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Décisions | Chambre civile

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C/11280/2021

ACJC/413/2023 du 16.03.2023 sur JTPI/11887/2022 ( SDF ) , MODIFIE

Recours TF déposé le 11.05.2023, rendu le 21.03.2024, CONFIRME, 5A_338/2023
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/11280/2021 ACJC/413/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU JEUDI 16 MARS 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par la 12ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 10 octobre 2022, comparant par Me Murat Julian ALDER, avocat, Yersin Lorenzi Latapie Alder, boulevard Helvétique 4, 1205 Genève, en l'Étude duquel il fait élection de domicile,

et

Madame B______, domiciliée ______, intimée, comparant par Me Daniela LINHARES, avocate, LBG Avocats, Galerie Jean-Malbuisson 15, case postale 1648, 1211 Genève 1, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/11887/2022 du 10 octobre 2022, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a autorisé les époux B______, née B______ [nom de jeune fille] le ______ 1971 à C______ (D______/Portugal), et A______, né le ______ 1971 à E______ (D______/Portugal), à vivre séparés (chiffre 1 du dispositif), attribué à B______ la jouissance exclusive du domicile conjugal sis avenue 1______ no. ______, [code postal] Genève, ainsi que du mobilier le garnissant (ch. 2), imparti à A______ un délai d'un mois dès la notification du jugement pour libérer de sa personne et de ses biens le domicile conjugal, autorisé B______ à requérir, moyennant intervention d'un huissier judiciaire, l'expulsion par la force publique de A______, à compter d'un mois dès la notification du jugement (ch. 3), condamné A______ à verser à B______, par mois et d'avance, à titre de contribution à l'entretien de celle-ci, les sommes de 1'550 fr. du 1er novembre 2022 jusqu'au 31 octobre 2024 et de 500 fr. jusqu'au 31 octobre 2026 (ch. 4), prononcé la séparation de biens des parties (ch. 5), prononcé ces mesures pour une durée indéterminée (ch. 6), arrêté les frais judiciaires à 780 fr., les a compensés avec les avances de frais fournies par les parties et les a répartis à raison de la moitié à la charge de chacun des époux, a condamné A______ à verser à B______ le montant de 350 fr. (ch. 7) a dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 8) et a condamné les parties à respecter et à exécuter les dispositions du jugement.

B.

a.      Par acte déposé à la Cour de justice le 31 octobre 2022, A______ forme appel contre ce jugement, reçu le 20 octobre 2021, dont il sollicite l'annulation du chiffre 4 du dispositif. Cela fait, il conclut, à titre préalable, à l'apport, en tant que de besoin, du dossier de la procédure civile n° C/11280/2021, à ce qu'il soit ordonné à B______ de produire la totalité des renseignement et titres relatifs à l'ensemble de ses revenus pour les mois de juillet, août, septembre et octobre 2022, à ce que soit ordonnée la tenue d'une audience de comparution personnelle, ainsi que l'audition de F______, détective privé, en qualité de témoin.

Au fond, il conclut à ce qu'il soit dit et constaté qu'il ne doit aucune contribution d'entretien à B______, sous suite de frais et dépens.

Il produit une pièce nouvelle et allègue des faits nouveaux.

b.      Par mémoire réponse du 28 novembre 2022, B______ conclut à l'irrecevabilité de la pièce nouvelle produite et au rejet de l'appel, sous suite de frais et dépens.

c.       Les parties ont été informées par courrier du greffe de la Cour du 20 décembre 2022 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.      B______, née B______ [nom de jeune fille] le ______ 1971 à C______ (D______/Portugal) et A______, né le ______ 1971 à E______ (D______/Portugal), tous deux de nationalité portugaise, se sont mariés civilement le ______ 1992 à D______ (Portugal).

Les époux n’ont pas conclu de contrat de mariage.

