

Il a produit une pièce nouvelle, soit un document émanant de l'Office cantonal de la statistique relatif aux loyers pratiqués à Genève.

b. Par réponse du 3 mars 2023, B______ a conclu au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris, avec suite de frais judiciaires et dépens.

c. A______ a répliqué le 15 mars 2023, persistant dans ses conclusions.

d. B______ ayant renoncé à dupliquer, les parties ont été informées par courrier du greffe de la Cour du 31 mars 2023 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier.

a.    B______ (ci-après: B______ ou l'intimée), née [B______] le ______ 1969, originaire de C______ (NE), et A______ (ci-après : A______ ou l'appelant), né le ______ 1954, originaire de C______ (NE) ont contracté mariage le ______ 2002 à Genève.

De leur union sont nés D______, le ______ 2002, et E______, le ______ 2004, aujourd'hui majeurs.

b.   Les époux se sont séparés en septembre 2021. B______ a quitté le domicile familial le 15 septembre 2021.

c.    Par acte du 6 mai 2022, B______ a saisi le Tribunal d'une requête en mesures protectrices de l'union conjugale, concluant, dépens compensés et s'agissant des points contestés en appel, à ce que le Tribunal condamne A______ au versement d'un montant de 5'000 fr. par mois au titre de contribution à son entretien dès le 1er septembre 2021.

d.   Dans son mémoire de réponse du 15 septembre 2022, A______ s'est notamment opposé aux conclusions de son épouse relatives au paiement d'une contribution d'entretien, sous suite de frais et dépens.

e.    Lors de la comparution personnelle des parties du 12 octobre 2022 ainsi qu'à l'audience de plaidoiries finales du 16 novembre 2022, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives s'agissant de la contribution d'entretien en faveur de B______.

C. La situation personnelle et financière des parties est la suivante (tous les montants sont arrondis).

a.    En 2017, la famille s'est installée à F______ [Royaume-Uni]. Ce séjour a duré jusqu'en 2021, juillet selon A______, septembre selon B______, la famille revenant alors vivre à Genève.

L'appelant soutient que l'intimée a toujours travaillé et contribué à l'entretien de la famille, les revenus annuels réalisés par celle-ci entre 2011 et 2016 oscillant entre 45'000 et 50'000 fr., et étant encore de l'ordre de 26'000 fr. en 2017.

L'intimée affirme qu'elle s'est essentiellement consacrée à l'éducation des enfants, en particulier depuis le déménagement à F______, l'appelant contribuant seul à l'entretien de la famille.

b.   b.a B______ exerce la profession de psychologue psychothérapeute FSP indépendante. Elle espère augmenter sa patientèle pour que cette activité devienne rentable, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Elle travaille également auprès de la société G______ SA, à 40% depuis septembre 2021 (avant cela à 10%). Enfin, elle donne des cours sur mandat auprès de trois hautes écoles différentes.

Le Tribunal a retenu que B______ avait réalisé, grâce aux activités précitées, entre septembre 2021 et septembre 2022, un revenu mensuel moyen de 4'470 fr.

Selon les décomptes de salaire de G______ SA produits d'octobre 2021 à août 2022, l'intimée a touché durant cette période 35'681 fr., soit 3'692 fr. bruts par mois (dont à déduire 586 fr. de charges sociale, soit 3'106 fr. nets), plus 2'715 fr. bruts à titre d'heures supplémentaires et 1'851 fr. bruts à titre de 13ème salaire en décembre 2021.

Ses mandats auprès des hautes écoles lui ont rapporté, en 2021, 1'148 fr. par mois (non contesté).

Il ressort du compte d'exploitation de l'intimée qu'elle a perçu de septembre 2021 à septembre 2022 7'650 fr. bruts en sa qualité de psychothérapeute, pour des charges de 12'781 fr., soit une perte de 5'221 fr.

