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Décisions | Chambre civile

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C/14245/2023

ACJC/1456/2023 du 31.10.2023 ( IUS ) , ADMIS

En fait
En droit

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/14245/2023 ACJC/1456/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 31 OCTOBRE 2023

 

Entre

A______ SA, sise ______, Belgique, requérante, représentée par
Me Anne-Virginie LA SPADA-GAIDE, avocate, avenue de Champel 8C,
case postale 385, 1211 Genève 12,

et

B______ AG, sise ______ [ZG], citée, représentée par Me Bernard VOLKEN, avocat, Konsumstrasse 16A, 3007 Bern.

 


EN FAIT

A. a. La société A______ SA, sise en Belgique, est active depuis 1979 dans la fabrication et la commercialisation de tabac.

b. Elle fabrique et commercialise notamment du tabac sans combustion à usage oral, sous forme de poudre/pâte humide noire à mâcher, sous la marque C______/D______ :

[image : 4 vues sur le produit]

 

Ce produit est conditionné dans une boîte cylindrique noire d'un diamètre de 5.2 cm et d'une hauteur de 1.5 cm. Elle est fermée par une bande adhésive sur laquelle est notamment mentionné "A______" et sont illustrées deux étoiles. Les bords de la boîte sont légèrement crénelés. Celle-ci se compose, sur ces deux faces, de trois contours de cercles et d'un disque central. Sur la face du dessus, le premier contour de cercle, de couleur noire, mesure 0.3 cm, le deuxième, de couleur blanche, mesure 0.6 cm et contient des avertissements sur les risques pour la santé liés à la consommation du tabac, et le troisième, de couleur noire, mesure 0.3 cm. Le disque central, de couleur brune, mesure 2.5 cm et contient la mention "C______" et celle incurvée "D______". La face du dessous mentionne notamment que le produit est fabriqué en Belgique.

c. A teneur des pièces produites, une des sociétés [du groupe] A______, soit A______ SA, vend en Suisse des boîtes C______/D______ depuis 2005.

d. Entre 2018 et 2023, la société suisse E______ AG, en tant que distributeur, a acheté à A______ SA 4'819'000 boîtes de C______/D______ pour un montant total de 5'706'659 euros.

E______ AG a revendu ces boîtes à des grossistes ou détaillants dans toute la Suisse, notamment à ______.

e. La société suisse B______ AG, sise à F______ [ZG], est active dans le commerce de marchandises de toutes sortes.

f. Elle commercialise notamment du tabac sans combustion à usage oral, sous forme de poudre/pâte humide verte à mâcher, sous la marque G______/H______ :

[image : 4 vues sur le produit]

 

Ce produit est conditionné dans une boîte cylindrique verte foncée d'un diamètre de 5.2 cm et d'une hauteur de 1.5 cm. Elle est fermée par une bande adhésive sur laquelle sont notamment illustrées quatre étoiles. Les bords de la boîte sont légèrement crénelés. Celle-ci se compose, sur ces deux faces, de trois contours de cercles et d'un disque central. Sur la face du dessus, le premier contour de cercle, de couleur noire, mesure 0.2 cm, le deuxième, de couleur blanche, mesure 0.6 cm et contient des avertissements sur les risques pour la santé liés à la consommation du tabac, et le troisième, de couleur noire, mesure 0.2 cm. Le disque central, de couleur verte kaki, mesure 2.8 cm et contient la mention "G______", au-dessus de laquelle figure un logo, et celle incurvée "H______". La face du dessous mentionne notamment que le produit est fabriqué en Suisse ("Hergestellt in der Schweiz").

g. B______ AG a notamment produit un formulaire de l'Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières, rempli par le fabricant du G______/H______ en février 2023, visant à fixer le taux d'imposition de ce produit.

Il ressort de ce formulaire que le G______/H______ est catégorisé "tabacs manufacturés (indigène)".

h. Sur le site internet de B______ AG, soit snushus.ch, disponible en allemand, français, anglais et italien, le descriptif de la boîte G______/H______, vendue au prix de 6 fr. 90, indique que "le G______ est plus fort que d'autres produits de tabac à chiquer comme le C______".

Ce site internet mentionne également, dans sa rubrique foire aux questions (FAQ), que le "snus" frais, soit la poudre de tabac humide, est importé de Suède.

i. Par courrier recommandé du 14 avril 2023, A______ SA a indiqué à B______ AG avoir récemment appris qu'elle commercialisait en Suisse, sous la marque G______/H______, une boîte de tabac sans combustion imitant de manière servile la boîte C______/D______. La forte ressemblance entre ces produits créait un risque de confusion au sens de la loi fédérale contre la concurrence déloyale du 19 décembre 1986 (ci-après : LCD; RS 241) et la reprise de tous les éléments caractéristiques de la boîte C______/D______ constituait un comportement parasitaire au sens de ladite loi.

A______ SA a ainsi mis en demeure B______ AG de cesser immédiatement toute fabrication, vente et/ou promotion des boîtes litigieuses que ce soit dans des points de ventes physiques ou sur internet, de rappeler les boîtes actuellement en possession de détaillants, de s'engager à s'abstenir de toute commercialisation de celles-ci et de communiquer la quantité de boîtes vendues au 14 avril 2023, le chiffre d'affaires global réalisé par la vente de celles-ci, ainsi que la quantité en stock, avec la confirmation de ce que ce stock serait détruit à ses frais.

j. Ce courrier a été suivi d'un rappel en date du 27 avril 2023.

k. B______ AG n'a pas fait suite à ces mises en demeure.

