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Décisions | Chambre civile

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C/18797/2021

ACJC/148/2024 du 06.02.2024 sur JTPI/8545/2023 ( OO ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/18797/2021 ACJC/148/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 6 FEVRIER 2024

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par la 19ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 28 juillet 2023, représentée par Me Lida LAVI, avocate, LAVI AVOCATS, rue Tabazan 9, 1204 Genève,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé, représenté par Me Oriana JUBIN, avocate, ONLEGAL c/o Lawffice SA, rue du Général Dufour 22, case postale 315,
1211 Genève 1.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/8545/2023 du 28 juillet 2023, reçu par A______ le 4 août 2023, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant par voie de procédure ordinaire, a dissout par le divorce le mariage contracté par A______ et B______ (ch. 1 du dispositif), laissé aux parties l'autorité parentale conjointe sur leur fille C______, née le ______ 2015 (ch. 2), attribué la garde exclusive de l'enfant à A______ (ch. 3) et réservé à B______ un large droit de visite (ch. 4), arrêté l'entretien convenable de C______, allocations familiales déduites, à 375 fr. [par mois] jusqu'à l'âge de 10 ans, puis à 575 fr. [par mois dès l'âge de 10 ans] (ch. 5), donné acte à B______ de son engagement à verser en mains de A______, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, à titre de contribution à l'entretien de C______, la somme de 500 fr. jusqu'au 30 septembre 2024 (ch. 6), donné acte à B______ de son engagement à reverser en mains de A______, chaque mois et dans leur intégralité, dès le 1er octobre 2024, les rentes pour enfant perçues mensuellement de la part de la Caisse de compensation D______ et de la caisse de pension E______ (ch. 7), dit que les allocations familiales continueraient à être perçues par A______ (ch. 8), dit que la bonification pour tâches éducatives était attribuée à celle-ci (ch. 9), ordonné à la caisse de pension E______ de verser, au débit du compte LPP au nom de B______, la somme de 26'500 fr. 21 en faveur du compte de libre passage n° 1______ détenu par A______ auprès de la Fondation institution supplétive LPP (ch. 10), donné acte aux parties de ce qu'elles renonçaient à se réclamer réciproquement une contribution à leur propre entretien (ch. 11), condamné, en tant que de besoin, B______ à restituer à A______ divers effets personnels réclamés par celle-ci au titre de la liquidation du régime matrimonial (ch. 12), dit que, cela fait, les parties avaient liquidé ledit régime et n'avaient plus aucune prétention à faire valoir l'une envers l'autre de ce chef (ch. 13), arrêté les frais judiciaires à 3'000 fr., répartis par moitié entre les parties et laissés à la charge de l'Etat de Genève (ch. 14), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 15) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 16).

B.            a. Par acte expédié le 3 septembre 2023 à la Cour de justice, A______ a formé appel de ce jugement, concluant à l'annulation du chiffre 10 de son dispositif et, cela fait, à ce que la Cour ordonne le partage par moitié "de l'économie LPP réalisée par les époux pendant la durée du mariage", confirme le jugement attaqué pour le surplus et déboute B______ de toutes autres conclusions.

Dans son acte d'appel, elle a précisé qu'en cas de partage par moitié des avoirs de prévoyance professionnelle cotisés par les parties durant le mariage, le montant qui devait être transféré à ce titre sur son compte de libre passage auprès de la Fondation supplétive LP s'élevait à 53'438 fr. 86.

Elle a produit des pièces nouvelles.

b. dans sa réponse du 17 octobre 2023, B______ a conclu à la confirmation du jugement attaqué, au déboutement de A______ de toutes autres conclusions et à la condamnation de la précitée en tous les dépens.

c. Dans sa réplique du 16 novembre 2023, A______ a persisté dans ses conclusions.

Elle a allégué des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles.

d. B______ a dupliqué le 20 décembre 2023, persistant dans ses conclusions.

e. La cause a été gardée à juger le 19 janvier 2024, ce dont les parties ont été avisées le jour même.