En appel, l'intimée admet réaliser un revenu mensuel net moyen de 4'513 fr. ([3'106 fr. x 13/12] + [3'094 fr. + 4'690 fr. + 5'990 fr.] / 12).

L'appelant soutient que l'intimée a gagné durant cette période 4'606 fr. par mois.

b.b.a A______ est salarié de l'Etude H______ Sàrl au sein de laquelle il exerce en qualité d'avocat.

Selon son certificat de salaire 2021, il a perçu 84'638 fr., soit 7'053 fr. par mois. En 2022, son salaire mensuel net a été réduit à 5'655 fr., selon les décomptes produits. L'appelant expose à cet égard que cette diminution de revenus correspond à une prise de retraite progressive, compte tenu de son âge, et à la difficulté de reprendre une activité aussi importante que précédemment, après quatre années passées à F______ et la pandémie de COVID-19.

Depuis le 1er avril 2022, il perçoit en sus 1'847 fr. par mois de rente AVS.

Devant le Tribunal, il a allégué avoir réalisé, en 2022, des revenus nets moyens de 10'384 fr., composés d'un salaire mensuel de 5'656 fr., d'une rente AVS de 1'847 fr. ainsi que des revenus de sa fortune et des revenus immobiliers de respectivement 1'530 fr. et 1'351 fr. (ces derniers n'étant pas contestés par l'intimée).

Se fondant sur les déclarations fiscales 2021 produites, datées respectivement des 20 janvier (revenu net total : 84'916 fr.) et 4 octobre 2022 (revenu net total : 74'559 fr.), le Tribunal a retenu un revenu mensuel net de l'appelant de 13'290 fr. ([84'916 fr. + 74'559 fr.] /12).

Lors de l'audience de comparution personnelle devant le Tribunal, l'appelant a exposé que la déclaration fiscale 2021 du 20 janvier 2022 ne concernait que les revenus des biens immobiliers, et que celle du 4 octobre 2022 prenait en compte tous ses revenus de l'année 2021.

En appel, il allègue des revenus mensuels de 6'214 fr. (74'559 fr. /12).

L'intimée soutient que ceux-ci totalisent 11'781 fr. (7'053 fr. + 1'847 fr. + 1'530 fr. + 1'351 fr.), la baisse alléguée en 2022 ne l'étant que pour les besoins de la cause.

b.b.b Le Tribunal a retenu que l'appelant disposait d'une fortune mobilière de 4'290'922 fr. composée d'avoirs bancaires à concurrence de 3'016'522 fr. et de titres suisses et étrangers à concurrence de 1'274'400 fr.

L'appelant soutient que sa fortune mobilière se monte à 3'016'522 fr., conformément à sa déclaration fiscale 2021 du 20 janvier 2022, le Tribunal ayant à tort pris en compte à deux reprises le même montant.

c.c.a Devant le Tribunal, l'intimée a allégué des charges mensuelles de 8'896 fr., comprenant, outre l'entretien de base OP en 1'350 fr., des frais de logement futur (estimation) de 3'000 fr., les primes d'assurance LAMal de 563 fr. et LCA de 424 fr., des frais médicaux non remboursés de 700 fr., un forfait véhicule de 400 fr., une charge fiscale estimée à 1'500 fr., des frais de femme de ménage de 380 fr. et un forfait pour les vacances de 580 fr.

Selon les décomptes de l'assurance-maladie de 2012 à 2020, les frais médicaux non couverts de l'intimée se sont élevés à 470 fr. par an en moyenne, soit environ 40 fr. par mois. En 2021, ces frais se sont élevés à 3'383 fr., soit 282 fr. par mois.

c.a.a Concernant le loyer allégué de 3'000 fr., correspondant à un appartement de 5 pièces permettant à l'intimée de recevoir ses enfants, alors qu'elle vit actuellement dans un appartement de 2 pièces sis rue 2______ no. ______ à Genève, pour un loyer de 1'051 fr., dans lequel elle exerce également son activité de psychothérapeute, le Tribunal a retenu que celle-ci ne pouvait continuer à vivre dans "ses locaux professionnels". Le montant de 3'000 fr. était équivalent à celui payé par l'appelant. Selon l'Office cantonal de la statistique, le loyer moyen à Genève pour un appartement de 5 pièces s'élevait à environ 2'300 fr.