B. a. Par requête déposée le 10 juillet 2023 au greffe de la Cour de justice, A______ SA a conclu, sur mesures provisionnelles, à ce qu'il soit fait interdiction à B______ AG, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP, de fabriquer, faire la publicité, offrir, vendre, importer, exporter, mettre en circulation de toute autre manière ou de posséder à ces fins, des boîtes G______/H______ et à ce qu'il soit ordonné à la citée d'indiquer, en lien avec ce produit, la provenance du tabac sans combustion, ainsi que le nombre de boîtes en sa possession et qui ont été vendues en Suisse, sous suite de frais judiciaires et dépens.

S'agissant de la recevabilité de sa requête, A______ SA a allégué que le produit litigieux pouvait être obtenu dans toute la Suisse, soit sur le site internet de B______ AG soit en magasin, en particulier à ______, de sorte que cette ville constituait l'un des lieux de résultat de l'atteinte. A cet égard, elle a produit un ticket de caisse attestant de l'achat du produit litigieux auprès du [magasin] I______ situé à la gare de ______.

Sur le fond, elle a allégué que la citée violait l'art. 3 al. 1 let. d LCD. L'apparence originale de son produit C______/D______, commercialisé en Suisse depuis plus de vingt ans, remplissait une fonction distinctive permettant à l'acheteur moyen d'identifier sa provenance commerciale. Cette fonction d'individualisation était mise en danger par la citée, qui reprenait à l'identique toutes les caractéristiques de son produit, à savoir la forme de la boîte, ces dimensions, les couleurs, la configuration des étiquettes apposées sur les deux faces, les bords légèrement crénelés, ainsi que le motif de l'étoile sur la bande adhésive entourant la boîte. Cette ressemblance créait un risque de confusion entre les deux produits. Les autres boîtes de tabac sans combustion à usage oral présentent sur le marché suisse différaient fortement de son produit:

[image : huit produits différents]

 

A______ SA a également produit trois pages d'extraits internet de boîtes de tabac sans combustion à usage oral.

En reprenant toutes les caractéristiques de la boîte C______/D______, la citée violait également l'art. 3 al. 1 let. e LCD en adoptant un comportement parasitaire, en ce sens qu'elle tentait de s'approprier sa réputation, ce qui était corroboré par la comparaison mentionnée sur le site internet de la citée.

Enfin, la citée indiquait que son produit était fabriqué en Suisse, alors qu'elle mentionnait importer le "snus" de Suède, ce qui était incompatible et constituait une violation de l'art. 47 al. 3 let a de la loi fédérale sur la protection des marques et des indications de provenance du 28 août 1992 (ci-après: LPM; RS 232.11).

b. Dans sa réponse, B______ AG a conclu, préalablement, à ce qu'il soit ordonné à A______ SA de fournir un montant à tout le moins supérieur à 50'000 fr. au titre de sûretés, principalement, au rejet de la requête, dans la mesure de sa recevabilité, sous suite de frais judiciaires et dépens.

S'agissant de la recevabilité de la requête, elle a allégué ne pas avoir conclu d'accord de distribution avec le point de vente I______ situé à la gare de ______, de sorte que le produit acheté par la requérante n'émanait pas d'elle. La précitée n'avait pas établi l'existence d'un lien de rattachement suffisamment étroit pour admettre la compétence des juridictions ______.

Sur le fond, elle a fait valoir que la boîte C______/D______ ne présentait aucune originalité et ne bénéficiait ainsi pas de force distinctive. Certains exemples des boîtes produits par la requérante concernaient du "snus" sans tabac, raison pour laquelle aucun message d'avertissement contre les risques pour la santé n'y figurait. Par ailleurs, le tabac sans combustion à usage oral s'adressait à une catégorie particulière de consommateurs, notamment des sportifs, et non au grand public. Elle a produit des exemples de boîtes de tabac sans combustion à usage oral, afin de démontrer que la forme cylindrique était banale pour le conditionnement de ce type de produit. En tous les cas, les différences entre les produits concernés suffisaient à écarter tout risque de confusion (couleur, nom du produit, sonorité, graphisme ou encore consommateurs visés). En outre, en sa qualité de détaillant, elle vendait également le produit de la requérante sur son site internet, de sorte qu'elle avait un intérêt à ce que celui-ci s'écoule bien. Aucun comportement parasitaire ne pouvait donc lui être reproché. Elle n'avait pas commis d'acte de concurrence déloyale. Enfin, elle ne fabriquait pas le produit litigieux, qui provenait bien de Suisse. A cela s'ajoutait que la requérante ne disposait pas de la qualité pour agir au sens de l'art. 55 LPM, de sorte que sa conclusion tendant à la fourniture de renseignements était infondée.

Si la Cour faisait droit aux mesures provisionnelles requises, celles-ci lui infligeraient un dommage important, raison pour laquelle des sûretés devaient être ordonnées. En outre, la requérante n'avait pas de siège en Suisse, ce qui engendrerait des difficultés pratiques à un éventuel recouvrement.

Elle a notamment produit un test effectué en laboratoire, dont il ressort que le G______/H______ a une teneur en nicotine de 21 mg/g, alors que celle du C______/D______ s'élève à 11 mg/g.

c. Dans leurs réplique et duplique, les parties ont persisté dans leurs conclusions et A______ SA a, pour le surplus, conclu au rejet de la requête en sûretés formulée par la citée.