C. Il ressort de la procédure les faits pertinents suivants :

a. A______ (ci-après également l'ex-épouse), née [A______] le ______ 1982 à F______ (France), de nationalités algérienne et française, et B______ (ci-après également l'ex-époux), né le ______ 1959 à Genève, de nationalité italienne, se sont mariés le ______ 2008 à Genève.

L'enfant C______, née le ______ 2015 à Genève, est issue de cette union.

b. A______ et B______ se sont séparés le 31 mai 2019.

c. Par jugement JTPI/14010/2020 du 13 novembre 2020, le Tribunal, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a notamment autorisé les parties à vivre séparées, attribué à B______ la jouissance du domicile conjugal, attribué la garde de C______ à A______, réservé à B______ un large droit de visite et condamné le précité à contribuer à l'entretien de sa fille à hauteur de 1'800 fr. par mois (dont 1'250 fr. de contribution de prise en charge), allocations familiales non comprises.

d. Par acte déposé le 30 septembre 2021 devant le Tribunal, A______ a formé une demande unilatérale en divorce, concluant notamment au partage par moitié de l'économie LPP réalisée par les époux pendant la durée du mariage.

De son côté, B______ s'est opposé au partage des avoirs de prévoyance cotisés par les parties durant le mariage, faisant valoir qu'il était désormais âgé de 62 ans et qu'il prendrait sa retraite le 1er octobre 2024, alors que A______, de 23 ans sa cadette, disposerait encore de nombreuses années après le prononcé du divorce pour se constituer une prévoyance professionnelle adéquate.

e. Dans leurs plaidoiries finales écrites du 14 avril 2023, les parties ont persisté dans leurs conclusions s'agissant du partage des avoirs de prévoyance.

La cause a ensuite été gardée à juger par le Tribunal.


 

f. La situation personnelle et financière des parties se présente comme suit :

f.a A______ est titulaire d'un permis C et parle couramment le français et l'arabe (sa langue maternelle). Selon son curriculum vitae, elle a suivi une formation d'assistante maternelle à domicile auprès de la Fondation G______ en 2011, ainsi qu'une formation intitulée "______ pour personne âgée" auprès de la Résidence H______ en 2017. Elle a travaillé successivement comme garde d'enfants à domicile entre 2008 et 2011, comme assistante maternelle auprès de I______ entre 2011 et 2016, comme auxiliaire de santé au sein d'un établissement médico-social (EMS) en 2017, puis comme employée de conditionnement au sein des J______ en 2021.

Devant le Tribunal, A______ a déclaré avoir cessé de travailler quelques mois après la naissance de C______, d'entente avec son ex-époux, puis avoir repris une activité salariée comme garde d'enfants à compter du mois de juillet 2021. Considérant toutefois que son salaire était dérisoire par rapport aux heures de travail réalisées, elle avait donné sa démission le 29 septembre 2021 et s'était retrouvée au chômage. Selon les fiches de l'assurance-chômage relatives à ses recherches d'emploi pour les mois de janvier à juin 2022, elle a effectué pendant cette période dix postulations par mois - dont plusieurs à un taux d'activité de 100% - dans les domaines de la petite enfance (auxiliaire de crèche, nounou, maman de jour, baby-sitter), du nettoyage (femme de ménage, employée de maison) et des soins à la personne (auxiliaire en soins pour personnes âgées). Elle a également publié et répondu à quelques annonces sur internet en qualité d'assistante maternelle diplômée bénéficiant de sept à neuf ans d'expérience. Durant l'année 2022, elle a suivi une mesure de réinsertion professionnelle d'une durée de six mois auprès de la Fondation K______, ainsi qu'un stage de quatre semaines en qualité d'employée de conditionnement auprès de la chocolaterie L______.