Deux enfants, aujourd'hui majeurs, sont issus de cette union, soit G______, né le ______ 1993 à D______ (Portugal), et H______, née le ______ 1997 à Genève.

b.      Par acte déposé au Tribunal le 14 juin 2021, B______ a formé une requête de mesures protectrices de l’union conjugale. S'agissant du seul point contesté en appel, elle a conclu à la condamnation de A______ à lui verser la somme mensuelle de 2'320 fr. à titre de contribution d'entretien.

c.       Lors de l’audience de comparution personnelle des parties du 22 septembre 2022, celles-ci ont apporté des précisions concernant leurs situations personnelles et financières.

A l'issue de l'audience, B______ a persisté dans ses conclusions. Elle a précisé qu'a minima, son époux devrait couvrir son déficit de 1'517 fr. 70 par mois pendant en tout cas quatre ans.

A______ a conclu à ce que son épouse soit déboutée de ses conclusions en contribution d'entretien.

La cause a été gardée à juger.

d.      Le Tribunal a retenu que A______ réalisait un revenu mensuel net de 5'128 fr., en qualité de maçon à 100% auprès de la société I______. On ne pouvait plus exiger de lui qu'il effectue des heures supplémentaires, comme il l'avait fait jusqu'en 2021, compte tenu de son âge, de son état de santé et de la pénibilité de son activité.

Ses charges ont été arrêtées à 3'330 fr. (les montants sont arrondis), soit 1'500 fr. à titre de loyer hypothétique, charges comprises, 560 fr. de prime d'assurance-maladie de base et complémentaire, 70 fr. de frais de transport, et 1'200 fr. de minimum vital.

Le Tribunal a écarté les frais de leasing d'un véhicule utilisé par la fille des parties, mais immatriculé au nom du l'appelant, qui en assumait seul toutes les charges de 327 fr. par mois, au motif que l'entretien de l'époux primait celui de l'enfant majeur. Les impôts du couple n'ont pas non plus été pris en compte, au vu de la situation financière des parties.

Le solde disponible de A______ était de 1'798 fr. (montant arrondi).

e.       Le Tribunal a retenu que B______ travaillait en qualité de nettoyeuse auprès des entreprises J______ SARL et K______, pour un salaire mensuel moyen net arrondi de 2'178 fr., calculé sur les deux dernières années [recte: sur l'année 2021, selon certificats de salaire produits], correspondant à environ 5 heures de travail par jour, ou un taux d'activité d'environ 60%.

En avril 2022, B______ a effectué 66 heures de travail auprès de l'entreprise K______, et 46 heures en juillet 2022 auprès de J______ SARL.

Ses charges ont été arrêtées à 3'398 fr. (les montants sont arrondis), soit 1'350 fr. de minimum vital, 1'490 fr. de loyer (80% de 1'862 fr.), 444 fr. d'assurance-maladie de base, subside déduit et 44 fr. d'assurance complémentaire ainsi que 70 fr. de frais de transport.

Devant le Tribunal, B______ a déclaré qu'en 2022 elle avait effectué plus d'heures et qu'elle recherchait une activité à 100%.

Le premier juge lui a dès lors imputé un revenu hypothétique de 2'904 fr. pour une activité à 80% dès le 1er novembre 2024 pour une durée de deux ans, et de 3'631 fr. pour une activité à 100 % dès le 1er novembre 2026. La contribution a ainsi été fixée à 1'550 fr. du 1er novembre 2022 au 31 octobre 2024 correspondant au déficit de l'intimée (2'178 fr. de revenus pour des charges de 3'398 fr., soit un déficit de 1'518 fr. [recte: 1'220 fr.]). Dès le 1er novembre 2024, la contribution a été arrêtée à 500 fr. (2'904 fr. de revenus pour des charges de 3'398 fr. soit un déficit de 494 fr.). Dès le 1er novembre 2026, l'intimée serait en mesure de couvrir ses charges.