La requérante a nouvellement allégué qu'au jour du dépôt de sa requête, le G______/H______ était en rupture de stock sur le site internet de la citée et ce jusqu'au 6 septembre 2023, date à laquelle elle avait commandé ce produit, avec une adresse de livraison à ______ (allégués n° 52 à 55; pièce n° 25). Elle avait, en outre, eu connaissance, le 1er septembre 2023, d'un cas de confusion entre son produit et celui litigieux, à savoir que sur le site internet d'un tiers distributeur le G______/H______ avait été classé par erreur dans ses propres produits (allégués n° 56 à 58; pièce n° 26). Enfin, la marque G______/H______, déposée en février 2023, était détenue par la société J______ AG, administrée par K______ et L______, également administrateurs de la citée, de sorte que celle-ci n'était pas un simple distributeur du produit litigieux (allégués n° 59 à 65; pièces n° 27 et 28, soit des extraits internet de SWISSREG, base de données de l'Institut fédéral de la Propriété Intellectuelle, et du Registre du commerce du canton de Zoug).

B______ AG a conclu à l'irrecevabilité des allégués nouveaux susvisés n° 52 à 58.

d. Par avis du greffe de la Cour du 17 octobre 2023 les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. La Cour examine d'office sa compétence à raison du lieu et de la matière (art. 59 al. 2 let. b et 60 CPC).

1.1.1 Aux termes de l'art. 5 al. 1 CPC, la Chambre civile de la Cour (art. 120 al. 1 let. a LOJ) connaît en instance unique des litiges portant sur des droits de propriété intellectuelle (let. a) ou relevant de la loi contre la concurrence déloyale lorsque la valeur litigieuse dépasse 30'000 fr. (let. d). Cette compétence vaut également pour statuer sur les mesures provisionnelles requises avant litispendance (art. 5 al. 2 CPC).

1.1.2 En l'occurrence, la requérante fonde ses prétentions sur la LPM et la LCD. A ce stade, il n'y a pas lieu de trancher la question de savoir si la valeur litigieuse de 30'000 fr. est atteinte en matière de concurrence déloyale, puisque l'économie de procédure commande, en raison du cumul objectif d'actions présentant un lien étroit, d'admettre une compétence matérielle unique (ACJC/694/2018 du 27 avril 2018 consid. 1.1; ACJC/731/2017 du 15 juin 2017 consid. 1.1; Berger, in Berner Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 2012, n° 32 ad art. 5 CPC).

La compétence ratione materiae de la Cour est ainsi donnée.

1.2.1 La requérante ayant son siège à l'étranger, le présent litige est de nature internationale.

La compétence à raison du lieu, au niveau international, s'examine à la lumière de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (ci-après: CL), à laquelle la Suisse et la Belgique sont parties (art. 1 al. 2 LDIP).

L'art. 2 al. 1 CL prévoit que les personnes domiciliées sur le territoire d'un Etat lié par la présente Convention sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet Etat.

A teneur des art. 109 al. 2 et 129 LDIP, les actions portant sur la violation de droits de propriété intellectuelle ou fondée sur un acte illicite - les actes de concurrence déloyale étant des actes illicites (art. 2 LCD) - peuvent être intentées devant les tribunaux suisses du lieu de l'acte ou du résultat.

Selon l'art. 10 LDIP, sont compétents pour prononcer des mesures provisoires soit les tribunaux ou les autorités suisses qui sont compétents au fond (let. a), soit les tribunaux ou les autorités suisses du lieu de l'exécution de la mesure (let. b).

En matière de prétentions découlant du droit de la concurrence déloyale, il a été jugé que le lieu du résultat se trouve au lieu du marché affecté par la concurrence déloyale, c'est-à-dire où les produits ou les services concernés sont offerts en concurrence avec ceux d'autres entreprises, et non pas au lieu où se sont produites d'éventuelles conséquences patrimoniales (Dutoit, Droit international privé suisse, 2005, n° 6 ad art. 129 LDIP; Bonomi, Commentaire romand CL, 2011, n° 134 ad art. 5 CL). La même règle s'applique lorsque l'acte déloyal a été commis sur internet, le for du lieu du résultat se situant sur le marché où s'est produit l'acte anticoncurrentiel (arrêt du Tribunal fédéral 4C.341/2005 du 6 mars 2007 consid. 4.1 et 4.2; Bonomi, op. cit., n° 29 ad art. 129 LDIP; Dutoit, op. cit., n° 10b ad art. 129 LDIP). La seule accessibilité à un site internet ne suffit toutefois pas pour créer la compétence des tribunaux de ce lieu (Bonomi, op. cit., n° 135 ad art. 5 CL). La doctrine préconise d'exiger un critère de rattachement supplémentaire, tel par exemple une publicité spécialement destinée à la Suisse en cas de violation du droit à une marque (Ducor, Commentaire romand LDIP, 2011, n° 39 ad art. 109 LDIP).

1.2.2 En l'espèce, la citée ayant son siège en Suisse, la compétence internationale des autorités suisses est donnée.

La citée commercialise notamment le produit litigieux par le biais de son site internet, dont le nom de domaine comporte l'extension suisse ".ch" et qui offre la possibilité de choisir la langue française. La Suisse romande est donc un public cible de la citée et le canton de ______ comporte indiscutablement un nombre important d'acheteurs potentiels. Il convient donc d'admettre que la réalité de ventes effectuées du produit litigieux par la citée à des clients domiciliés dans le canton de ______, par le biais de son site internet, est rendue suffisamment vraisemblable.