Lors de l'audience du Tribunal du 12 octobre 2022, A______ a déclaré qu'il lui était difficile de continuer à exercer une activité comme garde d'enfants en raison de ses problèmes de dos. A cet égard, elle a produit deux attestations médicales datant de mai et août 2022, dont il ressort qu'elle souffre de rachialgies communes (douleurs lombaires) et qu'elle est par ailleurs en bonne santé.

Entre le 1er novembre et le 31 décembre 2022, puis entre le 20 février et le 31 août 2023, A______ a été engagée - par contrats de travail de durée déterminée - en tant qu'employée de conditionnement auprès de la chocolaterie L______, pour un salaire horaire brut de base de 21 fr. 20 (tarif 2022), respectivement de 22 fr. 25 (tarif 2023), et un horaire de travail compris entre 20 et 42 heures par semaine. Selon son certificat de salaire pour la période de novembre à décembre 2022, elle a perçu à ce titre un revenu brut de 9'912 fr. (soit 8'516 fr. nets). Sa fiche de salaire pour décembre 2022 fait état d'un salaire net de 4'617 fr. 45 (207.25 heures de travail x 25 fr. 93 [salaire horaire brut]). Ses fiches de salaire pour l'année 2023 font état d'un salaire net de 1'290 fr. (55.50 heures de travail x 27 fr. 05 [salaire horaire brut]) en février, 4'109 fr. 60 en mars (177.25 heures x 27 fr. 05), 3'400 fr. 75 (146.75 heures x 27 fr. 05) en avril, 2'860 fr. 35 (123.50 heures x 27 fr. 05) en mai, 2'261 fr. 80 (97.75 heures x 27 fr. 05) en juin, 1'564 fr. 60 (67.75 heures x 27 fr. 05) en juillet et 1'965 fr. 55 (85 heures x 27 fr. 05) en août.

A______ a par ailleurs perçu des prestations d'aide financière de la part de l'Hospice général, à tout le moins en 2022 et 2023.

A partir du 1er octobre 2023, elle a été engagée - par contrat de travail de durée indéterminée - comme employée de conditionnement auprès de la chocolaterie L______ à un taux de 80 % (33.36 heures de travail par semaine) pour un salaire annuel brut de 42'000 fr., treizième salaire inclus (celui-ci étant versé en décembre). En octobre 2023, elle a perçu un salaire net de 2'639 fr. 75.

Le Tribunal a arrêté ses charges mensuelles - hors impôts - à 2'078 fr., comprenant la base d'entretien (1'350 fr.), les frais de logement (457 fr., 80% x 571 fr. 50 [loyer, allocation logement déduite]), les primes d'assurance-maladie (201 fr., subside déduit) et les frais de transport (70 fr., abonnement TPG).

A teneur des pièces produites, les avoirs de prévoyance cotisés par A______ pendant le mariage s'élèvent à 13'907 fr. 77, montant admis par l'ex-époux.

f.b B______ travaille à plein temps en qualité de concierge auprès de M______ SA pour un salaire annuel brut de 65'650 fr. (5'050 fr. x 13). Il exerce cette activité au N______. Dans la mesure où il effectue des services de piquet durant la nuit et le week-end à raison d'une semaine par mois, il perçoit en sus de son salaire mensuel fixe des indemnités pour service de garde.

En 2021, son salaire annuel s'est élevé à 76'552 fr. bruts, respectivement 66'197 fr. nets, ce montant comprenant les allocations familiales, les indemnités pour service de garde, ainsi qu'une indemnité d'ancienneté unique d'un montant brut de 1'265 fr.

B______ atteindra l'âge légal de la retraite le 1er octobre 2024. Selon les projections établies par la Caisse de compensation D______ et la caisse de pension E______, il percevra dès cette date - en l'absence de partage des avoirs de prévoyance cotisés pendant le mariage - une rente de vieillesse mensuelle (AVS + 2ème pilier) de 3'083 fr. 10 (1'931 fr. + 1'152 fr. 10 [13'825 fr. / 12]) et une rente mensuelle pour enfant de 1'002 fr. 40 (772 fr. + 230 fr. 40 [2'765 fr. / 12]).