Figure dans le compte d'exploitation de l'intimée au titre des charges la moitié du loyer de 1'051 fr., point que l'appelant conteste, faisant valoir que ce loyer est celui du logement de l'intimée, dans lequel elle n'exerce que très ponctuellement son activité de psychothérapeute, déficitaire.

Il soutient que l'intimée peut continuer à vivre dans le logement qu'elle occupe actuellement. En tout état, selon l'Office cantonal de la statistique, le loyer moyen d'un logement à loyer libre en ville de Genève est de 1'570 fr. pour un 4 pièces et de 1'889 fr. pour un 5 pièces, respectivement 1'734 fr. et 2'188 fr. dans le quartier I______, où vivait le couple. Le montant de 3'000 fr. pris en compte par le Tribunal est trop élevé.

c.a.b L'appelant conteste le montant des frais médicaux non remboursés de l'intimée en 700 fr. Il soutient que ceux-ci s'élèvent à 64 fr. par mois en moyenne, tout en relevant qu'en 2021, les frais non remboursés comprenaient des frais de psychothérapie qui devraient être pris en charge par l'assurance-maladie dès le 1er juillet 2022.

L'intimée fait valoir devant la Cour des frais médicaux non remboursés mensuels de 319 fr. (sans autre précision).

c.a.c L'appelant conteste également le montant de 400 fr. par mois au titre des frais de véhicule. L'intimée ne disposerait pas d'une voiture et aurait l'habitude de prendre les transports publics ou de recourir à J______ [entreprise de location de voiture]. Seuls 80 fr. mensuels devraient être pris en compte, correspondant à un abonnement annuel TPG, demi-tarif CFF et J______.

L'intimée fait valoir devant la Cour des frais de transport de 110 fr.

c.a.d Les frais de femme de ménage de 380 fr. par mois sont également remis en cause par l'appelant, qui conteste que l'intimée ait recours à de tels services.

c.a.e L'appelant critique encore le montant de 1'500 fr. allégué au titre des impôts par l'intimée, qu'il juge trop élevé.

c.a.f L'appelant estime que le forfait vacances de l'intimée doit être admis au maximum à concurrence de 250 fr. par mois, le sien, en 500 fr. (voir c.b. ci-dessous), étant justifié par le fait qu'il se rend régulièrement en Israël pour rendre visite à ses enfants et petits-enfants, issus d'une précédente union.

c.a.g C'est enfin à tort que le Tribunal a retenu un montant d'entretien de base OP de 1'350 fr. pour l'intimée, les enfants du couple ne vivant pas avec elle.

c.a.h En résumé, l'appelant soutient que les charges mensuelles de l'intimée totalisent 3'631 fr., alors que celle-ci fait valoir à ce titre 8'250 fr. par mois.

c.b L'appelant a allégué devant le Tribunal des charges de 8'826 fr., comprenant l'entretien de base OP en 1'350 fr. par mois, des frais de logement et parking de 2'959 fr., l'assurance ménage RC de 37 fr., les frais K______ [entreprise de télécommunications] de 95 fr., ceux de la femme de ménage de 700 fr., l'assurance maladie en 805 fr., des frais médicaux et dentaires non remboursés de 359 fr., des frais de véhicule de 421 fr., de vacances de 500 fr., et les impôts de 1'600 fr. Il prend également en charge les frais des enfants majeurs du couple pour des montants allégués de 1'320 fr. pour E______ et de 1'998 fr. pour D______.

Selon les pièces versées à la procédure, le loyer et les frais de parking de l'appelant totalisent 2'804 fr. par mois. Le montant moyen versé à K______ pour les mois de janvier, avril et août 2022 est de 119 fr.