Contrairement à ce que soutient la citée, la requérante se prévalait déjà dans sa requête du 10 juillet 2023 du fait que sa partie adverse commercialisait le produit litigieux sur son site internet, ce qui fondait la compétence à raison du lieu des juridictions ______. La vraisemblance de l'existence d'un point de vente physique à ______, par lequel la citée écoulerait le produit litigieux, n'est par conséquent pas nécessaire.

La Cour est ainsi également compétente ratione loci.

1.3 Pour le surplus, la requête respecte les exigences de forme prévues aux art. 130 ss et 221 ss CPC, de sorte qu'elle est recevable.

2. La requérante a allégué des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles après le premier échange d'écritures, soit dans le cadre de sa réplique.

2.1 A teneur de l'art. 229 al. 1 CPC, les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont admis aux débats principaux que s'ils sont invoqués sans retard et qu'ils remplissent l'une des conditions suivantes: ils sont postérieurs à l'échange d'écritures ou à la dernière audience d'instruction (novas proprement dits; let. a) ou s'ils existaient avant la clôture de l'échange d'écritures ou la dernière audience d'instruction mais ne pouvaient être invoqués antérieurement bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (novas improprement dits; let. b).

En procédure sommaire, une partie ne peut pas escompter que le tribunal ordonnera un second échange d'écritures ou une audience, après le premier échange d'écritures. Les parties n'ont aucun droit à pouvoir s'exprimer à deux reprises. En principe, la cause est gardée à juger après un échange d'écritures (ATF 144 III 117 consid. 2.2). Ceci n'exclut toutefois pas que, avec réserve, un second échange d'écritures puisse être ordonné, lorsqu'il apparaît comme nécessaire selon les circonstances (ATF 145 III 213 consid. 2.1.3; 144 III 117 consid. 2.1; 138 III 252 consid. 2.1). Pour les parties, il n'y a donc pas d'insécurité. Ainsi, après le premier échange d'écritures et à moins qu'une audience soit convoquée ou qu'un second échange d'écritures soit ordonné, des faits nouveaux ne peuvent être invoqués qu'aux conditions de l'art. 229 al. 1 CPC (ATF
146 III 237 consid. 3.1).

Selon la jurisprudence, les faits notoires, qu'il n'est pas nécessaire d'alléguer ni de prouver (ATF 130 III 113 consid. 3.4), sont ceux dont l'existence est certaine au point d'emporter la conviction du juge, qu'il s'agisse de faits connus de manière générale du public ou seulement du juge; il suffit qu'ils puissent être contrôlés par des publications officielles et dans la presse écrite, accessibles à chacun (ATF 137 III 623 consid. 3; 135 III 88 consid. 4.1).

2.2 En l'occurrence, la Cour a transmis la réponse de la citée à la requérante sans ordonner de second échange d'écritures, qui n'avait, d'ailleurs, pas été requis par les parties.

Les allégués nouveaux de la requérante n° 52 à 55, et la pièce nouvelles n° 25, concernent la compétence ratione loci de la Cour, qui a été admise sans se fonder sur ceux-ci, de sorte qu'il n'est pas nécessaire de statuer sur leur recevabilité.

Les allégués nouveaux n° 55 à 58, et la pièce nouvelle n° 26, concernent un éventuel cas de confusion entre le produit de la requérante et celui litigieux, prétendument découvert le 1er septembre 2023. Cette date n'est toutefois corroborée par aucun élément du dossier. La requérante, qui se prévalait déjà d'un risque de confusion dans sa requête du 10 juillet 2023, ne rend donc pas vraisemblable avoir fait preuve de la diligence requise au sens de l'art. 229 al. 1 CPC. Lesdits allégués et la pièce produite à leur appui ne sont donc pas recevables, étant relevé que le fait qu'une confusion se soit effectivement produite est sans pertinence pour admettre ou nier un risque de confusion (Kuonen, Commentaire romand LCD, 2017, n° 40 ad art. 3 al. 1 let. d LCD).

En revanche, les allégués nouveaux n° 59 à 65, et les pièces nouvelles n° 27 et 28, sont recevables, car ils concernent des faits notoires, librement accessibles sur des sites internet bénéficiant d'une empreinte officielle.

3. Les mesures provisionnelles sont soumises à la procédure sommaire (art. 248 let. d CPC), dans le cadre de laquelle, sauf exceptions, la maxime des débats (art. 55 al. 1 CPC; Bohnet, in Procédure civile suisse, Les grands thèmes pour les praticiens, 2010, ch. 23 et 26, p. 201 et 202) et la maxime de disposition s'appliquent (art. 58 al. 1 CPC).

Les mesures provisionnelles étant soumises à la procédure sommaire, avec administration restreinte des moyens de preuve, la cognition du juge est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit (ATF
127 III 474 consid. 2b/bb; arrêt du Tribunal fédéral 5A_442/2013 du 24 juillet 2013 consid. 2.1 et 5.1). La preuve est généralement apportée par titre au sens de l'art. 177 CPC (art. 254 al. 1 CPC).

4. La requérante reproche à la citée de favoriser un risque de confusion sur le marché suisse par la commercialisation du produit G______/H______, qui reprend à l'identique toutes les caractéristiques de son produit C______/D______. Elle soutient, en outre, que cette similitude vise à exploiter de manière parasitaire sa renommée, ce qui est corroboré par la comparaison desdits produits mentionnée sur le site internet de la citée.