L'appelant soutient nouvellement que l'intimée réalise un revenu mensuel net compris entre 3'500 fr. et 3'752 fr., en travaillant 140 heures par mois, à 25 fr. de l'heure, ce qui lui permettrait de couvrir ses charges. Le minimum vital de 1'350 fr. n'aurait pas dû être pris en compte, ou alors les frais qu'il assume en lien avec le véhicule utilisé par sa fille auraient également dû être retenus au titre de ses charges à lui.

f.       G______, le fils aîné des époux, a 29 ans et est marié. Quant à leur fille cadette, Diana, elle est âgée de 25 ans et vit avec sa mère. Elle fait un apprentissage de commerce qu'elle devrait terminer en juin 2023 et perçoit un salaire de 1'100 fr.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les jugements de mesures protectrices – qui doivent être considérés comme des décisions provisionnelles au sens de l'art. 308 al. 1 let. b CPC – dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Les jugements de mesures protectrices étant régis par la procédure sommaire selon l'art. 271 CPC, le délai d'introduction de l'appel est de dix jours (art. 314 al. 1 CPC).

1.2 En l'espèce, l'appel a été introduit en temps utile, selon la forme prescrite par la loi (art. 311 al. 1 CPC), et porte sur des conclusions qui, capitalisées selon l'art. 92 al. 2 CPC, sont supérieures à 10'000 fr.

Il est donc recevable.

2. Les parties, de nationalité étrangère, sont domiciliées à Genève et ne remettent pas en cause, avec raison, la compétence de la Cour de justice pour connaître du litige (art. 46 LDIP), ni l'application du droit suisse (art. 49 LDIP et art. 4 de la Convention de La Haye du 2 octobre 1973 sur la loi applicable aux obligations alimentaires [RS 0.211.213.01]).

3. La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), sa cognition étant toutefois limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb, JdT 2002 I 352; arrêt du Tribunal fédéral 5A_762/2013 du 27 mars 2014 consid. 2.2).

La fixation de la contribution d'entretien du conjoint dans le cadre de mesures protectrices de l'union conjugale est soumise à la maxime de disposition (art. 58 CPC; ATF 129 III 417 consid. 2.1.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_421/2015 du 21 janvier 2016 consid. 6.2.3).

4. L'appelant a produit une pièce nouvelle et allégué des faits nouveaux, dont l'intimée conteste la recevabilité.

4.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuves nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas l'être devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

Des pièces ne sont pas recevables en appel pour la seule raison qu'elles ont été émises postérieurement à l'audience de première instance. La question à laquelle il faut répondre pour déterminer si la condition de l'art. 317 al. 1 CPC est remplie est de savoir si le moyen de preuve n'aurait pas pu être obtenu avant la clôture des débats principaux de première instance (arrêt du Tribunal fédéral 5A_266/2015 du 24 jui 2015 consid. 3.2.2).

4.2 En l'espèce, la pièce nouvelle produite par l'appelant, soit un rapport de détective privé, daté du 27 octobre 2022 mais sollicité le 1er octobre 2022, dont il ressort que l'intimée travaillerait 140 heures par mois pour un revenu mensuel brut compris entre 3'752 fr. et 4'340 fr., est irrecevable, tous comme les faits auxquels il se rapporte.

En effet, quand bien même cette pièce porte une date postérieure à celle à laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger, l'appelant n'expose pas ce qui l'aurait empêché d'en solliciter l'établissement antérieurement. En tout état, elle n'a qu'une valeur probante limitée, car très succincte et étayée par aucun élément concret.

5. L'appelant sollicite des mesures d'instruction.

5.1 Conformément à l'art. 316 al. 3 CPC, l'instance d'appel peut librement décider d'administrer des preuves. Le juge peut renoncer à ordonner une mesure d'instruction pour le motif qu'elle est manifestement inadéquate, porte sur un fait non pertinent ou n'est pas de nature à ébranler la conviction qu'il a acquise sur la base des éléments déjà recueillis (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1, in RSPC 2012 p. 414; arrêts du Tribunal fédéral 5A_460/2012 du 14 septembre 2012 consid. 2.1 et 5A_191/2012 du 12 octobre 2012 consid. 4.7).