A teneur des pièces produites, les avoirs de prévoyance de B______ totalisaient environ 216'000 fr. au 30 septembre 2021, date du dépôt de la demande en divorce. Ses avoirs de prévoyance cotisés pendant le mariage s'élèvent à 120'785 fr. 50, montant admis par l'ex-épouse.

Devant le Tribunal, les parties ont confirmé qu'en cas de partage par moitié des avoirs cotisés pendant le mariage, le montant revenant à ce titre à l'ex-épouse se montait à 53'438 fr. 86 ([120'785 fr. 50 + 13'907 fr. 77] x 0.5 - 13'907 fr. 77).

Selon les projections établies par la caisse de pension E______, en cas de transfert du montant de 53'438 fr. 86 sur le compte de libre passage de l'ex-épouse, B______ devrait percevoir, dès le 1er octobre 2024, une rente vieillesse (2ème pilier) de 902 fr. 65 par mois (10'831 fr. 90 / 12) et une rente pour enfant de 180 fr. 50 par mois (2'166 fr. 40 /12).

Le Tribunal a arrêté ses charges mensuelles - hors impôts - à 2'335 fr., comprenant la base d'entretien (1'200 fr.), le loyer de son studio (543 fr.), les primes d'assurance-maladie (363 fr.) et les frais de transport (229 fr., soit 159 fr. de frais de taxi pour se rendre à son lieu de travail la nuit et le week-end + 70 fr. d'abonnement TPG).

f.c C______ est âgée de 8 ans et perçoit des allocations familiales de 311 fr. par mois.

Le Tribunal a arrêté ses charges mensuelles à 674 fr., comprenant l'entretien de base LP (400 fr.), la part au loyer de sa mère (114 fr., 20% x 571 fr. 50), les primes d'assurance maladie (25 fr., subside déduit), les frais de cuisines scolaires (90 fr.) et les frais de transport (45 fr., abonnement TPG).

D.           Dans le jugement entrepris, le Tribunal a retenu, s'agissant de la situation financière des parties, que A______ avait travaillé pendant le mariage, également après la naissance de sa fille, soit entre 2008 et 2017, en 2021, en novembre et décembre 2022, puis dès février 2023. En décembre 2022, elle avait travaillé 207.25 heures, ce qui équivalait à un taux d'activité supérieur à 100%, tandis que plusieurs de ses recherches d'emploi concernaient des emplois à temps plein. La prise en charge de C______ ne l'empêchait donc pas d'exercer une activité salariée lui permettant de couvrir l'entier de ses charges. Agée de 40 ans, elle était en bonne santé, disposait de plusieurs années d'expérience professionnelle et bénéficiait notamment d'une formation d'assistante maternelle à domicile. Il ne ressortait pas du dossier qu'il existerait un frein sérieux à l'employabilité de l'ex-épouse dans son domaine de compétence. Si elle indiquait souffrir de lombalgies l'empêchant de continuer à travailler comme nounou, la grande majorité de ses recherches d'emploi en 2022 avait porté sur des postes de maman de jour, d'employée de maison, d'assistante maternelle ou d'auxiliaire de soins. En tout état, aucun empêchement n'était allégué en lien avec sa nouvelle activité d'employée de conditionnement.

En travaillant à 80%, A______ pouvait réaliser un salaire mensuel brut d'au moins 3'495 fr. (soit, selon le calculateur statistique Salarium, le salaire brut médian pour une employée de 40 ans, titulaire d'un permis C, sans formation professionnelle complète, sans ancienneté et sans fonction de cadre, exerçant une activité dans la région lémanique, à hauteur de 32 heures par semaine, dans la branche économique "industries alimentaires" et le groupe professionnel "assistant-e-s de fabrication de l'alimentation"), soit un salaire mensuel net d'environ 3'041 fr. Après déduction de ses charges, y compris ses impôts estimés à 78 fr. par mois, elle bénéficiait d'un disponible mensuel de 885 fr.