Les frais dentaires de l'appelant se sont élevés en 2021 et 2022, respectivement à 1'578 fr. et 1'206 fr., selon les factures produites.

L'appelant a produit trois fiches de salaire de sa femme de ménage en 632 fr. par mois.

L'assurance véhicule de l'appelant était de 2'014 fr. en 2022, l'impôt de 1'885 fr. et les coûts de livret ETI de 309 fr., soit un total mensuel de 350 fr.

Il allègue une charge fiscale de 2'700 fr. par mois, estimée sur la base de la calculette mise à disposition par l'administration.

L'intimée admet pour l'appelant des frais médicaux non remboursés de 128 fr. par mois, des frais de véhicule de 270 fr. et conteste les frais de téléphonie. Elle ne remet pas en cause les autres montants allégués par l'appelant. Elle admet ainsi des charges mensuelles pour celui-ci à concurrence de 8'190 fr.

c.c Le Tribunal a considéré qu'il n'existait aucun motif de s'écarter du montant d'un peu plus de 8'800 fr. mois allégué par chacune des parties au titre de ses charges, lequel correspondait à leur train de vie.

D. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a retenu que l'intimée n'était pas en mesure de couvrir ses charges, que la fortune mobilière de plus de 4 millions dont l'appelant était titulaire devait être prise en compte pour calculer la contribution d'entretien, et qu'il paraissait équitable de fixer dite contribution à 4'000 fr. par mois à compter de la séparation, soit dès le 15 septembre 2021.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les jugements de mesures protectrices – qui doivent être considérés comme des décisions provisionnelles au sens de l'art. 308 al. 1 let. b CPC – dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Les jugements de mesures protectrices étant régis par la procédure sommaire selon l'art. 271 CPC, le délai d'introduction de l'appel est de dix jours (art. 314 al. 1 CPC).

1.2 En l'espèce, l'appel a été introduit en temps utile, selon la forme prescrite par la loi (art. 311 al. 1 CPC), et porte sur des conclusions qui, capitalisées selon l'art. 92 al. 2 CPC, sont supérieures à 10'000 fr.

Il est donc recevable.

1.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), sa cognition étant toutefois limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb, JdT 2002 I 352; arrêt du Tribunal fédéral 5A_762/2013 du 27 mars 2014 consid. 2.2).

La fixation de la contribution d'entretien du conjoint dans le cadre de mesures protectrices de l'union conjugale est soumise à la maxime de disposition (art. 58 CPC; ATF 129 III 417 consid. 2.1.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_421/2015 du 21 janvier 2016 consid. 6.2.3).

L'appel joint est irrecevable en procédure sommaire (art. 314 al. 2 CPC). Cela étant, l’intimé peut lui aussi présenter des griefs dans sa réponse à l’appel, si ceux-ci visent à exposer que malgré le bien-fondé des griefs de l’appelant, ou même en s’écartant des constats et du raisonnement juridique du jugement de première instance, celui-ci est correct dans son résultat. L’intimé à l’appel peut ainsi critiquer dans sa réponse les considérants et les constats du jugement attaqué qui pourraient lui être défavorables au cas où l’instance d’appel jugerait la cause différemment (arrêt du Tribunal fédéral 4A_258/2015 du 21 octobre 2015 consid. 2.4.2 et les réf. cit.; ACJC/1140/2017 du 5 septembre 2017 consid. 3.4).

