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Décisions | Sommaires

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C/13260/2024

ACJC/132/2025 du 28.01.2025 sur JTPI/12995/2024 ( SML ) , JUGE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/13260/2024 ACJC/132/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 28 JANVIER 2025

 

Entre

A______ SA, sise ______, recourante contre un jugement rendu par la 1ère Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 22 octobre 2024, représentée par
Me Catarina MONTEIRO SANTOS, avocate, NOMOS Avocats, boulevard des Tranchées 4, 1205 Genève,

et

B______ SARL, sise ______, intimée, représentée par Me Rémy BUCHELER, avocat, Pont-Rouge Avocats, route des Jeunes 9, 1227 Les Acacias.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/12995/2024 du 22 octobre 2024, reçu le 28 octobre 2024 par A______ SA, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant par voie de procédure sommaire, a dit que le courrier de B______ SARL du 24 septembre 2024, adressé au Tribunal après que la cause avait été gardée à juger, était irrecevable (chiffre 1 du dispositif), prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______, pour le chiffre 1, ainsi que pour les chiffres 2 et 3, à hauteur de 2'000 fr. chacun, ainsi que pour les intérêts mentionnés (ch. 2), mis les frais judicaires, arrêtés à 300 fr., à la charge de A______ SA et condamné celle-ci à verser ce montant à B______ SARL qui en avait fait l'avance (ch. 3 et 4), ainsi que 329 fr. TTC à titre de dépens (ch. 5).

B. a. Par acte expédié à la Cour de justice le 7 novembre 2024, A______ SA a fait recours de ce jugement, concluant à son annulation, sous suite de frais et dépens. Cela fait, elle a conclu, principalement, à ce qu'il soit constaté qu'aucun montant exigé par B______ SARL n'était dû, et, subsidiairement, à ce qu'il soit constaté que le montant de 2'000 fr. pour la gérance de novembre 2022 [recte : octobre 2022] avait été payé et que le montant de 4'000 fr. pour les gérances de décembre 2021 et février 2022 étaient compensées par la créance détenue par A______ SA à l'égard de B______ SARL. A titre préalable, elle a conclu à ce que la Cour ordonne l'audition de C______.

Elle a allégué des faits nouveaux et produits des pièces nouvelles.

b. Par arrêt du 18 novembre 2021, la Cour a rejeté la requête de A______ SA tendant à l'octroi de l'effet suspensif à son recours et dit qu'il serait statué sur les frais dans l'arrêt rendu sur le fond.

c. Par réponse du 15 novembre 2024, B______ SARL a conclu, à la forme, à l'irrecevabilité du recours, respectivement à l'irrecevabilité des allégués et pièces nouveaux invoqués par A______ SA et, sur le fond, au rejet du recours et à la confirmation du jugement attaqué, le tout sous suite de frais et dépens - ceux-ci devant être fixés à 1'462 fr. 50 (450 fr. x 3.25 heures d'activité).

d. Par ordonnance du 18 décembre 2024, la Cour a fixé un délai à A______ SA pour fournir tous les moyens de preuve propres à établir la date à laquelle son acte de recours avait été remis à la Poste.

e. Par pli du 20 décembre 2024, A______ SA a produit la quittance imprimée par l'automate "MyPoste24", dont il ressort que l'acte de recours a été remis à la Poste le 7 novembre 2024 à 21h09.

f. Par pli du 3 janvier 2025, B______ SARL a précisé s'en rapporter à justice sur la recevabilité du recours. Elle a fait valoir que les allégués et pièces nouveaux dont A______ SA se prévalait devant la Cour étaient irrecevables et que le recours était quoi qu'il en soit mal fondé. Elle persistait donc dans ses conclusions.

g. La cause a été gardée à juger le 10 janvier 2025, ce dont les parties ont été informées le même jour.

C. Les faits suivants ressortent du dossier soumis au Tribunal :

a. B______ SARL est une société sise à D______ [GE] qui a pour but, notamment, de "créer, gérer ou louer des restaurants de toutes spécialités, notamment asiatiques, cafés-bars, hôtels, boîtes de nuit, instituts de beauté, surfaces commerciales".

E______ en est l'associé-gérant unique depuis février 2021.