De son côté, B______ réalisait un salaire net - déduction faite des allocations familiales et de l'indemnité d'ancienneté perçue en 2021 dont le versement n'avait pas vocation à se répéter - d'environ 5'125 fr. Dès octobre 2024, il percevrait une rente de vieillesse mensuelle de 3'083 fr. 10 et une rente pour enfant de 1'002 fr. 40 (ce qui suffisait à couvrir l'entretien convenable de C______). Après déduction de ses charges, y compris ses impôts estimés à 133 fr. par mois, il bénéficierait dès cette date d'un disponible mensuel d'environ 615 fr.

Si A______ avait travaillé entre 2008 et 2017, puis dès 2021, elle n'avait toutefois pas pu se constituer de prévoyance "classique", le salaire perçu pendant plusieurs années n'ayant vraisemblablement pas atteint le minimum fixé par la LPP. A compter de 2021, elle avait travaillé comme employée de conditionnement auprès des J______, puis effectué un stage en cette même qualité auprès de L______, établissement qui l'avait engagée dès fin 2022. Elle avait ainsi considérablement amélioré ses perspectives de gain futures en intégrant ce nouveau corps de métier, à l'exemple du salaire net de 4'617 fr. 45 qu'elle avait perçu en décembre 2022.

Compte tenu de cette amélioration, de la grande différence d'âge entre les parties et du fait que B______ serait à la retraite dans environ une année, alors que A______ pourrait encore cotiser plus d'une vingtaine d'années pour se constituer une prévoyance adéquate, il se justifiait d'allouer à celle-ci non pas la moitié mais le 30% des avoirs cumulés par les parties durant le mariage en 134'693 fr. 27 (120'785 fr. 50 + 13'907 fr. 77). Par conséquent, il convenait de prélever la somme de 26'500 fr. 21 (134'693 fr. 27 x 0.3 - 13'907 fr. 77) sur le compte de prévoyance de l'ex-époux et de la transférer sur le compte de libre passage de l'ex-épouse.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC), dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions de première instance, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

En l'espèce, le litige porte sur le partage des avoirs de prévoyance professionnelle des parties, lesquels totalisent environ 135'000 fr., de sorte que la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. La voie de l'appel est ainsi ouverte.

1.2 L'appel a été formé dans le délai et selon la forme prescrits par la loi (art. 130, 131, 145 al. 1 let. b et 311 al. 1 CPC).

Si l'appelante n'a pas chiffré ses conclusions devant la Cour, le montant qu'elle réclame au titre du partage des avoirs de prévoyance ressort clairement de la motivation de son appel, mise en relation avec le dispositif du jugement attaqué.

L'appel est dès lors recevable.

1.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC).

Le juge établit les faits d'office pour toutes les questions qui touchent à la prévoyance professionnelle (art. 277 al. 3 CPC), étant néanmoins précisé que la maxime d'office et la maxime inquisitoire ne s'imposent que devant le premier juge (arrêts du Tribunal fédéral 5A_18/2018 du 16 mars 2018 consid. 6 et 5A_862/2012 du 30 mai 2013 consid. 5.3.2 et 5.3.3). En seconde instance, les maximes des débats et de disposition ainsi que l'interdiction de la reformatio in pejus sont applicables (ATF 129 III 481 consid. 3.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_478/2016 du 10 mars 2017 consid. 10.1 et les références citées).

1.4 Les parties étant domiciliées à Genève, la Cour est compétente pour statuer sur le partage de leurs avoirs de prévoyance professionnelle, seul point encore litigieux en appel (art. 63 al. 1 et 1bis LDIP).

Le droit suisse est par ailleurs applicable (art. 63 al. 2 LDIP).