5.2 En l'espèce, l'apport du dossier est acquis.

L'appelant sollicite pour la première fois en appel la production par l'intimée des titres relatifs à ses revenus pour les mois de juillet à septembre 2022. Cette requête est tardive, sans préjudice de sa pertinence, la contribution que l'appelant a été condamné à verser n'étant due que depuis le mois de novembre 2022, et l'appelant n'ayant pas contesté devant le Tribunal le revenu allégué par l'intimée lors de l'audience du 22 septembre 2022.

La comparution personnelle des parties, qui se sont déjà exprimées devant le Tribunal, paraît également inutile à ce stade, étant relevé que l'intimée a déclaré qu'en 2022 elle avait effectué plus d'heures et qu'elle cherchait une activité à 100%.

Enfin, la pièce nouvelle produite étant irrecevable, l'audition sollicitée de son auteur n'a pas lieu d'être.

En conclusion, les mesures d'instruction ne seront pas ordonnées, la Cour s'estimant suffisamment renseignée pour statuer.

6. L'appelant reproche au Tribunal d'avoir évalué de manière incorrecte la situation financière des parties et de l'avoir en conséquence condamné au versement d'une contribution d'entretien en faveur de l'intimée.

6.1.1 Lorsque la suspension de la vie commune est fondée, le juge fixe, à la requête de l'un des conjoints, la contribution d'entretien à verser par l'une des parties à l'autre (art. 176 al. 1 ch. 1 CC).

Le point de départ de tout calcul d'entretien est ce que l'on appelle l'entretien convenable, qui se calcule, dans les relations conjugales comme dans les relations après le mariage, sur la base du dernier standard vécu en commun (en dernier lieu ATF 147 III 293 consid. 4.4).

L'entretien convenable doit donc être distingué du minimum vital. Il ne se limite pas à ce dernier lorsque les circonstances sont favorables. Au contraire, les deux époux ont droit, dans la mesure des moyens disponibles et jusqu'à concurrence de l'ancien standard commun déterminé, au maintien de celui-ci tant que le mariage existe (en dernier lieu ATF 147 III 293 consid. 4.4; arrêts du Tribunal fédéral 5A_849/2020 du 27 juin 2022 consid. 5 destiné à la publication et 5A_112/2020 du 28 mars 2022 consid. 6.2).

6.1.2 Dans trois arrêts récents (ATF 147 III 265, SJ 2021 I 3016; 147 III 293; 147 III 301), le Tribunal fédéral a posé, pour toute la Suisse, une méthode de calcul uniforme des contributions d'entretien du droit de la famille.

Cette méthode implique de calculer dans un premier temps les moyens financiers à disposition, en prenant en considération tous les revenus du travail, de la fortune et les prestations de prévoyance, ainsi que le revenu hypothétique éventuel. Il s'agit ensuite de déterminer les besoins, en prenant pour point de départ les lignes directrices pour le calcul du minimum vital du droit des poursuites selon l'art. 93 LP. Les ressources à disposition sont réparties entre les différents membres de la famille, dans un ordre déterminé : il faut tout d'abord couvrir le minimum vital du droit des poursuites puis, si les moyens le permettent, le minimum vital du droit de la famille de chaque partie (ATF 147 III 265 consid. 7.1). L'éventuel excédent – après retranchement de la part des revenus dévolue à l'épargne, qui ne participe pas à l'entretien de la famille – est ensuite réparti en principe par "grandes et petites têtes", la part pour un parent étant le double de celle pour un enfant mineur. De multiples raisons fondées sur les particularités du cas d'espèce permettent toutefois de déroger à cette répartition, notamment la répartition de la prise en charge des enfants ou des besoins particuliers (ATF 147 III 265 consid. 7, 7.3 et 8.3.2).