2. La pièce nouvelle produite par l'appelant est recevable, s'agissant d'un fait notoire (art. 151 CPC).

3. L'appelant fait grief au Tribunal de l'avoir condamné à verser une contribution d'entretien à l'intimée.

3.1.1 D'après l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC, le juge fixe la contribution pécuniaire à verser par l'une des parties à l'autre. Tant que dure le mariage, les conjoints doivent donc contribuer, chacun selon ses facultés (art. 163 al. 1 CC), aux frais supplémentaires engendrés par l'existence parallèle de deux ménages. Chaque époux peut prétendre à participer d'une manière identique au train de vie antérieur (ATF 119 II 314 consid. 4b/aa; arrêts du Tribunal fédéral 5A_304/2013 du 1er novembre 2013 consid. 4.1; 5A_710/2009 du 22 février 2010 consid. 4.1, non publié aux ATF 136 III 257). Le montant de la contribution d'entretien se détermine en fonction des facultés économiques et des besoins respectifs des époux. Le législateur n'a pas arrêté de mode de calcul à cette fin. L'une des méthodes préconisées par la doctrine et considérée comme conforme au droit fédéral en cas de situations financières modestes ou moyennes et tant que dure le mariage (art. 176 al. 1 ch. 1 CC en relation avec l'art. 163 al. 1 CC), est celle dite du minimum vital, avec répartition de l'excédent (arrêt du Tribunal fédéral 5A_547/2012 du 14 mars 2013 consid. 4.1).

Le Tribunal fédéral a arrêté, pour toute la Suisse, une méthode uniforme de fixation de l'entretien - soit la méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent dite en deux étapes (arrêts du Tribunal fédéral 5A_311/2019 du 11 novembre 2020; 5A_891/2018 du 2 février 2021 et 5A_800/2019 du 9 février 2021 destinés à la publication).

Cette méthode implique de calculer dans un premier temps les moyens financiers à disposition, en prenant en considération tous les revenus du travail, de la fortune et les prestations de prévoyance, ainsi que le revenu hypothétique éventuel. Il s'agit ensuite de déterminer les besoins de la famille, en prenant pour point de départ les lignes directrices pour le calcul du minimum vital du droit des poursuites selon l'art. 93 LP. Les ressources à disposition sont réparties entre les différents membres de la famille, dans un ordre déterminé : il faut tout d'abord couvrir le minimum vital du droit des poursuites puis, si les moyens le permettent, le minimum vital du droit de la famille de chaque membre (ATF 147 III 265 consid. 7.1).

Dans le calcul des besoins, le point de départ est le minimum vital du droit des poursuites, comprenant l'entretien de base selon les normes d'insaisissabilité (NI 2022, RS/GE E 3 60.04; l'entretien de base OP comprend, notamment, l'alimentation, les vêtements et le linge, ainsi que les soins corporels et de santé), auquel sont ajoutées les dépenses incompressibles, soit les frais de logement, la prime d'assurance-maladie de base, les frais de transports et les frais de repas pris à l'extérieur (ATF 147 III 265 précité consid. 7.2).

Dans la mesure où les ressources financières le permettent, l'entretien convenable doit être élargi au minimum vital du droit de la famille. Pour les parents, les postes suivants entrent généralement dans cette catégorie : les impôts, les forfaits de télécommunication, les assurances, les frais de formation continue indispensable, les frais de logement correspondant à la situation financière (plutôt que fondés sur le minimum d'existence), un montant adapté pour l'amortissement des dettes et les primes d'assurance-maladie complémentaire. En revanche, sont exclus les autres postes tels que les voyages, les loisirs, etc., lesquels doivent être financés au moyen de l'excédent. Toutes les autres particularités du cas d'espèce doivent également être appréciées au moment de la répartition de l'excédent (ATF 147 III 265 précité).

Lorsqu'il entend tenir compte d'un revenu hypothétique, le juge doit examiner successivement deux conditions. Il doit d'abord déterminer si l'on peut raisonnablement exiger d'une personne qu'elle exerce une activité lucrative ou augmente celle-ci, eu égard, notamment, à sa formation, à son âge et à son état de santé. Le juge doit ensuite établir si la personne a la possibilité effective d'exercer l'activité ainsi déterminée et quel revenu elle peut en obtenir, compte tenu des circonstances subjectives susmentionnées, ainsi que du marché du travail (ATF 143 III 233 consid. 3.2; 137 III 102 consid. 4.2.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_461/2019 précité consid. 3.1).