Depuis plusieurs années, la société est locataire de locaux commerciaux sis avenue 2______ no. ______, [code postal] D______, dans lesquels elle exploite un café-restaurant.

b. A______ SA est une société sise à D______ qui a pour but l'exploitation et l'administration de restaurants, de bars et de pubs.

C______ en est l'administratrice unique depuis décembre 2022.

c. Le 9 juin 2021, les parties ont signé une "convention de location-gérance avec option d'achat", par laquelle B______ SARL, "propriétaire-bailleur", a confié à A______ SA, "locataire-gérant", l'exploitation du café-restaurant sis avenue 2______ no. ______ dès le 1er juillet 2021. Le contrat a été conclu pour une durée initiale de douze mois, renouvelable ensuite tacitement d'année en année.

Il était stipulé à l'art. 4 du contrat qu'à partir du 1er juillet 2021, A______ SA devait s'acquitter du loyer et charges des locaux du café-restaurant directement en mains de la régie en charge de l'immeuble. Par ailleurs, à partir du 1er septembre 2021, la société devait payer la "redevance mensuelle de gérance", d'un montant de 4'000 fr., au plus tard le 5 du mois en cours, sur le compte bancaire de B______ SARL auprès de [la banque] F______.

d. Le 20 avril 2024, B______ SARL a fait notifier à A______ SA le commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur les montants suivants : 2'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 décembre 2021, à titre de solde impayé pour la redevance de gérance de décembre 2021 (poste 1), 4'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 février 2022 à titre de redevance de gérance pour le mois de février 2022 (poste 2), et 4'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 octobre 2022, à titre de redevance de gérance pour le mois d'octobre 2022 (poste 3).

Ce commandement de payer a été frappé d'opposition totale.

e. Par requête déposée devant le Tribunal le 25 mai 2024, B______ SARL a conclu au prononcé de la mainlevée provisoire de l'opposition formée au commandement de payer précité, à hauteur de 2'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 décembre 2021, 2'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 février 2022 et 2'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 décembre 2022, sous suite de frais et dépens.

Elle a détaillé les paiements effectués par A______ SA de septembre 2021 à avril 2024, relevés bancaires à l'appui, exposant ce qui suit : la redevance de gérance de décembre 2021 avait été payée partiellement, à hauteur de 2'000 fr., le 6 janvier 2022; la redevance de février 2022 avait été payée partiellement, à hauteur de 2'000 fr., le 24 février 2022; les redevances d'octobre et novembre 2022 avaient été payées respectivement les 24 et 29 novembre 2022; la redevance de décembre 2022 avait été payée partiellement, à hauteur de 2'000 fr., le 31 mars 2023; les redevances des autres mois avaient toutes été réglées. Au vu des paiements opérés depuis septembre 2021, A______ SA restait devoir à B______ SARL les montants suivants : 2'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 décembre 2021 à titre de redevance pour le mois de décembre 2021, 2'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 février 2022 pour le mois de février 2022 et 2'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 décembre 2022 pour le mois de décembre 2022.

f. Lors de l'audience devant le Tribunal du 20 septembre 2024, B______ SARL a persisté dans ses conclusions. A______ SA a conclu au rejet de la requête de mainlevée et produit les pièces suivantes :

- un décompte établi par elle-même, listant les paiements effectués en faveur de B______ SARL de juillet 2021 à juillet 2024 (pièce 1 cit.);

- un courrier recommandé adressé par elle-même à B______ SARL le 26 août 2023 avec ses annexes, à savoir des photographies non datées du café-restaurant, un message WhatsApp non daté, un devis du 10 décembre 2021 de G______ SA et une facture du 21 novembre 2022 de H______ SARL (pièce 2 cit.);

- un courriel de I______ SA adressé le 16 mai 2024 à C______ et E______, ayant la teneur suivante (pièce 3 cit.) :

"Objet : [avenue] 2______ no. ______ - Solde décompte de chauffage - Demande de document (…)
Dans le cadre d'un remboursement de charges concernant le décompte de 2022-2023 (du 01.07.2022 au 30.06.22 : CHF 1'626.75), nous vous remercions de nous transmettre le contrat de sous-location qui vous lie s'il vous plaît, ainsi que votre IBAN. A la suite de cela, nous pourrons procéder au remboursement. Concernant le décompte de charges 2021-2022 (du 01.07.2021 au 30.06.2022 ; CHF 2'728 fr. 95), celui-ci sera directement remboursé à Monsieur E______
."