6.1.3 Pour déterminer la capacité contributive des parties, il faut prendre en considération en premier lieu le revenu effectif. Le juge peut également tenir compte, tant pour le débiteur d'entretien que le créancier, d'un revenu hypothétique supérieur au revenu effectif. Il s'agit d'inciter la personne à réaliser le revenu qu'elle est en mesure de se procurer et qu'on peut raisonnablement exiger d'elle afin de remplir ses obligations (ATF 137 III 102 consid. 4.2.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_461/2019 du 6 mars 2020 consid. 3.1). Cette incombance s'applique en particulier lorsque la reprise de la vie commune, et donc le maintien de la répartition antérieure des tâches, ne sont ni recherchés, ni vraisemblables; le but de l'indépendance financière des époux, notamment de celui qui jusqu'ici n'exerçait pas d'activité lucrative, ou seulement à temps partiel, gagne alors en importance. Cela est également valable en matière de mesures protectrices de l'union conjugale (ATF 137 III 385 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_584/2018 du 10 octobre 2018 consid. 5.1.1).

6.1.4 Selon l'art. 277 al. 2 CC, si, à sa majorité, l'enfant n'a pas encore de formation appropriée, les père et mère doivent, dans la mesure où les circonstances permettent de l'exiger d'eux, subvenir à son entretien jusqu'à ce qu'il ait acquis une telle formation, pour autant qu'elle soit achevée dans les délais normaux.

Les frais d'entretien de l'enfant majeur découlant de l'art. 277 al. 2 CC ne doivent dès lors pas être inclus sans autre considération dans le minimum vital élargi du débirentier (ATF 132 III 209 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_36/2016 du 29 mars 2016 consid. 4.1).

L'enfant majeur assume une part des coûts du logement s'il en a effectivement la capacité économique (arrêt du Tribunal fédéral 5A_432/2011 du 20 septembre 2011 consid. 3.2). En cas de communauté domestique avec un enfant majeur qui exerce une activité lucrative, il peut être équitable, selon les circonstances, de partager à parts égales les frais de logement (ATF 144 III 502 consid. 6.6; 132 III 483 consid. 4.2, 4.3 et 5 in JdT 2007 II 78, pp. 79 à 81). Aucune participation au loyer ne devrait toutefois être retenue pour un enfant majeur devant s'entretenir seul avec un salaire de 1'000 fr. (arrêt du Tribunal fédéral 5C.45/2006 du 15 mars 2006 consid. 3.6; Bastons Bulletti, L'entretien après le divorce : Méthodes de calcul, montant, durée et limites, in SJ 2007 II 77, p. 88).

La communauté de vie formée par une personne vivant avec un enfant majeur ne constitue pas une communauté durable, de sorte que le montant de base applicable à une personne vivant dans une telle communauté n'entre pas en considération (ATF 144 III 502 consid. 6.6 ; 132 III 483 consid. 4 in JdT 2007 II p. 78 ss; arrêt du Tribunal fédéral 5A_6/2019 du 3 juillet 2019 consid. 4.4). Il convient dès lors de prendre en compte le montant de base OP pour une personne vivant seule ou pour un débiteur monoparental si l'enfant qui vit auprès de son parent est en formation et sans revenu et que son parent le soutient (arrêt du Tribunal fédéral 5A_6/2019 du 3 juillet 20019 consid. 4.4). L'enfant majeur assume une part des coûts du logement du parent avec lequel il vit s'il en a effectivement la capacité économique (ATF 144 III 502 consid. 6.6; 132 III 483 précité consid. 4.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_432/2011 du 20 septembre 2011 consid. 3.2).

6.1.5 En cas de situation financière serrée, les frais de véhicule sont pris en considération uniquement si celui-ci est nécessaire à l'exercice d'une profession ou indispensable pour un autre motif (ATF 110 III 17 consid. 2; 108 III 60 consid. 3; arrêts du Tribunal fédéral 5A_971/2020 du 19 novembre 2021 consid. 9.2; 5A_144/2021 du 28 mai 2021 consid. 6.2). Si tel n'est pas le cas, les frais de transports publics sont pris en compte (art. 93 LP; ATF 147 III 265 précité consid. 7.2; 5A_329/2016 du 6 décembre 2016 consid. 4.1; Bastons Bulletti, L'entretien après le divorce: Méthodes de calcul, montant, durée et limites, in SJ 2007 II 77, p. 84 s. et 101 s.).