Seules les charges effectives, à savoir celles qui sont réellement acquittées, peuvent être prises en compte pour le calcul de la contribution d'entretien (ATF 121 III 20 consid. 3a et les références; arrêts du Tribunal fédéral 5A_889/2018 du 15 mai 2019 consid. 3.2.1; 5A_771/2018 du 28 mars 2019 consid. 3.2). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, il n'est pas arbitraire de tenir compte d'un loyer hypothétique pour une durée transitoire, le temps que la partie concernée trouve un logement. Hormis cette exception, seuls les frais de logement effectifs ou raisonnables doivent être pris en compte et, en l'absence de telles charges, il appartient à la personne concernée de faire valoir ses frais de logement effectifs dès la conclusion d'un contrat de bail (arrêts du Tribunal fédéral 5A_405/2019 du 24 février 2020 consid. 5.3; 5A_461/2017 du 25 juillet 2017 consid. 3.3 et les références citées).

L'obligation d'entretien du conjoint l'emporte sur celle de l'enfant majeur (ATF 132 III 209 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_36/2016 du 29 mars 2016 consid. 4.1).

La détermination de la quotité de la contribution d'entretien relève du pouvoir d'appréciation du juge, qui applique les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC).

3.1.2 Lorsque les revenus (du travail et de la fortune) suffisent à l'entretien des conjoints, la substance de la fortune n'est normalement pas prise en considération. Dans le cas contraire, l'entretien peut être assuré par des prélèvements dans la fortune des époux, le cas échéant même par les biens propres, que ce soit en mesures provisionnelles ou dans la procédure au fond. Savoir si et dans quelle mesure il peut être exigé du débirentier qu'il entame sa fortune pour assurer l'entretien courant doit être apprécié au regard des circonstances concrètes. Sont notamment d'une importance significative le standard de vie antérieur, lequel peut éventuellement devoir être diminué, l'importance de la fortune et la durée pendant laquelle il est nécessaire de recourir à celle-ci. Pour respecter le principe d'égalité entre les époux, l'on ne saurait cependant exiger d'un conjoint qu'il entame sa fortune pour assurer l'entretien courant que si l'on impose à l'autre d'en faire autant, à moins qu'il n'en soit dépourvu (arrêts du Tribunal fédéral 5A_608/2019 du 16 janvier 2020 consid. 4.2.1 et 5A_524/2017 du 9 octobre 2017 consid. 5.1.3).

3.2

En l'espèce, il convient donc d'examiner les revenus et charges des parties, à l'aune des griefs soulevés.

3.2.1 S'agissant de l'appelant, il sera tenu compte, sous l'angle de la vraisemblance, d'un revenu mensuel arrondi de 10'500 fr., correspondant à un salaire de 5'656 fr., la baisse alléguée étant crédible, contrairement à ce que tente de soutenir l'intimée, plus une rente AVS de 1'847 fr. et des revenus de la fortune de 1'530 fr. et 1'351 fr. (non contestés).

Les revenus de l'intimée seront estimés, sous l'angle de la vraisemblance, à 4'500 fr. par mois, tentant compte du salaire perçu pour l'activité à 40% auprès de G______ SA (sans les heures supplémentaires qui ne sont pas régulières) et des revenus de ses activités annexes (enseignement en HES). Il ne lui sera pas alloué de revenu hypothétique à ce stade, les mesures protectrices n'étant pas destinées à durer et un temps d'adaptation devant en tout état lui être laissé pour cas échéant augmenter sa capacité de gain.