- divers messages échangés sur WhatsApp (pièces 4 et 5 cit.).

Se référant à sa pièce 1, A______ SA a fait valoir que la redevance de gérance pour le mois d'octobre 2022, faisant l'objet du poste 3 du commandement de payer, avait d'ores et déjà été payée le 24 novembre 2022. Se référant à sa pièce 2, elle a allégué que les deux montants de 2'000 fr. faisant l'objet des postes 1 et 2 du commandement de payer n'étaient pas dus, dans la mesure où les parties s'étaient mises d'accord "pour réduire le montant du loyer en raison de travaux" effectués dans le café-restaurant. Au surplus, elle a déclaré compenser l'ensemble des montants réclamés avec ses propres créances envers B______ SARL à hauteur de 4'452 fr. 15 (montant "versé le 25 janvier 2022 en lien avec les travaux") et de 2'728 fr. 95 (montant mentionné dans sa pièce 3).

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

g. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a retenu que les pièces produites par B______ SARL valaient titre de mainlevée provisoire pour les sommes déduites en poursuite. De son côté, A______ SA n'avait fait valoir aucun moyen libératoire susceptible de faire échec au prononcé de la mainlevée. Les pièces 1 et 2 cit. étaient dénuées de force probante, dans la mesure où il s'agissait d'un décompte et d'un courrier émanant de la poursuivie elle-même. L'exception de compensation soulevée par A______ SA était également inopérante. En effet, le montant de 4'452 fr. 15 ne ressortait pas des pièces produites et le montant de 2'728 fr. 95, évoqué dans la pièce 3 cit., s'inscrivait dans le cadre d'un remboursement de charges que la poursuivie n'avait pas explicité et que le Tribunal n'était pas en mesure d'appréhender.

EN DROIT

1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a et 309 let. b ch. 3 CPC). La procédure sommaire s'applique (art. 251 let. a CPC).

Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée, pour les décisions prises en procédure sommaire.

En l'espèce, interjeté dans le délai et selon la forme prescrits par la loi, le recours est recevable.

1.2 Dans le cadre d'un recours, le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC).

1.3 Le recours étant instruit en procédure sommaire, la preuve des faits allégués doit être apportée par titres (art. 254 CPC). Les maximes des débats et de disposition s'appliquent (art. 55 al. 1, 255 let. a a contrario et art. 58 al. 1 CPC).

1.4 Les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables devant l'autorité de recours (art. 326 al. 1 CPC).

Il suit de là que les faits nouveaux, les pièces nouvelles et l'offre de preuve nouvelle (audition de C______) dont la recourante se prévaut devant la Cour sont irrecevables. Il en va de même des conclusions nouvelles qu'elle a formulées dans son acte de recours.

2. La recourante fait grief au Tribunal d'avoir considéré qu'elle n'avait fait valoir aucun moyen libératoire susceptible de faire échec au prononcé de la mainlevée.

2.1. Selon l'art. 82 LP, le créancier dont la poursuite se fonde sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé peut requérir la mainlevée provisoire (al. 1); le juge la prononce si le débiteur ne rend pas immédiatement vraisemblable sa libération (al. 2).

2.1.1 La procédure de mainlevée provisoire est une procédure sur pièces (Urkundenprozess), dont le but n'est pas de constater la réalité de la créance en poursuite, mais l'existence d'un titre exécutoire. Le juge de la mainlevée provisoire examine seulement la force probante du titre produit par le créancier poursuivant, sa nature formelle - et non la validité de la créance - et lui attribue force exécutoire si le débiteur ne rend pas immédiatement vraisemblables ses moyens libératoires (ATF 145 III 160 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_240/2021 du 13 mars 2022 consid. 3.2).

Par reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 al. 1 LP, il faut entendre notamment l'acte sous seing privé, signé par le poursuivi - ou son représentant (ATF 130 III 87 consid. 3.1) -, d'où ressort sa volonté de payer au poursuivant, sans réserve ni condition, une somme d'argent déterminée, ou aisément déterminable, et exigible (ATF 136 III 624 consid. 4.2.2; 136 III 627 consid. 2).