1.5 Les allégués nouveaux et pièces nouvelles dont l'appelante se prévaut en appel sont recevables, car postérieurs à la date du dépôt des plaidoiries finales écrites, à réception desquelles le Tribunal a gardé la cause à juger (art. 317 al. 1 CPC).

2. L'appelante fait grief au Tribunal de ne pas avoir ordonné le partage par moitié des avoirs LPP cotisés par elle-même et son ex-époux pendant le mariage.

2.1 En vertu de l'art. 122 CC, les prétentions de prévoyance professionnelle acquises durant le mariage et jusqu'à l'introduction de la procédure de divorce sont partagées entre les époux. Les prestations de sortie acquises, y compris les avoirs de libre passage et les versements anticipés pour la propriété du logement, sont partagées par moitié (art. 123 al.1 CC).

Selon l'art. 124b al. 2 CC, le juge attribue moins de la moitié de la prestation de sortie au conjoint créancier ou n'en attribue aucune pour de justes motifs. C'est le cas en particulier lorsque le partage par moitié s'avère inéquitable en raison de la liquidation du régime matrimonial ou de la situation économique des époux après le divorce (ch. 1), ou en raison des besoins de prévoyance de chacun des époux, compte tenu notamment de leur différence d'âge (ch. 2).

Le nouveau droit, entré en vigueur le 1er janvier 2017, n'exige plus que le partage s'avère "manifestement" inéquitable, ce qui doit permettre au juge de prononcer plus facilement un refus que sous l'ancien droit. Il y a iniquité lorsqu'un partage par moitié de l'avoir de prévoyance professionnelle de l'un des époux engendre pour lui une situation qui paraît choquante au regard de celle de son conjoint (LEUBA, Le nouveau droit du partage de la prévoyance professionnelle en cas de divorce, in FamPra.ch 2017 p. 25).

Il y a par exemple iniquité selon l'art. 124b al. 2 ch. 1 CC lorsqu'une épouse active a financé la formation de son mari et que celui-ci va exercer une profession qui lui permettra de se constituer une meilleure prévoyance vieillesse que celle-là. Il en va de même lorsque l'un des époux est employé, dispose d'un revenu et d'un deuxième pilier modestes, tandis que l'autre conjoint est indépendant, ne dispose pas d'un deuxième pilier, mais se porte beaucoup mieux financièrement (Message du Conseil fédéral du 29 mai 2013 concernant la révision du code civil suisse, partage de la prévoyance professionnelle en cas de divorce, FF 2013, p. 4370 et 4371 [ci-après : Message]; arrêt du Tribunal fédéral 5A_945/2016 du 19 mai 2017 consid. 3.1.2 et les références citées). L'iniquité se mesure à l'aune des besoins de prévoyance de l'autre conjoint. Il importe de ne pas vider de sa substance le principe du partage par moitié. Des différences de fortune ou de perspectives de gains ne constituent pas un motif suffisant de déroger à ce principe (Message, p. 4370 et 4371). Toute inégalité consécutive au partage par moitié ou persistant après le partage par moitié ne constitue pas forcément un juste motif au sens de cette disposition. Les proportions du partage ne doivent toutefois pas être inéquitables (Message, p. 4371).

Il peut ainsi être justifié de déroger au partage par moitié lorsque les deux époux ont des revenus et des perspectives de prestations de vieillesse futures comparables, mais ont constitué des avoirs de niveaux très différents durant le mariage du fait qu'ils ont une grande différence d'âge; c'est pourquoi la différence d'âge est citée expressément à l'art. 124b al. 2 ch. 2 CC (Message, p. 4371; arrêt du Tribunal fédéral 5A_153/2019 du 3 septembre 2019 consid. 6.3.2). En principe, la différence d'âge pertinente se situe aux alentours de 20 ans (LEUBA/UDRY, Partage du 2ème pilier : premières expériences, in Entretien de l'enfant et prévoyance professionnelle, 9ème symposium en droit de la famille, 2018, p. 1 ss, p. 17 et les références citées).