3.2.2 Les charges de l'appelant seront arrêtées à 8'200 fr. (arrondis), comprenant l'entretien de base en 1'200 fr. (et non 1'350 fr., l'entretien du conjoint l'emportant sur celui des enfants majeurs), le loyer du logement et du parking de 2'804 fr., l'assurance RC de 37 fr. (non contestée), 95 fr. de frais de téléphonie, rendus vraisemblables par pièces, les frais de femme de ménage en 700 fr., également établis par pièces et non contestés par l'intimée, 130 fr. de frais médicaux non couverts (frais de dentiste vraisemblablement récurrents, non contestés par l'intimée), 805 fr. de primes d'assurance LAMal et LCA, des frais de véhicule de 420 fr. (en tenant compte de frais d'essence vraisemblables de 70 fr. par mois, les autres montants étant établis par pièces) et 2'000 fr. d'impôts (estimation). Les frais de vacances n'ont pas à être pris en compte dans les charges.

Le disponible de l'appelant est ainsi de 2'300 fr.

Les charges de l'intimée seront fixées à 4'654 fr., comprenant l'entretien de base OP en 1'200 fr. comme pour l'appelant, 1'051 fr. correspondant à son loyer actuel (l'intimée n'ayant produit aucune recherche d'un autre logement), les primes d'assurance-maladie LAMal et LCA de 1'011 fr., des frais médicaux non remboursés de vraisemblablement 282 fr. (selon attestation de la caisse maladie de 2021), des frais de transport de 110 fr. (tels qu'allégués par elle en appel et correspondant aux frais d'abonnement TPG, CFF et J______) et des impôts en 1'000 fr. (estimation). Les frais de femme de ménage ne sont pas même rendus vraisemblables et ceux de vacances n'ont pas à être pris en compte dans les charges.

Son déficit est ainsi de 154 fr.

Après paiement du déficit de l'intimée, l'excédent du couple est de 2'146 fr., soit divisé par deux de 1'073 fr. La contribution due par l'appelant à l'intimée sera ainsi fixée à 1'250 fr. (154 fr. + 1'073 fr.).

Le dies a quo (non contesté à titre subsidiaire) sera également confirmé.

Il n'y a pas lieu de contraindre l'appelant à entamer sa fortune pour contribuer plus largement à l'entretien de l'intimée, celle-ci n'ayant pas rendu vraisemblable un train de vie élevé des parties durant la vie commune. En revanche, il pourra y puiser pour continuer de contribuer à l'entretien de ses enfants majeurs.

3.2.3 L'appel sera donc admis. Le chiffre 3 du dispositif du jugement entrepris sera en conséquence modifié dans le sens qui précède.

4. Compte tenu de la situation financière des parties et de l'issue du litige, les frais judicaires de première et seconde instance seront mis à leur charge à raison d'une moitié chacune.

La quotité de ceux de première instance fixée conformément à la loi sera confirmée. Les frais judiciaires d'appel seront fixés à 1'000 fr. (art. 96 CPC; art. 31 et 37 RTFMC).

L'appelant sera condamné à verser 1'000 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

La part des frais incombant à l'intimée, qui plaide au bénéfice de l'assistance judiciaire, sera provisoirement supportée par l'Etat de Genève.

Le litige relevant du droit de la famille, chaque partie supportera ses propres dépens (art. 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 6 février 2023 par A______ contre le jugement JTPI/1116/2023 rendu le 23 janvier 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/8764/2022.

Au fond :

Annule les chiffres 3 et 7 du dispositif du jugement entrepris et, statuant à nouveau sur ces points :

* Rectification d'erreur matérielle du 7 mars 2024 (art. 334 CPC)

 

Condamne A______ à verser en mains de B______, par mois et d'avance, au titre de contribution à son entretien, la somme de 1'500 fr. 1'250 fr.* pas mois dès le 15 septembre 2021.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de première instance et d'appel à 2'000 fr. et les met à la charge des parties à raison d'une moitié chacune.

Condamne A______ à verser 1'000 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Dit que la part des frais judiciaires à charge de B______ est provisoirement supportée par l'Etat de Genève.

Dit que chaque partie supporte ses dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Madame Pauline ERARD,
Madame Paola CAMPOMAGNANI, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.

 

Le président :

Cédric-Laurent MICHEL

 

La greffière :

Sandra CARRIER

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse supérieure à 30'000 fr.