4.1.1 Aux termes de l'art. 261 al. 1 CPC, le juge ordonne les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable qu'une prétention dont il est titulaire est l'objet d'une atteinte ou risque de l'être (let. a) et que cette atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable (let. b).

L'art. 262 CPC prévoit que le tribunal peut ordonner toute mesure provisionnelle propre à prévenir ou à faire cesser le préjudice, notamment l'interdiction et l'ordre de cessation d'un état de fait illicite.

L'octroi de mesures provisionnelles suppose la vraisemblance du droit invoqué et des chances de succès du procès au fond, ainsi que la vraisemblance, sur la base d'éléments objectifs, qu'un danger imminent menace le droit du requérant, enfin la vraisemblance d'un préjudice difficilement réparable - qui peut être patrimonial ou immatériel -, ce qui implique une urgence (Message du Conseil fédéral du 28 juin 2006 relatif au CPC, in FF 2006 p. 6841 ss, spéc. 6961; arrêts du Tribunal fédéral 5A_931/2014 du 1er mai 2015 consid. 4 et 5A_791/2008 du 10 juin 2009 consid. 3.1; Bohnet, Commentaire romand CPC, 2019, n° 3 ss ad art. 261 CPC).

En droit des marques ou en matière de concurrence déloyale, il est admis qu'un risque de confusion est en règle générale de nature à engendrer une perturbation du marché ainsi que d'autres dommages de nature immatérielle; en pareil cas, la condition de menace d'un dommage difficile à réparer est en principe considérée comme remplie (ACJC/335/2015 du 26 mars 2015 consid. 4.1; Schlosser, Les conditions d'octroi des mesures provisionnelles en matière de propriété intellectuelle et de concurrence déloyale, in sic! 2005, p. 349; Bohnet, op. cit., n° 13 ad art. 261 CPC).

4.1.2 Aux termes de l'art. 2 LCD, est déloyal et illicite tout comportement ou pratique commerciale qui est trompeur ou qui contrevient de toute autre manière aux règles de la bonne foi et qui influe sur les rapports entre concurrents ou entre fournisseurs et clients.

Pour qu'il y ait acte de concurrence déloyale, il ne suffit pas que le comportement apparaisse déloyal au regard de la liste d'exemples figurant aux art. 3 à 8 LCD; il faut encore qu'il influe sur les rapports entre concurrents ou entre fournisseurs et clients, il doit influencer le jeu de la concurrence, le fonctionnement du marché (ATF 132 III 414 consid. 3.1; 126 III 198 consid. 2c/aa), c'est-à-dire qu'il produise des effets sur le fonctionnement du marché suisse (Pichonnaz, Commentaire romand LCD, 2017, n° 46 et 47 ad art. 2 LCD).

4.1.3 Le droit de la concurrence déloyale ne contient aucune interdiction générale de copier les prestations d'autrui, car le principe est qu'on peut librement copier (ATF 131 III 384 consid. 5.1, in JdT 2005 I 434).

Toutefois, selon l'art. 3 al. 1 let d. LCD, est déloyal le comportement de celui qui prend des mesures qui sont de nature à faire naître une confusion avec les marchandises, les œuvres, les prestations ou les affaires d'autrui.

Le comportement visé par cet article suppose qu'un risque de confusion soit créé dans la perspective du public entre deux prestations, par l'emprunt à la prestation originale d'un de ses signes distinctifs protégés (Kuonen, op. cit., n° 12 ad art. 3 al. 1 let. d LCD). Les signes distinctifs protégés par la disposition susvisée sont ceux qui permettent d'individualiser sur le marché la prestation et le prestataire de manière à les différencier des tiers. Tel est notamment le cas lorsque la prestation à laquelle renvoie le signe distinctif a pu s'imposer sur le marché, de sorte que le public considère une caractéristique de la prestation comme étant distinctive de celle-ci et se fonde exclusivement sur cette caractéristique pour démarquer la prestation d'une autre (Kuonen, op. cit., n° 18 et ss ad art. 3 al. 1 let. d LCD; Arpagaus, in Bundesgesetz gegen den unlauteren Wettbewerb, Basler Kommentar, n° 44 et ss ad art. 3 al. 1 let. d LCD).

Cette disposition protège en particulier l'apparence du produit, à savoir la façon par laquelle un agent économique se présente sur le marché, son apparence, son image. Celle-ci remplit une fonction distinctive lorsqu'elle se caractérise par une originalité particulière ou s'est imposée. La condition préalable essentielle à la protection de l'apparence est la distinctivité de l'apparence dont la protection est recherchée. Il faut que l'acheteur moyen concerné voie dans l'apparence la désignation d'une origine particulière, d'un producteur déterminé (Kobel, Le parasitisme en droit suisse: entre Nachahmungsfreiheit (liberté d'imiter), Verwechslungsgefahr (risque de confusion) et Rufausbeutung (exploitation de la réputation), in Défis du droit de la concurrence déloyale, 2014, p. 108 à 111).

Une présentation est dotée de force distinctive dès l'origine lorsqu'à raison de son originalité elle est propre à distinguer une marchandise d'autres marchandises identiques ou similaires. Les principes applicables en droit des marques à propos de la force distinctive valent aussi pour le droit de la concurrence (ATF
135 III 446 consid. 6.3.1, JdT 2010 I 632).