2.2 En l'espèce, il n'est pas contesté que les prestations de sortie acquises par les parties durant le mariage doivent, en principe, être partagées conformément aux art. 122 et 123 CC. Il convient dès lors d'examiner si, comme l'a retenu le Tribunal, une exception au partage se justifie sur la base de l'art. 124b al. 2 CC.

A la date du prononcé du divorce, les parties étaient âgées respectivement de 64 et 41 ans, leur mariage ayant duré une dizaine d'années (d'octobre 2018 à fin mai 2019, date de la séparation). Lors du dépôt de la demande en divorce, les avoirs de prévoyance de l'intimé s'élevaient à environ 216'000 fr., dont 120'785 fr. 50 (soit près de 60% de ses avoirs totaux) accumulés pendant le mariage. De son côté, l'appelante, qui a commencé à cotiser au 2ème pilier en 2011, avait accumulé une prestation de sortie de 13'907 fr. 77. Il n'est au surplus pas contesté que l'intimé atteindra très prochainement l'âge de la retraite, contrairement à l'appelante qui est de 23 ans sa cadette.

Ainsi que l'a retenu le Tribunal, il apparaît que vu son âge, son état de santé (à teneur des certificats médicaux produits, l'ex-épouse est en bonne santé, aucune incapacité de travail - même partielle - n'étant évoquée en lien avec les rachialgies diagnostiquées), son expérience professionnelle (acquise avant et après la naissance de sa fille) dans les domaines de la petite enfance, des soins à la personne et de l'industrie alimentaire, ainsi que de son niveau de formation, les perspectives de prestations de vieillesse futures de l'appelante sont plus ou moins comparables à celles de l'intimé. A cet égard, il sera relevé qu'en augmentant son taux d'activité à 100% auprès de son employeur actuel, l'appelante serait en mesure de cotiser à la LPP - au cours des 20 prochaines années - sur la base d'un revenu brut annualisé d'au minimum 52'500 fr. (42'000 fr. x 100 / 80), soit un revenu se rapprochant de celui que l'intimé perçoit à ce jour, au terme de sa carrière professionnelle. A cela s'ajoute que la baisse de rente de l'ex-époux ensuite d'un partage des avoirs de prévoyance par moitié représente près de 250 fr. par mois (1'152 fr. 10 - 902 fr. 65), ce qui n'est pas négligeable vu sa situation financière modeste.

A la lumière de ce qui précède, la décision du Tribunal d'ordonner le partage des avoirs LPP à concurrence de 30% et non de 50% - afin de tenir compte de la situation de l'intimé qui, du fait de son âge plus avancé et de la progressivité des cotisations, a accumulé des prétentions de prévoyance beaucoup plus importantes durant le mariage, contrairement à l'appelante qui bénéficie encore d'une vingtaine d'années pour se constituer une prévoyance suffisante, sur la base de revenus à peu près comparables à ceux de son ex-époux - n'est pas critiquable.

Le jugement attaqué sera en conséquence confirmé.

3. Les frais judiciaires d'appel seront fixés à 1'000 fr. (art. 30 et 35 RTFMC) et mis à la charge de l'appelante qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Celle-ci plaidant au bénéfice de l'assistance judiciaire, ces frais seront laissés provisoirement à la charge de l'Etat de Genève, qui pourra en demander le remboursement ultérieurement aux conditions de l'art. 123 CPC.

Compte tenu de la nature familiale du litige, chaque partie conservera à sa charge ses propres dépens d'appel (art. 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 3 septembre 2023 par A______ contre le chiffre 10 du dispositif du jugement JTPI/8545/2023 rendu le 28 juillet 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/18797/2021.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'000 fr. et les met à la charge de A______.

Laisse provisoirement ces frais à la charge de l'Etat de Genève.

Dit que chacune des parties supportera ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.