Un contrat écrit justifie en principe la mainlevée provisoire de l'opposition pour la somme d'argent incombant au poursuivi si les conditions d'exigibilité de la dette sont établies, ce qui implique notamment la preuve par le créancier de l'exécution de sa propre prestation en cas de contrat bilatéral ou synallagmatique, le débiteur devant pour sa part rendre vraisemblable - et non se contenter d'alléguer - une éventuelle exception fondée sur une inexécution ou un défaut d'exécution de la prestation du créancier (arrêts du Tribunal fédéral 5A_1008/2014 du 1er juin 2015 consid. 5.4.3.2; 5A_465/2014 du 20 août 2014 consid. 7.2.1.2 et les références citées).

Le poursuivi peut se libérer en rendant vraisemblables les moyens issus du droit civil et se rapportant à l'engagement pris, objections ou exceptions, ayant trait à la naissance de l'engagement (nullité du contrat, vices du consentement), à l'extinction de l'obligation (paiement, compensation, prescription), à l'inexigibilité de la prestation (exceptio non adimpleti contractus) ou à la présence de défauts (art. 82 al. 2 LP; Gillieron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, n. 785, p. 156-157 et les références citées; Krauskopf, La mainlevée provisoire, quelques jurisprudences récentes, in JdT 2008 II 23, p. 45).

La compensation constitue une cause d'extinction de la créance. Le juge rejette la requête de mainlevée provisoire si le débiteur rend vraisemblable l'existence, le montant et l'exigibilité de la créance compensante ainsi que le montant exact à concurrence duquel la dette serait éteinte (ATF 136 III 624 consid. 4.2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_139/2018 du 25 juin 2019 consid. 2.6.1, publié in BlSchK 2021 p. 271). Il ne peut pas se contenter d'alléguer l'existence d'une créance envers le poursuivant pour rendre vraisemblable cette prétention et opposer valablement l'objection de compensation; de simples affirmations ne sont pas suffisantes (arrêts du Tribunal fédéral 5D_52/2022 du 2 février 2023 consid. 2.2.2; 5A_139/2018 précité consid. 2.6.2; VEUILLET/ABBET, La mainlevée de l'opposition, 2022, n. 126 ad art. 82 LP). Les preuves produites par le débiteur poursuivi doivent rendre vraisemblable le fait libératoire (ATF 132 III 140 consid. 4.1.2). L'exception de compensation doit ainsi être rendue vraisemblable par titre (art. 177 et 254 al. 1 CPC). La vraisemblance de la créance compensante peut résulter de l'image générale qui se dégage de divers documents, le juge jouissant à cet égard d'un certain pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 5A_66/2020 précité loc. cit. et les références citées). Le dépôt d'une action en justice ou l'introduction d'une poursuite à l'encontre du poursuivant ne rend pas vraisemblable la créance opposée en compensation (VEUILLET/ABBET, op. cit., n. 127 ad art. 82 LP).

2.1.2 Le contrat de bail signé constitue une reconnaissance de dette dans la poursuite en recouvrement du loyer (art. 257 CO) et des frais accessoires (art. 257a ss CO), dûment convenus et chiffrés, non seulement pour toute la durée de l'occupation de l'objet loué mais pour toute la durée contractuelle (VEUILLET/ABBET, op. cit., n. 160 ad art. 82 LP et les références citées).

Pour faire échec à la mainlevée, le poursuivi peut notamment faire valoir que la chose louée est affectée de défauts justifiant une réduction du loyer (art. 259a al. 1 let. b et 259d CO) ou des dommages-intérêts (art. 259a al. 1 let. c et 259e CO) et opposer cette prétention en compensation (arrêt du Tribunal fédéral 5A_66/2020 du 22 avril 2020 consid. 3.3.1). Le poursuivi doit rendre vraisemblable l'existence des défauts, ainsi que le montant de sa réclamation. La quotité de la réduction de loyer peut être rendue vraisemblable sur la base des pourcentages établis par la doctrine et la jurisprudence. La mainlevée sera alors prononcée sous déduction de la somme correspondante. Le fait qu'un bailleur soit disposé à entendre les doléances de son locataire n'implique pas une reconnaissance de défauts de sa part (arrêt du Tribunal fédéral dans les causes 5A_964/2021 et 5A_965/2021 du 9 mars 2022 consid. 3.1.2 et les références citées).

Le contrat de gérance libre doit être considéré comme un contrat de bail à ferme non agricole (ATF 128 III 419).