D'après la jurisprudence, la notion de danger de confusion est identique dans l'ensemble du droit des biens immatériels (ATF 128 III 353 consid. 4). Le risque de confusion signifie qu'un signe distinctif, à considérer le domaine de protection que lui confère le droit des raisons de commerce, le droit au nom, le droit des marques ou le droit de la concurrence, est mis en danger par des signes identiques ou semblables dans sa fonction d'individualisation de personnes ou d'objets déterminés. Ainsi, des personnes qui ne sont pas titulaires du droit exclusif à l'usage d'un signe peuvent provoquer, en utilisant des signes identiques ou semblables à celui-ci, des méprises en ce sens que les destinataires vont tenir les personnes ou les objets distingués par de tels signes pour ceux qui sont individualisés par le signe protégé en droit de la propriété intellectuelle (ATF 131 III 572 consid. 3).

Pour juger de ce danger de confusion, il faut prendre en considération l'impression globale que laissent les deux produits, comparés dans leur entier, auprès du public (ATF 122 III 369 consid. 1; 97 II 153 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_565/2016 du 2 mai 2017 consid. 5.1).

Le comportement du prétendu "imitateur" ne peut être qualifié de déloyal s'il a pris les mesures que l'on pouvait attendre de lui pour exclure un risque de confusion auprès du public s'agissant de l'origine d'un produit, notamment si le produit renvoie clairement à son fabricant (ATF 116 II 471 consid. 3a/aa; arrêt du Tribunal fédéral 4A_565/2016 précité consid. 5.1).

4.1.4 Agit de façon déloyale celui qui, notamment compare, de façon inexacte, fallacieuse, inutilement blessante ou parasitaire sa personne, ses marchandises, ses œuvres, ses prestations ou ses prix avec celles ou ceux d'un concurrent ou qui, par de telles comparaisons, avantage des tiers par rapport à leurs concurrents (art. 3 al. 1 let. e LCD).

Les comportements par lesquels un concurrent se rapproche sans nécessité de la prestation d'autrui ou en exploite la renommée sont déloyaux indépendamment du risque éventuel de confusion. On peut exploiter la renommée d'autrui par exemple en intégrant le produit ou les services d'autrui dans sa publicité de manière à opérer un transfert d'image en sa faveur. Il suffit qu'un signe similaire à celui d'autrui se trouve utilisé d'une manière telle que ceci ne puisse être compris autrement que comme une concurrence parasitaire et qu'il suscite auprès du public une association d'idées avec la marque ou le produit d'autrui (ATF 135 III 446 consid. 7.1, in JdT 2010 I 632).

L'auteur de la comparaison parasitaire favorise un transfert de la réputation ou des qualités de la prestation concurrente sur sa propre prestation dans l'esprit du public (Kuonen, op. cit., n° 37 ad art. 3 al. 1 let. e LCD).

4.2.1 En l'espèce, à teneur des pièces produites, il semble que la requérante commercialise en Suisse la boîte C______/D______, en tous les cas, depuis 2005. Entre 2018 et 2023, elle a vendu sur ce marché plus de 4'819'000 boîtes de ce produit.

Il est, en l'état, rendu vraisemblable que l'emballage de ce produit se distingue, dans son apparence globale, des autres boîtes que revêtent les produits du même type, soit du tabac sans combustion à usage oral, qui se trouvent actuellement sur le marché suisse. En effet, tous les exemples produits par les parties diffèrent assez nettement de la boîte C______/D______. Certes, ces emballages sont tous de forme cylindrique et de dimensions plus ou moins similaires - celui de la requérante étant toutefois 1 à 2 cm plus petit -, mais cela répond vraisemblablement à un besoin pratique pour le conditionnement du produit. En revanche, il apparait que les emballages des autres produits sur le marché sont tous très colorés et/ou présentent des graphismes forts (cf. consid. B.a EN DROIT supra). En outre, aucune autre boîte des exemples produits par les parties ne présente sur ces faces différents contours de cercles.

La citée n'a d'ailleurs pas produit d'exemples de boîtes d'autres marques qui ressembleraient à celle de la requérante.

Il sera ainsi retenu, sous l'angle de la vraisemblance, que la boîte de la requérante C______/D______ est dotée d'une certaine force distinctive, en ce sens que son apparence globale se distingue assez nettement des autres marchandises identiques ou similaires sur le marché suisse, permettant ainsi au consommateur moyen d'identifier sa provenance commerciale. A cet égard, contrairement à ce que soutient la citée, les consommateurs de tabac sans combustion à usage oral ne sauraient, sous l'angle de la vraisemblance, être considérés comme des spécialistes ou des acheteurs avertis, d'autant plus compte tenu du prix de ce produit qui est de l'ordre de 7 fr. Ainsi, le degré d'attention attendu des acheteurs potentiels ne semble pas élevé.

La citée, quant à elle, commercialise en Suisse depuis peu la boîte G______/H______, dont la marque n'a été déposée qu'en février 2023.

Or, le diamètre des boîtes G______/H______ et C______/D______ est identique, de même que la hauteur, et celles-ci présentent des bords légèrement crénelés. Le dessus de ces boîtes contient trois contours de cercles de largeur quasiment identique: deux noirs et un blanc avec le message d'avertissement sur les effets nocifs du tabac sur la santé, ainsi qu'un disque central contenant le nom de la marque, avec une partie incurvée. Le dessus des boîtes reprend la même configuration. Enfin, la bande adhésive entourant celles-ci contient des étoiles, représentées de manière légèrement différente.