6.2 En l'espèce, le Tribunal n'a imputé un revenu hypothétique à l'intimée que depuis le mois de novembre 2024, pour une activité à 80%. Pourtant, celle-ci a déclaré devant le Tribunal qu'en 2022 déjà elle avait effectué davantage d'heures de travail qu'auparavant et qu'elle cherchait un emploi à 100%. Ainsi, un revenu hypothétique de 2'904 fr., pour une activité à 80% (ce montant n'étant pas critiqué en tant que tel) sera imputé à l'intimée dès le prononcé du présent arrêt.

Contrairement à ce que tente de soutenir l'appelant, c'est à bon droit que le Tribunal a pris en compte, dans les charges de l'intimée, le montant de base OP de 1'350 fr., celle-ci vivant avec sa fille majeure, encore en formation, laquelle ne perçoit qu'un revenu de 1'100 fr., ne lui permettant pas d'assumer seule son entretien. Il sera relevé par ailleurs qu'une part du loyer de la fille a été soustraite des charges de l'intimée, malgré le revenu modeste de l'apprentie.

Ainsi, compte tenu du revenu hypothétique retenu, le déficit de l'intimée est de 494 fr. (2'904 fr. – 3'398 fr.), de sorte que la contribution due sera arrêtée à 500 fr.

Le disponible de l'appelant (de 1'798 fr.) est suffisant pour couvrir ce montant, sans qu'il y ait lieu de trancher plus avant la question de la prise en compte des frais de leasing du véhicule (allégués de 327 fr.) utilisé par la fille majeure dans ses charges. Cela étant, il n'est pas établi ni même allégué que celle-ci, pas plus que l'appelant, aurait absolument besoin d'un véhicule pour se déplacer.

Cette contribution sera due jusqu'au 31 décembre 2023. D'une part, ce laps de temps devrait permettre à l'intimée de trouver une activité à plein temps, comme elle le souhaite, dans un domaine d'activité dans lequel il n'est pas particulièrement difficile de trouver de travail. D'autre part, à cette date, elle n'aura vraisemblablement plus à assurer l'entretien de sa fille, qui aura alors terminé sa formation, de sorte qu'elle n'aura plus à assumer son entretien.

L'appel est fondé dans la mesure qui précède. Le chiffre 4 du dispositif du jugement sera modifié en conséquence.

7. Compte tenu de la nature et de l'issue du litige, aucune des parties n'obtenant entièrement gain de cause, les frais de l'appel, arrêtés à 800 fr., seront mis à la charge des parties à raison d'une moitié chacune.

Pour les mêmes raisons, chaque partie supportera ses propres dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 31 octobre 2022 par A______ contre le jugement JTPI/11887/2022 rendu le 10 octobre 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/11280/2021.

Au fond :

Annule le chiffre 4 du dispositif de ce jugement.

Cela fait, statuant à nouveau sur ce point :

Condamne A______ à verser à B______, par mois et d'avance, à titre de contribution à son entretien, la somme de 500 fr. dès le prononcé du présent arrêt jusqu'au 31 décembre 2023.

Confirme le jugement pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de l'appel à 800 fr., les met à la charge des parties à raison d'une moitié chacune, et dit qu'ils sont compensés avec l'avance fournie, acquise à l'Etat de Genève.

Condamne en conséquence B______ à verser à A______ la somme de 400 fr., en remboursement de cette avance.

Dit que chaque partie supportera ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Madame Pauline ERARD, Madame Paola CAMPOMAGNANI, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

Le président :

Cédric-Laurent MICHEL

 

La greffière :

Camille LESTEVEN

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.