Le bail à ferme est un contrat par lequel le bailleur s'oblige à céder au fermier, moyennant un fermage, l'usage d'un bien ou d'un droit productif et à lui en laisser percevoir les fruits ou les produits (art. 275 CO).

Le fermier doit pourvoir au bon entretien de la chose et, conformément à l'usage local, effectuer les petites réparations et remplacer les ustensiles et outils de peu de valeur qui ont péri de vétusté ou par l'usage (art. 284 CO). De son côté, le bailleur est tenu d'exécuter à ses frais les grosses réparations qui s'imposent pendant la durée du bail, dès que le fermier lui en a communiqué la nécessité (art. 279 CO).

2.1.3 Pour que la mainlevée provisoire soit prononcée, il faut que le poursuivant soit au bénéfice d'une reconnaissance de dette qui, outre les caractéristiques relatives à l'obligation de payer du débiteur, réunisse les trois identités, soit l'identité entre le poursuivant et le créancier désigné dans ce titre, l'identité entre le poursuivi et le débiteur désigné, et l'identité entre la prétention déduite en poursuite et le titre qui lui est présenté (ATF 143 III 221 consid. 4; 142 III 720 consid. 4.1; 139 III 444 consid. 4.1.1). D'abord, le créancier doit être aisément déterminable au moment de l'élaboration de la reconnaissance de dette, son identité devant ainsi figurer sur le titre; ensuite, l'auteur de la reconnaissance de dette doit être identique au poursuivi désigné sur le commandement de payer, il suffit pour cela qu'il ait signé la reconnaissance de dette; enfin, la prétention figurant sur le commandement de payer doit être identique à la prétention figurant sur le titre (ABBET/VEUILLET, op. cit., n. 74, 81 et 92 ad art. 82 LP).

Selon l'art. 67 al. 1 ch. 4 LP, la réquisition de poursuite énonce le titre et sa date; à défaut de titre, la cause de l'obligation. L'une des fonctions des indications contenues dans le commandement de payer est de répondre à un besoin de clarté et d'individualiser la prétention réclamée par voie d'exécution afin que le poursuivi puisse prendre position (ATF 141 III 173 consid. 2.2.2 et les références citées; arrêts du Tribunal fédéral 5A_8/2016 du 21 juin 2016 consid. 4.2; 5A_1001/2015 du 22 juin 2016 consid. 5.3.2, publié in BlSchK 2018 p. 4).

Lorsque la poursuite tend au recouvrement de prestations périodiques (tels que les loyers), la réquisition de poursuite doit indiquer avec précision les périodes pour lesquelles ces prestations sont réclamées. Même si elles dérivent d'une même cause juridique, elles ne sont pas moins des créances distinctes, soumises à leur propre sort. Cette exigence répond à un besoin de clarté et d'information du poursuivi quant à la prétention alléguée afin de lui permettre de prendre position. Le poursuivi ne doit pas être contraint de former opposition pour obtenir, dans une procédure de mainlevée subséquente ou un procès en reconnaissance de dette, les renseignements sur la créance qui lui est réclamée (ATF 141 III 173 consid. 2.2.2; 121 III 18 consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 5A_970/2019 du 3 décembre 2020 consid. 4.2).

2.2 En l'espèce, il n'est pas contesté que la "convention de location-gérance avec option d'achat" du 9 juin 2021 constitue une reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 LP pour le montant de la redevance de gérance (fermage) fixée à 4'000 fr. par mois dès le 1er septembre 2021.

A juste titre, le Tribunal a retenu que la recourante n'avait pas rendu vraisemblable l'existence d'un accord des parties portant sur une "réduction de loyer" de 50% en lien avec des travaux effectués dans les locaux du café-restaurant. Le courrier produit sous pièce 2 cit., qui émane de la seule recourante, est dénué de toute force probante à cet égard. Il en va de même des pièces annexées à ce courrier, à savoir des photographies non datées de mauvaise qualité, un message WhatsApp non daté, ainsi qu'un devis et une facture qui ne mentionnent pas le nom de la recourante, étant relevé qu'il ne ressort pas du dossier que cette dernière aurait communiqué à l'intimée la nécessité de procéder aux travaux qu'elle allègue avoir réalisés à ses frais dans le café-restaurant. Le devis et la facture susmentionnés - dont on ignore à qui ils sont adressés - sont par ailleurs insuffisants à démontrer l'existence et l'importance de défauts fondant une éventuelle créance en réduction du fermage pour les mois de décembre 2021 et février 2022; ils sont de plus insuffisants à démontrer l'exigibilité d'une telle créance.