Les couleurs des deux boîtes sont certes différentes, soit brune et verte foncée, mais pas suffisamment pour marquer une différence nette entre elles. Contrairement à ce que soutient la citée, l'appréciation du risque de confusion s'apprécie selon l'impression d'ensemble et non pas en fonction d'éléments isolés, tels que la différence des étoiles illustrées sur la bande adhésive ou encore le fait qu'au-dessus de la mention G______ est représenté un petit logo. Par ailleurs, la présence d'une marque divergente, soit G______/H______ et C______/D______, ne suffit pas nécessairement à écarter le risque de confusion. Ces différences entre ces deux produits ne concernent que des détails et ne peuvent dès lors pas influencer de manière décisive l'impression d'ensemble, qui se dégagent de ceux-ci. Or, l'apparence globale de la boîte G______/H______ ressemble fortement à celle de la requérante.

A cela s'ajoute que la boîte G______/H______ ne contient pas l'indication du nom du fabricant, ce qui n'est pas contesté, renforçant ainsi le risque de confusion.

La citée a admis que certaines boîtes produites par la requérante, à titre d'exemples de produit similaire sur le marché suisse, contenaient du tabac. Celles-ci ne comportent toutefois pas les avertissements liés aux risques du produit pour la santé sur la face du dessus de leur boîte, comme celles commercialisées par les parties. La citée ne peut donc pas se prévaloir d'une obligation légale pour justifier le fait que la boîte G______/H______ reprenne à l'identique la composition de celle de la requérante, soit la présence de trois contours de cercles, dont un blanc pour contenir lesdits avertissements.

Enfin, la citée ne rend pas vraisemblable que le G______/H______ viserait un cercle de consommateurs différent de celui du produit de la requérante, en particulier des sportifs.

L'apparence globale des deux produits étant similaire, il existe, sous l'angle de la vraisemblance, un risque de confusion entre ceux-ci pour le consommateur moyen, notamment de penser qu'ils sont fabriqués par la même entreprise, au sens de l'art. 3 al. 1 let. d LCD.

Partant, sur mesures provisionnelles, il sera fait interdiction à la citée de faire de la publicité, de mettre en vente et de détenir à cette fin des boîtes G______/H______, étant relevé que la précitée ne fabrique pas ce produit, de sorte que les autres mesures requises ne seront pas ordonnées (soit interdiction de fabriquer, d'importer et d'exporter).

Un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision sera imparti à la citée pour se conformer à ce qui précède. Cette mesure sera assortie de la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP.

4.2.2 La requérante soutient que la citée adopte un comportement parasitaire en se rapprochant sans nécessité de son propre produit afin de s'approprier sa notoriété.

Or, un tel comportement ne saurait être reproché à la citée. En effet, celle-ci ne fabrique pas le produit litigieux, mais se limite à le vendre sur le marché suisse, notamment par le biais de son site internet, en tant que détaillant. Le fait que la citée serait administrée par les mêmes personnes que le fabricant de la boîte G______/H______ ne suffit pas à cet égard, la précitée étant une personne morale distincte.

A cela s'ajoute que la citée propose également à la vente, sur son site internet, la boîte C______/D______.

La citée a, en outre, rendu vraisemblable que le G______/H______ avait une teneur en nicotine plus élevée que celle du C______/D______. Ainsi, la mention sur son site internet selon laquelle "le G______ est plus fort que d'autres produits de tabac à chiquer comme le C______" ne constitue pas une comparaison déloyale, mais informe de manière objective le consommateur sur la teneur en nicotine du produit litigieux.

Compte tenu de l'ensemble de ce qui précède, il ne peut pas être reproché à la citée de vouloir profiter de la réputation de la requérante et d'adopter un comportement parasitaire au sens de l'art. 3 al. 1 let. e LCD.

5. La requérante soutient encore que l'indication de provenance mentionnée sur la boîte G______/H______ est inexacte, ce qui constitue une violation de l'art. 47 al. 3 let. a LPM et un comportement déloyal au sens de l'art. 3 al. 1 let. b LCD.

5.1 Aux termes de l'art. 47 al. 1 LPM, par indication de provenance, on entend toute référence directe ou indirecte à la provenance géographique des produits ou des services, y compris la référence à des propriétés ou à la qualité, en rapport avec la provenance. Est notamment interdit l'usage d'indications de provenance inexactes (al. 3 let. a).

Selon l'art. 55 al. 1 LPM, la personne qui subit ou risque de subir une violation de son droit à la marque ou à une indication de provenance peut notamment demander au juge d'exiger du défendeur qu'il indique la provenance et la quantité des objets sur lesquels la marque ou l'indication de provenance ont été illicitement apposées et qui se trouvent en sa possession et qu'il désigne les destinataires et la quantité des objets qui ont été remis à des acheteurs commerciaux (let. c).

Toute personne qui demande des mesures provisionnelles peut en particulier requérir du juge qu'il les ordonne dans le but de déterminer la provenance des objets portant illicitement la marque ou l'indication de provenance (art. 59 let. b LPM).

A teneur de l'art. 3 al. 1 let. b LCD, agit de façon déloyale celui qui donne des indications inexactes ou fallacieuses sur lui-même, son entreprise, sa raison de commerce, ses marchandises, ses œuvres, ses prestations, ses prix, ses stocks, ses méthodes de vente ou ses affaires ou qui, par de telles allégations, avantage des tiers par rapport à leurs concurrents.

5.2 En l'espèce, il est mentionné sur la boîte G______/H______ que le produit qu'elle contient est fabriqué en Suisse ("Hergestellt in der Schweiz").