C'est également à bon droit que le Tribunal a rejeté l'exception de compensation soulevée par la recourante, étant relevé que la créance alléguée de 4'452 fr. 15 ne ressort d'aucune des pièces produites. Par ailleurs, la recourante n'a pas explicité à quel titre elle pourrait réclamer le paiement d'un montant de 2'728 fr. 95 à l'intimée, étant relevé que, selon la pièce 3 cit., ce montant aurait été remboursé non pas à l'intimée mais à une tierce personne, à savoir l'associé-gérant de la société.

En revanche, c'est à raison que la recourante reproche au Tribunal d'avoir prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition pour la somme réclamée sous le poste 3 du commandement de payer. En effet, il ressort sans équivoque de la requête de mainlevée et des relevés bancaires fournis par l'intimée que la redevance de gérance pour le mois d'octobre 2022 a bien été payée par la recourante. Contrairement à ce que plaide l'intimée, la mainlevée ne saurait être prononcée pour le solde impayé de la redevance pour le mois de décembre 2022, dès lors que cette prétention ne fait pas l'objet de la poursuite n° 1______ - laquelle porte uniquement sur les redevances de gérance pour les mois de décembre 2021, février 2022 et octobre 2022, ainsi que cela ressort expressément du commandement de payer.

Le recours se révèle ainsi partiellement fondé.

Le chiffre 2 du dispositif du jugement attaqué sera par conséquent annulé et, la cause étant en état d'être jugée (art. 327 al. 3 let. b CPC), la mainlevée provisoire de l'opposition sera prononcée à concurrence de 2'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 décembre 2021 et de 2'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 février 2022.

3. Les frais judiciaires de première instance ont été arrêtés à 300 fr. et compensés avec l'avance versée par l'intimée, ce qui n'est pas critiqué devant le Cour. Les frais judiciaires de recours, incluant l'émolument de décision sur effet suspensif, seront arrêtés à 450 fr. (art. 48 et 61 OELP) et compensés à due concurrence avec l'avance de 650 fr. versée par la recourante, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Au vu de l'issue du litige, la mainlevée requise ayant été prononcée à hauteur de 4'000 fr., correspondant à 2/3 de la somme totale réclamée, la recourante, qui succombe en grande partie, supportera les frais judiciaires à raison de 500 fr. et l'intimée à raison de 250 fr. (art. 106 al. 2 CPC). La recourante sera condamnée à verser 50 fr. à l'intimée, à titre de remboursement des frais judiciaires, et se verra restituer le solde de son avance en 200 fr.

La recourante versera en outre à l'intimée, à titre de dépens pour les deux instances cantonales, la somme de 500 fr., débours et TVA compris (art. 84, 85, 89 et 90 RTFMC).

Les chiffres 3 à 5 du dispositif du jugement entrepris seront par conséquent annulés et il sera statué à nouveau dans le sens de ce qui précède.

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 7 novembre 2024 par A______ SA contre le jugement JTPI/12995/2024 rendu le 22 octobre 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/13260/2024–1 SML.

Au fond :

Annule les chiffres 2 à 5 du dispositif du jugement attaqué et, statuant à nouveau :

Prononce la mainlevée provisoire de l'opposition formée par A______ SA au commandement de payer, poursuite n° 1______, à concurrence de 2'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 décembre 2021 et de 2'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 février 2022.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de première instance et de recours à 750 fr. et les compense avec les avances versées, qui restent acquises à l'Etat de Genève à due concurrence.

Les met à la charge de A______ SA à hauteur de 500 fr. et à la charge de B______ SARL à hauteur de 250 fr.

Invite les Services financiers du Pouvoir judiciaire à restituer à A______ SA le solde de son avance en 200 fr.

Condamne A______ SA à verser à B______ SARL le montant de 50 fr., à titre de remboursement des frais judicaires, et le montant de 500 fr., à titre de dépens de première instance et de recours.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Laura SESSA, greffière.

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Laura SESSA

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.