A cet égard, la citée a produit un formulaire de l'Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières, dont il ressort que ledit produit est catégorisé comme produit "indigène". Elle a ainsi rendu vraisemblable que l'indication de provenance susvisée est exacte, contrairement à ce que soutient la requérante. L'indication sur le site internet de la citée, selon laquelle le "snus" est importé de Suède, ne se rapporte pas spécifiquement au produit G______/H______. Cette mention n'est donc pas déterminante et ne permet pas de mettre en doute ce qui précède.

Par ailleurs, la citée n'étant pas la fabricante du produit litigieux, il est douteux qu'une indication de provenance fallacieuse puisse lui être reprochée.

Il s'ensuit que la requérante ne rend pas vraisemblable une violation des art. 47 al. 3 let. a LPM et 3 al. 1 let. b LCD, sans qu'il soit nécessaire d'examiner la question de sa qualité pour agir à cet égard, comme soulevé par la citée.

Il ne sera donc pas fait droit aux conclusions visant à ce que la citée fournisse des renseignements sur la provenance ou le nom du fabricant du produit litigieux, dont la requérante semble d'ailleurs connaître l'identité vu les pièces produites à l'appui de sa réplique. Par ailleurs, sur mesures provisionnelles avant litispendance, la requérante n'a pas d'utilité immédiate à connaître le nombre de boîtes G______/H______ en possession de la citée ou encore le nombre de boîtes vendues par celle-ci en Suisse.

6. La citée conclut à la condamnation de la requérante à fournir des sûretés d'un montant au moins supérieur à 50'000 fr.

6.1 Le tribunal peut astreindre le requérant à fournir des sûretés si les mesures provisionnelles risquent de causer un dommage à la partie adverse (art. 264 al. 1 CPC). Le requérant répond du dommage causé par des mesures provisionnelles injustifiées (art. 264 al. 2 CPC).

Les postes typiques du dommage sont les frais de procédure, le préjudice causé par le retard (par exemple la diminution objective et mesurable d'un bien, marchandise saisonnière invendable), le gain manqué (avec la difficulté de le déterminer et de le prouver), l'atteinte à la réputation et les dépenses liées à la diminution du dommage (Huber, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2016, n° 26 ad art. 264 CPC).

La partie qui requiert des sûretés doit rendre vraisemblable le risque d'un dommage et son montant éventuel. Elle doit articuler un montant minimum, en particulier quand le dommage est difficile à chiffrer. L'art. 42 CO est applicable par analogie (Huber, op. cit., n° 12 ad art. 264 CPC).

6.2 En l'occurrence, la citée se limite à alléguer, à l'appui de sa requête de sûretés, que les mesures sollicitées par la requérante lui causeraient un dommage important. Ce faisant, elle ne rend pas vraisemblable qu'un tel dommage puisse être évalué à 50'000 fr. minimum. En effet, elle ne fournit aucune indication sur les ventes réalisées du produit G______/H______.

De plus, le simple fait que le siège de la requérante se situe à l'étranger, soit en Belgique, ne permet pas de considérer qu'il sera particulièrement difficile de récupérer les montants dont elle devrait, cas échéant, s'acquitter en faveur de la citée.

Les conditions permettant d'astreindre la requérante à fournir des sûretés n'étant pas réunies, la citée sera déboutée de sa conclusion.

7. Dans la mesure où l'action au fond n'est pas encore pendante, la Cour impartira à la requérante un délai de quarante-cinq jours à compter de la réception du présent arrêt pour le dépôt de sa demande, sous peine de caducité des mesures ordonnées (art. 263 CPC).

8. Les frais judiciaires seront arrêtés à 5'000 fr. (art. 17 RTFMC) et, dans la mesure où aucune des parties n'obtient entièrement gain de cause, ils seront mis à la charge de chacune des parties par moitié (art. 106 al. 2 et 107 al. 1 let. f CPC). Ils seront compensés avec l'avance de même montant effectuée par la requérante, qui demeure acquise à l'Etat de ______ (art. 111 CPC). La citée sera ainsi condamnée à verser 2'500 fr. à la requérante à titre de remboursement des frais judiciaires.

Pour le même motif, chaque partie supportera ses propres dépens (art. 106 al. et 107 al. 1 let. f CPC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

statuant en instance cantonale unique


A la forme :

Déclare recevable la requête de mesures provisionnelles déposée le 10 juillet 2023 par A______ SA contre B______ AG.

Au fond :

Fait interdiction à B______ AG de faire de la publicité, de mettre en vente et de détenir à cette fin des boîtes G______/H______.

Impartit à B______ AG un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt pour s'exécuter en ce sens, sous menace de la peine prévue à l'art. 292 CP qui prévoit que "celui qui ne se sera pas conformé à une décision à lui signifiée, sous la menace de la peine prévue au présent article, par une autorité ou un fonctionnaire compétents sera puni d'une amende".

Impartit à A______ SA un délai de quarante-cinq jours à compter de la réception du présent arrêt pour valider les mesures provisionnelles par le dépôt d'une action au fond, sous peine de caducité desdites mesures provisionnelles.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires à 5'000 fr., les met à la charge de chacune des parties par moitié et les compense avec l'avance de frais de même montant effectuée par A______ SA, laquelle demeure acquise à l'Etat de ______.

Condamne B______ AG à verser à A______ SA 2'500 fr. à titre de remboursement des frais judiciaires.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.


 

 

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame
Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges;
Madame Sandra CARRIER, greffière.

 

La présidente :

Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE

 

La greffière :

Sandra CARRIER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.